NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/OPSC/BGR/CO/121 janvier 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L ’ ENFANT

Quarante ‑sixième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AU PARAGRAPHE 1 DE L ’ ARTICLE 12 DU PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L ’ ENFANT, CONCERNANT LA VENTE D ’ ENFANTS, LA PROSTITUTION DES ENFANTS ET LA PORNOGRAPHIE METTANT EN SCÈNE DES ENFANTS

Observations finales: BULGARIE

1.Le Comité a examiné le rapport initial de la Bulgarie (CRC/C/OPSC/BGR/1) à ses 1266e et 1267e séances, le 24 septembre 2007, et a adopté les observations finales ci‑après à sa 1284e séance, le 5 octobre 2007.

Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’État partie, qui donne des renseignements détaillés sur les mesures législatives, administratives, judiciaires et autres applicables en Bulgarie en ce qui concerne les droits garantis par le Protocole facultatif. Le Comité se félicite également des réponses écrites (CRC/C/OPSC/BGR/Q/1/Add.1) à sa liste de points à traiter, ainsi que du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation.

I. Directives générales

3.Le Comité rappelle à l’État partie qu’il convient de lire les présentes observations finales conjointement avec les précédentes (CRC/C/15/Add.66), adoptées après l’examen, le 8 janvier 1997, du rapport initial présenté par l’État partie en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant.

A. Aspects positifs

4.Le Comité prend acte avec satisfaction:

a)Des modifications apportées au Code pénal en 2002;

b)De l’adoption de la loi sur la lutte contre la traite d’êtres humains, en 2003.

5.Le Comité note également avec satisfaction que l’État partie a ratifié:

a)Le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en 2001;

b)Le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en 2001;

c)La Convention no182 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, en 2000;

d)La Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, en 2007;

e)La Convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité, en 2005.

B. Principes généraux de la Convention relative aux droits de l ’ enfant (art. 2, 3, 6 et 12)

6.Le Comité regrette que les principes généraux de la Convention relative aux droits de l’enfant n’aient pas été suffisamment intégrés dans les mesures adoptées par l’État partie en application du Protocole facultatif. Il est particulièrement préoccupé de ce que les enfants roms soient confrontés à des attitudes sociales qui compromettent leur protection et l’exercice de tous les droits consacrés dans le Protocole.

7. Le Comité recommande que les principes généraux de la Convention relative aux droits de l ’ enfant, en particulier le principe de non-discrimination, soient repris dans toutes les mesures adoptées par l ’ État partie pour appliquer les dispositions du Protocole facultatif, y compris dans les procédures judiciaires ou administratives.

II. Collecte de données

8.Le Comité note que les données sont collectées principalement par l’Institut national de statistiques et aussi par divers autres organismes, mais il regrette qu’il n’y ait pas suffisamment de données fiables, ventilées par âge, sexe et origine sociale ou ethnique, ni de travaux de recherche portant sur les domaines couverts par le Protocole facultatif.

9. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que des études approfondies soient conduites dans les domaines couverts par le Protocole facultatif, et qu ’ un système d ’ information uniforme soit mis en place afin que des données ventilées, notamment par âge, sexe et origine sociale ou ethnique, soient systématiquement collectées et analysées, car de telles données constituent des outils essentiels pour élaborer des politiques, les mettre en œuvre et les évaluer.

III. Mesures d’application générales

Plan d ’ action national

10.Le Comité accueille avec satisfaction l’élaboration d’une stratégie décennale pour l’enfance applicable au niveau national, ainsi que de différents programmes et stratégies sectoriels pour la protection de l’enfance, de portée nationale ou régionale. Cependant, il n’est pas certain que ces stratégies et programmes permettent d’assurer la mise en application du Protocole facultatif.

11. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que ses stratégies et programmes nationaux lui permettent de s ’ acquitter des obligations particulières qui découlent du Protocole facultatif, en consultation et en coopération avec les parties prenantes concernées, et en tenant compte de la Déclaration et du Programme d ’ action (A/51/385) ainsi que de l ’ Engagement mondial (A/S-27/12) adoptés respectivement au premier et au deuxième Congrès mondial contre l ’ exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales (Stockholm 1996, Yokohama 2001).

