Nations Unies

CRC/C/GC/24

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

18 septembre 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observation générale no 24 (2019) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour enfants

I.Introduction

1.La présente observation générale remplace l’observation générale no 10 (2007) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs. Elle tient compte des changements survenus depuis 2007 en raison de l’adoption de normes internationales et régionales, de la jurisprudence du Comité, des connaissances nouvelles sur le développement de l’enfant et de l’adolescent et d’éléments attestant de pratiques efficaces, y compris en matière de justice réparatrice. Elle tient aussi compte des préoccupations liées, notamment, aux tendances relatives à l’âge minimum de la responsabilité pénale et au recours persistant à la privation de liberté. La présente observation générale traite de questions spécifiques, telles que celles relatives aux enfants enrôlés et utilisés par des groupes armés non étatiques, y compris les groupes qualifiés de terroristes, et aux enfants qui ont affaire à des systèmes de justice coutumière ou autochtone ou à d’autres systèmes de justice non étatiques.

2.Les enfants diffèrent des adultes par leur degré de développement physique et psychologique. Ces différences constituent le fondement de la reconnaissance d’une responsabilité atténuée et d’un système distinct prévoyant une approche différenciée et personnalisée. Il a été démontré que l’exposition au système de justice pénale est préjudiciable aux enfants, en ce qu’elle limite leurs chances de devenir des adultes responsables.

3.Le Comité convient que la préservation de la sécurité publique est un but légitime du système de justice, y compris le système de justice pour enfants. Cependant, les États parties devraient servir ce but sous réserve de leur obligation de respecter et d’appliquer les principes de la justice pour enfants tels qu’ils sont consacrés par la Convention relative aux droits de l’enfant. Comme l’article 40 de la Convention le dispose clairement, tout enfant suspecté, accusé ou convaincu d’infraction à la loi pénale devrait toujours bénéficier d’un traitement qui soit de nature à favoriser son sens de la dignité et de la valeur personnelle. Les faits montrent que, d’une manière générale, la délinquance chez les enfants diminue après l’adoption de systèmes conformes aux principes susmentionnés.

4.Le Comité salue les nombreux efforts qui ont été faits pour mettre en place des systèmes de justice pour enfants conformes à la Convention. Il félicite les États qui ont adopté des dispositions qui sont plus favorables aux droits de l’enfant que celles qui figurent dans la Convention et la présente observation générale, et leur rappelle que, conformément à l’article 41 de la Convention, ils ne devraient prendre aucune mesure régressive. Il ressort des rapports des États parties que nombre d’États doivent encore engager d’importants investissements pour garantir le plein respect de la Convention, en particulier pour ce qui est de la prévention, de l’intervention précoce, de l’élaboration et de la mise en œuvre de mesures de déjudiciarisation, de l’approche multidisciplinaire, de l’âge minimum de la responsabilité pénale et du moindre recours à la privation de liberté. Le Comité appelle l’attention des États sur le rapport de l’Expert indépendant chargé de conduire l’Étude mondiale des Nations Unies sur les enfants privés de liberté (A/74/136), impulsée par le Comité, qui été soumis en application de la résolution 69/157 de l’Assemblée générale.

5.Ces dix dernières années, plusieurs déclarations et lignes directrices visant à promouvoir l’accès à la justice et une justice adaptée aux enfants ont été adoptées par des organismes internationaux et régionaux. Elles traitent des enfants dans tous les aspects des systèmes de justice, y compris les enfants victimes et témoins d’infractions, les enfants parties à des procédures en matière de protection sociale et les enfants traduits devant des tribunaux administratifs. Ces nouveaux éléments, quoique très utiles, n’entrent pas dans le cadre de la présente observation générale, qui porte essentiellement sur les enfants soupçonnés, accusés ou convaincus d’infraction à la loi pénale.

II.Objectifs et portée

6.Les objectifs et la portée de la présente observation générale sont les suivants :

a)Donner une interprétation contemporaine des articles et des principes pertinents de la Convention et orienter les États vers la mise en œuvre globale de systèmes de justice pour enfants qui promeuvent et protègent les droits de l’enfant ;

b)Rappeler l’importance de la prévention et de l’intervention précoce ainsi que de la protection des droits de l’enfant à toutes les étapes du système ;

c)Promouvoir des stratégies clefs visant à réduire les effets particulièrement nocifs du contact avec le système de justice pénale, compte tenu des connaissances accrues sur le développement de l’enfant, en particulier :

i)Établir un âge minimum de la responsabilité pénale approprié et faire en sorte que les enfants bénéficient d’un traitement adéquat, qu’ils n’aient pas encore atteint cet âge ou qu’ils l’aient dépassé ;

ii)Accroître le recours à la déjudiciarisation, pour soustraire les enfants aux procédures judiciaires formelles et les orienter vers des programmes efficaces ;

iii)Étendre l’application de mesures non privatives de liberté, afin que la détention d’un enfant soit une mesure de dernier ressort ;

iv)Mettre fin aux châtiments corporels, à la peine capitale et à la réclusion à vie ;

v)Dans les rares cas où la privation de liberté se justifie en tant que mesure de dernier ressort, veiller à ce que celle-ci s’applique uniquement à des enfants plus âgés, soit strictement limitée dans le temps et fasse l’objet d’un examen périodique ;

d)Promouvoir le renforcement des systèmes par des progrès en matière d’organisation, de développement des capacités, de collecte de données, d’évaluation et de recherche ;

e)Donner des informations sur les faits nouveaux survenus dans le domaine et traiter, en particulier, de l’enrôlement et de l’utilisation d’enfants par des groupes armés non étatiques, y compris les groupes qualifiés de terroristes, et des enfants qui ont affaire à des systèmes de justice coutumière ou autochtone et à des systèmes de justice non étatiques.

III.Terminologie

7.Le Comité recommande d’utiliser un langage non stigmatisant à l’égard des enfants soupçonnés, accusés ou convaincus d’infraction à la loi pénale.

8.Des termes importants employés dans la présente observation générale sont énumérés ci-après :

Adulte compétent : lorsque les parents ou les représentants légaux ne sont pas en mesure d’assister l’enfant, les États parties devraient permettre qu’un adulte compétent se charge de cette mission. Il peut s’agir d’une personne désignée par l’enfant ou par l’autorité compétente ;

Système de justice pour enfants : la législation, les normes et règles, les procédures, les mécanismes et les dispositions spécifiquement applicables aux enfants considérés comme des auteurs d’infractions, et les institutions et organes mis en place pour s’occuper de ces enfants ;

Privation de liberté : toute forme de détention ou d’emprisonnement, ou le placement d’une personne dans un établissement public ou privé dont elle n’est pas autorisée à sortir à son gré, ordonnés par une autorité judiciaire, administrative ou autre ;

Déjudiciarisation : mesures visant à soustraire les enfants au système judiciaire à tout moment, avant ou pendant la procédure applicable ;

Âge minimum de la responsabilité pénale : âge minimum établi par la loi en dessous duquel les enfants n’ont pas la capacité de commettre une infraction pénale ;

Détention provisoire : période de détention courant depuis le moment de l’arrestation jusqu’au prononcé de la décision ou de la peine et incluant la période de détention pendant le procès ;

Justice réparatrice : tout processus dans lequel la victime, l’auteur de l’infraction ou toute autre personne ou tout membre de la communauté subissant les conséquences de l’infraction participent ensemble et activement à la résolution des problèmes découlant de cette infraction, souvent avec l’aide d’un tiers juste et impartial. Les processus de réparation peuvent englober la médiation, le forum de discussion, la conciliation et le conseil de détermination de la peine.

IV.Éléments fondamentaux d’une politique globale de justice pour enfants

A.Prévention de la délinquance chez les enfants, y compris l’intervention précoce auprès des enfants n’ayant pas atteint l’âge minimum de la responsabilité pénale

9.Afin d’éclairer l’élaboration d’une stratégie de prévention, les États parties devraient consulter les Stratégies et mesures concrètes types des Nations Unies relatives à l’élimination de la violence à l’encontre des enfants dans le contexte de la prévention du crime et de la justice pénale, ainsi que les études comparatives nationales et internationales sur les causes profondes qui expliquent que des enfants aient affaire au système de justice pour enfants, et mener leurs propres travaux de recherche. Des études ont montré que des programmes de traitement familiaux et communautaires intensifs conçus pour apporter des changements positifs aux aspects des différents systèmes sociaux (foyer, école, communauté, relations entre pairs) qui favorisent l’émergence de graves problèmes comportementaux chez l’enfant réduisent le risque d’exposition des enfants au système de justice pour enfants. Les programmes de prévention et d’intervention précoce devraient faire une large place au soutien aux familles, notamment celles qui sont en situation de vulnérabilité ou qui connaissent des problèmes de violence. Un appui devrait être fourni aux enfants à risque, en particulier aux enfants qui abandonnent l’école, qui en sont exclus ou qui, de toute autre manière, n’achèvent pas leur scolarité. Le soutien d’un groupe de pairs et un engagement actif des parents sont recommandés. De plus, les États parties devraient mettre au point des services et des programmes locaux qui répondent aux besoins, problèmes, préoccupations et intérêts particuliers des enfants et qui fournissent des orientations et des conseils adaptés à leur famille.

