Nations Unies

CRC/C/OPSC/HUN/CO/1

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

3 novembre 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport soumis par la Hongrie en application du paragraphe 1 de l’article 12 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants *

Le Comité a examiné le rapport initial de la Hongrie (CRC/C/OPSC/HUN/1) à sa 1917e séance (voir CRC/C/SR.1917), le 10 septembre 2014, et adopté, à sa 1929e séance, le 19 septembre 2014, les observations finales ci-après.

I.Introduction

Le Comité accueille la présentation par l’État partie de son rapport initial et de ses réponses écrites à la liste des points (CRC/C/OPAC/HUN/Q/1/Add.1) et se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de l’État partie.

Le Comité rappelle à l’État partie que les présentes observations finales doivent être lues conjointement avec celles concernant les troisième à cinquième rapports périodiques de l’État partie au titre de la Convention (CRC/C/HUN/CO/3-5), ainsi qu’avec celles relatives au rapport initial au titre du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/HUN/CO/1), adoptées le 19 septembre 2014.

II.Observations générales

Aspects positifs

Le Comité accueille avec intérêt les nombreuses mesures prises par l’État partie dans des domaines liés à la mise en œuvre du Protocole facultatif, notamment:

a)Les modifications de la loi sur l’aide aux victimes d’infractions et l’indemnisation versée par l’État, en 2012, qui prévoit que les victimes de la traite, une fois identifiées, doivent bénéficier d’une place en foyer;

b)Le décret no 32/2011 du Ministre de l’administration publique et de la justice, en 2011, concernant l’établissement de salles d’interrogatoire adaptées aux enfants dans l’ensemble du pays.

Le Comité note avec appréciation la ratification par l’État partie de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, en avril 2013.

Le Comité accueille avec intérêt les progrès réalisés dans l’adoption de programmes et de plans d’action nationaux facilitant la mise en œuvre du Protocole facultatif, y compris la Stratégie nationale contre la traite des êtres humains 2013-2016.

III.Données

Collecte de données

Le Comité accueille avec intérêt les statistiques détaillées sur les rapports établis, les enquêtes menées, les poursuites engagées et les condamnations prononcées en lieu avec de nombreuses infractions visées par le Protocole facultatif. Il note que, bien que les statistiques soient ventilées dans une certaine mesure par sexe et âge, elles ne sont pas pleinement ventilées sur la base d’autres critères, tels que l’origine socioéconomique, la nationalité, le lieu de résidence (rural ou urbain) ou l’origine ethnique.

Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les données en rapport avec le Protocole facultatif soient systématiquement ventilées, notamment par âge, sexe, origine socioéconomique, nationalité, origine ethnique et lieu de résidence urbain ou rural, et que la collecte de données concerne toutes les infractions visées par le Protocole facultatif. Ces données devraient être analysées et utilisées en tant qu’outils essentiels pour l’élaboration et la mise en œuvre des politiques et le suivi et l’évaluation des mesures préventives. Le Comité recommande aussi à l’État partie de présenter dans son prochain rapport périodique des informations statistiques sur toutes les infractions visées par le Protocole facultatif.

IV.Mesures d’application générales

Plan national d’action

Le Comité prend note de la Stratégie de lutte contre la traite des êtres humains pour 2013-2016 mais est préoccupé de voir que cette stratégie ne tient pas compte spécifiquement des enfants victimes de la traite. Il est également préoccupé par l’absence de stratégie ou de plan d’action qui couvrirait les autres infractions visées par le Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une stratégie qui comprend des mesures globales dans tous les domaines conformément au Protocole facultatif. Il lui recommande également de veiller à ce que les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la stratégie et des plans d’action pertinents soient régulièrement évalués et à ce que des moyens humains, techniques et financiers soient allo ués à leur bonne mise en œuvre. La stratégie et les plans d’action devraient comporter des mesures axées sur la prévention, la protection, la réadaptation physique et psychologique et la réinsertion sociale des enfants victimes mais aussi sur l’ouverture d’enquêtes et l’engagement de poursuites pour les infractions visées par le Protocole facultatif.

