Nations Unies

CAT/C/TUR/QPR/5

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

27 décembre 2018

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Liste de points établie avant la soumissiondu cinquième rapport périodique de la Turquie *

Renseignements concernant spécifiquement la mise en œuvredes articles 1er à 16 de la Convention, notamment au regarddes précédentes recommandations du Comité

Questions retenues aux fins du suivi à l’issue du cycle précédent

1.Dans ses précédentes observations finales (CAT/C/TUR/CO/4, par. 49), le Comité a prié la Turquie de lui faire parvenir un complément d’information au sujet de certains points suscitant des préoccupations particulières traités aux paragraphes 10 c) (utilisation de contre-accusations en vue d’intimider les détenus ou leurs proches et de les décourager de signaler des actes de torture) ; 14 (allégations d’exécutions extrajudiciaires et de mauvais traitements liés à des opérations antiterroristes) ; 26 d) (mesures prises pour faire en sorte que toutes les personnes renvoyées en application de l’accord conclu le 18 mars 2016 par l’Union européenne et la Turquie puissent bénéficier d’un examen individuel de leur demande et soient protégées contre le refoulement et les renvois collectifs) ; 44 b) (utilisation de la détention et des poursuites comme moyen d’intimider les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme ou de les dissuader de s’exprimer librement). Prenant note du rapport préliminaire de suivi (CAT/C/TUR/CO/4/Add.1) soumis le 8 novembre 2016 en réponse à sa lettre du 31 août 2016, dans laquelle il avait demandé des renseignements sur les garanties juridiques, les enquêtes sur les allégations de torture et de mauvais traitements et l’indépendance de la justice pendant l’état d’urgence, le Comité remercie l’État partie pour les renseignements apportés. Toutefois, au vu de leur teneur, il considère que les recommandations formulées aux paragraphes 10 c), 14, 26 d), et 44 b) susmentionnés n’ont pas été mises en œuvre (voir par. 34 ; 10, 14, 19, 38 et 39 ; et 21 à 23 ; ainsi que 4, 5, 6, 8, 10, 11, 12, 14, 21, 31, 37, 38, 39, 41 et 44 ; et 17 et 18, concernant les garanties juridiques et l’indépendance de la justice, du présent document).

Articles 1er et 4

2.Eu égard aux précédentes observations finales du Comité (par. 18), fournir des informations sur toute modification apportée à l’article 94 du Code pénal afin de le mettre en conformité avec l’article premier de la Convention : a) en précisant les motifs ou raisons pour lesquels sont commis les actes de torture ; b) en incluant dans la définition les actes visant à intimider une personne autre que la victime, à faire pression sur cette personne ou à obtenir d’elle des renseignements ou des aveux.

Article 2

3.En ce qui concerne la demande d’informations complémentaires que le Président du Comité et le Rapporteur chargé du suivi des observations finales ont fait parvenir à l’État partie le 31 août 2016, et eu égard au paragraphe 2 de l’article 2 de la Convention contre la torture, aux termes duquel « aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture », fournir des informations actualisées sur la déclaration que le Gouvernement turc a adressée le 21 juillet 2016 au Secrétaire général, dans laquelle il annonce qu’il entend prendre des mesures susceptibles d’entraîner des dérogations aux obligations que lui font plusieurs articles du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, à savoir les articles 2, 3, 9, 10, 12, 13, 14, 17, 19, 21, 22, 25, 26 et 27.

4.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 19 et 20), des modifications récemment apportées au Code de procédure pénale, qui confèrent à la police de plus vastes pouvoirs lui permettant de maintenir des personnes en garde à vue sans que la régularité de cette mesure ne soit soumise au contrôle d’un juge, et de l’adoption de décrets ayant force de loi qui limitent considérablement l’application des garanties procédurales s’agissant des individus, des groupes et des organisations soupçonnés d’être impliqués dans la tentative de coup d’État du 15 juillet 2016, donner des renseignements sur les mesures prises pour faire en sorte que toutes les personnes détenues bénéficient de toutes les garanties juridiques fondamentales, en droit et dans la pratique, dès le tout début de leur privation de liberté, et soient présentées à un juge dans les meilleurs délais. À ce propos, fournir des informations sur l’application du décret-loi no 684 du 23 janvier 2017, qui fait passer de 30 à 7 jours la durée maximale de la détention sans inculpation ni contrôle par un juge, avec une possibilité de prolongation de 7 jours à la demande du procureur, et préciser si cette forme de privation de liberté est assimilable à une détention au secret de fait. Préciser en outre si des mesures ont été prises pour que la durée de la garde à vue ne dépasse pas 24 ou 48 heures, conformément au Code de procédure pénale. Indiquer également si les détenus soupçonnés d’infractions terroristes ont accès sans délai à un avocat et préciser combien de fois la loi relative à la lutte contre le terrorisme (loi antiterroriste) a été invoquée pour refuser à un suspect le droit de s’entretenir avec un avocat pendant les 24 heures qui suivent son arrestation, à la demande d’un procureur et sur décision d’un juge.

5.Outre les informations indiquant que les décrets d’urgence promulgués par l’État partie à la suite de la tentative de coup d’État ont suspendu l’application des garanties fondamentales contre la torture et les mauvais traitements, le Comité a reçu des allégations montrant que les personnes accusées d’infractions liées au terrorisme et d’association à la criminalité organisée étaient maintenues en détention jusqu’à 30 jours sans que la légalité de cette mesure ne soit examinée par un juge ; que les personnes arrêtées étaient détenues jusqu’à cinq jours sans être autorisées à contacter un avocat, et que des personnes privées de liberté se voyaient refuser le droit de s’entretenir en tête-à-tête avec leur avocat. Le Comité a également reçu des informations indiquant que des personnes privées de liberté n’avaient pas été autorisées à bénéficier d’un examen médical. Compte tenu de ces renseignements préoccupants, fournir des informations sur les mesures prises depuis la levée de l’état d’urgence, le 19 juillet 2018, en vue d’abroger ou de modifier les décrets pertinents sur l’état d’urgence, le but étant de garantir que toute personne privée de liberté bénéficie −  en droit et dans la pratique − du droit de contacter un avocat de son choix dès le début de la détention et de s’entretenir avec lui en toute confidentialité, de se faire examiner par un médecin indépendant et d’être présentée à une autorité judiciaire habilitée à ordonner sa remise en liberté peu de temps après la privation de liberté.

