Nations Unies

CRC/C/OPAC/BEN/CO/1

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

28 novembre 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport soumispar le Bénin en application du paragraphe 1 de l’article 8du Protocole facultatif à la Convention relative aux droitsde l’enfant, concernant l’implication d’enfantsdans les conflits armés *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport du Bénin (CRC/C/OPAC/BEN/1) à sa 2325e et 2326e séances (voir CRC/C/SR.2325 et 2326), le 26 septembre 2018, et a adopté les présentes observations finales à sa 2340e séance, le 5 octobre 2018.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie et les réponses écrites à la liste de points (CRC/C/OPAC/BEN/Q/1/Add.1). Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de haut niveau de l’État partie.

3.Le Comité rappelle à l’État partie que les présentes observations finales doivent être lues en parallèle avec celles qu’il a formulées au sujet du rapport valant troisième à cinquième rapports périodiques que l’État partie a soumis au titre de la Convention (CRC/C/BEN/CO/3-5), adoptées le 29 janvier 2016, et au sujet du rapport qu’il a soumis au titre du Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/BEN/CO/1), adoptées le 5 octobre 2018.

II.Observations d’ordre général

Aspects positifs

4.Le Comité se félicite de la déclaration faite par l’État partie lors de la ratification du Protocole facultatif, selon laquelle l’âge minimum de l’engagement volontaire dans les forces armées et les forces de sécurité nationales est fixé à 18 ans.

III.Mesures d’application générales

Coordination

5.Le Comité relève que la Direction de l’organisation du personnel de l’Armée est responsable au premier chef de l’application du Protocole facultatif, mais il est préoccupé par l’absence de définition claire des rôles et par le manque de coordination entre les différentes institutions et organes mentionnés dans le rapport de l’État partie.

6. Le Comité recommande à l ’ État partie de donner à la Direction de l ’ Organisation du Personnel de l ’ Armée des pouvoirs suffisants et un mandat qui lui permett ent de coordonner toutes les activités liées à la mise en œuvre du Protocole facultatif et de lui fournir les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement.

Suivi indépendant

7.Le Comité note que l’État partie met actuellement en place un mécanisme de plainte chargé de suivre l’application des droits de l’enfant. Il est toutefois préoccupé par le fait que, pour l’instant, il n’existe pas de mécanisme spécifique habilité à recevoir, examiner et traiter les plaintes qui relèvent du Protocole facultatif.

8. Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ accélérer la mise en place d ’ un mécanisme de plainte visant spécialement à suivre l ’ application des droits de l ’ enfant, qui soit en mesure de recevoir, d ’ examiner et de traiter les plaintes émanant d ’ enfants d’une manière adaptée aux enfants et dans le respect de la confidentialité ;

b) De garantir l ’ indépendance de la Commission nationale des droits de l ’ homme, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris )  ;

c) D ’ allouer les ressources humaines, financières et techniques nécessaires pour permettre à la Commission nationale des droits de l ’ homme de s ’ acquitter efficacement de ses responsabilités.

Allocation de ressources

9.Le Comité est préoccupé par l’absence d’allocations budgétaires spécifiquement consacrées à l’application du Protocole facultatif dans l’État partie.

10. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que des ressources suffisantes et ciblées soient allouées à l ’ application effective de toutes les dispositions du Protocole facultatif.

Diffusion et sensibilisation

11.Le Comité est préoccupé par l’absence d’efforts ciblés visant à diffuser largement les principes et dispositions du Protocole facultatif auprès des membres des forces armées et du grand public, y compris les enfants et leur famille.

12. Le Comité recommande à l ’ État partie de diffuser largement les principes et dispositions du Protocole facultatif auprès des membres des forces armées, de tous les professionnels concernés et du grand public, en particulier l es enfants et leur famille, notamment au moyen des programmes scolaires, de dossiers d ’ information remis aux recrues de l’armée et de campagnes de sensibilisation et de formation à long terme concernant les effets néfastes de toutes les infractions visées par le Protocole facultatif et les mesures de prévention à prendre pour les combattre.

