Nations Unies

CERD/C/KEN/CO/5-7

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

8 juin 2017

Français

Original : anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport du Kenya valant cinquième à septième rapports périodiques *

1.Le Comité a examiné le rapport du Kenya valant cinquième à septième rapports périodiques (CERD/C/KEN/5-7) à ses 2530e et 2531e séances (CERD/C/SR.2530 ; CERD/C/SR.2531), les 2 et 3 mai 2017. À ses 2541e, 2542e et 2543e séances, les 10 et 11 mai 2017, il a adopté les présentes observations finales.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie valant cinquième à septième rapports périodiques, bien qu’il ait été soumis avec retard. Il se félicite du dialogue constructif engagé lors de l’examen du rapport et souhaite en outre remercier la délégation pour les informations détaillées qu’elle a fournies à cette occasion et les renseignements complémentaires qu’elle lui a fait parvenir depuis lors.

B.Aspects positifs

3.Le Comité félicite l’État partie d’avoir participé à l’élaboration du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et d’avoir inscrit dans son plan de développement Vision 2030 des stratégies visant à instaurer une réelle égalité en apportant un appui aux régions et aux groupes qui ont de tout temps été défavorisés.

4.Le Comité salue les efforts de la Commission de la cohésion nationale et de l’intégration. Il note en outre avec satisfaction l’établissement du Fonds pour l’égalité, dont bénéficient les régions défavorisées.

5.Le Comité félicite l’État partie pour son action en faveur des réfugiés, qui le place parmi les pays du monde qui accueillent le plus grand nombre de réfugiés.

6.Le Comité salue en outre les mesures législatives ci-après prises par l’État partie :

a)La loi relative à l’agence nationale pour l’emploi (2016) ;

b)La loi sur l’aide juridictionnelle (2016) ;

c)La création du Fonds pour la justice réparatrice (2016) ;

d)La loi relative à l’éducation élémentaire (2013) ;

e)La loi relative aux personnes déplacées à l’intérieur du pays et communautés affectées (prévention, protection et assistance) (2012) ;

C.Préoccupations et recommandations

Statistiques

7.Le Comité prend note avec satisfaction des informations fournies par l’État partie concernant la représentation des différents groupes ethniques dans la fonction publique. Il note toutefois avec préoccupation que les données fournies n’offrent pas une évaluation d’ensemble de l’exercice des droits reconnus dans la Convention, tels que les droits au logement, à l’éducation, à l’emploi et à des soins de santé notamment, ventilées par groupe ethnique et par peuples autochtones. Le Comité a demandé ces données dans ses précédentes observations finales (art. 1).

8. Le Comité recommande à l’État partie de demander au Bureau national de la statistique de produire des données statistiques ventilées par sexe sur la situation socioéconomique des groupes ethniques et des peuples autochtones, et sur leur représentation dans l’éducation, l’emploi, les soins de santé, le logement et la vie publique et politique, en vue de créer une base empirique permettant d’évaluer la jouissance, dans des conditions d’égalité, des droits consacrés par la Convention.

Définition de la discrimination raciale

9.Le Comité note avec grand intérêt que la Constitution de l’État partie et la loi sur la cohésion nationale et l’intégration de 2008 interdisent l’une comme l’autre la discrimination fondée sur l’origine ethnique, mais fait observer que la définition de la discrimination fondée sur l’origine ethnique figurant dans la loi n’est pas conforme à celle figurant à l’article premier de la Convention.

10. Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa définition de la discrimination ethnique inscrite dans la loi sur la cohésion nationale et l’intégration en vue de la rendre conforme au paragraphe 1 de l’article premier de la Convention .

Institution nationale des droits de l’homme

11.Le Comité note avec satisfaction que l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme a de nouveau accordé le statut « A » à l’institution nationale des droits de l’homme, à savoir la Commission nationale des droits de l’homme du Kenya. Il espère toutefois que la Commission sera dotée de ressources suffisantes pour s’acquitter efficacement de son mandat (art. 2 et 6).