6.Donner des renseignements sur toute enquête ouverte sur les allégations indiquant qu’à la suite de la tentative de coup d’État du 15 juillet 2016, des personnes auraient été placées au secret sans avoir été inculpées en bonne et due forme et auraient été privées de contact avec leur avocat ou leur famille pendant des périodes allant jusqu’à 30 jours. Fournir des informations sur les renseignements fiables faisant état d’enlèvements et de disparitions forcées, en précisant s’il y a eu des enquêtes et des poursuites liées à ces cas allégués et quelle en a été l’issue.

7.Indiquer si l’article 7 de la loi du 20 mai 2016 portant création de la Commission de surveillance de l’application des lois est entrée en vigueur, ce qui devrait ouvrir la voie à la mise en place d’un système centralisé d’enregistrement des plaintes.

8.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie dans son rapport de suivi du 8 novembre 2016 selon lesquelles a) une nouvelle unité instituée au sein du Ministère de la justice a été chargée d’examiner les allégations concernant l’utilisation de la torture et des mauvais traitements dans les centres de détention à la suite de la tentative de coup d’État, b) les résultats de cet examen par les autorités seront rendus publics, et c) le Ministère de l’intérieur a demandé l’ouverture d’une enquête sur des allégations de mauvais traitements infligés à des soldats qui avaient été placés en garde à vue. En outre, le Comité a reçu des informations publiées par le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à la suite de la visite qu’il a effectuée en Turquie du 27 novembre au 2 décembre 2016, dans lesquelles on peut lire que, dans les jours et les semaines qui ont suivi le coup d’État manqué, la torture et diverses formes de mauvais traitements ont été largement pratiqués, en particulier au moment de l’arrestation de suspects par des membres de la police et de la gendarmerie ou des forces armées, puis dans les locaux de garde à vue de la police ou de la gendarmerie ainsi que dans des lieux non officiels de détention. Ces informations concordent avec des allégations portées à la connaissance du Comité d’après lesquelles en octobre 2016 plus de 35 000 personnes ont été détenues dans des lieux non officiels de détention tels que des salles de sport, où elles ont été soumises à des sévices physiques et psychologiques et privées du droit de communiquer avec leur avocat. Ces renseignements coïncident également avec des récits faisant état d’actes de torture, de mauvais traitements et d’autres violations des droits de l’homme perpétrés dans des lieux de détention officiels, dont la Direction de la sécurité d’Istanbul, la Direction de la sécurité d’Ankara, le commissariat de police d’Afyon, dans l’ouest de la Turquie, et la prison de type F de Tekirdag. Préciser le nombre de personnes placées en détention à la suite du coup d’État manqué, en particulier dans des lieux non officiels, et le nombre de plaintes pour actes de torture et/ou mauvais traitements infligés dans des lieux de détention officiels ou non officiels, et donner des informations sur les enquêtes officielles et les poursuites ouvertes sur ces allégations, en précisant leur issue.

9.Le Comité a reçu des informations sur la situation de Ziynet Saglam et le traitement qui a été réservé à l’intéressée, qui est actuellement incarcérée au centre pénitentiaire fermé de Mersin-Tarsus et qui aurait été gravement torturée pendant sa détention en République arabe syrienne et par des membres du Bureau des opérations spéciales (OSO) et de l’Agence nationale du renseignement (MIT) à Azez, également en République arabe syrienne, et en Turquie, où elle aurait été remise au Bureau du Procureur de Kilis et détenue dans le centre pénitentiaire de cette ville. Donner des renseignements récents sur la situation actuelle et l’état de santé de Mme Saglam, les mesures prises par la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie ou par un organe judiciaire concernant ce cas, et les résultats auxquels ces mesures ont abouti.

10.Eu égard à la conclusion du Rapporteur spécial selon laquelle le nombre infime d’enquêtes menées à ce jour par les autorités est en disproportion flagrante avec la fréquence alléguée des violations, le Comité relève avec inquiétude qu’une disposition du décret no 667 instituant l’état d’urgence prévoit que les personnes qui prennent des décisions et s’acquittent de leurs fonctions dans le cadre de l’application de ce décret sont exonérées de toute responsabilité d’ordre juridique, administratif, financier ou pénal pour les actes qu’elles auront accomplis dans ce contexte. Le Comité est également préoccupé par le décret-loi no 668 du 27 juillet 2017, dont les dispositions − selon l’interprétation qu’en donnent certains observateurs − pourraient conférer l’impunité aux auteurs d’actes de torture ou de mauvais traitements. Fournir un complément d’information sur les enquêtes ouvertes sur les allégations d’actes de torture et de mauvais traitements perpétrés à la suite de la tentative de coup d’État, y compris sur le nombre d’allégations ayant donné lieu à l’ouverture d’une enquête par la nouvelle unité du Ministère de la justice, ainsi que sur l’enquête demandée par le Ministère de l’intérieur, le nombre d’affaires que ces mécanismes ont transmises aux procureurs pour suite à donner, le nombre de procédures pénales pour torture ou mauvais traitements qui ont été engagées, en décrivant leur issue, le cas échéant. Préciser si des fonctionnaires ont été reconnus coupables et condamnés à des peines d’emprisonnement pour avoir infligé des tortures ou des mauvais traitements à des personnes placées en garde à vue sur la base de soupçons de participation au coup d’État ou d’appartenance à des groupes accusés de promouvoir le terrorisme. Fournir des informations sur l’état d’avancement de l’enquête que le Bureau du Procureur général d’Istanbul aurait ouverte sur le décès de Gökhan Acikkolu, qui a été arrêté le 23 juillet 2016 et est décédé le 5 août 2016 alors qu’il était détenu par le service de la lutte antiterroriste de la police d’Istanbul. Compte tenu de l’adoption de la décision no 1182 du 19 juillet 2018 proclamant la fin de l’état d’urgence, indiquer si les décrets-lois adoptés pendant l’état d’urgence sont encore en vigueur ou si certains d’entre eux ont été transformés en lois permanentes et, dans l’affirmative, lesquels, et préciser quels décrets-lois ont été abrogés.

