Nations Unies

CRC/C/OPSC/URY/1

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

31 octobre 2013

Français

Original: espagnol

Comité des droits de l ’ enfant

Examen des rapports soumis par les États parties en application du paragraphe 1 de l’article 12 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

Rapports initiaux des États parties attendus en 2005

Uruguay *

[24 octobre 2012]

Table des matières

Page

I.Introduction3

II.Caractéristiques de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescentsà des fins commerciales3

III.Cadre juridique et institutionnel de l’Uruguay5

IV.Plan national d’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescentsà des fins commerciales6

V.Budget consacré à l’application du Protocole facultatif8

VI.Situation des enfants et des adolescents en Uruguay8

VII.Exploitation sexuelle en Uruguay − Quelques données9

VIII.Mise en œuvre d’articles spécifiques du Protocole facultatif11

A.Prévention (art. 9, par. 1 et 2)11

B.Assistance aux victimes (art. 9, par. 3 et 4)17

C.Interdiction et questions connexes (art. 3, 4 (par. 2 et 3) 5, 6 et 7)18

D.Saisie et confiscation21

E.Protection des victimes23

F.Extradition26

G.Coopération judiciaire internationale27

H.Renforcement de la coopération internationale27

Annexes**31

I.Introduction

Le présent rapport initial, relatif à la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, est soumis par l’Uruguay au Comité des droits de l’enfant conformément au paragraphe 1 de l’article 12 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Il a été élaboré et structuré en tenant compte des Directives révisées concernant les rapports initiaux que les États parties doivent présenter conformément au paragraphe 1 de l’article 12 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/2, du 3 novembre 2006).

L’élaboration du présent rapport a été coordonnée par la Direction des droits de l’homme et du droit humanitaire du Ministère des relations extérieures de l’Uruguay.

L’exercice a donné lieu à de vastes consultations des différents organismes de l’État concernés par la question qui, pour la plupart, sont membres du Comité national pour l’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales ou non commerciales (CONAPESE).

Des consultations ouvertes ont également été organisées avec les organisations non gouvernementales et autres partenaires de la société civile concernés par cette question.

II.Caractéristiques de l’exploitation sexuelle des enfantset des adolescents à des fins commerciales

L’Uruguay a commencé de constater que l’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents à des fins commerciales est plus répandue que ce que l’on a bien voulu croire jusqu’à présent.

Les causes de ce phénomène sont multiples et ne supportent pas la simplification. Il s’agit d’un ensemble de facteurs sociaux, économiques, culturels et éthiques qui donnent lieu à des asymétries de pouvoir entraînant des relations d’exploitation qui transforment des enfants et des adolescents en marchandises monnayables et les privent de leur condition d’êtres humains.

La multiplicité des causes de ce problème appelle des modes opératoires intégrant diverses institutions, savoirs et instruments, ainsi que l’indispensable participation de la société et des divers acteurs de l’action publique et privée.

L’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales repose sur le fait que des adultes recherchant le contact sexuel avec des enfants ou des adolescents sont disposés à payer pour satisfaire leurs pulsions, que des personnes et des organisations tirent profit de ce commerce et que des enfants et des adolescents vulnérables et peu protégés deviennent les victimes des uns et des autres.

De telles transactions ne sont pas des faits isolés; au contraire, elles font partie d’une culture qui entretient des systèmes d’idées reçues et de valeurs justifiant des relations de domination de classe, d’ethnie, de sexe ou de condition sociale.

Cette culture «accepte» le rapport sexuel contre de l’argent ou un autre type de bien ou d’espèce, favorise l’abandon de la dignité en échange d’un résultat financier, et se caractérise par le mépris, la discrimination et la négation du droit à l’enfance pour ceux qui sont nés dans les catégories sociales les plus démunies.

Dans un tel contexte, on est amené à considérer que l’exploitation sexuelle est naturelle, à la banaliser et à en minimiser le caractère délictueux.

Ces barrières culturelles touchent d’importantes catégories de la population, y compris les fonctionnaires des organismes appelés à intervenir lorsque des pratiques de commerce sexuel avec des enfants ou des adolescents sont détectées.

Elles peuvent aussi susciter des difficultés, voire l’incertitude ou la paralysie, lorsqu’il s’agit de détecter de telles situations et d’intervenir.

Pour progresser vers l’élimination de l’exploitation sexuelle, il faut donc casser les idées reçues.

Parmi celles-ci, il y a celles qui tendent à criminaliser les enfants et les adolescents qui ont été amenés ou obligés à commettre de tels actes par les adultes qui les exploitent. Il faut inverser la tendance actuelle, et cesser d’être tolérants envers le client ou celui qui exploite, et sévères envers les victimes.

L’exploiteur et le client abusent de la vulnérabilité et de la situation de soumission de la victime pour exercer leur pouvoir économique et satisfaire leurs pulsions aux dépens de la dignité et des droits de l’enfant: c’est ce comportement de certains adultes qui génère la demande et perpétue l’exploitation d’une activité financièrement rentable.

Les lignes d’action du Plan national d’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales, adopté en 2007, puis évalué et reformulé en 2011, font le lien entre la sensibilisation de la collectivité et la formation des agents des organismes amenés à s’occuper de telles situations.

Il ne s’agit pas de transformer ces agents en spécialistes mais de les doter du minimum d’outils nécessaires pour qu’ils puissent détecter certaines situations et intervenir, à leur niveau, suivant des procédures dûment définies et convenues dans une perspective de respect des droits.

À la nécessaire action de répression et de sanction des adultes responsables, il convient d’ajouter la mise en œuvre de stratégies de prise en charge des victimes, la création des systèmes de protection nécessaires pour réduire la vulnérabilité et le fait de doter les victimes des moyens d’exercer leurs droits.

Ces lignes d’action‑sensibilisation, de formation, de répression et de restitution des droits doivent être complétées par la révision permanente des cadres juridiques, compte tenu de la pratique et des capacités d’adaptation et de transformation dont font généralement preuve les auteurs de ces comportements délictueux.

L’Uruguay s’est aujourd’hui doté d’un plan national d’action dans ce domaine, qui place le pays au même niveau que les pays de la région qui ont fait des progrès à cet égard.

Le Plan décrit les mesures à appliquer, désigne des responsables de l’action à mener et prévoit des évaluations ainsi qu’un calendrier dont la mise en œuvre a déjà commencé.

L’action menée pour éliminer l’exploitation sexuelle des enfants est fondée sur un ensemble de politiques de protection de l’enfance et de l’adolescence s’inscrivant dans la volonté de renforcer la solidarité nationale, dans un pays qui protège ses enfants et où ceux‑ci ont le droit d’avoir des droits.

La vulnérabilité des victimes est un phénomène social qui s’explique par de multiples asymétries mais, au-delà des dimensions objectives de la pauvreté et de l’absence de protection, il convient aussi de considérer les conditions subjectives.

Les représentations collectives de l’homme et de la femme légitiment des pratiques par lesquelles l’homme accède au rapport sexuel à n’importe quel prix. L’argent semble créer des droits sur le corps et sur le désir d’autrui. De même, l’image du corps en tant qu’objet d’échange favorise les pratiques d’exploitation.

III.Cadre juridique et institutionnel de l’Uruguay

En Uruguay, le problème de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents, à des fins commerciales ou non commerciales, est longtemps resté dans l’ombre, comme l’illustre l’absence de réaction de l’État, malgré les engagements internationaux du pays.

L’Uruguay a ratifié tous les instruments relatifs aux droits de l’homme qui traitent de cette question, ce qui a représenté un progrès extrêmement important, non seulement par la force juridique de ces dispositions, mais aussi par le changement de point de vue qu’entraîne cette évolution.

Parmi ces instruments, on retiendra l’adoption de:

a)La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979), loi no 15.164 du 4 août 1981, et l’adoption du Protocole facultatif s’y rapportant, loi no 17.338 du 18 mai 2001;

b)La Convention relative aux droits de l’enfant (1990), loi no 16.137 du 28 septembre 1990;

c)La Convention interaméricaine sur le trafic international des mineurs (1994), loi no 16.860 du 9 septembre 1997;

d)La Convention interaméricaine pour la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre la femme (1994), loi no 16.735 du 5 janvier 1996;

e)La Convention (no 182) de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants (1999), loi no 17.298 du 15 mars 2001;

f)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2002), loi no 17.559 du 27 septembre 2002;

g)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole additionnel s’y rapportant, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, loi no 17.861 du 28 décembre 2004;

h)La loi no 17.815 relative à l’exploitation sexuelle des enfants, des adolescents ou des personnes jugées incapables, à des fins commerciales ou non commerciales, conforme aux dispositions du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants;

i)La loi no 18.250 sur les migrations, qui définit les infractions de traite et de trafic des personnes.

Il convient aussi d’indiquer que l’Uruguay a participé activement aux Congrès mondiaux contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, qu’il a adhéré aux engagements formulés à l’issue des Congrès et qu’il a promu la réalisation, à Montevideo, en 2001, de la Consultation régionale préparatoire au deuxième Congrès mondial.

Un certain nombre d’engagements assumés par les pays de la région de l’Amérique latine et des Caraïbes, avec l’appui d’organisations internationales et d’organisations non gouvernementales nationales et internationales, ont été formulés lors de la Consultation.

Les États participant à la Consultation se sont en effet engagés à coordonner leur action et à coopérer aux fins de prévenir cette exploitation et de protéger, récupérer, réintégrer les enfants et les adolescents, et faciliter leur participation, de mener des enquêtes, d’établir des indicateurs, d’assurer le suivi des engagements en question et, enfin, d’adopter des plans d’action visant à mettre en œuvre les objectifs définis dans le Programme de Stockholm.

C’est à la suite de ces engagements qu’a été créé, le 27 octobre 2004 (décret 358/2004 (annexe I)), le CONAPESE, au caractère permanent, qui relève de l’Institut de l’enfance et de l’adolescence de l’Uruguay (INAU), constitué officiellement en 2005.

Le Comité se compose de représentants de l’INAU, qui le préside, du Ministère de l’éducation et de la culture (et d’une représentation du ministère public), du Ministère de la santé, du Ministère de l’intérieur, du Ministère du tourisme et de l’Office de la planification et du budget, de l’administration de l’éducation nationale et d’organisations non gouvernementales.

Le Comité compte, parmi ses conseillers permanents, un représentant de l’Institut interaméricain de l’enfance, un représentant du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et un représentant de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

Le CONAPESE doit se constituer en organe collégial intersectoriel habilité à planifier et à proposer une politique publique de lutte contre l’exploitation sexuelle de l’enfance et de l’adolescence, et élaborer et proposer le Plan national de prévention et d’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales ou non commerciales, pour une période d’au moins cinq ans.

