Nations Unies

CCPR/C/108/D/2094/2011

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

28 octobre 2013

Français

Original: anglais

C omité des droits de l ’ homme

Communication no 2094/2011

Constatations adoptées par le Comité à sa 108e session(8-26 juillet 2013)

Communication p résentée par:

F. K. A. G. et consorts (représentés par un conseil, Ben Saul)

Au nom de:

Les auteurs

État partie:

Australie

Date de la communication:

28 août 2011 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application de l’article 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 6 septembre 2011 (non publiée sous forme de document)

Date de l ’ adoption des constatations:

26 juillet 2013

Objet:

Détention de personnes dans des centres des services de l’immigration pendant une durée indéterminée

Questions de procédure:

Épuisement des voies de recours internes, irrecevabilité ratione materiae, défaut de fondement

Questions de fond:

Droit à la liberté, droit à la protection contre les traitements inhumains, droit à la vie de famille, droit des enfants à la protection

Articles du Pacte:

7, 9 (par. 1, 2 et 4), 10 (par. 1), 17 (par. 1), 23 (par. 1) et 24 (par. 1)

Articles du Protocole facultatif:

2, 3 et 5 (par. 2 b))

Annexe

Constatations du Comité des droits de l’homme au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatifse rapportant au Pacte international relatif aux droitscivils et politiques (108e session)

concernant la

Communication no 2094/2011*,**

Présentée par:

F. K. A. G. et consorts (représentés par un conseil, Ben Saul)

Au nom de:

Les auteurs

État partie:

Australie

Date de la communication:

28 août 2011 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l ’ homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 26 juillet 2013,

Ayant achevé l’examen de la communication no 2094/2011 présentée en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, au nom de F. K. A. G. et consorts,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par les auteurs de la communication et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5du Protocole facultatif

1.1Les auteurs de la communication sont 37 personnes détenues en Australie dans des centres pour immigrants. Il s’agit de citoyens sri-lankais d’origine ethnique tamoule, à l’exception de l’un des auteurs qui est citoyen du Myanmar d’origine rohingya. Les auteurs avancent que les droits qu’ils tiennent des articles 7, 9 (par. 1, 2 et 4), 10 (par. 1), 17 (par. 1), 23 (par. 1) et 24 (par. 1) ont été violés. Ils sont représentés par un conseil.

1.2Le 4 juillet, le 16 novembre et le 29 novembre 2012, le Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires, agissant au nom du Comité, après avoir reçu des informations provenant du conseil, a demandé à l’État partie d’adopter toutes les mesures nécessaires pour assurer le bien-être physique et psychologique des auteurs, les protéger du risque d’automutilation et leur apporter le soutien nécessaire pour soulager l’intense anxiété qui résulte de leur détention prolongée, afin d’éviter tout préjudice irréparable. Le Rapporteur spécial a également demandé à l’État partie d’organiser un examen psychiatrique indépendant de deux des auteurs.

Rappel des faits présentés par les auteurs

2.1Trente et un des auteurs, dont deux enfants, ont pénétré les eaux territoriales australiennes dans diverses embarcations entre mars 2009 et mars 2010. Ils ont été appréhendés en mer et ont d’abord été débarqués à Christmas Island, en Australie. Ils ont été emmenés dans des centres de détention pour immigrants en application de l’article 189 3) de la loi sur les migrations de 1958, selon lequel les autorités australiennes sont tenues de placer en détention tout «non-ressortissant en situation irrégulière» se trouvant dans un «territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion». Les auteurs ne détenaient pas de visa d’entrée en Australie valide. L’un d’eux est un enfant né en détention en Australie.

2.2Cinq des auteurs (S. R. (auteur no 13), A. R. (auteur no 14), A. R. (auteur no 15), S. S. (auteur no 22) et S. Y. (auteur no 34)) ont été débarqués en Indonésie après avoir été secourus en mer par le navire des services douaniers australiens Ocean ic Viking. L’Australie s’est ensuite entendue avec l’Indonésie pour les recevoir sur son territoire le 29 décembre 2009 au bénéfice de visas à «objectif spécial». Lorsqu’ils sont arrivés par avion à Christmas Island, leurs visas ont expiré et ils sont devenus des «non-ressortissants en situation irrégulière» dans la «zone de migration» n’étant pas arrivés par un «territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion». Ils avaient le droit de demander des visas de protection et ils ont été placés en détention auprès des services de l’immigration dans l’attente d’une décision définitive sur leur statut.

2.3Les auteurs ont par la suite été transférés dans différents centres de détention pour immigrants. Les auteurs du groupe de 31 ont ensuite été reconnus par le Ministère de l’immigration et de la citoyenneté comme des réfugiés dont le retour dans leur pays d’origine présenterait des risques pour eux. Les cinq personnes sauvées par l’Oceanic Viking se sont vu reconnaître le statut de réfugié par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux réfugiés mais ont voulu demander une protection permanente à l’État partie.

2.4Tous les auteurs adultes se sont vu refuser des visas qui leur auraient permis de demeurer dans l’État partie après que l’Agence australienne du renseignement relatif à la sécurité (ASIO) (l’Agence du renseignement) eut déclaré qu’ils ne remplissaient pas les critères de sécurité voulus. Aucun n’a reçu d’explication sur le fondement de cette évaluation. Les trois enfants ont reçu des visas de protection.

2.5Les auteurs se trouvent dans l’impossibilité de contester les motifs de l’évaluation des risques qu’ils présentent pour la sécurité. Le seul recours dont ils disposent est un réexamen, devant les juridictions fédérales, pour «erreur juridictionnelle» (erreur de droit), laquelle peut inclure le déni de procédure équitable. Cependant, ce réexamen ne constitue pas un réexamen au fond des éléments de fait et de preuve motivant la décision de l’Agence du renseignement. Dans la mesure où les motifs sur lesquels s’appuient les évaluations n’ont pas été divulgués, les auteurs n’ont aucun moyen de déterminer s’il y a eu erreur juridictionnelle.

2.6Un visa leur ayant été refusé, tous les auteurs sont maintenus en détention aux fins de leur expulsion, au titre de l’article 198 de la loi sur les migrations. Ils ne sont cependant pas prêts à retourner dans leur pays de nationalité de leur plein gré et l’État partie ne les a pas informés de son intention de les renvoyer dans leur pays d’origine. L’Australie ne les a pas non plus informés qu’un quelconque État tiers ait décidé de les accepter ni que des négociations aient été entamées dans cette perspective. Aucun État tiers n’a l’obligation de les admettre. Il est en outre très peu probable qu’un État tiers les accepte puisque l’Australie a considéré qu’ils présentaient un risque pour la sécurité.

2.7Par la suite, le conseil des auteurs a informé le Comité par écrit que la santé physique et mentale des auteurs détenus était de plus en plus menacée. En mai 2012, K. N. (auteur no 11) s’est administré une dose excessive d’antidépresseurs et a dû être hospitalisé. Le 6 mai 2012, S. Y. (auteur no 34) a été découvert alors qu’il tentait de se mutiler avec un câble électrique. K. S. (auteur no 27) a tenté de se suicider le 8 novembre 2012. Ses actes étaient motivés par son inquiétude au sujet de son frère, P. S. (auteur no 29), qui est atteint de maladie mentale et ne reçoit pas de traitement adapté. K. T. (auteur no 30) a tenté de se suicider les 15 et 24 novembre 2012.

Teneur de la plainte

3.1Les auteurs avancent que leur détention est contraire aux articles 9 (par. 1, 2 et 4), 7, 10 (par. 1), 17 (par. 1), 23 (par. 1) et 24 (par. 1) du Pacte.

Article 9 (par. 1)

3.2La détention des auteurs, arbitraire ou illégale au regard du paragraphe 1 de l’article 9, comprend deux phases distinctes: la première se situe avant la décision de l’Australie de leur refuser la protection due aux réfugiés et la seconde commence après ce refus et se poursuit jusqu’à l’expulsion des auteurs du territoire australien.

3.3L’État partie n’a pas fourni, pour chaque auteur, de motif légitime expliquant pourquoi il avait été arrêté à son arrivée aux fins de déterminer s’il risquait de disparaître ou de ne pas coopérer ou s’il présentait à première vue une menace pour la sécurité de l’État. Tous les auteurs ont été automatiquement mis en détention parce qu’ils étaient des non-ressortissants en situation irrégulière se trouvant dans un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion. Le cadre législatif ne permet pas une appréciation individuelle sur le fond de la nécessité de la détention.

3.4La nécessité de détenir chaque auteur pris individuellement n’ayant pas été étayée, il est possible d’en déduire que la détention vise d’autres objectifs: la prévention d’un risque généralisé de disparition que ne présente pas personnellement chacun des auteurs; la mise en œuvre d’une politique plus générale de sanction ou de dissuasion des entrées illégales; ou le simple avantage d’avoir les intéressés à disposition en permanence à des fins administratives. Or aucun de ces objectifs ne constitue un motif légitime de détention.

