CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/65/CO/810 décembre 2004

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATIONDE LA DISCRIMINATION RACIALESoixante‑cinquième session2-20 août 2004

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIESCONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination raciale

TADJIKISTAN

1.Le Comité a examiné le rapport initial ainsi que les deuxième, troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques du Tadjikistan qui auraient dû être soumis de 1996 à 2004, présentés en un seul document (CERD/C/463/Add.1), à ses 1658e et 1659e séances (CERD/C/SR.1658 et 1659), tenues les 11 et 12 août 2004. À sa 1670e séance (CERD/C/SR.1670), tenue le 19 août 2004, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport qui lui a été soumis et la possibilité ainsi offerte d’engager le dialogue avec l’État partie de façon constructive. Le Comité prend note avec satisfaction de la présence d’une délégation de haut niveau et des efforts que celle‑ci a faits pour répondre aux questions qui lui ont été posées.

3.Le Comité prend note avec satisfaction des efforts faits par l’État partie pour respecter les principes directeurs du Comité concernant la présentation des rapports, en particulier en fournissant des renseignements relatifs à la composition ethnique de la population ainsi que des données statistiques. Cependant, des renseignements supplémentaires devraient lui être fournis sur la mise en œuvre concrète de la Convention.

4.Sachant que des difficultés économiques n’ont permis à l’État partie de présenter son rapport initial que neuf ans après la ratification de la Convention, le Comité l’invite à tenir dûment compte, pour la soumission de ses rapports futurs, du calendrier établi par le Comité.

B. Aspects positifs

5.Le Comité accueille avec satisfaction la création, en 2002, de la Commission sur le respect des engagements internationaux relatifs aux droits de l’homme, qui est chargée de recevoir les plaintes individuelles et d’établir les rapports périodiques prévus par les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

6.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié les principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme, ainsi que la Convention de la Communauté d’États indépendants sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales.

7.Le Comité note avec intérêt que la législation de l’État partie est dans l’ensemble conforme à l’article 4 de la Convention et que l’article 62 du Code pénal dispose que la discrimination raciale est une circonstance aggravante, en cas d’infraction pénale.

8.Le Comité note avec satisfaction que la loi tadjike garantit la liberté des citoyens de choisir leur langue d’enseignement et d’utiliser leur propre langue dans leurs relations avec les organismes et autorités administratifs, les entreprises, institutions et associations.

9.Le Comité se félicite de ce que l’État partie ait consulté plusieurs organisations représentant les groupes ethniques au cours de l’élaboration du rapport.

10.Le Comité prend note avec satisfaction de la déclaration faite par la délégation, selon laquelle la ratification de la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et de la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie est actuellement à l’étude et encourage l’État partie à ratifier ces instruments dans les meilleurs délais.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

11.Le Comité note que le droit interne n’offre aucune définition de la discrimination raciale. Toutefois, la définition établie dans la Convention peut être invoquée directement devant les tribunaux.

Le Comité est d’avis que l’élaboration de lois sur la discrimination raciale, notamment tous les éléments figurant dans l’article premier de la Convention, offrirait un outil utile pour combattre la discrimination raciale.

12.Le Comité regrette l’insuffisance des informations fournies sur le niveau de représentation effective des membres des minorités nationales et ethniques dans les organes de l’État.

L’État partie devrait fournir dans son prochain rapport périodique des informations complémentaires sur cette question, notamment des données statistiques.

13.Le Comité est préoccupé par le fait que les critères utilisés pour interdire aux réfugiés et aux demandeurs d’asile de vivre dans certains quartiers en vertu de la loi de 2002 «sur les réfugiés» manquent de clarté, ce qui pourrait correspondre à une violation de l’article 5 d) i) de la Convention.

Le Comité prie l’État partie de lui fournir des informations complémentaires sur la loi «sur les réfugiés» et les restrictions touchant la liberté de circulation et de séjour, afin d’être en mesure de déterminer si cette loi est conforme aux engagements internationaux de l’État partie.

14.Le Comité est préoccupé de ce que, selon certaines informations, des réfugiés se sont vu refuser la citoyenneté tadjike en dépit du fait qu’ils remplissaient les conditions fixées dans la loi «sur la citoyenneté».

Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXX concernant la discrimination contre les non ‑ressortissants et lui recommande d’appliquer la loi «sur la citoyenneté» sans discrimination, conformément aux prescriptions de l’article 5 d) iii) de la Convention.

15.Le Comité est préoccupé de ce que, selon certaines informations, des réfugiés en particulier afghans ont été renvoyés de force dans leur pays.