Diffusion, sensibilisation et formation

Le Comité prend note des informations communiquées par l’État partie sur les nombreux stages de formation et séminaires auxquels ont participé des juges, des officiers de police, des procureurs et d’autres organismes d’enquête. Toutefois, il est préoccupé par le fait que la majorité de ces activités semblent être organisées par des organisations non gouvernementales et financées par des donateurs internationaux, et qu’elles ne ciblent pas les enfants qui risquent de devenir victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif. Il constate aussi avec inquiétude que l’État partie n’a pas évalué les effets de ces activités de formation sur l’action menée dans ces domaines couverts par le Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues pour organiser sur l’ensemble du territoire des activités continues et systématiques de diffusion et de sensibilisation concernant le Protocole facultatif. Devraient participer à ces activités des enfants des catégories marginalisées et défavorisées qui risque nt de devenir victimes d’infractions relev ant du Protocole facultatif. Il  recommande aussi à l’État partie de procéder à des évaluations régulières de ses activités de formation auprès des juges et des forces de l’ ordre, afin de s’assurer qu’ils mettent bien en pratique les connaissances acquises .

Allocation de ressources

Le Comité est préoccupé de ce que l’État partie n’a pas fourni d’information sur les ressources spécifiques allouées aux activités visées par le Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l’État partie d’allouer des ressources suffisantes et ciblées à la mise en œuvre effective du Protocole facultatif aux niveaux national, régional et local, et de fournir ces informations dans son prochain rapport périodique.

V.Prévention de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants (art. 9 (par. 1 et 2))

Mesures adoptées pour prévenir les infractions visées par le Protocole facultatif

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour prévenir la traite des personnes en général, mais il est préoccupé par l’absence de mécanisme en place pour repérer et suivre les enfants qui risquent de devenir victimes d’infractions relevant du Protocole facultatif. En particulier, l’État partie ne dispose pas de programmes ciblant spécifiquement les enfants vulnérables ou marginalisés.

Le Comité encourage l’État partie à établir un mécanisme permettant d’identifier et de suivre les enfants qui risqu e nt de devenir victimes d ’ infractions visées par le Protocole facultatif et à mettre sur pied des programmes spécifiques à destination des enfants roms, des enfants vivant dans la pauvreté, des enfants touché s par les migrations, d es enfants placés en institutions et d e s autres enfants vulnérable s ou marginalisés.

Traite des enfants à des fins sexuelles

Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour remédier à la traite des êtres humains en adoptant des stratégies et des textes législatifs. Il constate toutefois avec préoccupation que l’État partie reste un pays d’origine de transit pour la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle. Le Comité est également préoccupé par la surreprésentation des enfants roms placés en institution parmi les victimes de traite. En outre, il est préoccupé de ce que l’État partie n’encourage pas suffisamment les victimes à participer volontairement au processus d’enquête et de poursuite des trafiquants, et il regrette le manque d’informations sur l’utilisation de programmes de protection des témoins.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures qui s’imposent pour mener une étude complète sur les causes, la nature et l’ampleur du phénomène de la traite d’enfants à des fins sexuelles, en particulier en ce qui concerne les enfants roms. Il lui recommande aussi de prendre des mesures propres à réduire et prévenir la traite, notamment à adopter un nouveau plan d’action contre celle-ci et à sensibiliser les professionnels et la population dans son ensemble au problème de la traite d’ enfants, par le biais d’activités d ’éducation, y compris de campagnes dans les médias, et à établir une coopération avec les autorités des pays de destination des enfants faisant l’objet de la traite. En outre, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour offrir des incitations et une protection adéquates aux victimes de la traite afin de participer aux enquête s sur les trafiquants.

VI.Interdiction de la vente d’enfants, de la pornographie mettant en scène des enfants et de la prostitution des enfants et questions connexes (art. 3, 4 (par. 2 et 3), 5, 6 et 7)

Lois et réglementations pénales en vigueur

Le Comité se félicite que le Code pénal de l’État partie traite de la plupart des infractions visées par le Protocole facultatif. Il regrette toutefois que l’État partie n’ait fourni aucune information sur le point de savoir si l’infraction consistant à obtenir indûment, en tant qu’intermédiaire, le consentement à l’adoption d’un enfant en violation des instruments juridiques internationaux relatifs à l’adoption est visée par son Code pénal.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour garantir que tous les éléments contenus à l’article 3 du Protocole facultatif, y compris l’infraction consistant à obtenir indûment, le consentement à l’adoption d’un enfant en violation des instruments juridiques internationaux relatifs à l’adoption, soient inscrits dans sa législation.