10.Les articles 18 et 27 de la Convention confirment l’importance de la responsabilité qui incombe aux parents d’élever leurs enfants, tout en faisant obligation aux États parties d’accorder une aide appropriée aux parents (ou aux autres personnes ayant la charge de l’enfant) aux fins de l’exercice de cette responsabilité. Les investissements en faveur de l’éducation et de la protection de la petite enfance sont corrélés à des taux de violence et de criminalité ultérieures plus faibles. Les actions peuvent débuter lorsque l’enfant est très jeune, par exemple sous la forme de programmes de visite à domicile destinés à renforcer les capacités parentales. Les mesures d’assistance devraient s’appuyer sur la masse d’informations disponibles sur les programmes de prévention axés sur la famille et la communauté, tels que les programmes visant à améliorer l’interaction parent‑enfant, les partenariats avec les écoles, les relations positives avec des pairs et les activités culturelles et récréatives.

11.L’intervention précoce auprès des enfants qui n’ont pas atteint l’âge de la responsabilité pénale suppose la prise de mesures multidisciplinaires et adaptées à l’enfant dès les premiers signes d’un comportement qui serait constitutif d’une infraction si l’enfant avait atteint l’âge minimum de la responsabilité pénale. Les programmes d’intervention devraient être élaborés à partir de données factuelles et tenir compte non seulement des différentes causes psychosociales du comportement en question, mais aussi des facteurs de protection susceptibles de renforcer la résilience. Les interventions doivent être précédées d’une évaluation interdisciplinaire et exhaustive des besoins de l’enfant. Surtout, et cela constitue une priorité absolue, l’enfant devrait bénéficier d’un soutien dans sa famille et sa communauté. Dans les cas exceptionnels qui nécessitent un placement de l’enfant, la protection de remplacement devrait, de préférence, être assurée dans une structure familiale, même si le placement en institution peut être judicieux dans certains cas aux fins de la fourniture de l’ensemble des services professionnels nécessaires. Le placement en institution devrait être uniquement une mesure de dernier recours, appliquée pour la période la plus courte possible et soumise au contrôle des autorités judiciaires.

12.Une approche systémique de la prévention suppose également la limitation du recours au système de justice pour enfants par la dépénalisation d’infractions mineures telles que l’absentéisme scolaire, la fugue, la mendicité ou la violation de domicile, qui sont souvent le résultat de la pauvreté, du sans-abrisme ou de la violence familiale. Il arrive en outre que les enfants victimes d’exploitation sexuelle et les adolescents qui ont entre eux des relations sexuelles consenties fassent l’objet de poursuites pénales. Ces actes, également appelés « délits d’état », ne sont pas considérés comme des infractions lorsqu’ils sont le fait d’adultes. Le Comité prie instamment les États parties de supprimer les délits d’état de leur législation.

B.Interventions auprès des enfants ayant dépassé l’âge minimum de la responsabilité pénale

13.Selon le paragraphe 3 b) de l’article 40 de la Convention, les États parties sont tenus de promouvoir l’adoption de mesures permettant de traiter ces enfants sans recourir à la procédure judiciaire, chaque fois que cela est approprié. Dans la pratique, ces mesures se répartissent généralement en deux catégories :

a)Les mesures visant à soustraire les enfants au système judiciaire à tout moment, avant ou pendant la procédure applicable (déjudiciarisation) ;

b)Les mesures s’inscrivant dans le cadre de la procédure judiciaire.

14.Le Comité rappelle aux États parties que, lorsqu’ils appliquent les mesures relevant de l’une ou l’autre des catégories susmentionnées, ils devraient particulièrement veiller à faire respecter et protéger pleinement les droits de l’homme de l’enfant et les garanties légales qui lui sont offertes.

Interventions permettant d’éviter le recours à la procédure judiciaire

15.Des mesures concernant les enfants qui évitent le recours à une procédure judiciaire ont été intégrées dans de nombreux systèmes partout dans le monde ; elles sont généralement appelées « mesures de déjudiciarisation ». La déjudiciarisation consiste à soustraire les affaires au système de justice pénale formel, généralement pour privilégier des programmes ou des activités. Outre qu’elle évite la stigmatisation et les mentions au casier judiciaire, cette approche produit de bons résultats pour les enfants, est compatible avec la sûreté publique et a fait la preuve d’un bon rapport coût-efficacité.

16.La déjudiciarisation devrait être la solution à privilégier dans la majorité des affaires concernant des enfants. Les États parties devraient sans cesse étendre l’éventail des infractions pour lesquelles la déjudiciarisation est possible, jusqu’à y inclure des infractions graves, au besoin. Des possibilités de déjudiciarisation devraient pouvoir être offertes aussitôt que possible après l’entrée en contact avec le système de justice et aux divers stades de la procédure. La déjudiciarisation devrait faire partie intégrante du système de justice pour enfants et, conformément au paragraphe 3 b) de l’article 40 de la Convention, les droits de l’homme de l’enfant et les garanties légales offertes à celui-ci doivent être pleinement respectés et protégés dans tous les processus et programmes de déjudiciarisation.

17.Il appartient aux États parties de décider de la nature et de la teneur exactes des mesures de déjudiciarisation et de prendre les dispositions législatives et autres nécessaires à leur mise en œuvre. Le Comité prend note de l’élaboration de divers programmes axés sur la communauté, tels que les travaux d’intérêt général, les activités de supervision et d’orientation assurées par des responsables désignés, les conférences familiales et d’autres formes de justice réparatrice, y compris les mesures de réparation offertes aux victimes.

18.Le Comité tient à souligner ce qui suit :

a)Il ne faudrait recourir à la déjudiciarisation que lorsqu’il existe une preuve irréfutable que l’enfant a commis l’infraction qui lui est imputée ou lorsque l’enfant reconnaît librement et volontairement sa responsabilité, sans avoir subi d’actes d’intimidation ou de pressions, étant entendu que son aveu ne sera pas exploité à son détriment dans d’éventuelles poursuites judiciaires ;

b)Pour donner son consentement libre et volontaire à la mesure de déjudiciarisation, l’enfant devrait disposer d’informations suffisantes et précises sur la nature, la teneur et la durée de cette mesure et comprendre quelles seraient les conséquences d’une absence de coopération ou de l’inexécution de la mesure ;

c)La loi devrait préciser dans quels cas la déjudiciarisation est possible, et les décisions en la matière relevant de la police, des procureurs ou d’autres organismes devraient être réglementées et pouvoir être réexaminées. Tous les agents de l’État et acteurs qui participent au processus de déjudiciarisation devraient recevoir la formation et l’appui nécessaires ;

d)L’enfant doit avoir la possibilité de bénéficier d’une aide juridique ou de toute autre assistance appropriée en ce qui concerne la mesure de déjudiciarisation offerte par les autorités compétentes et doit pouvoir demander le réexamen de ladite mesure ;

e)Les mesures de déjudiciarisation ne devraient pas englober la privation de liberté ;

f)Une fois la mesure de déjudiciarisation exécutée, l’affaire devrait être définitivement classée. Les archives confidentielles concernant cette mesure qui peuvent être conservées à des fins administratives ou à des fins de réexamen, d’enquête et de recherche ne sauraient être considérées comme des condamnations pénales ou donner lieu à une mention au casier judiciaire.

Interventions dans le cadre de la procédure judiciaire (jugement)

19.Quand les autorités compétentes ouvrent une procédure judiciaire, les principes d’un jugement équitable s’appliquent (voir la section D ci-après). Le système de justice pour enfants devrait offrir des possibilités étendues d’appliquer des mesures sociales et éducatives et limiter strictement le recours à la privation de liberté, dès l’arrestation et pendant toute la procédure ainsi que dans le cadre de la détermination de la peine. Les États parties devraient se doter d’un service de probation ou d’un organisme analogue disposant d’un personnel qualifié pour garantir l’utilisation maximale et efficace de mesures telles que les ordonnances de supervision et d’orientation, la mise à l’épreuve, la surveillance par la communauté ou l’obligation de se présenter chaque jour dans un centre, et des possibilités de libération anticipée.

C.Âge et systèmes de justice pour enfants

Âge minimum de la responsabilité pénale

20.Les enfants qui commettent une infraction alors qu’ils n’ont pas atteint l’âge minimum de la responsabilité pénale ne peuvent pas être tenus pénalement responsables. Les enfants qui ont atteint ou dépassé l’âge minimum de la responsabilité pénale au moment de la commission d’une infraction, mais qui ont moins de 18 ans, peuvent être inculpés et faire l’objet de procédures de justice pour enfants, dans le strict respect de la Convention. Le Comité rappelle aux États parties que l’âge à prendre en considération est l’âge au moment de la commission de l’infraction.

21.Le paragraphe 3 de l’article 40 de la Convention impose aux États parties d’établir un âge minimum de la responsabilité pénale, mais ne donne pas de précisions quant à l’âge. Plus d’une cinquantaine d’États parties ont relevé l’âge minimum après avoir ratifié la Convention ; l’âge le plus souvent fixé au niveau international est celui de 14 ans. Cependant, il ressort des rapports soumis par les États parties que certains États maintiennent un âge de la responsabilité pénale très bas, qui n’est pas acceptable.