12. Se référant à sa recommandation générale n o  17 (1993) concernant la création d’organismes nationaux pour faciliter l’application de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que des ressources financières suffisantes soient allouées à la Commission nationale des droits de l’homme du Kenya, en parfaite conformité avec l’article 249.3 de la Constitution kényane et les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (les Principes de Paris).

Actes de discrimination raciale, discours de haine raciale et incitation à la haine raciale

13.Le Comité salue les stratégies adoptées récemment pour surveiller les discours de haine et l’incitation à la violence sur les plateformes des réseaux sociaux et lors de rassemblements politiques. Il note que les actes de discrimination raciale et les discours de haine sont signalés et donnent lieu à des poursuites, et constate avec intérêt que l’État partie procède à la révision de la loi sur la cohésion nationale et l’intégration en vue de durcir les peines imposées aux auteurs d’acte de discrimination raciale. Il est toutefois préoccupé par l’absence de collecte systématique de données faisant état des motifs de non-poursuite, des condamnations et des voies de recours utiles offertes aux victimes ainsi que par l’absence de renseignements sur les procédures et les sanctions administratives appliquées en cas de discrimination raciale, y compris de données par domaines (emploi, éducation, logement, médias, etc.). Le Comité est également préoccupé par les informations reçues concernant la nécessité d’accroître les ressources allouées au directeur du parquet et à la Commission pour la cohésion nationale et l’intégration et de renforcer l’indépendance de cette Commission. Le Comité constate en outre avec préoccupation que l’interdiction figurant dans la loi n’est pas pleinement conforme à l’article 4 de la Convention. Il prend note avec intérêt des travaux législatifs en cours menés par l’État partie pour remédier à cette situation (art. 2, 4 et 6).

14. Rappelant ses recommandations générales n o  31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale et n o  35 (2013) sur la lutte contre les discours de haine, le Comité :

a) Recommande à l’État partie de modifier sa législation en vue de l’aligner sur l’article 4 de la Convention ;

b) Encourage l’État partie à continuer de poursuivre les auteurs d’actes de discrimination raciale et de discours de haine raciale, et de confier davantage de pouvoirs au directeur du parquet pour ce qui est d’engager des poursuites et davantage de responsabilités à la Commission de la cohésion nationale et de l’intégration, tout en renforçant l’indépendance de celle-ci ;

c) Réitère sa demande d’information sur les plaintes , les poursuites, les condamnations, les procédures administratives engagées par domaine (emploi, éducation, médias, logement, discours de haine, etc.) et sur les sanctions imposées aux auteurs d’actes de discrimination raciale (voir CERD/C/KEN/CO/1-4, par. 9 et 10), et demande des renseignements sur les mesures de compensation que les autorités ont adoptées et qui sont accessibles aux victimes à la suite de telles condamnations ou sanctions ;

d) Demande à l’État partie de décrire les différents organes administratifs habilités à se saisir d’actes de discrimination raciale (par domaine, à savoir discours de haine, logement, éducation, médias et emploi).

Accès à la justice

15.Le Comité salue l’adoption de la loi sur l’aide juridictionnelle (2016) et de la politique nationale y afférent, qui visent à garantir l’accès de tous les Kényans à des services abordables d’aide juridictionnelle et de sensibilisation. Il note toutefois avec préoccupation que le budget total du Fonds pour l’aide juridictionnelle et du Fonds national pour la sensibilisation à l’aide juridictionnelle est insuffisant. En outre, il prend note avec préoccupation des informations indiquant que la loi n’a pas été pleinement mise en œuvre, et que les procédures judiciaires restent trop complexes et trop coûteuses pour de nombreuses victimes de discrimination raciale, notamment pour les autochtones et les femmes (art. 5 et 6).