Compétence extraterritoriale et extradition

Le Comité note que la législation de l’État partie permet de poursuivre ses ressortissants ayant commis un crime à l’étranger mais regrette que l’État partie n’ait pas établi sa compétence extraterritoriale dans tous les cas auxquels il est fait référence à l’article 4 du Protocole facultatif. Il note aussi que l’État partie n’autorise l’extradition que lorsqu’il existe un traité bilatéral ou multilatéral d’extradition et n’invoque pas le Protocole facultatif pour demander une extradition.

Le Comité recommande à l’État partie d’établir la compétence extraterritoriale pour tous les cas dont il est fait mention dans le Protocole facultatif, y compris lorsque l’auteur présumé est un ressortissant ou une personne qui réside habituellement en Hongrie, ou lorsque la victime est un enfant hongrois. Il lui recommande aussi de considérer le Protocole facultatif comme base juridique permettant l’extradition des personnes ayant commis des infractions visées par ledit p rotocole en l’absence de traité d’extradition bilatéral ou multilatéral.

VII.Protection des droits des enfants victimes (art. 8 et 9 (par. 3 et 4))

Mesures prises pour protéger les droits des enfants victimes

Le Comité se félicite des modifications apportées en 2012 à la loi sur l’aide aux victimes d’infractions et l’indemnisation versée par l’État, en vertu de laquelle l’État est tenu de fournir une place en foyer aux victimes de la traite et d’autres crimes, y compris aux enfants victimes. Toutefois, il est préoccupé par le manque d’informations au sujet du traitement et de l’indemnisation dont bénéficient les enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif.

Le Comité recommande vivement à l’État partie de garantir que les enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif bénéficient systématiquement d’une prise en charge et d’une indemnisation adéqua t e s et aient rapidement accès à des informations sur les moyens de les obtenir. Il recommande aussi à l’État partie de faire en sorte, en adoptant les dispositions légales et réglementaires voulues, que tous les enfants victimes ou témoins d’ actes criminels bénéficient de la protection requise par la Convention, et de prendre pleinement en considération les Lignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant d es enfants victimes et témoins d’actes criminels.

Exploitation sexuelle et prostitution des enfants

Le Comité est préoccupé par le fait que les enfants victimes d’exploitation sexuelle et de prostitution ne sont pas considérés comme des victimes mais plutôt comme des délinquants, et reçoivent souvent des amendes si la contrainte n’a pas été prouvée. Il regrette le manque d’informations sur le soutien, l’assistance et la protection fournis aux enfants victimes de l’exploitation sexuelle et de la prostitution, y compris la mise à disposition d’une place en foyer d’accueil.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour fournir aux enfants victimes d’exploitation sexuelle et de prostitution le soutien, l’assistance et la protection dont il ont besoin, y compris des abris, et d’exonérer ces victimes de toute responsabilité, y compris d’amendes , même dans les cas où la contrainte ne peut pas être prouvée.

VIII.Assistance et coopération internationale (art. 10)

Accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux

À la lumière du paragraphe 1 de l’article 10 du Protocole facultatif, le Comité encourage l’État partie à continuer de renforcer la coopération internationale dans le cadre d’accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux, en particulier avec les pays voisins, notamment en renforçant les procédures et mécanismes visant à coordonner la mise en œuvre de ces accords, en vue de mieux prévenir toute infraction visée dans le Protocole facultatif, d’en identifier les auteurs, d’enquêter sur eux, de les poursuivre et de les punir.

IX.Suivi et diffusion

Suivi

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour assurer la pleine application des présentes recommandations, notamment en les transmettant aux ministères compétents, au Parlement, à la Cour suprême et aux autorités nationales et locales, pour examen et suite à donner.

Diffusion des observations finales

Le Comité recommande que le rapport initial et les réponses écrites de l’État partie ainsi que les recommandations adoptées à leur sujet (observations finales) soient largement diffusés, notamment ( mais non exclusivement ) par Internet, auprès du grand public, des organisations de la société civile, des groupes de jeunes , des groupes professionnels, des professionnels des médias et des enfants, afin de susciter le débat et une prise de conscience concernant le Protocole facultatif, son application et son suivi.

X.Prochain rapport

Conformément au paragraphe 2 de l’article 12, le Comité invite l’État partie à donner un complément d’information sur la mise en œuvre du Protocole facultatif et des présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il soumettra au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant, conformément à l’article 44 de la Convention.