Le Comité national a aussi pour fonction de plaider en faveur du renforcement de la coordination et de la concertation entre les institutions publiques et privées, nationales et internationales s’occupant de l’enfance, aux fins de définir des solutions et des stratégies susceptibles de prévenir les situations favorisant l’exploitation sexuelle.

Le Comité national s’occupe, d’une manière générale, de la réintégration et de la réhabilitation des victimes, au moyen d’interventions sociales et de l’administration de la justice.

Il a pour mission de créer des instances décentralisées aux niveaux départemental et local, en encourageant l’engagement et la participation citoyenne aux objectifs proposés, et d’évaluer l’application de la politique publique et du Plan national d’action.

Le CONAPESE gère les allocations du Plan national et peut disposer de ressources provenant des organismes internationaux de coopération.

IV.Plan national d’élimination de l’exploitation sexuelledes enfants et des adolescents à des fins commerciales

Membre du premier Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle organisé à Stockholm en 1996, et du second Congrès mondial, tenu à Yokohama en 2001, l’Uruguay a pris l’engagement international de «créer une association mondiale de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales».

La Déclaration et le Programme d’action de Stockholm constituent un appel à l’action, dont ils définissent la portée: coordination internationale, prévention, protection, réintégration et participation des enfants.

L’un des engagements les plus importants émanant des Congrès est l’élaboration et l’exécution effectives d’un plan national d’action établissant les grands axes de la prévention et de l’élimination du phénomène dans le pays.

C’est dans ce cadre que l’État uruguayen a entrepris de mettre en œuvre et de coordonner diverses mesures spécifiques de protection des enfants victimes de ce grave problème et de lutte contre les organisations délictueuses qui tirent cruellement profit de l’exploitation d’enfants et d’adolescents.

Le Gouvernement uruguayen élabore actuellement le premier élément tangible de l’engagement du pays, rejoignant ainsi le groupe réduit de pays à avoir mis au point des plans nationaux d’action dans ce domaine.

Le Plan national a été adopté et défini comme instrument de référence et d’orientation principal s’agissant d’établir des mesures destinées à prévenir et, in  fine, à éliminer ce problème social.

S’inscrivant dans le cadre de l’action menée pour faire reculer la pauvreté dans le pays, le Plan est lié aux autres plans d’action et politiques visant le développement et la protection complète des enfants et des adolescents uruguayens.

Il convient de souligner que le cadre conceptuel ci-après est conçu pour les deux plans d’action que le Comité doit mettre au point, l’un sur l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et l’autre, sur l’exploitation sexuelle à des fins non commerciales, même s’il n’est question ici que d’exploitation sexuelle à des fins commerciales.

L’objectif général du Plan national d’action est de garantir à tous les enfants et adolescents du pays le plein exercice des droits fondamentaux consacrés par la Constitution de la République, la Convention relative aux droits de l’enfant et le Code de l’enfance et de l’adolescence en ce qui concerne l’exploitation sexuelle.

Parmi les objectifs précis du Plan, on relèvera la conception, la mise en œuvre et le suivi d’actions visant à éliminer l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, dans un ensemble de sous-programmes de prévention, de protection et de prise en charge des enfants et des adolescents, et de rétablissement des victimes dans leurs droits (programme 1).

On retiendra également la conception, la mise en œuvre et le suivi des mesures d’élimination de l’exploitation sexuelle à des fins non commerciales, dans un ensemble de sous-programmes de prévention, de protection et de prise en charge des enfants et des adolescents et de rétablissement des victimes dans leurs droits (programme 2).

Les bénéficiaires directs du Plan sont les enfants et les adolescents victimes de violence sexuelle ou présentant des facteurs les exposant au risque de la violence sexuelle, ainsi que leur famille.

Depuis 2011, l’action menée dans le cadre du Plan a principalement porté sur les objectifs suivants:

a)Prévention: contribuer à la modification des conceptions sociales dominantes, qui perpétuent l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales;

b)Protection: adapter la législation et la réglementation institutionnelles en vigueur afin qu’elles protègent les enfants et les adolescents contre toutes les formes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales; diffuser la législation nationale et internationale en vigueur relative à l’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents à des fins commerciales; contribuer à la répression de l’infraction d’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents à des fins commerciales;

c)Prise en charge: organiser les divers services concernés par cette problématique, et veiller à ce qu’ils soient fonctionnels pour ce type de situation; renforcer le système public et privé pour apporter les réponses voulues, lorsque des situations d’exploitation sexuelle sont détectées;

d)Réintégration: assurer la réadaptation complète des enfants et des adolescents qui ont été victimes d’exploitation sexuelle, ainsi que celle de leur famille, en garantissant la protection de leur intégrité physique et émotionnelle;

e)Participation des enfants et des adolescents: garantir le droit des enfants et des adolescents de participer à la gestion des questions qui les concernent;

f)Formation et développement des connaissances: mieux faire connaître la question de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents en Uruguay; former les ressources humaines à l’intervention active;

g)Fonctionnement et diffusion: vulgariser l’action du Comité; veiller à son bon fonctionnement;

h)Suivi et évaluation: contrôler la mise en œuvre du Plan et procéder à tout ajustement nécessaire.

V.Budget consacré à l’application du Protocole facultatif

Les actions menées pour appliquer le Protocole facultatif sont financées par le budget affecté à l’INAU; elles bénéficient d’apports systématiques du Ministère du tourisme et des sports, ainsi que d’autres services, qui participent à l’action menée en utilisant leurs propres ressources.

Les divers services et institutions concernés doivent procéder à des demandes précises d’exécution de programmes de prévention, de formation, de répression et de prise en charge des victimes de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants.

Les institutions et services publics concernés ne disposent pas d’un budget propre, ce qui entrave la planification réelle des mesures de mise en œuvre du Protocole facultatif.

VI.Situation des enfants et des adolescents en Uruguay

D’après les données du dernier recensement national de 2011, la population totale de l’Uruguay s’élève à 3 285 877 personnes.

Le pays a un indice de développement humain élevé à l’échelle mondiale, ce qui, dans le contexte de l’Amérique latine, le place à un enviable troisième rang.

L’espérance de vie à la naissance des habitants de l’Uruguay est de 76 ans et le taux de mortalité maternelle est de 18 pour 100 000 naissances vivantes, tandis que la mortalité infantile est de 10,5 pour 100 000 naissances vivantes.

D’après les données de l’Institut national de statistique concernant l’année 2007 (les données du recensement de 2011 relatives à ce domaine ne sont pas encore disponibles), le niveau de pauvreté se situe à 13,7 %, tandis que le niveau d’indigence est de 1,7 %, taux qui illustrent la claire tendance à la baisse qui se manifeste depuis 2006.

Néanmoins, malgré cette baisse observée, certaines caractéristiques d’ordre structurel, liées notamment à la ségrégation dans le logement et l’enseignement, et à l’exclusion sociale ont des conséquences claires: la pauvreté touche davantage les enfants et le recul des indices de pauvreté et d’indigence est plus marqué pour les adultes que pour les enfants et les adolescents, ce qui provoque un «déséquilibre intergénérationnel dans l’accès au bien-être».

Également d’après les données relevées en 2007, le taux de scolarisation primaire est de 97,4 %, pourcentage qui connaît une chute brutale à partir de l’âge de 15 ans (quand un nombre important d’adolescents commencent à travailler), à telle enseigne que 38 % seulement des élèves terminent l’enseignement moyen.

Au niveau familial, on constate qu’au cours des dix dernières années, le nombre de ménages unipersonnels et monoparentaux où la femme est chef de famille a augmenté et que les ménages biparentaux ont diminué, les naissances étant concentrées dans les catégories les plus pauvres de la population.

En ce qui concerne la violence et la criminalité, la progression historique de certaines infractions de droit commun (vol, cambriolages, homicides) s’est stabilisée, mais le nombre de plaintes pour violence intrafamiliale a augmenté; quant aux infractions sexuelles, elles ont augmenté et évolué, les tentatives de viol, l’attentat violent à la pudeur et l’outrage à la pudeur connaissant une importante progression.

De même, les suicides consommés et les tentatives de suicide ont augmenté.

Cette évolution semble indiquer que la pauvreté se concentre sur les jeunes générations, malgré les importantes dépenses publiques consenties dans le domaine social (santé, éducation et prévoyance sociale), visant à garantir les droits des enfants et des adolescents.

Si l’on ajoute à cela le fait que les familles pauvres sont celles qui concentrent une grande partie de la reproduction biologique et sociale de la population uruguayenne et que les membres adultes de cette catégorie sociale sont ceux qui ont le niveau d’instruction le moins élevé, on s’aperçoit qu’à l’évidence, même s’il est sujet de droit, l’enfant issu de telles familles a peu de chances d’accéder à un plein développement éducatif et familial, et de s’insérer sur le marché du travail.

Tableau résumé de la situation: dans un contexte de violence sur la personne humaine accrue, une société caractérisée par une enfance et une adolescence appauvries, disposant d’un accès insuffisant aux biens sociaux et culturels.

Dans un tel contexte, pour qu’elles soient réellement efficaces et qu’elles garantissent les conditions minimales de développement du potentiel, l’accès aux possibilités de progresser et la réalisation des conditions de la citoyenneté, les politiques publiques de l’enfance et de l’adolescence entreprises doivent tenir compte des variables démographiques décrites ci-dessus.

L’accès à la condition de citoyen va nécessairement de pair avec la construction d’une notion de l’enfance axée sur la condition de sujet, de personne, et doit faire valoir le droit à la dignité, à la protection, au genre, au développement harmonieux et, spécialement, à une sexualité saine et sans aucune forme de violence.

VII.Exploitation sexuelle en Uruguay − Quelques données

On a détecté des cas d’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents à des fins commerciales, sous diverses formes et dans plusieurs zones du pays; il s’agit fondamentalement de prostitution d’enfants et d’adolescents, et de cas de «pornographie mettant en scène des enfants» sur Internet.

On a également relevé que des adolescents étrangers (provenant principalement de pays limitrophes) étaient introduits dans le pays à des fins d’exploitation sexuelle dans les zones touristiques ou d’échanges commerciaux importants.

On ne dispose pas de données quantitatives permettant de mesurer de manière globale le phénomène de l’exploitation sexuelle en Uruguay, pour des raisons liées aux caractéristiques du problème (illégalité, activité délictueuse, forme occulte d’exploitation et banalisation, en tant que «stratégie de survie des catégories pauvres», notamment) et aux difficultés qu’il y a de concevoir des outils méthodologiques appropriés permettant de le cerner.