22.Selon les connaissances actuelles dans les domaines du développement de l’enfant et des neurosciences, la maturité et la capacité d’abstraction des enfants âgés de 12 à 13 ans sont encore en pleine évolution, le cortex frontal n’ayant pas fini de se développer. Il est donc peu probable que ces enfants aient conscience de la portée de leurs actes ou comprennent une procédure pénale. Ils subissent en outre les effets de leur entrée dans l’adolescence. Comme le Comité le souligne dans son observation générale no 20 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l’enfant pendant l’adolescence, l’adolescence correspond à un stade du développement humain sans équivalent qui se caractérise par un développement rapide du cerveau, ce qui se reflète dans la prise de risques, certains types de processus décisionnels et la capacité de contrôler ses impulsions. Les États parties sont encouragés à prendre note des résultats des recherches scientifiques récentes et à relever l’âge minimum en conséquence, en l’établissant à 14 ans au moins. De plus, les données dans les domaines des neurosciences et du développement de l’enfant montrent que le cerveau poursuit sa maturation après l’adolescence, ce qui a une incidence sur certains types de processus décisionnels. En conséquence, le Comité félicite les États parties qui ont fixé un âge de la responsabilité pénale plus élevé, par exemple 15 ou 16 ans, et prie instamment tous les États parties de s’abstenir d’abaisser l’âge minimum de la responsabilité pénale dans quelques circonstances que ce soit, conformément à l’article 41 de la Convention.

23.Le Comité admet que, s’il importe que soit fixé pour la responsabilité pénale un âge minimum raisonnablement élevé, l’efficacité de l’approche dépend aussi du traitement que chaque État réserve aux enfants qui ont dépassé cet âge et à ceux qui ne l’ont pas encore atteint. Le Comité continuera d’accorder une grande attention à ce point dans le cadre de l’examen des rapports des États parties. Les enfants qui n’ont pas atteint l’âge minimum de la responsabilité pénale doivent recevoir l’aide et les services dont ils ont besoin de la part des autorités compétentes et ne devraient pas être considérés comme des enfants qui ont commis une infraction pénale.

24.Si, faute de preuve, il ne peut être établi que l’enfant n’a pas atteint l’âge de la responsabilité pénale ou qu’il a dépassé cet âge, l’enfant doit avoir le bénéfice du doute et ne pas être tenu pénalement responsable.

Systèmes prévoyant des exceptions concernant l’âge minimum

25.Le Comité est préoccupé par l’existence de pratiques qui permettent d’appliquer un âge minimum de la responsabilité pénale plus bas dans les cas où, par exemple, l’enfant est présumé coupable d’une infraction grave. Ces pratiques sont généralement adoptées sous la pression de l’opinion publique et ne sont pas fondées sur une compréhension rationnelle du développement de l’enfant. Le Comité recommande vivement aux États parties de mettre fin à ces pratiques et de fixer un âge de la responsabilité pénale normalisé en deçà duquel les enfants ne peuvent pas faire l’objet de poursuites pénales, sans exception.

Systèmes prévoyant deux âges minima

26.Plusieurs États parties appliquent deux âges minima de la responsabilité pénale (7 et 14 ans, par exemple), en présumant que l’enfant qui a atteint ou dépassé l’âge le plus bas mais n’a pas atteint l’âge le plus élevé n’est pas pénalement responsable à moins qu’il ne soit démontré qu’il possède une maturité suffisante. Ce système, initialement conçu pour protéger l’enfant, n’a pas fait ses preuves dans la pratique. L’idée d’une détermination de la responsabilité pénale au cas par cas recueille un certain appui mais, comme le Comité l’a fait observer, elle laisse beaucoup de latitude aux tribunaux et se traduit par des pratiques discriminatoires.

27.Les États sont instamment priés d’établir un âge minimum unique approprié et de veiller à ce qu’une telle réforme n’entraîne pas une régression concernant l’âge de la responsabilité pénale.

Irresponsabilité pénale des enfants présentant des retards de développement ou des troubles ou handicaps neurodéveloppementaux

28.Les enfants qui présentent des retards de développement ou des troubles ou handicaps neurodéveloppementaux (troubles du spectre de l’autisme, troubles causés par l’alcoolisation fœtale ou lésions cérébrales acquises, par exemple) ne devraient pas du tout avoir affaire au système de justice pour enfants, même s’ils ont atteint l’âge minimum de la responsabilité pénale. À défaut d’une exclusion automatique, ces enfants devraient faire l’objet d’une évaluation individuelle.

Application du système de justice pour enfants

29.Le système de justice pour enfants devrait s’appliquer à tous les enfants qui ont atteint l’âge minimum de la responsabilité pénale mais qui ont moins de 18 ans au moment de la commission de l’infraction.

30.Le Comité recommande aux États parties qui limitent l’applicabilité de leur système de justice pour enfants aux enfants de moins de 16 ans (voire aux enfants encore plus jeunes) ou qui autorisent, à titre exceptionnel, que certains enfants soient traités comme des adultes (en raison de la catégorie de l’infraction, par exemple) de modifier leur législation de sorte que leur système de justice pour enfants s’applique pleinement et sans discrimination à toutes les personnes qui ont moins de 18 ans au moment de la commission de l’infraction (voir aussi l’observation générale no 20, par. 88).

31.Les systèmes de justice pour enfants devraient aussi accorder une protection aux personnes qui avaient moins de 18 ans lorsque l’infraction a été commise mais qui ont eu 18 ans pendant le procès ou le processus de détermination de la peine.

32.Le Comité félicite les États parties qui autorisent l’application du système de justice pour enfants aux personnes âgées de 18 ans et plus, en règle générale ou à titre exceptionnel. Cette position est en accord avec les données disponibles dans les domaines du développement de l’enfant et des neurosciences, qui montrent que le cerveau poursuit son développement un peu au-delà de 20 ans.

Actes de naissance et détermination de l’âge

33.Un enfant qui n’est pas en possession d’un acte de naissance devrait s’en voir délivrer un rapidement et gratuitement par les services de l’État chaque fois que la preuve de son âge doit être apportée. Si l’âge ne peut pas être établi au moyen d’un acte de naissance, les autorités devraient accepter tout document pouvant attester l’âge, tel qu’une déclaration de naissance, un extrait du registre des naissances, un acte de baptême ou document équivalent, ou des bulletins scolaires. En l’absence de preuve du contraire, ces documents devraient être considérés comme authentiques. Les autorités devraient permettre que des entretiens soient menés avec les parents ou que la déposition de ceux-ci soit recueillie concernant l’âge de l’enfant ou permettre que les enseignants ou les chefs religieux ou communautaires qui connaissent l’âge de l’enfant rédigent une déclaration à ce sujet.

34.Ce n’est que lorsque ces mesures se révèlent infructueuses qu’il pourra être procédé à une évaluation du développement physique et psychologique de l’enfant par des pédiatres ou d’autres professionnels capables d’évaluer différents aspects du développement. Cette évaluation devrait être faite sans délai, d’une manière respectueuse de l’enfant, qui tienne compte des questions de genre et soit adaptée à la culture de l’enfant, et comporter des entretiens avec l’enfant et avec ses parents ou les personnes qui s’occupent de lui, dans une langue que l’enfant comprend. Les États devraient s’abstenir de recourir uniquement à des méthodes médicales fondées, entre autres, sur les analyses osseuses et dentaires, qui sont souvent imprécises en raison de grandes marges d’erreur et peuvent aussi être traumatisantes. La méthode d’évaluation la moins invasive devrait être retenue. En l’absence d’éléments probants, l’enfant ou le jeune doit avoir le bénéfice du doute.

Continuité des mesures de justice pour enfants

35.Le Comité recommande que les enfants qui atteignent l’âge de 18 ans avant la fin d’un programme de déjudiciarisation, d’une mesure non privative de liberté ou d’une mesure de détention soient autorisés à exécuter le programme, la mesure ou la peine en question jusqu’à son terme et ne soient pas transférés dans un centre pour adultes.

Infractions commises avant et après l’âge de 18 ans et infractions commises avec des adultes

36.Lorsqu’un jeune est l’auteur de plusieurs infractions, certaines commises avant l’âge de 18 ans et d’autres commises après cet âge, les États parties devraient envisager de prévoir des règles procédurales permettant que le système de justice pour enfants s’applique pour toutes ces infractions, lorsqu’il existe des motifs raisonnables de le faire.

37.Lorsqu’un enfant commet une infraction avec un adulte ou avec plusieurs adultes, les règles du système de justice pour enfants lui sont appliquées, que les auteurs de l’infraction soient jugés ensemble ou séparément.

D.Garanties d’un procès équitable

38.Le paragraphe 2 de l’article 40 de la Convention contient une liste importante de droits et de garanties visant à ce que chaque enfant ait droit à un traitement et à un procès équitables (voir aussi l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques). Il convient de noter qu’il s’agit de normes minimales. Les États parties peuvent et devraient s’efforcer de définir et d’appliquer des normes plus exigeantes.

39.Le Comité souligne que la formation continue et systématique des professionnels du système de justice pour enfants est essentielle pour faire respecter les garanties susmentionnées. Ces professionnels devraient être capables de travailler dans des équipes interdisciplinaires et être bien informés du développement physique, psychologique, mental et social de l’enfant et de l’adolescent, ainsi que des besoins particuliers des enfants les plus marginalisés.

40.Des garanties contre la discrimination sont nécessaires dès le premier contact avec le système de justice pénale et tout au long du procès, et toute discrimination à l’égard d’un groupe d’enfants, quel qu’il soit, appelle des mesures de réparation actives. Une attention particulière tenant compte des questions de genre devrait être accordée aux filles ainsi qu’aux enfants qui subissent une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. Des aménagements devraient être apportés pour les enfants handicapés, notamment en ce qui concerne l’accès physique aux tribunaux et à d’autres bâtiments, l’aide aux enfants qui ont un handicap psychosocial, l’assistance en matière de communication et de lecture des documents et les aménagements procéduraux pour les témoignages.