11.Étant donné que les décrets d’urgence s’appliquent non seulement aux infractions en lien avec le coup d’État manqué, mais aussi à toutes les infractions relevant du terrorisme, y compris celles commises dans le contexte des troubles dans le sud-est du pays, indiquer si des enquêtes et des poursuites ont été ouvertes en bonne et due forme sur les allégations selon lesquelles des hommes et des femmes soupçonnés d’être des membres ou des sympathisants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) ou d’appartenir à d’autres groupes associés à l’insurrection kurde ou à d’autres groupes terroristes ont été soumis à la torture et à des mauvais traitements, en précisant l’issue de ces enquêtes et poursuites, le cas échéant. D’après des informations nombreuses et concordantes, ces tortures et mauvais traitements avaient généralement été infligés aux intéressés au moment de leur appréhension et de leur arrestation, pendant leur transfert vers le lieu de détention ainsi qu’au début de leur garde à vue et pendant leur interrogatoire, dans une cellule de garde à vue, et les auteurs de ces actes étaient principalement des membres des unités de la police chargées des opérations spéciales ou de la gendarmerie. Les méthodes utilisées consistaient notamment en des passages à tabac violents, des coups de pied et de poing, des insultes, des menaces de violence sexuelle, le maintien prolongé dans des positions pénibles, l’imposition du port de menottes, la privation d’eau, de nourriture et de sommeil et, dans un cas, le viol. Indiquer si des plaintes pour torture ou mauvais traitements ont été déposées, des enquêtes diligentées et des poursuites engagées, en précisant si des fonctionnaires ont été condamnés à des peines ou ont fait l’objet de sanctions ou de mesures disciplinaires pour avoir commis ces actes.

12.Eu égard aux précédentes observations finales du Comité (par. 9) et compte tenu de l’écart considérable entre le nombre élevé d’allégations de torture et le nombre relativement faible de sanctions disciplinaires, d’amendes et de peines d’emprisonnement qui ont été prononcées, donner des renseignements sur les mesures prises pour remédier à cette disparité. Le Comité renouvelle sa demande d’informations sur les six affaires dans lesquelles des fonctionnaires ont été reconnus coupables de mauvais traitements et condamnés à des peines d’emprisonnement entre 2011 et 2013 ainsi que sur les affaires de torture qui ont fait l’objet d’arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. Donner des détails sur les cinq « allégations graves » de torture et de mauvais traitements au sujet desquelles des enquêtes ont été menées et des mesures disciplinaires appliquées. Fournir des renseignements sur le nombre total d’enquêtes, de poursuites et de procédures se rapportant à des allégations de torture et de mauvais traitements qui ont été menées depuis le 15 juillet 2016 ainsi que sur les mesures de réparation dont auraient bénéficié les victimes.

13.Étant donné que la Commission de surveillance de l’application des lois aura non seulement à examiner les allégations d’infractions commises par des agents de la force publique (membres de la Police nationale, de la gendarmerie ou du corps des gardes‑côtes), mais aussi à assumer la fonction de conseil permanent du Ministère de l’intérieur, indiquer comment les éventuelles relations institutionnelles et hiérarchiques entre les enquêteurs et les auteurs présumés des faits seront traitées.

14.Fournir des informations sur la loi no 6722 du 14 juillet 2016, dont l’application est rétroactive et qui confère aux forces de lutte contre le terrorisme ce que d’aucuns considèrent comme une immunité de poursuites de fait pour les actes commis dans le contexte des opérations menées dans le sud-est du pays. Ce texte prévoit en outre que le pouvoir exécutif doit avoir donné son autorisation préalable pour que des poursuites puissent être engagées contre des soldats ou des civils qui ont participé à des opérations de lutte contre le terrorisme et qui sont soupçonnés d’avoir commis des infractions dans l’exercice de leurs fonctions, dispositions qui limitent considérablement les possibilités d’ouvrir des enquêtes sur les allégations de torture ou de mauvais traitements mettant en cause les forces de sécurité concernées. Indiquer si la loi no 6722 du 14 juillet 2016 a été abrogée à la suite de l’adoption de la décision no 1182 du 19 juillet 2018 proclamant la fin de l’état d’urgence.

15.Eu égard aux précédentes observations finales du Comité (par. 42), indiquer si les dispositions de l’additif à la loi no 3359 susceptibles de limiter arbitrairement l’accès des victimes de torture et de mauvais traitements à des soins médicaux, y compris des examens médicaux et des services de réadaptation, ont été abrogées.

16.Eu égard aux précédentes observations finales du Comité (par. 27 et 28), indiquer si des mesures ont été prises pour faire en sorte que l’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité, qui joue le rôle de mécanisme national de prévention de la torture, jouit d’une indépendance fonctionnelle, structurelle et financière, si la procédure de nomination de ses membres est pleinement conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et si des commissaires ont déjà été nommés. Indiquer également si l’Institution des droits de l’homme et de l’égalité est opérationnelle et dispose d’une structure spécialisée et de ressources suffisantes lui permettant de jouer efficacement son rôle de mécanisme national de prévention. Fournir des informations sur les mesures prises par l’État partie pour renforcer l’indépendance de l’Institution turque des droits de l’homme et de l’égalité vis-à-vis du pouvoir exécutif. Préciser en outre si les rapports établis par les conseils de surveillance des prisons et des établissements pénitentiaires, le sous-comité chargé des condamnés et des détenus de la commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale turque, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du Conseil de l’Europe et le Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants créé en vertu du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, après la visite que ce dernier a effectuée en Turquie en 2015, ont été rendus pleinement accessibles au public.