Néanmoins, au cours des dernières années, les résultats des diverses études qualitatives suggèrent l’existence de conditions favorables à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et évoquent en particulier la prostitution d’enfants et d’adolescents, la pornographie mettant en scène des enfants, la traite, tant au niveau interne qu’au niveau international, et le tourisme sexuel.

Des «diagnostics rapides participatifs» ont été réalisés dans le cadre du projet frontalier Uruguay-Brésil (Stratégie régionale de lutte contre la traite des enfants et des adolescents à des fins d’exploitation sexuelle).

D’autres études, menées dans des zones de grande activité économique, comme le port de Nueva Palmira, permettent de mieux cerner le problème qui se pose dans l’ensemble du pays.

On peut également étudier les zones où des personnes originaires de lieux différents confluent pendant des périodes déterminées (récoltes) ou qui sont des lieux de passage (camionneurs, représentants commerciaux, voyageurs).

Il est également important de noter que les plaintes déposées par l’INAU et les procédures engagées concernant des infractions définies dans le Protocole facultatif constituent des données nouvelles et plus précises dans ce domaine.

Entre 2007 et 2009, 20 plaintes ont été déposées par l’INAU auprès des tribunaux spécialisés dans la répression de la criminalité organisée.

En 2010, l’INAU a déposé 17 plaintes et, en 2011, 41.

Ces faits permettent deux lectures ou la combinaison de deux lectures: soit le phénomène est en hausse, soit on en a une vision plus qualifiée et on a progressé dans les modalités de l’action, soit, encore, l’exploitation sexuelle augmente et les opérateurs sociaux possèdent de meilleurs outils de détection et de traitement du problème.

Entre 2009 et 2012, 23 procédures ont été engagées dans des affaires d’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents.

Quatre‑vingt‑deux pour cent de ces procédures ont été engagées par les bureaux de la Défense publique au pénal spécialisés dans la lutte contre la criminalité organisée.

Des procédures ont été engagées concernant des infractions de: contribution à l’exploitation sexuelle (6), rétribution pour l’exécution d’actes sexuels ou érotiques (6), pornographie (6), attentat violent à la pudeur (6), proxénétisme (1), traite (recrutement) (1), blanchiment d’argent (provenant de la traite) (1).

Les auteurs de ces infractions étaient principalement des hommes, mais on a constaté que quatre mères de victimes ont collaboré dans certaines des affaires.

Cinquante-six pour cent des auteurs avaient plus de 40 ans et, pour la plupart, appartenaient aux catégories de la population caractérisées par la vulnérabilité socioéconomique: 7 chômeurs, 6 porteurs, 2 militaires à la retraite, 1 retraitée (domestique), 2 femmes au foyer, 1 barman, 1 jardinier, 1 manœuvre, 1 chiffonnière et 1 travailleur indépendant.

Il s’agissait dans tous les cas de primodélinquants qui avaient été jugés et avaient fait de la prison préventive, à l’exception d’une domestique poursuivie pour blanchiment d’argent (provenant de la traite).

Récemment, le Parlement a adopté la loi no 18.914 (annexe II) portant modification de la législation sur le blanchiment d’argent, par laquelle les affaires d’exploitation sexuelle à des fins commerciales deviennent des infractions relevant de la justice pénale ordinaire, sauf s’il est prouvé qu’il y a association de malfaiteurs réunissant trois personnes ou plus, conformément à la définition du groupe criminel organisé énoncée dans la loi no 18.362.

VIII.Mise en œuvre d’articles spécifiques du Protocole facultatif

A.Prévention (art. 9, par. 1 et 2)

Le Gouvernement uruguayen s’attache à donner plus de visibilité à la question de la prévention en mettant en œuvre, par l’intermédiaire de divers organes de l’État, des actions multiples et durables.

Les mesures de prévention ont pour objectifs de sensibiliser, mobiliser, former et renforcer institutionnellement les acteurs clefs.

Mesures à caractère général

Des plans d’urgence en faveur de l’équité ont été adoptés pour combattre la pauvreté et l’indigence, qui prévoient des mesures d’ordre structurel, de même que des réformes dans les domaines de la fiscalité, de la santé et des prestations sociales non contributives, avec des transferts monétaires s’appuyant sur des critères d’équité.

Formation des agents de la fonction publique

Dans le cadre de son mandat, le CONAPESE organise régulièrement des formations à l’intention des fonctionnaires de l’administration centrale et à d’autres professionnels travaillant sur le thème de l’exploitation sexuelle des enfants. Elles prennent la forme de journées de formation organisées dans différentes villes du pays et de formations permanentes à distance via une classe virtuelle.

Depuis 2008, des journées de formation ont eu lieu tant dans la capitale qu’à l’intérieur du pays (dans les départements de Colonia, Florida et Paysandú), avec un total de 510 participants à ce jour.

La classe virtuelle, en fonctionnement depuis 2010, a permis de former à distance 102 personnes à ce jour.

Campagnes de sensibilisation

i)Campagne de sensibilisation «¡Zafá de la Calle!» (La rue, tu peux en sortir!) (INAU, 2008);

ii)Campagne de sensibilisation contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales (INAU, Ministère du tourisme et des sports, 2008);

iii)Campagne de sensibilisation «Del dicho al hecho, Derecho» (Les droits, des paroles aux actes), 2008;

iv)Campagne de sensibilisation contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, avec distribution de brochures par le Ministère du tourisme et des sports et le CONAPESE (décembre 2007);

v)Campagne de sensibilisation contre la violence (physique, émotionnelle et sexuelle) à destination des enfants et des adolescents, INAU (Système global de protection de l’enfance et de l’adolescence contre la violence (Sipiav), 2008);

vi)Célébration, depuis 2010, de la Journée nationale de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales et non commerciales, le 7 décembre de chaque année.

Enseignement

Plan Ceibal et éducation sexuelle. C’est dans le cadre du Plan Ceibal («un ordinateur pour chaque élève et chaque enseignant»), qui vise à promouvoir via la démocratisation numérique un plus large et meilleur accès à l’éducation et à la culture, qu’a été introduite l’éducation sexuelle.

Programme d’éducation sexuelle dans l’éducation nationale. Conformément à son mandat, le Conseil de direction central (CODICEN) de l’Administration nationale de l’éducation publique (ANEP) a intégré en 2005 l’éducation sexuelle dans le système scolaire classique au titre de la formation de base des enfants et des adolescents.

Ce programme d’ampleur nationale est mis en œuvre à tous les niveaux d’enseignement, une certaine autonomie étant laissée aux organes décideurs correspondants pour définir les modalités précises répondant au mieux aux spécificités des classes d’âge auxquelles il s’adresse.

Les autorités nationales, entre autres choses, constituent des commissions dont l’objectif principal est de faire de l’éducation sexuelle une réalité dans tous les établissements, à tous les niveaux du système éducatif placé sous l’autorité de l’Administration nationale de l’éducation publique.

Dans ce programme, la sexualité est abordée comme une dimension constitutive des êtres humains, faisant partie intégrante de leur personnalité, en lien étroit avec leur vie affective, émotionnelle et familiale, qui se projette et s’exprime dans les relations sociales et les divers liens que peuvent nouer les membres de la société.

L’éducation sexuelle est aussi vue comme une exigence de la société à l’égard du système éducatif public, dont les parents, les éducateurs, les enseignants au travers des assemblées techniques ou pédagogiques et tout un ensemble d’acteurs du système politique se font l’écho.

L’éducation sexuelle doit être considérée comme une façon de donner effet aux engagements contractés par le pays au moment de la signature et de la ratification de la Convention relative aux droits de l’enfant et de ses Protocoles facultatifs.

Dans le cadre théorique dans lequel elle s’insère, l’éducation sexuelle s’articule autour de différentes notions: sexualité, éducation, développement, santé intégrale et droits de l’homme.

À l’heure actuelle, la situation en ce qui concerne l’éducation sexuelle dans le système d’enseignement public peut être décrite comme suit.

Au sein du Conseil de formation du système éducatif, un séminaire de formation obligatoire a été intégré au tronc commun de formation professionnelle dans le cadre du plan de formation 2008 des maîtres, professeurs et maîtres d’apprentissage de l’ensemble du pays.

Au niveau du Conseil de l’enseignement primaire et préprimaire, l’éducation sexuelle a été intégrée dans les programmes scolaires en 2008. À ce niveau, on compte 54 inspecteurs référents pour l’éducation sexuelle dans l’ensemble du pays.

Pour ce qui est de l’enseignement secondaire, l’éducation sexuelle figure dans les programmes des première, deuxième et troisième années du premier cycle et de la première année du deuxième cycle de l’enseignement secondaire, sous toutes leurs formes: cours pendant la journée ou le soir, cours pour adultes, en milieu urbain comme en milieu rural.

Dans chaque établissement, un professeur référent pour l’éducation sexuelle travaille de manière transversale avec les enseignants des différentes matières, mais aussi avec les mères, pères ou représentants des adolescents et dans le cadre d’ateliers spécifiques avec les élèves.

Dans l’enseignement technique et professionnel, l’éducation sexuelle prend la forme d’ateliers de deux heures par semaine en première et deuxième années du cycle de base technologique. Ceux‑ci sont animés par des enseignants qui ont été spécialement formés dans le cadre des cours prévus par le programme entre 2007 et 2010.

En 2011 a été créé le poste d’enseignant référent institutionnel, responsable de l’éducation sexuelle dans les autres niveaux. Il s’agit d’une expérience pilote menée à bien dans les lycées agricoles de tout le pays ainsi que dans quelques écoles techniques.

Les professeurs concernés travaillent en coordination avec les enseignants d’autres matières, par le biais d’ateliers qui s’adressent aux étudiants, aux familles, mais aussi à l’ensemble de la communauté.

Programme d’éducation sexuelle. Il comprend trois grands volets: a) la formation des enseignants. Depuis 2007, les membres de la Commission pour l’éducation sexuelle de l’ANEP organisent des formations destinées aux enseignants des établissements primaires et secondaires et des centres de formation des enseignants, qui peuvent être suivies physiquement ou en ligne et où sont abordés en priorité les thèmes des droits de l’homme, de la sexualité et du genre; b) l’amélioration des connaissances grâce à des publications et à des études; c) la création de centres de référence et de groupes départementaux. Ces activités sont menées à bien en coordination avec la Commission de l’éducation sexuelle de l’Administration nationale de l’éducation publique.

Pour ce qui est de l’Université de la République, un mastère en droits de l’enfant et politiques publiques existe depuis 2004. Il s’agit d’un projet interdisciplinaire auquel participent les facultés de droit, de sciences sociales, de médecine et de psychologie. Si ce mastère a initialement bénéficié de l’impulsion et de l’appui de l’UNICEF, il est financé sur le budget de l’Université depuis 2009.