Données

13.Le Comité est préoccupé par l’absence de système de collecte de données dans l’État partie pour l’ensemble des domaines qui relèvent du Protocole facultatif.

14. Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place un système de collecte systématique de données pour tous les domaines qui relèvent du Protocole facultatif.

IV.Prévention

Procédures de vérification de l’âge

15.Le Comité note que toute personne doit produire un certificat de naissance prouvant son âge avant d’être admise au service militaire obligatoire ou volontaire et que des registres spéciaux ont été établis aux fins de la délivrance de certificats de naissance aux personnes qui n’ont pas été enregistrées à la naissance. Il est toutefois préoccupé par le fait que de nombreux enfants ne sont toujours pas enregistrés à la naissance, que les certificats de naissance ne sont souvent pas disponibles et que certains certificats sont falsifiés.

16. Le Comité souligne l ’ importance de l ’ enregistrement des naissances pour la prévention de l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés et rappelle la recommandation qu ’ il a formulée dans ses observations finales de 2016 concernant la Con vention (CRC/C/BEN/CO/3-5, par.  31), par laquelle il exhortait l ’ État partie à prendre toutes les mesures voulues pour que les naissances soient enregistrées partout dans le pays. Le Comité prie également instamment l ’ État partie de veiller à ce que les certificats de naissance soient strictement vérifiés et de prendre d ’ autres mesures visant à s’assurer de l ’ âge des candidats au service militaire.

Prévention de l’enrôlement par des groupes armés non étatiques

17.Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas pris de mesures suffisantes pour prévenir l’enrôlement éventuel d’enfants dans des groupes extrémistes violents opérant à l’étranger.

18. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer une stratégie pour lutter contre l’ enrôlement éventuel d ’ enfants par des groupes armés opérant à l ’ étranger et de mettre en place des mécanismes appropriés pour repérer les enfants qui risquent d ’ être enrôlés ou utilisés par des groupes armés non étatiques.

Écoles militaires

19.Le Comité constate avec préoccupation que les programmes des écoles militaires comprennent une initiation au maniement des armes pour les enfants âgés de 15 ans et plus. Il est aussi préoccupé par le fait qu’il n’existe pas de mécanisme de plainte indépendant accessible aux enfants qui fréquentent les écoles militaires.

20. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les élèves des écoles militaires ne soient pas formés à l ’ utilisation des armes ou impliqués dans un conflit armé avant l ’ âge de 18 ans, et à ce que toute école militaire pour enfants tienne compte des principes relatifs aux droits de l ’ homme. Il lui recommande également de mettre en place un mécanisme de plainte indépendant qui soit accessible aux enfants qui fréquentent les écoles militaires.

Éducation aux droits de l’homme et à la paix

21.Le Comité relève avec préoccupation que l’État partie ne prévoit pas suffisamment d’activités de formation sur le droit international humanitaire et les normes relatives aux droits de l’homme, en particulier la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant, pour le personnel militaire et les personnes participant à des missions de maintien de la paix.

22. Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer les mesures visant à inclure un enseignement sur les dispositions du droit international humanitaire et les normes relatives aux droits de l ’ homme, notamment sur la Convention et l es P rotocoles facultatifs s’y rapportant , dans le programme d ’ enseignement obligatoire destiné aux appelés, aux personnes en service militaire actif et à celles qui participent à des missions de maintien de la paix.

V.Interdiction et questions connexes

Législation et réglementation pénales en vigueur

23.Le Comité regrette que la législation de l’État partie n’incrimine pas expressément l’enrôlement ou l’utilisation d’enfants dans des hostilités par les forces armées ou par des groupes armés non étatiques. Il constate aussi avec inquiétude que l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans n’est pas qualifié de crime de guerre dans la législation de l’État partie.

24. Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ interdire et d ’ incriminer expressément l ’ enrôlement et l ’ utilisation d ’ enfants de moins de 18 ans dans des hostilités par les forces armées et par d es groupes armés non étatiques et de faire en sorte que le s auteurs soient poursuivis  ;

b) De qualifier de crime de guerre l ’ enrôlement et l ’ utilisation d ’ enfants de moins de 15 ans dans des hostilités et de punir c es actes en conséquence.

