Nations Unies

CERD/C/ARE/CO/17

Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

21 septembre 2009

Français

Original: anglais

Comité pour l ’ éliminati on de la discrimination raciale

Soixante- quinzième session3-28 août 2009

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention

Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination raciale

Émirats arabes unis

1.Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a examiné les rapports périodiques des Émirats arabes unis allant du douzième au dix-septième (CERD/C/ARE/12 à 17), présentés en un seul document, à ses 1936e et 1937e séances (CERD/C/SR.1936 et CERD/C/SR.1937), tenues les 4 et 5 août 2009. À sa 1957e séance (CERD/C/SR.1957), tenue le 18 août 2009, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du rapport de l’État partie qui a été élaboré conformément aux directives concernant l’établissement des rapports, et de ses réponses écrites à la liste des points à traiter (CERD/C/ARE/Q/17), ainsi que des informations complémentaires et des éclaircissements fournis en réponse aux questions que les membres du Comité ont posées oralement.

3.Le Comité se félicite également de la présence d’une délégation de haut niveau et des réponses franches et constructives que celle-ci a apportées aux questions et commentaires formulés par les membres du Comité.

4.Le Comité prend note du fait que les ressortissants de l’État partie sont minoritaires dans leur propre pays, puisqu’ils ne sont que 825 495 sur une population totale de 4 106 427 habitants, qu’en outre environ 85 % de la main-d’œuvre est étrangère, et qu’il en résulte un environnement tout à fait unique qui est source de difficultés pour l’État partie.

B.Aspects positifs

5.Le Comité salue la reprise par l’État partie du dialogue avec le Comité, ainsi que son attachement et son appui renouvelés aux organisations et institutions internationales.

6.Le Comité se félicite aussi de l’annonce faite par l’État partie de la visite prochaine dans le pays du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée.

7.Le Comité note avec satisfaction que, comme l’État partie l’a indiqué dans ses réponses écrites et lors de l’exposé oral, la Convention a force de loi sur son territoire, ce qui fait qu’elle peut être invoquée directement devant ses tribunaux au même titre que les lois nationales.

8.Le Comité se félicite de la signature par l’État partie de mémorandums d’accord avec plusieurs États concernant le recrutement sous contrat aux Émirats arabes unis de ressortissants de ces pays, en vue de régulariser la procédure d’entrée de ces travailleurs de façon à les informer de leurs droits et de leurs obligations découlant de leur contrat de travail.

9.Le Comité prend acte avec satisfaction de l’adoption de la loi fédérale no 51 de 2006, qui vise à lutter contre les infractions liées à la traite et à toutes les formes d’exploitation des êtres humains, notamment des femmes et des enfants, ainsi que de la création en application de cette loi d’un comité national chargé de la question de la traite des êtres humains.

C.Sujets de préoccupation et recommandations

10.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie concernant la répartition géographique et par sexe de la population qui réside sur son territoire et le nombre total de ressortissants et de non-ressortissants, mais il relève avec préoccupation que le rapport de l’État partie ne contient aucune donnée statistique sur la composition ethnique de la population, ni sur la situation socioéconomique des différents groupes qui la constituent.

Conformément aux paragraphes 10 à 12 de ses directives révisées pour l ’ établissement des rapports périodiques (CERD/C/2007/1), le Comité recommande à l ’ État partie de lui communiquer des informations sur la composition de la population, ventilées par origine nationale et ethnique, ainsi que des données statistiques sur la situation socioéconomique de s différents groupes, afin qu ’ il puisse évaluer leur situation sur les plans économique, social et culturel ainsi que le niveau de protection de leurs droits.

11.Le Comité prend note du fait que la Constitution de l’État partie est fondée sur le principe de la justice sociale et protège toute une série de droits fondamentaux. Toutefois, il est préoccupé par le fait que les non-citoyens qui se trouvent sur son territoire puissent ne pas jouir de certains droits fondamentaux.

Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir un exercice égal des droits fondamentaux par les ressortissants et les non-ressortissants dans toute la mesure prévue par le droit international.

12.Le Comité prend note acte des renseignements communiqués par l’État partie au sujet de la législation qu’il a mise en place pour interdire la discrimination, et de son affirmation selon laquelle son peuple pratique la tolérance et réprouve toutes les manifestations de discrimination. Toutefois, le Comité note avec préoccupation que la législation vise principalement la discrimination religieuse et qu’elle ne mentionne pas la discrimination raciale, notamment la discrimination fondée sur l’origine nationale.

