Nations Unies

CED/C/NER/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

28 janvier 2020

Original : français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Rapport soumis par le Niger en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention, attendu en 2017 *

[Date de réception:1er août 2019]

Table des matières

Page

Abréviations3

Introduction5

Première partie : Cadre juridique général de l’interdiction de la disparition forcée6

A.Cadre juridique national6

B.Cadre juridique international et régional8

C.Hiérarchie des normes9

D.Non-dérogation10

E.Invocabilité et applicabilité de la Convention10

F.Autorités compétentes10

G.Cas concrets des décisions administratives ou judiciaires11

Deuxième partie : renseignement spécifiques aux articles 1 à 25 de la Convention11

Article 1 : Prohibition absolue des disparitions forcées11

Article 2 : Définition de la disparition forcée12

Article 3 : Enquête14

Article 4 : Incrimination14

Article 5 : Crime contre l’humanité14

Article 6 : Régime de responsabilité pénale15

Article 7 : Peines applicables17

Article 8 : Prescription17

Article 9 : Compétence17

Article 10 : Détention provisoire19

Article 11 : Obligation d’extrader ou de juger19

Article 12 : Dénonciation et enquête21

Article 13 : Extradition22

Article 14 : Entraide judiciaire22

Article 15 : Coopération internationale22

Article 16 : Non-refoulement23

Article 17 : Interdiction de la détention au secret23

Article 18 : Information sur la personne détenue25

Article 19 : Protection des données personnelles25

Article 20 : Restrictions au droit à l’information26

Article 21 : Remise en liberté27

Article 22 : Sanction des entraves et manquement à l’obligation d’information27

Article 23 : Formation28

Article 24 : Droit des victimes29

Article 25 : Enfant31

Abréviations

ADN

Acide Désoxyribonucléique

ANLTP/TIM

Agence Nationale de Lutte contre la Traite des Personnes et le Trafic Illicite de Migrants

CADHP

Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples

CED

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (sigle en anglais)

CNCLTP/TIM

Commission Nationale de Coordination de la Lutte contre la Traite des Personnes et le Trafic Illicite de Migrants

CDE

Convention relative aux Droits de l’Enfant

CEDEF

Convention sur l’Elimination de toutes les Formes de Discrimination à l’Egard de la Femme

CEDEAO

Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest

CERD

Convention Internationale sur l’Elimination de toutes les formes de Discrimination raciale

CICR

Comité International de la Croix-Rouge

CJM

Code de Justice Militaire

CNDH

Commission Nationale des Droits Humains

CNE

Commission Nationale d’Eligibilité au Statut de Refugiés

CP

Code Pénal

CPP 

Code de Procédure Pénale

DBC

Document de Base Commun

DUDH

Déclaration Universelle des Droits de l’Homme

FDS

Forces de Défense et de Sécurité

FSEJ

Faculté des Sciences Economiques et Juridiques

HAPD

Haute Autorité à la Protection des Données à Caractère Personnel

HCDH

Office du Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme

IDDH

Institut Danois des Droits de l’Homme

INS

Institut National de la Statistique

MGF

Mutilation Génitale Féminine

MJ

Ministère de la Justice

OCHA

Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires

OIM

Organisation Internationale pour les Migrations

OIT

Organisation Internationale du Travail

ONG

Organisation Non Gouvernementale

OPJ

Officier de Police Judiciaire

OSC

Organisations de la Société Civile

OUA

Organisation de l’Unité Africaine

PIDCP

Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

PJ

Police Judiciaire

PTF

Partenaires Techniques et Financiers

PNUD

Programme des Nations Unies pour le Développement

PV

Procès-Verbal/ Procès-verbaux

TGI

Tribunal de Grande Instance

TI

Tribunal d’Instance

UA

Union Africaine

UEMOA

Union Economique et Monétaire Ouest Africain

UNICEF

Fonds des Nations Unies pour l’Enfance

Introduction

1.La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (CED) fut adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 20 décembre 2006. Elle a été signée le 6 février 2007 par le Niger et ratifiée le 24 juillet 2015.

2.Le présent rapport est soumis au Comité des disparitions forcées, institué par l’article 26 de la Convention, conformément aux dispositions de l’article 29 prévoyant que les États parties rendent compte des mesures qu’ils ont prises pour donner effet à leurs obligations au titre de la Convention dans un délai de deux (2) ans à compter de l’entrée en vigueur de celle-ci à leur égard.

3.Le Niger soumet, par le présent document, son rapport initial conformément aux directives d’établissement des rapports adoptées par le Comité des disparitions forcées à sa deuxième session en mars 2012.

4.Ce rapport fait l’état des lieux des efforts déployés par le Niger depuis la ratification de la CED. Il met aussi en relief les réalisations et les progrès accomplis en vue de renforcer la culture de la lutte contre toutes les formes de privation de libertés pouvant conduire à la disparition forcée de personnes, pour donner plein effet aux dispositions de la Convention.

5.La production du présent rapport, qui couvre la période allant de 2015 à 2019, témoigne de la détermination de l’État à respecter ses obligations internationales. Il a été élaboré selon un processus participatif et inclusif par le Comité Interministériel chargé de la Rédaction des Rapports aux Organes des Traités et de l’Examen Périodique Universel, en tenant compte des directives en la matière. Les structures étatiques concernées par les droits consacrés par la Convention, les structures de la Société civile œuvrant dans le domaine de la promotion et de la protection des droits humains, la Commission Nationale des Droits Humains (CNDH) ont été impliquées dans le processus d’élaboration.

6.Ce processus s’est étalé sur 4 phases principales :

•Un 1er atelier d’orientation tenu les 21 et 22 février 2019, au cours duquel tous les membres du Comité Interministériel ont reçu une formation sur le contenu de la CED, les directives pour l’établissement du rapport étatique et le dialogue constructif avec le Comité. À la fin de la formation une mission de recherche et de collecte des données a été confiée à chacun des membres ;

•Un 2ème atelier de compilation et de relecture du 1er draft du rapport tenu du 16 au 18 avril 2019, regroupant tous les membres du Comité et des personnes ressources ;

•Un 3ème atelier national de validation du rapport tenu du 29 au 31 mai 2019ayant regroupé les structures étatiques, la société civile, les partenaires techniques et financiers et la CNDH ;

•L’adoption du rapport final en Conseil des Ministres le… (date à préciser après le CM).

7.Conformément aux directives, le document, outre l’introduction, comporte deux (2) parties portant sur :

•Le cadre dans lequel s’inscrit la prohibition des disparitions forcées ;

•La mise en œuvre des dispositions de la Convention.

8.En soumettant ce rapport au Comité des disparitions forcées, le Niger réaffirme son attachement aux valeurs des droits de l’homme et à la collaboration avec les organes des Nations Unies chargés de la protection des droits de l’homme.

Première partie : Cadre juridique général de l’interdiction de la disparition forcée

A.Cadre juridique national

9.Au Niger, bien que la législation interne ne soit pas explicite sur la disparition forcée, elle reconnait de façon tacite dans la Constitution, le Code pénal, le Code de procédure pénale et le Code de justice militaire, les pratiques de la disparition forcée à travers ses différentes manifestations relativement aux atteintes aux libertés des personnes.

La Constitution

10.La notion de disparition forcée n’est pas expressément consacrée dans le droit positif. Cependant, la Constitution du 25 novembre 2010 en son article 11 a, de manière péremptoire, affirmé que la personne humaine est sacrée et que l’État a l’obligation absolue de la respecter et de la protéger.

11.L’article 12 consacre le droit à l’intégrité physique et morale ainsi que le droit à la liberté et à la sécurité.

12.L’article 14 en son alinéa 2, prévoit la punition de tout individu, tout agent de l’État, qui se rendrait coupable d’actes de tortures, de sévices ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, soit de sa propre initiative, soit sur instruction.

13.L’article 15 dispose que nul n’est tenu d’exécuter un ordre manifestement illégal.

14.L’article 16 criminalise le fait de contraindre un citoyen à l’exil ou à la déportation.

15.L’article 18 consacre le principe de la légalité des délits et des peines.

Le Code pénal

16.Le Code pénal n’a pas expressément prévu la disparition forcée mais a tout de même prévu et réprimé les actes assimilables à la disparition forcée. On y relève les articles pertinents suivants :

•L’article 108 punit d’emprisonnement tout fonctionnaire public, agent ou préposé de l’administration qui aura ordonné ou fait quelque acte arbitraire ou attentatoire soit à la liberté individuelle soit aux droits civiques d’un ou plusieurs citoyens ;

•L’article 109 prévoit des dommages-intérêts pour les victimes des actes ci-dessus ;

•L’article 110 punit pour détention arbitraire tout régisseur d’établissement pénitentiaire qui aura reçu un prisonnier sans mandat ou jugement ;

•L’article 112 prévoit des sanctions pénales à l’endroit des procureurs généraux ou de la République, des substituts, des juges et des officiers de police judiciaire qui auront retenu ou fait retenir sans titre régulier de détention un individu hors des lieux déterminés par le gouvernement ou l’administration publique ;

•L’article 113 consacre les sanctions pénales encourues par les fonctionnaires publics chargés de la police administrative ou judiciaire qui auront refusé ou négligé de déférer à une réclamation légale tendant à constater les détentions illégales et arbitraires, soit dans les lieux destinés à la garde des détenus, soit partout ailleurs et qui ne justifieront pas les avoir dénoncés à l’autorité supérieure ;

•L’article 117 sanctionne tous dépositaires de l’autorité publique qui auront concerté des mesures contraires à la Constitution et aux lois ;

•L’article 208.2 assimile à un crime contre l’humanité puni de la peine de mort, la déportation, la réduction en esclavage, ou la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvements de personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d’actes inhumains, inspirés par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux et organisés en exécution d’un plan concerté à l’encontre d’un groupe de population civile.

Le Code de procédure pénale

17.Le Code de procédure pénale contient des dispositions qui permettent de protéger une personne contre les actes de disparition forcée. Il s’agit de :

•L’article 131 qui dispose :

« La détention provisoire est une mesure exceptionnelle. Elle ne peut être ordonnée ou maintenue que dans les conditions définies ci-après :

1. Lorsque la détention préventive de l’inculpé est l’unique moyen de conserver les preuves ou les indices matériels ou d’empêcher soit une pression sur les témoins ou les victimes, soit une concertation frauduleuse entre les inculpés ;

2. Lorsque cette détention est l’unique moyen pour protéger l’inculpé, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ;

3. Lorsque l’infraction, en raison de sa gravité, des circonstances de sa commission ou de l’importance du préjudice qu’elle a causé, a provoqué un trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public, auquel la détention est l’unique moyen de mettre fin… ».

•L’article 34 qui donne mandat aux procureurs généraux près les Cours d’Appel de veiller à l’application de la loi pénale sur le territoire de la République du Niger ;

•L’article 39 qui précise que le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner ;

•L’article 71 prescrivant la notification au suspect de son droit de prendre un avocat à partir de la 24eme heure de la garde à vue sous peine de nullité ;

•L’article 80 qui dispose que toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le juge d’instruction compétent. Dans ce cas, elle doit sous peine de non recevabilité de sa plainte consigner au greffe une somme présumée nécessaire pour les frais de la procédure ;

•L’article 642-1 qui renseigne que tout étranger qui hors du territoire de la République s’est rendu coupable d’un crime, soit comme auteur, soit complice, peut être poursuivi et jugé d’après les dispositions des lois nigériennes, lorsque la victime est de nationalité nigérienne ;

•L’article 642-1 bis précisant que tout étranger qui, hors du territoire de la République, s’est rendu coupable d’un acte de torture, peut être poursuivi et jugé d’après les dispositions des lois du Niger ou applicables au Niger, s’il se trouve sur le territoire ou sous la juridiction de la République et s’il n’est pas extradé vers l’État dont il est un ressortissant ou sur le territoire duquel le crime a été commis ou dont la victime est un ressortissant ;

•L’article 649-17 disposant que l’extradition ou la remise ne peut être accordée lorsque le prévenu risque la torture ou tout traitement inhumain, cruel et dégradant.