3.5Quant à la phase qui a suivi la décision de refus, la simple affirmation qu’une personne présente un risque pour la sécurité ne saurait répondre aux critères de l’article 9. La non-divulgation des éléments retenus aux fins de l’évaluation des risques pour la sécurité ne permet pas de déterminer si la détention était dûment justifiée et constitue également un déni de procédure équitable. On ne peut que supposer que les évaluations ont trait au comportement présumé des auteurs avant leur entrée en Australie. Cependant, si l’État partie dispose de preuves lui permettant de soupçonner l’un quelconque des auteurs d’avoir commis une infraction dans le contexte du conflit armé à Sri Lanka, ou d’être associé à une organisation telle que les Tigres de Libération de l’Eelam Tamoul (LTTE), de telles infractions pourraient donner lieu à des poursuites en vertu du droit australien. En outre, aucune activité antérieure des auteurs à Sri Lanka ne saurait aisément confirmer qu’ils présentent pour la communauté australienne un risque justifiant leur détention. De plus, il se pourrait que la source des preuves ou informations les concernant ne soit pas fiable, surtout si les autorités australiennes se sont appuyées sur des renseignements fournis par le Gouvernement sri‑lankais.

3.6L’État partie n’a recouru à aucune mesure autre que la détention, et n’a pas démontré que des mesures non privatives de liberté seraient inadaptées ou ne répondraient pas aux préoccupations en matière de sécurité. En outre, la loi australienne ne prévoit aucun mécanisme juridiquement contraignant de réexamen périodique des motifs de la détention; elle n’établit pas non plus la durée maximale de la détention. Celle-ci se poursuit simplement jusqu’à ce que l’intéressé reçoive un visa ou soit expulsé du territoire. Dans des affaires semblables à l’espèce, la Cour suprême australienne a confirmé la légalité de la détention d’immigrants pendant une durée indéterminée.

3.7L’évaluation des risques pour la sécurité à laquelle l’Australie a procédé constitue un motif supplémentaire et unilatéral, d’exclusion de réfugiés qui n’est pas conforme à la Convention relative au statut des réfugiés. Les réfugiés ne peuvent être privés de protection que s’ils sont soupçonnés d’un crime grave conformément à l’article 1F ou présentent un risque au sens de l’article 33 2), mais non parce qu’ils relèvent du sens large donné à la notion de «sécurité» par le droit australien. Leur détention ne saurait être justifiée par le droit international des réfugiés si ni l’article 1F ni l’article 33 2) ne leur sont applicables.

Article 9 (par. 2)

3.8Aucun des auteurs n’a été informé par les autorités des raisons de fond qui justifieraient sa détention. Les intéressés ont seulement appris qu’ils étaient détenus en tant que «personnes arrivées sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion» et «non-ressortissants en situation irrégulière» passibles de détention conformément à la loi sur les migrations.

Article 9 (par. 4)

3.9La loi australienne ne prévoit aucun recours contre la détention des auteurs et aucun tribunal n’est compétent pour en évaluer la nécessité, y compris au regard d’éléments de risque propres à chacun des auteurs. La loi sur les migrations dispose que les personnes arrivées sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion sont obligatoirement détenues et ne prévoit pas d’appréciation individuelle.

3.10Les juridictions australiennes ne peuvent effectuer qu’un réexamen purement formel de la question de savoir si les auteurs sont arrivés sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion, s’ils ont reçu ou non un visa ou s’ils sont retenus dans l’attente de leur expulsion vers un autre pays. Bien qu’elles puissent réexaminer une décision administrative lorsqu’un des rares motifs d’«erreur juridictionnelle» prévus par la loi est invoqué, notamment le déni de procédure équitable, un tel réexamen n’englobe pas la nécessité de la détention sur le fond.

3.11Dans la mesure où les raisons ayant amené les autorités à considérer qu’ils présentaient un risque pour la sécurité n’ont pas été divulguées, les auteurs ne peuvent tenter de déterminer si des erreurs de droit ont été commises par l’Agence du renseignement. En outre, les juridictions ont reconnu qu’elles n’avaient pas les connaissances nécessaires pour évaluer des informations relatives à la sécurité. L’examen des preuves qu’elles effectuent dans ces cas-là est largement formel et sans effet. Même si les auteurs étaient en mesure d’entamer une procédure de réexamen judiciaire, l’Agence du renseignement aurait la possibilité d’invoquer «l’immunité d’intérêt public» pour les empêcher de contester devant les tribunaux des preuves ayant étayé un avis négatif en matière de sécurité comme elle l’a déjà fait dans d’autres affaires d’évaluation des risques pour la sécurité portées devant la Cour fédérale où elle avait rendu un avis négatif à propos des non-ressortissants.

Article 7 et article 10 (par. 1)

3.12La conjugaison des facteurs que représentent le caractère arbitraire de la détention, sa durée prolongée ou indéterminée et les conditions difficiles qui prévalent dans les centres où ont été placés les auteurs est à l’origine de préjudices psychologiques graves et irréversibles, contraires à l’article 7 et au paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte. Les conditions difficiles de détention incluent l’inadéquation des soins de santé mentale et physique, l’exposition à l’instabilité, à la violence et à un traitement juridique punitif, le risque d’un emploi excessif de la force par les autorités et le fait d’être témoin du suicide ou de l’automutilation d’autres détenus ou de craindre de tels événements. Aucun recours interne, pas même un recours constitutionnel, n’est disponible à cet égard.

3.13Différentes institutions, parmi lesquelles la Commission australienne des droits de l’homme et des organismes médicaux, ont exprimé leur vive préoccupation à l’égard de la santé mentale des personnes placées dans les centres de détention d’immigrants. Les effets de la détention sur la santé mentale des auteurs sont exacerbés par les conditions matérielles qu’ils subissent. La Commission australienne des droits de l’homme s’est par exemple inquiétée des conditions très contraignantes qui prévalent au Centre de détention des services de l’immigration de Villawood et au Centre de détention des services de l’immigration du secteur nord de Darwin, entourés de grillages électriques et où la surveillance est très stricte. Le centre de détention des services de l’immigration de Christmas Island est lui aussi comparé à une prison. La Commission a également dit craindre que les autorités ne fassent un usage excessif de la force dans les centres de détention et s’est inquiétée de l’inadéquation des services de santé mentale et physique.

Article 17 (par. 1), article 23 (par. 1) et article 24 (par. 1)

3.14Les cinq membres de la famille R. (auteurs nos 13 à 17) soutiennent que leur détention prolongée constitue également une violation des articles 17 (par.1), 23 (par.1) et 24(par. 1), en ce qu’elle est une ingérence dans leur vie familiale incompatible avec l’obligation qu’a l’État partie de protéger la famille et les enfants. La famille est logée dans un centre distinct de Villawood, le Sydney Immigration Residential Housing. La détention des enfants n’est pas justifiée. Étant donné leur âge (1, 4 et 7 ans au moment de la présentation de la communication), ils ne présentent aucun risque en matière de sécurité ou de santé et ne risquent pas de disparaître. Même si le logement en résidence à Villawood est préférable aux bâtiments principaux de détention, il s’agit tout de même d’un lieu fermé dont les enfants et leur famille ne sont pas libres de sortir. Selon les professionnels de la santé mentale, la détention de nourrissons et d’enfants a des effets immédiats, et probablement à long terme également, sur leur développement ainsi que sur leur santé psychologique et émotionnelle.

3.15Les cinq auteurs ont été soigneusement examinés par un psychiatre, qui a établi un rapport daté du 1er novembre 2010 adressé au Ministère de l’immigration et de la citoyenneté. Il ressort de ce rapport que S. R. (auteur no 13) est sérieusement déprimée et présente les symptômes classiques d’un trouble dépressif majeur. Elle présente également certains signes de stress post-traumatique. Son état dépressif s’explique aisément par les graves facteurs de stress auxquels la famille est exposée depuis son placement en détention et par l’incertitude qui pèse sur son sort. Son fils âgé de 3 ans peut être anormalement triste et anxieux et souffre peut-être de malnutrition. Son développement normal a été gravement perturbé. Il est possible que les trois enfants éprouvent des difficultés à l’avenir s’ils continuent de vivre en détention, car ils ne peuvent pas se faire librement des amis lorsqu’ils ne sont pas à l’école et ne peuvent entretenir des liens avec l’ensemble de leur famille ni s’adonner à des activités extrascolaires.

3.16La détention de la famille R. constitue une ingérence dans leur vie familiale en ce qu’elle perturbe les interactions ordinaires des membres de la famille et altère leurs libertés et leurs relations, dont la possibilité de choisir leur lieu de résidence, leurs conditions de vie, les personnes avec lesquelles ils cohabitent, leurs activités familiales en dehors du domicile et leurs relations avec la communauté. Leur détention prolongée étant contraire aux articles 9, 7 et 10 du Pacte, cette ingérence n’est justifiée par aucun but légitime.