Extradition

25. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour inclure les infractions visées par le Protocole facultatif dans tous les futurs accords d ’ extradition conclus avec d ’ autres États parties et de faire en sorte que la double incrimination ne soit pas une condition pour l’ extradition dans les affaires concernant ces infractions.

VI.Protection, réadaptation et réinsertion

Mesures adoptées pour protéger les droits des enfants victimes

26.Le Comité prend note de l’élaboration d’une grille utilisée pour repérer les enfants vulnérables qui ont besoin d’une protection sociale. Il est toutefois préoccupé par le manque d’informations sur l’efficacité de cet outil pour repérer, à un stade précoce, les enfants réfugiés, demandeurs d’asile et migrants qui entrent dans l’État partie et peuvent avoir été enrôlés ou utilisés dans des hostilités à l’étranger.

27. Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De renforcer la grille de vulnérabilité afin d e repérer , à un stade précoce, les enfants réfugiés, demandeurs d ’ asile ou migrants, y compris les enfants non accompagnés, qui arrivent de pays qui connaissent ou ont connu des conflits armés, et qui pourraient avoir ét é impliqués dans des hostilités  ;

b) De veiller à ce que le personnel chargé de repérer ces enfants soit formé aux droits de l ’ enfant, à la protection de l ’ enfance et aux techniques d ’ inte rrogatoire adaptées aux enfants  ;

c) De mettre en place des protocoles et des services spécialisés afin que ces enfants puissent recevoir l ’ aide dont ils ont besoin pour leur réadaptation physique et psychologique et leur réinsertion sociale.

VII.Assistance et coopération internationales

Coopération internationale

28. Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre et de renforcer sa coopération avec le Comité international de la Croix-Rouge et avec la Représentant e spécial e du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé, et d ’ étudier la possibilité d ’ accroître sa coopération avec le Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance et d ’ autres organismes des Nations Unies aux fins de la mise en œuvre du Protocole facultatif.

Exportation d’armes et assistance militaire

29. Le Comité salue la ratification par l ’ État partie de la Convention de la Communauté économique des États de l ’ Afrique de l ’ Ouest sur les armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes et du Traité sur le commerce des armes. Il relève également qu ’ un projet de loi établissant le régime applicable aux armes et munitions est actuellement devant le Parlement. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter le projet de loi établissant le régime applicable aux armes et munitions et d ’ autres textes législatifs spécifiques , et de mettre en œuvre des mesures visant à prévenir la vente, la contrebande, l ’ exportation et le transit d ’ armes, y compris les armes légères et de petit calibre, et la fourniture d’ une assistance militaire aux pays où il est notoire que des enfants sont enrôlés ou utilisés illégalement dans des conflits armés ou des hostilités ou sont susceptibles de l’être .

VIII.Ratification du Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications

30. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier le Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications, afin de renforcer encore le respect des droits de l’enfant.

IX.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

31. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement mises en œuvre, et notamment qu’elles soient transmises au Ministère de la défense, à la Direction générale de la police nationale, à la Direction générale de la gendarmerie nationale, aux tribunaux et aux autorités locales, pour examen et suite à donner.

32. Le Comité recommande que le rapport et les réponses écrites à la liste de points soumis par l’État partie et les présentes observations finales soient largement diffusés, notamment sur Internet, auprès du grand public, des organisations de la société civile, des groupes de jeunes, des groupes professionnels et des enfants, afin de susciter un débat et une prise de conscience concernant le Protocole facultatif, son application et son suivi .

B.Prochain rapport périodique

33. Conformément au paragraphe 2 de l’article 8 du Protocole facultatif, le Comité prie l’État partie de faire figurer des informations complémentaires sur la mise en œuvre du Protocole facultatif et sur la suite donnée aux présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il soumettra en application de l’article 44 de la Convention .