Le Comité est d ’ avis que la discrimination raciale ou les risques de discrimination raciale existent dans toutes les sociétés . Il recommande donc à l ’ État partie d ’ adopter une législation qui interdise expressément la discrimination raciale ou de modifier les lois existantes de façon à se mettre en pleine conformité avec la Convention (art .  2).

13.Le Comité note qu’il n’existe pas dans la législation nationale de dispositions donnant effet aux prescriptions de l’article 4 de la Convention, qui fait obligation aux États parties de criminaliser la diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, l’incitation à la haine raciale, ainsi que les actes de violence ou l’incitation à de tels actes, dirigés contre toute race ou groupe de personnes d’une autre couleur ou d’une autre origine ethnique.

Le Comité appelle l ’ attention sur ses recommandations générale s I (1972), VII (198 5) et XV (1993), selon les quelle s toutes les prescriptions de l ’ article 4 sont impératives , et insiste sur le caractère préventif d ’ une législation interdisant expressément l ’ incitation à la discrimination raciale et la propagande raciste. Il recommande à l ’ État partie d ’ inclure dans sa législation nationale des dispositions qui donnent effet aux prescriptions de l ’ article 4.

14.Le Comité prend note des informations communiquées par l’État partie dans son rapport et dans les réponses écrites ainsi que des explications données par oral concernant les efforts déployés pour améliorer les conditions de vie et de travail des travailleurs étrangers engagés sous contrat, mais il demeure préoccupé par des informations contraires émanant d’autres sources qui indiquent que ces conditions ne répondent toujours pas aux normes.

Compte tenu de sa recommandation générale XXX (200 5 ) concernant l a discrimination contre les non- ressortissants, le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) Continuer à renforcer la protection de tous les travailleurs étrangers au moyen d ’ une législation appropriée et de politiques destinées à lutter contre les abus, notamment la rétention de passeports par les employeurs, le non - paiement prolongé de salaires, les retenues arbitraires sur salaire, le non - paiement d ’ heures supplémentaires et d ’ heures de travail;

b) Garantir l ’ application les lois en vigueur et renforcer les mécanismes de surveillance, tels que l ’ inspection du travail, pour ce qui est du paiement des salaires, des soins médicaux, du logement et des autres conditions de vie et de travai l de la main-d ’ œuvre étrangère ;

c) R endre les mécanismes de plainte plus efficaces et faciliter l ’ accès des travailleurs étrangers à ces mécanismes ;

d) P résenter dans son prochain rapport davantage de données statistiques sur le nombre d ’ inspections effectuées , les plaintes déposées, les enquêtes menées et les jugements rendus ainsi que , le cas échéant, d es informations sur les indemnisations accordées ( al. i, iii et iv du paragraphe e ) de l ’ article 5 , art . 6).

15.Le Comité prend note avec satisfaction des informations communiquées par l’État partie concernant les efforts qu’il a faits pour améliorer et réglementer le système de parrainage, en particulier du nouvel article 18 de la loi sur le travail, qui réglemente les relations entre les institutions, les employeurs et les travailleurs, notamment les travailleurs étrangers. Il demeure néanmoins préoccupé par les allégations selon lesquelles en dépit des efforts déployés par l’État partie, des employeurs continueraient à commettre des abus dans le cadre de ce système.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour protéger les droits des personnes recrutées selon le système du parrainage , notamment : a) de consolider sa lé gislation et ses poli tiques, selon que de besoin; b) de renforcer l ’ application des dispositions réglementaires pertinentes et de surveiller les conditions de vie et de travail des travailleurs étrangers ; et c) d ’ améliorer l ’ efficacité et la transparence des mécanismes de plainte existants. Il encourage en outre l ’ État partie à poursuivre sa coopération avec l ’ Organisation internationale du Travail pour réglementer le recrutement et les conditions de travail de s travailleurs étrangers ( al. i des paragraphes d ) et e ) de l ’ article 5 , art . 6).

16.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie dans son rapport et dans ses réponses écrites concernant les efforts continus pour améliorer la situation des travailleurs étrangers employés comme domestiques, avec notamment la mise en place, en 2007, d’un contrat de travail type pour les employés de maison qui fixe certains de leurs droits en matière de rémunération, de temps de repos, de paiement du salaire et de soins médicaux. Le Comité note en outre que l’État partie élabore actuellement un projet de loi qui permettra de réglementer de façon plus détaillée les conditions de travail de certaines catégories de travailleurs étrangers, notamment les employés de maison, et prévoira un mécanisme de plainte. Il s’inquiète toutefois de ce que les employés de maison ne sont pas couverts par la protection garantie par la loi sur le travail et continuent d’être victimes de violations de leurs droits.

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts en finalisant et en adoptant le projet de loi élaboré pour protéger les droits du travail des employés de maison, prévenir les abus et permettre à ces travailleurs de déposer facilement plainte en cas de violation de leurs droits (art . 5 et 6).

17.Le Comité prend note des renseignements communiqués par l’État partie concernant l’acquisition de la nationalité conformément aux dispositions de la législation nationale, et de l’information selon laquelle la procédure d’acquisition de la nationalité est actuellement examinée et révisée; il demeure néanmoins préoccupé par le fait qu’à l’heure actuelle, les enfants des ressortissantes des Émirats arabes unis mariées à un étranger ne peuvent en aucune circonstance obtenir la nationalité émirienne.

Le Comité rappelle le paragraphe 16 de sa r ecommandation générale XXX (2005) c oncernant la discrimination contre les non - ressortissants et recommande à l ’ État partie de songer à modifier sa législation pour permettre aux enfants de femmes émiriennes d’obtenir la nationalité de leur mère , conformément aux dispositions relatives à la non-discrimination qui figurent à l ’ alinéa iii du paragraphe d) de l ’ article 5 de la Convention .

18.Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour régulariser la situation des Bidouns (résidents non enregistrés), notamment la création d’un comité chargé de la question des sans-papiers et de l’octroi des permis de résidence, ainsi que l’octroi de la nationalité à plus de 1 200 Bidouns, mais il demeure préoccupé par la situation juridique de certains Bidouns, s’agissant notamment de leur statut d’apatride, et par les allégations faisant état d’une discrimination à leur encontre sur le marché du travail.

Le Comité recommande à l ’ État partie: a) de poursuivre l es efforts engagés pour vérifier sans discrimination la nationalité des Bidouns, et de leur accorder la nationalité émirienne dans les cas appropriés ; et b) de prendre les mesures voulues pour leur garantir l ’ accès sur un pied d ’ égalité au marché du travail (al . iii du paragraphe d) et al. i du paragraphe e) de l ’ article 5).

19.Ayant à l’esprit le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à songer à ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qu’il n’a pas encore ratifiés, en particulier ceux dont les dispositions ont un effet direct sur la question de la discrimination raciale, tels que la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990).

20.Le Comité recommande à l’État partie de tenir compte de la Déclaration et du Programme d’action de Durban adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, ainsi que du document final de la Conférence d’examen de Durban, qui s’est tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il applique la Convention dans son ordre juridique interne. Il le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations spécifiques sur les plans d’action et autres mesures adoptés pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

21. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à tenir des consultations et d’élargir le dialogue qu’il a instauré avec les organisations de défense des droits de l’homme de la société civile, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

22.Le Comité engage l’État partie à songer à faire la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention.

23.Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les modifications apportées au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptées le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties à la Convention et approuvées par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111 en date du 16 décembre 1992. À cet égard, il renvoie à la résolution 61/148 de l’Assemblée générale, par laquelle l’Assemblée a demandé instamment aux États parties à la Convention d’accélérer leurs procédures internes de ratification des modifications et d’informer par écrit le Secrétaire général, dans les meilleurs délais, de leur acceptation de ces modifications.

24.Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser ses observations finales sur ces rapports dans les langues officielles et les autres langues communément utilisées, selon le cas.

25.Le Comité, notant que l’État partie n’a pas soumis son document de base, l’engage à l’établir conformément aux directives harmonisées pour l’établissement des rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles qui concernent le document de base commun, adoptées à la cinquième Réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.4).

26.Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur modifié, le Comité prie l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations qui figurent aux paragraphes 14, 16 et 18 ci-dessus.

27.Le Comité souhaite également appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations 10, 12 et 13, et le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour appliquer ces recommandations.

28.Le Comité recommande que les dix-huitième, dix-neuvième et vingtième rapports périodiques de l’État partie soient soumis en un seul document, d’ici le 20 juillet 2013, et soient élaborés en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et que ce document porte sur tous les points soulevés dans les présentes observations finales.