41.Les États parties devraient adopter des lois et garantir des pratiques qui protègent les droits de l’enfant dès le moment où celui-ci entre en contact avec le système de justice, y compris au stade de l’interpellation, de la sommation ou de l’arrestation, pendant qu’il est gardé dans les locaux de la police ou d’autres services de répression, pendant les transferts vers et depuis les postes de police, les lieux de détention et les tribunaux, et pendant les interrogatoires, les fouilles et le prélèvement d’échantillons pouvant constituer des preuves. Le lieu où se trouve l’enfant pendant l’ensemble de ces phases et processus, ainsi que son état, devraient être consignés sur des registres.

Non-rétroactivité de l’application de la justice pour enfants (art. 40 (par. 2 a)))

42.Aucun enfant ne sera reconnu coupable d’infraction à la loi pénale pour un acte qui ne constituait pas une infraction pénale, au regard du droit national ou international, au moment où il a été commis. Les États parties qui développent leurs dispositions pénales dans le but de prévenir et de combattre le terrorisme devraient veiller à ce que ces changements n’entraînent pas l’application rétroactive ou involontaire de sanctions à des enfants. Aucun enfant ne devrait se voir imposer une peine plus lourde que celle qui était applicable au moment où il a commis l’infraction ; en revanche, l’enfant devrait profiter de toute modification apportée à la loi après la commission de l’infraction allant dans le sens d’un allégement de la peine prévue.

Présomption d’innocence (art. 40 (par. 2 b) i)))

43.La présomption d’innocence impose que la charge de la preuve incombe à l’accusation, quelle que soit la nature de l’infraction. L’enfant jouit du bénéfice du doute et n’est reconnu coupable que si les charges qui pesaient contre lui ont été prouvées au-delà d’un doute raisonnable. Un comportement suspect de l’enfant ne devrait pas être interprété comme un signe de culpabilité, car il peut être dû à une mauvaise compréhension de la procédure, à l’immaturité, à la peur ou à d’autres raisons.

Droit d’être entendu (art. 12)

44.Aux paragraphes 57 à 64 de l’observation générale no 12 (2009) sur le droit de l’enfant d’être entendu, le Comité expose le droit fondamental de l’enfant d’être entendu dans le contexte de la justice pour enfants.

45.L’enfant a le droit d’être entendu directement, et pas seulement par l’intermédiaire d’un représentant, à tous les stades de la procédure, dès son entrée en contact avec le système de justice. Il a le droit de garder le silence et l’exercice de ce droit ne devrait pas entraîner de présomptions défavorables.

Participation effective à la procédure (art. 40 (par. 2 b) iv)))

46.Un enfant ayant dépassé l’âge minimum de la responsabilité pénale devrait être considéré comme compétent pour participer à tous les stades de la procédure judiciaire. Aux fins de sa participation effective, l’enfant a besoin de l’appui de tous les professionnels concernés pour comprendre les faits qui lui sont reprochés et les conséquences et options possibles, afin de fournir des instructions à son représentant légal, de soumettre les témoins à un contre-interrogatoire, de présenter sa version des faits et de prendre des décisions appropriées concernant les éléments de preuve, les témoignages et les mesures qui seront imposées. La procédure devrait se dérouler dans une langue que l’enfant comprend parfaitement, faute de quoi les services d’un interprète doivent être fournis gratuitement. La procédure devrait se dérouler dans un climat de compréhension afin que l’enfant puisse y participer pleinement. Le développement d’un système de justice adapté aux enfants suppose de favoriser l’emploi d’un langage adapté aux enfants à tous les stades de la procédure, d’agencer les salles d’audition et les salles d’audience d’une manière qui réponde aux besoins des enfants, d’assurer aux enfants le soutien d’adultes compétents, de débarrasser la justice de son apparat intimidant et d’adapter la procédure, y compris des aménagements en faveur des enfants handicapés.

Notification rapide et directe des accusations (art. 40 (par. 2 b) ii)))

47.Tout enfant a le droit d’être informé dans le plus court délai et directement (ou, s’il y a lieu, par l’intermédiaire de ses parents ou représentants légaux) des accusations portées contre lui. Par l’expression « dans le plus court délai », on entend « aussitôt que possible après le premier contact de l’enfant avec le système de justice ». Il ne faudrait pas omettre d’informer les parents par commodité ou pour des motifs liés aux ressources. Les enfants dont les affaires font l’objet d’une déjudiciarisation au stade de l’accusation ont besoin de comprendre les possibilités juridiques qui leur sont offertes, et les garanties juridiques devraient être pleinement respectées.

48.Les autorités devraient faire en sorte que l’enfant comprenne les faits qui lui sont reprochés, les possibilités qui lui sont ouvertes et les procédures. Il ne suffit pas de présenter un document officiel à l’enfant, il faut aussi le lui expliquer oralement. L’enfant devrait recevoir l’aide d’un parent ou d’un adulte compétent pour comprendre tout document qui lui est présenté, mais les autorités ne devraient pas laisser à ces personnes le soin d’expliquer à l’enfant les faits qui lui sont reprochés.

Assistance juridique ou toute autre assistance appropriée (art. 40 (par. 2 b) ii)))

49.Les États devraient faire en sorte que l’enfant bénéficie d’une assistance juridique ou de toute autre assistance appropriée dès le début de la procédure, pendant la préparation et la présentation de sa défense et jusqu’à l’épuisement de toutes les possibilités de recours ou de réexamen. Le Comité prie les États parties de retirer toute réserve qu’ils auraient pu formuler au sujet du paragraphe 2 b) ii) de l’article 40 de la Convention.

50.Le Comité demeure préoccupé par le fait que de nombreux enfants répondent d’accusations pénales devant des autorités judiciaires, administratives ou d’autres autorités publiques et sont privés de liberté sans bénéficier d’une représentation juridique. Il fait observer que, conformément au paragraphe 3 d) de l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le droit d’être représenté en justice est une garantie minimale dont jouit toute personne ayant affaire au système de justice pénale, disposition qui devrait également s’appliquer aux enfants. Le même article dispose que la personne accusée est autorisée à se défendre elle-même et doit se voir attribuer un défenseur chaque fois que l’intérêt de la justice l’exige.

51.Au vu de ce qui précède, le Comité constate avec préoccupation que les enfants bénéficient d’une protection moindre que celle que le droit international garantit aux adultes. Il recommande aux États d’accorder une représentation juridique effective et gratuite à tout enfant qui a à répondre d’accusations pénales devant des autorités judiciaires, administratives ou d’autres autorités publiques. Les systèmes de justice pour enfants ne devraient pas permettre à l’enfant de renoncer à son droit d’être représenté en justice, à moins que cette décision ne soit prise librement et sous le contrôle d’un juge impartial.

52.Si l’enfant est réorienté vers un programme de déjudiciarisation ou s’il a affaire à un système qui n’aboutit pas à des condamnations, à l’inscription de mentions au casier judiciaire ou à des mesures privatives de liberté, une « autre assistance appropriée », fournie par des fonctionnaires qualifiés, peut constituer une forme d’assistance acceptable, même si les États qui sont en mesure de le faire devraient assurer aux enfants une représentation juridique pendant toute la procédure, conformément à l’article 41 de la Convention. Lorsqu’une autre assistance appropriée est autorisée, la personne qui fournit cette assistance est tenue d’avoir une connaissance suffisante des aspects juridiques du processus de justice pour enfants et doit recevoir la formation nécessaire.

53.Selon le paragraphe 3 b) de l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, il faut pouvoir disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de la défense. Conformément à la Convention relative aux droits de l’enfant, la confidentialité des communications entre l’enfant et son conseil juridique ou autre assistant doit être garantie (art. 40 (par. 2 b) vii))) et le droit de l’enfant à une protection contre toute immixtion dans sa vie privée ou sa correspondance doit être respecté (art. 16).

Décisions prises sans retard et en présence des parents ou représentants légaux(art. 40 (par. 2) b) iii)))

54.Le Comité rappelle que la période comprise entre la commission de l’infraction et la clôture de la procédure doit être aussi courte que possible. Plus cette période est longue, moins la procédure a de chances d’aboutir au résultat souhaité.

55.Le Comité recommande aux États parties de définir et de faire respecter des délais maxima concernant la période comprise entre la commission de l’infraction et l’achèvement de l’enquête policière, la décision du procureur (ou de tout autre organe compétent) d’inculper l’enfant et le prononcé du jugement définitif par le tribunal ou toute autre instance judiciaire. Ces délais doivent être beaucoup plus courts que ceux qui sont applicables aux adultes, sans pour autant compromettre le plein respect des garanties juridiques. Des délais tout aussi courts devraient être appliqués dans le cadre des mesures de déjudiciarisation.

56.Les parents ou les représentants légaux devraient être présents pendant toute la procédure. Néanmoins, le juge ou l’autorité compétente peut décider de limiter, de restreindre ou de refuser leur présence, à la demande de l’enfant ou de son conseil juridique ou autre assistant approprié, ou parce qu’elle n’est pas dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

57.Le Comité recommande aux États parties de légiférer expressément pour que les parents ou les représentants légaux participent autant que possible à la procédure car ils peuvent apporter un soutien psychologique et émotionnel général à l’enfant et contribuer à l’obtention de résultats efficaces. De plus, le Comité est conscient que beaucoup d’enfants vivent de manière informelle avec des proches qui ne sont ni leurs parents ni leurs représentants légaux et que la législation devrait être adaptée de sorte que les personnes qui s’occupent véritablement de l’enfant puissent l’assister pendant la procédure, si les parents ne sont pas disponibles.

