Observations finales concernant le rapport unique valantseptième et huitième rapports périodiques de l’Allemagne *

Le Comité a examiné le rapport unique valant septième et huitième rapports périodiques de l’Allemagne (CEDAW/C/DEU/7-8) à ses 1482e et 1483e séances, tenues le 21 février 2017 (voir CEDAW/C/SR.1482 et CEDAW/C/SR.1483). La liste des questions et des points soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/DEU/Q/7-8 et les réponses de l’Allemagne sont consignées dans le document CEDAW/C/DEU/Q/7-8/Add.1.

A.Introduction

Le Comité se félicite de la présentation par l’État partie de son rapport unique valant septième et huitième rapports périodiques. Il apprécie également les réponses écrites de l’État partie à la liste des points et questions soulevés par le groupe de travail d’avant session et remercie la délégation des informations données oralement.

Le Comité salue l’envoi par l’État partie d’une délégation multisectorielle, dirigée par Elke Ferner, la Secrétaire d’État parlementaire du Ministère fédéral des affaires familiales, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse, et composée de représentants du Ministère fédéral des affaires étrangères, du Ministère fédéral du travail et des affaires sociales, de l’Office fédéral pour les migrations et les réfugiés, du Ministère fédéral de la justice et de la protection des consommateurs, de la Conférence permanente des ministres de l’éducation et des affaires culturelles des Länder (États fédérés), du Sénat de Berlin, de la Mission permanente de l’Allemagne auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève. Le Comité apprécie l’échange de vues constructif qu’il a tenu avec la délégation.

* Adoptées par le Comité lors de sa soixante-sixième session (13 février-3 mars 2017).

B.Aspects positifs

Le Comité se félicite des progrès accomplis, depuis son examen en 2009 du sixième rapport périodique de l’État partie (CEDAW/C/DEU/6), dans la mise en œuvre de réformes législatives, et notamment de l’adoption des textes suivants :

a)La modification de l’article 177 du Code pénal allemand (2016), consacrant le principe du « non, c’est non »;

b)La loi sur l’intégration des personnes handicapées (2016), qui protège de la discrimination les femmes souffrant d’un handicap;

c)La loi fédérale sur l’égalité (2015) et la loi sur la représentation égale des femmes et des hommes aux postes de direction (2015);

d)La loi sur le salaire minimum (2015), dont bénéficient de nombreuses femmes occupant un emploi faiblement rémunéré;

e)La quarante-septième loi portant modification du droit pénal (2013), qui fait de la mutilation génitale féminine une infraction pénale distincte au regard de l’article 226a du Code pénal.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et stratégique de façon à accélérer l’élimination de la discrimination contre les femmes et à favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes, notamment en adoptant ou en mettant en place :

a)Le second plan d’action national pour l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité;

b)Le plan d’action national sur la Convention relative aux droits des personnes handicapées (2016);

c)Le plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme (2016);

d)La politique relative à l’intégration, au logement, aux soins de santé et à l’éducation pour les réfugiés et les demandeurs d’asile, y compris les mineurs non accompagnés (2011-2015);

e)Le numéro d’urgence pour les cas de violences faites aux femmes (2013).

Le Comité se félicite que, depuis l’examen du rapport précédent, l’État partie ait ratifié les instruments internationaux suivants ou y ait adhéré :

a)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, en 2013 ;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2009;

c)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2009;

d)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant, en 2009.

Le Comité salue la détermination et la générosité dont l’État partie a fait preuve en accueillant de nombreux demandeurs d’asile et réfugiés ayant dû fuir leur pays en 2015 et au début de 2016. Son leadership et son engagement humanitaires, à un moment charnière pour la protection des réfugiés en Europe, ont illustré de façon impressionnante les valeurs de crédibilité et de respect des normes en matière de droits de l’homme ainsi que le principe de protection internationale.

C.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif dans la pleine application de la Convention (voir sa déclaration sur ses relations avec les parlementaires, adoptée à la quarante-cinquième session, en 2010). Il invite le Bundestag et le Bundesrat et les parlements des Länder conformément à leurs mandats, à prendre les mesures nécessaires pour la mise en œuvre des présentes observations finales d’ici à la prochaine période d’établissement d’un rapport au titre de la Convention.

D. Principaux domaines de préoccupation et recommandations

Application de la Convention, du Protocole facultatif s’y rapportantet des recommandations générales du Comité

Le Comité salue les nombreux efforts faits par l’État partie pour diffuser la Convention. Il s’inquiète néanmoins des disparités qui subsistent dans son application dans les Länder et les municipalités. Il est également préoccupé par le fait que les magistrats et les juristes connaissent peu la Convention, le Protocole facultatif s’y rapportant et les recommandations générales du Comité.

Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer la formation dispensée par l ’ École allemande de la magistrature et de donner aux juges, aux procureurs et aux avocats les moyens d ’ invoquer ou d ’ appliquer directement la Convention et le Protocole facultatif s ’ y rapportant dans les tribunaux nationaux.

Application de la Convention dans le cadre du système fédéral

Conscient de la complexité des structures fédérales et constitutionnelles de l’État partie, le Comité se félicite des efforts considérables faits pour améliorer la coordination de l’application de la Convention, notamment au moyen de conférences ministérielles à l’échelon des Länder. Il prend également note de la publication, en 2017, du troisième Atlas de l’égalité des sexes en Allemagne, qui constituera un outil important pour promouvoir les droits des femmes dans l’ensemble de l’État partie. Néanmoins, il reste préoccupé par le fait que, dans les domaines relevant de la responsabilité exclusive des Länder, la Convention n’est pas appliquée de manière cohérente.

Compte tenu de la responsabilité juridique et du rôle de premier plan du Gouvernement fédéral dans l ’ application de la Convention, le Comité recommande à nouveau (voir CEDAW/C/DEU/CO/6 , par. 16) de veiller à ce que la coordination des structures à tous les niveaux soit plus efficace afin d’assurer l ’ uniformité des résultats dans l’application de la Convention sur l ’ ensemble du territoire de l ’ État partie. Il recommande également à celui-ci de renforcer le mandat de l ’ Institut allemand des droits de l ’ homme et de l’habiliter à assurer l’application transparente, cohérente et systématique de la Convention sur l ’ ensemble de son territoire.