17.Compte tenu également de la demande susmentionnée d’informations complémentaires du 31 août 2016, et étant donné que le principe de l’état de droit et de l’indépendance du pouvoir judiciaire doit être respecté à tout moment, y compris pendant l’état d’urgence, donner des informations actualisées sur la capacité de l’État partie à garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire et de l’administration de la justice eu égard à la déclaration du Ministre de l’intérieur en date du 27 juillet 2016, par laquelle celui-ci a annoncé que 1 684 juges et procureurs avaient été incarcérés en application d’une décision du Bureau du Procureur d’Ankara ordonnant le placement en détention de 2 740 juges et procureurs soupçonnés de mener des activités portant atteinte à la sécurité nationale. Ces incarcérations avaient eu lieu à l’issue de procédures sommaires et sans possibilité de saisir une juridiction d’un recours contre les décisions de révocation permanente prononcées contre des juges, des procureurs et des fonctionnaires, en raison de l’adoption du décret d’urgence no 667 promulgué par le Conseil des ministres le 23 juillet 2016. Donner des renseignements sur les informations montrant qu’au 20 mars 2018, quelque 112 679 fonctionnaires, dont 7 037 enseignants et 4 662 juges et procureurs, avaient été révoqués à vie et que 1 763 policiers et soldats à la retraite avaient été privés de leur pension et d’autres prestations sociales. En outre, indiquer combien de décisions portant sur des recours formés par des juges et des procureurs pour contester leur révocation ont été rendues par le Conseil d’État et par le Tribunal administratif suprême, dont la compétence à connaître de recours directs relatifs à des affaires de ce type a été précisée par le décret-loi no 685 du 23 janvier 2017. Indiquer combien de magistrats révoqués ont demandé leur réintégration devant l’Assemblée générale du Conseil supérieur des juges et des procureurs. Fournir des renseignements détaillés, ventilés par profession, lieu et nombre, sur les fonctionnaires, en particulier les juges et les procureurs, qui ont été révoqués puis rétablis dans leurs fonctions. En outre, décrire les mesures prises par l’État partie pour faire face aux retards signalés dans l’administration de la justice qui ont fait suite aux licenciements massifs de fonctionnaires, y compris de juges et de procureurs, en particulier après l’approbation par le référendum du 16 avril 2017 des modifications des dispositions de la Constitution relatives à la nomination des membres du Conseil supérieur des juges et des procureurs et à l’indépendance de cet organe vis-à-vis des pouvoirs exécutif et législatif.

18.Le Comité prend acte avec satisfaction des informations fournies par l’État partie, dont il ressort que les affaires concernant les agents publics soupçonnés d’être affiliés ou liés à des organisations qui auraient participé à la préparation du coup d’État sont examinées au cas par cas, que des mécanismes de réexamen des décisions de mise à pied ou de révocation de fonctionnaires sont en place, et que certains des fonctionnaires licenciés ont été réintégrés dans leurs fonctions. Il demeure toutefois gravement préoccupé par les renseignements montrant qu’à la mi-octobre 2016, 3 640 juges et procureurs avaient été mis à pied sans que leur cause soit auparavant entendue dans le cadre d’un procès équitable. En outre, il relève avec préoccupation que, le 8 décembre 2016, le Réseau européen des conseils de la justice a décidé de suspendre le statut d’observateur du Conseil supérieur des juges et des procureurs de Turquie au motif qu’il n’était plus conforme aux Statuts du Réseau et qu’il n’était plus une institution indépendante des pouvoirs exécutif et législatif jouant un rôle de premier plan dans la contribution de l’appareil judiciaire au fonctionnement indépendant de la justice. Le Comité prend également note avec inquiétude d’un rapport dont il ressort que le Vice-Président du Conseil supérieur a suggéré que les juges et les procureurs révoqués ne pouvaient être rétablis dans leurs fonctions que s’ils communiquaient des renseignements utiles sur les membres des organisations soupçonnées d’avoir participé à la tentative de coup d’État. Compte tenu de ces préoccupations, fournir des données actualisées sur le nombre de juges et de procureurs qui ont été suspendus ou révoqués depuis juillet 2016 et sur le nombre de magistrats qui ont été rétablis dans leurs fonctions, y compris au sein de l’Assemblée générale du Conseil supérieur. Donner également des informations actualisées sur les mesures prises pour modifier les procédures actuelles permettant de suspendre ou révoquer les juges et les procureurs de façon à les rendre conformes aux Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature. En particulier, décrire les mesures prises pour garantir que tous les fonctionnaires aient la possibilité d’être entendus dans le cadre d’une procédure équitable avant le prononcé de la décision les concernant et de réclamer le réexamen par une entité indépendante des décisions qui leur sont défavorables.

