Cinquante-deuxième session

9-27 juillet 2012

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Nouvelle-Zélande

Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a examiné le septième rapport périodique de la Nouvelle-Zélande (CEDAW/C/NZL/7) à ses 1053e et 1054e séances, le 18 juillet 2012 (CEDAW/C/SR.1053 et 1054). La liste des questions et des points soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/NZL/Q/7 et les réponses données par le Gouvernement néo-zélandais sont reproduites dans le document CEDAW/C/NZL/Q/7/Add.1.

Introduction

Le Comité remercie l’État partie de lui avoir présenté dans les délais impartis son septième rapport périodique. Ce document bien structuré respectait les directives du Comité concernant l’établissement des rapports et contenait des références aux recommandations générales du Comité. Le Comité remercie l’État partie de son exposé oral, de ses réponses écrites à la liste des questions et des points soulevés par le Groupe de travail d’avant-session et des précisions apportées aux questions posées oralement par le Comité.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau conduite par Jo Goodhew, Ministre de la condition de la femme.

Le Comité constate avec satisfaction que l’élaboration du rapport a donné lieu à un dialogue participatif entre les organismes gouvernementaux, le Parlement et les organisations nationales de la société civile, y compris des organisations de femmes.

Le Comité se félicite de la participation et de la contribution de la Commission des droits de l’homme néo-zélandaise à ses travaux.

Aspects positifs

Le Comité félicite l’État partie d’avoir retiré sa dernière réserve à la Convention à la suite de la promulgation de la loi de 2007, portant modification de la loi relative aux droits de l’homme, qui permet aux femmes servant dans les forces armées de participer aux combats.

Il prend note avec satisfaction de la nomination à des fonctions ministérielles de trois femmes maories et, pour la première fois, d’une Asiatique.

Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir adopté, depuis ses observations finales précédentes, en 2007, plusieurs réformes législatives et réformes d’orientation en faveur des femmes. Il se félicite notamment :

a)De la campagne « It’s not OK », lancée en 2008 par le Groupe de travail chargé de la lutte contre la violence dans la famille visant à changer les attitudes à l’égard de ce problème;

b)Des modifications apportées à la législation en 2009, qui autorisent les juridictions pénales à délivrer des ordonnances de protection au nom des victimes lorsque l’agresseur est condamné pour violences familiales;

c)De la loi de 2008 modifiant la loi relative aux relations avec l’employeur (congés, alimentation des nourrissons et autres questions), qui encourage l’allaitement sur le lieu de travail;

d)De la campagne nationale d’information lancée en 2007, qui vise à encourager les femmes à réaliser des tests d’auto-dépistage du cancer du col de l’utérus et a permis d’accroître le taux de détection pour tous les groupes de femmes;

e)Des « indicateurs du changement », mis en place en 2008 par le Ministère de la condition de la femme afin de suivre les progrès accomplis dans le domaine des droits des femmes en Nouvelle-Zélande.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Le Comité rappelle l’obligation qui incombe à l’État partie d’appliquer, de manière systématique et constante, toutes les dispositions de la Convention et estime que les préoccupations exprimées et les recommandations formulées dans les présentes observations finales doivent faire l’objet d’une attention prioritaire de la part de l’État partie d’ici à la présentation du prochain rapport périodique. Le Comité constate avec préoccupation qu’un certain nombre de problèmes continuent de faire obstacle à la pleine application de la Convention dans l’État partie, notamment l’emploi d’un langage neutre pour aborder la violence sexiste, y compris familiale; les disparités et inégalités salariales; le statut des groupes de femmes vulnérables, y compris les femmes handicapées et issues de minorités; les répercussions qu’a eues le tremblement de terre de 2011 sur les femmes; les effets des changements d’orientation, notamment du resserrement des crédits affectés aux dispositifs d’aide judiciaire; le caractère inadapté des objectifs et des indicateurs de référence relatifs à la promotion des droits des femmes; et l’insuffisance des mesures visant à diffuser et à promouvoir la Convention. Il demande par conséquent instamment à l’État partie de faire porter ses efforts sur ces questions dans ses activités de mise en œuvre et à rendre compte, dans son prochain rapport périodique, sur les mesures prises et les résultats obtenus. Il lui demande également de soumettre les présentes observations finales à tous les ministères compétents, au Parlement et aux autorités judiciaires, de façon à en assurer la pleine application.