Cadre législatif

Le Comité accueille avec satisfaction les dispositions constitutionnelles, les lois, les normes administratives et les stratégies qui ont été adoptées depuis le dernier rapport périodique et qui visent à favoriser l’égalité des sexes et à interdire la discrimination à caractère sexiste. Néanmoins, il est préoccupé par le fait que la loi générale sur l’égalité de traitement (2006) reste de portée limitée et ne parvient pas à protéger intégralement les femmes de la discrimination sexiste dans les sphères privées et familiales. Il note le renversement de la charge de la preuve dans les procédures civiles et administratives relatives à la discrimination, mais souligne que les plaintes pour discrimination ne peuvent être déposées que pendant une période extrêmement limitée. Il regrette également que l’action collective, permettant aux organisations de femmes et aux syndicats de saisir les tribunaux en cas de discrimination, ne soit actuellement pas prévue par la loi. En outre, il est préoccupé par l’article 9 de la loi, qui établit une différence de traitement contestable fondée sur la religion ou les convictions.

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier la loi générale sur l ’ égalité de traitement, conformément aux propositions énoncées dans l ’ évaluation de l ’ Agence fédérale de lutte contre la d iscrimination, et d ’ élargir son champ d ’ application. Il recommande ainsi à l ’ État partie d ’ introduire le droit des organisations de femmes et des syndicats à engager une action collective pour porter devant les tribunaux l es affaires de discrimination. Il recommande également de rallonger à au moins six mois le délai de dépôt de plaintes pour discrimination. Il recommande, en outre, d ’ ajouter les licenciements à la loi et de supprimer l ’ article 9.

Obligation extraterritoriale de l’État

Le Comité est préoccupé par :

a)Les répercussions négatives des pratiques des sociétés transnationales, en particulier des sociétés textiles et des grandes entreprises agricoles qui sont enregistrées ou domiciliées dans l’État partie et qui mènent des activités à l’étranger, sur l’exercice des droits consacrés dans la Convention par les femmes et les filles des États tiers;

b)L’inadéquation du cadre juridique, qui ne permet pas de poursuivre les entreprises et sociétés enregistrées ou domiciliées dans l’État partie pour des violations des droits fondamentaux des femmes commises à l’étranger, et la non‑prise en compte de la problématique hommes-femmes dans le plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme;

c)L’absence d’un mécanisme indépendant et efficace habilité à enquêter sur les plaintes faisant état de violations commises par ces sociétés, telles que les expulsions auxquelles auraient procédé des entreprises allemandes établies à l’étranger, et l’accès limité à des recours judiciaires pour les femmes victimes de ces violations;

d)L’absence d’études d’impact tenant expressément compte des droits fondamentaux des femmes avant la négociation d’accords internationaux de commerce et d’investissement.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D e renforcer sa législation régissant les pratiques des sociétés enregistrées ou domiciliées dans l’État partie et menant des activités à l’étranger, notamment en leur demandant de procéder à des études d’impact sur les droits de l’homme et sur les droits des femmes avant de prendre des décisions en matière d’investissement;

b) D e mettre en place des mécanismes efficaces pour enquêter sur les plaintes déposées contre ces sociétés, qui seraient chargés, entre autres, de recevoir les plaintes, de mener des enquêtes indépendantes et d ’ intégrer la problématique hommes-femmes dans le plan d ’ action national;

c) D ’adopter des mesures spécifiques, notamment un mécanisme d ’ indemnisation, pour faciliter l’accès à la justice des femmes victimes de violations de leurs droits fondamentaux, et de faire en sorte que les mécanismes judiciaires et administratifs mis en place tiennent compte de la problématique hommes-femmes;

d) D e s’assurer que les accords de commerce et d’investissement négociés par l’État partie reconnaissent la primauté des obligations internationales contracté e s par ce dernier dans le domaine des droits de l’homme sur les intérêts des investisseurs et que la mise en place de procédures de règlement des différends entre les investisseurs et l’État dans le cadre de l ’ Accord économique et commercial global ne crée pas d’obstacles au plein respect de la Convention.

Mécanisme national de promotion de la femme et prise en comptede la problématique hommes-femmes

Le Comité salue l’augmentation en 2017 de l’allocation budgétaire pour le Ministère fédéral des affaires familiales, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse ainsi que l’action menée par l’État partie pour renforcer la coopération entre les structures et mécanismes institutionnels compétents. Le Comité demeure cependant préoccupé par :

a)L’absence d’une stratégie globale intégrée pour la prise en compte systématique de la problématique hommes-femmes, ainsi que le manque de données adéquatement ventilées par sexe ou de dispositifs globaux de suivi et d’évaluation de l’impact;

b)L’absence à l’échelle nationale d’une stratégie, d’une politique ou d’un plan d’action intégré en faveur de l’égalité des sexes permettant de lutter contre les facteurs structurels qui perpétuent les inégalités entre hommes et femmes;

c)La réticence de l’État partie à prendre en compte la problématique hommes-femmes dans l’analyse budgétaire au niveau fédéral, alors même que l’adoption de cette approche dans certains Länder a été couronnée de succès;

d)Le caractère limité du mandat de l’Agence fédérale de lutte contre la discrimination, qui, malgré l’augmentation des ressources qui lui sont allouées, n’a pas l’autorité suffisante pour déposer plainte ou appuyer des affaires portées devant les tribunaux, ouvrir des enquêtes ou imposer des sanctions en réponse à des allégations de discrimination;

e)Les dispositions de la loi fédérale sur l’égalité qui réservent aux femmes l’accès aux postes de responsables et responsables adjoints des questions d’égalité des sexes;

f)L’insuffisance des ressources allouées aux questions d’égalité des sexes par le Ministère fédéral de la coopération économique et du développement, qui a des incidences négatives sur l’application pleine et effective de sa politique d’égalité des sexes dans l’action de l’Allemagne en faveur du développement et de son plan d’action en la matière.