19.Dans ses précédentes observations finales (par. 44), le Comité a prié l’État partie de lui faire parvenir des informations sur les mesures prises afin d’éviter que les autorités arrêtent et poursuivent les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme en vue de les intimider ou les dissuader de rendre compte librement de questions se rapportant aux droits de l’homme. Le Comité prend note des objections formulées par l’État partie sur les allégations selon lesquelles des journalistes ou des défenseurs des droits de l’homme seraient détenus à des fins d’intimidation. Il est toutefois profondément préoccupé par les informations crédibles indiquant qu’en décembre 2016, 149 journalistes et professionnels des médias étaient en détention en Turquie et que la grande majorité d’entre eux se trouvait en détention provisoire, ainsi que par les informations montrant que 140 organes de presse et 29 maisons d’édition ont été fermés en application de décrets d’urgence. Le Comité est également préoccupé par les informations signalant la fermeture en novembre 2016 d’environ 375 organisations non gouvernementales (ONG) et par les renseignements indiquant que ces organisations n’ont pas reçu d’explications individualisées au sujet de leur fermeture et qu’elles n’ont eu aucune possibilité de former un recours. Fournir des informations récentes sur l’état actuel d’avancement des procédures engagées contre Taner Kiliç, président de la section turque d’Amnesty International ; Osman Kavala, fondateur et chef du conseil de l’organisation Anadolu Kultur ; et Eren Keskin, coprésidente de l’Association pour les droits de l’homme, ainsi que d’autres personnes associées à des organisations de défense des droits de l’homme qui ont été détenues ou poursuivies ou qui ont fait l’objet de représailles. Fournir des renseignements sur les mesures prises pour : garantir que les affaires concernant des journalistes en détention soient examinées par un organe judiciaire indépendant ; donner la possibilité aux organes de presse et aux ONG de contester les décisions de fermeture les concernant devant une autorité judiciaire indépendante, en indiquant le nombre de recours ayant abouti à une décision favorable et la suite qui leur a été donnée ; et garantir que les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme puissent mener leurs activités sans faire l’objet d’actes d’intimidation ni de menaces de représailles. Donner des informations sur la situation et le lieu dans lequel se trouvent actuellement Mehmet Altan et Şahin Alpay, deux journalistes placés en détention provisoire sur la base de soupçons d’infractions dites terroristes et d’implication dans le coup d’État, et les autres personnes détenues pour les mêmes motifs. En outre, compte tenu des informations indiquant que des médecins qui avaient soigné des victimes de torture ont également fait l’objet d’actes d’intimidation et de harcèlement, donner des précisions sur ce qui est arrivé à ces médecins et à d’autres membres du personnel médical. Indiquer combien de médecins et de professionnels de la santé ont été autorisés à continuer de pratiquer leur métier ou à reprendre leur activité professionnelle et apporter une assistance aux victimes de torture ou de mauvais traitements. Fournir également des informations sur le statut actuel de l’Association contemporaine des avocats (Çağdaş Hukukçular Derneği) et de l’Association des avocats de la Mésopotamie (Mezopotamya Hukukçular Derneği), qui ont été fermées le 22 novembre 2016 en application du décret d’urgence no 677, et décrire la situation de Selçuk Kozağaçli, le président de l’Association contemporaine des juristes, qui a été arrêté le 13 novembre 2017, et indiquer où il se trouve actuellement.

20.Eu égard aux précédentes observations finales du Comité (par. 45 et 46), décrire les efforts déployés par l’État pour lutter contre la violence fondée sur le genre, y compris les mesures prises pour émettre des ordonnances de protection en faveur des femmes exposées à un risque de violence sexiste quelle qu’en soit la nature, ce qui inclut les crimes d’honneur et la violence familiale, indiquer combien d’affaires de violence à l’égard des femmes ont rapidement donné lieu à une enquête approfondie et combien d’auteurs présumés d’actes de ce type ont été poursuivis ou sanctionnés, et décrire les effets de ces mesures. Fournir des informations sur les efforts déployés par l’État partie pour faire en sorte que les femmes qui sollicitent la délivrance d’une ordonnance de protection bénéficient concrètement de mesures de protection dignes de ce nom, et indiquer combien de fonctionnaires ayant refusé d’accorder une protection effective à ces femmes ont fait l’objet de sanctions disciplinaires, en précisant la nature de ces sanctions. Indiquer si les victimes de violence à l’égard des femmes peuvent être hébergées dans des foyers d’accueil et si elles obtiennent réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation équitable et adéquate. Décrire les mesures visant à dispenser une formation efficace sur la violence sexiste aux membres des forces de l’ordre, aux juges et aux fonctionnaires qui sont en contact direct avec les victimes.

Article 3

21.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 23 à 25), donner des renseignements sur les mesures que l’État partie a prises pour se conformer à l’article 3 de la Convention. Indiquer notamment s’il a mis en place un nouveau système d’asile conforme aux normes internationales, pour que les personnes qui le souhaitent puissent avoir accès aux procédures d’asile et que les demandes fassent l’objet d’un examen individualisé, indiquer s’il a pris des mesures pour lever les restrictions géographiques à l’application de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et, pour ce faire, retirer ses réserves à ladite Convention, et préciser toute procédure qu’il aurait instituée pour repérer rapidement les victimes d’actes de torture parmi les demandeurs d’asile. Fournir des renseignements sur les résultats des enquêtes éventuellement menées au sujet des tirs qui ont eu lieu à la frontière méridionale en avril 2016. Fournir également des renseignements sur l’accord passé entre l’Union européenne et la Turquie au sujet de la « crise migratoire », qui est entré en vigueur en mars 2016. Dans ses précédentes observations finales (par. 26), le Comité a demandé à l’État partie de lui fournir un complément d’information sur les mesures prises pour que toutes les personnes renvoyées dans l’État partie en application de l’accord signé le 18 mars 2016 entre l’Union européenne et la Turquie puissent bénéficier d’un examen individuel de leur demande et soient protégées contre le refoulement et contre les renvois collectifs. Le Comité prend note avec satisfaction des informations qui lui ont été communiquées par l’État partie, selon lesquelles, d’une part, les personnes renvoyées ont le droit de demander une protection internationale contre le risque d’expulsion et, d’autre part, l’État ne se livre ni à des évaluations collectives ni à des expulsions massives. Le Comité prie l’État partie de lui fournir des informations sur le nombre de personnes rentrées au pays en application de l’accord du 18 mars 2016 qui ont demandé une protection internationale, sur le nombre de personnes, parmi elles, qui se sont vu accorder une telle protection et le nombre de celles à qui elle a été refusée, et sur les pays vers lesquels ces personnes ont été expulsées.