16. Le Comité encourage l’État partie à poursuivre la mise en œuvre de ses politiques d’aide juridictionnelle pour garantir aux victimes de discrimination raciale, aux minorités et aux autochtones un accès à la justice dans des conditions d’égalité, et notamment :

a) De doter les services d’aide juridictionnelle de ressources financières et humaines suffisantes  ;

b) De rapprocher les tribunaux nationaux des régions où vivent des groupes minoritaires et des peuples autochtones, y compris en renforçant les capacités des systèmes de justice de substitution dans les domaines ayant trait aux droits de l’homme et en continuant de créer et de mettre en service de petites juridictions d’appel chargées de régler les différends mineurs.

Mesures spéciales destinées à réduire les inégalités

17.Le Comité accueille avec satisfaction les diverses dispositions du droit interne ainsi que les programmes prévoyant l’adoption de mesures spéciales destinées à combattre les inégalités entre les différents groupes et comtés.À cet égard, les mesures clefs ont notamment consisté à conférer certains pouvoirs aux gouvernements des comtés et à mettre en place le Fonds pour l’égalité afin de fournir aux régions marginalisées des fonds spéciaux pour y favoriser le développement et atténuer les inégalités. Le Comité note néanmoins que si les frontières des comtés rendent compte dans certains cas des divisions ethniques, plus d’une dizaine de comtés ne respectent pas la disposition de la loi sur les gouvernements de comté en vertu de laquelle au moins 30 % des postes de début de carrière vacants doivent être pourvus par des candidats issus des minorités ethniques du comté (art. 5).

18. Conformément au paragraphe 4 de l’article premier et au paragraphe 2 de l’article 2 de la Convention ainsi qu’à la recommandation générale n o  32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour que les comtés respectent les critères de recrutement des membres des minorités énoncés dans la loi sur les gouvernements de comté, notamment en envisageant la possibilité d’imposer des sanctions aux comtés qui ne le font pas. Le Comité demande également à l’État partie d’encourager les sociétés privées et les entreprises à assurer aux groupes ethniques une plus grande égalité en matière d’emploi.

.Situation des peuples autochtones

19.Le Comité est alarmé par les informations indiquant que les Sengwer sont expulsés de leurs terres traditionnelles dans la forêt d’Embobut, en violation d’une ordonnance de la Haute Cour. Tout en prenant acte de la position de l’État partie selon laquelle aucune expulsion n’a eu lieu récemment, le Comité note que, d’après des allégations, des agents du Service des forêts ont incendié des dizaines d’habitations appartenant à des Sengwer. En outre, il est préoccupé par les informations signalant que la communauté autochtone endorois a fait l’objet d’attaques et d’expulsions par des assaillants armés. Il est également préoccupé par les informations indiquant que, malgré l’arrêt de la Haute Cour en l’affaire Joseph Letuya and others v. The Attorney General, des Ogiek continuent encore aujourd’hui d’être expulsés de la forêt de Mau. Le Comité est également préoccupé par les informations indiquant que des activités ayant des incidences sur des terres ancestrales occupées par des peuples autochtones ont été menées sans le consentement libre, préalable et éclairé des intéressés (art. 2, 5 et 6).

20. Rappelant sa recommandation générale n o  23 (1997) concernant les droits des peuples autochtones, le Comité exhorte l’État partie à  :

a) Prévenir les actes menaçant la sécurité physique et les biens des Sengwer, des Endorois, des Ogiek et d’autres peuples autochtones, mener des enquêtes sur ces actes, en poursuivre les auteurs présumés et condamner les responsables à des peines ;

b) Reconnaître juridiquement les droits collectifs des Sengwer, des Endorois, des Ogiek et d’autres peuples autochtones de posséder, de mettre en valeur, de contrôler et d’utiliser leurs terres, leurs ressources et leurs territoires communaux conformément au droit coutumier et aux régimes fonciers traditionnels ainsi que leur droit de participer à l’exploitation, à la gestion et à la préservation des ressources naturelles qui y sont associées ;

c) Engager des consultations effectives entre les acteurs intéressés et les communautés susceptibles d’être touchées par des projets visant à mettre en valeur, préserver ou exploiter des terres ancestrales autochtones ou leurs ressources naturelles et obtenir le consentement libre, préalable et éclairé des communautés autochtones concernées avant de lancer ces projets .