Le Code de justice militaire

18.Le Code de justice militaire (CJM) n’incrimine pas expressément la disparition forcée mais contient des dispositions générales garantissant la protection des personnes contre toute forme de disparitions forcées ou infractions voisines :

•L’article 62 prévoit qu’à l’expiration des délais de garde à vue, les personnes mises en cause doivent être présentées au commissaire du gouvernement ou à l’autorité civile compétente. Les supérieurs hiérarchiques sont avisés par écrit du transfèrement. En outre, en attendant leur mise en route, les personnes mises en cause peuvent être maintenues dans les chambres de sureté d’une caserne de gendarmerie ou dans une prison militaire ;

•L’article 63 permet au commissaire du gouvernement de dispenser les officiers de police judiciaire de la formalité de l’article 62 et dans ce cas les personnes mises en cause doivent être reconduites à l’autorité dont elles dépendent à l’expiration des délais de garde à vue. Ces supérieurs peuvent ordonner que les personnes reconduites soient déposées dans un local disciplinaire en attendant la décision à intervenir ;

•L’article 64 fait obligation aux officiers de police judiciaire militaires de mentionner dans leurs procès-verbaux, les dates et heures marquant le début et la fin des mesures de garde à vue ;

•L’article 65 précise que le contrôle de la garde à vue des personnes étrangères aux forces armées est assuré par le commissaire du gouvernement ou le juge d’instruction militaire territorialement compétent ; ces derniers peuvent déléguer ces pouvoirs respectivement au Procureur de la République ou au Juge d’Instruction dans le ressort desquels la garde à vue est exercée ;

•L’article 102 prévoit, qu’il s’agisse d’un ordre d’incarcération ou d’un mandat, l’inculpé ou le prévenu est conduit soit dans une prison militaire, soit en cas d’impossibilité dans un établissement désigné par l’autorité investie des pouvoirs de poursuites judiciaires ;

•L’article 300 fait obligation à tout chef militaire de dénoncer à sa hiérarchie toute infraction militaire dont il a connaissance ;

•L’article 317 en son point 5, érige en crime de génocide le fait, en exécution d’un plan concerté, de commettre un transfert forcé d’enfants ;

•L’article 319 érige en crime contre l’humanité les enlèvements des personnes suivis de leur disparition ;

•L’article 321 alinéa 6 érige en crime de guerre et réprime la déportation, le transfert ou le déplacement illicite, la détention illicite d’une personne civile protégée par la Convention sur la protection des personnes civiles en temps de guerre ou une personne protégée à ces mêmes égards par les protocoles I et II additionnels de Genève du 12 août 1949.

B.Cadre juridique international et régional

19.Le Niger a ratifié ou adhéré à beaucoup d’instruments juridiques internationaux ayant un lien avec les disparitions forcées, il s’agit notamment de :

•Le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (PIDCP) ratifié le 7 mars 1986 ;

•Les protocoles additionnels I et II aux conventions de Genève de 1949 ratifiés le 8 juin 1979 ;

•La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (CERD) ratifiée le 27 avril 1967 ;

•Le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) ratifié le 7 mars 1986 ;

•La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) à laquelle le Niger a adhéré le 8 octobre 1999 ;

•La Convention relative aux Droits de l’Enfant (CDE) ratifiée le 30 septembre 1990 ;

•La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CAT) à laquelle le Niger a adhéré le 5 octobre 1998 ;

•La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (CMW) à laquelle le Niger a adhéré le 18 mars 2009 ;

•La Convention relative aux Droits des Personnes Handicapées (CDPDH) ratifiée le 24 juin 2008 ;

•Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ratifié le 7 novembre 2014 ;

•La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, ratifiée le 24 juillet 2015 ;

•Le Statut de Rome créant la Cour pénale internationale, ratifié le 11 avril 2002 ;

•La Convention internationale contre la prise d’otages, ratifiée le 1er octobre 2003 ;

•La Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif, à laquelle le Niger a adhéré le 26 octobre 2004 ;

•Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ratifié le 30 septembre 2004 ;

•Les quatre Conventions de Genève (1949) sur le droit international humanitaire, succession du Niger le 16 août 1964 ;

•La Convention de l’Organisation de l’Unité Africaine sur l’élimination du mercenariat en Afrique, Libreville, 3 juillet 1977, ratifiée le 16 septembre 1980 ;

•La Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui, ratifiée le 10 juin 1977 ;

•La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, ratifiée le 21 juillet 1986 ;

•La Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, ratifiée le 11 décembre 1999 ;

•La Convention 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants, ratifiée le 4 août 2000 ;

•La Convention 111 de l’OIT concernant la discrimination (emploi et profession), adoptée en 1958, ratifiée le 23 mars 1962 ;

•La Convention no 29 de l’OIT concernant le travail forcé, ratifiée le 23 mars 1962 et son protocole de 2014 ratifié en juin 2015 ;

•Le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, ratifié le 17 mai 2004 ;

•La Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, à laquelle le Niger a adhéré le 30 septembre 2004 ;

•La Convention pour la répression de la capture illicite d’aéronefs de 1970 ;

•La Convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme de 1999 ;

•La Convention de l’UA relative à l’entraide judiciaire et à l’extradition de 2008, etc.

C.Hiérarchie des normes

20.Au Niger, les Conventions internationales régulièrement ratifiées ont force supra constitutionnelle. Ainsi en cas de contradiction entre une disposition conventionnelle et la Constitution, l’article 170 de la Constitution prévoit la modification de celle-ci.

21.Conformément à l’article 171 de la Constitution, les Traités et Accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication autorité supérieure à celles des lois, sous réserve pour chaque Accord ou Traité de son application par l’autre partie.

D.Non-dérogation

22.La non dérogation est un principe consacré par les conventions internationales auxquelles le Niger a souscrit. Ainsi, quelle que soit la gravité de la faute commise par un individu ou le caractère de la situation exceptionnelle décrétée par les autorités (état d’urgence, état de mise en garde, état de guerre) rien ne peut justifier la pratique de disparition forcée. En effet, cette volonté a été réaffirmée par le constituant nigérien qui place la protection des droits de la personne humaine parmi les premières obligations qui incombent à l’État.

E.Invocabilité et applicabilité de la Convention

23.L’article 2 du Code de procédure civile dispose : « Toute personne a le droit de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus et garantis par la Constitution, les conventions internationales, les lois et les règlements en vigueur ».

24.L’article 72 de la loi no 2018-37 du 1er juin 2018 fixant l’organisation et la compétence des juridictions au Niger prévoit également l’application des conventions internationales prioritairement aux normes internes. La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparition forcées peut ainsi être invoquée devant les juridictions pénales ou civiles et devant les autorités administratives. Cependant, une nuance doit être apportée entre les dispositions directement applicables et celles qui ont besoin de mesures pour être mises en œuvre au plan interne. Pour ces dernières, leur invocabilité est, en pratique, liée à l’adoption de dispositions légales internes de mise en œuvre.

F.Autorités compétentes

25.Les autorités judiciaires, administratives et autres, compétentes pour connaitre des questions traitées dans la Convention comprennent notamment :

•La Cour constitutionnelle, lorsqu’il s’agira de statuer sur la base de l’article 170 de la Constitution, c’est-à-dire lorsqu’un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution ou aussi lorsqu’il s’agira d’apprécier la constitutionnalité d’une loi par voie d’action ou d’exception ;

•La Haute Cour de justice chargée de juger le Président de la République pour crime de haute trahison et les membres du gouvernement pour des faits qualifiés crimes ou délits commis dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leur fonction ;

•La Cour de Cassation qui est la plus haute juridiction en matière judiciaire, chargée notamment de recevoir les pourvois en cassation contre les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions judiciaires, et d’engager des poursuites pénales contre les personnalités bénéficiant d’un privilège de juridiction ;

•Le Conseil d’État compétent pour connaitre en 1er et dernier ressort du recours pour excès de pouvoir contre les décisions rendues par les autorités administratives et aussi pour connaitre les pourvois en cassation formés contre les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions administratives ;

•Les Cours d’Appels compétentes pour recevoir les appels contre les jugements rendus en 1er ressort par les tribunaux ;

•Les Cours d’Assises chargées de juger les auteurs de crime autre que le Président de la République et les membres du gouvernement ainsi qu’il est dit ci-dessus ;

•Les Tribunaux Correctionnels et de simple police chargés de juger en 1er ressort les auteurs des délits et contraventions ;

•Le Tribunal Militaire chargé de juger les militaires et les personnes assimilées pour crime ou délit commis en temps de paix ou en temps de guerre ;

•Les Tribunaux Administratifs compétents pour connaitre en 1er ressort du contentieux administratif (plein contentieux) ;

•Le Médiateur de la République habilité à recevoir les plaintes de tout citoyen qui s’estime lésé par l’Administration pourvu que le litige n’ait pas été soumis aux juridictions ;

•La Commission Nationale des Droits Humains chargée de veiller à l’effectivité et à la promotion des droits et des libertés fondamentales ;

•Les Commissions de Discipline Administratives chargées de sanctionner les fautes administratives commises par les agents de l’État ;

•Les Inspections Générales de Service des Agents de l’État chargés de relever les manquements à leurs devoirs et proposer des sanctions ;

•Les Inspections Générales des Services de l’Armée de la Gendarmerie chargées de veiller au respects des règles d’éthique, de discipline et de déontologie des Forces armées nationales et de la gendarmerie ;

•L’Inspection Générale des Services de Sécurité qui veille aux règles d’éthique, de déontologie et de discipline des agents de la Police et de la Garde Nationale ;

•L’Inspection générale des services judiciaires et pénitentiaires, etc.

G.Cas concrets des décisions administratives ou judiciaires

26.En l’état actuel de la jurisprudence nationale, il n’existe pas de décisions judiciaires dans lesquelles les dispositions de la Convention ont été appliquées stricto sensu en dehors des cas nombreux relatifs aux atteintes aux libertés individuelles tels que les arrestations et séquestrations arbitraires. Il n’existe pas aussi de décisions judiciaires dans lesquelles des violations de la Convention ont été établies.

Deuxième partie : Renseignements spécifiques aux articles 1 à 25 de la Convention

Article 1 : Prohibition absolue des disparitions forcées

27.Le Niger est partie à la Convention internationale sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et n’a pas émis de réserves à cet instrument.

28.La Constitution a réaffirmé dans son préambule qui a valeur constitutionnelle, la résolution du peuple nigérien souverain à bâtir un État de droit garantissant, d’une part, l’exercice des droits collectifs et individuels, la liberté, la justice, la dignité, l’égalité, la sûreté et le bien être comme valeurs fondamentales de la société et, d’autre part, l’alternance démocratique et la bonne gouvernance.

29.Le même préambule, proclame l’attachement du peuple nigérien aux principes de la démocratie pluraliste et aux droits humains tels que définis par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) de 1948, le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques de 1966, le Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels de 1966 et la Charte africaine des droits de l’Homme et des Peuples de 1981.

30.On peut retenir dans la Constitution les articles pertinents ci-après :

•Article 11. La personne humaine est sacrée. L’État a l’obligation absolue de la respecter et de la protéger ;

•Article 12. Chacun a droit à la liberté et à la sécurité dans les conditions définies par la loi ;

•Article 16. Aucun citoyen ne peut être contraint à l’exil ou faire l’objet de déportation. La contrainte à l’exil ou la déportation de citoyen est considérée comme un crime contre la nation et puni conformément à la loi ;

•Article 32. L’État reconnaît et garantit la liberté d’aller et venir dans les conditions définies par la loi.

31.La Constitution n’a prévu aucune exception au droit de ne pas être l’objet d’une disparition forcée. Les circonstances exceptionnelles n’en sont pas une. Lorsque ces circonstances sont décrétées, la Constitution n’est pas suspendue et aucun organe de contrôle n’est supprimé.