Le Comité recommande une nouvelle fois (voir CEDAW/C/DEU/CO/6 , par. 24) à l ’ État partie :

a) D e renforcer la prise en compte intégrée de la problématique hommes-femmes et de mettre en place des mécanismes efficaces de suivi et de transparence, notamment grâce à la poursuite systématique des évaluations de l’incidence de la législation sur l’égalité des sexes dans tous les ministères, en veillant à ce que ces évaluations soient fondées sur les objectifs et les indicateurs pertinents et les données recueillies;

b) D ’élaborer, à l ’ échelle nationale, une stratégie, une politique et un plan d’action intégrés pour l ’ égalité des sexes permettant de lutter contre les facteurs structurels à l’origine des inégalités persistantes, notamment les formes convergentes de discrimination contre les femmes et les filles défavorisées et marginalisées;

c) D ’adopter une procédure de budgétisation intégrée tenant compte de la problématique hommes-femmes (notamment de la réalisation des objectifs de développement durable) et prévoyant des mécanismes de suivi et de transparence couvrant tous les secteurs et échelons de l ’ administration, en faisant fond sur l ’ expérience des Länder, qui ont opté, avec succès, pour ce type de procédure;

d) D e renforcer le mandat de l ’ Agence fédérale de lutte contre la discrimination et de l ’ habiliter à déposer plainte, ouvrir des enquêtes et imposer des sanctions; de veiller à ce que cette a utorité soit dotée de ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour s ’ acquitter efficacement de son mandat; et de mettre en place et maintenir des bureaux indépendants de lutte contre la discrimination dans tous les Länder;

e) D ’envisager de modifier la loi fédérale sur l ’ égalité pour permettre aux hommes d ’ occuper des postes de responsables des questions d’égalité des sexes;

f) D e doter le Ministère fédéral de la coopération économique et du développement de ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour l ’ application pleine et effective de sa politique d ’ égalité des sexes dans l’action en faveur du développement et de son plan d ’ action en la matière.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité félicite l’État partie de la diversité des mesures temporaires spéciales qu’il a adoptées pendant la période considérée pour faire avancer la réalisation de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines visés par la Convention où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées. Il salue également l’engagement pris par l’État partie de poursuivre cette approche à l’avenir.

Concernant sa recommandation générale n o 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité recommande à l ’ État partie de continuer d ’ adopter et de mettre en œuvre soit des mesures temporaires spéciales soit des mesures permanentes pour assurer l’égalité réelle des femmes et des hommes, et d’assurer l’allocation de ressources, la mise en place d’incitations, le ciblage du recrutement et l ’ établissement d ’ objectifs assortis d’échéances ainsi que de quotas dans les domaines visés par la Convention où les femmes sont sous ‑ représentées ou défavorisées, dans les secteurs tant public que privé.

Stéréotypes

Le Comité se félicite de l’adoption de mesures législatives, entre autres, pour lutter contre les stéréotypes discriminatoires et prend note des projets pilotes relatifs à la représentation des personnes transgenres dans les médias. Néanmoins, il demeure préoccupé par :

a)La prédominance de stéréotypes sur les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, qui continue d’entraver le progrès de l’égalité des sexes;

b)Les images stéréotypées et sexualisées des femmes qui continuent d’être véhiculées par les médias et la publicité;

c)Les représentations stéréotypées et négatives dans les médias des femmes issues des minorités ethniques et des femmes migrantes, qui compromettent leur aptitude à mieux s’intégrer dans la société.

Le Comité recommande une nouvelle fois (voir CEDAW/C/DEU/CO/6 , par. 28) à l’État partie :

a) D e redoubler d’efforts pour éliminer les stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, notamment par des campagnes de sensibilisation;

b) D e mettre en place une stratégie de sensibilisation à l ’ intention des professionnels des médias, comprenant des directives et des mécanismes de suivi afin d ’ éliminer les stéréotypes discriminatoires à l ’ égard des femmes et d ’ encourager une couverture médiatique soucieuse de cette problématique, en particulier à l ’ approche d ’ élections; d’introduire des mesures visant à promouvoir la représentation égale des femmes et des hommes dans les médias; et de renforcer le rôle du Conseil allemand des normes de publicité pour qu ’ il puisse faire appliquer des sanctions adéquates dans le cadre de la lutte contre les stéréotypes sexistes discriminatoires;

c) D ’introduire des mesures pour encourager les médias à promouvoir des images positives des femmes issues des minorités ethniques et des femmes migrantes, réfugiées et demandeuses d ’ asile.

Pratiques préjudiciables

Le Comité salue l’adoption de mesures législatives et autres visant à combattre les pratiques préjudiciables, dont la loi de 2013 portant la quarante-septième modification du Code pénal, qui interdit les mutilations génitales féminines et prévoit la création d’un groupe de travail interministériel sur l’intersexualité/la transsexualité. Néanmoins, il est préoccupé par :

a)Les dispositions législatives qui autorisent le mariage des moins de 18 ans dans certaines circonstances exceptionnelles;

b)Le grand nombre de filles vivant dans l’État partie, souvent issues de familles de migrants, qui ont subi des mutilations génitales féminines ou d’autres pratiques préjudiciables ou qui risquent d’en être victimes;

c)La rareté des projets d’information et d’éducation sur les pratiques préjudiciables, notamment à l’intention des femmes issues des minorités et des migrantes, l’inadéquation de la formation des professionnels de la santé et des services sociaux et l’insuffisance des services de conseil dotés des ressources voulues, dans l’ensemble de l’État partie;

d)L’absence de dispositions législatives interdisant clairement de procéder à un acte médical inutile sur des nourrissons ou des enfants de sexe indéterminé avant qu’ils ne soient en âge de donner leur consentement préalable, libre et éclairé;

e)L’inadéquation du soutien et des recours effectifs mis à disposition des personnes intersexuées ayant subi très jeunes un acte chirurgical inutile du point de vue médical et aux conséquences souvent irréversibles, qui cause des souffrances physiques et psychologiques de longue durée.