Parlement

Tout en réaffirmant que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef de s’acquitter pleinement des obligations de l’État partie au titre de la Convention, le Comité souligne que celle-ci a force obligatoire pour tous les secteurs de l’administration et invite l’État partie à encourager le Parlement, conformément à ses procédures, à prendre, le cas échéant, les mesures nécessaires en vue de la mise en œuvre des présentes observations finales d’ici à l’élaboration du prochain rapport devant être présenté au titre de la Convention. Le Comité constate que les dernières observations finales et les recommandations qui y étaient formulées n’ont été que peu diffusées auprès du Parlement et note que celui-ci n’exerce pas de contrôle systématique ni n’exige de comptes en ce qui concerne les droits des femmes et l’égalité des sexes. Le Comité recommande à l’État partie de diffuser plus largement son rapport ainsi que ses propres observations finales et recommandations auprès de tous les parlementaires. Il exhorte l’État partie à envisager de créer une commission parlementaire spéciale sur les droits de l’homme pour renforcer le contrôle qu’a le Parlement sur la question en général et sur les droits des femmes et l’égalité des sexes en particulier.

Définition de la discrimination contre les femmes et de l’égalité des sexes

Rappelant la recommandation qu’il a formulée dans le document CEDAW/C/NZL/CO/6, le Comité demeure préoccupé par le fait qu’il n’existe toujours pas, dans la Constitution ou dans la législation de l’État partie, d’interdiction explicite et détaillée de la discrimination directe et indirecte à l’égard des femmes, contrairement à ce qui est prévu à l’article 1 de la Convention. Le Comité s’inquiète également de l’insuffisance des dispositions législatives visant à remédier à la discrimination, tant directe qu’indirecte, à l’égard des femmes, qui est le fait d’acteurs privés, et à garantir une rémunération égale pour un travail d’égale valeur.

Le Comité recommande que, dans le cadre de la révision de la C onstitution actuellement menée, l’État partie veille à ce que le principe d’égalité des hommes et des femmes soit pleinement inscrit dans la C onstitution ou toute autre disposition légis lative, conformément à l’alinéa a) de l’article  2 de la Convention. Il exhorte l’État partie à établir une définition juridique de la discrimination fondée s ur le sexe conforme à l’article  1 de la Convention et à élargir la responsabilité de l’État pour les actes de discrimination qui sont le fait tant du secteur public que du secteur privé, conformément à l’alinéa e) de l’article  2 de la Convention, en vue de parvenir à l’égalité formelle et réelle entre femmes et hommes.

Rayonnement de la Convention, de son protocole facultatif et des recommandations générales du Comité

Le Comité note avec satisfaction que le Ministère de la justice a mis en ligne, en 2010, un site sur les droits de l’homme qui fournit des informations sur la Convention et son protocole facultatif, mais demeure préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas pris les mesures nécessaires pour assurer le rayonnement de la Convention sur l’ensemble de son territoire. Il s’inquiète de ce que de nombreuses femmes ignorent l’existence du mécanisme de dépôt de plaintes prévu par le Protocole facultatif et ne connaissent pas suffisamment leurs droits au titre de la Convention. Le Comité s’inquiète également du peu de mesures prises par l’État partie pour former les juges et les avocats à la Convention et inscrire l’instrument dans son cadre juridique.

Le Comité exhorte l’État partie  :

a) À mieux informer les femmes de leurs droits et des moyens d’accès à la justice dont elles disposent, aux niveaux national et local, pour dénoncer les violations de leurs droits au titre de la Convention et à sensibiliser les femmes, sur l’ensemble de son territoire, à cet instrument, y compris dans les établis sements d’enseignement primaire, secondaire et universitaire , en menant des campagnes d’information et en utilisant les médias;

b) À diffuser le texte de la Convention, de son protocole facultatif, de ses propres recommandations générales et de ses vues sur les communications et les demandes individuelles auprès de tous les secteurs de la société, et à proposer aux représentants de l’État, aux législateurs, aux juges, aux avocats, aux magistrats, aux procureurs, à la police et aux autres membres des services de maintien de l’ordre des formations juridiques et autres cours périodiques sur la Convention et son applicabilité afin qu’elle puisse servir de cadre efficace pour toutes les lois, décisions de justice et politiques qui seront adoptées en matière d’égalité des sexes et de promotion de la femme.