3.17S. S. (auteur no 20), en détention à Villawood depuis août 2011, est séparé de sa femme et de son enfant mineur, qui vivent à Sidney, au sein de la communauté australienne. Cette séparation est la cause d’un stress et d’une anxiété intenses pour la famille, confrontée à une détention de durée indéterminée non susceptible de réexamen, que les visites régulières de l’auteur ne parviennent pas à atténuer. L’épouse a de grandes difficultés à s’intégrer à la communauté australienne sans son mari et souffre de problèmes de santé continus liés au stress. Elle-même et l’enfant sont logés à une grande distance du centre où le mari est détenu, ce qui rend leurs visites quotidiennes coûteuses et leur prend beaucoup de temps. À partir du moment où la détention de l’auteur est illégale, il n’existe aucune justification légale de l’ingérence dans la vie familiale et l’État partie est responsable de laviolation des articles 17, 23 (par. 1) et 24 (par.1) du Pacte.

3.18Pour les raisons indiquées ci-dessus, aucun recours interne contraignant ne permet aux auteurs d’empêcher cette ingérence arbitraire dans leur vie familiale ou d’obliger les autorités à accorder à leur famille ou leurs enfants la protection requise aux articles 23 (par. 1) et 24 (par. 1) du Pacte.

Réparation demandée

3.19L’État partie devrait, entre autres mesures, reconnaître les violations du Pacte, libérer immédiatement les auteurs, leur présenter des excuses et leur offrir une réparation adéquate, y compris pour leur détresse morale et leur souffrance psychologique. Si l’État partie juge nécessaire de maintenir certains auteurs en détention, il devrait fournir une appréciation individuelle de cette nécessité, envisager des mesures non privatives de liberté, établir une procédure d’examen périodique indépendant de la nécessité du maintien en détention et prévoir un examen judiciaire effectif de la nécessité de la détention.

3.20Pour ce qui est des garanties de non-répétition, la loi australienne devrait être modifiée de la manière suivante: la détention ne devrait plus être obligatoire; une évaluation individuelle de la nécessité de la détention devrait être exigée; les détenus devraient être informés des raisons de fond qui justifient leur détention; un examen périodique indépendant de la nécessité de la détention devrait être effectué; des mesures non privatives de liberté devraient être envisagées; un examen judiciaire effectif, sur le fond, de la détention et des avis négatifs issus d’évaluations des risques pour la sécurité devrait être prévu; des mesures visant une protection accrue des droits de la famille et des enfants devraient être prises.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4.1Le 5 décembre 2012, l’État partie a affirmé que toutes les demandes étaient irrecevables. Il a déclaré que le 15 octobre 2012 le Gouvernement avait annoncé qu’il désignerait un organisme indépendant chargé d’examiner les évaluations des risques pour la sécurité s’étant soldées par des avis négatifs à propos de demandeurs d’asile à l’égard desquels l’État a des obligations de protection et qui sont placés dans les centres de détention pour immigrants. Cet organisme étudiera tous les documents utilisés par l’Agence du renseignement (y compris tout élément nouveau que l’individu concerné communiquerait à l’Agence) et présentera ses conclusions au Procureur général, au Ministère de l’immigration et de la citoyenneté et à l’Inspecteur général des renseignements et de la sécurité. Il examinera tous les douze mois les évaluations des risques pour la sécurité s’étant soldées par un avis négatif. Les auteurs de la communication auront accès aux mécanismes de réexamen initial et périodique, ce qui leur permettra de prendre part à un processus décisionnel ouvert et responsable en matière d’évaluation des risques pour la sécurité.

4.2Puisque le statut de réfugié a été reconnu aux auteurs, ceux-ci ont droit à une protection en vertu du droit international et ne peuvent être renvoyés dans leur pays d’origine. Le Gouvernement australien recherche des solutions à leur proposer, notamment la réinstallation dans un pays tiers ou un retour en toute sécurité dans leur pays d’origine, lorsqu’ils n’y seront plus exposés à aucun risque ou que des garanties effectives et fiables auront été obtenues. En revanche, il n’est pas souhaitable que les personnes pour lesquelles l’évaluation des risques pour la sécurité s’est soldée par un avis négatif vivent dans la communauté australienne tant que les autorités recherchent une solution.

Non-épuisement des recours internes

4.3Les auteurs n’ont pas épuisé les voies de recours internes au regard des articles 7, 9 (par. 1 et 4), 10 (par. 1), 17 (par. 1), 23 (par. 1) et 24 (par. 1). Chacun d’eux avait la possibilité de demander un examen judiciaire de la décision concernant sa détention auprès de la Cour fédérale ou de la Cour suprême australienne et, dans le cadre d’une telle procédure, de demander des informations sur les fondements de l’évaluation des risques pour la sécurité. Les auteurs ne s’en sont pas prévalus, à l’exception de P. S. (auteur no 29), qui a saisi la Cour suprême mais s’est par la suite entendu avec le Gouvernement australien et a retiré sa demande, et de Y. R. (auteur no 17), qui a introduit auprès de la Cour suprême, en mai 2012, une action par laquelle il contestait l’évaluation des risques pour la sécurité ayant abouti à un avis négatif le concernant et la légalité de sa détention. La Cour suprême examinera si Y. R. a bénéficié d’une procédure équitable dans l’évaluation des risques qu’il présentait pour la sécurité, si l’article 189 de la loi sur les migrations permet sa détention et s’il ressort du principe de séparation des pouvoirs énoncé dans la Constitution qu’une détention de longue durée ne peut être légale que si elle est ordonnée par une juridiction. La date du prononcé de l’arrêt n’est pas encore connue. Si la demande d’examen judiciaire de l’évaluation des risques pour la sécurité aboutissait, l’Agence du renseignement pourrait notamment devoir réexaminer le dossier.

4.4Une affaire récente (Plaintiff M47/2012 v. Director General of Security and Ors) démontre en outre qu’il existe encore des voies de recours internes à la disposition des auteurs. Il s’agit d’une personne qui est arrivée en Australie avec le groupe secouru par l’Oceanic Viking. La Cour suprême a examiné les raisons de la décision négative prise à l’issue de l’évaluation des risques pour la sécurité qui ont été indiquées par l’Agence du renseignement au plaignant M47, ainsi que la possibilité qu’il a eue d’analyser les questions essentielles sur lesquelles était fondée la décision relative à l’évaluation de la sécurité. La Cour suprême a conclu que l’Agence du renseignement avait réservé au plaignant M47 une procédure équitable compte tenu des circonstances de l’espèce. Toutefois, elle a jugé qu’un règlement pris en vertu de la loi sur les migrations était dénué de validité au motif qu’il appliquait un critère empêchant l’octroi d’un visa de protection à un réfugié si celui-ci faisait l’objet d’un avis négatif en matière d’évaluation des risques pour la sécurité. Il en résulte que le refus d’accorder un visa de protection au plaignant M47 n’était pas conforme à la loi et que le Ministère de l’immigration et de la citoyenneté devra réexaminer sa demande de visa de protection. La Cour suprême a conclu que le maintien en détention du plaignant M47 était légal aux fins de statuer sur la demande de visa de protection. Le jugement rendu dans cette affaire pourrait s’appliquer aux auteurs arrivés sur l’Oceanic Viking (au cas où ils présenteraient une demande de visa de protection, ce qu’ils n’ont pas fait à ce jour). En revanche, ce jugement ne concerne pas les auteurs qui sont des «personnes arrivées sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion» en vertu de la loi sur les migrations, étant donné qu’ils sont visés par l’interdiction de présenter des demandes de visa en vertu de l’article 46A de la loi sur les migrations.

4.5L’État partie conteste l’argument des auteurs selon lequel il est inutile d’engager une procédure d’examen judiciaire dans la mesure où les tribunaux australiens ne peuvent effectuer un tel examen que sur le terrain de l’«erreur juridictionnelle» et ne sont pas compétents pour examiner la nécessité de la détention sur le fond. Le fait que l’affaire M47 a été portée devant la Cour suprême pour contester directement la légalité de la détention de personnes se trouvant dans la situation des auteurs met en évidence le fait que les auteurs disposent encore d’un recours utile. Il est possible de mettre en cause devant la Cour suprême la légalité de la détention dans les mêmes circonstances.

4.6Les auteurs de la communication qui sont mineurs (auteurs nos 14, 15 et 16) n’ont pas, par l’intermédiaire de leurs parents, exercé toutes les voies de recours administratives qui leur offrent une perspective raisonnable de réparation.

Irrecevabilité ratione materiae

4.7Les griefs formulés dans la communication qui sont tirés de la Convention relative au statut des réfugiés sont irrecevables ratione materiae car ils sont incompatiblesavec lesdispositions du Pacte.

4.8Les griefs tirés du paragraphe 2 de l’article 9 sont également irrecevables ratione materiae, les auteurs n’ayant pas été «arrêtés». Le terme «arrestation» devrait être entendu comme désignant l’acte consistant à appréhender une personne à la suite de la commission ou de la commission présumée d’une infraction pénale pour la placer en détention. Le sens ordinaire du mot «arrestation» ne s’étend pas au placement d’un demandeur d’asile en détention administrative dans le but d’effectuer des contrôles de santé, de sécurité et d’identité.