À la lumière de la recommandation générale n o 31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de l’observation générale n o 18 du Comité des droits de l’enfant (2014) sur les pratiques préjudiciables, le Comité recommande à l’État partie :

a) D e prévoir des garanties pour protéger les filles de moins de 18 ans qui ont été autorisées à se marier;

b) D e recueillir systématiquement des données ventilées sur l’incidence des pratiques préjudiciables à l’échelle nationale et de continuer à renforcer les mesures de prévention et de protection visant à éliminer les mutilations génitales féminines;

c) D e mettre en place des campagnes de sensibilisation; de veiller à ce que les victimes de mutilations génitales féminines aient facilement accès à l’information; de faire en sorte que les professionnels de la santé et des services sociaux soient suffisamment formés pour repérer les victimes potentielles et que les responsables de ces pratiques soient traduits en justice ;

d) D ’adopter des dispositions législatives claires interdisant expressément de procéder à des actes chirurgicaux et à d’autres traitements médicaux inutiles sur les enfants intersexués avant qu’ils ne soient en âge de donner leur consentement préalable, libre et éclairé; d’offrir aux familles d’enfants intersexués des conseils et un soutien adéquats; de veiller à ce que l’Association des médecins allemands informe les professionnels de la santé que la loi leur interdit de procéder à des actes chirurgicaux et à d’autres traitements médicaux inutiles sur les enfants intersexués;

e) D e garantir un accès effectif à la justice aux personnes intersexuées qui ont subi un acte chirurgical ou un autre traitement médical inutile sans avoir donné leur consentement libre, préalable et éclairé, y compris en modifiant les délais de prescription, et d’examiner la proposition du Conseil national d’éthique allemand de créer u n fonds public d’indemnisation.

Violence sexiste à l’égard des femmes

Le Comité salue les nombreuses mesures prises par l’État partie pour remédier à la violence sexiste à l’égard des femmes, en particulier la modification de 2016 à l’article 177 du Code pénal, qui incrimine les agressions sexuelles, qu’elles soient commises par le recours à la force ou la menace du recours à la force et le viol. Il se félicite également qu’au cours de leurs échanges de vues, l’État partie ait annoncé qu’il allait ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique en 2017. Néanmoins, il est préoccupé par:

a)La prévalence de la violence familiale à l’encontre des femmes, l’absence de stratégie globale de prévention et d’intervention précoce et le fait que les autorités judiciaires tendent à considérer les cas de violence familiale comme relevant de la sphère privée;

b)L’insuffisance des signalements des actes de violence sexiste à la police et la faiblesse des taux de poursuites et de condamnation pour de tels actes;

c)Les informations indiquant que les femmes handicapées, en particulier celles qui vivent en institution, sont deux à trois fois plus exposées que les autres femmes aux diverses formes de violence;

d)Les cas signalés de violence sexuelle ou familiale infligée aux femmes placées dans des centres d’hébergement pour réfugiés par leur partenaire, le personnel du centre ou le personnel de sécurité; les restrictions légales à la liberté de ces femmes, qui font qu’elles doivent souvent attendre plusieurs mois avant de pouvoir être transférées dans un autre lieu d’hébergement protégé;

e)Les crimes haineux et les agressions visant les réfugiés et les demandeurs d’asile, qui sont commis dans les centres d’accueil et dans les camps et au cours desquels des femmes et des filles sont blessées;

f)Les stéréotypes sexistes et les idées préconçues sur le viol qui ont cours dans la société et le corps judiciaire;

g)Le fait que, dans certains cas, les femmes ont du mal à faire reconnaître, dans la pratique, la dureté particulière de leur situation, condition requise, selon la loi sur le séjour des étrangers, pour qu’il soit fait abstraction de l’obligation de communauté conjugale d’au moins trois ans pour pouvoir obtenir un permis de séjour autonome, ou se trouvent contraintes de demeurer mariées à un homme violent pour éviter de perdre le droit de séjour découlant de cette union.

Le Comité rappelle sa recommandation générale n o 19 (1992) sur la violence à l’égard des femmes et recommande une nouvelle fois à l’État partie :

a) D e redoubler d’efforts pour lutter contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes et de prendre des mesures pour élaborer une stratégie globale de prévention de la violence familiale comprenant des campagnes de sensibilisation;

b) D ’encourager les femmes à signaler les violences sexistes, y compris les violences familiales dont elles sont victimes, et de faire en sorte que ces violences fassent effectivement l’objet d’une enquête et que leurs auteurs soient dûment poursuivis;

c) D e mettre en place un mécanisme indépendant pour suivre les cas de violence et de maltraitance dans les établissements pour personnes handicapées et de le doter des moyens humains, techniques et financiers nécessaires pour s’acquitter pleinement de sa mission;

d) D e modifier la législation afin que des considérations relatives à l’immigration n’empêchent pas les autorités d’agir rapidement pour protéger les victimes de violence sexiste;

e) D ’enquêter sans délai sur tout crime haineux ou agression contre des femmes et des filles réfugiées ou demandeuses d’asile, et de veiller à ce que les auteurs des faits soient dûment poursuivis;

f) D e lancer des campagnes de sensibilisation pour éduquer le public quant aux répercussions de la violence sexuelle et d’intensifier les programmes de renforcement des capacités à l’intention des juges, des procureurs, des policiers et autres membres des forces de l’ordre, tant au niveau fédéral qu’au niveau des Länder, aux fins de la stricte application des dispositions du droit pénal relatives à la violence sexuelle à l’égard des femmes;

g) D e faire en sorte que les étrangères ne soient pas contraintes de rester dans une relation matrimoniale violente en facilitant la reconnaissance de la dureté particulière de leur situation et en leur accordant un droit de séjour autonome ;

h) D e prendre à titre prioritaire, comme annoncé lors de leurs échanges de vues, toutes les mesures requises pour ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

Femmes et paix et sécurité

Le Comité se félicite que l’État partie ait pris l’engagement d’appliquer la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, lancé en 2013 son premier plan d’action national sur les femmes et la paix et la sécurité et adopté en 2015 ses principes relatifs aux armes de petit calibre. Il est toutefois préoccupé par la façon dont sont utilisées les armes exportées par l’État partie, y compris dans des zones de conflit et par le fait que, contrairement aux obligations contractées par celui-ci au titre du Traité sur le commerce des armes (2014), les industriels de l’armement n’exercent pas un suivi suffisant sur l’utilisation qui est faite des armes qu’ils fournissent dans les situations où des violences sont exercées à l’encontre des femmes. Il juge également préoccupant que la violence sexiste ne fasse pas partie des motifs justifiant le refus d’octroyer une autorisation d’exportation énoncés dans les principes relatifs aux armes de petit calibre.