Accès à la justice et mécanismes de recours judiciaire

Le Comité est profondément préoccupé par le resserrement des crédits affectés par l’État partie au financement de l’aide judiciaire et par les critères d’octroi proposés, qui ont entraîné une baisse des demandes de la part des femmes et la persistance probable des conséquences dommageables qui en découlent sur l’accès des femmes à la justice, d’autant que 65 % des utilisateurs de l’aide judiciaire dans l’État partie sont des femmes. Il s’inquiète également du fait que les barrières culturelles, financières et linguistiques privent les femmes migrantes de l’accès voulu aux services juridiques appropriés, et que la part des femmes maories poursuivies et condamnées pour des infractions à la loi pénale est anormalement importante, tout comme leur proportion parmi les victimes de la criminalité. Par ailleurs, s’il se félicite du rôle joué par la Commission des droits de l’homme dans la mise en place d’un mécanisme d’examen des plaintes pour discrimination, il craint que les informations sur ce dispositif n’aient pas été suffisamment diffusées et que la Commission des droits de l’homme ne dispose pas des ressources nécessaires.

Le Comité exhorte l’État partie  :

a) À faciliter l’accès des femmes à la justice, notamment en fournissant une aide judiciaire gratuite aux femmes ne disposant pas de s ressources suffisantes , et à intensifier les efforts déployés pour s’assurer que les femmes migrantes et maories ne sont pas victimes de discrimination dans l’administration de la justice;

b) À proposer une formation systématique des membres des professions juridiques et des organisations non gouvernementales concernant l’application de la législation interdisant la discrimination, notamment pour ce qui est de l’accès à la justice, dans le respect des obligations contractées au titre de la Convention et de son protocole facultatif;

c) À renforcer les initiatives de sensibilisation expliquant aux femmes comment se servir des recours juridiques disponibles face à la discrimination, notamment ceux prévus par la Commi ssion des droits de l’homme, et à veiller à ce que la Commission dispose de ressources suffisantes.

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas pris de mesures suffisantes pour s’assurer que les plans nationaux et les organismes publics tiennent systématiquement compte de l’égalité des sexes comme il l’en avait prié dans ses précédentes conclusions finales (CEDAW/C/NZL/CO/6, par. 15). Dans cet ordre d’idées, il note avec inquiétude que l’État partie n’a pas lancé de nouveau plan d’action en faveur des femmes pour remplacer celui qui a pris fin en 2009 et que le Ministère de la condition de la femme ne dispose pas des ressources suffisantes pour s’acquitter des nombreuses tâches qui lui incombent.

Le Comité encourage l’État partie :

a) À veiller à la prise en compte d’u ne démarche soucieuse de l’égalité des sexes dans tous les plans nationaux et par tous les organismes publics ;

b) À renforcer le mécanisme national existant en le dotant de l’autorité et des ressources humaines et financières voulues, ainsi qu’en veillant à ce qu’il ait l’impact nécessaire à tous les niveaux et à améliorer la coordination entre les dispositifs actuels de promotion de la femme et de l’égalité des sexes en augmentant les ressources du Ministère de la condition de la femme;

c) À mener une étude de grande ampleur sur les moyens d’améliorer la situation des femmes dans l’État partie avant d’élaborer en conséquence un plan national d’action en faveur des femmes.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité note que l’État partie a mis en place des indicateurs du changement lui permettant de mesurer les progrès réalisés concernant les droits des femmes dans trois domaines prioritaires, à savoir le développement économique, la proportion de femmes exerçant des responsabilités et les violences subies par les femmes. Il craint toutefois que les objectifs et les indicateurs fixés ne soient pas suffisants pour garantir aux femmes des progrès significatifs. À cet égard, le Comité regrette que l’État partie ait déclaré que les mesures temporaires spéciales ne constituaient pas un instrument adapté pour parvenir plus rapidement à une égalité de fait entre les hommes et les femmes, même si le recours à ces mesures est autorisé par la loi. Tout en reconnaissant les progrès réalisés dans le secteur public, il déplore le faible nombre de femmes occupant des postes de haut niveau et de direction ou présentes dans les conseils d’administration des entreprises privées.