Coordination et évaluation

12. Le Comité note que la mise en application du Protocole facultatif est assurée par l’Office public de protection de l’enfance et divers autres organismes. Toutefois, il est préoccupé par l’absence d’organisme gouvernemental spécialement chargé de coordonner et d’évaluer les activités entreprises à cette fin.

13. Le Comité encourage l ’ État partie à renforcer la coordination existante et à mettre en place un mécanisme spécialement chargé de coordonner, d’ exécuter et d’ évaluer régulièrement les activités conduites dans les domaines couverts par le Protocole facultatif . Il lui recommande aussi de doter spécifiquement ce mécanisme en ressources humaines et financières suffisantes pour lui permettre d ’ être pleinement opérationnel.

Institutions indépendantes

14.Le Comité accueille avec satisfaction la création du Bureau du médiateur en 2004 et l’élection du médiateur en 2005. Toutefois, il n’entre pas dans le mandat et les attributions du médiateur de surveiller et de promouvoir l’application des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme comme la Convention relative aux droits de l’enfant et ses Protocoles facultatifs.

15. Le Comité recommande à l ’ État partie, conformément aux Principes de Paris et en tenant compte de son Observation générale n o 2 (2002) sur les institutions nationales des droits de l ’ homme, d ’ étendre le mandat du médiateur de façon à y inclure la surveillance et la promotion de l’application de s instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme . Le Comité recommande également de nommer un médiateur pour les enfants ou un médiateur adjoint spécialisé dans les questions concernant l ’ enfance, en lui allouant des ressources humaines et financières suffisantes.

Diffusion et formation

16.Le Comité se félicite des nombreuses activités de diffusion et de formation organisées par l’État partie en collaboration avec des organisations internationales intergouvernementales et non gouvernementales, en particulier dans des domaines comme l’éducation civique, l’éducation aux droits de l’homme et la sensibilisation aux mesures préconisées dans le Protocole facultatif. Le Comité reste toutefois préoccupé par le caractère non systématique des efforts engagés pour sensibiliser les catégories professionnelles intéressées et le grand public au Protocole et pour former convenablement les juges, les procureurs, les travailleurs sociaux qui travaillent auprès des enfants et pour eux, et le grand public. Le Comité s’inquiète aussi du fait que ces efforts ne portent pas sur tous les domaines couverts par le Protocole.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre et de renforcer ses activités de diffusion et de formation, et de consacrer des ressources suffisantes à l ’ élaboration de matériels et de cours de formation dans tous les domaines couverts par le Protocole facultatif, à l ’ intention des catégories professionnelles concernées, y compris les policiers, les procureurs, les juges, le personnel médical, les médias et les autres professionnels chargés d ’ appliquer le Protocole facultatif. En outre, compte tenu du paragraphe 2 de l ’ article 9, le Comité recommande à l ’ État partie de diffuser largement les dispositions du Protocole facultatif, en particulie r auprès des enfants et de leur famille , notamment par le biais des programmes scolaires, ainsi que de campagnes de sensibilisation et d ’ une formation à long terme sur les mesures préventives et sur les conséquences néfastes de toutes les infractions visées dans le Protocole, en encourageant la participation de la communauté et en premier lieu celle des enfants et des enfants victimes, des organisations de la société civile et de l ’ industrie du voyage et du tourisme.

IV. Prévention de la vente d ’ enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants

Mesures adoptées pour prévenir les infractions visées dans le Protocole facultatif

18.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie et les autorités municipales pour prévenir les infractions visées dans le Protocole facultatif. Cependant, il s’inquiète de ce que les mesures de prévention ciblées contre l’exploitation des enfants, y compris la prostitution, la pornographie et le travail forcé des enfants, de même que celles permettant de cerner les causes et l’étendue du problème, restent limitées.