22.Fournir des renseignements sur le nombre de demandes d’asile que l’État partie a reçues au cours de la période considérée, sur le nombre de demandes auxquelles il a fait droit et sur le nombre de demandes qui ont été acceptées parce que les intéressés avaient été torturés ou risquaient de l’être s’ils étaient renvoyés dans leur pays d’origine.

23.Indiquer le nombre de refoulements, d’extraditions et d’expulsions auquel l’État partie a procédé au cours de la période considérée, notamment sur la foi d’assurances diplomatiques ou de leur équivalent, ainsi que le nombre de cas dans lesquels l’État partie a lui-même donné de telles assurances diplomatiques ou garanties.

Articles 5 à 9

24.Fournir des renseignements sur toute loi ou mesure qui aurait été adoptée récemment pour mettre en œuvre l’article 5 de la Convention.

25.Citer les traités d’extradition qui auraient été conclus avec d’autres États parties et préciser si dans ces instruments les infractions mentionnées à l’article 4 de la Convention figurent au nombre des motifs d’extradition.

26.Spécifier les traités ou accords d’entraide judiciaire que l’État partie a conclus avec d’autres entités (pays, tribunaux internationaux et institutions internationales), et préciser si, dans la pratique, des éléments de preuve ont été transmis dans le cadre de poursuite pour actes de torture ou mauvais traitements en application de ces instruments.

27.Indiquer si, depuis que le Comité a examiné le précédent rapport de l’État partie, celui-ci a rejeté, pour quelque raison que ce soit, une demande émanant d’un État en vue de l’extradition d’une personne soupçonnée d’avoir commis des actes de torture et s’il a par conséquent engagé des poursuites contre cette personne. Dans l’affirmative, fournir des renseignements sur l’état d’avancement de la procédure et sur l’issue de celle-ci.

Article 10

28.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 29 et 30) indiquer :

a)Si des programmes obligatoires de formation en cours de service ont été mis en place pour faire en sorte que tous les agents de la fonction publique, en particulier les représentants des forces de l’ordre, les membres de la gendarmerie, le personnel pénitentiaire et le personnel médical travaillant dans les prisons et les établissements psychiatriques aient une bonne connaissance des dispositions de la Convention, notamment de l’interdiction absolue de la torture ;

b)Si le personnel médical et l’ensemble du personnel concerné sont spécialement formés à la détection des cas de torture et de mauvais traitements, conformément à ce que préconise le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul) ;

c)Si des méthodes ont été mises au point pour mesurer l’efficacité et les effets de ce type de formations, en particulier en ce qui concerne le Protocole d’Istanbul.

Article 11

29.Fournir des renseignements sur les mesures qui ont été prises pour remédier, dans l’ensemble du pays, à la surpopulation des lieux de privation de liberté, dans lesquels le taux d’occupation dépassait parfois les 200 % au lendemain du coup d’État manqué, compte tenu en outre de l’afflux massif de détenus et de l’augmentation notoire du nombre de personnes placées en détention avant-jugement, qui a été estimé à 224 878 en juin 2017. De même, fournir des renseignements sur les mesures prises pour faire diminuer la surpopulation dans les établissements où elle persiste depuis plusieurs années et sur l’état d’avancement des projets de construction de plusieurs établissements pénitentiaires. Indiquer en outre si l’État partie envisage de mettre en placedes solutions de substitution à la détention, conformément aux Règles minima des Nations Unies pour l’élaboration de mesures non privatives de liberté (Règles de Tokyo).

30.Donner des informations sur les mesures qui ont été prises, d’une part, pour ramener la durée de détention dans les cellules des commissariats de police qui aurait dans certains cas été prolongée jusqu’à trente jours, à un maximum de sept jours, comme annoncé au Conseil des droits de l’homme le 2 mars 2017, et ce, dans l’optique, à terme, de faire totalement disparaître cette forme de détention et, d’autre part, pour améliorer les conditions matérielles dans toutes les cellules des commissariats de police, à savoir : faire en sorte que les cellules soient propres et chauffées, qu’elles soient équipées de matériel de couchage et ne soient pas surpeuplées, qu’elles ne fassent pas l’objet en permanence d’un éclairage puissant et ne soient pas sous surveillance vidéo 24 heures sur 24, et que les détenus aient un accès approprié à des toilettes, ainsi qu’à la lumière du jour et à l’air libre.

31.Répondre aux informations indiquant que des fouilles à nu et des fouilles corporelles invasives seraient fréquemment pratiquées dans les lieux de détention, sur des détenus comme sur des visiteurs, et ce, de manière irrespectueuse, et que leur fréquence aurait nettement augmenté après la tentative de coup d’État. Répondre également aux informations selon lesquelles les détenus seraient fouillés à leur arrivée en prison, avant et après les transferts et autres sorties temporaires des locaux de la prison, par exemple pour les détenus qui doivent recevoir des soins médicaux, et parfois même à l’intérieur des centres de détention et des cellules, sans préavis et sans justification claire. Fournir en outre des renseignements sur les enquêtes éventuellement ouvertes et les poursuites engagées sur la foi d’informations faisant état de mauvais traitements et de traitements dégradants qui auraient été infligés à des personnes arrêtées (agressions verbales et menaces, claques et réalisation de fouilles corporelles invasives, menaces sexuelles proférées par des gardiens de sexe masculin contre des détenues et actes de harcèlement sexuel commis par des gardiens hommes contre des détenues lors de transferts, et non‑respect par ces mêmes gardes du droit à l’intimité desdites détenues lors d’examens médicaux).

32.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 35 et 36), fournir des renseignements actualisés sur toute mesure qui aurait été prise pour abroger l’article 47 du Code pénal, sur les mesures prises pour abroger le paragraphe 1 de l’article 25 de la loi sur l’exécution des peines et les mesures de sûreté, ainsi que sur toute autre mesure prise pour alléger les conditions de détention restrictives appliquées aux personnes condamnées à la réclusion à perpétuité incompressible.