Le Comité encourage l’État partie à étudier, examiner et revoir la question de la pertinence et de l’utilité des mesures temporaires spéciales prévues au paragraphe 1 de l’article  4 de la Convention et dans s a recommandation générale n o 25. Il lui recommande également d’inclure dans sa législation sur l’égalité des dispositions visant à encourager le recours à ces mesures, tant dans le secteur public que privé, afin d’accélérer la réalisation en droit et en pratique de l’égalité des femmes et des hommes dans tous les domaines et dans tous les secteurs de l’État partie.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

Tout en prenant note des efforts déployés par l’État partie pour éliminer les comportements discriminatoires et les pratiques préjudiciables dont sont victimes les femmes, notamment dans le cadre de la réglementation relative à la radiodiffusion et à la télévision, le Comité reste préoccupé par les stéréotypes négatifs associés aux rôles traditionnels des hommes et des femmes au sein de la famille et dans la société en général. Il s’inquiète en particulier de la représentation peu flatteuse des femmes dans les médias, qui relève parfois de l’exploitation et perpétue la discrimination dont les femmes et les filles font l’objet. À cet égard, il relève avec préoccupation que l’État partie n’a pas lancé de campagne nationale sur le thème de l’importance de l’égalité entre les hommes et les femmes comme l’avait recommandé le Comité dans ses précédentes observations finales. Il s’inquiète en outre de l’ampleur prise par le harcèlement en ligne, qui vise notamment les adolescentes. Le Comité s’inquiète également du fait que la pratique du mariage forcé soit encore imposée aux jeunes filles issues de l’immigration.

Le Comité exhorte l’État partie :

a) À organiser sans tarder une campagne nationale sur le thème de l’importance de l’égalité entre les femmes et les hommes dans une société démocratique, en vue de faire mieux comprendre ce que veut dire et ce que comporte l’égalité de fait des femmes et des hommes et d’éliminer les stéréotypes négatifs associés aux rôles traditionnels des hommes et des femmes au sein de la famille et dans la société en général, conformément à l’alinéa f) de l’article 2 et à l’alinéa a) de l’article 5 de la Convention;

b) À recueillir de manière systématique des données sur les pratiques préjudiciables, notamment le harcèlement en ligne qui vise les adolescentes, et à mettre en œuvre des mesures telles que le lancement de campagnes de sensibilisation dans les établissements scolaires pour prévenir de telles pratiques;

c) À prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre la pratique des mariages précoces et forcés dans les communautés de migrants et à lancer des campagnes de sensibilisation à ce sujet.

Violences faites aux femmes

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour protéger les femmes contre les violences par le biais de ses cadres législatif et institutionnel. Sur le plan législatif, plusieurs modifications ont été apportées au droit pénal afin de renforcer la protection des droits des victimes; de nouveaux pouvoirs sont notamment accordés à la police, qui peut désormais délivrer des ordonnances de protection en urgence pour protéger les victimes de violences familiales. Le Comité note aussi que la loi autorise les juridictions pénales à délivrer des ordonnances de protection au nom des victimes dans les affaires de violences familiales.

Tout en prenant note des travaux du Groupe de travail sur la violence familiale, le Comité s’inquiète du niveau de représentation peu élevé au sein de cette instance. Il note aussi que beaucoup des recommandations qui figuraient dans le rapport du Groupe de travail sur la violence sexuelle n’ont pas encore été appliquées. Il prend note par ailleurs de l’augmentation du nombre de tribunaux chargés spécifiquement des affaires de violences familiales et de l’adoption de plusieurs initiatives de sensibilisation telles que la campagne « It’s not OK », qui vise à lutter contre ce phénomène. Malgré ces changements positifs, le Comité est préoccupé par les niveaux élevés et croissants de violence à l’égard des femmes et par les faibles taux de signalement de ces actes et de condamnation de leurs auteurs, en particulier dans les affaires de violences sexuelles. Il relève aussi avec inquiétude l’insuffisance des données statistiques sur les violences faites aux femmes, notamment les femmes maories, les migrantes et les femmes handicapées.