Défaut de fondement

4.9Les griefs tirés de l’article 7 et du paragraphe 1 de l’article 10 devraient être déclarés irrecevables pour défaut de fondement. Les auteurs ont formulé des doléances générales sur les conditions de détention. Ils n’ont cependant pas apporté de preuve indiquant que le traitement en détention de l’un quelconque d’entre eux ait été plus humiliant ou dégradant que la détention elle-même eu égard à leur situation particulière.

Commentaires des auteurs sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité

5.1Le 21 février 2013, les auteurs ont présenté des commentaires sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité.

5.2Les auteurs rejettent l’argument selon lequel les recours internes n’ont pas été épuisés. Ils ont droit à un examen judiciaire de la détention et de l’évaluation des risques pour la sécurité qui s’est soldée par un avis négatif, mais un tel examen est pratiquement inefficace ou de portée trop étroite pour protéger les droits consacrés par le Pacte. Pour ce qui est de l’examen de la détention, les tribunaux peuvent vérifier si un détenu est arrivé sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion mais ne sont pas compétents pour examiner la nécessité de la détention sur le fond. En outre, dans sa jurisprudence, la Cour suprême a établi que la détention d’immigrants pour une période indéterminée était conforme au droit interne. Le critère de l’épuisement des recours internes ne saurait signifier que les auteurs sont tenus de contester la jurisprudence récente et définitive de la Cour suprême. Quant à engager une procédure d’examen judiciaire de l’évaluation des risques pour la sécurité qui s’est soldée par un avis négatif, les auteurs n’ayant pas été dûment informés des raisons ou des preuves utilisées lors de l’évaluation des risques pour la sécurité les concernant sont dans l’impossibilité d’identifier des erreurs de droit qui pourraient constituer un motif de réexamen. Or le fait de saisir un tribunal sans fondement est considéré comme un abus de procédure.

5.3Certains éléments pratiques font également obstacle à l’examen judiciaire: la procédure est onéreuse pour des réfugiés en détention qui n’ont aucun revenu et n’ont pasdroit à l’aide juridictionnelle. Quant à l’affaire M47,le fait que ce réfugié a pu saisir un tribunal montre seulement que cette personne en particuliera identifié des erreurs de droitparce qu’elle avait obtenu davantage d’informations que les auteurs de la présente communication.

5.4En outre, dans l’affaire M47, il s’agit d’un réfugié secouru par l’Oceanic Viking qui est entré légalement en Australie au bénéfice d’un visa à objectif spécial. Sa situation est donc différente de celle de la majorité des auteurs de la présente communication, qui sont entrés en Australie illégalement par bateau et qui, selon la loi, n’ont pas le droit de demander un visa de protection. Au mieux, l’arrêt de la Cour suprême pourrait s’appliquer aux cinq auteurs secourus par l’Oceanic Viking. En tout état de cause, la Cour suprême a confirmé la légalité du maintien en détention du plaignant M47. Sur le plan juridique la détention avant expulsion est simplement devenue une détention dans l’attente d’une nouvelle évaluation (valide) des risques qu’il présente pour la sécurité et d’un réexamen de sa demande de visa de protection. Ceci montre bien que les juridictions n’ont pas compétence pour ordonner la libération des auteurs si ce n’est pour des motifs techniques très limités.

5.5Quant aux auteurs mineurs, ils ont le droit de vivre dans la communauté australienne. Cela ne rend pas pour autant leurs demandes irrecevables. Il est dans leur intérêt supérieur tant de ne pas être séparés de leurs parents que de ne pas résider en détention. Toute menace pour la sécurité nationale que pourraient représenter les parents (et qu’ils contestent) pourrait être contrée par l’application de mesures de sécurité comme le placement sous surveillance, l’obligation de se présenter périodiquement aux autorités, le dépôt de garanties, le port de bracelets de localisation par GPS ou l’imposition de restrictions à la liberté de communication et au choix du lieu de résidence.

5.6Pour ce qui est de la recevabilité des allégations de violation de la Convention relative au statut des réfugiés, les auteurs ne demandent pas au Comité de constater des violations distinctes ou directes de cette convention. Ils lui demandent d’interpréter le paragraphe 1 de l’article 9 au regard du droit des réfugiés qui devrait être considéré en l’espèce comme la lex specialis.

5.7Pour ce qui est de l’argument selon lequel le paragraphe 2 de l’article 9 vise uniquement les cas d’arrestation en matière pénale, les auteurs avancent que cette disposition s’inscrit dans le cadre de l’objectif général de l’article 9, qui est la protection contre l’arrestation et la détention arbitraires, et pas seulement l’arrestation ou la détention du chef d’une infraction pénale.

5.8Les auteurs ont présenté des informations suffisantes aux fins de la recevabilité des griefs qu’ils tirent des articles 7 et 10 et ils peuvent en communiquer d’autres. Chaque auteur est prêt à présenter une déclaration dans laquelle il décrirait son expérience de la détention et les effets que celle-ci a sur lui. D’autres rapports psychiatriques concernant plusieurs auteurs peuvent également être communiqués sur demande.

5.9Quant à la nomination d’un organisme indépendant chargé d’examiner les évaluations des risques pour la sécurité s’étant soldées par un avis négatif, les auteurs considèrent cette mesure comme une amélioration qui, cependant, demeure insuffisante du point de vue procédural. Premièrement, les conclusions de cet organe ne sont pas contraignantes et constituent de simples recommandations adressées à l’Agence du renseignement. Deuxièmement, il n’est toujours pas prévu de divulguer un minimum d’informations dans chaque cas, ce qui limite la capacité des réfugiés à réagir avec efficacité. Dans un cas donné, l’Agence du renseignement a toujours la possibilité de décider qu’il est impossible de révéler les raisons de fond à l’intéressé, ce qui impliquera que l’organe d’examen ne pourra pas le faire non plus. Donc, les réfugiés peuvent encore se voir privés de toute information quant aux allégations formulées à leur encontre avant que la décision les concernant ne soit rendue et ce, en toute légalité.

Observations de l’État partie sur le fond

6.1Le 5 décembre 2012, l’État partie a soutenu que les griefs soulevés par les auteurs étaient dépourvus de fondement, et ce pour les raisons suivantes.

Article 9 (par. 1)

6.2Les auteurs sont des non-ressortissants en situation irrégulière détenus conformément à la loi sur les migrations. Leur détention est donc légale. La Cour suprême australienne a considéré que les dispositions pertinentes de la loi étaient conformes à la Constitution. Les demandeurs d’asile sont placés dans des centres de détention pour immigrants lorsqu’ils relèvent de l’une des catégories suivantes: 1) personnes arrivées sans autorisation qui présentent un risque pour la communauté lié à la santé, l’identité ou la sécurité; 2) non-ressortissants en situation irrégulière qui présentent des risques inacceptables pour la communauté; et 3) non-ressortissants en situation irrégulière qui refusent de manière répétée de se conformer aux conditions définies par leur visa.

6.3La durée et les conditions de la détention, y compris l’adéquation du logement et des services fournis, font l’objet de contrôles réguliers. La durée de la détention ne correspond pas à des délais préétablis mais dépend de l’appréciation, pour chaque individu, des risques qu’il présente pour la sécurité de la communauté. Ces évaluations sont effectuées par des organismes publics le plus rapidement possible. Le critère déterminant n’est pas la durée de la détention mais la question de savoir si la détention est justifiée.

6.4L’Agence du renseignement a examiné le cas de chaque auteur adulte individuellement et a décidé, en application de l’article 4 de la loi sur l’Agence australienne du renseignement relatif à la sécurité, que leur délivrer un visa permanent constituerait un risque pour l’une ou plusieurs des raisons suivantes:

Cela constituerait une menace pour la sécurité de l’Australie et des Australiens, notamment une menace de violence à motivation politique, cela favoriserait les violences communautaires ou constituerait une menace pour l’intégrité territoriale de l’Australie et l’intégrité de ses frontières;

Cela reviendrait à offrir aux organisations auxquelles les intéressés pourraient appartenir un refuge d’où ils pourraient organiser des attaques contre leur gouvernement, que ce soit en Australie ou à l’étranger;

Cela pourrait revenir à offrir à des personnes ou des organisations terroristes un refuge qui leur permettrait de se livrer à des activités terroristes ou de financer de telles activités en Australie.

6.5Communiquer en détail les informations confidentielles qui sous-tendent les évaluations des risques pour la sécurité s’étant soldées par un avis négatif mettrait en cause le mécanisme d’évaluation des risques pour la sécurité et compromettrait la sécurité de l’Australie. Cela exposerait également les sources de l’Agence du renseignement et entamerait les capacités sur lesquelles celle-ci s’appuie pour remplir ses missions.

6.6La détention des auteurs adultes est une mesure proportionnée au risque pour la sécurité qui a été constaté pour chaque intéressé. Pour ce qui est des trois auteurs mineurs, leur intérêt supérieur a été pris en compte et il leur a été permis de résider au sein de la communauté australienne. Dans les cas où les familles ont décidé de rester ensemble dans les centres de détention, des services et installations adaptés ont été fournis. Les enfants vivent dans une résidence des services de l’immigration et sont libres d’aller à l’école, de participer à des sorties et à d’autres activités organisées de manière qu’ils puissent vivre avec le moins de contraintes possibles compte tenu de leur statut de non-ressortissants en situation régulière, le temps que des solutions pour la famille soient trouvées.