Ses objectifs sont de faire connaître les questions liées aux droits de l’enfant, de former des enquêteurs et des responsables de programmes et services de protection globale des droits et de faire une place à la thématique des droits de l’enfant dans la formation initiale des professionnels à l’université.

À ce jour, cette formation a été suivie par 150 professionnels du système de protection de l’enfance. Dans ce cadre sont abordées les analyses et les enquêtes sur les phénomènes de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents, sous ses différentes formes, et de la traite des enfants et adolescents.

Mesures institutionnelles

i)Création en 2007 du système global de protection de l’enfance et de l’adolescence contre la violence. Il s’agit d’un réseau interinstitutionnel dont font partie l’INAU, l’ANEP et les Ministères du développement social, de la santé publique et de l’intérieur;

ii)Renforcement institutionnel des voies de plainte de la «Línea Azul» (no d’appel 0800 5050);

iii)Ouverture de centres de protection des droits dans les villes de Chuy, Río Branco, Rivera, Paso de los Toros, Dolores et Bella Unión.

iv)Lancement du Programme pour la participation des enfants et des adolescents (PROPIA), visant à faire participer les enfants et les adolescents à l’élaboration des initiatives sur les thèmes qui les concernent (2006-2008);

v)Réalisation d’études sur l’exploitation sexuelle dans les localités de Chuy, Rivera, Bella Unión, Río Branco, Paso de los Toros et Nueva Palmira (INAU, 2006‑2008);

vi)Dans l’enseignement primaire, un protocole spécifique a été défini et approuvé en 2007, qui fixe une feuille de route pour le repérage en milieu scolaire des situations de maltraitance et de sévices sexuels sur enfants ou adolescents;

vii)Dans l’enseignement secondaire, un protocole a été adopté en 2010 pour faire face aux situations de violence familiale sur des adolescents.

Mesures mises en œuvre aux frontières

L’Uruguay a adopté un projet financé par la Banque interaméricaine de développement, intitulé «Stratégie régionale de lutte contre la traite d’enfants et d’adolescents à des fins d’exploitation sexuelle commerciale».

Ce projet comporte cinq volets: 1) bilan de situation; 2) élaboration de plans opérationnels locaux et binationaux; 3) définition des flux et de protocoles régionaux; 4) définition d’une stratégie régionale; 5) systématisation de l’expérience.

L’INAU a procédé à des premiers bilans dans des villes uruguayennes en 2007, mais le lancement du projet ayant été repoussé à 2010, il s’est avéré nécessaire de les refaire.

Ressortent notamment de ces travaux: l’invisibilité du problème, le déni de son caractère relativement fréquent, la tendance à imputer la faute aux non‑locaux et aux victimes elles-mêmes, la banalisation des faits, l’impression qu’en cas de dénonciation «rien ne se passe» et la porosité des frontières.

À partir, entre autres, de ces données, on a travaillé en 2011 à mettre au point des plans opérationnels locaux dans chaque ville du pays ainsi qu’à créer les comités locaux correspondants.

Cela n’a pas été chose facile, compte tenu d’une part des retards avec lesquels les fonds nécessaires pour garantir la continuité du projet ont été dégagés et d’autre part de la multiplicité des tâches incombant aux services travaillant à l’intérieur du pays, qui ont entraîné des difficultés pour mobiliser les autres organisations concernées.

Dans le cadre du programme Niñosur de la Réunion des hautes autorités des droits de l’homme du Marché commun du Sud (MERCOSUR), on s’attache actuellement à consolider ces plans locaux et ces comités. Dans cette optique, des journées de formation ont été organisées dans la capitale et dans chacune des localités, et il est prévu d’organiser par la suite des rencontres avec des acteurs des villes brésiliennes.

C’est ainsi que seront constitués des comités binationaux et élaborés des plans binationaux.

Cette avancée permettra, espère-t-on, d’avoir un impact plus important que celui obtenu jusqu’ici dans les lieux d’exécution du projet. Ces efforts, conjugués à d’autres projets et à l’action du Comité national, ont contribué à donner aux équipes de l’INAU une vision plus claire du problème et ont conduit l’INAU à décider de créer un lieu de prise en charge approprié pour les victimes.

L’INAU a décidé de financer le recrutement de deux équipes itinérantes, qui réagissent rapidement aux situations qui se présentent, en prêtant leur concours aux équipes locales. Parallèlement, toutes les équipes de l’intérieur du pays doivent être formées, de manière à pouvoir réagir d’elles-mêmes face à un cas d’exploitation sexuelle d’enfant, d’ici à deux ans.

La capitale disposera d’une équipe préparée dans le même but et de nouveaux centres viendront compléter ceux qui existent déjà pour accueillir les garçons et filles qui en ont besoin.

La mise en œuvre de ce projet a posé des problèmes, pour des raisons financières. En effet, tout au long du processus, des retards dans la réception des fonds provenant de la Banque ont causé des interruptions qui ont ralenti la dynamique.

On a pu de ce fait observer un certain manque de confiance chez les acteurs locaux, qui doutaient de la pérennité du projet.

Mesures mises en œuvre dans le secteur touristique

i)Le Ministère du tourisme et des sports a signé un accord-cadre avec les hôtels proposant leurs services dans le pays, les agences de voyages, les gîtes ruraux, les campings et d’autres opérateurs de voyage en vue d’adopter des mesures pour prévenir et combattre le phénomène de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales;

ii)C’est ainsi qu’est intégrée dans la notion de tourisme durable et responsable − principal objectif du Ministère du tourisme et des sports − la protection intégrale des enfants et des adolescents, dont l’industrie du tourisme assumera la responsabilité partagée;

iii)À ce jour, plus de 300 accords-cadres ont été signés avec différents acteurs du secteur. Ils ont permis de promouvoir dans chacune des entreprises concernées les règles de déontologie que doivent suivre les directeurs, les administrateurs et les employés pour prévenir et combattre la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants;

iv)Par cette démarche, les opérateurs du tourisme s’engagent aussi à adopter des mesures de promotion des droits de l’enfant et de l’adolescent; à empêcher tout acte d’exploitation sexuelle à des fins commerciales, de pédopornographie et de tourisme infantile; à mettre en œuvre des mesures pour éviter que les travailleurs, employés et intermédiaires offrent des services de tourisme pédophile; à signaler au Ministère du tourisme et des sports, au Ministère de l’intérieur et au CONAPESE tout acte en rapport avec des faits d’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales, incitation comprise; à ne proposer dans leurs programmes de promotion touristique aucune possibilité d’exploitation sexuelle commerciale d’enfants ou d’adolescents, ni explicitement ni implicitement; et à faciliter la création d’espaces où peuvent être présentés des supports de diffusion des actions de prévention;

v)L’efficacité de la démarche tient au caractère non obligatoire de la signature des accords pour les opérateurs, ainsi qu’au fait que le Ministère du tourisme traite directement avec chacun des opérateurs concernés, sans aucun intermédiaire (Chambre du commerce du secteur ou autres);

vi)Des journées de réflexion sont organisées sur la prévention de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales dans le secteur des voyages et du tourisme.

Mesures mises en œuvre par le Ministère de l’intérieur

En 2010, avec la loi de finances no 18.719 a été créée la Direction générale relative à la lutte contre la criminalité organisée et à Interpol, qui travaille spécifiquement sur la criminalité organisée et les délits connexes, dont l’exploitation sexuelle et la traite et le trafic d’êtres humains sous toutes leurs formes. La Direction générale compte deux bureaux, dont un qui se consacre à l’exploitation sexuelle des enfants, des adolescents ou des adultes.

Cette Direction générale collabore directement avec Interpol, ce qui lui donne accès à certaines informations et lui offre la possibilité de signaler à l’échelle internationale des cas de disparition de personne, des infractions liées aux réseaux de la criminalité organisée, des condamnations de délinquants, etc.

Depuis son entrée en fonction (en 2011) et jusqu’au mois de juin 2012, la Direction générale a identifié un cas de travail forcé sur la personne d’un adolescent, pour lequel deux personnes ont été traduites en justice; 15 cas de mineurs de 18 ans victimes de prostitution, infractions pour laquelle sept personnes ont été traduites en justice; et des cas de matériel pornographique illégal ayant donné lieu à neuf procès.

De plus, la Direction nationale de l’identification civile et la Direction des migrations, qui relèvent du Ministère de l’intérieur, sont chargées de contrôler les entrées et sorties des citoyens et des étrangers et contribuent ainsi à détecter, surveiller et prévenir les problèmes liés à la traite et au trafic d’êtres humains.

À l’École nationale de police, les normes se rapportant à la question sont étudiées à différents niveaux, mais compte tenu de la nécessité d’approfondir les connaissances en la matière, une analyse des programmes de formation des policiers a été menée et des propositions ont été formulées pour mieux intégrer les thèmes visés par le présent rapport dans différentes parties du programme de l’École de formation des officiers et dans le cadre des examens de passage en année supérieure.

Ces propositions figurent dans la publication Proposition pour la prise en compte de la perspective de genre, de la santé sexuelle et génésique et de la violence familiale dans la formation des fonctionnaires de police, de 2011. Les thèmes de l’exploitation sexuelle des enfants et adolescents et de la traite de personnes à des fins d’exploitation sexuelle commerciale y sont abordés dans le chapitre «Cours supérieur de spécialisation en politiques de sécurité et de genre».

L’Unité des relations internationales du Ministère de l’intérieur fait office de coordonnateur dans le cadre des réunions des Ministres de l’intérieur et de la justice du MERCOSUR; c’est à elle que revient la compétence exclusive des échanges d’informations et de la coopération en matière de données et d’indicateurs sur les délits et faits de violence définis et examinés par les pays membres du MERCOSUR, les États associés et les autres acteurs de la communauté internationale.

La Division des politiques du genre est quant à elle chargée de concevoir, d’évaluer et de superviser les politiques institutionnelles sous l’angle de l’égalité hommes-femmes, en mettant en avant des stratégies d’égalité des chances et des droits pour les hommes et les femmes, par une évaluation, une assistance et un accompagnement des préfectures de la Police nationale et des directions nationales et en articulation constante avec les autres institutions travaillant sur ce thème.

Depuis sa création, la Division travaille principalement sur les thèmes liés à la violence sexuelle et sexiste; c’est pourquoi, en matière de traite et d’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents à des fins commerciales ou non commerciales, son action consiste presque exclusivement à accompagner le programme de travail des organes plus spécifiquement créés à cette fin.

Ces organes sont la Commission interinstitutionnelle sur la traite et le trafic de femmes, la Commission interinstitutionnelle pour les questions de genre, qui relève du Ministère des affaires étrangères, et le CONAPESE.