Le Comité appelle l’État partie :

a) À prendre les mesures nécessaires pour encourager le signalement des cas de violences familiales et sexuelles, notamment en s’assurant que les professionnels de l’éducation et de la santé et les travailleurs sociaux sont parfaitement au fait de la législation en vigueur, sensibilisés à toutes les formes de violences faites aux femmes et capables de s’acquitter de l’obligation de signalement qui est la leur;

b) À renforcer la formation des policiers, des procureurs, d u personnel judiciaire et des autres représentants d ’organismes d’État compétents en matière de violences familiales et sexuelles;

c) À fournir une assistance et une protection adéquates aux femmes victimes de violences, notamment les femmes maories et les migrantes, en s’assurant qu’elles bénéficient des services juridiques et psychosociaux nécessaires;

d) À relever le niveau de représentation au sein du Groupe de travail sur la violence familiale et lui affecter des ressources appropriées de façon à améliorer la manière dont cette entité est perçue sur le territoire de l’État partie;

e) À assurer le recueil et la publication systématiques de données ventilées par sexe, appartenance ethnique, type de violence s et nature des liens entre l’agresseur et la victime; à recueillir des données sur le nombre de femmes tuées par leur compagnon ou ex-compagnon; et à vérifier l’efficacité des lois, politiques et pratiques relatives à la lutte contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité se félicite du Plan de lutte contre la traite des personnes de 2009 et de la protection renforcée offerte aux travailleurs du sexe depuis l’adoption de la loi de 2003 relative à la réforme de la prostitution, mais regrette l’absence d’informations et de données détaillées sur la traite des femmes et des filles. Il note qu’il n’y a eu aucune poursuite ou condamnation pour traite de femmes et de filles et se demande si cette situation n’est pas liée à une méconnaissance du danger de la traite et de l’exploitation, compte tenu notamment de tout ce que l’on sait sur la traite des femmes et des filles migrantes, et en particulier du phénomène des mariages arrangés par correspondance et par Internet.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De rechercher, poursuivre et punir les trafiquants et garantir la protection des droits fondamentaux des femmes et des filles victimes de la traite;

b) De s’assurer que les femmes et les filles victimes de la traite bénéficient d’un accompagnement adéquat afin d’être en mesure de témoigner contre leurs trafiquants;

c) De procéder à des contrôles systématiques et des évaluations périodiques, notamment en recueillant et analysant de s données sur la traite et l’exploitation des femmes dans la prostitution et d’inclure ces données dans son prochain rapport périodique;

d) De renforcer la sensibilisation aux dangers de la traite et de l’exploitation et de faire des efforts pour aller, dans une démarche préventive, à la rencontre des populations vulnérables, qui incluent les femmes et les filles migrantes, et notamment des femmes mariées par correspondance et par Internet.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité note le degré élevé de participation des femmes à la vie publique et relève que l’État partie s’est classé sixième sur les 135 pays étudiés dans le Global Gender Gap Report de 2011, qui analyse les disparités entre les sexes dans le monde, et 15e sur 134 pour la représentation des femmes au Parlement. Malgré la forte présence de femmes au sein de l’administration centrale et des collectivités locales ainsi que du service diplomatique, le Comité constate avec inquiétude que les femmes restent sous-représentées aux postes de direction et à haut niveau dans les professions judiciaires, notamment la magistrature, et que leur présence au sein de l’administration a diminué depuis la présentation du dernier rapport de l’État partie. Il note que, si le Gouvernement et le secteur privé s’emploient de concert à définir des objectifs pour la promotion des femmes à des postes de décision, les cibles, objectifs et échéances fixés ne sont pas suffisants, signe éventuel d’une régression plutôt que d’un progrès dans la représentation des femmes.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre des mesures pour que davantage de femmes occupent des postes de décision à tous les niveaux et dans tous les domaines, à la lumière de la recommandation n o 23 du Comité sur les femmes dans la vie politique et publique;

b) De redoubler d’efforts pour diffuser d es informations relatives à la Convention auprès des acteurs privés et publics de manière à les sensibiliser à ce que signifie l’égalité réelle des femmes et des hommes;

c) De réexaminer les cibles, objectifs et échéances fixés pour la promotion des femmes à des postes de décision, de manière à s’assurer qu’ils font suffisamment progresser la représentation des femmes.