Le Comité recommande à l’État partie de mettre la législation sur le contrôle des exportations d’armes en conformité avec les dispositions du paragraphe 4 de l’article 7 du Traité sur le commerce des armes et avec la Position commune 2008/944/PESC du Conseil de l’Union européenne. Il lui recommande également de procéder à des évaluations complètes et transparentes des répercussions de l’utilisation abusive d’armes légères et de petit calibre sur les femmes, notamment celles qui vivent dans les zones de conflit, avant d’octroyer des licences d’exportation.

Traite d’êtres humains et exploitation de la prostitution

Le Comité accueille avec satisfaction la batterie de mesures juridiques et structurelles élaborées par l’État partie pour lutter contre la traite d’êtres humains. Néanmoins, il est préoccupé par :

a)L’absence de stratégie globale de lutte contre la traite et l’absence de données ventilées sur les victimes ou d’informations quantitatives sur l’ampleur de ce phénomène dans l’État partie, en particulier à des fins autres que l’exploitation sexuelle;

b)Les faibles taux de poursuites engagées et de condamnations prononcées dans les affaires de traite de femmes et de filles;

c)L’absence de directives nationales pour l’identification des victimes de la traite;

d)L’absence de mesures d’assistance, de réadaptation et de réinsertion organisées et harmonisées de façon systématique dans tous les Länder, notamment pour fournir des conseils, des soins médicaux, un soutien psychologique et des réparations, y compris sous la forme d’une indemnisation aux victimes de la traite, en particulier les femmes migrantes, qui n’ont pas automatiquement droit à des permis de séjour temporaires sauf à coopérer avec la police et les autorités judiciaires;

e)L’insuffisance des mesures en place pour garantir, dans l’ensemble du pays, la fourniture de conseils et d’un soutien multilingues aux femmes victimes de la traite et à celles se livrant à la prostitution, et l’inadéquation des procédures permettant de proposer aux femmes qui souhaitent sortir de la prostitution d’autres activités rémunératrices.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D e mettre en place un mécanisme indépendant à l’appui d’une politique complète et efficace de lutte contre la traite d’ êtres humains, et de doter ce mécanisme des ressources humaines, techniques et financières lui permettant de recueillir et d’analyser les données ventilées sur ce phénomène et de mener des études statistiques et quantitatives sur son ampleur dans l’État partie;

b) D e mettre au point des programmes de sensibilisation des policiers et des travailleurs sociaux au niveau municipal et de mener des enquêtes sur tous les cas de traite des personnes, en particulier des femmes et des filles, d’en poursuivre les auteurs et de les sanctionner comme il convient ;

c) D ’élaborer des directives nationales permettant d’identifier efficacement les victimes de la traite;

d) D e renforcer les mesures visant à repérer de façon systématique les femmes victimes de la traite et celles qui risquent d’en être victimes, en particulier les migrantes et les filles non accompagnées, et à leur apporter un soutien, en leur garantissant l’accès à des soins de santé, à des services de conseil et à des mesures de réparation, y compris sous la forme d’une indemnisation; d’augmenter également les ressources humaines, techniques et financières des organisations non gouvernementales qui offrent aux victimes des services spécialisés de protection et d’appui; de mettre sur pied des formations de sensibilisation à l’égalité des sexes à l’intention des travailleurs sociaux qui s’occupent des victimes de la traite;

e) D ’accorder des permis de séjour temporaires à toutes les victimes de la traite pour leur permettre de bénéficier de mesures de protection et de réinsertion, indépendamment de leur volonté de coopérer ou non avec les autorités policières et judiciaires, et de veiller à ce que les autorités adoptent une approche centrée sur la victime lorsqu’elles statuent sur le délai de rétablissement et de réflexion;

f) D e fournir, dans le prochain rapport périodique, une évaluation des dispositions pénales révisées relatives à la traite d’ êtres humains adoptées en octobre 2016, qui prévoient notamment de traduire en justice les clients des victimes de la traite ou de l’exploitation sexuelle;

g) De mieux soutenir les femmes et les filles qui souhaitent sortir de la prostitution, y compris en leur proposant des programmes appropriés et d’autres activités rémunératrices.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité accueille avec satisfaction les mesures que l’État partie a adoptées pour favoriser la participation des femmes à la vie politique et à la vie publique. Néanmoins, il demeure préoccupé par les obstacles structurels qui freinent cette participation et par les stéréotypes discriminatoires, qui continuent d’empêcher les femmes d’être élues ou nommées aux postes décisionnaires dans la fonction publique, les partis politiques, l’appareil judiciaire et les universités. Il est également préoccupé par le fait que la loi fédérale sur l’égalité n’impose aucun délai à l’application des plans relatifs à l’égalité des sexes. Il note en outre avec préoccupation que, dans les procédures judiciaires, les pouvoirs de sanction et la qualité pour agir en justice des responsables de l’égalité des chances sont limités.

Le Comité recommande une nouvelle fois à l’État partie de redoubler d’efforts pour accroître le nombre de femmes siégeant dans les organes de décision élus aux niveaux fédéral et des Länder et nommées à des postes de responsabilité au niveau municipal, afin de parvenir à l’égale représentation des femmes et des hommes dans la vie politique et dans la vie publique (voir CEDAW/C/DEU/CO/6 , par. 32). Il recommande également de mettre sur pied des campagnes de sensibilisation pour mieux faire comprendre que les femmes doivent impérativement pouvoir participer pleinement, librement et démocratiquement à la vie politique et à la vie publique si l’on veut donner p leinement effet à leurs droits.

Éducation

Le Comité accueille avec satisfaction les larges mesures prises par l’État partie pour lutter contre les stéréotypes discriminatoires dans le domaine de l’éducation. Il demeure toutefois préoccupé par :

a)Le fait que les droits fondamentaux des femmes n’ont pas été pleinement intégrés dans les programmes, les plans et les matériels pédagogiques de l’État partie et que seuls quelques Länder ont adopté des matériels pédagogiques non sexistes et sensibilisant notamment à la problématique de la diversité et de la protection de tous les groupes minoritaires;

b)La préférence continue des femmes pour les carrières et les domaines d’étude traditionnellement féminins et leur sous-représentation dans certains secteurs de l’enseignement et de la formation techniques et de l’enseignement supérieur, comme les sciences, la technologie, le génie et les mathématiques;

c)La sous-représentation persistante des femmes aux postes décisionnaires et aux échelons supérieurs de l’ensemble du système éducatif, en dépit des mesures encourageantes adoptées au niveau universitaire;