Droit de ne pas être contraint de s’incriminer soi-même (art. 40 (par. 2 b) iv)))

58.Les États parties doivent veiller à ce que l’enfant ne soit pas contraint de témoigner, de faire des aveux ou de reconnaître sa culpabilité. Le recours à la torture ou à d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants pour obtenir une reconnaissance des faits ou des aveux constitue une violation grave des droits de l’enfant (Convention relative aux droits de l’enfant, art. 37 a)). Les déclarations et aveux ainsi obtenus sont irrecevables à titre de preuve (Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, art. 15).

59.Il est inacceptable d’user de la contrainte pour amener un enfant à faire des aveux ou à témoigner contre lui-même. Le terme « contraint » devrait être interprété au sens large et ne pas renvoyer uniquement à la force physique. Le risque de faux aveux est accru selon l’âge et le degré de développement de l’enfant, par le manque de compréhension, la crainte de conséquences inconnues, y compris la possibilité d’un placement en détention, ainsi que par la durée et les circonstances de l’interrogatoire.

60.L’enfant doit avoir accès à une assistance juridique ou à toute autre assistance appropriée et devrait bénéficier du soutien d’un parent, d’un représentant légal ou d’un autre adulte compétent pendant l’interrogatoire. Lorsqu’il s’agit de déterminer le caractère volontaire et la fiabilité des déclarations ou aveux faits par l’enfant, le tribunal ou tout autre organe judiciaire devrait tenir compte de tous les facteurs, à savoir l’âge et le degré de maturité de l’enfant, la durée de l’interrogatoire ou de la garde à vue et la présence du conseil juridique ou d’un autre assistant indépendant, du (des) parent(s), du représentant légal ou d’un adulte compétent. Les agents de police et autres autorités chargéesde l’enquête devraient être dûment formés afin de s’abstenir d’employer des techniques et des pratiques d’interrogatoire qui débouchent sur des aveux ou des témoignages forcés ou peu fiables, et les techniques audiovisuelles devraient être utilisées chaque fois que cela est possible.

Comparution et interrogatoire des témoins (art. 40 (par. 2) b) iv)))

61.L’enfant a le droit d’interroger les témoins à charge et de faire citerdes témoins à décharge ; les procédures de justice pour enfants devraient favoriser la participation de l’enfant, dans des conditions d’égalité, avecl’assistance d’un conseil.

Droit de réexamen ou de recours (art. 40 (par. 2 b) v)))

62.L’enfant a le droit de contester la déclaration de culpabilité ou les mesures qui lui ont été imposées devant une autorité ou instance judiciaire supérieure, compétente, indépendante et impartiale. Ce droit ne se limite pas aux infractions les plus graves. Les États parties devraient envisager d’adopter des mesures de recours automatiques, notamment dans les affaires qui aboutissent à l’inscription d’une mention au casier judiciaire ou à une privation de liberté. De plus, l’accès à la justice doit être interprété au sens large, de manière à permettre le réexamen ou la contestation de toute décision erronée, sur le fond ou sur la forme, et à garantir que des voies de recours utile soient disponibles.

63.Le Comité recommande aux États parties de retirer toute réserve qu’ils auraient pu formuler au sujet du paragraphe 2 b) v) de l’article 40 de la Convention.

Assistance gratuite d’un interprète (art. 40 (par. 2 b) vi)))

64.S’il ne comprend pas la langue utilisée dans le système de justice pour enfants ou s’il ne peut pas s’exprimer dans cette langue, l’enfant a le droit de bénéficier gratuitement de l’assistance d’un interprète, à tous les stades de la procédure. Les interprètes concernés devraient avoir été formés à travailler avec des enfants.

65.Les États parties devraient fournir l’assistance appropriée et efficace de professionnels qualifiés aux enfants qui ont des difficultés à communiquer.

Plein respect de la vie privée (art. 16 et 40 (par. 2 b) vii)))

66.Le droit de l’enfant à ce quesa vie privée soient pleinement respectée à tous les stades de la procédure est énoncé au paragraphe 2 b) vii) de l’article 40 de la Convention, qui devraitêtre lu conjointement avec l’article 16 et le paragraphe 1 de l’article 40.

67.Les États parties devraient respecter la règle voulant que les audiences concernant des enfants soient tenues à huis clos. Les exceptions à cette règle devraient être très limitées et clairement précisées dans la loi. Si le verdict ou la peine sont prononcés en audience publique, l’identité de l’enfant ne devrait pas être divulguée. De plus, le droit à la protection de la vie privée signifie que les dossiers judiciaires et procès-verbaux d’audience concernant des enfants devraient rester strictement confidentiels et incommunicables à des tiers, hormis les personnes directement concernées par l’enquête et le jugement de l’affaire.

68.Les noms des enfants ne devraient pas figurer dans les recueils de jurisprudence, y compris ceux qui sont consultables en ligne.

69.Le Comité recommande aux États de s’abstenir de consigner les données personnelles d’un enfant ou d’une personne qui était enfant au moment de la commission d’une infraction dans un quelconque registre public des délinquants. La mention de ces données dans des registres qui ne sont pas publics devrait également être évitée, en ce qu’elle compromet les chances de réinsertion.

70.Selon le Comité, il devrait exister une protection à vie contre la publication d’informations ayant trait aux infractions commises par des enfants. Cette règle de non‑publication et son maintien après que l’auteur de l’infraction a atteint l’âge de 18 ans se justifient en ce que la divulgation de telles informations entraîne pour la personne concernée une stigmatisation permanente, ce qui risque d’avoir des effets négatifs sur son accès à l’éducation, au travail, au logement ou à la sécurité, toutes choses qui empêchent l’enfant de se réinsérer et de jouer un rôle constructif dans la société. Les États parties devraient donc faire en sorte que la règle générale soit une protection de la vie privée durant toute la vie, concernant tous les types de médias, y compris les médias sociaux.

71.De plus, le Comité recommande aux États parties d’adopter des règles permettant que les mentions qui figurent au casier judiciaire des enfants soient effacées lorsque ceux-ci atteignent l’âge de 18 ans, de manière automatique ou, dans des cas exceptionnels, à l’issue d’un examen indépendant.

E.Mesures

Mesures de déjudiciarisation à tous les stades de la procédure

72.La décision de traduire un enfant devant le système de justice n’implique pas que l’enfant devra faire l’objet d’une procédure judiciaire formelle. Dans l’esprit des observations qu’il a formulées plus haut, à la section IV.B, le Comité insiste sur le fait que les autorités compétentes − le procureur dans la plupart des États − devraient réfléchir constamment à la manière d’épargner à l’enfant une procédure judiciaire ou une condamnation, par des mesures de déjudiciarisation et d’autres dispositions. Autrement dit, des possibilités de déjudiciarisation devraient être offertes aussitôt que possible après l’entrée en contact avec le système de justice, avant l’ouverture du procès, et être disponibles pendant toute la procédure. Il conviendra ce faisant de respecter pleinement les droits de l’hommede l’enfant et les garanties juridiques qui lui sont offertes, étant donné que les mesures de déjudiciarisation, de par leur nature et leur durée, peuvent être astreignantes et qu’une assistance juridique ou toute autre assistance appropriée sera donc nécessaire. Les mesures de déjudiciarisation devraient être présentées à l’enfant comme un moyen de suspendre la procédure judiciaire formelle, qui sera close si le programme de déjudiciarisation est exécuté de manière satisfaisante.

Jugement par le tribunal pour enfants

73.À l’issue d’un procès conforme aux dispositions de l’article 40 de la Convention (voir la section IV.D ci-dessus), une décision sur les mesures à prendre est rendue. La loi devrait prévoir un large éventail de mesures non privatives de liberté et donner expressément la priorité à leur application afin que la privation de liberté soit uniquement une mesure de dernier ressort et soit d’une durée aussi brève que possible.

74.Il existe de nombreux exemples d’utilisation et de mise en œuvre de mesures non privatives de liberté, y compris les mesures de justice réparatrice. Les États parties devraient mettre à profit cette expérience pour élaborer et appliquer des mesures non privatives de liberté qui soient adaptées à leurs propres cultures et traditions. Les mesures qui seraient assimilables à du travail forcé, à de la torture ou à des traitements inhumains et dégradants doivent être expressément proscrites et passibles de sanctions.

75.Le Comité réaffirme que le recours aux châtiments corporels à titre de sanction constitue une violation de l’article 37 a) de la Convention, qui interdit toutes les formes de peines ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants (voir aussi l’observation générale no 8 (2006) sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments).

76.Le Comité insiste sur le fait que la réaction à une infraction devrait toujours être proportionnée non seulement aux circonstances et à la gravité de l’acte commis, mais aussi à la situation personnelle de l’enfant (âge, responsabilité atténuée, circonstances et besoins, y compris, s’il y a lieu, les besoins en soins de santé mentale) et aux divers besoins de la société, en particulier les besoins à long terme. Une approche exclusivement répressive n’est pas conforme aux principes de la justice pour enfants énoncés au paragraphe 1 de l’article 40 de la Convention. Lorsque des infractions graves sont commises par des enfants, des mesures proportionnées à la situation de l’auteur de l’infraction et à la gravité de son acte peuvent être envisagées, sans que soit négligée la nécessité d’assurer la sûreté publique et de prendre des sanctions. L’intérêt supérieur de l’enfant devrait être une considération primordiale et toute l’importance voulue devrait être accordée à la nécessité de favoriser la réinsertion sociale de l’enfant.

77.Conscient que la privation de liberté est préjudiciable aux enfants et aux adolescents et compromet leurs chances de réinsertion réussie dans la société, le Comité recommande aux États parties d’établir une peine maximale pour les enfants reconnus coupables d’infractions pénales, en tenant compte du principe selon lequel cette peine doit être « d’une durée aussi brève que possible » (Convention relative aux droits de l’enfant, art. 37 b)).

