NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/OPSC/KWT/CO/118 février 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L ’ ENFANT

Quarante-septième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AU PARAGRAPHE 1 DE L ’ ARTICLE 12 D U PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L ’ ENFANT, CONCERNANT LA VENTE D ’ ENFANTS, LA PROSTITUTION DES ENFANTS ET LA PORNOGRAPHIE METTANT EN SCÈNE DES ENFANTS

Observations finales: KOWEÏT

1.Le Comité a examiné le rapport initial du Koweït (CRC/C/OPSC/KWT/1) à ses 1301e et 1302e séances (CRC/C/SR.1301 et 1302), tenues le 24 janvier 2008, et a adopté les observations finales ci-après à sa 1313e séance, tenue le 1er février 2008.

Introduction

2.Le Comité prend note avec satisfaction du rapport initial de l’État partie ainsi que des réponses écrites à sa liste des points à traiter (CRC/C/OPSC/KWT/Q/1/Add.1). Il apprécie le dialogue constructif qu’il a eu avec une délégation importante et interdisciplinaire.

I . Directives générales

3.Le Comité rappelle à l’État partie que les présentes observations finales devraient être lues parallèlement à celles qu’il a adoptées au sujet du rapport initial de l’État partie, le 26 octobre 1998 (CRC/C/15/Add.96), à celles qu’il a adoptées au sujet du rapport initial de l’État partie concernant le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/KWT/CO/1).

Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction la création, en 2007, d’un Haut Conseil à la famille et à l’enfance, ainsi que la ratification par l’État partie des instruments suivants:

a)Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, le 26 août 2006;

b)Convention no 138 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant l’âge minimum d’accès à l’emploi, le 15 novembre 1999;

c)Convention no 182 de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, le 15 août 2000;

d)Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, le 12 mai 2006;

e)Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, le 12 mai 2006;

f)Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, le 12 mai 2006.

II . Données

5.Le Comité apprécie les efforts déployés par le Ministère des affaires sociales et du travail pour actualiser son système de collecte des données afin de recueillir des informations sur le nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées pour des infractions visées par le Protocole facultatif. Toutefois, le Comité regrette que les données fiables sur l’ampleur du phénomène de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants et sur le nombre d’enfants impliqués dans de telles activités soient très limitées, pour des raisons qui sont essentiellement liées à l’absence de système global de collecte de données et aux tabous qui entourent encore cette question.

6.Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place un système global de collecte de données afin de s ’ assurer que des données ventilées par âge, sexe, groupes minoritaires, enfants vulnérables − notamment les enfants migrants et les enfants apatrides (B idounes) − et catégorie socioéconomique , soient systématiquement recueillies et analysées, ces données constituant un instrument essentiel d ’ évaluation de l ’ application effective des politiques publiques. Ces données devraient porter notamment sur le nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées pour de telles infractions, et être ventilées par type d ’ infraction. À cet égard, l e Comité encourage l ’ É tat partie à solliciter l ’ aide des organismes et programmes de s Nations Unies , y compris celle du Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance (UNICEF).

III . Mesures d ’ application générales

Législation

7.Le Comité prend note avec satisfaction des déclarations de l’État partie selon lesquelles le Protocole facultatif est devenu partie intégrante du droit positif koweïtien. Il note également que l’État partie envisage d’adopter une loi sur les droits de l’enfant. Il est néanmoins préoccupé par l’harmonisation limitée entre le droit koweïtien, en particulier le Code pénal, et les dispositions du Protocole facultatif.

8. Le Comité recommande à l ’ É tat partie de poursuivre et d ’ achever la mise en conformité de sa législation nationale avec le Protocole facultatif afin de permettre une application appropriée de l ’ ensemble des dispositions du Protocole et de faire en sorte qu ’ il soit fait explicitement référence à l ’ ensemble des actes et activités constituti f s d ’ infractions en vertu du Protocole facultatif.

Diffusion et formation

9.Le Comité note avec intérêt que l’État partie organise des formations spéciales à l’intention des travailleurs sociaux, des psychologues et du personnel s’occupant de certaines catégories d’enfants.

10. Le Co mité recommande à l ’ État partie :

a) De poursuivre et de renforcer l ’ éducation et la formation systématiques aux dispositions du Protocole facultatif à l ’ intention de l ’ ensemble des g roupes professionnels concernés ;

b) De r enforcer les mesures visant à diffuser les dispositions du Protocole facultatif auprès de la population, en particulier auprès des enfants et d es parents, en s ’ appuyant sur les programmes scolaires et des supports spécialement adoptés aux enfants, et en mettant en priorité l ’ accent sur les enfants migrants et les enfants apatrides ( B idounes ).

Allocation des ressources

11.Le Comité prend note avec intérêt de la création en 2007 d’un centre chargé de contrôler la situation des travailleurs domestiques. Cela étant, il regrette l’absence de renseignements sur le financement des autres domaines couverts par le Protocole facultatif.

12. Le Comité encourage l ’ É tat partie à veiller à ce que des ressources suffisantes soient consacrées à l ’ application du Protocole , en particulier aux mécanismes de surveillance et d ’ établissement de rapports , ainsi qu ’ aux activités de diffusion, de sensibilisation et de formation.

Institutions indépendantes

13.Tout en prenant note des déclarations de l’État partie selon lesquelles la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants n’existent pas sur son territoire, le Comité déplore l’absence d’institutions chargées de recevoir les plaintes concernant des violations des droits des enfants et notamment des infractions visées par le Protocole facultatif.

14. Le Comité encourage l ’ É tat partie, conformément aux Principes de Paris ( r ésolution 48/134 de l ’ Assemblée générale, annexe) et eu égard à l ’ Observation générale n o 2 (2002) du  Comité sur les institutions nationales des droits de l ’ homme, à envisager de créer une institution nationale indépendante des droits de l ’ homme compétente pour recevoir des plaintes relatives à des violations des droits de l ’ enfant − et notamment à d es infractions visées par le Protocole facultatif −, pour enquêter sur ces plaintes et pour leur donner la suite voulue .

IV. Prévention de la vente d ’ enfants, de la pornographie mettant en scène des enfants et de la prostitution des enfants (art .  9, par .  1 et 2)

Sensibilisation

15.Le Comité prend note avec intérêt des activités d’éveil des consciences et de sensibilisation menées par le Ministère de la femme et de l’enfance, par le Centre sous-régional de la mère et de l’enfant et par l’Association koweïtienne pour la promotion de l’enfant arabe.

16. Le Comité encourage l ’ É tat partie à jouer un rôle actif dans la promotion des activités de sensibilisation concernant la vente d ’ enfants, la pornographie mettant en scène des enfants et la prostitution des enfants.

V . Interdiction de la vente d ’ enfants, de la pornographie mettant en scène des enfants et de la prostitution des enfants et questions connexes (art . 3 et 4, par .  2, 3, 5, 6 et 7)

Lois et règlements pénaux en vigueur

17.Tout en notant que l’État partie considère que la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants n’existent pas sur son territoire, le Comité se déclare préoccupé par les points suivants:

a)Le droit koweïtien n’érige pas expressément la vente d’enfants en infraction et, même si la notion a été incorporée dans l’infraction de traite des êtres humains, celle-ci ne couvre pas l’ensemble des cas de vente d’enfants, puisqu’elle comprend seulement la vente d’enfants à des fins d’esclavage;

b)Même si le Code pénal interdit l’impression, la vente, la distribution ou la diffusion de documents pornographiques, la possession de tels documents à des fins d’usage personnel n’est pas expressément interdite par la loi;

c)Les dispositions du Code pénal visent essentiellement à protéger les filles, et non les garçons, contre l’exploitation sexuelle.

18. L e Comité exhorte l ’ É tat partie à adopter une législation spécifique en modifiant son Code pénal pour que l ’ ensemble des actes e t activités visés par le Protocole facultatif soient pleinement couverts par sa législation pénal e et que ce lle ‑ci offre la même protection aux garçons et aux filles.

Compétence

19.Le Comité note que le Code pénal établit la compétence des tribunaux pour connaître des infractions couvertes par ses dispositions lorsqu’elles sont commises à l’étranger, si elles ont des répercussions sur l’État koweïtien, ou si l’auteur présumé est un ressortissant koweïtien et l’acte en question est incriminé à la fois dans l’État partie et dans l’État dans lequel il a été commis. Toutefois, le Comité est préoccupé par le fait que l’exercice de cette compétence extraterritoriale soit soumis à la condition de la double incrimination, et par le fait que l’ensemble des infractions et faits visés par le Protocole facultatif ne soient pas couverts, en particulier lorsque l’auteur présumé de l’infraction commise à l’étranger est un ressortissant koweïtien ou une personne qui a sa résidence habituelle au Koweït, ou lorsque la victime est un ressortissant koweïtien.

20.Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour établir sa compétence aux fins de connaître de toutes les infractions visées par le Protocole facultatif , conformément à l ’ article 4 de ce texte.

Extradition

21.Tout en notant que l’extradition est prévue en des termes généraux en droit koweïtien, le Comité se déclare préoccupé par le fait que la législation ne prévoit pas expressément la possibilité d’extrader les auteurs d’infractions visées par le Protocole facultatif. Le Comité prend également note de la réserve à l’article 5, paragraphe 3, du Protocole facultatif formulée par l’État partie lors de son adhésion à cet instrument.

22. Le Comité recommande à l ’ É tat partie de revoir sa légis l ation afin de la mettre en conformité avec le Protocole facultatif , notamment avec l ’ article 5 , qui concerne l ’ extradition. Il encourage l ’ É tat partie à retirer sa réserve à l ’ article 5, paragraphe 3, du  Protocole facultatif.

VI. Protection des droits des enfants victimes (art .  8 et 9, par .  3 et 4)

Mesures adopt é es pour protéger les droits et l es intérêts des enfants victimes d ’ actes proscrits par le Protocole facultatif

23.Le Comité note avec intérêt que le Code civil koweïtien prévoit l’indemnisation des victimes d’actes illicites pour le préjudice subi, y compris le «préjudice moral». Il relève également que des forces de police spéciales ont été établies pour enquêter sur les infractions commises par des mineurs ou à leur encontre. Le Comité note avec intérêt la création d’un centre chargé de contrôler la situation des employés de maison et de veiller à ce qu’aucun employé de maison âgé de moins de 18 ans ne soit conduit dans le pays. Le Comité note toutefois avec préoccupation qu’il est toujours possible que des employés de maison de moins de 18 ans qui entrent dans le pays soient exploités.

24. Le Comité encourage l ’ É tat partie à concevoir et à appliquer d es politiques et des mesures adéquates pour que d es trafiquants ne fassent pas entrer des personnes de moins de 18 ans dans l ’ État partie pour y travailler, en particulier pour se livrer aux pires formes du travail des enfants , comme la prostitution .

Mesures de protection prises dans le cadre du système de justice pénale

25.Le Comité est préoccupé par le fait que les enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif puissent être considérés non comme des victimes mais comme des délinquants juvéniles et soient, en tant que tels, privés d’une protection adéquate dans le cadre du système de justice pénale.

26. Le Comité exhorte l ’ É tat partie, conformément à l ’ artic le 8 du Protocole facultatif, à  protéger les droits et les intérêts des enfants victimes, notamment par le biais d ’ une protection adéquate et explicite dans le cadre du système de justice pénale , pour qu ’ ils ne soient pas considérés ou traités comme des délinquants juvéniles .

Rétablissement et réinsertion des victimes

27.Le Comité, tout en notant que l’État partie pourvoit aux besoins des personnes placées dans les établissements de protection sociale, y compris en fournissant des services de réadaptation et de réinsertion, regrette que l’État partie n’ait donné aucun renseignement sur une telle prise en charge et sur les mesures de rétablissement physique, psychologique et social prises à l’intention des enfants qui ne sont pas placés dans de tels établissements.

28. Le Comité exhorte l ’ État partie à veiller à ce que des mesures administratives et des politiques et programmes sociaux appropriés soient adopté s afin de protéger l ’ ensemble des enfants vulnérables aux infractions visées par le Protocole facultatif et de permettre le plein rétablissement physique, psychologique et social des enfants victimes.

Service d ’ assistance téléphonique

29.Le Comité note avec regret que les enfants n’ont accès à aucun mécanisme leur permettant de signaler des violations du Protocole facultatif.

30.Le Comité encourage l ’ État partie à mettre en place un service national d ’ assistance téléphonique qui fonctionnerait nuit et jour et serait accessible gratuitement en composant un numéro à trois chiffres , pour que les enfants puissent signaler des violation s des dispositions du Protocole facultatif.

Courses de chameaux

31.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises par l’État partie pour mettre un terme à l’emploi d’enfants en tant que jockeys dans les courses de chameaux. Il regrette toutefois que la décision ministérielle 125/2004, qui interdit l’emploi d’enfants dans les courses de chameaux ou d’autres activités dangereuses, autorise néanmoins les enfants à participer aux courses de chameaux sous certaines conditions, énoncées dans l’article 2 de cette même décision.

32. Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier sa législation afin d ’ interdire expressément, sans aucune exception , l ’ emploi d ’ enfants dans les courses de chameaux et d ’ autres activités dangereuses. Le Comité recommande en particulier à l ’ État partie de modifier sa décision ministérielle 125/2004 afin que l ’ emploi d ’ enfants en tant que jockeys dans les courses de chameaux soit complètement interdit , sans exception.

VII. Suivi et diffusion

Suivi

33. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures appropriées pour assurer la pleine application des présentes recommandations, notamment en les faisant parvenir aux ministères concernés, à l ’ Assemblée nationale , au Parlement et aux autorités des gouvernorats , afin qu ’ elles soient dûment examinées et suivies d ’ effet.

Diffusion

34. Le Comité recommande que le rapport initial et les réponses écrites de l ’ État partie, ainsi que les observations finales adoptées par le Comité , soient largement diffusées , notamment par le biais de l ’ Internet, des programmes scolaires et de l ’ éducation aux droits de l ’ homme, au près du grand public, des organisations de la société civile, des associations de jeunes , des groupes professionnels, des responsables locaux, des médias, des enfants et de leurs parents, afin de susciter un débat et une prise de conscience à propos du P rotocole facultatif, de son application et de son suivi.

VIII. Prochain rapport

35. Conformément au paragraphe 2 de l ’ article 12 du Protocole facultatif, le Comité invite l ’ État partie à faire figurer des informations complémentaires sur l ’ application dudit Protocole dans le prochain rapport périodique qu ’ il doit lui présenter en application de l ’ article 44 de la Convention relative aux droits de l ’ enfant, et qui était initialement attendu en 1998.

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