d)L’accès limité des femmes et des filles réfugiées et demandeuses d’asile aux cours de langue et d’intégration, qui ne sont actuellement proposés qu’aux réfugiés ayant des chances de demeurer dans l’État partie ou aux réfugiés officiellement reconnus.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D ’encourager la diversification des choix éducatifs offerts aux femmes et aux hommes et aux filles et aux garçons, de réviser les programmes d’enseignement des Länder pour qu’ils intègrent les droits fondamentaux des femmes, de veiller à ce que des matériels pédagogiques non sexistes et sensibilisant à la problématique de la diversité et de la protection de toutes les minorités soient disponibles dans tous les Länder et d’incorporer aux programmes nationaux de formation des enseignants un module sur les stéréotypes sexistes dans le système éducatif;

b) D e lutter contre les stéréotypes discriminatoires et les obstacles structurels pouvant décourager les filles de poursuivre leurs études au-delà du niveau secondaire et de choisir des disciplines traditionnellement masculines, comme les mathématiques, l’informatique et les sciences;

c) D e continuer à faciliter et à suivre l’évolution professionnelle des femmes dans le système éducatif de façon à garantir l’égalité d’accès aux échelons supérieurs de l’ensemble du système et à prévenir la discrimination cachée ou indirecte envers les femmes;

d) D e veiller à ce que tous les enfants réfugiés et demandeurs d’asile puissent bénéficier de cours de langue et de programmes d’intégration.

Emploi

Le Comité félicite l’État partie du vaste ensemble de mesures qu’il a prises pour faciliter la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale et pour réduire l’écart de rémunération entre les sexes, et il accueille avec satisfaction le projet de loi sur l’égalité salariale. Néanmoins, il constate avec préoccupation :

a)L’écart de rémunération entre les sexes enregistré dans le secteur public comme dans le secteur privé (21 % à l’heure actuelle), qui est attribuable à une application lacunaire de la législation sur le principe « à travail égal, salaire égal » et qui continue d’avoir des répercussions négatives sur l’évolution professionnelle des femmes et sur leurs prestations de retraite;

b)La persistance de la ségrégation horizontale et verticale de l’emploi, la concentration des femmes dans les secteurs des services les moins rémunérés et dans les emplois temporaires ou à temps partiel, en raison du rôle traditionnel qui leur est dévolu dans l’éducation des enfants, et leur sous-représentation aux postes de direction dans les entreprises;

c)L’écart du montant de la retraite entre les sexes, qui était de 53% en 2016, les hommes recevant des prestations plus avantageuses que les femmes;

d)L’accès limité des femmes migrantes, réfugiées, demandeuses d’asile ou handicapées au marché du travail officiel;

e)les stéréotypes négatifs auxquels sont confrontés les mères qui travaillent; le régime d’imposition sur le revenu des couples, qui dépend de la combinaison des classes fiscales; et les dispositions relatives aux prestations sociales, qui peuvent entraver la pleine intégration au marché du travail des femmes ainsi que leur autonomie et leur sécurité financières;

f)L’insuffisance de structures d’accueil de qualité pour les enfants, en dépit des efforts considérables déployés à cet égard.

Rappelant ses recommandations antérieures (voir CEDAW/C/DEU/CO/6 , par. 40) le Comité recommande à l’État partie :

a) D ’ intensifier ses efforts pour éliminer l’écart de rémunération entre les sexes et garantir l ’ égalité des chances entre les hommes et les femmes sur le marché du travail, notamment en continuant de prendre des mesures spéciales temporaires avec des objectifs assortis d ’ échéances, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o 25 du Comité, et de faire de l ’ adoption du projet de loi sur l ’ égalité salariale une priorité;

b) D ’ offrir des formations spécialisées et des incitations aux femmes pour les attirer vers des professions non traditionnelles, d ’ éliminer la ségrégation professionnelle, tant horizontale que verticale, dans les secteurs public et privé, de surveiller la mise en œuvre des mesures temporaires spéciales pour faciliter l’accès des femmes aux postes de direction dans les entreprises et d ’ encourager celles-ci à offrir des possibilités de temps partiel pour ces postes;

c) D ’ augmenter la retraite légale pour garantir un niveau de vie décent aux femmes retraitées et de modifier la législation pour éviter qu ’ une pension, qu’elle soit légale, professionnelle ou financée en partie par l ’ État, puisse être déduite des prestations sociales de base des demandeurs d’emploi;

d) D e veiller à ce que les victimes de harcèlement sexuel sur leur lieu de travail aient accès à des mécanismes et des voies de recours efficaces et d ’ encourager les employeurs à faire régulièrement le point sur la culture de l ’ entreprise pour prévenir ce type de pratiques;

e) D e poursuivre la mise en œuvre du programme « Forte sur le marché de l ’ emploi » ( Stark im Beruf ), qui est financé par le Fonds social européen et qui aide les mères issues de l ’ immigration à faire décoller leur carrière professionnelle en Allemagne, de prendre en considération les besoins des autres femmes défavorisées, notamment les femmes handicapées, et d ’ adopter des mesures ciblées pour élargir leurs possibilités d’emploi;

f) D e multiplier les campagnes de sensibilisation pour lutter contre les stéréotypes négatifs dominants qui empêchent l ’ intégration des mères sur le marché du travail et de réviser le régime fiscal et les dispositions relatives aux prestations sociales qui, en fonction de la combinaison des classes fiscales appliquée, nuisent à la pleine participation des femmes au marché du travail;

g) D ’ introduire des taux d ’ encadrement adéquats dans les garderies et de garantir ainsi que les enfants sont pris en charge par des personnes fiables et compétentes après l ’ école, et d’étendre les possibilités de garderie à temps plein.

Santé

Le Comité salue les mesures adoptées par l’État partie pour intégrer un volet égalité des sexes dans tous les programmes du secteur de la santé. Néanmoins, il reste préoccupé par :

a)Les disparités entre les Länder pour ce qui est de l’accès des femmes plus démunies à des moyens de contraception à un prix abordable;

b)L’obligation qui est faite aux femmes qui souhaitent avorter sur demande, en application du paragraphe 1 de l’article 218a du Code pénal, de rencontrer un psychologue et d’attendre la fin du délai de trois jours imposé (jugé inutile sur le plan médical par l’Organisation mondiale de la Santé), et la non‑couverture par l’assurance maladie de l’intervention dans ce cas de figure (bien que, dans certains cas particuliers et après l’examen des ressources, l’intervention puisse être prise en charge en vertu de la loi relative à la grossesse en situation de conflit);

c)Les difficultés rencontrées par les migrants en situation irrégulière pour accéder à des soins de santé non urgents, leurs efforts pour obtenir les papiers nécessaires conduisant souvent à leur signalement aux autorités et à leur expulsion.