32.Aux termes de l’article 67, lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité du territoire national ou l’exécution des engagements internationaux sont menacés d’une manière grave et immédiate, et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend des mesures exceptionnelles exigées par ces circonstances après consultation officielle du Premier Ministre, du Président de l’Assemblée Nationale et du Président de la Cour Constitutionnelle. Il en informe la Nation par un message. L’Assemblée Nationale se réunit de plein droit si elle n’est pas en session. Aucune institution de la République ne peut être dissoute ou suspendue pendant l’exercice des pouvoirs exceptionnels.

33.Les mesures exceptionnelles doivent être inspirées par la volonté d’assurer aux pouvoirs publics constitutionnels, dans les moindres délais, les moyens d’accomplir leur mission. L’Assemblée Nationale apprécie à la majorité absolue de ses membres la durée de l’exercice des pouvoirs exceptionnels et y met fin en cas d’abus.

34.Aussi aucune disposition législative ou règlementaire n’autorise une disparition forcée et si cela arrivait ce serait constitutif d’un acte manifestement illégal engageant la responsabilité pénale de l’auteur et du complice conformément à l’article 42 du Code pénal qui dispose en substance que n’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives et règlementaires ou commandé par l’autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal.

35.De même tout agent de l’État a le devoir absolu de ne pas exécuter un ordre manifestement illégal qu’il reçoit de son supérieur hiérarchique. Bien que le CJM prévoit que les militaires doivent obéissance aux ordres de leurs supérieurs et sont responsables de l’exécution des missions qui leur sont confiées, il ne peut leur être ordonné et ils ne peuvent accomplir des actes qui sont contraires aux lois, aux coutumes de la guerre et aux conventions internationales.

36.En somme tout fonctionnaire civil ou militaire a le droit et l’obligation de ne pas obéir à l’ordre de commettre ou de participer, de quelque manière que ce soit, au crime de disparition forcée, un tel ordre étant manifestement illégal.

37.En outre, ni l’état d’urgence ni aucune autre circonstance exceptionnelle n’est de nature à justifier que soient commis des actes de disparitions forcées.

Article 2 :Définition de la disparition forcée

38.Il n’y a pas de définition, en droit interne, de la disparition forcée au sens de la Convention. Mais, la Constitutionconsacre des dispositions qui se rapportent aux situations pouvant relever de la disparition forcée.

39.En effet l’article 11 précise : « La personne humaine est sacrée. L’État a l’obligation absolue de la respecter et de la protéger ». Dans le même sens, l’article 12 consacre à chacun le droit à la vie, à la santé, à l’intégrité physique et morale, à la liberté, à la sécurité dans les conditions définies par la loi et fait obligation à l’État d’assurer à chacun la satisfaction des besoins et services essentiels ainsi qu’un plein épanouissement. L’article 14 quant à lui, établit que : « Nul ne sera soumis à la torture, à l’esclavage ni à des sévices ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Tout individu, tout agent de l’État, qui se rendrait coupable d’actes de torture, de sévices ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, soit de sa propre initiative, soit sur instructions, sera puni conformément à la loi ».

40.Enfin, l’article 16 dispose : « Aucun citoyen ne peut être contraint à l’exil ou faire l’objet de déportation. La contrainte à l’exil ou la déportation de citoyen est considérée comme un crime contre la nation et punie conformément à la loi ».

41.Le Code pénal en ses articles 208.1 à 208.4 interdit la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il incrimine spécifiquement la pratique massive et systématique d’enlèvement de personnes suivi de leur disparition (art. 208.2), l’arrestation et la séquestration arbitraires des personnes (art. 265 à 268).

42.Aux termes de l’article 248 du CP « Les coupables d’enlèvement, de recel ou de suppression d’enfant, de substitution d’un enfant à un autre ou de supposition d’enfant à une femme qui ne sera pas accouchée, seront punis d’un emprisonnement de deux à huit ans. La tentative sera punie comme le délit lui-même ».

43.L’article 255. § 1 du CP dispose : « Quiconque aura, par fraude ou violence, enlevé ou fait enlever des mineurs de moins de 18 ans, ou les aura entraînés, détournés ou déplacés, ou les aura fait entraîner, détourner ou déplacer des lieux où ils étaient mis par ceux à l’autorité ou à la direction desquelles ils étaient soumis ou confiés, sera puni d’un emprisonnement de deux à moins de dix ans. La tentative sera punie comme le délit lui-même ». L’article 256 ajoute que « si le coupable s’est fait payer ou a eu pour but de se faire payer une rançon par les personnes sous l’autorité ou la surveillance desquelles le mineur était placé, la peine sera celle de l’emprisonnement à vie ».

44.L’article 270. 3 §5 du CP qualifie de délit d’esclavage, l’enlèvement des enfants prétendus esclaves pour les mettre en servitude. La peine sera celle d’un emprisonnement de dix à trente ans si le mineur est retrouvé vivant avant qu’ait été rendu l’arrêt de condamnation. L’article 257 ajoute que l’enlèvement emportera la peine de mort s’il a été suivi de la mort du mineur.

45.L’article 258. § 1 du CP prévoit que celui qui, sans fraude ni violence aura enlevé ou détourné, ou tenté d’enlever ou de détourner un mineur de moins de 18 ans, sera puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 10 000 à 100 000 francs ou de l’une de ces deux peines seulement.

46.L’article 324 du CP retient que lorsqu’un vol aura été précédé ou suivi de viol, d’enlèvement de femmes, d’enfants ou de toute autre personne ou d’usage d’arme à feu la peine de mort sera encourue.

47.L’article 265 du CP punit d’un emprisonnement d’un à moins de dix ans, ceux qui sans ordre des autorités constituées, et hors les cas où la loi ordonne de saisir des prévenus, auront arrêté, détenu ou séquestré des personnes quelconques. Quiconque aura prêté un lieu pour exécuter la détention ou séquestration subira la même peine. Il ne pourra être fait application pour le présent article des dispositions relatives aux circonstances atténuantes et au sursis.

48.L’article 266 du CP précise que la peine sera d’un emprisonnement de dix à vingt ans dans chacun des cas suivants :

•Si l’arrestation a eu lieu en vertu d’un faux ordre de l’autorité publique ;

•Si elle a été exécutée avec un faux costume ;

•Si la victime a été arrêtée ou détenue avec menace de mort.

49.L’article 267 du CP dispose que dans les cas prévus aux articles précédents, si les personnes arrêtées, détenues ou séquestrées ont été soumises à des tortures corporelles, la peine sera celle de la mort.

50.L’article 268 du CP énonce que la peine sera réduite à celle d’un emprisonnement de six mois à cinq ans si les coupables des délits mentionnés à l’article 265, non encore poursuivis de fait, ont rendu la liberté à la personne arrêtée, séquestrée ou détenue, avant le dixième jour accompli depuis celui de l’arrestation, détention ou séquestration.

51.Les articles 269 et 270 punissent quant à eux l’aliénation de la liberté d’autrui.

Article 3 : Enquête

52.En dépit de l’absence d’une loi spécifique réprimant la disparition forcée au sens de la Convention, des mesures appropriées sont prises pour enquêter et poursuivre les responsables des actes qui lui sont assimilés, commis par des personnes ou des groupes de personnes agissant sans l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, et pour traduire les responsables en justice. Toutes les dispositions répressives citées ci-dessus s’appliquent indistinctement que les auteurs soient des particuliers agissant d’eux-mêmes ou qu’ils soient des agents de l’État agissant au nom de ce dernier.

53.Le Code de procédure pénale (CPP) organise l’enquête, l’instruction et le jugement des présumés auteurs. Pour ce qui concerne l’enquête, la police judicaire, sous l’autorité du Procureur de la République, est chargée de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs. En cas d’ouverture d’une information les OPJ exécutent les délégations du Juge d’instruction.

54.Les auteurs présumés sont jugés par les juridictions compétentes tel que spécifié au paragraphe 24 ci-dessus avec toutes les garanties d’un procès équitable.

Article 4 : Incrimination

55.La disparition forcée n’est pas encore définie séparément en tant qu’infraction qualifiée de façon à la distinguer des autres infractions qui peuvent lui être rattachées mais en sont par nature différentes, comme l’enlèvement, l’enlèvement d’enfants, l’arrestation arbitraire, la privation arbitraire de liberté, la torture et la privation de la vie ou des infractions analogues qui sont prévues dans le Code pénal et d’autres textes. Cependant les mesures sont en train d’être prises en vue de l’adoption d’une loi spécifique à la disparition forcée.

Article 5 : Crime contre l’humanité

56.L’article 208.2 du CP érige en crime contre l’humanité l’enlèvement d’une personne suivi de sa disparition. Mais la définition de la disparition forcée en tant que crime contre l’humanité, selon le droit international, c’est-à-dire commis en tant que pratique généralisée ou systématique contre la population civile n’est pas encore établie dans la législation interne.

57.La disparition forcée est considérée comme crime contre l’humanité par le statut de Rome portant création de la Cour pénale internationale. Il la cite parmi les actes constitutifs de crime contre l’humanité commis de façon généralisée et systématique contre la population civile.

58.Au sens de l’article 7 du statut de Rome par disparition forcée, « On entend les cas où des personnes sont arrêtées, détenues ou enlevées par un État ou une organisation politique ou avec l’autorisation, l’appui ou l’assentiment de cet État ou de cette organisation, qui refuse ensuite d’admettre que ces personnes sont privées de liberté ou de révéler le sort qui leur est réservé ou l’endroit où elles se trouvent, dans l’intention de les soustraire à la protection de la loi pendant une période prolongée ».

59.Au Niger, cette incrimination est prise en compte par l’article 208.2 du Code pénal qui dispose : « Constituent des crimes contre l’humanité, la déportation, la réduction en esclavage ou la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvements de personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d’actes inhumains, inspirés par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux et organisés en exécution d’un plan concerté à l’encontre d’un groupe de population civile ».

60.Il ressort que l’article 208.2 cite parmi les actes constitutifs du crime contre l’humanité l’enlèvement de personnes suivi de leur disparition, mais encore faudrait-il que ces actes soient commis en exécution d’un plan concerté et à l’encontre d’un groupe de population civile. Les crimes contre l’humanité au sens des dispositions de l’article 208.2 alinéa 2 sont punis de la peine de mort. Le Code pénal consacre en son article 208.8 alinéa 1 l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité tant du point de vue de l’action publique que de la peine prononcée et par conséquent du crime de disparition forcée. Ainsi, il dispose : « L’action publique relative aux crimes prévus au présent chapitre ainsi que les peines prononcées sont imprescriptibles ».

Article 6 : Régime de responsabilité pénale

61.En droit positif nigérien la responsabilité pénale des auteurs et complices d’une infraction est encadrée par la Constitution, le Code pénal et le Code de justice militaire.

62.Aux termes de l’article 14 de la Constitution « ...tout individu, tout agent de l’État, qui se rendrait coupable d’actes de torture, de sévices ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans l’exercice de ses fonctions, soit de sa propre initiative, soit sur instructions, sera puni conformément à la loi ».

63.Selon l’article 41 du Code pénal, nul n’est responsable pénalement que de son propre fait. L’article 42 du même code dispose : « N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ».

64.Aux termes de l’article 317 du CJM, constitue un génocide le fait, en exécution d’un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux.

65.L’article 319 du même code indique : « Constituent des crimes contre l’humanité, la déportation, la réduction en esclavage ou la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires d’enlèvements de personnes suivis de leur disparition ».

66.Il découle de la lecture combinée de ces différents textes que tout acte commis par quiconque en dehors du cadre légal entraîne automatiquement la responsabilité de son auteur.

67.La Constitution est le principal document que peut invoquer tout subordonné pour refuser d’exécuter un ordre manifestement illégal (art. 15). À cela il faut ajouter la Convention elle-même à laquelle la Constitution confère une autorité supérieure aux lois (art. 171).

68.Le moyen de défense fondé sur la violation de l’article 15 de la Constitution qu’aura à soulever le subordonné qui refuse d’exécuter un ordre manifestement illégal, va toujours prospérer.