21.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures récemment prises par l’État partie pour améliorer l’accès à l’éducation, mais il est préoccupé par les informations montrant que les peuples autochtones y ont difficilement accès du fait de l’absence d’écoles à proximité de leur lieu de vie (art. 5 e) et 7).

22. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts afin de garantir l’accès à l’éducation à tous les Kényans sans discrimination, notamment en adoptant des mesures spéciales appropriées .

Injustices historiques liées aux terres

23.Le Comité note avec satisfaction que l’article 40 de la Constitution de 2010 consacre le droit des individus et des groupes de posséder des biens, individuellement ou collectivement. Il relève également l’adoption de la loi de 2016 relative aux terres communautaires et de la loi de 2016 portant modification de la législation foncière, qui tend à remédier aux injustices historiques liées aux terres. Le Comité se félicite de la création en 2016 du Fonds pour la justice réparatrice, dont l’objectif est d’accorder une réparation aux victimes des injustices historiques. Il est toutefois préoccupé par le fait que les tensions interethniques continuent d’être alimentées par les inégalités découlant du régime en vigueur de propriété foncière (art. 5 d) et e)).

24. Le caractère discriminatoire de la répartition des terres étant l’un des principaux griefs alimentant les tensions interethniques, le Comité engage l’État partie à prendre les mesures requises pour redistribuer les terres. Il lui recommande une nouvelle fois de prendre sans attendre des mesures pour rendre opérationnels les mécanismes de règlement équitable des litiges fonciers, en tenant compte du contexte historique de la propriété et de l’acquisition des terres (voir CERD/C/KEN/CO/1-4, par. 18). Le Comité invite l’État partie à fournir des renseignements sur les régimes de propriété foncière. Il souhaiterait en outre recevoir un complément d’information sur l’obligation prévue par la Constitution de définir une limite maximale pour la quantité de terres pouvant être possédées ou louées à bail par un individu ou un groupe. Le Comité demande instamment à l’État partie de saisir toutes les occasions qui se présentent de créer, au moyen de plans d’urbanisme, des quartiers dans lesquels les habitants puissent vivre, travailler, aller à l’école et participer à la vie politique dans un contexte multiethnique.

Établissements spontanés

25.Le Comité demeure préoccupé par les établissements spontanés et par l’apparente lenteur des avancées réalisées par les autorités kényanes, en dépit de l’application du programme d’assainissement des bidonvilles, en vue de donner aux personnes qui y vivent l’accès à un logement convenable, à une eau salubre ainsi qu’à l’assainissement, à des services de santé et à l’éducation pour leurs enfants. Le Comité a souligné dans ses précédentes observations finales qu’il s’agissait d’une question urgente et que des mesures devaient être prises pour déployer des efforts à la mesure de la gravité des problèmes afin de prévenir l’apparition de nouveaux conflits interethniques dans les bidonvilles (art. 5).

26. Les établissements spontanés demeurant une source de ressentiment constant et de tensions ethniques potentielles, le Comité prie l’État partie d’indiquer quelles mesures il a mis es au point pour faire face à l’ampleur du problème, l’invite à accélérer l’application du programme d’assainissement des bidonvilles et l’encourage à promouvoir la mixité ethnique dans le domaine du logement.

Apatrides

27.Le Comité prend note avec intérêt des efforts que l’État partie a déployés pour enregistrer les apatrides. Il est toutefois préoccupé par les informations indiquant que certains groupes ethniques, notamment les Nubiens, les personnes d’origine somalienne et les groupes vivant dans les zones proches de la frontière, font face à des difficultés et sont soumis à de longues procédures de vérification lorsqu’ils cherchent à obtenir des documents d’identité (art. 1er, 2 et 5).