Enfin, les 19 préfectures départementales de police recueillent les plaintes déposées en matière d’infraction sexuelle, de proxénétisme, de prostitution et de pornographie mettant en scène des enfants, puis mènent à bien les enquêtes et procédures policières correspondantes, conformément aux décisions des autorités judiciaires.

Afin de coordonner les efforts déployés par toutes les entités susmentionnées et de définir un plan d’action commun et une politique publique, une commission de travail a été créée le 30 décembre 2011 par arrêté ministériel, avec pour mission: a) de définir la stratégie institutionnelle globale pour tout ce qui touche à la traite et au trafic de personnes; b) d’étudier et évaluer la mise en œuvre des instruments, mécanismes et procédures de prévention et d’enquêter sur ces infractions; c) de déterminer la pertinence d’éventuelles formations pour les fonctionnaires qui travaillent sur ce thème et campagnes de sensibilisation pour les catégories de population les plus vulnérables, les possibilités de mener ces tâches à bien et la capacité des institutions de s’en charger.

Cette liste de mesures montre clairement que les autorités publiques se sont saisies du thème de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents et en ont fait un objectif dont il doit être tenu compte dans les politiques publiques en tant que thème touchant aux violations des droits de l’homme non seulement de la victime mais de la société tout entière.

B.Assistance aux victimes (art. 9, par. 3 et 4)

L’Uruguay s’emploie à mettre sur pied des mécanismes pour garantir aux victimes des délits visés par le Protocole facultatif l’assistance appropriée et les services nécessaires à leur pleine réinsertion sociale et à leur rétablissement physique et psychologique.

L’État uruguayen n’ignore cependant pas qu’il reste bien des lacunes à combler et des obstacles à franchir pour atteindre cet objectif.

La définition d’une politique publique dans le cadre de la Stratégie nationale en faveur de l’enfance et de l’adolescence a permis de faire les avancées suivantes:

a)Création d’un service pilote de prise en charge des enfants et adolescents victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle commerciale, de juin 2011 à octobre 2012. Une assistance psychologique, sociale et juridique a pu être apportée dans ce cadre par l’intermédiaire de plusieurs ONG et grâce à des fonds de l’Union européenne en accord avec l’Institut national de la femme (INMUJERES) du Ministère du développement social. En un an de travail, ce service est venu en aide à 20 enfants et adolescents mais a aussi dispensé une formation à 3 fonctionnaires (2 techniciennes et 1 éducatrice) de l’INAU afin que l’administration publique dispose de compétences ciblées;

b)Durant la phase de transition entre l’élaboration du projet et la conception du dispositif spécialisé de prise en charge, c’est l’équipe de l’INAU qui interviendra dans les cas de traite à des fins d’exploitation sexuelle qui pourraient se présenter;

c)Inclusion d’un volet sur cette thématique dans le Projet 0 (en cours d’exécution), relevant des fonds de cohésion (PNUD, UNICEF, OIM, Ministère du développement social, INAU, Agence uruguayenne de coopération internationale) contre l’exploitation sexuelle commerciale, avec pour objectif, à terme, d’établir une cartographie des ressources existantes dans le pays, de recenser les lacunes à combler dans la législation pour mieux faire face au problème et de mettre sur pied un centre spécialisé pour la prise en charge des enfants et des adolescents victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales;

d)Conception d’un programme de lutte contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales au sein de la structure institutionnelle de l’INAU, qui s’appuie sur une direction et trois équipes techniques opérationnelles, une officielle et deux itinérantes, de caractère territorial et constituées en concertation avec des ONG. Elles s’attacheront à former des acteurs sur tout le territoire et à fournir un premier appui aux victimes lorsque des cas sont dénoncés;

e)Mise en place de plans opérationnels locaux et binationaux dans les villes frontalières visées par le projet de stratégie régionale de lutte contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales des enfants et des adolescents dans les villes frontalières brésiliennes, argentines, paraguayennes et uruguayennes (dit «projet PAIR-MERCOSUR»).

C.Interdiction et questions connexes (art. 3, 4 (par. 2 et 3) 5, 6 et 7)

Incrimination des faits visés par le Protocole facultatif

L’Uruguay a légiféré sur les actes visés par l’article 2 du Protocole facultatif, qui condamne le fait d’offrir, de remettre ou d’accepter un enfant, quel que soit le moyen utilisé, aux fins d’exploiter l’enfant à des fins sexuelles, de transférer les organes de l’enfant à titre onéreux et de soumettre l’enfant au travail forcé.

En conséquence, différents actes et activités parmi ceux énoncés dans le Protocole facultatif ont été prévus dans la législation pénale uruguayenne et constituent des infractions pénales.

L’Uruguay n’a toutefois pas encore érigé la vente d’enfants et d’adolescents en infraction pénale au niveau national.

Il convient d’ajouter que l’ordre juridique uruguayen a introduit les infractions pénales de prostitution d’enfants et d’exploitation sexuelle d’enfants dès 1927.

La loi no 8080 (dite de répression du délit de proxénétisme et des délits connexes, du 27 mars 1927), telle que modifiée par l’article 24 de la loi no 16.707 (loi relative à la sécurité des citoyens) définit les actes délictueux en rapport avec la prostitution et l’exploitation sexuelle d’enfants dans ses articles 1er et 2.

L’article premier dispose ce qui suit: «Toute personne, quel que soit son sexe, qui exploite la prostitution d’autrui et y contribue d’une quelconque manière à des fins d’enrichissement, quand bien même elle aurait obtenu le consentement de la victime, sera punie de deux à huit années de réclusion. En cas de récidive, l’aggravation sera appliquée sur la peine maximale portée par la loi. Quiconque encourage ou incite autrui à se livrer à la prostitution, dans le pays ou à l’étranger, à des fins d’enrichissement, sera puni de trois à douze mois d’emprisonnement.».

L’article 2 de la loi dispose: «La peine minimale imposée sera de quatre années de réclusion si la victime est âgée de moins de 18 ans, si l’auteur des faits est un fonctionnaire de police ou si les faits se sont accompagnés de tromperie, de violence, de menace grave, d’abus d’autorité ou de tout autre moyen d’intimidation ou de contrainte, de même que si l’auteur est un ascendant de la victime, s’il en est l’époux, le frère ou le tuteur ou s’il en a la garde ou vit maritalement avec elle.».

Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants a été adopté par la loi no 17.559 du 27 septembre 2002.

La loi no 17.815 (annexe III) du 6 septembre 2004 (relative à la violence sexuelle à des fins commerciales ou non commerciales sur la personne d’enfant, d’adolescent ou de majeur incapable) donne effet au Protocole facultatif en définissant dans ses articles 4, 5 et 6 les faits délictueux au sens de l’ordre juridique uruguayen de manière conforme aux dispositions du Protocole facultatif.

Dans son article 4, la loi érige en infraction pénale le fait de rétribuer ou de promettre de rétribuer un mineur ou un majeur incapable en échange d’un quelconque acte sexuel ou érotique: «Quiconque paie un mineur ou un majeur incapable, quel que soit son sexe, ou s’engage à le payer ou à lui offrir un avantage économique ou d’une quelconque autre nature, en échange d’actes sexuels ou érotiques quels qu’ils soient, sera puni de deux à douze années de réclusion.».

Dans son article 5 (Participation à l’exploitation sexuelle de mineurs ou de majeurs incapables), cette loi dispose que: «Quiconque participe d’une quelconque manière à la prostitution, l’exploitation ou la servitude sexuelle de mineurs ou de majeurs incapables sera puni de deux à douze années de réclusion.». Dans ce même article 5, elle prévoit des circonstances aggravantes, dans les termes suivants: «La durée de la peine sera augmentée d’un tiers à 50 % si l’infraction a été commise par une personne abusant des liens familiaux qui l’unissent à la victime, de sa situation d’autorité ou de sa position hiérarchique, dans le secteur public ou privé, ou bien de ses fonctions de policier.».

Dans son article 6 (Trafic de mineurs ou de majeurs incapables), la loi dispose que: «Quiconque favorise ou facilite d’une quelconque manière l’entrée ou la sortie sur le territoire de mineurs ou de majeurs incapables en vue de leur prostitution ou de leur exploitation sexuelle sera puni de deux à douze années de réclusion.».

Les conduites délictueuses visées par le Protocole facultatif sont en outre incriminées dans la loi no 18.250 (annexe IV) (loi relative aux migrations).

L’article 78 de cette loi prévoit ainsi le délit de traite, dans les termes qui suivent: «Quiconque participe d’une quelconque manière ou par quelque moyen que ce soit au recrutement, au transport, au transfert, à l’accueil ou à la réception de personnes à des fins de travail forcé ou de services forcés, d’esclavage ou de pratiques analogues, de servitude, d’exploitation sexuelle, d’extraction ou de prélèvement d’organes ou à toute autre activité contraire à la dignité humaine, sera puni de quatre à seize années de réclusion.».

L’article 79 prévoit le délit de trafic de personnes: «Quiconque favorise ou facilite l’entrée ou le transit de personnes sur le territoire ou la sortie de personnes du pays dans un cas autre que ceux prévus à l’article 78 de la présente loi mais avec les mêmes motivations sera puni de deux à huit années de réclusion.».

Dans son article 80, la loi no 18.250 dispose que: «Dans les affaires de traite d’êtres humains s’appliqueront, le cas échéant, les dispositions des articles 13 et 14 de la loi no 18.026 (annexe V), du 25 septembre 2006, en faveur des plaignants, victimes, témoins et membres de la famille.».

L’article 81 énonce des circonstances aggravantes spéciales:

«Les infractions visées aux articles 77, 78 et 79 de la présente loi sont considérées comme commises avec des circonstances aggravantes spéciales et seront punies d’une peine augmentée d’un tiers à 50 %:

a)Lorsqu’elles ont mis en danger la santé ou l’intégrité physique du ou des migrant(s);

b)Lorsque la victime est un enfant ou un adolescent ou quand l’auteur s’est prévalu de l’incapacité physique ou intellectuelle d’une personne majeure;

c)Lorsque l’auteur occupe des fonctions policières ou ayant trait à la sécurité, à la surveillance ou au contrôle des migrations de personnes;

d)Lorsque le trafic ou la traite de personnes est commis(e) avec violence, intimidation ou tromperie ou lorsque l’auteur profite de l’inexpérience de sa victime;

e)Lorsque l’auteur fait des activités visées aux articles 77, 78 et 79 de la présente loi son activité habituelle.».

Force est de reconnaître qu’en matière de prostitution ou d’exploitation sexuelle des enfants, diverses qualifications pénales existent pour des conduites similaires, ce qui peut être source de problèmes d’interprétation au moment de l’application des textes.