33.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 37 et 38), indiquer s’il a été adopté une réglementation officielle qui autorise expressément les organisations de la société civile, notamment les organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme, les professionnels de santé et les membres des barreaux locaux à effectuer des visites indépendantes dans des lieux de détention. Indiquer si les nombreux organes nationaux officiellement chargés de surveiller les lieux de détention et autres lieux de privation de liberté jouissent de l’indépendance financière et opérationnelle et s’ils sont en mesure de fonctionner correctement, dans les faits, notamment si tel était le cas pour ceux qui ont été démantelés après le coup d’État de juillet 2016. Fournir des renseignements actualisés quant au fait que les conseils de surveillance des prisons de l’État partie auraient été supprimés par décret le 1er septembre 2016.

Articles 12 et 13

34.Dans ses précédentes observations finales (par. 10), le Comité a évoqué, entre autres choses, les « contre-accusations », telles que « refus d’obtempérer » ou « outrage à agent de la force publique », portées contre les personnes qui présentaient des plaintes pour actes de torture, mauvais traitements ou brutalités policières mettant en cause des agents de la force publique, et le fait que ces personnes risquaient de se voir inculpées d’une nouvelle infraction pénale. Fournir des informations sur toute mesure prise pour remédier à cette situation. Au vu des renseignements que le Rapporteur spécial sur la torture a inscrits dans son rapport après s’être entretenu avec des détenus, des avocats et des organisations de la société civile, le Comité est préoccupé par le fait que la plupart des victimes d’actes de torture ou d’autres formes de mauvais traitements n’ont pas déposé plainte auprès des autorités parce qu’elles avaient peur de subir des représailles ou que leurs proches soient victimes de telles représailles, et aussi par l’absence de volonté ou d’aptitude des autorités judiciaires à enquêter convenablement à ce sujet et à statuer. Le Comité est également préoccupé par les informations indiquant que nombre des personnes qui ont officiellement porté plainte ont rapporté que ni le ministère public ni la justice n’avaient donné suite à leur plainte.

35.Fournir des renseignements sur les 38 arrêts de la Cour constitutionnelle concluant à une violation de l’interdiction de la torture entre 2014 et 2016.

36.Préciser et commenter les informations selon lesquelles le Bureau du procureur de Trabzon aurait publié, le 5 janvier 2017, un document indiquant qu’il n’y avait pas de raison d’enquêter sur une plainte pour actes de torture si les faits en cause relevaient de mesures prises durant l’application des décrets relatifs à l’état d’urgence, et d’engager des poursuites à ce sujet, en raison de l’immunité que ces décrets conféraient de fait aux représentants de l’État, ce qui garantirait l’impunité de fait des actes de torture et des mauvais traitements commis par des représentants de l’État.

37.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 11), fournir des renseignements sur les résultats des enquêtes éventuellement ouvertes suite aux allégations de torture et de mauvais traitements mettant en cause des membres des forces de sécurité, qui ont été formulées par 52 personnes et portent notamment sur des violences policières commises à Cizre entre décembre 2015 et mars 2016. Préciser si les auteurs des faits en cause ou leurs complices, y compris les personnes occupant des fonctions de commandement, ont été poursuivis et si les victimes ont eu accès à des voies de recours et si elles ont obtenu réparation.

38.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 13 et 14) et au vu des informations que l’État partie a fournies dans sa réponse, donner des informations sur l’issue de l’enquête judiciaire ouverte par le Bureau du Procureur général de Cizre afin de découvrir l’identité de l’auteur ou des auteurs du meurtre présumé de Maşallah Edin et Zeynep Taşkin, qui auraient été tués par des tireurs d’élite de la police, le 8 septembre 2015, dans le quartier de Cudi, à Cizre. Donner également des informations sur les résultats des enquêtes que le Bureau du Procureur général de Cizre a ouvertes dans six autres affaires, suite à des allégations portant sur des actes de torture, des mauvais traitements et des violences qui auraient été commis par des agents des forces de sécurité. Le Comité prie à nouveau l’État partie de lui fournir des informations sur toute enquête qui aurait été ouverte au sujet des meurtres d’Ahmet Kaymaz et de son fils de 12 ans Ugur, qui ont été tués en novembre 2004 par les forces de sécurité lors d’une opération antiterroriste, meurtres qui ont fait l’objet d’une décision de la Cour européenne des droits de l’homme.

39.Compte tenu du fait que le Rapporteur spécial sur la torture a dit à l’issue de sa visite dans le pays que le ministère public avait donné suite aux plaintes de personnes accusées de terrorisme ou d’être des sympathisants du PKK, dans le sud-est du pays, qui allèguent avoir été victimes d’actes de torture ou de mauvais traitements en garde à vue, fournir au Comité des informations actualisées sur la progression des enquêtes ouvertes au sujet des allégations d’actes de torture et de mauvais traitements liées aux opérations de sécurité menées dans le sud-est du pays.

40.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 22 et 23), fournir des renseignements actualisés sur toutes les enquêtes, poursuites et décisions dont auraient pu faire l’objet les cas présumés de disparition forcée et sur toute indemnisation qui aurait été accordée aux victimes.

41.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 15 et 16), fournir des renseignements sur les enquêtes et poursuites éventuellement menées au sujet du recours excessif à la force par la police, notamment compte tenu des pouvoirs élargis que les modifications apportées au dispositif législatif relatif à la sécurité intérieure confèrent aux agents de police, qui les autorisent à se servir d’armes à feu contre les manifestants. Indiquer si les agents de police ont reçu une formation sur les Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois dans le cadre de manifestations, compte tenu des modifications apportées au dispositif de sécurité intérieure.

42.Indiquer si le système de traitement des plaintes visant des agents des forces de l’ordre a été amélioré depuis l’adoption de la loi portant création de la Commission de suivi de l’application des lois, et préciser s’il a gagné en efficacité et en rapidité.