78.Des peines minimales obligatoires sont incompatibles avec le principe de proportionnalité du système de justice pour enfants et avec la règle selon laquelle la détention doit être une mesure de dernier ressort et être d’une durée aussi brève que possible. Les tribunaux ne devraient pas tenir compte du passé judiciaire des enfants qu’ils sont chargés de juger ; même des régimes de peines minimales discrétionnaires empêchent la bonne application des normes internationales.

Interdiction de la peine de mort

79.L’article 37 a) de la Convention reprend la règle du droit international coutumier selon laquelle il est interdit d’imposer la peine de mort pour un crime commis par une personne de moins de 18 ans. Quelques États parties présument que l’interdiction concerne uniquement l’exécution de personnes de moins de 18 ans. D’autres diffèrent la date de l’exécution jusqu’à ce que le condamné ait atteint cet âge. Le Comité rappelle que le seul véritable critère est l’âge de l’intéressé au moment de la commission de l’infraction. En l’absence d’éléments fiables et probants établissant qu’il avait moins de 18 ans au moment des faits, l’auteur de l’infraction devrait avoir le bénéfice du doute et la peine de mort ne peut pas lui être appliquée.

80.Le Comité invite les rares États parties qui n’ont pas encore aboli la peine de la mort pour toutes les infractions commises par des personnes de moins de 18 ans à le faire sans délai et sans prévoir d’exceptions. Toute condamnation à la peine de mort prononcée contre une personne qui avait moins de 18 ans au moment de la commission de l’infraction devrait être commuée en une peine pleinement conforme à la Convention.

Pas de réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle

81.Aucun enfant qui était âgé de moins de 18 ans au moment où il a commis une infraction ne devrait être condamné à la réclusion à perpétuité sans possibilité de libération, y compris la libération conditionnelle. La période de détention devant être effectuée avant qu’une libération conditionnelle puisse être envisagée devrait être beaucoup plus courte que dans le cas des adultes et devrait être réaliste ; la possibilité de libération conditionnelle devrait être reconsidérée périodiquement. Le Comité rappelle aux États parties qui condamnent des enfants à des peines de réclusion à perpétuité assorties d’une possibilité de libération, y compris la libération conditionnelle, qu’ils devraient s’efforcer, dans le cadre de l’application de cette peine, de réaliser les buts du paragraphe 1 de l’article 40 de la Convention. Cela signifie notamment que l’enfant condamné à la réclusion à perpétuité devrait recevoir une éducation, un traitement et des soins en vue de sa libération et de sa réinsertion et afin qu’il ait la capacité d’assumer un rôle constructif dans la société. Cela nécessite aussi d’évaluer périodiquement le développement et les progrès de l’enfant pour décider d’une éventuelle libération. La réclusion à perpétuité rend très difficile voire impossible la réalisation des objectifs de réinsertion. Le Comité note que, dans son rapport de 2015, le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants constate que la réclusion à perpétuité et les peines de longue durée, telles que les peines consécutives, sont exagérément disproportionnées et, partant, cruelles, inhumaines ou dégradantes lorsqu’elles s’appliquent à un enfant (A/HRC/28/68, par. 74). Le Comité recommande vivement aux États parties d’abolir toute forme de réclusion à perpétuité, y compris les peines de durée indéterminée, pour toutes les infractions commises par des personnes qui avaient moins de 18 ans au moment des faits.

F.Privation de liberté, y compris la détention provisoire et l’incarcération après le jugement

82.L’article 37 de la Convention énonce des principes importants en matière de recours à la privation de liberté, les droits procéduraux de tout enfant privé de liberté et des dispositions relatives aux traitements et aux conditions applicables aux enfants privés de liberté. Le Comité appelle l’attention des États parties sur le rapport de 2018 du Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, dans lequel le Rapporteur spécial fait observer que l’ampleur des souffrances qu’endurent les enfants détenus ou internés impose que le monde se mobilise en faveur de l’abolition des prisons et grandes institutions où sont placés les enfants, et que la société investisse davantage dans les services de proximité (A/HRC/38/36, par. 53).

83.Les États parties devraient engager sans délai un processus visant à réduire au minimum le recours à la détention.

84.Aucune disposition de la présente observation générale ne devrait être interprétée comme encourageant ou appuyant le recours à la privation de liberté ; l’objectif est plutôt de définir les procédures et les conditions qu’il convient d’appliquer dans les rares cas où la privation de liberté est jugée nécessaire.

Principes directeurs

85.Les principes directeurs du recours à la privation de liberté sont les suivants : a) il ne doit être procédé à l’arrestation, à la détention ou à l’incarcération d’un enfant que conformément à la loi et en dernier ressort uniquement, et cette mesure doit être d’une durée aussi brève que possible ; b) nul enfant ne doit être privé de liberté de façon illégale ou arbitraire. L’arrestation marque souvent le début de la détention provisoire et les États devraient veiller à ce que la loi fasse clairement obligation aux agents des forces de l’ordre d’appliquer l’article 37 dans le contexte de l’arrestation. Les États devraient aussi veiller à ce que les enfants ne soient pas retenus dans des véhicules de transport ou des cellules de garde à vue, sauf en dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible, et à ce qu’ils ne soient pas détenus avec des adultes, à moins que cela serve leur intérêt supérieur. La priorité devrait être donnée aux dispositifs permettant que l’enfant soit rapidement libéré et rendu à ses parents ou confié à des adultes compétents.

86.Le Comité constate avec préoccupation que, dans de nombreux pays, les enfants sont maintenus en détention provisoire pendant des mois, voire des années, ce qui constitue une violation grave de l’article 37 b) de la Convention. La détention provisoire ne devrait être utilisée que dans les cas les plus graves et seulement après un examen attentif des possibilités de placement dans la communauté. La déjudiciarisation au stade précédant le jugement réduit le recours à la détention mais, même lorsque l’enfant est appelé à être jugé dans le système de justice pour enfants, il faudrait cibler avec soin des mesures non privatives de liberté, afin de limiter le recours à la détention provisoire.

87.La loi devrait spécifier les critères de recours à la détention provisoire, qui devraient être principalement la nécessité de garantir la comparution de l’enfant au procès et les cas où l’enfant représente un danger immédiat pour autrui. Si l’enfant est considéré comme représentant un danger (pour lui‑même ou pour autrui), des mesures de protection devraient lui être appliquées. La détention provisoire devrait faire l’objet d’un examen périodique et sa durée devrait être limitée par la loi. Tous les acteurs du système de justice pour enfants devraient donner la priorité aux affaires des enfants qui sont en détention provisoire.

88.En application du principe selon lequel la privation de liberté devrait être imposée pour la période la plus brève possible, les États parties devraient prévoir des possibilités de libération anticipée, y compris pendant la garde à vue, pour que l’enfant soit placé sous la protection de ses parents ou d’autres adultes compétents. Il devrait être possible de décider d’une libération avec ou sans conditions, comme celle consistant pour l’enfant à se présenter dans une structure ou à une personne habilitée. Il ne devrait pas y avoir d’obligation de versement d’une caution, étant donné que la plupart des enfants n’ont pas les moyens de payer et que cela constitue une discrimination à l’égard des familles pauvres et marginalisées. De plus, en fixant une caution, le tribunal reconnaît en principe que l’enfant devrait être libéré et d’autres mécanismes peuvent être utilisés pour garantir la présence de l’enfant au procès.

Droits procéduraux (art. 37 d))

89.Tout enfant privé de liberté a le droit d’avoir rapidement accès à l’assistance juridique ou à toute autre assistance appropriée, ainsi que le droit de contester la légalité de sa privation de liberté devant un tribunal ou une autre autorité compétente, indépendante et impartiale, et a droit à ce qu’une décision rapide soit prise en la matière. Le Comité recommande qu’aucun enfant ne soit privé de liberté, sauf pour des raisons avérées de sûreté ou de santé publiques, et encourage les États parties à fixer un âge en dessous duquel les enfants ne peuvent pas être légalement privés de liberté, 16 ans par exemple.

90.Tout enfant arrêté et privé de liberté devrait être présenté à une autorité compétente dans un délai de vingt-quatre heures afin que la légalité de sa privation de liberté ou de son maintien en détention soit examinée. Le Comité recommande aussi aux États parties de veiller à ce que la détention provisoire soit réexaminée périodiquement en vue d’y mettre fin. Dans les cas où il ne peut se voir accorder une libération conditionnelle pendant ou avant sa première comparution (dans un délai de vingt-quatre heures), l’enfant devrait être inculpé des faits qui lui sont reprochés et traduit devant un tribunal ou une autre autorité ou instance judiciaire compétente, indépendante et impartiale, afin que sa cause soit entendue aussitôt que possible et au plus tard trente jours après son placement effectif en détention provisoire. Eu égard à la pratique de l’ajournement répété ou prolongé des audiences, le Comité prie instamment les États parties de fixer des limites maximales pour le nombre et la durée des ajournements et d’adopter des dispositions législatives ou administratives tendant à ce que le tribunal ou toute autre instance compétente rende une décision définitive sur les faits reprochés dans les six mois suivant la date de début de la détention, faute de quoi l’enfant devrait être libéré.

91.Le droit de contester la légalité de la privation de liberté recouvre non seulement le droit de faire appel de décisions de justice, mais aussi le droit de saisir un tribunal aux fins du réexamen d’une décision administrative (prise, par exemple, par la police, le procureur ou d’autres autorités compétentes). Les États parties devraient fixer des délais brefs pour le traitement des recours et demandes de réexamen afin que des décisions soient prises rapidement, comme l’exige la Convention.