Enfin, toujours en ce qui concerne les conduites délictueuses liées à la prostitution ou à l’exploitation sexuelle des enfants, il convient de mentionner la loi no 14.294 (loi relative aux stupéfiants) dans la version donnée par la loi no 17.343 (annexe VI) et ses modifications ultérieures.

La loi no 17.343 réprime le blanchiment d’argent issu non seulement du trafic de drogues mais aussi d’autres activités telles que «(…) le trafic illicite d’hommes, de femmes ou d’enfants et le proxénétisme (…)».

En ce qui concerne la pornographie mettant en scène des enfants, l’ordre juridique uruguayen comporte aussi des qualifications pénales conformes au Protocole facultatif.

Comme cela a déjà été indiqué, l’Uruguay a adopté par la loi no 17.559 le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Pour donner effet aux dispositions du Protocole facultatif, le pays a adopté la loi no 17.815, dont les articles 1er, 2 et 3 visent tous les agissements liés à la pornographie mettant en scène des enfants.

Ainsi, dans son article premier (Fabrication ou production de matériel pornographique avec utilisation de mineurs ou de majeurs incapables), la loi no 17.815 dispose que: «Quiconque fabrique ou produit d’une quelconque manière du matériel pornographique en ayant recours à des mineurs ou à des majeurs incapables ou qui utilise leur image sera puni de vingt-quatre mois d’emprisonnement à six années de réclusion.».

Dans son article 2 (Commerce et diffusion de matériel pornographique faisant apparaître des images ou toute autre forme de représentation de mineurs ou de majeurs incapables), cette loi dispose: «Quiconque commercialise, diffuse, exhibe, stocke à des fins de distribution, importe, exporte, distribue ou offre du matériel pornographique dans lequel apparaît l’image ou toute autre forme de représentation d’un mineur ou d’un majeur incapable sera puni de douze mois d’emprisonnement à quatre années de réclusion.».

Dans son article 3 (Soutien de la commercialisation et de la diffusion de matériel pornographique faisant apparaître l’image ou toute autre représentation d’un ou plusieurs mineurs ou majeurs incapables), cette loi énonce: «Quiconque facilite d’une quelconque manière, pour son propre compte ou le compte d’autrui, la commercialisation, la diffusion, l’exhibition, l’importation, l’exportation, la distribution, l’offre, le stockage ou l’acquisition de matériel pornographique contenant l’image ou toute autre forme de représentation d’un ou plusieurs mineur(s) ou majeur(s) incapable(s) sera puni de six mois d’emprisonnement à deux années de réclusion.».

Aux fins du présent article, «est défini comme pornographique tout produit ou matériel qui contient d’une quelconque manière l’image ou toute autre forme de représentation de personnes mineures ou incapables se livrant à des activités sexuelles explicites, réelles ou simulées, ou l’image ou la représentation de leurs parties génitales, à des fins essentiellement sexuelles (loi no 17.559, du 27 septembre 2002, relative au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants)».

Comme on peut le voir, la législation uruguayenne prévoit tous les agissements liés aux délits de pornographie mettant en scène des enfants, de la fabrication ou la production de matériel pornographique avec utilisation de mineurs ou de majeurs incapables, à la commercialisation et à la diffusion de ce matériel mettant en scène des mineurs ou des majeurs incapables.

En ce qui concerne la vente d’organes, c’est la loi no 14.005 qui définit le délit de commercialisation d’organes ou de tissus humains. En son article 14, ce texte dispose ce qui suit: «Quiconque reçoit pour son compte propre ou pour le compte d’autrui de l’argent ou tout autre avantage ou en accepte la promesse en échange du fait de céder un organe ou un tissu, de ne pas s’opposer à son utilisation ou d’autoriser une autopsie clinique aux fins de la loi sera puni de six mois d’emprisonnement à quatre années de réclusion.».

En ce qui concerne le travail des enfants, en ratifiant la Convention no 182 (1999) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur les pires formes de travail des enfants, par la loi no 17.298, l’Uruguay s’est engagé à adopter toutes les mesures immédiates et efficaces nécessaires pour parvenir de toute urgence à interdire et éliminer les pires formes de travail des enfants.

En ce qui concerne la corruption de mineur, l’article 274 du Code pénal uruguayen dispose: «Est coupable de corruption de mineur toute personne qui, pour assouvir sa propre perversion, par le biais d’actes obscènes, corrompt une personne âgée de plus 12 ans et de moins de 18 ans.».

Il convient enfin de signaler que l’infraction pénale de tourisme sexuel n’est pas prévue dans l’ordre juridique uruguayen. Pour autant, il est possible de réprimer de tels faits, prévus par le Protocole facultatif, en invoquant l’article premier de la loi no 18.250, au titre de la traite ou du trafic de mineurs. Il est également possible d’invoquer les dispositions de la loi no 17.815.

D.Saisie et confiscation

La législation uruguayenne prévoit la saisie et la confiscation des biens tels que les documents, les avoirs et les autres moyens matériels utilisés pour commettre les infractions visées dans le Protocole facultatif ou en faciliter la commission, ainsi que des produits tirés de ces infractions.

L’article 2 de la loi no 18.494 du 5 juin 2009 sur le contrôle et la prévention du blanchiment d’avoirs et du financement du terrorisme abroge et remplace la réglementation antérieure en la matière et établit les nouveaux pouvoirs des juridictions pénales compétentes.

Conformément à cette loi, les personnes poursuivies pour avoir commis des infractions visées par la Convention relative aux droits de l’enfant et par son Protocole facultatif se voient appliquer les présentes mesures conservatoires et, à terme, des mesures de confiscation.

Aux termes de l’article premier de cette loi, «les biens, produits ou instruments tirés d’infractions visées par la législation uruguayenne, à savoir ... les infractions visées par la loi no 17.815, du 6 septembre 2004, par les articles 77 à 81 de la loi no 18.250 du 6 janvier 2008 et toutes les infractions visées par le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ou concernant la traite, le trafic et l’exploitation sexuelle…» relèvent du blanchiment de capitaux.

La loi no 18.494 (annexe VI) réglemente également les mesures conservatoires et leur fondement juridique, les compétences des tribunaux en la matière, les recours et les mesures possibles.

Le paragraphe 1 de l’article 62 relatif aux mesures conservatoires dispose ce qui suit: «La juridiction pénale compétente ordonne, par décision motivée, à son initiative ou à la demande d’une partie, à tout stade du procès, y compris celui de l’instruction, les mesures conservatoires propres à garantir la disponibilité des biens susceptibles d’être confisqués aux auteurs d’une des infractions prévues par la présente loi ou d’une infraction apparentée.».

Le paragraphe 2 de l’article 62 précise: «La juridiction pénale compétente adopte des mesures conservatoires si elle estime qu’elles sont indispensables à la protection du droit qu’a l’État de disposer de ces biens une fois confisqués et si un retard dans la procédure peut entraîner une violation ou une négligence de ce droit.».

Aux termes du paragraphe 3 de l’article 62: «La juridiction pénale compétente peut: a) apprécier la nécessité de la mesure et ordonner une autre mesure qu’elle juge plus efficace; b) décider de la portée et de la durée d’application de la mesure; et c) ordonner la modification, le remplacement ou la levée de la mesure conservatoire adoptée.».

En matière de recours, le paragraphe 4 de l’article 62 prévoit ce qui suit: «Les mesures adoptées sont confidentielles et aucun incident ni requête ne peut avoir pour effet d’en empêcher l’exécution. Toute décision tendant à autoriser, à rejeter ou à modifier une mesure conservatoire est susceptible de réexamen ou d’appel, mais la formation de ces recours ne suspend pas l’exécution de la mesure.».

Cette loi prévoit également que le tribunal peut ordonner d’autres mesures. Le paragraphe 5 de l’article 62 dispose en effet: «La juridiction pénale compétente peut ordonner toute mesure qu’elle juge indispensable, comme l’interdiction de modifier l’état d’un bien, la notification préventive du litige sur le bien, le placement sous séquestre et la saisie du bien, la désignation d’un contrôleur, d’un inspecteur ou d’un observateur, ou toute autre mesure qui faciliterait l’exécution de la mesure conservatoire.».

En ce qui concerne les mesures provisoires, le paragraphe 6 de l’article 62 précise que «la juridiction pénale compétente peut ordonner, à titre de mesure provisoire ou de mesure d’exécution anticipée, l’adjudication des biens placés sous séquestre ou, plus généralement, soumis à une mesure conservatoire, qui risqueraient de se dégrader, de se déprécier ou de perdre de la valeur, ou dont la conservation entraînerait un préjudice ou des dépenses disproportionnés par rapport à la valeur».

L’article 63 définitle terme «confiscation».

Le paragraphe 1 de cet article dispose en effet que «la confiscation s’entend d’une sanction prise par la juridiction pénale compétente à la demande du ministère public, à titre de peine accessoire, qui consiste en la privation définitive d’un bien, produit ou instrument. La décision exécutoire qui l’ordonne a pour effet de transférer la propriété du bien et doit être inscrite dans les registres publics correspondants».

S’agissant du champ d’application objectif, le paragraphe 2 de l’article 63 dispose ce qui suit:

«Dans le jugement de condamnation prononcé à l’encontre de l’auteur de l’une des infractions visées par la présente loi ou d’une infraction apparentée, la juridiction pénale compétente ordonne, à la demande du ministère public, la confiscation:

a)Des stupéfiants et substances psychotropes illicites saisis au cours de la procédure;

b)Des biens ou instruments qui ont servi à commettre l’infraction ou à la préparer;

c)Des biens et produits tirés de l’infraction;

d)Des biens et produits obtenus par l’utilisation des gains tirés de l’infraction, dont les biens et les produits en lesquels les gains tirés de l’infraction ont été transformés ou convertis, et les biens et les produits auxquels ont été mêlés les gains tirés de l’infraction, à concurrence de la valeur estimée de ces derniers;

e)Les revenus ou autres gains retirés des biens et produits tirés de l’infraction.».

Le paragraphe 3 de l’article 63 de cette loi, qui porte sur la confiscation par équivalent, prévoit que «lorsque de tels biens, produits ou instruments ne peuvent être confisqués, la juridiction pénale compétente ordonne la confiscation de tout autre bien appartenant au condamné et dont la valeur correspond au montant du profit généré par l’infraction. Si cela n’est pas possible, la juridiction le condamne à payer une amende d’un montant équivalent à la valeur des biens».

L’article 63 prévoit également la confiscation de plein droit des biens.