L’État partie devrait poursuivre sa coopération avec le HCR afin de protéger les personnes qui ont cherché refuge au Tadjikistan. En outre, le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que, conformément à l’article 5 b), nul ne soit renvoyé de force dans un pays lorsqu’il y a des raisons sérieuses de croire que sa vie pourrait y être en danger.

16.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni de renseignements sur la situation de la communauté rom au Tadjikistan.

Le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur la situation des Roms. Appelant l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXVII, le Comité lui recommande d’adopter une stratégie en vue d’améliorer la situation des Roms et leur protection contre toute discrimination venant d’organismes publics, de toute personne ou organisation.

17.Le Comité, tout en appréciant les efforts faits par l’État partie pour dispenser aux enfants appartenant aux minorités ethniques un enseignement en langue maternelle, note avec regret que le nombre de manuels scolaires ouzbeks rédigés selon l’alphabet latin et adaptés aux nouveaux programmes d’enseignement est insuffisant.

Le Comité encourage l’État partie à engager des consultations avec la minorité ouzbèke et à n’épargner aucun effort pour répondre aux préoccupations de cette minorité à ce sujet. L’État partie devrait fournir au Comité des renseignements supplémentaires sur la mise en œuvre effective de la loi sur l’éducation, en particulier sur le nombre d’écoles dispensant un enseignement en langues minoritaires et leur répartition géographique, la qualité de l’enseignement fourni et, éventuellement, sur les difficultés.

18.Le Comité note avec préoccupation que, selon certaines informations, les langues minoritaires sont rarement utilisées par la télévision et la radio publiques, par les journaux et magazines.

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que des plages horaires suffisantes soient consacrées à des programmes en langues minoritaires par la radio et la télévision publiques. L’État partie devrait prendre des mesures en vue de faciliter la publication de journaux en langues minoritaires. À cet égard, des efforts particuliers devraient être faits concernant l’utilisation de l’ouzbek, qui est la langue de la minorité la plus nombreuse.

19.Le Comité note avec intérêt que la loi de 1997 sur la culture garantit le droit des minorités nationales et ethniques de préserver et développer leur identité culturelle.

Le Comité souhaite recevoir des renseignements complémentaires sur le contenu et la mise en œuvre concrète de la loi susmentionnée, sur les différents programmes adoptés à cette fin et sur les mécanismes qui permettent d’assurer la participation des groupes concernés à l’élaboration et à l’application de ces programmes.

20.Le Comité note qu’aucune affaire liée à la discrimination raciale n’a été jugée par les tribunaux.

Le Comité recommande à l’État partie de s’assurer que l’absence de plaintes pour discrimination raciale n’est pas due à l’ignorance des droits des victimes, à la méfiance à l’égard de la police et des autorités judiciaires ou à une attention ou une sensibilité insuffisantes des autorités aux cas de discrimination raciale. Le prochain rapport périodique devrait comporter une analyse de la situation à cet égard.

21.Le Comité note avec intérêt que la création d’une institution nationale des droits de l’homme est à l’étude.

Le Comité encourage l’État partie à créer promptement une telle institution, conformément aux Principes de Paris relatifs au statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (les Principes de Paris) (résolution 48/134 de l’Assemblée générale).

22.Le Comité regrette l’absence d’informations sur l’action engagée par l’État partie pour améliorer la compréhension, le respect et la tolérance entre groupes ethniques au Tadjikistan, en particulier sur les programmes qui ont été éventuellement adoptés pour dispenser un enseignement interculturel.

L’État partie devrait adopter des mesures propres à promouvoir la compréhension et l’éducation interculturelles entre groupes ethniques, en particulier dans les domaines de l’enseignement, de l’éducation, de la culture et de l’information. Il devrait inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements plus détaillés à ce sujet.

23.Le Comité salue les efforts faits pour donner aux juges et à d’autres responsables de l’application des lois une formation portant sur les droits de l’homme.

L’État partie devrait fournir au Comité des renseignements sur l’efficacité de cette formation et ses effets sur la mise en œuvre de la Convention.

24.Le Comité note que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention et lui recommande d’envisager la possibilité de la faire.

25.Le Comité recommande instamment à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité attire l’attention de l’État partie sur la résolution 57/194 de l’Assemblée générale, dans laquelle l’Assemblée a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement. L’Assemblée générale a renouvelé cette demande dans sa résolution 58/160.

26.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action ou autres mesures adoptés pour appliquer cette déclaration et ce programme d’action au niveau national.

27.Le Comité encourage l’État partie à continuer de consulter les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

28.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations finales du Comité.

29.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses sixième et septième rapports périodiques en un seul document, attendu le 10 février 2008, et de veiller à ce que ce rapport soit complet et traite tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

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