Conformément à sa recommandation générale n°24 (1999) sur les femmes et la santé, le Comité recommande à l’État partie :

a) D e s’assurer que toutes les femmes et les jeunes filles, en particulier celles qui vivent dans la pauvreté ou dans des zones reculées, ont accès à des moyens de contraception modernes et abordables, et ce sur l ’ ensemble du territoire de l’État partie;

b) D e veiller à ce que les femmes puissent se faire avorter en toute sécurité, sans être obligées de rencontrer un psychologue et d ’ attendre la fin du délai de trois jours imposé (jugé inutile d ’ un point de vue médical par l ’ Organisation mondiale de la S anté) et à ce que l ’ intervention soit remboursée par l’assurance maladie;

c) D ’ envisager d ’ abroger ou de modifier l ’ article 87 de la loi sur le séjour et de faire en sorte que les migrants en situation irrégulière puissent avoir accès aux soins non urgents, sans courir le risque d ’ être signalés aux autorités et ensuite expulsés.

Autonomisation économique des femmes

Le Comité note avec satisfaction les lourds investissements réalisés pour développer les services de garde d’enfants, ce qui a facilité la conciliation des obligations professionnelles et familiales dans l’État partie. Toutefois, il reste préoccupé par :

a)La pauvreté touchant de façon disproportionnée les mères célibataires et les femmes âgées, migrantes ou handicapées;

b)Le nombre significatif de parents, généralement les pères, qui ne versent pas les pensions alimentaires, et le risque considérable de basculement dans la pauvreté des familles monoparentales dont le chef est une femme, en raison notamment de l’accès souvent limité et compliqué à l’avance d’entretien;

c)L’insuffisance des données disponibles sur les conséquences économiques du divorce sur les femmes.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D ’ adopter une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté visant en particulier les femmes les plus défavorisées et les plus vulnérables, en prenant en compte les droits de l ’ homme et la problématique homme s -femme s et en veillant à ce que l ’ élaboration et la mise en œuvre de cette stratégie soient véritablement ouvertes à tous, et d ’ encourager la participation active des femmes;

b) D e mettre au point un système viable de versement des pensions alimentaires et d ’ introduire une indemnité pour enfant à charge accordée sous condition de ressources et une avance d’entretien minimale à verser pour les enfants après la séparation ou le divorce des parents;

c) D ’ effectuer des recherches et de recueillir des données ventilées pour évaluer les conséquences économiques du divorce sur les femmes et adopter des politiques et des programmes publics visant à améliorer leur situation économique.

Femmes rurales

Le Comité remercie l’État partie pour les renseignements au sujet des femmes rurales fournis à la suite de leur échange de vues. Il prend note avec satisfaction du soutien apporté depuis 2010 à l’Association des femmes dans l’agriculture sous forme de conférences et de programmes de sensibilisation sur l’écart de rémunération entre les sexes et d’initiatives diverses visant à promouvoir la diversification dans le secteur agricole. Néanmoins, il demeure préoccupé par :

a)L’écart de salaire entre les hommes et les femmes dans les zones rurales, qui reste plus élevé que dans les zones urbaines;

b)Le risque de basculement dans la pauvreté et d’exclusion sociale des femmes, en particulier les mères célibataires et les personnes agées, en raison de l’insuffisance des infrastructures, notamment en matière de soins médicaux et de protection sociale, de l’évolution démographique et des migrations rurales.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D e remédier à l ’ écart de salaire considérable entre les hommes et les femmes dans les zones rurales, d ’ encourager l ’ autonomisation économique des femmes rurales, notamment les agricultrices, et de leur garantir l ’ accès et le contrôle fonciers ainsi que des facilités de crédit;

b) D ’assurer la mise en place d ’ une infrastructure de garde d ’ enfants adéquate, d ’ offrir des possibilités de formation visant à favoriser la diversification et le développement d ’ autres formes d ’ emploi pour encourager les jeunes femmes à rester dans les zones rurales et d ’ élargir les offres de services de soins aux personnes âgées.

Groupes de femmes défavorisées

Migrantes et femmes appartenant aux minorités

Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour faciliter l’intégration des migrantes, en particulier les musulmanes et les femmes appartenant à des minorités ethniques. Néanmoins, il constate avec inquiétude que les migrantes et les femmes appartenant aux minorités sont, encore à l’heure actuelle, plus susceptibles de faire l’objet de plusieurs formes de discrimination lorsqu’elles essayent d’accéder à la vie politique, à l’éducation, à l’emploi ou aux soins de santé.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures efficaces pour éliminer la discrimination à l’égard des migrantes et des femmes appartenant aux minorités, tant dans la société en général qu’au sein de leurs communautés, en lançant des campagnes de sensibilisation et en collaborant avec les médias pour lutter contre toute forme de discrimination à l ’ égard de ces femmes.

Femmes transgenres

Le Comité prend note avec satisfaction de la création d’un groupe de travail interministériel sur l’intersexualité et la transsexualité et de la possible révision de la loi sur la transsexualité. Néanmoins, il demeure préoccupé par :

a)Le caractère contraignant des conditions à remplir par les femmes transgenres pour obtenir l’autorisation de subir un traitement pour changer de sexe (notamment l’obligation d’obtenir l’aval de deux experts et de suivre un long traitement de 12 à 18 mois, souvent vécu comme une « psychopathologisation » du processus de transition) et les exigences déraisonnables imposées par les compagnies d’assurance maladie pour prendre en charge des coûts du traitement;

b)Les cas de discrimination à l’égard des femmes transgenres.