En effet, aux termes du paragraphe 4 de l’article63:«Sans préjudice des dispositions précitées, passé un délai de six mois après que la juridiction pénale compétente a délivré, à quelque stade de la procédure, un mandat d’arrêt à l’encontre d’un suspect ou inculpé n’ayant pas encore été arrêté, et à condition que la situation n’ait pas changé, les biens, produits ou instruments saisis provisoirement sont confisqués de plein droit, le condamné perdant tous ses droits sur ceux-ci. Dans le cas où des biens ou produits tirés d’infractions visées par la présente loi ou d’infractions apparentées sont retrouvés et que leur propriétaire ne se manifeste pas dans un délai de six mois, ils sont confisqués de plein droit.».

Enfin, le paragraphe 5 de l’article 63 porte sur le champ d’application subjectif.

À cet égard, il prévoit que «la confiscation peut porter sur les biens énumérés dans les paragraphes précédents et dont le condamné, par la commission de l’une des infractions prévues par la présente loi ou d’une infraction apparentée, est le bénéficiaire final, à condition que l’origine frauduleuse de ces biens dénoncée par l’accusation n’ait pas pu être contredite et que leur valeur soit disproportionnée par rapport à l’activité licite à laquelle le condamné a déclaré s’être livré pour les obtenir. Elle peut porter sur des fonds, des biens et d’autres avoirs que le prévenu a acquis avant de se livrer à une activité délictueuse, à condition que la juridiction pénale compétente dispose d’éléments factuels permettant d’établir un lien raisonnable avec cette activité délictueuse».

Ce paragraphe prévoit également ce qui suit: «Aux fins de la confiscation, la personne condamnée pour avoir commis l’une des infractions visées par la présente loi ou une infraction apparentée est réputée bénéficiaire finale des biens, même si la propriété de ceux-ci a été transférée à un tiers, à une personne physique ou à une personne morale. Il revient à la juridiction pénale compétente de décider des biens à confisquer et de déterminer les champs d’application objectif et subjectif de la confiscation.».

E.Protection des victimes

L’Uruguay dispose de plusieurs textes législatifs relatifs à la protection des victimes de la traite et du trafic d’êtres humains.

Selon l’article 80 de la loi sur les migrations (loi no 18.250),les dispositions des articles 13 et 14 de la loi no 18.026, du 25 septembre 2006, s’appliquent, le cas échéant, aux dénonciateurs, aux victimes, aux témoins et à la famille de la victime dans les affaires de traite.

Les dispositions de cette loi montrent que le cadre de la protection des victimes d’exploitation sexuelle, infraction pour laquelle une circonstance aggravante est prévue lorsque la victime est un enfant ou un adolescent, est fixé par les articles 13 et 14 de la loi sur la coopération avec la Cour pénale internationale.

Le paragraphe 1 de l’article 13 («Intervention de la victime») de la loi no 18.026 dispose que dans les affaires liées aux crimes prévus aux chapitres I à III de la section II de la loi, l’auteur de la plainte, la victime ou les membres de la famille de celle-ci ont accès à l’intégralité du dossier et peuvent obtenir des preuves, mettre à disposition celles qu’ils possèdent et participer à tous les actes de la procédure judiciaire. À cette fin, ils communiquent l’adresse de leur domicile et sont avisés de toutes les décisions adoptées dans le cadre de la procédure.

Toujours selon ce paragraphe, si le classement de l’affaire a été ordonné ou si, à l’issue d’un délai de soixante jours à compter du dépôt de la plainte, la phase d’instruction ou d’enquête préliminaire est toujours en cours, l’auteur de la plainte, la victime ou les membres de la famille de celle-ci peuvent soumettre au juge compétent une demande motivée de réexamen de l’affaire ou une demande d’informations sur l’état d’avancement de la procédure.

Le paragraphe 2 de l’article 13 dispose que si la demande de réexamen de l’affaire est présentée en raison du classement de l’affaire, le procureur suppléant réexamine le dossier dans un délai de vingt jours.

Selon le paragraphe 3, la décision de justice est communiquée au plaignant, au Procureur général et au procureur.

Le paragraphe 4 précise ce qui suit:

«Pendant la procédure, le juge ordonne d’office ou à la demande du procureur toute mesure qu’il juge appropriée et nécessaire pour protéger la sécurité des victimes et des témoins, leur bien-être physique ou psychologique, leur dignité et leur vie privée. À cette fin, il tient compte de tous les facteurs pertinents, notamment de l’âge, du sexe et de l’état de santé des intéressés, ainsi que du type d’infraction, en particulier dans les affaires de violence sexuelle, de violence sexiste ou de violence à l’égard d’enfants et de mineurs.

Dans les cas de violence sexuelle, la corroboration du témoignage de la victime n’est pas exigée; aucun élément relatif au comportement sexuel passé de la victime ou des témoins n’est admissible en tant que preuve et le consentement ne peut être invoqué comme moyen de défense.

À titre exceptionnel et lorsque la protection des victimes, des témoins ou de l’inculpé l’exige, le juge peut autoriser, par une décision motivée, la présentation des preuves par des moyens électroniques ou d’autres moyens techniques particuliers visant à éviter aux victimes de subir un nouveau traumatisme. Ces mesures sont notamment appliquées dans les cas d’agression sexuelle ou lorsque les victimes ou les témoins sont mineurs, conformément aux dispositions de l’article 18 de la loi no 17.514 du 2 juillet 2002.

Tous les moyens possibles doivent être mis en œuvre pour que le procureur puisse s’appuyer sur des conseillers juridiques spécialisés dans des domaines déterminés, comme la violence sexuelle, la violence sexiste et la violence à l’égard des enfants. En outre, il est fait en sorte que le tribunal ait à sa disposition un personnel spécialisé dans la prise en charge des victimes de traumatismes, notamment de violence sexuelle ou sexiste.».

Le paragraphe 1 de l’article 14 de la loi no 18.026 (Réparation accordée aux victimes) dispose ce qui suit: «L’État accorde une réparation aux victimes des crimes visés dans les chapitres I à III de la section II de la présente loi commis sur le territoire de la République ou à l’étranger par des agents de l’État ou par d’autres personnes qui, même si elles n’ont pas cette qualité, ont agi avec l’autorisation, l’appui ou le consentement d’agents de l’État.».

Le paragraphe 2 de l’article 14 vient préciser que la réparation doit être intégrale et comprendre des mesures d’indemnisation, de restitution et de réadaptation, et doit s’étendre aux membres de la famille de la victime et au groupe ou à la communauté auquel elle appartient. L’expression «membre de la famille» s’entend de l’ensemble des personnes unies par le lien du mariage ou par un lien de parenté, ainsi que par le fait de vivre ensemble ou de faire vie commune.

Comme cela a été mentionné dans les observations relatives à la mise en œuvre de l’article 7 du Protocole facultatif, les dispositions de la loi no 18.494 sur le contrôle et la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme s’appliquent dans les cas de blanchiment de capitaux, qu’il s’agisse d’avoirs, de produits ou d’instruments tirés d’une infraction prévue par le Protocole facultatif.

L’article 8 et les articles suivants de la loi prévoient des mesures spécifiques de protection des victimes, des témoins et des collaborateurs.

Le paragraphe 1 de l’article 8 de la loi no 18.494 dispose que les témoins et les victimes, lorsqu’ils agissent en tant que tels, les experts et les collaborateurs intervenant dans les affaires dont sont saisis les tribunaux de première instance spécialisés dans le crime organisé peuvent bénéficier de mesures de protection lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser que leur vie ou leur intégrité physique ou celles de leur famille sont gravement menacées.

Le paragraphe 2 de l’article 8 énumère les différentes mesures de protection. Il s’agit:

«1.De charger la police d’assurer la protection physique de ces personnes.

2.D’utiliser des mécanismes permettant d’empêcher les tiers étrangers au procès d’identifier ces personnes lorsqu’elles doivent comparaître pendant la phase d’instruction.

3.De garantir à ces personnes la confidentialité de leur comparution, d’assurer leur transport par un véhicule de l’État et de les auditionner dans une zone distincte.

4.D’interdire, tant aux particuliers qu’aux médias, de photographier ces personnes et d’enregistrer ou de diffuser leur image.

5.D’offrir à ces personnes la possibilité de témoigner via des moyens audiovisuels ou d’autres procédés techniques appropriés.

6.De réinstaller ces personnes à une nouvelle adresse et de leur fournir un nouveau nom et de nouveaux documents d’identité, la Direction nationale de l’état civil devant prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la confidentialité de ces mesures.

7.D’interdire la divulgation intégrale ou partielle des informations ayant trait à leur identité ou à leur adresse.

8.De fournir à ces personnes une aide financière dans les cas de réinstallation à une nouvelle adresse, conformément au paragraphe 3 de l’article 464 de la loi no 15.903 du 10 novembre 1987.».

Le paragraphe 3 de l’article 8 prévoit également que les mesures de protection énoncées dans le paragraphe précédent sont adoptées par le juge à la demande du ministère public ou à la requête de la victime, du témoin, de l’expert ou du collaborateur, par une décision de justice pouvant les étendre aux membres de la famille et aux proches de la victime.

Le paragraphe 4 de l’article 8 précise que des accords peuvent être conclus avec d’autres États aux fins de la réinstallation des victimes, des témoins ou des collaborateurs, tandis que le paragraphe 5 prévoit que les décisions adoptées au titre des précédents paragraphes sont tenues secrètes et versées dans un dossier distinct conservé par le greffe du tribunal.

L’article 9 de la loi no 18.494 prévoit que le fonctionnaire qui, en sa qualité de fonctionnaire ou dans l’exercice de ses fonctions, révèle les mesures de protection confidentielles, l’adresse des personnes réinstallées ou, le cas échéant, leur nouvelle identité, encourt une peine allant de deux à six ans d’emprisonnement assortie d’une interdiction absolue d’exercer des fonctions publiques pendant deux à dix ans.

Enfin, aux termes de l’article 10 de cette loi:

«Quiconque commet des actes de violence ou d’intimidation afin d’exercer une influence directe ou indirecte sur l’auteur d’une plainte, une partie ou un suspect, un avocat, un procureur, un expert, un interprète ou un témoin afin que celui-ci modifie son comportement dans une procédure ou ne remplisse pas ses obligations au regard de la justice, encourt une peine allant de deux mois à quatre ans d’emprisonnement.

Si l’auteur des faits a atteint son objectif, les dispositions légales relatives à la complicité s’appliquent, sans préjudice des dispositions du paragraphe 2 de l’article 60 du Code pénal.

La commission, par l’auteur d’actes de violence ou d’intimidation visant à exercer une influence directe ou indirecte, de la façon prévue au paragraphe 1, d’actes portant atteinte à la vie, à l’intégrité, à la liberté, à la liberté sexuelle ou aux biens, à titre de représailles, constitue une circonstance aggravante de l’infraction respective et entraîne une augmentation d’un tiers du minimum et du maximum de la peine prévue.».