43.Donner des informations actualisées sur l’état d’avancement de l’enquête menée par l’État partie concernant les actes de torture et l’homicide dont aurait été victime le journaliste Jamal Khashoggi au consulat de l’Arabie saoudite à Istanbul le 2 octobre 2018.

Article 14

44.Fournir des renseignements sur les mesures de réparation et d’indemnisation, notamment sur les moyens de réadaptation prescrits par les tribunaux et effectivement accordés aux victimes d’actes de torture et à leurs proches depuis l’examen du précédent rapport, notamment en application de la loi d’indemnisation au titre des pertes liées au terrorisme et à la lutte antiterroriste. Ces renseignements devraient porter notamment sur le nombre de demandes d’indemnisation qui ont été déposées, celles auxquelles il a été fait droit et les montants prescrits et effectivement versés dans chaque cas. Fournir également des renseignements sur les programmes de réparation en cours, notamment pour ce qui est de la prise en charge des traumatismes, et des autres formes de réadaptation assurées aux victimes d’actes de torture et de mauvais traitements, ainsi que sur les ressources matérielles, humaines et budgétaires dégagées pour assurer le bon fonctionnement de ces programmes.

45.Fournir des renseignements sur les moyens accessibles aux personnes qui ont été victimes de violations, notamment d’actes de torture et de mauvais traitements, dans le cadre de l’application des décrets relatifs à l’état d’urgence, pour obtenir une indemnisation, compte tenu de l’arrêt que la Cour constitutionnelle a rendu le 9 août 2016, dans lequel elle a estimé ne pas être compétente pour réexaminer les décrets relatifs à l’état d’urgence. Fournir des renseignements sur les allégations d’actes de torture et de mauvais traitements qui ne peuvent être examinées par la Commission d’examen des procédures relatives à l’état d’urgence créée le 23 janvier 2017 en application du décret-loi no KHK/685.

Article 15

46.Commenter les allégations selon lesquelles un grand nombre de personnes arrêtées après la tentative de coup d’État, notamment dans le cadre des violences qui ont sévi dans le sud-est, ont été soumises à des techniques d’interrogatoire brutales destinées à leur extorquer des aveux par la force ou à les contraindre à incriminer d’autres personnes, en violation des articles 148, 206 2) a) et 217 2) du Code de procédure pénale. Fournir des renseignements au sujet des informations récurrentes selon lesquelles, d’une part, les actes de torture et les mauvais traitements avaient pour but de contraindre les victimes, non seulement à faire des aveux, mais aussi à dénoncer d’autres personnes dont le nom et la photographie figuraient sur une liste de membres présumés d’organisations terroristes, et, d’autre part, de nombreuses personnes auraient été arrêtées sur la foi d’accusations fallacieuses ou de dénonciations qui auraient été obtenues sous la torture.

47.Fournir des renseignements sur les mesures concrètes qui ont été prises pour garantir le respect, en droit et en fait, du principe qui veut que les éléments de preuve obtenus par la torture sont irrecevables. Donner des exemples d’affaires dans lesquelles les tribunaux ont prononcé un non-lieu parce que des éléments de preuve ou des témoignages avaient été obtenus par la torture ou au moyen de mauvais traitements.

Article 16

48.Indiquer :

a)Les mesures qui ont été prises pour améliorer les conditions matérielles de détention, notamment pour chauffer les lieux de détention tout au long de la journée et pas uniquement la nuit ;

b)S’il a été envisagé d’autoriser les détenus inculpés d’infractions relevant des lois antiterroristes à passer ou recevoir davantage d’appels téléphoniques et à recevoir davantage de visites de leurs proches ;

c)Si les personnes placées en détention avant-jugement et les condamnés sont effectivement séparés et si les adultes en détention sont séparés des mineurs ;

d)Si des mesures ont été prises pour améliorer l’accès des mineurs en détention avant-jugement à l’éducation et aux activités récréatives et si les détenus faisant l’objet de régimes de haute sécurité ont le droit de travailler ;

e)Les mesures qui ont été prises pour que les lieux de détention disposent d’un nombre suffisant de médecins généralistes, de dentistes, de psychiatres et de psychologues, pour que les détenus ayant besoin de soins médicaux soient rapidement transférés dans des établissements de soins, sans avoir besoin d’attendre qu’un groupe de détenus aient besoin des mêmes soins, et pour que des programmes spécifiques soient mis en place pour traiter les maladies contagieuses, le VIH/sida et la toxicomanie.

49.Commenter les allégations selon lesquelles un grand nombre de personnes arrêtées en raison de la tentative de coup d’État auraient été détenues à l’isolement durant des périodes prolongées. De même, fournir des informations sur ce qui a été fait par l’État partie pour assurer un accès suffisant à l’alimentation, à l’eau et aux soins médicaux, ainsi que sur les mesures qui ont été prises pour atténuer le grave surpeuplement qui régnait semble-t-il dans nombre d’établissements au lendemain de la tentative de coup d’État.

50.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 47 et 48), expliquer quelles mesures ont été prises pour enquêter efficacement sur les faits présumés de violence commis contre des appelés par d’autres militaires et poursuivre dûment les responsables au cours de la période considérée, et fournir des données sur les décès enregistrés dans les rangs de l’armée en dehors des combats au cours de la période considérée, et fournir des renseignements sur la cause de ces décès. Indiquer si les plaintes visant des membres de l’armée sont examinées par un organe indépendant. Le Comité prie à nouveau l’État partie de bien vouloir lui fournir des informations sur toute enquête qui aurait été ouverte sur la mort d’Uğur Kantar, appelé, en octobre 2011.

51.Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par. 33 et 34), fournir des renseignements actualisés sur les décès survenus en garde à vue, les causes de ces décès et indiquer si dans chaque cas une enquête a été ouverte rapidement et menée de manière impartiale par un organe indépendant.

52.Fournir des informations sur les dispositions applicables pour qu’un patient soit admis dans un établissement médicalisé et sur les garanties prévues contre les admissions contraires à la volonté de l’intéressé.