Traitement et conditions de détention (art. 37 c))

92.Tout enfant privé de liberté doit être séparé des adultes, y compris dans les cellules de garde à vue. L’enfant ne doit pas être placé dans un centre ou une prison pour adultes, de très nombreux éléments indiquant que cela nuit à sa santé et à sa sécurité fondamentale et compromet son aptitude future à ne pas retomber dans la délinquance et à se réinsérer. L’exception admise au principe de la séparation des enfants et des adultes, qui est énoncée à l’article 37 c) de la Convention − « à moins que l’on estime préférable de ne pas le faire dans l’intérêt supérieur de l’enfant » − devrait être interprétée strictement et les États parties ne devraient pas faire passer l’intérêt supérieur de l’enfant au second plan pour des raisons de commodité. Les États parties devraient mettre en place des structures distinctes pour les enfants privés de liberté, qui soient dotées d’un personnel dûment qualifié et fonctionnent selon des politiques et des pratiques adaptées aux enfants.

93.Il ne découle pas de cette règle qu’un enfant placé dans un établissement pour enfants devrait être transféré dans un établissement pour adultes dès qu’il a atteint l’âge de 18 ans. Il devrait pouvoir rester dans le même établissement si cela relève de son intérêt supérieur et n’est pas contraire à celui des enfants placés dans cet établissement.

94.Tout enfant privé de liberté a le droit de rester en contact avec sa famille par des courriers et des visites. Pour faciliter ces visites, l’enfant devrait être placé dans un établissement aussi proche que possible du domicile familial. Les circonstances exceptionnelles susceptibles de limiter ces contacts devraient être clairement décrites par la loi et ne pas être laissées à l’appréciation discrétionnaire des autorités.

95.Le Comité souligne que, dans tous les cas de privation de liberté, il convient d’observer, entre autres, les règles et principes suivants :

a)La détention au secret de personnes de moins de 18 ans n’est pas autorisée ;

b)Les enfants devraient bénéficier d’un environnement physique et de conditions de logement propices à la réalisation des objectifs de réinsertion qui sous‑tendent leur placement en établissement. Leurs besoins d’intimité et de stimuli sensoriels ainsi que leur besoin d’interagir avec d’autres enfants et de participer à des activités sportives, de faire de l’exercice physique et d’avoir des activités artistiques et récréatives devraient être dûment pris en considération ;

c)Tout enfant a droit à une éducation adaptée à ses besoins et à ses capacités, y compris le passage d’examens, et conçue pour le préparer au retour dans la société ; de plus, tout enfant devrait, s’il y a lieu, recevoir une formation professionnelle susceptible de le préparer à un emploi futur ;

d)Tout enfant a le droit d’être examiné par un médecin ou un professionnel de la santé dès son admission dans un centre de détention ou un établissement pénitentiaire et doit recevoir, tout au long de son séjour, les soins de santé physique et mentale dont il a besoin − lesquels devraient être dispensés, dans la mesure du possible, par les établissements et les services de santé locaux ;

e) Le personnel du lieu de détention devrait encourager et faciliter des contacts fréquents entre l’enfant et l’extérieur, notamment les communications avec sa famille, ses amis et d’autres personnes, y compris des représentants d’organismes extérieurs de bonne réputation, ainsi que les possibilités de visites dans sa famille. Aucune restriction ne doit être imposée à la possibilité pour l’enfant d’avoir à tout moment des entretiens confidentiels avec son avocat ou tout autre assistant ;

f)La contrainte ou la force ne peut être utilisée que lorsque l’enfant représente un danger imminent de blessure pour lui-même ou pour autrui et uniquement quand tous les autres moyens qui auraient pu permettre de le maîtriser ont été épuisés. La contrainte ne devrait pas être utilisée à des fins d’obéissance et ne devrait jamais impliquer d’actes visant à causer délibérément des souffrances. Elle ne doit jamais être utilisée à titre de sanction. L’usage de la contrainte ou de la force, y compris les moyens de contrainte physiques, mécaniques, médicaux ou pharmacologiques, devrait être placé sous la surveillance étroite, directe et constante d’un médecin ou d’un psychologue. Le personnel du centre de détention devrait recevoir une formation sur les normes applicables, et les membres du personnel qui utilisent la contrainte ou la force en violation des règles et des normes devraient être punis comme il convient. Les États devraient enregistrer, analyser et évaluer tous les cas d’utilisation de la contrainte ou de la force et faire en sorte de réduire au minimum le recours à ces pratiques ;

g)Toute mesure disciplinaire doit être compatible avec le respect de la dignité inhérente à l’enfant et les objectifs fondamentaux du placement en institution.Les mesures disciplinaires contraires aux dispositions de l’article 37 de la Convention doivent être strictement interdites, qu’il s’agisse des châtiments corporels, de la réclusion dans une cellule obscure, de la mise à l’isolement ou de toute autre punition qui peut nuire à la santé physique ou mentale ou au bien-être de l’enfant concerné ; les mesures disciplinaires ne devraient pas priver l’enfant de ses droits fondamentaux, notamment le droit de recevoir la visite de son représentant légal, le droit de rester en contact avec sa famille et les droits à l’alimentation, à l’eau, à l’habillement, à la literie, à l’éducation et à l’exercice physique ouà un contact réel et quotidien avec d’autres personnes ;

h)La mise à l’isolement ne devrait pas être utilisée à l’égard des enfants. Toute mesure consistant à séparer un enfant des autres devrait être prise uniquement en dernier ressort, être d’une durée aussi brève que possible et viser à protéger l’enfant ou autrui. Lorsqu’elle jugée nécessaire, la mesure consistant à séparer un enfant des autres devrait être mise en œuvre en présence ou sous la surveillance étroite d’un membre du personnel dûment qualifié, et les motifs et la durée de cette mesure devraient être consignés ;

i)Tout enfant devrait avoir le droit d’adresser, sans censure quant au fond, une requête ou une plainte à l’administration centrale, à l’autorité judiciaire ou à toute autre autorité indépendante compétente, et avoir le droit d’être informé sans délai de la réponse. Les enfants doivent connaître leurs droits et avoir connaissance des mécanismes de traitement des requêtes ou des plaintes et pouvoir y accéder facilement ;

j)Des inspecteurs indépendants et qualifiés devraient être habilités à procéder à des inspections régulières et à entreprendre, de leur propre initiative, des inspections inopinées des lieux de détention ; ils devraient s’attacher tout particulièrement à s’entretenir, dans un cadre confidentiel, avec les enfantsplacés en établissement ;

k)Les États parties devraient faire en sorte que rien n’incite à priver un enfant de liberté et qu’il n’existe aucune possibilité de corruption en ce qui concerne le placement de l’enfant, les biens et les services qui lui sont fournis ou les contacts avec sa famille.

G.Questions spécifiques

Tribunaux militaires et cours de sûreté de l’État

96.Selon une opinion qui commence à se faire jour, le jugement de civils par des tribunaux militaires et des cours de sûreté de l’État est contraire au droit, non susceptible de dérogation, de bénéficier d’un procès équitable devant une juridiction compétente, indépendante et impartiale. Il s’agit d’une violation des droits encore plus préoccupante lorsqu’elle concerne des enfants, car ceux-ci devraient toujours avoir affaire à des systèmes de justice pour enfants spécialisés. Le Comité a exprimé ses préoccupations à cet égard dans plusieurs observations finales.

Enfants enrôlés et utilisés par des groupes armés non étatiques, y compris des groupes qualifiés de terroristes, et enfants inculpés dans le contexte de la lutte contre le terrorisme

97.L’Organisation des Nations Unies a constaté de nombreux cas d’enrôlement et d’exploitation d’enfants par des groupes armés non étatiques, y compris des groupes qualifiés de terroristes, non seulement dans des zones de conflit, mais aussi dans des zones exemptes de conflits, dont les pays d’origine, de transit ou de renvoi des enfants.

98.Lorsqu’ils sont sous le contrôle de ces groupes, les enfants peuvent être victimes de diverses formes de violations, notamment : être soumis à la conscription ; suivre une formation militaire ; être utilisés dans des hostilités ou des actes terroristes, y compris des attentats-suicides ; être contraints de procéder à des exécutions ; être utilisés comme boucliers humains ; être victimes d’enlèvement, de vente, de traite, d’exploitation sexuelle ou de mariage d’enfants ; être utilisés pour le transport ou la vente de drogues ; ou être exploités aux fins de l’exécution de tâches dangereuses telles que l’espionnage, les activités de surveillance, la garde de postes de contrôle, les patrouilles ou le transport de matériel militaire. Il a été signalé que des groupes armés non étatiques et des groupes qualifiés de terroristes contraignent aussi des enfants à infliger des violences aux membres de leur propre famille ou de leur propre communauté pour qu’ils fassent la preuve de leur loyauté et soient dissuadés de toute défection à l’avenir.

99.Les autorités des États parties font face à un certain nombre de difficultés lorsqu’elles prennent en charge ces enfants. Certains États parties ont adopté une approche répressive, qui ne prend pas en considération les droits de l’enfant ou les prend en considération de manière limitée, ce qui a des conséquences durables pour le développement de l’enfant et compromet ses chances de réinsertion sociale et, partant, peut avoir de graves conséquences pour l’ensemble de la société. Souvent, ces enfants sont arrêtés, détenus, poursuivis et jugés pour les actes qu’ils ont commis dans des zones de conflit et aussi, dans une moindre mesure, dans leurs pays d’origine ou de renvoi.