28. Rappelant sa recommandation générale n o  30 (2004) concernant la discrimination contre les non-ressortissants, le Comité engage l’État partie à mettre fin aux pratiques discriminatoires et à intensifier ses efforts pour régler le problème de l’apatridie, notamment par l’application de procédures d’enregistrement normalisées et la délivrance de documents officiels d’identité. Le Comité engage également l’État partie à envisager d’octroyer la nationalité kényane à tous les Nubiens qui résidaient au Kenya au moment de l’indépendance du pays, ainsi qu’à leurs descendants.

Mesures de lutte contre le terrorisme

29.Le Comité prend note des récents attentats terroristes, à la suite desquels des mesures renforcées de sécurité ont été prises au Kenya, mais il est préoccupé par les informations indiquant que les mesures antiterroristes visant à lutter contre Al-Shabab, y compris le profilage ethnique de certains groupes ethniques, ont entraîné des violations des droits de l’homme, notamment des dizaines d’exécutions extrajudiciaires et de disparitions forcées (art. 5).

30. Le Comité recommande à l’État partie de donner rapidement suite aux allégations de violations et de veiller à ce que tous les suspects bénéficient des garanties juridiques fondamentales, en particulier ceux d’origine ou de nationalité étrangère, compte tenu de la Déclaration sur la discrimination raciale et des mesures de lutte contre le terrorisme adoptée le 8 mars 2002 par le Comité (A/57/18, par. 514 ).

Traite à l’étranger de personnes et de travailleurs migrants kényans

31.Le Comité est préoccupé par les informations données par l’État partie, selon lesquelles des Kényans, en particulier des femmes, sont recrutés pour travailler comme domestiques à l’étranger dans des conditions assimilables à de l’esclavage. Le Comité constate avec inquiétude qu’en 2013, l’État partie a détecté plusieurs dizaines de victimes de la traite, mais que seulement sept personnes soupçonnées d’infractions relevant de la traite ont été déclarées coupables (art. 5 et 6).

32. Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer ses efforts pour combattre la traite des personnes et de fournir dans son prochain rapport périodique des données sur la traite des êtres humains, y compris des informations sur les affaires jugées par les tribunaux et les recours offerts aux victimes. Il encourage également l’État partie à poursuivre ses efforts pour lutter contre les mauvais traitements infligés aux travailleurs migrants kényans engagés à l’étranger, et à ratifier la  c onvention (n o  189) de l’Organisation internationale du Travail sur les travailleuses et travailleurs domestiques .

Personnes atteintes d’albinisme

33.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie lors du dialogue au sujet des efforts consentis pour combattre la violence à l’égard des personnes atteintes d’albinisme dans le pays, mais il est alarmé par les informations faisant état de 13 attaques de ce type, dont cinq meurtres (art. 6 et 7).

34. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures efficaces pour protéger les personnes atteintes d’albinisme contre la violence, la discrimination et la stigmatisation .

Commission Vérité, justice et réconciliation

35.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie, mais il est préoccupé par les informations signalant que des victimes des violences commises à la suite des élections de 2007 n’ont pas obtenu une réparation suffisante et n’ont pas pu revenir vivre sur leurs terres pour des raisons de sécurité (art. 6 et 7).

36. Le Comité prie l’État partie de fournir davantage de précisions et de garanties au sujet des recommandations de la Commission Vérité, justice et réconciliation et des recours offerts aux personnes touchées par les violences commises à la suite des élections de 2007 (voir CERD/C/KEN/CO/1-4, par. 14 à 16) .