6.7La légalité des décisions rendues au titre de la loi relative à l’Agence du renseignement peut faire l’objet d’un examen judiciaire. En outre, l’Inspecteur général des renseignements et de la sécurité peut enquêter sur la légalité, la régularité, l’efficacité et l’adéquation des évaluations des risques pour la sécurité que peuvent présenter des non‑ressortissants effectuées par l’Agence du renseignement.

Article 9 (par. 2)

6.8Pour le cas où le Comité conclurait que les auteurs ont été «arrêtés» au sens du paragraphe 2 de l’article 9, l’État partie soutient qu’il n’y a pas eu violation de cette disposition. Conformément à la pratique habituelle, tous les auteurs, à leur arrivée à Christmas Island, ont été informés des raisons de leur mise en détention dans une notification rédigée en anglais. Le texte de la notification a été lu par un fonctionnaire, des interprètes étant présents pour le traduire vers les langues concernées.

6.9Les auteurs qui avaient été secourus par l’Ocean ic Viking ont été informés qu’ils ne répondaient pas aux critères de sécurité requis pour l’obtention d’un visa de résident permanent et qu’ils devaient donc être mis en détention dans l’attente d’une solution de réinstallation. Les autres auteurs ont été informés que la raison de leur détention était leur statut présumé de non‑ressortissants en situation irrégulière. Lorsque le Ministère de l’immigration et de la citoyenneté a reçu l’avis négatif de l’Agence du renseignement issu de l’évaluation des risques que les auteurs présentaient pour la sécurité, les auteurs en ont été informés et il leur a été expliqué qu’ils ne pouvaient dès lors prétendre à un visa de résident permanent.

Article 9 (par. 4)

6.10Les auteurs peuvent demander l’examen judiciaire de la légalité de leur détention et un tribunal peut ordonner leur libération si la détention n’est pas conforme à la loi. Bien qu’il interdise l’ouverture de certaines actions judiciaires aux personnes arrivées sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion, l’article 494AA de la loi sur les migrations indique expressément qu’il est sans préjudice de la compétence de la Cour suprême en matière de constitutionnalité.

6.11L’examen judiciaire des évaluations des risques pour la sécurité s’étant soldées par un avis négatif offre aux tribunaux une importante occasion d’examiner la question de la divulgation, par l’Agence du renseignement, d’informations aux intéressés. Dans le cadre de cet examen, une partie peut demander la communication de toute information, sous réserve que celle-ci soit pertinente et que l’Agence n’ait pas obtenu l’immunité d’intérêt public.

Article 7 et article 10 (par. 1)

6.12Le système de détention d’immigrants et le traitement réservé aux auteurs en détention ne sont pas à l’origine de souffrances physiques ou psychologiques si graves qu’elles constitueraient un traitement contraire aux dispositions ci-dessus. En outre, le système de détention obligatoire des immigrants arrivés sur le territoire sans autorisation n’est pas arbitraire en soi et la détention de chaque auteur pris individuellement ne l’est pas non plus dans la mesure où elle est raisonnable, nécessaire, proportionnée, appropriée et justifiable dans toutes les circonstances. Le fait que la détention se prolonge n’est pas en soi suffisant pour constituer une violation de ces articles.

6.13L’État partie rejette les arguments selon lesquels les conditions de détention constitueraient un traitement inhumain ou dégradant. Les auteurs sont hébergés dans des conditions considérées comme les plus adaptées à leur situation. Onze auteurs vivent dans des centres de détention d’immigrants, 20 dans des foyers des services de l’immigration et 6 dans des logements de transit relevant des mêmes services. Ces installations sont gérées par Serco, une société privée qui est tenue de veiller à ce que les personnes détenues soient traitées équitablement, avec dignité et respect. Les actes et le comportement du personnel de Serco sont régis par un code de conduite. Cette société a adopté des politiques et procédures destinées à garantir le bien-être des personnes détenues.

6.14Il est procédé à un examen périodique des conditions de détention, ce qui a été fait pour chacun des auteurs. La détention d’immigrants fait également l’objet d’une surveillance régulière par des organismes externes et indépendants comme la Commission australienne des droits de l’homme, le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et le Conseil du Ministre sur les demandeurs d’asile et la détention.

6.15L’État partie reconnaît que les immigrants placés en détention, en particulier ceux qui sont arrivés par la mer sans autorisation et qui ont subi des tortures et des traumatismes ou qui présentent des antécédents de troubles mentaux, peuvent voir leur santé mentale se détériorer et être tentés par l’automutilation ou le suicide. Des éléments tels que le rejet d’une demande de visa et l’incertitude liée au statut de migrant et à la durée de la détention peuvent constituer pour eux des facteurs de stress supplémentaires. C’est pourquoi ils ont accès à des services de santé et de soutien psychologique adaptés à leur situation personnelle et bénéficient d’examens réguliers par des professionnels de la santé.

6.16Tous les centres de détention d’immigrants, y compris ceux dans lesquels les auteurs résident, sont dotés de services de santé primaires d’une qualité généralement comparable à ceux dont disposent les Australiens et qui tiennent compte de la diversité, voire de la complexité des besoins des intéressés. Lorsqu’un traitement médical spécialisé n’est pas disponible sur place, il est fait appel à des spécialistes extérieurs.

6.17Contrairement à ce qu’affirment les auteurs, les conditions matérielles de détention sont adaptées et constamment améliorées, et les personnes détenues ont suffisamment de possibilités de loisirs. Il peut arriver que des troubles ou des incidents violents surviennent, mais l’entreprise Serco a mis en place des procédures détaillées pour y faire face. Les auteurs n’ont fait état d’aucun événement de ce type dont ils auraient été directement témoins. Serco n’a recours à la contrainte qu’en dernier ressort et le degré de force pouvant être employé est strictement limité.

6.18En l’absence d’allégations précises concernant chacun d’entre eux, le Comité ne saurait conclure que les auteurs ont été personnellement soumis à des traitements contraires à l’article 7 et au paragraphe 1 de l’article 10.

Article 17 (par. 1), article 23 (par. 1) et article 24 (par. 1)

6.19Il n’y a pas eu ingérence dans la vie de la famille R. car ses membres n’ont pas été séparés et l’article 17 ne s’étend pas à l’ingérence dans la «vie familiale». Pour le cas où le Comité serait d’un avis contraire, l’État partie fait valoir qu’il n’y a pas eu ingérence, car la famille a eu accès à des services de soutien, des infrastructures et des activités qui lui ont permis de vivre aussi normalement que possible. Depuis le 10 août 2010, elle loge dans la résidence des services de l’immigration de Villawood, qui dispose de logements privés de style familial dans un cadre communautaire. Les bâtiments sont composés de quatre maisons duplex dont chacune comprend trois chambres, deux salles de bains, une cuisine, une salle à manger et un salon ainsi qu’un garage. Un espace commun a été aménagé avec des pelouses, un petit jardin, des espaces de jeux pour les enfants, un demi-terrain de basketball et un petit espace couvert réservé aux loisirs. Lorsque la famille y est arrivée, elle a été soumise à certaines restrictions en raison des risques pour la sécurité que Y. R. et S. R. présentaient selon les autorités. Ces restrictions ont par la suite été levées et la famille est à présent libre d’entretenir des relations avec les autres personnes de la résidence, de recevoir des visites et de participer à des activités à l’extérieur.

6.20Pour le cas où le Comité conclurait que la détention constitue une ingérence dans la famille, l’État partie affirme que cette ingérence n’est ni illicite ni arbitraire. La nécessité de protéger les intérêts de la sécurité nationale de l’Australie l’emporte sur toute considération liée aux difficultés que rencontre la famille.

6.21L’État partie ne s’est pas immiscé dans la vie familiale de M. S. non plus. La femme et l’enfant de M. S. vivent suffisamment près de lui pour pouvoir lui rendre visite chaque jour et il peut rester chez eux pendant quatre heures tous les samedis. En outre, la décision de ne pas vivre ensemble a été prise par la famille elle-même. Pour le cas où le Comité estimerait que la séparation de l’auteur et du reste de sa famille constitue une ingérence dans la vie de celle-ci, l’État partie fait valoir que l’ingérence n’est ni illicite ni arbitraire, dans la mesure où elle est proportionnée au but légitime qui consiste à protéger les intérêts de la sécurité nationale.

6.22Les griefs tirés du paragraphe 1 de l’article 23 sont également dénués de fondement. L’obligation de protection est subordonnée à l’adoption de mesures raisonnables visant à contrôler l’immigration, conformément au droit qu’a l’État partie de surveiller l’entrée, le séjour et l’expulsion des étrangers et de protéger la sécurité nationale. L’État partie s’est doté de programmes et de politiques destinés à soutenir les familles placées dans les centres de détention d’immigrants, notamment par l’intermédiaire d’un personnel qualifié, du personnel médical, de conseillers et d’assistants sociaux.