19. Le Comité encourage l ’ État partie à :

a) Adopter une loi spécifique sur les obligations des fournisseurs d ’ accès à Internet en ce qui concerne la pornographie mettant en scène des enfants ;

b) Entreprendre des travaux de recherche sur les effets des actions de prévention passées et sur la nature et l ’ étendue de l ’ exploitation des enfants, y compris la prostitution et la pornographie, pour déterminer quels enfants y sont exposés et quelle est l ’ ampleur du problème ;

c) Demander, afin d ’ assurer une prévention plus efficace dans les domaines couverts par le Protocole facultatif, l ’ assistance technique du Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance (UNICEF) et d ’ autres organisations et institutions internationales ;

d) Prendre de nouvelles mesures de prévention ciblées et coopérer avec les organisations internationales intergouvernementales et non gouvernementales pour mener des campagnes de sensibilisation dans tous les domaines couverts par le Protocole facultatif.

20.Le Comité est profondément préoccupé par la situation difficile de certains groupes d’enfants, tels que les enfants roms, les enfants des rues et les enfants handicapés, qui sont particulièrement vulnérables à toutes les formes d’exploitation.

21. Le Comité demande instamment à l’État partie d’accorder une attention accrue à la situation des groupes d’enfants vulnérables qui risquent particulièrement d’être victimes des infractions visées dans le Protocole facultatif. À ce propos, il recommande à l’État partie d’allouer des ressources humaines et financières suffisantes à la mise en œuvre de programmes ciblés visant à protéger les enfants particulièrement vulnérables contre les violations de leurs droits, en accordant une attention spéciale à l’éducation et aux soins de santé. L’État partie devrait aussi faire davantage d’efforts pour faire connaître leurs droits à ces enfants.

Permanence téléphonique

22. Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a prévu de mettre en place, en collaboration avec l’UNICEF et d’autres ONG, une permanence téléphonique pour aider les enfants victimes. À ce propos, il recommande à l’État partie de faire en sorte que cette permanence téléphonique soit accessible par un numéro gratuit à trois chiffres, opérationnel vingt ‑quatre heures sur vingt ‑quatre. Il lui recommande également de veiller à ce que les enfants connaissent ce service et puissent y avoir accès. En outre, l’État partie devrait faciliter la collaboration de ce service avec les ONG qui s’occupent d’enfants, la police, les professionnels de santé et les travailleurs sociaux.

V. Interdiction de la vente d ’ enfants, de la pornographie mettant en scène des enfants et de la prostitution des enfants

Lois et réglementations pénales existantes

23.Le Comité salue les modifications apportées au Code pénal pour le mettre en conformité avec le Protocole facultatif mais il relève avec préoccupation que tous les textes ne sont pas conformes avec le Protocole facultatif et que, par exemple, il manque des définitions précises de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants comme le prévoient les alinéas b et c de l’article 2 du Protocole.

24.Le Comité recommande à l’État partie de revoir sa législation en vue de la mettre en conformité totale avec le Protocole facultatif, et d’y inclure notamment des définition s de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants, de sorte qu’il soit possible de poursuivre les auteurs de tels actes. En outre, le Comité invite l’État partie à modifier sa législation pénale de façon que celle ‑ci réprime toutes les infractions liées à la prostitution des enfants et à la pornographie mettant en scène des enfants, conformément aux alinéas b et c de l’article 3 du Protocole.

Aspects juridiques de l’adoption

25.Le Comité se félicite de la ratification en 2002 de la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale et des efforts notables faits par l’État partie pour lutter contre les adoptions illégales, mais il s’inquiète de ce que des pratiques illégales et abusives continuent d’exister en Bulgarie, en particulier en ce qui concerne l’adoption internationale.

26. Le Comité recommande à l’État partie de prendre d’urgence des mesures pour continuer à combattre la vente d’enfants aux fins d’adoption, notamment des mesures de lutte contre la corruption, en tenant compte des dispositions de l’article 3 du Protocole facultatif, de l’article 21 de la Convention relative aux droits de l’enfant et de la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.

VI. Protection des droits des enfants victimes

Mesures adoptées pour protéger les droits et les intérêts des enfants victimes d’actes interdits par le Protocole facultatif

27.Le Comité accueille avec satisfaction la réforme du Code de procédure pénale effectuée en 2005, qui introduit la nouvelle condition de victime et en particulier de l’enfant victime. Il est cependant préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas un service judiciaire distinct et spécialisé pour s’occuper des enfants qui sont victimes d’infractions visées dans le Protocole facultatif. Il regrette en outre que la formation des professionnels soit insuffisante, que les pédopsychiatres soient trop peu nombreux et qu’il n’y ait pas assez d’informations sur les programmes spécifiques de réadaptation destinés aux enfants victimes, ni de données sur les indemnisations accordées aux victimes.