L e Comité recommande à l’État partie :

a) D e réviser la loi sur la transsexualité pour l ’ harmoniser avec les normes internationales de non-discrimination et pour assouplir et simplifier les conditions d ’ autorisation de changement de sexe et de faire en sorte que les compagnies d ’ assurance maladie prennent en charge ces interventions, sans exigences déraisonnables;

b) D ’ intensifier ses efforts pour éliminer la discrimination à l ’ égard des personnes transgenres, notamment en menant des campagnes de sensibilisation et en formant les fonctionnaires de police et du système judiciaire.

Réfugiées et demandeuses d’asile

Tout en félicitant l’État partie des efforts considérables accomplis pour accueillir les demandeurs d’asile et les réfugiés et des mesures d’intégration qui ont été prises, le Comité reste préoccupé par :

a)La suspension jusqu’en mars 2018 du droit au regroupement familial pour les personnes ayant bénéficié d’une protection subsidiaire, qui pourrait porter préjudice aux femmes et aux filles;

b)Le fait que les mesures d’intégration, bien qu’impressionnantes, ne répondent pas de façon satisfaisante aux besoins de toutes les réfugiées et demandeuses d’asile, notamment en ce qui concerne l’intégration sociale et professionnelle;

c)L’existence, en dépit du recrutement massif à l’Office fédéral des migrations et des réfugiés, de retards accumulés importants, qui nuisent aussi bien à l’enregistrement des demandes d’asile qu’à la suite qui leur est donnée.

Conformément à sa recommandation générale n o 32 (2014) sur les femmes et les situations de réfugiés, d’asile, de nationalité et d’apatridie et à sa recommandation générale n o 30 (2013) sur les femmes dans la prévention des conflits, les conflits et les situations d’après conflit, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D e réexaminer la décision de différer le regroupement familial pour les bénéficiaires de la protection subsidiaire, car il s ’ agit là d ’ une importante filière, sûre et légale, d ’ assurer leur intégration, en particulier dans le cas des femmes et des filles vulnérables;

b) D ’ incorporer dans sa législation les dispositions de l ’ Union européenne relatives aux conditions d ’ accueil et aux procédures de demande d ’ asile, en tenant compte des besoins spécifiques des réfugiées et des demandeuses d ’ asile particulièrement vulnérables, et ce dans chaque mesure relative à l ’ intégration;

c) D e veiller à ce que l ’ Office fédéral des migrations et des réfugiés dispose des ressources nécessaires pour résorber les retards accumulés importants et de faire en sorte qu ’ une attention prioritaire soit accordée aux besoins particuliers des réfugiés et des demandeurs d ’ asile vulnérables arrivés dans l ’ État partie, notamment les femmes et les filles, et ce tout au long de la procédure de demande d ’ asile.

Mariage et relations familiales

Le Comité est préoccupé par :

a)Le risque qu’en l’absence d’un mécanisme garantissant l’exercice de la garde alternée et la prise en compte de la situation réelle pour déterminer pour chaque parent le montant de la pension alimentaire et le rythme de la résidence alternée, la règle de l’autorité parentale conjointe appliquée par défaut ne contribue à une diminution du nombre d’ordonnances concernant le versement de pensions alimentaires;

b)Les dispositions énoncées dans la loi sur les biens matrimoniaux acquis pendant le mariage, qui ne prennent pas en compte l’augmentation des revenus potentiels et du capital humain des hommes pendant le mariage et, par conséquent, ne protègent pas suffisamment les femmes, qui risquent de tomber dans la pauvreté du fait de la répartition inégale des charges domestiques;

c)Les déductions fiscales applicables aux familles, qui, si elles allègent la charge fiscale (en fonction de la classe choisie), amplifient le coin fiscal entre le premier et le deuxième apporteur de revenu et n’ont presque aucune conséquence générale sur l’offre de main-d’œuvre ou la lutte contre la pauvreté, n’incitant donc guère les mères de famille à rejoindre le marché du travail;

d)L’absence de système public d’indemnisation pour rendre justice et réparation aux femmes qui ont divorcé dans l’ancienne République démocratique allemande et dont la carrière professionnelle, parfois longue de 40 ans, n’a pas été reconnue en vertu du Traité d’unification et de la loi relative au transfert des pensions de retraite.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D e mettre en place un mécanisme de contrôle garantissant l ’ exercice de la garde alternée et prenant en compte la situation réelle pour déterminer pour chaque parent le montant de la pension alimentaire et le rythme de la résidence alternée;

b) D e veiller à ce que les mères célibataires puissent prendre des congés prolongés pour s’acquitter de leurs responsabilités maternelles sans être pénalisées;

c) D ’ éliminer les déductions fiscales applicables aux familles qui allègent la charge fiscale, mais amplifient le coin fiscal entre le premier et le deuxième apporteur de revenu, et d ’ offrir des avantages aux mères pour les encourager à entrer sur le marché du travail;

d) D e mettre en place un système public d ’ indemnisation pour dédommager les femmes qui ont divorcé dans l ’ ancienne République démocratique allemande en complétant leur pension de retraite.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite instamment l’État partie à s’appuyer sur la Déclaration et le Programme d’action de Beijing dans ses efforts de mise en œuvre des dispositions de la Convention.

Programme de développement durable à l’horizon 2030

Le Comité demande à l ’ État partie de promouvoir l’égalité effective entre les sexes, conformément aux dispositions de la Convention, et ce tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Diffusion

Le Comité demande à l’État partie de soumettre rapidement les présentes observations finales, dans la langue officielle de l ’ État partie, aux institutions publiques compétentes au niveau de l ’ État fédéral et des Länder, en particulier le Bundestag, le Bundesrat, les différents parlements et ministères et l’appareil judiciaire, de façon à en assurer la pleine application.

Ratification d’autres traités

Le Comité note que l’adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme permet aux femmes de mieux jouir de leurs droits et libertés fondamentaux à tous égards. Il encourage donc l ’ État partie à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, dont il n ’ est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité demande à l’État partie de lui fournir, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu’il aura prises pour donner suite aux recommandations énoncées aux paragraphes 3 8 b), 4 0 b), 4 8 b) et 5 0 d) ci ‑ dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à présenter son neuvième rapport périodique en mars 2021. En cas de retard, le rapport devra couvrir toute la période jusqu’au moment de sa présentation.

Le Comité demande à l’État partie de suivre les directives harmonisées sur l’établissement des rapports à présenter en vertu des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, y compris le document de base commun et les documents se rapportant à chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).