Éducation

Le Comité salue plusieurs avancées de l’État partie dans le domaine de l’éducation, et notamment l’augmentation du nombre d’enfants fréquentant des établissements préscolaires, l’amélioration des taux de rétention des filles dans le secondaire et l’augmentation constante du nombre de femmes obtenant des diplômes universitaires. Il se félicite en outre de l’information communiquée par l’État partie selon laquelle il y a davantage de femmes que d’hommes dans l’enseignement supérieur et les femmes maories et celles en provenance des îles du Pacifique sont plus nombreuses aux différents niveaux d’enseignement (certificat, diplôme, maîtrise et doctorat) que leurs homologues d’Europe ou d’Asie. Le Comité craint toutefois que l’État partie n’ait pas suffisamment fait connaître le caractère facultatif des droits de scolarité, comme il l’avait recommandé dans ses observations finales précédentes. De ce fait, les parents se sentent peut-être tenus d’acquitter ces droits, qui sont un fardeau financier pour les ménages à faible revenu et les familles monoparentales. Le Comité constate aussi avec inquiétude que le taux global de décrochage scolaire des filles maories a augmenté ces dernières années malgré une amélioration au niveau de l’enseignement supérieur. Il s’inquiète par ailleurs de la persistance de stéréotypes sexistes dans le choix des matières étudiées, qui se répercute sur les perspectives d’emploi et perpétue la ségrégation professionnelle.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De formuler un programme rationnel qui permette de s’assurer que les parents comprennent bien le caractère facultatif des paiements réclamés par les établissements scolaires et de surveiller les pratiques de ce s établissements quant à la collecte de droits de scolarité auprès des parents;

b) De recueillir des données sur le coût réel de l’éducation pour les parents;

c) De prendre des mesures pour réduire les taux de décrochage scolaire chez les filles maories et réinsérer ces élèves dans le système scolaire;

d) De mettre en place des mesures de déségrégation des matières scolaires en vue d’assurer l’égalité d’accès des femmes et des filles aux disciplines non traditionnelles dans le but d’élargir le ur s perspectives d’emploi et de mettre fin à la ségrégation professionnelle.

Emploi

Le Comité note avec inquiétude le taux de chômage élevé, qui touche plus particulièrement les jeunes femmes et les minorités ethniques, et constate la persistance d’une forte ségrégation professionnelle. Tout en prenant acte avec satisfaction de l’extension du congé parental aux travailleurs indépendants, il s’interroge sur les problèmes que posent la mise en place du congé parental, notamment du congé parental rémunéré pour les hommes, l’octroi de congés rémunérés aux travailleurs saisonniers ou temporaires ayant plusieurs employeurs et les difficultés rencontrées pour augmenter la représentation des femmes aux postes d’encadrement et de décision. Le Comité s’inquiète également des propositions de révision de la législation des négociations collectives, qui permettraient aux employeurs de recruter de nouveaux salariés à des conditions individuelles moins favorables, même lorsque les syndicats ont négocié des accords collectifs. Il note par ailleurs que le nombre de femmes dirigeant des entreprises privées ou membres de conseils d’administration d’entreprises a légèrement diminué depuis 2007. Il a aussi appris avec inquiétude la suppression du Service pour l’équité en matière de rémunération et d’emploi au Ministère du travail et constate que le Ministère de la condition de la femme ne dispose d’aucune politique cohérente pour combler les écarts salariaux persistants entre les femmes et les hommes.

  Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De promulguer une législation garantissant la mise en œuvre du principe «  à travail égal, salaire égal  » , conformément à l ’ alinéa d) de l ’ article 11 de la Convention;

b) De veiller à l ’ application effective de ce principe en définissant des mesures et des indicateurs spécifiques, en fixant des échéances pour corriger les inégalités salariales dans différents secteurs et en réexaminant les responsabilités des hauts fonctionnaires en matière de politiques salariales;

c) De mettre en place des mesures législatives appropriées pour garantir le congé parental, notamment le congé parental rémunéré pour les hommes, ainsi que le congé rémunéré pour les travailleurs saisonniers ou temporaires ayant plusieurs employeurs, et d ’ envisager la ratification de la Convention n o 156 de l ’ Organisation internationale du Travail sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales;

d) D ’ adopter des politiques et de prendre toutes les mesures nécessaires, dont des mesures temporaires spéciales assorties d ’ échéances, en application du paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et de la recommandation générale n o 25 du Comité, pour mettre un terme à la ségrégation professionnelle, tant horizontale que verticale;

e) D ’ effectuer une évaluation indépendante des incidences en fonction du sexe de la réforme de la législation sur les négociations collectives et de s ’ assurer que les changements envisagés n ’ont pas de répercuss ions défavorables sur l ’ emploi des femmes et leurs droits syndicaux;

f) De s ’ assurer qu ’ il existe au sein de son administration un observatoire des disparités salariales entre les hommes et les femmes, malgré la suppression du Service pour l ’ équité en matière de rémunération et d ’ emploi au Ministère du travail.