69.D’après l’article 108 du Code pénal : « Tout fonctionnaire public, agent ou préposé de l’administration qui aura ordonné ou fait quelque acte arbitraire ou attentatoire soit à la liberté individuelle, soit aux droits civiques d’un ou plusieurs citoyens, soit à la Constitution, sera puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et pourra en outre, conformément aux dispositions de l’article 25, être privé de tout ou partie des droits énoncés à l’article 21. Si néanmoins, il justifie avoir agi par ordre de ses supérieurs pour des objets du ressort de ceux-ci, sur lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, il sera exempt de la peine, laquelle dans ce cas sera appliquée seulement aux supérieurs qui auront donné l’ordre ».

70.Dans tous les cas, lorsque l’ordre est manifestement illégal, ce sont les dispositions de l’article 42 alinéa 2 qui s’appliquent.

71.Aux termes de l’article 110 du Code pénal : « Les régisseurs de prison qui auront reçu un prisonnier sans mandat ou jugement ou, quand il s’agira d’une expulsion ou d’une extradition sans ordre provisoire du gouvernement, ceux qui l’auront retenu ou refusé de le représenter à l’officier de police ou au porteur de ses ordres, sans justifier de la défense du procureur de la République ou du juge, ceux qui auront refusé d’exhiber leurs registres à l’officier de police seront, comme coupables de détention arbitraire, punis de six mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 10 000 à 150 000 francs ou de l’une de ces deux peines seulement ».

72.L’article 112 du Code pénal dispose : « Seront punis d’un emprisonnement d’un à cinq ans les procureurs généraux ou de la République, les substituts, les juges ou les officiers de police judiciaire qui auront retenu ou fait retenir sans titre régulier de détention un individu hors des lieux déterminés par le gouvernement ou l’administration publique ».

73.L’article 113 du Code pénal dispose : « Les fonctionnaires publics chargés de la police administrative ou judiciaire, qui auront refusé ou négligé de déférer à une réclamation légale tendant à constater les détentions illégales et arbitraires, soit dans les lieux destinés à la garde des détenus, soit partout ailleurs, et qui ne justifieront pas les avoir dénoncés à l’autorité supérieure, seront punis d’un emprisonnement de six mois à deux ans ».

74.Selon l’article 265 du Code pénal : « Seront punis d’un emprisonnement de un à moins de dix ans, sans ordre des autorités constituées, et hors les cas où la loi ordonne de saisir des prévenus, auront arrêté, détenu ou séquestré des personnes quelconques. Quiconque aura prêté un lieu pour exécuter la détention ou séquestration subira la même peine. Il ne pourra être fait application pour le présent article des dispositions relatives aux circonstances atténuantes et au sursis ».

75.Quant à l’article 266 du Code pénal, il prévoit :

« La peine sera d’un emprisonnement de dix à vingt ans dans chacun des cas suivants :

- Si l’arrestation a eu lieu en vertu d’un faux ordre de l’autorité publique ;

- Si elle a été exécutée avec un faux costume ;

- Si la victime a été arrêtée ou détenue avec menace de mort ».

76.Enfin, l’article 267 du Code pénal énonce que : « Dans les cas prévus aux articles précédents, si les personnes arrêtées, détenues ou séquestrées ont été soumises à des tortures corporelles, la peine sera celle de la mort ».

77.Le statut général de la Fonction Publique relativement à la conduite de ses agents prévoit que l’obligation d’obéissance hiérarchique connaît des limites. C’est le cas lorsque l’ordre est étranger aux missions du service, lorsque l’exécution de l’ordre constitue une infraction pénale, lorsque l’ordre est manifestement illégal et compromet gravement un intérêt public. L’agent qui exécute un tel ordre engage sa responsabilité personnelle. En outre, le supérieur hiérarchique qui a connaissance des actes illégaux commis par ses subordonnés engage sa responsabilité personnelle s’il n’entreprend rien pour les faire cesser.

78.Dans le même sens, les différents codes de conduite des Forces de Défense et de Sécurité (FDS) prévoient que le subordonné est tenu de se conformer aux instructions de l’autorité supérieure, sauf dans le cas où l’ordre est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. Dans ce cas, le subordonné a le devoir de faire part de ses objections à l’autorité qui l’a donné, en indiquant expressément la signification illégale qu’il attache à l’ordre litigieux. Si l’ordre est maintenu et si, malgré les explications ou l’interprétation qui lui en ont été données, le subordonné persiste dans sa contestation, il doit en référer à la première autorité supérieure qu’il a la possibilité de joindre. Il doit être pris acte de son opposition. Tout refus d’exécuter un ordre qui ne répondrait pas aux conditions ci-dessus engage la responsabilité de l’intéressé.

79.L’agent qui refuse d’exécuter un ordre manifestement illégal n’encourt aucune sanction. Il dispose d’un recours hiérarchique devant le supérieur immédiat du donneur d’ordre ou d’un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’État s’il écope d’une quelconque sanction suite à son refus d’exécuter l’ordre manifestement illégal.

80.Il convient également de noter que toute arrestation ou détention arbitraire qui peut être qualifiée de disparition forcée est manifestement illégale et qu’aucun subordonné ne peut être obligé d’exécuter un tel ordre.

Article 7 : Peines applicables

81.Le Niger réaffirme dans sa Constitution son attachement au principe de l’État de droit. Le Code pénal ne fait pas cas de la disparition forcée de façon spécifique et ne fait pas de référence au cas où la victime est une femme enceinte. Par contre, l’article 324 du Code pénal fait cas de l’enlèvement des femmes et des enfants.

82.Les peines prévues pour les infractions voisines citées plus haut sont la peine de mort, l’emprisonnement à vie, l’emprisonnement de 1 à 5 ans, de 1 à moins de 10 ans, de 10 à 20 ans selon la gravité des actes commis.

83.Des circonstances atténuantes et des causes d’exemption de peines sont prévues lorsque la victime est libérée plus ou moins promptement ou lorsque les auteurs se sont dénoncés. Des circonstances aggravantes sont encourues en cas de torture, de mort, de maladie ou mutilation grave de la victime.

84.Comme exemples de circonstance aggravante, il faut retenir les cas lorsque l’arrestation ou l’enlèvement est exécuté soit avec port d’un uniforme ou d’un insigne réglementaire ou paraissant tel, soit sous un faux nom ou sur un faux ordre de l’autorité publique ou lorsque la personne enlevée, arrêtée, détenue ou séquestrée a été soumise à des tortures corporelles. Si les tortures ont entraîné la mort, la mutilation d’un organe ou toute infirmité permanente, les coupables sont punis de mort.

Article 8 : Prescription

85.La législation nigérienne ne prévoit pas de délai pour l’infraction de disparition forcée en tant que telle dans la mesure où cette infraction n’est pas encore prévue au Code pénal. Cependant, comme mentionné plus haut à l’article 5, l’article 208 du Code pénal inclut la disparition forcée parmi les crimes contre l’humanité. Le même code en son article 208.8 prévoit expressément l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité. De même, le Niger a ratifié le traité de Rome sur la CPI qui prévoit l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité et l’Assemblée Nationale vient d’autoriser la ratification le 26 avril 2018 de la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.

86.Dans la législation nigérienne, les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles selon les dispositions de l’article 208.8 du Code pénal, mais il n’existe pas de disposition qui mentionne expressément que le début de la disparition forcée ne soit pas pris comme point de départ pour appliquer la prescription conformément aux dispositions de la Convention.

87.Pour le délai de prescription de la peine, le Code de procédure pénale prévoit qu’il est de 5 ans pour les délits, 20 ans pour les crimes, à compter du jour où la condamnation est devenue définitive.

Article 9 : Compétence

88.La législation nigérienne a établi la compétence des juridictions nationales aux fins de connaître de toute infraction dont celles assimilables à la disparition forcée, commise sur son territoire ou à bord d’aéronefs ou de navires immatriculés au Niger, ou dont l’auteur présumé est l’un de ses nationaux ou quand la personne victime est l’un de ses nationaux. Ces critères de compétence se retrouvent notamment dans le Code de procédure pénale en ses articles 642 et suivants et dans l’ordonnance no 2010-86 du 16 décembre 2010 relative à la lutte contre la traite des personnes en son article 33. Ainsi tout ressortissant du Niger qui, en dehors du territoire national s’est rendu coupable d’un fait qualifié crime puni par la loi du Niger, peut être poursuivi et jugé par les juridictions du Niger. Tout ressortissant du Niger qui, en dehors du territoire national, s’est rendu coupable d’un fait qualifié délit par la loi du Niger, peut être poursuivi et jugé par les juridictions du Niger si le fait est puni par la législation du pays où il a été commis même dans le cas où l’auteur du fait n’a acquis la qualité de national du Niger que postérieurement au fait qui lui est imputé.

89.Selon la loi no 2016-21 du 16 juin 2016 modifiant et complétant le Code de procédure pénale, tout étranger qui, hors du territoire de la République, s’est rendu coupable d’un acte de torture, peut être poursuivi et jugé, d’après les dispositions des lois du Niger, s’il se trouve sur le territoire ou sous la juridiction de la République et s’il n’est pas extradé vers l’État dont il est un ressortissant ou sur le territoire duquel le crime a été commis ou dont la victime est un ressortissant.

90.Quiconque s’est, sur le territoire de la République, rendu complice d’un crime ou d’un délit commis à l’étranger, peut être poursuivi et jugé par les juridictions du Niger si le fait est puni à la fois par la loi étrangère et par la loi du Niger, à la condition que le fait qualifié crime ou délit ait été constaté par une décision définitive de la juridiction étrangère. En cas de délit commis contre un particulier, la poursuite ne peut être intentée qu’à la requête du ministère public ; elle doit être précédée d’une plainte de la partie offensée ou d’une dénonciation officielle à l’autorité du Niger par l’autorité du pays où le fait a été commis.

91.En cas de poursuite contre un étranger placé en détention provisoire, il bénéficie du droit à la protection consulaire garanti par l’article 36 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963. Ainsi le Ministère de la Justice informe le Ministère en charge des Affaires Etrangères et de la Coopération du placement en détention d’un étranger dans une affaire quelconque, et ce dernier saisit à son tour les autorités consulaires ou diplomatiques du pays dont le détenu est le national pour notification.

92.Le Niger est partie à plusieurs conventions et accords qui prévoient l’entraide judiciaire et l’extradition, dont voici quelques exemples :

•Convention de coopération judiciaire en matière pénale entre la République du Niger et la Grande Jamahiriya Arabe Libyenne Populaire signée le 2 mai 2008 ;

•Convention de coopération judiciaire entre la République du Niger et la République Algérienne Démocratique et Populaire signée en 1984 ;

•Convention de coopération judiciaire entre la République du Niger et la République du Mali signée le 22 avril 1994 ;

•Accord de coopération judiciaire entre les Républiques du Mali, du Niger et du Tchad signé le 9 mai 2017 ;

•Convention générale en matière de justice entre la République du Niger et la République du Mali signée en 1960 ;

•Accord de coopération judiciaire entre le Niger et le Nigeria signé le 18 juillet 1990 ;

•Convention d’extradition judiciaire entre le Gouvernement du Niger et la République française signée le 5 juin 2018 ;

•Convention générale de coopération en matière pénale de l’OUA de 1961 ;

•Accord de coopération judiciaire entre le Gouvernement du Niger et celui de la République Populaire de Chine signé en 2001 ;

•Convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République du Niger et le Gouvernement de la République française signé le 5 juin 2018 ;

•Convention de coopération judiciaire entre la République du Niger et la République française signée en 1977 ;

•Accord de coopération entre l’ONU et la République du Niger relatif à la poursuite pénale des membres de DAECH ;

•Convention relative à l’entraide judiciaire en matière pénale entre États membres de la CEDEAO signée en 1992 ;

•Convention d’extradition de la CEDEAO de 1994.

93.Le Code de procédure pénale en ces articles 649.1 à 649.42 fixent les règles générales relative à l’extradition.

94.Le Niger ne dispose pas d’exemples d’affaires comportant l’infraction de disparition forcée dans lesquelles une demande d’extradition judiciaire a été présentée par l’État partie ou lui a été présentée.