F.Extradition

Tout au long de son histoire, l’Uruguay a conclu des accords bilatéraux régissant les extraditions avec différents pays.

Dans les cas où il n’existe pas d’accord bilatéral, les dispositions de l’article 32 du Code de procédure pénale régissent l’examen des demandes d’extradition émanant d’une autorité étrangère.

Ledit article prévoit que si aucun traité n’a été conclu, l’extradition ne peut avoir lieu qu’à trois conditions, à savoir: a) les infractions visées doivent être passibles d’une peine d’emprisonnement de deux ans au moins; b) la demande doit être présentée par le Gouvernement concerné au pouvoir exécutif, assortie du jugement de condamnation ou du mandat de dépôt et des justificatifs requis par la loi uruguayenne pour procéder à l’arrestation; c) une déclaration judiciaire doit être présentée si l’extradition est demandée avant l’audience pénale du prévenu et du ministère public.

Nonobstant ce cadre général, notamment pour ce qui est des infractions qui font l’objet du présent rapport, la loi prévoit que toutes les infractions qui relèvent, au niveau national, de la compétence des tribunaux spécialisés en matière de crime organisé, peuvent donner lieu à une extradition.

À cet égard, l’article 11 de la loi no 18.494 prévoit que, sans préjudice des dispositions de l’alinéa A de l’article 32 du Code de procédure pénale, la demande d’extradition est recevable pour les infractions visées par le décret-loi no 14.294 du 31 octobre 1974, les infractions antérieures aux infractions visées aux articles 54 à 57 dudit décret-loi et celles visées par la loi no 17.835 du 23 septembre 2004.

La loi no 18.914 (portant modification de la législation relative au blanchiment de capitaux), qui prévoit que les cas d’exploitation sexuelle à des fins commerciales relèvent de la justice pénale ordinaire (à moins qu’il n’existe des éléments prouvant l’implication d’une association de malfaiteurs de trois personnes ou plus), ayant été adoptée, le paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif habilite les juges nationaux à autoriser l’extradition.

G.Coopération judiciaire internationale

La coopération judiciaire internationale, mise en œuvre par l’intermédiaire de différents mécanismes, est la règle de conduite de l’appareil judiciaire uruguayen.

Les accords de coopération judiciaire conclus par l’Uruguay sont le principal mécanisme de mise en œuvre de cette coopération.

Toutefois, la coopération judiciaire internationale ne se limite pas à ce mécanisme, puisque les juges uruguayens dialoguent généralement avec leurs homologues étrangers dans des cadres formels et informels (ces derniers étant rapidement formalisés si des demandes officielles de coopération sont formulées).

En règle générale, la coopération est mise en œuvre par l’intermédiaire des tribunaux spécialisés et se fonde sur l’expertise et la spécialisation par domaine.

Dans le domaine spécifique de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants, la coopération avec les pays de la région est permanente.

Les accords de coopération le plus souvent utilisés dans la lutte contre ces fléaux sont ceux qui ont été conclus avec les États-Unis et l’Espagne en matière de pornographie et ceux conclus avec les pays de la région dans le domaine de la traite et du trafic.

H.Renforcement de la coopération internationale

Actions coordonnées avec d’autres États

MERCOSUR − Niñ@Sur. En 2004, le CMC (Conseil du Marché commun) du MERCOSUR a adopté une décision instituant la Réunion des hautes autorités des droits de l’homme et des chancelleries du MERCOSUR afin de veiller à ce que les institutions démocratiques jouent pleinement leur rôle et de garantir le respect, la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Les États ont ainsi décidé d’accorder une place centrale à la promotion et à la protection des droits de l’enfant et de l’adolescent et se sont engagés à garantir aux enfants la pleine jouissance et la protection intégrale des droits qui sont les leurs dans des conditions d’égalité avec le reste de la population. Les États participants ont jugé indispensable de pouvoir partager leurs données d’expérience et d’élaborer des stratégies communes pour mieux mettre en œuvre les instruments relatifs aux droits de l’homme.

La proposition appelée «Iniciativa Niñ@Sur» vise à promouvoir la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant et d’autres instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme.

Cette initiative vise également à favoriser le dialogue et la coopération entre les États en vue du suivi et de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, compte tenu du lien direct qu’ont nombre de ces objectifs avec les droits de l’enfant et de l’adolescent.

Les questions liées à la traite, au trafic, à la vente, à l’exploitation sexuelle et à la violence sexuelle occupent une place prioritaire dans le programme de travail de l’Initiative Niñ@Sur.

Parmi les actions concrètes prévues, on peut citer le projet de mise en place d’un réseau régional de lutte contre la traite d’enfants et d’adolescents aux fins d’exploitation sexuelle dans les zones frontalières.

Dans le cadre de ce projet, il est proposé d’élaborer une stratégie régionale de lutte contre la traite d’enfants et d’adolescents aux fins d’exploitation sexuelle. Cette stratégie se fonde sur des expériences validées et systématiques de mobilisation, d’organisation, de renforcement et d’intégration de réseaux et de services locaux de prévention, de prise en charge, de défense et de responsabilisation.

Cette stratégie est financée par des fonds non remboursables de la Banque interaméricaine de développement et des fonds versés par les États membres du MERCOSUR.

La stratégie est mise en œuvre dans 15 villes jumelles d’États membres du MERCOSUR; sa phase expérimentale a été lancée en Argentine, au Brésil, au Paraguay et en Uruguay. En Uruguay, les villes participantes sont Chuy, Rivera, Bella Unión et Rio Branco.

Dans ce cas précis, la coopération technique internationale permet de construire et de renforcer les mécanismes et les bases de la coordination des actions et d’échanger des informations et des données d’expérience sur les méthodes de lutte contre ce problème ainsi que sur les solutions les plus efficaces permettant de rationaliser l’investissement public.

Les pays qui participent à ce projet sont l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay.

Groupe d ’ action régionale des Amériques. Le 26 octobre 2005, à Rio de Janeiro, s’est tenue la première réunion des ministres et des hautes autorités du tourisme d’Amérique du Sud pour la prévention de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales dans le secteur touristique, qui a institué le Groupe d’action régionale des Amériques, dont les pays membres sont l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, le Chili, la Colombie, l’Équateur, le Paraguay, le Pérou, le Suriname, l’Uruguay et le Venezuela; les pays observateurs sont le Costa Rica, Cuba, Curaçao, le Mexique et la République dominicaine; et les organisations ayant le statut d’observateurs sont l’Organisation mondiale du tourisme et l’UNICEF.

Le Groupe d’action régionale des Amériques se réunit chaque année afin de prévenir et d’éliminer l’exploitation sexuelle à des fins commerciales des enfants et des adolescents dans le secteur des voyages et du tourisme.

Depuis 2005, les actions ci-après sont menées dans le cadre du Groupe d’action régionale des Amériques:

a)Organisation du cours international de formation de formateurs régionaux, avec l’appui d’experts internationaux de l’OIT, de l’OIM, de l’UNICEF et de l’ECPAT;

b)Création du Corps de formateurs régionaux, composé de membres de différentes organisations publiques et privées qui dispensent la formation dans la région, dans chaque pays membre et au sein de leur propre organisation. Le programme de formation au niveau national vise à former un nombre croissant de formateurs;

c)Recensement de tous les thèmes abordés par le cours international dans un guide destiné aux formateurs régionaux;

d)Tenue d’ateliers de simulation et d’ateliers de renforcement, sur site ou par vidéoconférence, à l’intention du Corps de formateurs régionaux (formation continue);

e)Élaboration du Plan de formations au niveau national pour la région;

f)Création du site Web et du Forum de communication du Groupe d’action régionale des Amériques, dont les liens figurent sur différents sites Web de membres ou d’organisations;

g)Enregistrement, dans les langues de la région, d’un CD de sensibilisation par le biais de la musique, qui comporte des chansons, des messages et des informations numériques. Ce CD constitue un outil qui permet d’aider le Corps de formateurs régionaux à diffuser le message dans toute la région.

Réunions des ministres de l ’ intérieur et de la justice du MERCOSUR. Dans ce domaine, l’Uruguay échange des informations concernant les données et les indicateurs relatifs aux infractions et aux violences et coopère avec les pays membres du MERCOSUR et les États associés. Concernant la traite et l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, les accords et mesures ci-après ont été adoptés.

Accord sur la lutte contre le trafic illicite de migrants entre les États parties du MERCOSUR (décision CMC 37/04).

Campagne de sensibilisation et de prévention concernant la traite des personnes (décision CMC 12/06).

Accord entre les États parties du MERCOSUR et les États associés sur la coopération régionale pour la protection des droits des enfants et des adolescents vulnérables (décision CMC 25/08)

Accord concernant la mise en œuvre de bases de données partagées sur les enfants et les adolescents vulnérables entre les États parties du MERCOSUR et les États associés (décision CMC 26/08).

Accord-cadre de coopération entre les États parties du MERCOSUR et les États associés sur la création d’équipes d’enquêtes conjointes (décision CMC 21/10).

Déclaration de Montevideo sur la lutte contre la traite dans les États du MERCOSUR et les États associés (18 novembre 2005).

Déclaration des ministres de la justice des États du MERCOSUR concernant la traite à des fins d’exploitation (7 mai 2010).

Plan d’action sur la lutte contre la traite entre les États parties du MERCOSUR et les États associés (accord 01/06).

Coopération avec I nterpol. La Direction générale chargée de la lutte contre le crime organisé et des relations avec Interpol facilite l’échange d’informations entre les pays membres d’Interpol et d’autres organismes internationaux (OIM, OIT, etc.), en particulier pour ce qui est des infractions liées au crime organisé, aux délinquants condamnés et aux personnes disparues, entre autres.

Dans le cadre de la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants, la notice verte est utilisée pour informer les autres membres d’Interpol qu’un réseau d’exploitation ou de pédophilie opère peut-être sur leur territoire ou dans leur région.

La Direction générale chargée de la lutte contre le crime organisé et des relations avec Interpol agit conformément aux dispositions de la loi no 18.026 sur la coopération avec la Cour pénale internationale dans le domaine de la lutte contre le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, dont les articles 13 et 14 portent création d’un mécanisme de protection des auteurs de plainte, des victimes et des membres de leur famille et des témoins dans le contexte de l’intervention et de l’indemnisation des victimes.

Annexes

Annexe I − Décret no 358/2004

Annexe II − Loi no 18.914

Annexe II − Loi no 18.362

Annexe III − Loi no 17.815

Annexe IV − Loi no 18.250

Annexe V − Loi no 18.026

Annexe VI − Loi no 17.343

Annexe VII − Loi no 18.494