Santé

Le Comité félicite l’État partie de l’action qu’il mène pour protéger les droits des femmes en matière de santé procréative et d’hygiène sexuelle et prévenir la mortalité maternelle. Il s’inquiète, toutefois, du caractère complexe des lois sur l’avortement, qui imposent aux femmes d’obtenir des certificats auprès de deux consultants certifiés avant de pouvoir avorter, ce qui les rend dépendantes de l’interprétation en leur faveur d’une règle qui les prive de leur autonomie. Le Comité s’inquiète aussi du fait que l’État partie criminalise toujours l’avortement, ce qui conduit les femmes à recourir à des avortements illégaux, souvent dangereux. Il se réjouit des mesures prises pour améliorer les services de santé mentale destinés aux jeunes femmes, mais note avec préoccupation le taux élevé de suicide prévalant chez les jeunes femmes, notamment celles issues des minorités et de la migration. Le Comité prend acte du système très complet d’assurance maladie et du succès des récentes campagnes d’éducation dans le domaine de la santé, comme la campagne visant à promouvoir le dépistage du cancer du col de l’utérus et les directives sur les bonnes pratiques concernant les services de santé destinés aux lesbiennes et aux transsexuels, mais s’interroge quant à l’accessibilité et à la qualité de ces services. Il s’inquiète aussi des inégalités d’accès auxquelles font face les femmes issues des minorités en matière de soins de santé. Il note notamment avec préoccupation le taux élevé de grossesse chez les adolescentes maories, et le manque d’accès à une information adaptée à l’âge concernant la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation. Par ailleurs, le Comité s’inquiète de ce que certains praticiens, considérant qu’il est obligatoire de soumettre les femmes enceintes à un test de dépistage du VIH, soumettent certaines femmes à ce test sans leur consentement.

  Le Comité exhorte l ’ État partie :

a) À réviser la législation et les pratique s en matière d ’ avortement, dans un souci de simplification et dans l ’ optique de garantir la liberté de choix des femmes;

b) À faire en sorte que les femmes ne soient pas obligées de recourir à des avortements dangereux et à abroger les dispositions qui prévoient des sanctions à l ’ encontre des femmes choisissant d ’ avorter;

c) À prendre les mesures nécessaires pour trouver des solutions face aux problèmes de santé mentale que connaissent de plus en plus de jeunes filles, prévenir et combattre la consommation excessive d ’ alcool et l ’ usage des drogues et prévenir le suicide des jeunes filles, en particulier celles qui sont issues de la migration et des minorités;

d) À faire davantage pour améliorer les services de santé, notamment de santé mentale, destinés aux femmes issues des minorités, en particulier les femmes maories et originaires de s îles du Pacifique;

e) À améliorer l ’ accès aux services de santé destinés aux lesbiennes et aux transsexuels et la qualité de ces services;

f) À promouvoir, à grande échelle, l’éducation concernant les droits en matière d ’hygiène sexuelle et de santé de la procréation , en particulier en ce qui concerne la prévention des grossesses précoces et non désirées, et à renforcer les mesures d ’ assistance aux jeunes filles enceintes;

g) À faire en sorte que les femmes enceintes soient informées du caractère facultatif du dépistage du VIH et que le dépistage n ’ ait lieu qu ’ avec leur consentement éclairé.

Groupes de femmes défavorisées

Le Comité s’inquiète de la situation de certains groupes de femmes défavorisées (femmes handicapées, femmes issues de minorités ethniques et d’autres minorités, femmes vivant en zone rurale et migrantes), particulièrement exposées à diverses formes de discrimination en matière d’éducation, de santé, de vie sociale, de participation à la vie politique et d’emploi. Comme l’indique le rapport présenté par l’État partie, les femmes handicapées représentent une part anormalement importante des femmes sans qualification, sans emploi et à faible revenu. Le Comité craint que la nouvelle loi sur la sécurité sociale ne touche principalement les femmes maories, qui verront leurs prestations sociales diminuer. Il s’inquiète par ailleurs du faible nombre de programmes éducatifs et professionnels destinés aux femmes et aux filles handicapées. Il s’inquiète, enfin, des conséquences du séisme de Christchurch pour les femmes, en particulier les femmes vivant en zone rurale et les femmes âgées, qui seraient davantage sujettes au stress, à l’anxiété et à la dépression et sont davantage touchées par les déplacements et le chômage.