Article 10 : Détention provisoire

95.Toute personne convaincue de disparition forcée peut, sur la base des dispositions pénales nationales examinées plus haut, être poursuivie et, donc être détenue. La détention provisoire est strictement encadrée par le Code de procédure pénale pour toutes les infractions.

96.L’article 131 du CPP dispose : « La détention provisoire est une mesure exceptionnelle. Elle ne peut être ordonnée ou maintenue que dans les conditions définies ci-après :

1. Lorsque la détention préventive de l’inculpé est l’unique moyen de conserver les preuves ou les indices matériels ou d’empêcher soit une pression sur les témoins ou les victimes, soit une concertation frauduleuse entre les inculpés ;

2. Lorsque cette détention est l’unique moyen pour protéger l’inculpé, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ;

3. Lorsque l’infraction, en raison de sa gravité, des circonstances de sa commission ou de l’importance du préjudice qu’elle a causé, a provoqué un trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public, auquel la détention est l’unique moyen de mettre fin. L’inculpé peut se faire assister par un avocat... ».

97.La durée de la détention provisoire est strictement limitée. Elle ne peut excéder une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits reprochés à l’inculpé et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité. En matière correctionnelle, lorsque le maximum de la peine prévue par la loi est inférieur ou égal à 3 ans d’emprisonnement, l’inculpé domicilié au Niger ne peut être détenu plus de six mois après sa première comparution devant le juge d’instruction s’il n’a pas été déjà condamné soit pour crime, soit pour délit à un emprisonnement de plus de trois ans sans sursis. Dans les autres cas, l’inculpé ne peut être détenu plus de six mois renouvelables une seule fois par ordonnance motivée du juge d’instruction.

98.En cas de poursuite pour crime, l’inculpé ne peut être maintenu en détention au-delà de 18 mois. Toutefois, le juge d’instruction peut, à l’expiration de ce délai décider de prolonger la détention pour une durée qui ne peut être supérieure à 12 mois par une ordonnance non renouvelable selon la même procédure.

99.Les dispositions relatives à la limitation de la durée de la détention provisoire ne s’appliquent pas en cas de terrorisme, meurtre, assassinat, parricide, empoisonnement ainsi qu’aux vols criminels et aux détournements de deniers publics.

100.La mise en liberté peut être demandée à tout moment par le détenu ou par le parquet ou être ordonnée d’office par le juge qui peut l’assortir de certaines conditions.

Article 11 : Obligation d’extrader ou de juger

101.La Constitution du Niger en son article 117 prescrit que la justice est rendue sur le territoire national au nom du peuple et dans le strict respect de la règle de droit, ainsi que des droits et libertés de chaque citoyen.

102.L’extradition est régie par les articles 649-1 et suivants du CPP et par les Conventions et accord internationaux. Le principe « aut dedere aut judicare » connait une pleine application au Niger.

103.Les autorités compétentes pour enquêter sur les faits présumés de disparition forcée et poursuivre ceux qui en sont soupçonnés sont:

•Les officiers de police judiciaires (OPJ) prévus à l’article 16 du CPP à savoir : les procureurs de la République et leurs substituts, les juges d’instructions, les juges d’instance, les gouverneurs, les préfets, le directeur général de la police nationale et son adjoint, les officiers et gradés de la gendarmerie, les commissaires et inspecteurs principaux de police, les officiers de paix et officiers de police, les officiers de la garde nationale du Niger, les sous-officiers de la garde nationale du Niger ayant au moins trois ans de service dans leurs corps et ayant suivi une formation de préparation à la qualité d’OPJ, les maires et leurs adjoints ;

•Les procureurs généraux près les Cours d’Appel chargés aux termes de l’article 34 du CPP de veiller à l’application de la loi pénale sur le territoire de la République du Niger ;

•Le Ministre de la Justice en vertu de l’article 35 du CPP, pour dénoncer au procureur général, les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre d’engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions que le ministre juge opportunes.

104.La loi no 2003-010 du 11 mars 2003 portant Code de justice militaire consacre la compétence des autorités militaires pour mener des enquêtes et engager des poursuites en cas d’infractions assimilables à la disparition forcée.

105.Ainsi, l’article 3 du Code de justice militaire prévoit que leMinistre chargé de la Défense Nationale est investi des pouvoirs de poursuites judiciaires militaires et que les Ministres en charge de la tutelle des personnels des forces de défense et de sécurité autres que les forces armées nationales exercent les mêmes pouvoirs à l’égard de ces personnels.

106.Les juges militaires sont nommés par décret du président de la République après avis du Conseil Supérieur de la Défense Nationale pour une durée de trois ans renouvelable (art.13 CJM), les fonctions de juge d’instruction sont exercées par des juges militaires nommés dans les mêmes conditions que les juges (art.17 CJM). Toutes ces fonctions sont aussi exercées par des juges civils à titre transitoire.

107.Le commissaire du gouvernement est le chef du parquet ; il est choisi parmi les officiers supérieurs en activité et nommé par décret du Président de la République sur proposition du Ministre chargé de la Défense Nationale pour une durée de deux ans renouvelables (art.20 et 21).

108.Les règles de preuves relatives aux poursuites et à la condamnation sont appliquées dans les mêmes conditions que pour toute infraction de droit commun de caractère grave ; ces règles sont appliquées selon la même rigueur qu’il s’agisse d’un national ou d’un étranger. Cela est attesté par la Constitution qui en son article 42 alinéa 2 dispose que les ressortissants des autres pays bénéficient sur le territoire de la République du Niger des mêmes droits et libertés que les ressortissants nigériens dans les conditions déterminées par la loi.

109.La législation interne a prévu plusieurs mesures garantissant le droit à un procès équitable pour le suspect à tous les stades de la procédure à savoir:

•Le droit de communiquer avec un conseil: l’article 3 de la loi organique no 2018-37 du 1erjuin 2018 fixant l’organisation et la compétence des juridictions dispose qu’en toute matière, nul ne peut être jugé sans être en mesure de présenter ses moyens de défense. Les avocats ont libre accès devant toutes les juridictions. La défense et le choix du défenseur sont libres ;

•L’article 71 du Code de procédure pénale prescrit la notification au suspect de son droit de prendre un avocat à partir de la 24e heure de la garde à vue sous peine de nullité. Cette disposition est d’ailleurs rendue caduque par le règlementno 05/CM/UEMOA du 2 août 2015 relatif à l’harmonisation des règles régissant la profession d’avocat dans l’espace UEMOA qui prescrit l’assistance de l’avocat dès l’interpellation ;

•L’article 20 alinéa 1 de la Constitution du 25 novembre 2010 pose le principe de la présomption d’innocence en ces termes: « Toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d’un procès public durant lequel toutes les garanties nécessaires à sa libre défense lui auront été assurées ».

•Le droit à l’égalité devant les tribunaux est consacré par la Constitution en ses articles 8 alinéa 1 et 12 alinéa 3, ainsi que par les instruments juridiques régionaux et internationaux relatifs à la défense des droits de l’homme régulièrement ratifiés par le Niger.

110.Le titre IX du Code de procédure pénale du Niger consacre l’uniformité des règles de preuve appliquées aux poursuites et aux condamnations aux suspects nationaux et étrangers:

•L’article 642 CPP dispose que tout ressortissant du Niger qui, en dehors du territoire de la République, s’est rendu coupable d’un fait qualifié crime puni par la loi du Niger, peut être poursuivi et jugé par les juridictions du Niger;

•L’article 642-1 renseigne que tout étranger qui hors du territoire de la République s’est rendu coupable d’un crime, soit comme auteur, soit comme complice, peut être poursuivi et jugé d’après les dispositions des lois nigériennes, lorsque la victime est de nationalité nigérienne ;

•L’article 642-1bis précise que tout étranger qui, hors du territoire de la République, s’est rendu coupable d’un acte de torture, peut être poursuivi et jugé d’après les dispositions des lois du Niger ou applicables au Niger, s’il se trouve sur le territoire ou sous la juridiction de la République et s’il n’est pas extradé vers l’État dont il est un ressortissant ou sur le territoire duquel le crime a été commis ou dont la victime est un ressortissant.

111.En plus des critères traditionnels de compétence, l’article 208.8 du Code pénal prévoit que les juridictions nigériennes sont compétentes pour connaitre des infractions indépendamment du lieu où celles-ci auront été commises. Ces juridictions exercent leurs compétences conformément aux règles décrites dans les précédents paragraphes.

112.Le Niger ne dispose pas de statistiques sur des exemples de poursuites ou jugements relatifs à la disparition forcée.

Article 12 : Dénonciation et enquête

113.En l’absence d’une procédure spécifique se rapportant à l’infraction de disparitions forcées, c’est le droit commun qui s’applique. Conformément aux dispositions du Code de procédure pénale toutes les garanties accordées évoquent des autorités compétentes pour élucider une affaire concernant une disparition forcée.

114.Aux termes de l’article 39 du Code de procédure pénale le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner. En cas de classement sans suite il avise le plaignant.

115.L’article 80 du même code dispose que toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le juge d’instruction compétent. Dans ce cas, elle doit sous peine de non recevabilité de sa plainte consigner au greffe une somme présumée nécessaire pour les frais de la procédure (art. 83 du CPP).

116.En cas de refus des autorités juridictionnelles compétentes d’examiner et de traiter l’affaire, le plaignant peut saisir les instances internationales ou régionales de promotion ou de protection des droits humains, le médiateur de la République, la Commission Nationale des Droits Humains, les associations de défense des droits de l’homme.

117.La CNDH prévue par l’article 44 de la Constitution est indépendante des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Elle a une vocation de neutralité et d’impartialité dans la recherche des faits en matière de protection et de promotion des droits humains. Au cours de ses investigations, elle agit selon un cadre juridique bien défini par la loi no 2012-044 du 24 août 2012, déterminant sa composition, son organisation, ses attributions et son fonctionnement.

118.Le Niger ne dispose pas de statistiques désagrégées concernant le nombre de plaintes pour disparition forcée déposées auprès des autorités nationales et les résultats des enquêtes.

119.À défaut d’une procédure spécifique pour élucider une affaire et établir les faits concernant une disparition forcée, c’est le droit commun qui s’applique. Ainsi, aux termes de l’article 69 du CPP, les officiers de police judiciaire soit sur instructions du Procureur de la République soit d’office, procèdent à des enquêtes préliminaires. Ces opérations relèvent de la surveillance du procureur général.

120.L’article 40 du Code de procédure pénale dispose : « Le procureur de la République procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale. À cette fin, il dirige l’activité des officiers et agents de la police judiciaire dans le ressort de son tribunal ».

Article 13 : Extradition

121.L’article 649.3 alinéa 2 du Code de procédure pénale dispose : « L’extradition peut aussi être accordée en vertu de la courtoisie internationale, de l’entente, de la réciprocité ou en se fondant sur les assurances données par les autorités compétentes ». Quant à l’article 649.4 du même texte, il dispose « L’extradition est fondée sur la base de traité ou d’accord signé entre le Niger et un autre État ». Ces dispositions démontrent à suffisance que les infractions prévues au Code pénal ou contenues dans les traités ou conventions auxquels le Niger est librement partie peuvent donner lieu à extradition.

122.La disparition forcée n’étant pas encore incorporée dans le Code pénal en tant qu’infraction spécifique, nous ne disposons pas de traité spécifique à cette infraction mais notre pays en a conclu avec plusieurs États dans le cadre de l’entraide et de la coopération en matière judiciaire.

123.L’article 649.1 du Code de procédure pénale dispose qu’en matière d’extradition, le Ministère de la Justice est l’autorité centrale. Pour les exemples d’accord en matière d’extradition, il faut se référer au paragraphe 91 ci-dessus.

Article 14 : Entraide judiciaire

124.En l’état actuel de la législation nigérienne, il n’existe pas de traité ou de disposition d’entraide applicable à la disparition forcée. L’entraide judiciaire s’opère donc à travers les conventions bilatérales ou multilatérales. En l’absence de celles-ci, elle demeure néanmoins possible, sur le fondement des dispositions légales internes, sous la seule condition que l’autorité étrangère offre ses services dans des affaires comparables au titre de la réciprocité.

125.Cependant, les dispositions du Code de procédure pénale permettent aux magistrats nigériens en l’absence de convention, de présenter leurs demandes à des autorités judiciaires étrangères, en faisant des offres de réciprocité.

126.À ce jour, aucune demande d’entraide en relation avec des faits de disparition forcée n’a été adressée au Niger.

Article 15 : Coopération internationale

127.À ce jour aucune demande d’assistance à des victimes de disparition forcée ou visant à les localiser ou les faire libérer n’a été reçue par les autorités nigériennes et inversement. On ne peut, par conséquent donner d’exemple concret d’entraide ou de coopération internationale en la matière.

Article 16 : Non-refoulement

128.L’extradition ou la remise ne peut être accordée lorsque le prévenu risque la torture ou tout traitement inhumain, cruel et dégradant (art. 649-17 CPP).

129.C’est la loi no 97-016 du 20 juin 1997 portant statuts des réfugiés qui s’applique en matière d’expulsion et de refoulement des réfugiés et demandeurs d’asile.

130.L’extradition est accordée par décret du Président de la République, après avis conforme de la Chambre d’accusation de la Cour d’appel (art. 649-25 et suivants CPP).

131.L’expulsion, le renvoi et le refoulement sont autorisés par arrêté du Ministre chargé de l’Intérieur.

132.Toutes ces décisions sont susceptibles de recours. L’extradition et le refoulement respectivement devant les autorités de l’ordre judiciaire (juridiction de droit commun) et devant les juridictions administratives, selon les procédures ordinaires par simple requête.

133.Tous les agents qui concourent à la prise des décisions d’expulsion, refoulement, extradition (magistrats, policiers, gendarmes, gardes nationaux, cadres de l’administration) sont formés à la procédure pénale, au maintien de l’ordre et au respect des conventions internationales de promotion et de protection des droits de l’homme.

Article 17 : Interdiction de la détention au secret

134.Il résulte des dispositions constitutionnelles que la vie, la sûreté et l’intégrité physique de la personne humaine sont sacrées et protégées. Aucune personne ne peut être privée de sa liberté pour avoir commis un acte, que dans les cas où la loi a prévu et puni cet acte avant sa commission.

135.La privation de la liberté peut être ordonnée en cas de garde à vue ou de détention préventive. Les règles régissant la garde-à-vue sont prévues dans le Code de procédure pénale. Elle consiste dans le droit reconnu aux officiers de police judiciaire de maintenir à leur disposition les personnes contre lesquelles il existe des indices de culpabilité dans le cadre d’une enquête judiciaire. L’article 59 du CPP énonce que si pour les nécessités de l’enquête l’OPJ est amené à garder à sa disposition une ou plusieurs personnes contre lesquelles existent des indices de culpabilité, qu’il ne puisse les retenir plus de soixante-douze heures. Ces mêmes dispositions prescrivent qu’une éventuelle prolongation, qui ne peut dépasser quarante-huit heures, ne peut être autorisée que par le Procureur de la République ou le juge d’instruction.

136.En matière de lutte contre le terrorisme, le délai de la garde à vue est fixé à quinze (15) jours renouvelables une fois par le Procureur de la République ou le juge d’instruction (art. 605.5 du CPP).

137.La détention secrète est donc interdite car seuls les lieux fixés par la loi peuvent y servir. Ce sont les établissements pénitentiaires, les commissariats de police, les brigades de piste et de gendarmerie et généralement tous les locaux destinés aux enquêtes de la police judiciaire. Dans tous ces différents locaux de détention, il doit être tenu des registres constatant les identités des personnes détenues, les motifs ou les titres de la détention, la date et l’heure du début de la détention, etc…

138.Le Procureur de la République, chef de la police judiciaire a la charge de veiller à la régularité de toute détention. En cas de constatation d’une irrégularité, les responsables de ces structures en question s’exposent à des sanctions disciplinaires sans préjudice des sanctions pénales qu’ils encourent.

139.Pendant l’enquête préliminaire, la personne gardée à vue a le droit de communiquer avec son avocat dès son interpellation et peut aussi communiquer avec sa famille. Elle doit aussi être examinée par un médecin avant son défèrement au parquet sous peine de nullité de la procédure. Si cette personne a fait l’objet d’un mandat de détention, elle a le droit d’être visitée par sa famille et ses proches.

140.En cas de garde à vue ou de détention d’étrangers, les autorités judiciaires font application de l’article 36 de la Convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires en informant le poste consulaire ou la mission diplomatique de leurs pays d’origine et en autorisant sa communication avec les autorités consulaires de leurs pays d’origine.

141.Selon l’article 666 du CPP : « Le procureur général a la surveillance des établissements pénitentiaires et tient la main à ce que personne n’y soit détenu illégalement. Le juge d’instruction, une fois par mois, le président de la chambre d’accusation, le juge d’instance, le procureur de la République et le procureur général, chaque fois qu’ils l’estiment nécessaire, visitent les établissements pénitentiaires. Le président de la cour d’assises, une fois au moins au cours de chaque session, visite les accusés internés dans la prison du siège de la cour ».

142.L’article 667 du CPP prévoit que dès réception d’un arrêt ou d’un jugement de condamnation, d’une ordonnance de prise de corps, d’un mandat de dépôt ou d’arrêt, d’un mandat d’amener lorsque ce mandat doit être suivi d’incarcération provisoire, ou d’un ordre d’arrestation établi conformément à la loi, le chef de l’établissement est tenu d’inscrire sur le registre l’acte qui lui est remis. En cas d’exécution volontaire de la peine, le chef de l’établissement recopie sur le registre d’écrou l’extrait de l’arrêt ou du jugement de condamnation qui lui a été transmis par le procureur général ou par le procureur de la République. En toute hypothèse, l’avis de l’écrou est donné par le chef de l’établissement, selon le cas, au procureur général ou au procureur de la République. Le registre d’écrou mentionne également, en regard de l’acte de remise, la date de la sortie du détenu ainsi que, s’il y a lieu, la décision ou le texte de la loi motivant la libération.

143.L’article 668 CPP énonce que « Nul agent de l’administration pénitentiaire ne peut, à peine d’être poursuivi et puni comme coupable de détention arbitraire, recevoir, ni retenir aucune personne qu’en vertu d’un arrêt ou jugement de condamnation, d’une ordonnance de prise de corps, d’un mandat de dépôt ou d’arrêt, d’un mandat d’amener lorsque ce mandat doit être suivi d’incarcération provisoire, ou d’un ordre d’arrestation établi conformément à la loi et sans que l’inscription sur le registre d’écrou prévu à l’article précédent ait été faite».

144.L’article 15 de la loi no 2017-08 du 31 mars 2017, déterminant les principes fondamentaux du régime pénitentiaire au Niger dispose qu’il est tenu au greffe de chaque établissement pénitentiaire :

•Un registre d’écrou pour les prévenus et accusés ;

•Un registre d’écrou pour les condamnés ;

•Un registre pour les contraintes par corps ;

•Un registre d’écrou pour les détenus de passage.

145.Ces registres sont cotés et paraphés par le Procureur de la République ou le Président du Tribunal d’Instance. Le Ministre de la Justice et les chefs d’établissement peuvent prescrire en cas de besoin la tenue d’autres registres.

146.Aux termes de l’article 16 de la loi no 2017-08 précité : « Il sera tenu au greffe de chaque établissement pénitentiaire un dossier individuel de chaque détenu dont la liste des pièces sera fixée par acte règlementaire ».

147.Selon l’article 46 de la même loi : « Il est diligenté une enquête rapide, approfondie et impartiale sur toutes allégations de torture et d’autres mauvais traitements ou sur tout décès suspect survenu en détention ».

148.Suite à la ratification par le Niger du Protocole facultatif à la Convention contre la torture, un projet de loi créant un mécanisme national de prévention de la torture, a été élaboré et introduit dans le circuit d’adoption. Ce mécanisme sera exercé par la Commission Nationale des Droits Humains.

Article 18 : Information sur la personne détenue

149.En application de l’article 71 du CPP, toute personne placée en garde à vue est avisée qu’elle bénéficie notamment du droit de se faire assister par un avocat. Le règlement no 05/CM/UEMOA précise que l’assistance de l’avocat s’opère dès l’interpellation. Elle peut aussi en application des conventions internationales recevoir la visite de ses proches ou de sa famille. Elle doit enfin avant d’être déférée être examinée par un médecin attestant qu’elle n’a pas subi de sévices.

150.De même, toute personne placée en détention provisoire peut recevoir des visites sous certaines conditions et, dans tous les cas, le juge ne peut lui refuser de recevoir son avocat.

151.La loi garantit en toutes circonstances le droit à l’information des proches de la personne privée de liberté. La personne privée de liberté a le droit de refuser tout contact ou toute communication d’information sur les raisons de sa détention. En matière de protection consulaire, la Convention de Vienne du 24 avril 1963 en son article 36 subordonne l’obligation d’information des autorités consulaires à la demande expresse de la personne privée de liberté.

152.La loi no 2017-08 du 31 mars 2017 prévoit que les proches parents du détenu sont admis à lui rendre visite sur autorisation des autorités judiciaires. Cependant, les enfants âgés de moins de 16 ans accompagnant une personne porteuse de permis de communiquer, sont dispensés de cette autorisation.

153.Les détenus ont le droit d’envoyer ou de recevoir des correspondances sous réserves des dispositions contraires ordonnées par les magistrats et des dispositions relatives au maintien du bon ordre et de la sécurité. Ils sont immédiatement informés de tous les évènements survenus dans leurs familles et peuvent exceptionnellement être autorisés à se rendre dans leurs familles ou à communiquer téléphoniquement avec elles.

154.L’article 45 de ladite loi dispose : « Les détenus ou les tiers agissant en leur nom peuvent déposer à titre confidentiel des plaintes contre le personnel pénitentiaire en cas de maltraitance ou de traitement inhumain ou dégradant ». L’article 46 ajoute : « Il est diligenté une enquête rapide, approfondie et impartiale sur toutes allégations de torture et d’autres mauvais traitements ou sur tout décès suspect survenu en détention ».

Article 19 : Protection des données personnelles

155.La loi no 2017-28 du 30 mai 2017 fixe les modalités de protection des données à caractère personnel. L’article 3 énumère les matières qui relèvent de cette loi. Il s’agit de :

•Toute collecte, tout traitement, toute transmission, tout stockage et toute utilisation des données à caractère personnel par une personne physique, l’État, les collectivités locales, les personnes morales de droit public ou de droit privé ;

•Tout traitement automatisé ou non de données contenues ou appelées à figurer dans un fichier ;

•Tout traitement de données mis en œuvre sur le territoire national ;

•Tout traitement de données concernant la sécurité publique, la défense, la recherche et la poursuite d’infractions pénales ou la sûreté de l’État, sous réserve des dérogations définies par les dispositions spécifiques fixées par d’autres lois.

156.Aux termes de l’article 5 de la loi susvisée, le traitement des données à caractère personnel est soumis à une déclaration préalable auprès de l’Autorité de protection des données à caractère personnel. Cette déclaration comporte l’engagement que le traitement satisfait aux exigences de la loi. L’Autorité de protection délivre un récépissé en réponse à la déclaration, le cas échéant, par voie électronique. Le demandeur peut mettre en œuvre le traitement dès réception de son récépissé. Il n’est exonéré d’aucune de ses responsabilités.

157.Sont soumis à l’autorisation préalable de l’autorité de protection avant toute mise en œuvre :

•Le traitement des données à caractère personnel portant sur des données génétiques, médicales et sur la recherche scientifique dans ces domaines ;

•Le traitement des données à caractère personnel portant sur des données relatives aux infractions, aux condamnations ou aux mesures de sûreté prononcées par les juridictions ;

•Le traitement portant sur un numéro national d’identification ou tout autre identifiant de la même nature, notamment les numéros de téléphones ;

•Le traitement des données à caractère personnel comportant des données biométriques ;

•Le traitement des données à caractère personnel ayant un motif d’intérêt public notamment à des fins historiques, statistiques ou scientifiques ;

•Le transfert de données à caractère personnel envisagé à destination d’un pays tiers.

158.La demande d’autorisation est présentée par le responsable du traitement ou son représentant légal. Il a été créé la Haute Autorité à la Protection des Données à Caractère Personnel en abrégé la « HAPD » qui est une autorité indépendante chargée de veiller à ce que les traitements des données à caractère personnel soient mis en œuvre conformément aux dispositions de la loi.

159.Le Niger ne dispose pas encore d’une base de données génétiques. L’objectif de la loi sur la protection des données à caractère personnel est que ces données soient collectées et traitées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes et ne doivent en conséquence, être utilisées à d’autres fins que celles pour lesquelles elles sont collectées.

Article 20 : Restrictions au droit à l’information

160.L’article 31 de la Constitution prévoit que « toute personne a droit d’être informée et d’accéder à l’information détenue par les services publics dans les conditions déterminées par la loi ».

161.L’accès à l’information peut être restreint du fait du caractère secret de l’instruction judiciaire prévu par la législation interne. La nature et la durée dépendent de la sensibilité du dossier en question. Toutefois, les avocats de la personne mise en cause peuvent avoir accès au dossier après une demande adressée au juge.

162.La restriction du droit à l’information est exceptionnelle et ne peut concerner l’avocat du détenu. En effet, selon l’article 110 du Code de procédure pénale, « L’inculpé détenu peut aussitôt, après la première comparution, communiquer librement avec son conseil. Le juge d’instruction a le droit de prescrire l’interdiction de communiquer pour une période n’excédant pas 15 jours. Il peut la renouveler de 15 jours seulement. En aucun cas, l’interdiction de communiquer ne s’appliquera au Conseil de l’inculpé ».

163.La loi no 2017-08 du 31 mars 2017 déterminant les principes fondamentaux du régime pénitentiaire au Niger, prévoit que toute personne privée de liberté doit être gardée dans un établissement pénitentiaire qui est un service public placé sous l’autorité du Ministre de la Justice.

164.À l’exception de certains magistrats, des autorités administratives et des commissaires de la CNDH, nul n’est admis à visiter un établissement pénitentiaire s’il n’est porteur d’une autorisation du Ministre de la Justice. Les proches parents du détenu sont admis à lui rendre visite sur autorisation écrite délivrée par les autorités judiciaires compétentes.

Article 21 : Remise en liberté

165.Chaque détenu libéré fait l’objet d’une procédure de levée d’écrou, et un billet de sortie lui est délivré par l’administration pénitentiaire. Celle-ci renvoie aussi à l’autorité judiciaire un avis de libération. Le registre d’écrou à l’arrivée du détenu mentionne également, la date de la sortie du détenu ainsi que, s’il y a lieu, la décision ou le texte de la loi motivant la libération.

166.Pour les individus retenus par des particuliers (prise d’otage, séquestration, enlèvement…), leur libération donne lieu à l’établissement d’un procès-verbal dressé par les autorités policières qui ont procédé à cette libération.

167.La remise en liberté des individus détenus par les autorités est supervisée par l’autorité judiciaire, gardienne des libertés individuelles (art. 130 alinéa 2 CPP). Ceux qui sont retenus par des particuliers sont libérés soit par les agents d’application de la loi ou les services de renseignement, soit par leurs ravisseurs eux-mêmes.

168.Aux termes de l’article 666 Code de procédure pénale : « Le procureur général a la surveillance des établissements pénitentiaires et tient la main à ce que personne n’y soit détenu illégalement. Le juge d’instruction, une fois par mois, le président de la chambre d’accusation, le juge d’instance, le procureur de la République et le procureur général, chaque fois qu’ils l’estiment nécessaire, visitent les établissements pénitentiaires. Le président de la cour d’assises, une fois au moins au cours de chaque session, visite les accusés internés dans la prison du siège de la cour ».

169.L’article 667 du CPP ajoute que : « Dès réception d’un arrêt ou d’un jugement de condamnation, d’une ordonnance de prise de corps, d’un mandat de dépôt ou d’arrêt, d’un mandat d’amener lorsque ce mandat doit être suivi d’incarcération provisoire, ou d’un ordre d’arrestation établi conformément à la loi, le chef de l’établissement est tenu d’inscrire sur le registre l’acte qui lui est remis. En cas d’exécution volontaire de la peine, le chef de l’établissement recopie sur le registre d’écrou l’extrait de l’arrêt ou du jugement de condamnation qui lui a été transmis par le procureur général ou par le procureur de la République. En toute hypothèse, l’avis de l’écrou est donné par le chef de l’établissement, selon le cas, au procureur général ou au procureur de la République … ».

Article 22 : Sanction des entraves et manquement à l’obligation d’information

170.Aux termes de l’article 134 du Code de procédure pénale toute personne privée de liberté, ou son conseil peut à tout moment saisir la juridiction compétente pour obtenir sa mise en liberté provisoire. En cas de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement, la personne bénéficiaire a droit à une réparation en adressant une requête à la commission d’indemnisation sis au sein de la Cour de Cassation ou en engageant la responsabilité de l’État devant les tribunaux administratifs (art. 143-1 à 143-4 du CPP).

171.Pour empêcher la privation illégale, l’arrestation et la séquestration arbitraire sont érigées en infractions graves, les peines sont aggravées si l’auteur est un agent de l’autorité. Les lieux de détention ne peuvent être que ceux établis par l’autorité.

172.Pour empêcher le manquement à l’obligation d’enregistrer la privation de liberté, les régisseurs sont tenus d’enregistrer tout détenu, avec son titre de détention dans un registre d’écrou et d’y mentionner l’auteur du titre de détention. Le refus de donner les renseignements ou la fourniture de renseignements inexacts constituent une infraction.

173.À côté des sanctions pénales (emprisonnement, amende, privation des droits civils, civiques et politiques), il y a des sanctions administratives /disciplinaires dont l’échelle varie de l’avertissement à la révocation.

174.La loi prévoit en effet des sanctions pénales, administratives et disciplinaires contre les autorités judiciaires, administratives pour les manquements en matière de détention.

175.Ainsi aux termes l’article 108 du Code pénal, on retient que tout fonctionnaire public, agent ou préposé de l’administration qui aura ordonné ou fait quelque acte arbitraire ou attentatoire soit à la liberté individuelle, soit aux droits civiques d’un ou plusieurs citoyens, soit à la Constitution, sera puni d’un emprisonnement de un (1) à cinq (5) ans. Si néanmoins, il justifie avoir agi par ordre de ses supérieurs pour des objets du ressort de ceux-ci, sur lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, il sera exempt de la peine, laquelle dans ce cas sera appliquée seulement aux supérieurs qui auront donné l’ordre.

176.Selon l’article 109 du Code pénal : « Les dommages intérêts, qui pourraient être prononcés à raison des attentats exprimés dans l’article 108 ci-dessus, seront demandés soit sur la poursuite pénale, soit par voie civile, et seront réglés, eu égard aux personnes, aux circonstances et au préjudice souffert ».

177.Il ressort des dispositions de l’article 110 du Code pénal que : « Les régisseurs de prison qui auront reçu un prisonnier sans mandat ou jugement ou, quand il s’agira d’une expulsion ou d’une extradition sans ordre provisoire du gouvernement, ceux qui l’auront retenu ou refusé de le représenter à l’officier de police ou au porteur de ses ordres, sans justifier de la défense du procureur de la République ou du juge, ceux qui auront refusé d’exhiber leurs registres à l’officier de police seront, comme coupables de détention arbitraire, punis de six mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 10 000 à 150 000 francs ou de l’une de ces deux peines seulement ».

178.Les coupables pourront, en outre, conformément aux dispositions de l’article 25, être privés de tout ou partie de leurs droits civiques.

179.L’article 112 du Code pénal énonce que : « Seront punis d’un emprisonnement de un à cinq ans les procureurs généraux ou de la République, les substituts, les juges ou les officiers de police judiciaire qui auront retenu ou fait retenir sans titre régulier de détention un individu hors des lieux déterminés par le gouvernement ou l’administration publique ».

180.Enfin l’article 113 du Code pénal dispose : « Les fonctionnaires publics chargés de la police administrative ou judiciaire, qui auront refusé ou négligé de déférer à une réclamation légale tendant à constater les détentions illégales et arbitraires, soit dans les lieux destinés à la garde des détenus, soit partout ailleurs, et qui ne justifieront pas les avoir dénoncés à l’autorité supérieure, seront punis d’un emprisonnement de six mois à deux ans ».

Article 23 : Formation

181.Dans le cadre de la protection et de la promotion des droits humains en milieu carcéral, plusieurs formations ont été dispensées à l’endroit du personnel médical des établissements pénitentiaires et des autres agents chargés de la garde des détenus en 2015 notamment à Kollo, Tahoua et Zinder. Ces formations entrent dans le cadre du programme d’amélioration et de modernisation des conditions de vie et de détention.

182.La formation assurée au personnel de la police ne fait pas cas de manière expresse des dispositions relatives à la disparition forcée. Cependant, en pratique, le cours de déontologie incluant des aspects relatifs à l’interdiction de détention illégale est enseigné à l’école de police. Dans les cours de procédure pénale, l’enseignement de la procédure en ce qui concerne notamment les enquêtes préliminaires, souligne la nécessité de respecter la dignité humaine et l’obligation de n’exercer aucune forme de privation de liberté pouvant le soustraire à la protection de la loi.

183.En outre, un manuel et un guide de formation en droits de l’homme à l’usage de la garde nationale qui a en charge la garde des détenus, ont été élaborés par le Ministère de l’Intérieur, avec l’appui de l’Institut Danois des Droits de Homme (IDDH) et de la Faculté des Sciences Economiques et Juridiques (FSEJ) respectivement en 2006 et 2010. Aussi 176 gardes nationaux ont été formés de 2016 à 2017 sur les droits de l’homme.

184.Il a été aussi élaboré plusieurs modules de formation en droits humains dont les conventions internationales fondamentales, destinés à la nouvelle école dénommée Ecole de Formation Judiciaire du Niger qui est désormais en charge de la formation initiale des magistrats, des greffiers, et du nouveau personnel de l’administration pénitentiaire créé par la loi no 2017-09 du 31 mars 2017.

185.Dans le cadre du partenariat entre le Ministère de la Justice et l’IDDH, un programme de formation en Droits Humains, destiné aux forces de défense et de sécurité et aux magistrats a été élaboré. À cet effet, des manuels de formation en droits humains ont été édité à l’endroit des magistrats, de la police, de la garde nationale, des chefs d’établissements pénitentiaires et de la garde nationale. De 2009 à 2016, 327 magistrats ont été formés sur le manuel de formation en droits humains, l’objectif final étant de les amener à mieux appliquer les conventions internationales.

186.De même, en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme (HCDH), le Ministère de la Justice a organisé une série de formations dans ce sens. L’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) a également formé les FDS et les magistrats sur les techniques d’enquête et d’investigation en matière de Traite des personnes et de trafics illicites de migrants. On peut noter plusieurs autres formations des formateurs à l’endroit des officiers de la Garde Nationale du Niger, de la Police et de la Gendarmerie, organisées aussi bien par l’État que par les ONG.

187.Les formations à l’endroit du personnel d’application des lois insistent bien sur le respect de la loi no 2002-05 du 8 février 2002, déterminant l’ordre manifestement illégal qui dispose en son article 1er que « Nul n’est tenu d’exécuter un ordre manifestement illégal ». Est considéré comme tel, tout ordre donné ou intimé en violation flagrante des lois et règlements en vigueur. Les ordres ou instructions prescrivant, autorisant ou encourageant notamment une disparition forcée sont interdits. Toute personne qui aura donné ou exécuté cet ordre manifestement illégal ne pourra invoquer le commandement de l’autorité légitime pour s’exonérer de sa responsabilité pénale et/ou civile.

188.L’article 5 de la même loi précise que sans préjudice des sanctions administratives et/ou disciplinaires, sont punies des peines réprimant l’infraction à la loi pénale résultant de l’exécution d’un ordre manifestement illégal, la personne qui a donné l’ordre et celle qui l’a exécuté.

189.L’article 29 du décret no 99-368 du 30 septembre 1999 sur le régime pénitentiaire dispose que « les surveillants exécutent les ordres du régisseur et du surveillant chef. Placés sous l’autorité directe du surveillant chef, ils sont chargés notamment de la surveillance des détenus, de la garde des établissements pénitentiaires, du maintien de l’ordre et la discipline intérieure, de la bonne exécution du travail pénal, de l’exécution du service de propreté dans toutes les parties de l’établissement. Ils rendent compte sans délai de toute infraction aux règlements et aux ordres reçus. Ils sont tenus de consigner dans un registre leurs observations journalières concernant leurs différentes tâches ».

190.Ainsi s’ils ont des raisons de croire qu’une disparition forcée s’est produite ou est projetée, ils doivent la signaler à leurs supérieurs hiérarchiques qui avisent immédiatement les services de police, de la gendarmerie ou de la garde nationale et en rendent compte aux autorités administratives et judiciaires.

Article 24 : Droit des victimes

191.La victime est définie comme toute personne ayant personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction (art. 80 du CPP). Cette définition inclut la personne disparue et ses ayants droits et les associations, spécialement autorisées par la loi et dont l’objet est la lutte contre la disparition forcée. Ces associations n’existent pas pour le moment au Niger.

192.Les ayants droits et les associations sont entendues au cours de l’enquête. À cette phase, les victimes ne sont pas associées à l’enquête. Mais dans la phase judiciaire, il est reconnu aux victimes la qualité de partie civile. Elles sont associées au processus, et consultées par le juge chaque fois qu’il entend prendre une décision juridictionnelle et mieux elles sont avisées lorsque ces décisions sont prises.

193.Les victimes ont le droit de constituer avocat et sont informées des résultats de l’instruction. Il en est de même lors de la phase du procès comme indiqué plus haut, les victimes deviennent des parties au procès et leurs droits sont garantis par la loi.

194.Les conclusions de l’instruction sont portées à la connaissance des parties par le juge d’instruction (par voie de notification) et celles du jugement par les huissiers de justice (par voie de signification). Mais en cours d’enquête, d’instruction ou de jugement, le respect des droits des victimes conduit les Procureurs de la République à recevoir périodiquement les victimes et leurs avocats, à leur annoncer les avancées et les raisons des retards de la procédure, la date éventuelle du procès notamment. Il ne s’agit pas de rencontres formelles, encadrées par la loi, mais elles se sont imposées dans des dossiers médiatisés, comportant plusieurs victimes et nécessitant plusieurs actes (expertises, contre-expertises, coopération internationale, etc.) Il est alors indispensable de communiquer afin de rassurer les victimes et souvent de solliciter leur contribution. Par exemple, les victimes peuvent se constituer en association, faire des déclarations que les magistrats ne peuvent pas faire, rencontrer les dirigeants politiques pour faire accélérer une demande d’extradition ou de classification de pièces, faire des sit-in, etc.

195.Il n’existe pas de dispositif spécifique aux disparitions forcées. Mais chaque fois qu’une infraction est commise, une unité d’enquête de la police judiciaire ou des services de renseignement diligente une enquête à laquelle collaborent les victimes. Les victimes sont recherchées ou localisées. Si les restes des victimes sont découverts, ils sont traités dignement et remis aux membres de leurs familles ou conservées à cette fin.

196.Il n’existe pas de protocoles mis en place pour le traitement des restes des personnes disparues et la restitution à leur famille, conformément aux normes internationales, mais leur mise en place est envisageable notamment au niveau du laboratoire de la police scientifique et technique.

197.Il n’existe pas des dispositifs prévus pour recueillir systématiquement des données ante mortem relatives aux personnes disparues et à leurs proches et pour mettre en place des bases de données Acide Désoxyribonucléique (ADN) ou permettant d’identifier les victimes de disparition forcée, mais il existe des initiatives en vue de mettre en place un tel système.

198.Il n’existe pas non plus un mécanisme pour stocker le matériel génétique des personnes disparues et de leurs proches, mais des initiatives sont possibles en vue d’en établir un.

199.Toute victime d’une infraction peut saisir la justice pour réclamer réparation contre l’auteur. Si cet auteur est inconnu, l’État peut être poursuivi si l’un de ses services ou agents a été défaillant. Des fonds spéciaux sont institués pour les victimes de terrorisme et de la traite mais ne sont pas encore opérationnels. Si les victimes sont des agents de l’État ou de membres des forces de défense et de sécurité, il existe un mode de réparation spécifique.

200.Le principe de la réparation est l’indemnisation intégrale, la reconnaissance de la qualité de victime, la réparation des préjudices matériel, moral et la restitution. Cependant, l’État s’efforce de rendre effective la garantie de non-répétition.

201.Il existe une procédure devant les tribunaux civils pour constater et déclarer la disparition ou l’absence d’une personne conformément aux dispositions des articles 343 à 370 du Code civil.

202.La Constitution et la loi prévoient la liberté pour les citoyens de se regrouper en association de tout genre en général, en ce qui ne soit contraire aux bonnes mœurs et à, l’ordre public. Les associations sont formées par simple déclaration à la Mairie, mais pour qu’elles soient opérationnelles, une autorisation du Ministre de l’Intérieur est nécessaire.

203.Certaines lois sont élaborées selon un mode participatif. Les administrations et les associations intéressées sont consultées tant au moment de l’élaboration (commission des reformes du MJ, comité technique de vérification des textes du Secrétariat général du gouvernement) qu’au moment du vote en commission de l’Assemblée nationale.

204.Concernant l’aspect relatif à la sécurité sociale en cas de disparition forcée d’un travailleur, ses enfants continuent de bénéficier des prestations familiales tant que l’employeur continue de payer ses cotisations pendant cette période. À l’expiration du délai de six (6) l’employeur peut légalement rompre le contrat de travail en octroyant à la famille du disparu les indemnités de fin de contrat prévues par la législation. Pour bénéficier de la pension les ayants droits doivent produire un certificat de décès et les conclusions du conseil de famille. Ces conditions empêchent à la famille du travailleur disparut de bénéficier de la pension.

Article 25 : Enfant

205.Il n’existe pas de cas signalés ni de dispositions légales spécifiques aux cas d’enfants soumis à une disparition forcée soustraits de façon illicite, ou ceux dont les parents sont soumis à une disparition forcée et les enfants nés pendant la captivité de leur mère soumise à une disparition forcée.

206.La Constitution consacre la protection de l’enfant. En effet, l’article 21 dispose que : « Le mariage et la famille constituent la base naturelle et morale de la communauté humaine. Ils sont placés sous la protection de l’État. L’État et les collectivités publiques ont le devoir de veiller à la santé physique, mentale et morale de la famille, particulièrement de la mère et de l’enfant ».

207.Quant à l’article 22, il dispose que : « L’État veille à l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard de la femme, de la jeune fille et des personnes handicapées. Les politiques publiques dans tous les domaines assurent leur plein épanouissement et leur participation au développement national. L’État prend, en outre, les mesures de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants dans la vie publique et privée. Il leur assure une représentation équitable dans les institutions publiques à travers la politique nationale du genre et le respect des quotas ».

208.Le Code pénal réserve tout un chapitre au crime et délit contre l’enfant et la famille (chap. V). Et a première section du chapitre incrimine l’enlèvement, les coups et blessures volontaires sur enfant âgé de moins de 13 ans, la privation d’aliment et de soins, le recel, la suppression, la supposition et substitution d’enfant, la non représentation d’un enfant par la personne chargée de sa garde (art. 248 à 250) ; le défaut de déclaration de naissance ou de remise d’un nouveau-né (art. 251 et 252) ; l’abandon d’un enfant ou d’un incapable (art. 253 et 254) ; le détournement de mineur (art. 255 à 258) ; la non représentation d’un enfant sur la garde duquel il a été statué par décision de justice (art. 259).

209.La loi no 2014-72 du 20 novembre 2014 déterminant les compétences, les attributions et le fonctionnement des juridictions pour mineurs au Niger, établit des mesures de protection de l’enfant conformément à la Convention relative aux droits de l’enfant.

210.Cette loi définit en son article premier l’enfant en danger comme étant « Tout enfant dont la santé, la sécurité, la moralité sont en danger et dont les conditions de son éducation sont gravement compromises ».

211.L’article 37 de cette loi fixe les mesures de protection à prendre en cas de situation d’enfant en danger. Il dispose ainsi : « Lorsque la santé, la sécurité, la moralité d’un mineur ou les conditions de son éducation sont gravement compromises, le juge des mineurs ou le Tribunal pour mineurs peut ordonner, après une enquête sociale, de maintenir, chaque fois que cela est possible le mineur dans son milieu actuel de résidence. Dans ce cas, le juge des mineurs ou le Tribunal pour mineurs désigne, soit une personne qualifiée, soit un service socio-éducatif agréé, en lui donnant mission d’apporter aide et conseil à la famille afin de surmonter les difficultés matérielles et morales que celle-ci rencontre ».

212.Le maintien de l’enfant dans son milieu peut toutefois être subordonné à des obligations particulières, telles que celle relative à la fréquentation d’un établissement sanitaire ou d’éducation, ou à l’exercice d’une activité professionnelle.

213.S’il est nécessaire de retirer l’enfant de son milieu actuel, le juge des mineurs ou le Tribunal pour mineurs peut décider de le confier :

•À celui des père ou mère chez lequel l’enfant n’avait pas sa résidence habituelle ;

•À un autre membre de la famille ou à un tiers digne de confiance ;

•À un établissement sanitaire ou d’éducations agréées ;

•À un service de l’administration chargée de la protection de l’enfant.

214.Dans les trois premiers cas, le juge des mineurs ou le Tribunal pour mineurs peut charger une personne qualifiée ou un service socio-éducatif agréé d’apporter aide et conseil à la personne ou à l’institution qui a recueilli le mineur.

215.Le juge des mineurs peut aussi charger une personne qualifiée ou un service socio-éducatif agréé, d’apporter aide et conseil au milieu d’où le mineur a été provisoirement retiré afin de surmonter les difficultés matérielles et morales qu’il rencontre et de préparer son retour ».

216.En vue de garantir le respect des principes fondamentaux des droits de l’enfant dans toutes les actions le concernant, les dispositions suivantes ont été prises :

•La prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant parmi les principes clés régissant la politique de protection de l’enfant tant dans sa dimension administrative que judiciaire et aussi, dans la loi no 2014-72 du 20 novembre 2014 déterminant les compétences, les attributions et le fonctionnement des juridictions pour mineurs ;

•L’adoption en 2013 du document cadre de la protection de l’enfant ;

•La création par arrêté no 051/MP/PF/PE/DPE du 25 août 2011 d’un comité technique chargé d’étudier et d’analyser les dossiers de demandes d’adoption plénière. Aussi, des accords ont été signés avec des Organismes agréés en matière d’adoption internationale (Enfants du Mandé de Québec, Larissa de Belgique). Ces accords permettent d’assurer le suivi des enfants ayant fait l’objet d’adoption Internationale ;

•L’adoption du Décret du 4 juin 2010 fixant les conditions de création et de fonctionnement des institutions privées d’Accueil, d’Ecoute, d’orientation et d’hébergement pour enfant ;

•L’adoption de l’ordonnance no 2010-86 du 16 décembre 2010 relative à la lutte contre la traite des personnes ;

•La création de la Commission Nationale de Coordination de la Lutte contre la Traite des Personnes et de Trafic Illicite de Migrants (CNCLTP/TIM) et de l’Agence Nationale de Lutte contre la Traite des Personnes et de Trafic Illicite de Migrants (ANLTP/TIM) par l’ordonnance no 2010-86 du 16 décembre 2010 relative à la lutte contre la traite des personnes ;

•La création du service central de la protection des femmes et des mineurs ;

•La création des brigades de protection des mineurs au sein de la police, de la garde nationale et de la gendarmerie nationale ;

•La création des centres d’accueil et d’hébergement des enfants en conflit avec la loi.