6.23Les griefs tirés du paragraphe 1 de l’article 24 sont eux aussi dépourvus de fondement. La famille R. a un certain nombre de proches qui résident à Sydney, la ville où se trouve Villawood. Les enfants ont par conséquent la possibilité de résider avec des membres de la famille élargie tout en restant à proximité de leurs parents. S’ils résident dans le centre de détention, c’est sur décision de leurs parents. En offrant aux enfants la possibilité de résider au sein de la communauté australienne, l’État partie a rempli son obligation au titre du paragraphe 1 de l’article 24.

6.24Pour le cas où le Comité n’accepterait pas cet argument, l’État partie affirme que la situation des enfants de la famille R. en détention ne constitue pas une violation du paragraphe 1 de l’article 24. L’État partie a tenu compte de l’intérêt supérieur des enfants de cette famille en leur offrant des mesures de protection adaptées. Les enfants sont titulaires d’un visa de protection, ont accès aux mêmes services de santé que les citoyens australiens, vont à l’école et sont autorisés à participer à toutes les activités scolaires.

6.25Quant à la famille S., elle a pu choisir entre plusieurs possibilités de logement, parmi lesquelles des solutions qui ont permis à l’enfant de S. d’entretenir une relation étroite avec son père, de vivre au sein de la communauté australienne, d’aller à l’école et de participer à d’autres activités, ce qui démontre que l’État partie a tenu compte de l’intérêt supérieur de cet enfant.

Réparation

6.26Vu qu’il n’y a pas eu violation des droits que les auteurs tiennent du Pacte, aucune des réparations qu’ils demandent ne devrait être recommandée par le Comité. Il serait inapproprié que le Comité recommande la libération des auteurs adultes, compte tenu des risques qu’ils représentent pour la sécurité nationale d’après l’évaluation qui a été faite, et vu qu’un examinateur indépendant a été récemment désigné. Pour le cas où le Comité conclurait que l’Australie n’a pas respecté certains droits, l’État partie lui demande de recommander d’autres formes de réparation que la remise en liberté.

Allégations d’automutilation

6.27À propos des allégations d’automutilation mentionnées au paragraphe 2.7 ci‑dessus, le 6 août 2012 l’État partie a informé le Comité que K. N. et S. Y. (auteurs nos 11 et 34) avaient reçu des soins et bénéficié d’un soutien psychologique. Le Gouvernement australien avait peu de temps auparavant répondu à une enquête de la Commission sur la situation particulière des auteurs. Conformément à la loi, le Médiateur avait été informé du maintien en détention de tous les auteurs dans des centres pour immigrants. L’État partie veille à ce que toutes les personnes placées dans des centres de détention d’immigrants bénéficient d’une prise en charge adaptée à leur état de santé physique et psychologique, soient logées dans un environnement qui contribue à la réduction des risques d’automutilation et reçoivent le soutien nécessaire pour limiter et gérer l’anxiété résultant d’une détention prolongée.

Commentaires des auteurs sur les observations de l’État partie concernant le fond

7.1Le 23 février 2013, les auteurs ont formulé les commentaires ci-dessous sur les observations de l’État partie concernant le fond, qui reprennent certains des arguments antérieurs, auxquels d’autres ont été ajoutés comme suit.

Article 9 (par. 1)

7.2La détention des auteurs est illégale. La légalité au sens du paragraphe 1 de l’article 9 doit être interprétée non seulement au regard du droit interne mais au regard du droit international, y compris le Pacte. La détention pour des motifs de sécurité est illégale au regard du paragraphe 1 de l’article 9 parce que les procédures de réexamen prévues par la législation nationale sont manifestement insuffisantes.

7.3La détention obligatoire à l’arrivée est arbitraire. Cela est d’autant plus vrai que la durée de la détention entre leur arrivée et la notification de l’évaluation des risques pour la sécurité s’étant soldée par un avis négatif a été très longue (entre quatorze mois et deux ans). L’État partie n’a pas justifié la nécessité d’un si long délai.

7.4L’État partie n’a pas cherché à démontrer qu’il avait envisagé d’autres solutions que la détention dans chaque cas particulier ni à expliquer pourquoi telle ou telle mesure non privative de liberté n’était pas adaptée. Il n’a fourni aucune preuve des démarches qu’il aurait entreprises en vue de la réinstallation des auteurs dans un pays tiers.

7.5Quant à l’inexistence ou l’inefficacité d’un examen judiciaire de la détention, les auteurs arguent que l’Inspecteur général des renseignements et de la sécurité ne détient qu’un pouvoir de recommandation et ne saurait dès lors offrir une voie de recours utile s’appuyant sur un droit juridiquement opposable de faire annuler une évaluation des risques pour la sécurité s’étant soldée par un avis négatif.

Article 9 (par. 2)

7.6La notification de détention reçue par les auteurs à leur arrivée n’explique pas pourquoi chaque auteur est individuellement considéré comme présentant un risque et par conséquent comme devant être placé en détention, que ce soit pour des raisons liées à l’identité, la sécurité, la santé ou un risque de disparition. De la même manière, les lettres du Ministère de l’immigration et de la citoyenneté informant les auteurs de l’évaluation faite par l’Agence du renseignement ne précisent pas les raisons de sécurité qui justifieraient la détention. L’État partie n’a fourni aucune preuve attestant que chacun des auteurs a effectivement reçu une notification écrite de détention à son arrivée en Australie ni que chaque auteur se trouvant à Christmas Island a été informé dans une langue qu’il comprend.

Article 9 (par. 4)

7.7Pour le cas où le Comité considérerait que la détention des auteurs est illégale au regard du paragraphe 1 de l’article 9, parce qu’elle n’est ni nécessaire ni proportionnée, il devrait aussi constater la violation du paragraphe 4 de l’article 9 dans la mesure où les juridictions australiennes ne sont pas compétentes pour vérifier la nécessité d’une détention. En ce qui concerne le réexamen effectué par la Cour suprême, celle-ci ne statue que sur une centaine de dossiers par an, en sa qualité de plus haute juridiction de l’État et de juge de la constitutionnalité. Il n’est pas réaliste de laisser entendre que les auteurs pourraient demander un examen judiciaire alors que le nombre d’affaires inscrites au rôle de la Cour suprême est très faible, que de nombreux milliers de personnes arrivées sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion sont détenues chaque année et que la compétence d’autres cours fédérales est exclue. En outre, préparer un dossier pour saisir la Cour suprême demande des ressources importantes ainsi qu’une représentation en justice, ce dont les auteurs ne disposent tout simplement pas.

Article 7 et article 10 (par. 1)

7.8Plusieurs institutions australiennes indépendantes critiquent régulièrement les conditions de vie dans tous les centres de détention d’immigrants, ainsi que leur effet sur la santé mentale des intéressés. La détérioration continue de l’état psychologique des détenus montre que les mesures de santé prises par l’Australie ne peuvent garantir la sécurité des détenus vu que la détention prolongée est elle-même à l’origine d’un préjudice pour lequel il n’y a pas de traitement médical. Les éléments suivants sont pertinents aux fins de déterminer si la détention des auteurs est inhumaine ou dégradante: a) les auteurs sont des réfugiés ayant droit à une protection spéciale, pour lesquels la détention devrait être une mesure de dernier recours d’une durée aussi brève que possible; b) la plupart des auteurs ont été traumatisés par leur fuite de Sri Lanka; c) certains d’entre eux se sont vu diagnostiquer des maladies mentales qui ne peuvent être convenablement soignées tant qu’ils restent en détention; d) certains des auteurs sont des enfants particulièrement vulnérables.

7.9Si le Comité ne constate pas de violation de l’article 7 faute de preuve, il pourrait tout de même constater une violation du paragraphe 1 de l’article 10 dans la mesure où les auteurs, en tant que groupe, ont subi le même type de mauvais traitements dans le cadre d’une détention de durée indéterminée, dans des conditions physiques et sanitaires difficiles.

Articles 17 (par. 1), 23 (par. 1) et 24 (par. 1)

7.10La détention illégale et/ou arbitraire des parents constitue un manquement à l’obligation de prendre dûment en considération l’intérêt supérieur des enfants, qui sont par là même contraints de choisir entre deux solutions, dont ni l’une ni l’autre n’est conforme à leur intérêt: être séparés de leurs parents ou vivre en détention avec eux.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

8.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

8.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément aux dispositions du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même affaire n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

8.3Le Comité relève que l’État partie conteste la recevabilité de la communication au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés. L’État partie affirme que les cinq auteurs appartenant au groupe secouru par l’Oceanic Viking, qui ont le droit de demander des visas de protection, auraient pu demander un examen judiciaire de la décision les concernant devant la Cour suprême. Cependant, le Comité considère que l’État partie n’a pas démontré que les auteurs disposaient d’un recours utile pour contester leur détention prolongée, voire indéterminée, même s’ils n’étaient pas soumis au même régime de détention de durée indéterminée que les autres auteurs. L’État partie n’a pas démontré que les tribunaux nationaux étaient habilités à prendre des décisions individuelles au sujet des raisons qui ont motivé la détention de chacun des auteurs pendant les longs mois qu’a duré la procédure. Le Comité relève en outre que dans l’arrêt qu’elle a rendu le 5 octobre 2012 dans l’affaire M47, la Cour suprême a confirmé le maintien en détention obligatoire d’un réfugié appartenant au groupe secouru par l’Oceanic Viking. En conséquence, le Comité conclut que l’État partie n’a pas démontré l’existence d’autres recours utiles et que la communication est recevable pour ces auteurs au titre du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif.

8.4Tous les autres auteurs, qui sont des personnes arrivées sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion et n’ont pas le droit de demander des visas de protection, n’ont pas demandé l’examen judiciaire de la décision concernant leur placement en détention et des fondements de l’évaluation des risques qu’ils présentaient pour la sécurité, à l’exception de deux d’entre eux. Sur ces deux auteurs, l’un a déposé une requête auprès de la Cour suprême, mais l’a ensuite retirée, et la requête présentée par l’autre est encore pendante. Néanmoins, le Comité considère que l’État partie n’a pas démontré l’existence d’autres recours utiles qui auraient permis aux auteurs de se faire entendre pour justifier leurs allégations au sujet de leur détention. L’éventualité que la plus haute juridiction de l’État partie annule un jour sa décision précédente concernant le maintien en détention pour une durée indéterminée ne permet pas de dire qu’il existe actuellement un recours utile. L’État partie n’a pas démontré que les juridictions nationales avaient compétence pour rendre des décisions individuelles concernant les motifs qui justifient la détention de chaque auteur. Par ailleurs, il importe eu égard à ces auteurs de rappeler que dans l’affaire M47 la Cour suprême a confirmé le maintien en détention obligatoire du réfugié, ce qui montre que même quand le requérant obtient gain de cause cela ne met pas nécessairement fin à la détention arbitraire. En conséquence, le Comité conclut que l’État partie n’a pas démontré l’existence d’autres recours utiles et que la communication est recevable eu égard à ces auteurs au titre du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif.

8.5Le Comité relève également l’argument de l’État partie selon lequel le grief que les auteurs tirent du paragraphe 2 de l’article 9 devrait être déclaré irrecevable ratione materiae au motif que cette disposition vise uniquement l’arrestation du chef d’infractions pénales. Le Comité considère toutefois que le terme «arrestation», dans le contexte de cette disposition, désigne le commencement d’une privation de liberté, qu’il s’agisse d’une procédure pénale ou administrative, et que l’intéressé a le droit d’être informé des raisons de son arrestation. Le Comité estime par conséquent que ce grief n’est pas irrecevable ratione materiae ni pour tout autre motif et qu’il devrait être examiné au fond.

8.6Pour ce qui est des griefs tirés de l’article 7 et/ou du paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte, le Comité considère que ces griefs ont été suffisamment étayés aux fins de la recevabilité et les déclare recevables.

8.7Pour ce qui est des arguments avancés par les auteurs de la famille R. selon lesquels leur détention constituerait une violation des articles 17 (par. 1) et 23 (par. 1), ainsi que de l’article 24 (par. 1) à l’égard de leurs trois enfants, le Comité relève qu’il a été proposé à la famille de rester unie, qu’elle a bénéficié d’un logement résidentiel spécial et que des programmes éducatifs ainsi que des loisirs et autres activités, y compris à l’extérieur de la résidence, sont disponibles, en particulier pour les enfants. Malgré les difficultés inhérentes à la vie en détention, le Comité considère que, dans les circonstances de l’espèce, les auteurs n’ont pas suffisamment étayé leurs griefs à cet égard et les déclare irrecevables au regard de l’article 2 du Protocole facultatif. Quant aux griefs soulevés par l’auteur S. S. (auteur no 20) au titre des mêmes articles, compte tenu des arrangements prévus par l’État partie pour favoriser les contacts de S. S. avec son épouse et son enfant, qui vivent au sein de la communauté australienne, le Comité considère également que, au regard des circonstances de l’espèce, ces griefs n’ont pas été suffisamment étayés aux fins de la recevabilité.

8.8En conséquence, le Comité décide que la communication est recevable en ce qu’elle semble soulever des questions au regard des articles 7, 9 (par. 1, 2 et 4) et de l’article 10 (par. 1).

Examen au fond

9.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par les parties.

Griefs tirés de l’article 9 (par. 1)

9.2Les auteurs affirment que leur détention obligatoire à leur arrivée ainsi que son caractère continu et sa durée indéterminée, pour des motifs de sécurité, sont illégaux et arbitraires et constituent par conséquent une violation du paragraphe 1 de l’article 9 du Pacte. Ils avancent que leur détention est une mesure disproportionnée par rapport aux risques qu’ils présenteraient pour la sécurité et que les procédures internes d’examen de la détention sont manifestement inadéquates. L’État partie fait valoir que les auteurs adultes sont des non-ressortissants en situation irrégulière détenus en application de la loi sur les migrations et de la loi relative à l’Agence australienne du renseignement relatif à la sécurité, que leur détention est par conséquent légale et constitutionnelle, ainsi que la Cour suprême l’a déjà déclaré, et qu’il s’agit aussi d’une mesure proportionnée aux risques que les auteurs présentent pour la sécurité d’après les autorités.

9.3Le Comité rappelle que l’adjectif «arbitraire» n’est pas synonyme de «contraire à la loi» mais doit recevoir une interprétation plus large qui englobe le caractère inappropriée, l’injustice, l’absence de prévisibilité et le non-respect des garanties judiciaires. La détention pendant une procédure aux fins de contrôle de l’immigration n’est pas en soi arbitraire mais doit être justifiée, raisonnable, nécessaire et proportionnée compte tenu des circonstances, et la mesure doit être réévaluée si elle se poursuit. Les demandeurs d’asile qui entrent illégalement sur le territoire d’un État partie peuvent être placés en rétention pendant une brève période initiale, le temps de vérifier leur entrée, d’enregistrer leurs griefs et de déterminer leur identité si elle est douteuse. Les maintenir en détention pendant que leur demande est examinée serait arbitraire en l’absence de raisons particulières propres à l’individu, comme un risque de fuite, le danger d’atteinte à autrui ou un risque d’acte contre la sécurité nationale. Il convient d’étudier les éléments utiles au cas par cas et de ne pas fonder la décision sur une règle obligatoire applicable à une vaste catégorie de personnes; il convient également d’envisager des moyens moins intrusifs d’obtenir le même résultat, comme l’obligation de se présenter à la police, le versement d’une caution ou d’autres moyens d’empêcher le demandeur de passer dans la clandestinité; il faut en outre que la décision fasse l’objet d’un réexamen périodique et d’un contrôle juridictionnel. La décision doit également prendre en considération les besoins des enfants et l’état de santé mentale de l’étranger placé en détention. Les intéressés ne doivent pas rester retenus indéfiniment aux fins du contrôle de l’immigration si l’État partie n’est pas en mesure de procéder à leur expulsion.

9.4Le Comité observe que les auteurs sont maintenus en détention auprès des services de l’immigration depuis 2009 ou 2010, qu’ils l’ont été en premier lieu à titre de mesure obligatoire à leur arrivée puis à la suite des évaluations des risques qu’ils présentaient pour la sécurité par l’Agence du renseignement. Le fondement de la détention des auteurs secourus par l’Oceanic Viking a peut-être changé après l’arrêt de la Cour suprême qui a statué que le régime de l’Agence du renseignement était inapplicable, mais les autres auteurs restent en détention pour une durée indéterminée pour des raisons de sécurité. Quelle qu’ait pu être la justification de la détention initiale, par exemple la vérification de l’identité, l’État partie n’a pas, de l’avis du Comité, démontré, à titre individuel, que leur détention continue pour une durée indéterminée était légitime. Il n’a pas démontré non plus que d’autres mesures moins intrusives ne pouvaient pas répondre à la nécessité de protéger la sécurité nationale contre les risques que les auteurs adultes étaient censés présenter. En outre, les auteurs ont été maintenus en détention sans être informés du risque spécifique associé à chacun d’eux et des mesures prises par les autorités australiennes pour trouver des solutions qui leur permettent de recouvrer leur liberté. Ils ne bénéficient pas non plus des garanties juridiques qui leur permettraient de contester leur détention de durée indéterminée. Pour toutes ces raisons, le Comité conclut que la détention des deux groupes d’auteurs est arbitraire et contraire au paragraphe 1 de l’article 9 du Pacte. Cette conclusion s’applique également aux trois enfants mineurs car leur situation, indépendamment de leur statut juridique de non‑ressortissant en situation régulière, ne peut pas être dissociée de celle de leurs parents.

Griefs tirés de l’article 9 (par. 2)

9.5Les auteurs affirment que les autorités ne les ont pas informés individuellement des raisons de fond justifiant leur détention, ni à leur arrivée ni après l’évaluation effectuée par l’Agence du renseignement. L’État partie soutient que, à leur arrivée, la plupart des auteurs ont reçu une notification de détention leur expliquant qu’ils étaient soupçonnés d’être des non‑ressortissants en situation irrégulière et que, par la suite, chacun d’eux a été informé, dans une lettre, de l’évaluation par l’Agence des risques qu’il présentait pour la sécurité. Le Comité observe tout d’abord que le paragraphe 2 de l’article 9 dispose que tout individu arrêté sera informé, au moment de son arrestation, des raisons de cette arrestation, et que cette exigence n’est pas limitée aux arrestations du chef d’infractions pénales. Le Comité considère que, pour ce qui concerne la détention initiale, l’information fournie aux auteurs suffit à répondre aux exigences du paragraphe 2 de l’article 9. Pour les auteurs qui ont ensuite reçu un avis négatif après évaluation des risques pour la sécurité, cet avis représente une phase postérieure du traitement de leur cas par les services de l’immigration et n’équivaut pas à une nouvelle arrestation au sens du paragraphe 2 de l’article 9, et l’avis doit plutôt être examiné au regard du paragraphe 1 de l’article 9. En revanche, pour les cinq auteurs secourus par l’Ocean ic Viking, le fondement de leur détention initiale était une évaluation antérieure des risques qu’ils présentaient pour la sécurité. À cet égard, le Comité considère qu’un objectif majeur de l’obligation exigeant que tout individu arrêté soit informé des raisons de son arrestation est de permettre à l’intéressé d’obtenir sa libération s’il estime que les raisons avancées ne sont pas valables ou sont mal fondées; et que les raisons doivent inclure non seulement le fondement général de l’arrestation mais aussi des éléments de fait suffisants pour donner une indication du fond de la plainte. Étant donné la justification vague, trop générale, fournie par l’État partie quant aux raisons pour lesquelles les autorités n’ont pas communiqué aux auteurs des informations précises sur le fondement des évaluations des risques qu’ils présentaient pour la sécurité, le Comité conclut qu’il y a eu, pour ces cinq auteurs, violation du paragraphe 2 de l’article 9 du Pacte.

Griefs tirés de l’article 9 (par. 4)

9.6Quant à l’affirmation des auteurs arrivés sur un territoire d’outre-mer énuméré dans la liste d’exclusion selon laquelle leur détention ne peut pas être mise en cause en vertu du droit australien et aucun tribunal n’est compétent pour en apprécier la nécessité sur le fond, le Comité prend note de l’argument de l’État partie qui indique que les auteurs peuvent demander auprès de la Cour suprême l’examen judiciaire de la légalité de leur détention et de l’évaluation des risques qu’ils présentent pour la sécurité. Compte tenu du précédent constitué par la conclusion de la Cour suprême dans l’affaire Al ‑Kateb v. Godwin, 2004, qui confirme la légalité de la détention d’immigrants pendant une durée indéterminée et de l’absence de précédents pertinents dans la réponse présentée par l’État partie qui démontreraient l’efficacité d’une requête auprès de la Cour suprême dans des cas semblables, le Comité n’est pas convaincu que la Cour soit habilitée à examiner la justification de la détention des auteurs sur le fond. Le Comité relève en outre que, dans l’arrêt rendu dans l’affaire M47, la Cour suprême a confirmé le maintien en détention obligatoire du réfugié considéré, ce qui montre que le fait que le requérant obtient gain de cause ne met pas nécessairement fin à la détention arbitraire. Le Comité renvoie à sa jurisprudence et réaffirme que l’examen judiciaire de la légalité de la détention au sens du paragraphe 4 de l’article 9 ne doit pas consister uniquement à vérifier si la détention est compatible avec le droit national mais doit inclure la possibilité d’ordonner la libération du détenu si sa détention est déclarée incompatible avec les dispositions du Pacte, en particulier celles du paragraphe 1 de l’article 9. Le Comité considère dès lors que les faits de l’espèce font apparaître une violation du paragraphe 4 de l’article 9.

9.7En ce qui concerne les auteurs secourus par l’Ocean ic Viking, il ressort clairement de l’arrêt rendu par la Cour suprême le 5 octobre 2012 dans l’affaire M47 que l’examen judiciaire devant cette instance constitue bel et bien un moyen de contester la légalité de la détention fondée sur l’évaluation des risques que les intéressés présentent pour la sécurité effectuée par l’Agence du renseignement, indépendamment des circonstances propres à chacun d’eux. Néanmoins, il ressort de l’arrêt rendu par la Cour que les requérants dont la requête aboutirait seraient de nouveau placés sous le régime de la détention obligatoire en attendant qu’une décision soit prise sur leurs demandes de visa de protection. En conséquence, le Comité conclut que, pendant la période en question, les auteurs secourus par l’Oc e an ic Viking ont également été victimes de violations du paragraphe 4 de l’article 9.

Griefs tirés des articles 7 et 10 (par. 1)

9.8Le Comité prend note des griefs que les auteurs tirent des articles 7 et 10 (par. 1) et des informations fournies par l’État partie, notamment sur les soins de santé et le soutien psychologique proposés aux immigrants détenus. Le Comité considère néanmoins que les services en question n’allègent en rien le poids des allégations relatives à l’incidence négative sur la santé mentale des détenus d’une détention prolongée et de durée indéterminée, dont les motifs n’ont même pas été communiqués aux intéressés, allégations qui n’ont pas été contestées et qui sont confirmées par les rapports médicaux concernant certains auteurs. Le Comité considère que la conjugaison des facteurs que représentent le caractère arbitraire de la détention des auteurs, sa durée prolongée ou indéterminée, le refus de leur fournir des informations et de leur accorder des droits procéduraux, et les conditions difficiles dont leur détention est assortie, est à l’origine de préjudices psychologiques graves et constitue un traitement contraire à l’article 7 du Pacte. Compte tenu de cette constatation, le Comité n’examinera pas les mêmes griefs tirés du paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte.

10.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constate que l’État partie a violé les droits des auteurs au titre des articles 7 et 9 (par. 1 et 4) du Pacte. L’État partie a également violé le paragraphe 2 de l’article 9 à l’égard de cinq auteurs.

11.En vertu du paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’offrir aux auteurs une réparation effective, consistant notamment en la libération, dans des conditions appropriées aux différentes situations, une réadaptation et une indemnisation adéquate. L’État partie est en outre tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas à l’avenir. À cet égard, il devrait revoir sa législation sur les migrations en vue de la mettre en conformité avec les articles 7 et 9 (par. 1, 2 et 4) du Pacte.

12.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y avait eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations. L’État partie est invité en outre à rendre publiques les présentes constatations et à les diffuser largement sur son territoire.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]

Appendices

Appendice I

[Anglais seulement]

Names of authors and places of detention

Mr. F. K. A. G. (Scherger IDC)

Mr. T. A. (Scherger IDC)

Mr. S. B. (Villawood IDC)

Mr. V. E. (Christmas Island IDC)

Mr. S. G. (Scherger IDC)

Mr. S. G. (Northern IDC at Darwin)

Mr. T. K. (Christmas Island IDC)

Mr. S. K. (Villawood IDC, Blaxland)

Mr. S. M. (Villawood IDC)

Mr. N. M. (Northern IDC at Darwin)

Mr. K. N. (Maribyrnong IDC)

Mr. J. P. (Curtin IDC)

Ms. S. R. (Villawood IDC)

Master A. R. (Villawood IDC)

Miss A. R. (Villawood IDC)

Master V. R. (Villawood IDC)

Mr. Y. R. (Villawood IDC)

Mr. R. R. (Scherger IDC)

Mr. K. S. (Curtin IDC)

Mr. S. S. (Villawood IDC, Fowler)

Mr. D. S. (Maribyrnong IDC)

Mr. S. S. (Maribyrnong IDC)

Mr. N. S. (Villawood IDC, Fowler)

Mr. M. S. (Villawood IDC, Fowler)

Mr. N. S. (Villawood IDC)

Mr. N. S. (Villawood IDC, Fowler)

Mr. K. S. (Villawood IDC, Blaxland)

Mr. T. S. (Villawood IDC, Fowler)

Mr. P. S. (Villawood IDC, Fowler)

Mr. K. T. (Maribyrnong IDC)

Mr. S. T. (Villawood IDC, Blaxland)

Mr. M. T. (Scherger IDC)

Mr. V. V. (Scherger IDC)

Mr. S. Y. (Maribyrnong IDC)

Mr. S. S. (Curtin IDC)

Mr. S. B. (Scherger IDC)

Mr. S. S. (Northern IDC at Darwin)

Appendice II

Opinion individuelle de Sir Nigel Rodley

Je renvoie à mon opinion distincte dans l’affaire C. c. Australie. Je considère que la constatation de violation du paragraphe 4 de l’article 9 est redondante et superflue, puisque l’absence de garanties juridiques permettant de contester la détention fait partie intégrante, voire est au cœur même, de la constatation de violation du paragraphe 1 de l’article 9 ci‑dessus. En outre, je ne suis toujours pas convaincu que la protection du paragraphe 4 de l’article 9, lequel prévoit la possibilité de contester la légalité d’une détention, puisse aller au-delà de la possibilité d’introduire un recours en vertu du droit national. Ce qui n’est pas légal au regard du droit international est précisément visé au paragraphe 1 de l’article 9.

[Fait en anglais, sera publié ultérieurement en arabe, en chinois, en espagnol, en français et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]