Le Comité recommande que l ’ État partie :

a) Fournisse dans son prochain rapport des données et renseignements sur la condition des femmes handicapées, des femmes vivant en zone rurale, des femmes âgées et des femmes issues de minorités ethniques, notamment en ce qui concerne leur accès à l ’ éducation, à l ’ emploi et aux services de santé;

b) S ’ assure que les réformes du système de protection sociale en cours ne portent pas préjudice aux groupes de femmes défavorisées et que soit menée une évaluation indépendante de leur s incidence s sur l ’ un et l ’ autre sexe;

c) Veille à ce que les mesures de relèvement mises en place après le séisme de 2011 tiennent compte de l ’ égalité entre les sexes et analyse l ’ incidence de ces mesures sur les deux sexes en s ’ appuyant sur des données ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique et toute autre caractéristique pertinente.

Discrimination à l’égard des femmes dans les relations conjugales et familiales

Le Comité s’inquiète des cas de mariages forcés qui ont été signalés dans les groupes issus de l’immigration et déplore qu’aucune loi n’interdise le mariage précoce et forcé. Il est également préoccupé par le fait qu’en matière de droit de la famille, les femmes migrantes ne soient pas suffisamment protégées, tant par la législation que dans la pratique, notamment contre le mariage forcé, la polygamie et les violences liées à la dot, et que des jeunes filles de 16 ans peuvent se marier avec le consentement de leurs parents.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De fixer l ’ âge minimum légal du mariage à 18 ans et de ne permettre aucune exception, même en cas de consentement parental;

b) D ’adopter des dispositions juridiques pour interdire les mariages précoces et forcés et de promouvoir les mesures visant à protéger les femmes touchées par la polygamie et les violences liées à la dot.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité exhorte l ’ État partie, en application de ses obligations au titre de la Convention, à mettre pleinement en œuvre la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et lui demande d ’ inclure des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne que l ’ application intégrale et effective de la Convention est nécessaire à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Il demande que toutes les mesures prises en vue de réaliser ces objectifs tiennent compte de l ’ égalité des sexes et reflètent explicitement les dispositions de la Convention et prie l ’ État partie d ’inclure des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Diffusion

Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées en Nouvelle-Zélande de manière à ce que la population du pays, en particulier les membres de l ’administration, les responsables politiques, les parlementaires et les organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, soient au fait des mesures prises pour assurer l ’ égalité de droit et de fait entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Il demande également à l’État partie de diffuser largement , en particulier auprès des organisations de femmes et de défense des droits de l ’ homme, le texte de ses propres recommandations générales, de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing, ainsi que les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l ’ Assemblée générale, intitulée «  Les femmes en l ’ an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e siècle  » .

Ratification d’autres instruments

Le Comité souligne que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribuerait à promouvoir l ’ exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc l ’ État partie à envisager de ratifier les instruments auxquels il n ’ est pas encore partie, à savoir la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille .

Suivi des observations finales

Le C omité demande à l ’ État partie de lui fournir par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures prises pour donner suite aux recommandations formulées aux paragraphes 36 et 38 ci-dessus.

Élaboration du prochain rapport

Le Comité prie l ’ État partie de veiller à associer tous les ministères et organismes publics à l ’ élaboration de son prochain rapport et à également consulter plusieurs organisations de femmes et de défense des droits de l ’ homme.

Le Comité prie l ’ État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu ’ il lui soumettra en application de l ’article 18 de la Convention et l ’ invite à présenter son prochain rapport périodique en juillet 2016.

Le Comité invite l ’ État partie à suivre les «  Directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument  » , approuvé à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme en juin 2006 (voir HRI/MC/2006/3). Les directives sur l ’ établissement de rapports spécifiques à chaque instrument, adoptées par le Comité à sa quarantième session en janvier 2008, doivent être appliquées conjointement avec les directives harmonisées pour l ’ établissement d ’ un document de base commun. Ensemble, elles constituent les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre de la Convention sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes. Le document propre à cet instrument ne doit pas dépasser 40 pages et le document de base commun actualisé 80 pages.