Réfugiés et demandeurs d’asile

37.Le Comité félicite l’État partie d’avoir reçu et accueilli des centaines de milliers de réfugiés et de demandeurs d’asile pendant plus de vingt-cinq ans, en coordination avec les organisations humanitaires internationales. Il est toutefois gravement préoccupé par la décision du Gouvernement de faire appel de l’arrêt rendu en 2017 par la Haute Cour, qui a déclaré nul et non avenu l’ordre de fermer le camp de Dadaab, qui accueille plus de 250 000 réfugiés. Le Comité est préoccupé par l’absence d’informations sur le partage des charges avec la communauté internationale, qu’il avait recommandé dans ses observations finales précédentes (voir CERD/C/KEN/CO/1-4, par. 25). Il est également préoccupé par les restrictions à la liberté de circulation des réfugiés, l’absence de solutions de réinstallation et par les conditions insalubres de vie dans les camps de réfugiés (art. 2, 5 et 6).

38. Le Comité recommande à l’État partie d’assurer la protection des demandeurs d’asile et des réfugiés sur son territoire, conformément aux obligations que lui impose la loi, en particulier  :

a) De continuer de collaborer avec les organisations humanitaires internationales pour créer et maintenir des capacités suffisantes dans les centres d’accueil afin que ceux-ci puissent offrir aux réfugiés et aux demandeurs d’asile des repas, un hébergement et des services de santé adéquats  ;

b) D’inviter de nouveau la communauté internationale à assumer ses responsabilités à l’égard des réfugiés en vertu du principe du partage des charges  ;

c) D’élaborer, en consultation avec les groupes concernés et en partenariat avec l e Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et d’autres organisations concernées, une stratégie à long terme pour une solution durable en matière d’intégration locale des réfugiés, en particulier en ce qui concerne l’éducation et l’accès à des conditions de vie décentes, car résider dans des camps ne constitue pas une solution durable pour les personnes concernées ;

d) De respecter l’arrêt rendu en 2013 par la Haute Cour en l’affaire Kituo Cha Seria & others v. The Attorney General et de se conformer à la loi lorsque le couvre-feu est déclaré, en veillant à ce que cette mesure ne soit pas appliquée pendant des périodes d’une durée disproportionnée et à ce que les autorités ne recourent à ce moyen que dans des circonstances exceptionnelles.

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

39 . Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions intéressent directement les communautés qui peuvent faire l’objet de discrimination raciale, comme la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Le Comité recommande également à l’État partie de ratifier la c onvention ( n o 169) de l’Organisation internationale du Travail relative aux peuples indigènes et tribaux (1989).

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

40. À la lumière de sa recommandation générale n o 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, quand il applique la Convention dans son ordre juridique interne . Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

41. À la lumière de la résolution 68/237 de l’Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour 2015-2024 et de la résolution 69/16 sur le programme d’activités de la Décennie internationale, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et de mettre en œuvre un programme adapté de mesures et de politiques. Il lui demande d’inclure dans son prochain rapport des renseignements précis sur les mesures spécifiques qu’il aura prises dans ce cadre, compte tenu de sa recommandation générale n o 34 (2011) sur la discrimination raciale envers les personnes d’ascendance africaine.

Consultations avec la société civile

42. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’élargir le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

Amendement à l’article 8 de la Convention

43. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111.

Déclaration visée à l’article 14 de la Convention

44. Le Comité encourage l’État partie à faire la déclaration facultative visée à l’article 14 de la Convention, par laquelle les États parties reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles.

Document de base commun

45. Le Comité encourage l’État partie à lui soumettre une version actualisée de son document de base (HRI/CORE/KEN/2011), établi en 2011, conformément aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant le document de base commun, adoptées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme tenue en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I). À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 42 400 mots fixée pour ce document.

Suite donnée aux présentes observations finales

46. Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son Règlement intérieur, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 8 et 14 c) et d) ci-dessus.

Paragraphes d’importance particulière

47. Le Comité souhaite appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant dans les paragraphes 20, 24, 26 et 38 et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

Diffusion d’information

48. Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également les observations finales du Comité qui s’y rapportent, ainsi que de les publier dans les langues officielles et les autres langues couramment utilisées, selon qu’il conviendra.

Élaboration du prochain rapport périodique

49.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre son rapport valant huitième et neuvième rapports périodiques, d’ici au 13 octobre 2020, en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1) et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques.