Nations Unies

CRPD/C/ECU/CO/1

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

27 octobre 2014

Français

Original: espagnol

Comité des droits de l ’ homme

Observations finales concernant le rapport initial de l’Équateur *

I.Introduction

Le Comité a examiné le rapport initial de l’Équateur (CRPD/C/ECU/1) à ses 153e et 154e séances, tenues les 22 et 23 septembre 2014, respectivement, et a adopté les observations finales ci-après à sa 168e séance, le 2 octobre 2014.

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’Équateur et le remercie de ses réponses écrites (CRPD/C/ECU/Q/1/Add.1) à la liste des points à traiter établie par le Comité (CRPD/C/ECU/Q/1).

Le Comité se déclare satisfait du dialogue constructif engagé au cours de l’examen du rapport initial et de la présence de la délégation de haut niveau de l’État partie.

II.Aspects positifs

Le Comité accueille avec satisfaction les dispositions de la Constitution politique de l’Équateur (2008) relatives aux droits de la personne handicapée, dont les articles 11, 16, 35, 42, 46 à 49, 51, 61, par. 7, 62, 66, 81, 330, 341, 369, 373 et 381.

Le Comité accueille aussi avec satisfaction les efforts qu’a déployés l’État partie pour donner effet à la Convention à travers l’adoption de lois, d’initiatives et de politiques publiques, dont:

a)L’adoption de la loi sur les handicaps (loi180) qui fixe le cadre de la protection en matière de handicap;

b)Le plan pour le «bien vivre» (Plan Nacional para el Buen Vivir) 2009-2013, dans le cadre du Plan national de développement;

c)Le développement de la Mission solidaire Manuela Espejo.

Le Comité accueille avec satisfaction la création, en 2013, du Secrétariat technique du handicap, à la demande de la vice-présidence de la République, qui complète le cadre institutionnel du handicap.

Le Comité se félicite de l’augmentation de la dotation budgétaire allouée par l’État partie à la protection des droits de la personne handicapée au cours des dernières années.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes et obligations générales (art. 1 à 4)

Le Comité note avec préoccupation que, bien que la loi organique relative au handicap ait été adoptée après la ratification de la Convention par l’État partie, la définition et l’approche du handicap qui y sont énoncées restent médicales. La définition de la personne handicapée insiste sur la limitation des capacités et fait l’impasse sur la dimension sociale et relationnelle du handicap.

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir entièrement la loi organique relative au handicap afin de la mettre en conformité avec les principes généraux et les dispositions spécifiques de la Convention, en particulier en ce qui concerne la non ‑discrimination et la pleine application d ’ une approche fondée sur les droits de l ’ homme.

Le Comité relève avec préoccupation que l’État partie n’a pas encore soumis son cadre législatif à une révision complète dans l’objectif de mettre les lois relatives à l’éducation, aux transports, au développement urbain, à la prévention de la violence, à la santé, aux relations familiales, au travail, à la culture et au sport en conformité avec les droits garantis par la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place une commission plurielle comprenant des représentants d ’ organisations indépendantes de personnes handicapées et de divers organismes publics, qui serait chargée de revoir de manière systématique la législation existante dans les domaines de l ’ éducation, des transports, du développement urbain, de la prévention de la violence, de la santé, des relations familiales, du travail, de la culture et du sport, pour la mettre en conformité avec la Convention.

Le Comité note avec préoccupation que les organisations de personnes handicapées, y compris les organisations de femmes handicapées ou d’enfants handicapés, n’ont pas été associées à l’élaboration du rapport initial de l’État partie, par le biais de contributions indépendantes. Il relève également avec inquiétude qu’il n’existe pas dans l’État partie de mécanisme autonome de participation des organisations de personnes handicapées qui soit distinct de l’administration.

Le Comité engage l ’ État partie à prendre des mesures pour promouvoir la participation effective des organisations qui représentent les femmes handicapées, l es enfants handicapés, l es personnes issues des nations et peuples autochtones, l es personnes d ’ ascendance africaine et l es Montubios à la prise de décisions dans le domaine du handicap. Il l ’ invite à garantir l ’ indépendance et l ’ autonomie des organisations de personnes handicapées s ’ agissant de leur participation et de leurs interventions dans le cadre de l’ adoption des lois, politiques et programmes visant à mettre en œuvre la Convention ainsi que dans le cadre du suivi de l ’application de la Convention.

B.Droits spécifiques (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

Le Comité constate avec préoccupation que la législation équatorienne ne définit pas les «aménagements raisonnables» et que le refus d’apporter de tels aménagements n’est pas considéré comme une forme de discrimination. Il relève aussi avec préoccupation qu’il n’existe pas de mécanismes institutionnels permettant de punir les actes de discrimination commis contre des personnes handicapées, ni de repérer et de sanctionner les formes de discrimination croisée, et que l’État partie n’a pas pris de mesures pour garantir la non‑répétition des actes discriminatoires.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire figurer expressément dans sa législation l ’ obligation de procéder à des aménagements raisonnables en fonction des besoins dans une situation donnée et de faire en sorte que le refus d ’ apporter de tels aménagements constitue une forme de discrimination fondée sur le handicap. Il lui recommande de créer des organismes indépendants habilités à connaître des plaintes déposées et des actions engagées par les personnes handicapées pour lutter contre les actes discriminatoires. Lesdits organismes devro nt être dotés de pouvoirs leur permettant de mener des enquêtes et d’ imposer des sanctions aux entités publiques ou privées responsables de tels actes, y compris lorsqu ’ il s ’ agit de discrimination croisée.

Femmes handicapées (art. 6)

Le Comité est préoccupé par la discrimination que subissent les femmes et les filles handicapées, exacerbée par la présence simultanée de divers facteurs d’exclusion sociale liés au sexe et au handicap. Il est aussi préoccupé par le fait que le Conseil national pour l’égalité des sexes n’a pas pris de mesures pour tenir compte des besoins des femmes et des filles handicapées et ne les associe pas directement à ses activités.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D e faire fonctionner la législation et tous les programmes et actions prévus pour les femmes et filles handicapées, y compris les mesures de mise à nive au et de discrimination positive, pour mettre fin à la discrimination qui les frappe dans tous les domaines , t ant en zones urbaines qu ’ en zones rurales, en garantissant leur participation effective à l a conception et l a mise en œuvre de telles mesures ;

b) D e veiller à ce que le Conseil national pour l ’ égalité des sexes incorpore dans son action des mesures de lutte contre la discrimination croisée qui frappe les femmes, en tenant compte du handicap en tant que facteur d ’ exclusion, et à ce que des femmes handicapées participent directement à l ’ action du Conseil.

Enfants handicapés (art. 7)

Le Comité est préoccupé de constater que, malgré l’action menée par les associations de personnes handicapées, il n’existe pas de structures officielles pour la participation des enfants handicapés, filles et garçons, ni de cadres ou de mesures d’encouragement pour promouvoir la création d’organisations d’enfants handicapés.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ inclure dans les mesures incitatives qu ’ il prend pour soutenir les organisations de personnes handicapées un volet expressément consacré à la participation des enfants handicapés, pour préserver leur identité et les encourager à participer à la protection de leurs propres droits.

Sensibilisation (art. 8)

Le Comité note avec préoccupation que la prévention du handicap est considérée comme une politique publique relative aux droits des personnes handicapées. La prévention du handicap ne doit pas être une politique relevant de la promotion des droits des personnes handicapées car cela tend à donner une image négative des personnes qui vivent avec un handicap.

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir sa stratégie de manière à ce que l ’ objectif de la prévention du handicap ne soit pas considéré comme relevant d ’ une politique de promotion des droits des personnes handicapées.

Accessibilité (art. 9)

Le Comité est préoccupé par les faits suivants:

a)Le Règlement technique équatorien ne définit pas l’accessibilité comme couvrant tous les aspects de l’information et de la communication, y compris les technologies de l’information et de la communication (TIC) ainsi que les outils au service de la langue simplifiée, conformément aux indications formulées par le Comité dans son Observation générale no 2 (2014) relative à l’accessibilité;

b)Les transports publics ne sont pas encore accessibles aux personnes handicapées, qui sont obligées d’utiliser d’autres modes de transport plus coûteux pour leurs activités quotidiennes (voir l’Observation générale no 2 (2014) du Comité);

c)Des directives pour l’accessibilité des contenus Web ont été adoptées en janvier 2014, mais leur mise en œuvre prend du retard, en particulier en ce qui concerne les sites qui fournissent des informations officielles.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De modifier le Règlement technique équatorien afin qu ’ il inclue, dans les obligations spécifiques en matière d ’ accessibilité, tous les aspects de l ’ information, de la communication et des technologies, ainsi que les outils au service de la langue simplifiée;

b) De mettre en œuvre un programme complet de mise en conformité des transports publics en Équateur, y compris dans les zones rurales, de sorte que, dans des délais prédéfinis, tous les transports soient accessibles;

c) D ’ accélérer la mise en œuvre de la norme NTE INEN - ISO/IEC 40500 «Technologies de l ’ information − Règles pour l ’ accessibilité des contenus Web» pour que les personnes handicapées puissent accéder à Internet et pour que ces directives soient contraignantes, en particulier pour les sites des institutions publiques qui offrent différents services aux personnes handicapées.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

Le Comité relève avec préoccupation que la législation civile de l’État partie suive le modèle de la prise de décisions substitutive, qui repose sur des modalités comme la tutelle et la curatelle, et qu’aucun programme n’a été mis en œuvre pour réformer le Code civil et le Code de procédure civile dans les plus brefs délais en vue d’intégrer le modèle de la prise de décisions assistée, comme le recommande le Comité dans son Observation générale no 1 (2014) relative à la «Reconnaissance de la personnalité juridique des personnes handicapées dans le respect de l’égalité avec les autres».

Le Comité recommande à l ’ État partie de créer un groupe de travail comprenant des représentants d ’ organisations indépendantes de personnes handicapées, afin de revoir la législation civile dans les meilleurs délais et de mettre en place des mécanismes de prise de décisions assistée. Il recommande également à l ’ État partie d ’ élaborer un plan de mise en œuvre, assorti d ’ un calendrier, afin de donner effet au nouveau plan.

Accès à la justice (art. 13)

Le Comité relève avec préoccupation que le corps judiciaire méconnaît les droits des personnes handicapées tels que consacrés par les instruments nationaux et internationaux, qu’il n’existe pas de programmes expressément conçus pour offrir des services aux personnes handicapées dans le domaine de la justice et que les bâtiments de justice ne sont pas accessibles. Il s’inquiète de ce que le système de justice, qu’il s’agisse de la justice pénale, de la justice civile, de la justice du travail ou de la justice administrative, ne fasse pas obligation aux autorités judiciaires de procéder à des aménagements de la procédure lorsque des personnes handicapées doivent intervenir dans les procédures concernées.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De modifier les programmes de formation du personnel judiciaire, afin qu ’ ils prennent en considération les droits des personnes handicapées consacrés par les instruments nationaux et internationaux relatifs aux droits de l ’ homme;

b) De faire en sorte que le Conseil de la magistrature mette en œuvre un plan national d ’ adaptation visant à ce que les bâtiments de justice offrent des conditions d ’ accessibilité satisfaisantes à la fois du point de vue architectural et du point de vue de la communication, et d ’ introduire l ’ obligation de mettre à disposition des interprètes de langue des signes équatorien pour les personnes sourdes et des documents simples à lire pour les personnes présentant un handicap mental;

c) D ’ engager des réformes législatives dans les domaines du droit pénal, civil et administratif et du droit du travail, de manière à inclure l ’ obligation de procéder à des aménagements dans la procédure pour que les personnes handicapées puissent accéder à la justice dans des conditions d ’ égalité.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

Le Comité note avec préoccupation que certaines personnes handicapées, en particulier les personnes abandonnées considérées comme présentant une «oligophrénie grave et chronique», restent en institution et ne disposent pas du soutien nécessaire pour vivre dans la société. Il est également préoccupé de constater que l’État partie n’a pas pris de mesures pour garantir une procédure régulière aux personnes handicapées accusées d’avoir commis une infraction. Il craint en outre que la déclaration d’irresponsabilité appliquée aux personnes handicapées est un prétexte pour imposer des mesures de sécurité privatives de liberté d’une durée non définie, et que les personnes handicapées ne bénéficient pas des mêmes garanties que pour le reste de la population dans le système de justice pénale.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ élaborer un plan global qui permette de mettre fin à l ’ internement des personnes se trouvant à l ’ hôpital psychiatrique Julio Endara, en offrant à ces personnes des conditions de sécurité et des garanties pour leur permettre d ’ exercer leur droit d ’ être intégrées dans la communauté. Le plan global doit comprendre des mesures visant à garantir à ces personnes l ’ hébergement, la nourriture et les mesures de soutien nécessaires pour assurer leur pleine intégration;

b) De supprimer la déclaration générale d ’ irresponsabilité applicable aux personnes handicapées accusées d ’ une infraction, afin que ces personnes aient le droit à un procès équitable, dans des conditions d ’ égalité, et bénéficient des garanties générales du droit pénal, aussi bien sur le fond que du point de vue de la procédure;

c) De supprimer les mesures de sécurité qui entraîn ent obligatoi rement l ’ internement et le traitement médico-psychiatrique et promouvoir des mesures de substitution respectueuses des arti cles 14 et 19 de la Convention;

d) De veiller à ce que tous les services de santé mentale ne soient fournis qu ’ avec le consentement libre et éclairé de la personne concernée.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

Le Comité est préoccupé par ce qui suit:

a)Le taux de grossesse chez les jeunes de 12 à 19 ans est élevé, selon le dernier recensement de 2010, et la plupart des femmes handicapées ont leur premier enfant entre 15 et 19 ans, ce qui est révélateur d’un taux élevé de violence sexuelle à l’égard des femmes handicapées, en particulier celles qui présentent un handicap intellectuel;

b)Il n’existe pas de mécanisme approprié permettant de détecter les situations de violence à l’égard des personnes handicapées, en particulier des femmes qui présentent un handicap intellectuel, à la fois dans la famille et dans les lieux d’accueil des personnes handicapées;

c)L’État partie n’a pas encore mis en place de mécanismes spécifiques pour garantir l’insertion sociale effective des enfants et adolescents handicapés vivant en institution et pour assurer la prévention efficace de la violence à l’égard de ces personnes, qui peuvent rester en institution jusqu’à leurs 18 ans. Les établissements fermés sont propices à la violence, à la négligence et à la maltraitance envers les enfants et les adolescents.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De mettre en place un programme de formation sur les droits des personnes handicapées en matière de sexualité et de procréation, en ciblant particulièrement les femmes présentant un handicap intellectuel, leurs proches et les professionnels qui fournissent des services dans les différentes institutions de l ’ État;

b) De procéder à des modifications institutionnelles et d ’ élaborer des programmes de formation pour les professionnels des secteurs de la police et de la justice, afin qu ’ ils soient en mesure de détecter les situations de maltraitance et de violence dans lesquelles pourraient se trouver des personnes handicapées et de mener des enquêtes en procédant aux aménagements de procédure nécessaires pour punir les auteurs d ’ infraction;

c) De créer, parallèlement à la mise en place de programmes visant à garantir le droit des enfants handicapés de vivre dans la communauté, des mécanismes de surveillance systématique par d es organes autonomes, des conditions de vie dans les institutions accueillant des personnes handicapées, dans le but de prévenir les situations de maltraitance et de violence , conformément au paragraphe 3 de l ’ article 16 de la Convention .

Liberté de circulation et nationalité (art. 18)

Le Comité note avec préoccupation que l’article 7 de la loi sur la naturalisation dispose toujours que l’Équateur ne peut accorder la nationalité équatorienne aux personnes qui souffrent d’une «maladie chronique». Étant donné le lien étroit entre la «maladie chronique» et le handicap, cet article est ouvertement discriminatoire et contraire à l’article 18 de la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abroger l ’ article 7 de la loi sur la naturalisation afin que toute personne handicapée puisse, sur la base de l ’ égalité avec les autres, demand er la nationalité équatorienne.

Autonomie de vie et inclusion dans la société

Le Comité est préoccupé par le fait que l’allocation «Joaquín Gallegos Lara», permettant aux personnes handicapées de recevoir de l’aide à domicile, soit versée au prestataire de soins et non à la personne handicapée qui la demande.

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir les critères afin d ’ octroyer l ’ allocation « Joaquín Gallegos Lara » aux personnes handicapées, afin que celles-ci puissent disposer de cet appui à l ’ autonomie de vie et à l ’ inclusion dans la société.

Éducation (art. 24)

Le Comité est préoccupé par ce qui suit:

a)La plupart des personnes handicapées n’ont au mieux qu’une instruction de base et, sur un total de 4,14 millions d’étudiants enregistrés à l’échelle nationale, il n’y a que 24 499 étudiants handicapés. La durée moyenne de scolarisation est de trois à quatre ans pour les personnes handicapées, alors que la moyenne nationale est de neuf ans;

b)Malgré les efforts faits pour former les enseignants de manière à répondre aux besoins de l’éducation inclusive, il faut encore une impulsion supplémentaire pour répondre à tous les besoins éducatifs;

c)Les garanties de procédure et de fond sur lesquelles se fonde actuellement l’État pour revoir et surveiller l’accès des personnes handicapées à l’éducation inclusive, en particulier les pouvoirs du Conseil national pour l’égalité des personnes handicapées et des unités de district pour le soutien de l’inclusion;

d)Les personnes handicapées n’ont que peu accès aux universités de l’État, qui n’ont pas encore aménagé leurs programmes d’enseignement et pris des mesures pour garantir l’accessibilité des principaux centres d’enseignement, afin que les personnes handicapées puissent s’inscrire aux différents programmes.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ élaborer un programme public visant à ce que toutes les personnes handicapées qui vivent sur son territoire puissent s ’ inscrire aux programmes d ’ enseignement élémentaire, secondaire et secondaire supérieur et avoir accès à un système éducatif inclusif qui serait renforcé aussi dans l ’ enseignement supérieur;

b) D ’ accroître l’action menée en faveur de la formation initiale et continue des enseignants pour répondre aux exigences de l ’ éducation inclusive pour les personnes handicapées;

c) De faciliter le dépôt de plaintes auprès du Conseil national pour l ’ égalité des personnes handicapées pour parvenir à un contrôle plus efficace du respect des obligations en la matière, et de veiller à ce qu ’ il y ait une unité de soutien de l ’ inclusion dans chaque district scolaire et non dans chaque province, comme c ’ est le cas actuellement;

d) De redoubler d ’ efforts pour mettre en œuvre les modèles d ’ éducation inclusive pour les personnes handicapées au niveau de l ’ université, ce qui passe par un aménagement du programme d ’ enseignement et des espaces physiques des universités dans les différentes filières proposées.

Santé (art. 25)

Le Comité relève avec préoccupation que les mesures prises par le Ministère de la santé en faveur des personnes handicapées, par l’intermédiaire des centres de soins, ne prévoient l’accessibilité de ces centres pour les personnes handicapées dans les zones rurales.

Le Comité recommande que le Ministère de la santé lance un programme d ’ accessibilité des centres de soins afin que ceux-ci puissent mettre en œuvre les protocoles relatifs aux différents handicaps et que leurs installations soient accessibles aux personnes qui vivent en zone rurale.

Le Comité est préoccupé par le fait que le Code pénal et de procédure pénale prévoit la possibilité, pour l’époux, les parents, un membre de la famille proche ou le représentant légal de la femme présentant un handicap intellectuel, de prendre en son nom la décision de procéder à un avortement, lorsque la grossesse est la conséquence d’un viol.

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier l ’ article  150 du Code pénal et de procédure pénale et toute autre législation analogue autorisant des tiers à prendre des décisions concernant l e corps des femmes handicapées.

Travail et emploi (art. 27)

Le Comité est préoccupé par l’indice d’emploi peu élevé des personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État d ’ élaborer des programmes visant à augmenter le taux d ’ emploi des personnes handicapées et de mettre au point des programmes d ’ emploi destinés aux personnes handicapées.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

Le Comité note avec préoccupation que le prototype de logement social du Ministère du développement urbain et du logement ne tient pas compte du principe de la conception universelle qui rendrait possible l’utilisation de ces logements par des personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir le prototype de logement social de manière à prendre en considération les besoins des personnes handicapées et de faire en sorte que les logements soient conçus selon les principes de la conception universelle.

Participation à la vie culturelle, aux activités récréatives, aux loisirs et aux sports (art. 30)

Le Comité relève avec préoccupation que les infrastructures sportives et culturelles n’ont pas été aménagées pour permettre aux personnes handicapées d’y accéder et de les utiliser. Il note également avec préoccupation que les établissements scolaires et les centres sportifs ne proposent pas de programmes de sport inclusifs pour les personnes handicapées, en particulier pour les plus jeunes. Il est aussi préoccupé de constater que les théâtres, les cinémas et autres lieux de divertissement et lieux culturels ne disposent pas des infrastructures nécessaires ni d’un personnel formé pour garantir l’inclusion des personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de lancer un plan national pour l ’ accessibilité du sport et de revoir la politique qu’il mène dans les domaines de la culture et des loisirs afin que les principales infrastructures soient accessibles aux personnes handicapées. De même, il recommande que, dans le cadre des plans et mécanismes de supervision des théâtres, cinémas et autres lieux de divertissement, des mesures soient prises pour surveiller les conditions d ’ accessibilité et que des sanctions soient imposées lorsque les conditions ne sont pas réunies pour qu ’ ils puissent être utilisés par tous les usagers.

Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a toujours pas ratifié le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès aux œuvres publiées pour les aveugles, les déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés.

Le Comité encourage l ’ État partie à prendre toutes les mesures appropriées pour ratifier et mettre en œuvre le Traité de Marrakech le plus tôt possible.

C.Obligations particulières (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

Le Comité note avec préoccupation que l’Équateur ne dispose toujours pas d’un système unifié de collecte d’informations qui permette d’évaluer dans quelle mesure toutes les personnes handicapées jouissent de leurs droits.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place un système permettant de mettre un terme aux discordances entre les différentes institutions qui gèrent les données relatives au handicap et qui sont actuellement dispersées, et d ’ établir un système de surveillance doté d ’ indicateurs précis pour mesurer les progrès effectués dans la réalisation des différents droits consacrés par la Convention.

Le Comité relève avec préoccupation que le système national d’évaluation du handicap ne comprend pas de données ventilées sur les enfants autochtones ou afro‑équatoriens, ni sur les Montubios. La situation de ces groupes de population risquant d’être aggravée par les discriminations multiples, il est nécessaire de disposer d’informations fiables pour répondre à leurs besoins spécifiques.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mener des enquêtes spécifiques et de faire figurer dans les informations issues du recensement national de la population le nombre de personnes handicapées, en particulier de femmes et d ’ enfants, qui sont montubios ou afro ‑équatoriens et vivent dans les zones rurales, afin de concevoir des programmes d ’ accès aux droits qui soient spécialement adaptés à la situation de ces personnes.

Application et suivi au niveau national (art. 33)

Le Comité est préoccupé par le fait que le bureau du Défenseur du peuple ne fait pas partie du mécanisme de surveillance interne de la Convention, composé du Conseil de participation citoyenne et de contrôle social et de l’Observatoire citoyen national pour le respect des personnes handicapées. Il est aussi préoccupé par l’absence de mécanisme spécifique concernant la pleine participation des organisations de la société civile à la fonction de suivi de la Convention, prévu au paragraphe 3 de l’article 33 de la Convention.

Le Comité rappelle à l ’ État partie que le mécanisme de suivi au niveau national doit être indépendant et s ’ acquitter de fonctions précises de promotion, de protection et de suivi de l ’ application de la Convention. Dans ce cadre, i l l’exhorte à adopter les mesures juridiques nécessaires pour établir clairement un mécanisme indépendant, conform e à la Convention et aux Principes de Paris, à renforcer ses capacités au niveau financier et à lui octroyer les ressources voulues pour qu ’ il puisse s ’ acquitter efficacement de son mandat et assurer la pleine participation des personnes handicapées et des organisations qui les représentent dans le processus de suivi.

Coopération et assistance technique

En application de l’article 37 de la Convention, le Comité propose une assistance technique à l’État partie, fondée sur la consultation des experts, par le biais du secrétariat. L’État partie peut aussi demander l’assistance technique des organismes spécialisés de l’ONU possédant des bureaux dans le pays ou dans la région.

Suite donnée aux observations finales et diffusion

Le Comité demande à l’État partie de lui faire parvenir, dans un délai de douze mois et conformément au paragraphe 2 de l’article 35 de la Convention, des renseignements par écrit sur les mesures adoptées pour mettre en œuvre les recommandations qui figurent au paragraphe 29, alinéa a et au paragraphe 31, alinéas a et b.

Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre ses recommandations telles qu’énoncées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre les observations finales, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et de l’Assemblée nationale, aux responsables des ministères compétents, aux membres de la magistrature et des professions concernées, telles que les professionnels de l’éducation, de la santé et du droit, ainsi qu’aux autorités locales, au secteur privé et aux médias, en ayant recours aux stratégies modernes de communication.

Le Comité demande à l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, sous un format accessible, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations représentatives des personnes handicapées, et auprès des personnes handicapées et des membres de leur famille.

Le Comité encourage l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de ses prochains rapports périodiques.

Prochain rapport

Le Comité demande à l’État partie de soumettre ses deuxième et troisième rapports périodiques en un seul document au plus tard le 3 mai 2018. Il l’invite aussi à envisager de recourir à la procédure simplifiée de soumission de rapports, suivant laquelle le Comité établit une liste de points à traiter au moins un an avant la date butoir, fixée pour les rapports attendus. Les réponses de l’État partie à cette liste constituent son rapport.