28. Le Comité recommande à l’État partie:

a) Au vu du paragraphe 1 de l’article 8 du Protocole facultatif, de continuer à renforcer les mesures visant à protéger les droits et les intérêts des enfants qui ont été victimes ou témoins d’actes interdits par le Protocole facultatif, à tous les stades de la procédure pénale, en tenant compte des Lignes directrices des Nations Unies en matière de justice dans les affaires impliquant des enfants victimes et témoins (résolution 2005/20 du Conseil économique et social);

b) D’instaurer un service judiciaire spécialisé pour mineurs qui s’occupe des enfants victimes, par exemple un système séparé d’administration de la justice pour les mineurs, conformément aux normes internationales (voir également CRC/C/15/Add.66, par. 34).

c) De poursuivre la mise en place de services spécialisés pour le traitement médical et psychologique des enfants victimes et, compte tenu de l’article 9 du Protocole facultatif, de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les enfants victimes bénéficient de toute l’aide dont ils ont besoin, en particulier pour se rétablir physiquement et psychologiquement et se réinsérer socialement, en leur permettant notamment de consulter facilement, dans tout le pays, des professionnels de l’enfance victime;

d) De prendre des mesures pour dispenser une formation appropriée, en particulier dans les domaines juridique et psychologique, aux personnes appelées à s’occuper d’enfants qui ont été victimes d’infractions visées dans le Protocole facultatif, conformément au paragraphe 4 de l’article 8 du Protocole;

e) De poursuivre et renforcer la collaboration avec les ONG et l’Organisation internationale pour les migrations en vue de proposer des services adéquats aux enfants victimes;

f) De veiller à ce que tous les enfants victimes aient accès à des procédures leur permettant, sans discrimination, de demander réparation aux personnes légalement responsables, conformément au paragraphe 4 de l’article 9 du Protocole facultatif.

29.Le Comité s’inquiète de ce que les enfants victimes d’infractions visées dans le Protocole facultatif puissent être stigmatisés et socialement marginalisés, et qu’ils puissent également être tenus pour responsables, jugés et placés en détention.

30. Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre toutes les mesures possibles pour éviter la stigmatisation et la marginalisation sociale des enfants victimes d’infractions visées dans le Protocole facultatif, et de veiller à ce que ces enfants ne soient ni poursuivis ni sanctionnés.

VII. Aide et coopération internationales

Application des lois

31. Le Comité encourage l’État partie à continuer d’instaurer des liens de coopération juridique et pratique avec d’autres États afin de prévenir la criminalité, et de poursuivre et sanctionner les délinquants. Il lui recommande de renforcer, aux niveaux régional et international, ses activités d’entraide judiciaire et policière et de coopération en faveur des victimes avec d’autres États et les organisations internationales, afin de prévenir et de combattre la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, et d’aider au rapatriement des victimes dans leur pays d’origine mais uniquement dans le cas où cette mesure sert leur intérêt supérieur. À ce propos, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son Observation générale n o  6 (2005) concernant le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine.

VIII. Suivi et diffusion

Suivi

32. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les présentes recommandations soient pleinement appliquées, notamment en les transmettant aux ministères concernés, au Narodno Sobranie (Assemblée nationale) et aux autorités locales, pour examen et suite à donner.

Diffusion

33. Le Comité recommande que le rapport et les réponses écrites de l’État partie, ainsi que ses propres recommandations y relatives (observations finales), soient largement diffusés, y compris sur l’Internet (mais pas exclusivement), auprès du grand public, des organisations de la société civile, des groupes de jeunes, des groupes de professionnels et des enfants, afin de susciter un débat et de sensibiliser au Protocole facultatif, à son application et à son suivi.

IX. Prochain rapport

34. Conformément au paragraphe 2 de l’article 12, le Comité invite l’État partie à donner des informations complémentaires sur l’application du Protocole facultatif dans le prochain rapport périodique qu’il présentera au titre de l’article 44 de la Convention relative aux droits de l’enfant.

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