100.Le Comité appelle l’attention des États parties sur la résolution 2427 (2018) du Conseil de sécurité, dans laquelle le Conseil insiste sur la nécessité d’établir des instructions permanentes pour le transfert rapide des enfants qui sont ou seraient associés à des groupes armés non étatiques, y compris ceux qui ont commis des actes de terrorisme, aux acteurs civils de la protection de l’enfance compétents. Le Conseil souligne que les enfants qui ont été enrôlés, en violation du droit international applicable, par des forces armées ou des groupes armés et ont été accusés d’avoir commis des crimes en temps de conflit armé doivent être traités en premier lieu comme des victimes de violations du droit international. De plus, le Conseil prie instamment les États Membres d’envisager, comme mesures de substitution aux poursuites et à la détention, des mesures non judiciaires qui mettent l’accent sur la réinsertion, et les engage à appliquer une procédure régulière pour tous les enfants détenus au motif de leur association avec des forces armées ou des groupes armés.

101.Les États parties devraient veiller à ce que tous les enfants accusés d’infractions pénales, indépendamment de la gravité des actes et du contexte, soient traités dans le respect des dispositions des articles 37 et 40 de la Convention, et devraient s’abstenir d’accuser et de poursuivre des enfants pour l’expression d’opinions ou pour le simple fait qu’ils ont été associés à un groupe armé non étatique, y compris les groupes qualifiés de terroristes. Conformément au paragraphe 88 de son observation générale no 20, le Comité recommande en outre aux États parties d’adopter des mesures préventives afin de venir à bout des facteurs sociaux et des causes profondes de ces faits, ainsi que des mesures de réinsertion sociale, y compris dans le cadre de l’application des résolutions du Conseil de sécurité relatives à la lutte contre le terrorisme, notamment les résolutions 1373 (2001), 2178 (2014), 2396 (2017) et 2427 (2018), et de la résolution 72/284 de l’Assemblée générale, en particulier les recommandations qui figurent au paragraphe 18.

Justice coutumière, justice autochtone et autres formes de justice non étatique

102.De nombreux enfants entrent en contact avec des systèmes de justice divers, qui fonctionnent parallèlement au système de justice formel ou en marge de ce système. Il peut s’agir de systèmes de justice coutumière, tribale, autochtone ou autre. Ces systèmes peuvent être plus accessibles que les mécanismes formels et présentent l’avantage de proposer rapidement et à relativement peu de frais des solutions adaptées aux particularités culturelles. Ils peuvent servir de substituts à la procédure officielle applicable aux enfants et sont de nature à faire évoluer favorablement les comportements culturels concernant les enfants et la justice.

103.Il est de plus en plus admis qu’il faudrait prêter attention à ces systèmes dans le cadre de la réforme des programmes du secteur de la justice. Compte tenu des tensions qui peuvent exister entre la justice étatique et la justice non étatique ainsi que des préoccupations au sujet des droits procéduraux et des risques de discrimination ou de marginalisation, toute réforme devrait se faire par étapes, selon une méthode reposant sur une parfaite compréhension des différents systèmes comparés et qui soit acceptable par toutes les parties prenantes. Les processus de justice coutumière et les décisions qui en découlent devraient être conformes au droit constitutionnel et respecter les garanties juridiques et procédurales. Il importe qu’il n’y ait pas de discrimination injuste si des enfants qui ont commis des infractions similaires sont traités différemment dans des systèmes ou instances parallèles.

104.Les principes de la Convention devraient être pris en compte dans tous les mécanismes de justice qui s’occupent des enfants et les États parties devraient veiller à ce que la Convention soit connue et appliquée. Les systèmes de justice coutumière, autochtone ou les autres systèmes de justicenon étatique permettent souvent l’adoption de mesures de justice réparatrice, qui peuvent être riches d’enseignements pour le système formel de justice pour enfants. De plus, la reconnaissance de ces systèmes de justice peut contribuer à un meilleur respect des traditions des sociétés autochtones, ce qui pourrait être bénéfique aux enfants autochtones. Les interventions, les stratégies et les réformes devraient être conçues pour des contextes précis et leur mise en œuvre devrait être pilotée par des acteurs nationaux.

V.Organisation du système de justice pour enfants

105.Aux fins de la pleine mise en œuvre des principes et des droits précisés dans les paragraphes précédents, il est nécessaired’organiser efficacement l’administration de la justice pour enfants.

106.Un système complet de justice pour enfants nécessite la mise en place de sections spécialiséesau sein de la police, du système judiciaire, des tribunaux et des bureaux du procureur, et la nomination de défenseurs ou d’autres représentants spécialiséschargésd’apporter une assistance juridique ou toute autre forme d’assistance appropriée à l’enfant.

107.Le Comité recommande aux États parties d’instituer des tribunaux pour enfants, en tant qu’entités distinctes ou en tant que subdivisions des tribunaux existants. Dans les cas où cela n’est pas réalisable pour des raisons pratiques, les États parties devraient veiller à la nomination de juges spécialisés dans le traitement desaffaires relevant de la justice pour enfants.

108.Des services spécialisés, notamment en matière de probation, de conseil ou de supervision, et des établissements spécialisés, par exemple des centres de traitement de jour et, au besoin, de petits établissements de soins et de traitement, devraient être créés à l’intention des enfants adressés par le système de justice pour enfants. Une coordination interinstitutions efficace des activités de l’ensemble de ces sections, services et établissements spécialisés devrait être constamment favorisée.

109.De plus, une évaluation individuelle des enfants et une approche multidisciplinaire sont encouragées. Une attention particulière devrait être attachée aux services spécialisés de proximité pour les enfants qui n’ont pas encore atteint l’âge de la responsabilité pénale, mais qui sont considérés comme ayant besoin d’aide.

110.Les organisations non gouvernementales peuvent jouer et jouent effectivement un rôle important dans la justice pour enfants. C’est pourquoi le Comité recommande aux États parties de favoriser la participation active de ces organisations à l’élaboration et à l’application de leur politique globale de justice pour enfants et, s’il y a lieu, de leur fournir les ressources nécessaires à cet effet.

VI.Sensibilisation et formation

111.Les enfants qui commettent des infractions ont souvent mauvaise presse, ce qui alimente les stéréotypes négatifs et discriminatoires à leur endroit. La perception négative dont ils sont l’objet ou le fait qu’ils soient traités comme des délinquants s’expliquent souvent par une présentation trompeuse ou une mauvaise compréhension des causes de la délinquance et débouchent régulièrement sur des appels en faveur d’une approche plus dure (tolérance zéro, règle dite « des trois infractions », peines obligatoires, jugement devant un tribunal pour adultes et autres mesures essentiellement répressives). Les États parties devraient s’employer à obtenir des parlementaires, des organisations non gouvernementales et des médias qu’ils contribuent activement à promouvoir et à soutenir les campagnes éducatives et autres visant à faire en sorte que tous les aspects de la Convention soient respectés s’agissant des enfants qui ont affaire au système de justice pour enfants. Il est capital que les enfants, en particulier ceux qui ont une expérience du système de justice pour enfants, soient associés à ces efforts de sensibilisation.

112.Pour que l’administration de la justice pour enfants soit de qualité, il est essentiel que tous les professionnels concernés reçoivent une formation multidisciplinaire appropriée sur la teneur et la signification de la Convention. Cette formation devrait être systématique et continue et ne devrait pas se limiter à la présentation des dispositions nationales et internationales pertinentes. Elle devrait rendre compte de l’état des connaissances et des nouvelles données dans divers domaines, notamment en ce qui concerne : les causes sociales et autres de la délinquance ; le développement social et psychologique de l’enfant, y compris les découvertes actuelles dans le domaine des neurosciences ; les inégalités qui peuvent être constitutives de discrimination à l’égard de certains groupes marginalisés, tels que les enfants appartenant à des minorités ou à des peuples autochtones ; la culture et les tendances chez les jeunes ; la dynamique des activités de groupe et les mesures de déjudiciarisation et peines non privatives de liberté disponibles, en particulier les mesures qui permettent d’éviter le recours à une procédure judiciaires. La possibilité d’utiliser certains procédés axés sur les nouvelles technologies, comme la « vidéocomparution », devrait être envisagée, mais les risques présentés par d’autres procédés, comme le profilage génétique, ne devraient pas être perdus de vue. L’efficacité des méthodes et des moyens employés devrait être constamment réévaluée.

VII.Collecte de données, évaluation et travaux de recherche

113.Le Comité prie instamment les États parties de recueillir systématiquement des données ventilées, notamment sur le nombre et la nature des infractions commises par des enfants, l’usage de la détention provisoire et la durée moyenne de cette mesure, le nombre d’enfants dont les affaires ont été traitées dans un cadre autre qu’une procédure judiciaire (déjudiciarisation), le nombre d’enfants qui ont été déclarés coupables, la nature des peines auxquelles ces enfants ont été condamnés, et le nombre d’enfants privés de liberté.

114.Le Comité recommande aux États parties de faire en sorte que leurs systèmes de justice pour enfants soient évalués périodiquement, en particulier pour ce qui est de l’efficacité des mesures prises et au regard de questions comme celles de la discrimination, de la réinsertion et des types d’infraction, de préférence par des établissements universitaires indépendants.

115.Il est important que les jeunes, en particulier ceux qui sont en contact ou qui ont été en contact avec le système de justice pour enfants, soient associés à ces activités d’évaluation et de recherche, et que lesdites activités soient menées dans le respect des directives internationales existantes sur la participation des enfants à la recherche.