NATIONS

UNIES

CRC

Convention relative aux

droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/PER/CO/314 mars 2006

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante et unième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité des droits de l’enfant: Pérou

1.Le Comité a examiné le troisième rapport périodique du Pérou (CRC/C/125/Add.6) à ses 1087e et 1089e séances (voir CRC/C/SR.1087 et 1089), tenues le 12 janvier 2006, et a adopté les observations finales ci-après à sa 1120e séance, tenue le 27 janvier 2006.

A. Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du troisième rapport périodique de l’État partie ainsi que de ses réponses détaillées à la liste des points à traiter (CRC/C/Q/PER/3), qui lui ont permis de mieux comprendre la situation des enfants au Pérou. Le Comité se félicite également du dialogue franc et ouvert qu’il a pu avoir avec la délégation intersectorielle de haut niveau de l’État partie.

B. Mesures de suivi et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité accueille avec satisfaction:

a)L’adoption du Plan d’action national pour l’enfance 2002-2010;

b)L’adoption, en 2005, du Plan d’action national pour la prévention et l’élimination du travail des enfants;

c)La mise en place, en 2001, du Programme national de lutte contre la violence familiale et sexuelle;

d)L’adoption du Plan d’action contre la pauvreté pour la période 2004-2006;

e)Le lancement du Programme Juntos 2005 («Ensemble») pour venir en aide aux familles les plus défavorisées.

4.Le Comité se réjouit en outre de la ratification des instruments suivants:

a)Les Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant, respectivement, l’implication d’enfants dans les conflits armés et la vente d’enfants, la prostitution des enfants, et la pornographie mettant en scène des enfants, le 8 mai 2002;

b)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, le 14 septembre 2005;

c)Les Conventions de l’OIT concernant l’âge minimum d’accès à l’emploi (no 138) et l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (no 182), le 13 novembre 2002 et le 10 janvier 2002, respectivement;

d)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (2002), visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, le 23 janvier 2002;

e)Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, le 10 novembre 2001.

C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1. Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44, par. 6, de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

5.Le Comité constate que l’État partie a donné suite à certaines des préoccupations et recommandations qu’il avait formulées (CRC/C/15/Add.120) après l’examen du deuxième rapport périodique de l’État partie (CRC/C/65/Add.8). Il regrette cependant que l’État partie n’ait que partiellement ou insuffisamment réagi à d’autres de ses préoccupations et recommandations, comme celles, notamment, qui avaient trait au renforcement de la commission appelée Ente Rector, à la non-discrimination, à l’affectation des ressources, au respect des opinions de l’enfant, aux sévices et violences sexuelles visant les enfants au sein de la famille et en dehors de celle-ci, aux disparités régionales qui caractérisent l’accès aux soins de santé, à l’accès limité des enfants autochtones à l’éducation, à l’exploitation économique des enfants, et à l’administration de la justice pour mineurs.

6.Le Comité prie instamment l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite aux recommandations figurant dans les observations finales relatives au deuxième rapport périodique qui n’ont pas encore été mises en œuvre, et de donner suite également à celles qui sont formulées dans les présentes observations finales concernant le troisième rapport périodique.

Législation et application des textes

7.Le Comité relève que certaines lois nationales restent en contradiction avec la Convention. Il est préoccupé notamment par les articles du Code de l’enfance relatifs aux «bandes dangereuses» (décret législatif no 899 sur le pandillaje pernicioso), en vertu desquels toute personne de moins de 18 ans qui contrevient à ces dispositions encourt jusqu’à six ans de privation de liberté. La loi no 28190 sur la mendicité suscite des préoccupations similaires.

8.Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour rendre sa législation interne totalement compatible avec la Convention, et d’envisager l’abrogation de la loi sur la mendicité ainsi que des articles du Code de l’enfance qui concernent le pandillaje pernicioso.

9.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport présenté par la Commission de la vérité au Président de la République, en août 2003, ainsi que le fait que cet organisme ait recommandé, entre autres, la mise en place d’un Plan global pour l’indemnisation des victimes de la violence. Le Comité constate cependant avec préoccupation que les recommandations de la Commission n’ont que partiellement été mises en œuvre et que seules quelques victimes ont à ce jour obtenu réparation.

10. Le Comité recommande à l’État partie de donner la suite qui convient à toutes les recommandations de la Commission de la vérité, en particulier à celles qui concernent le Plan global pour l’indemnisation des victimes de la violence, et d’accorder une attention spéciale aux conséquences du conflit armé sur les enfants.

Plan d’action national

11.Tout en accueillant avec satisfaction l’adoption du Plan d’action national pour l’enfance 2002-2010, ainsi que la création d’une commission intersectorielle chargée d’en surveiller la mise en œuvre, le Comité note avec préoccupation qu’aucun crédit budgétaire n’a été spécifiquement alloué à ce plan, et que les acteurs de la société civile, notamment les organisations œuvrant en faveur des enfants, n’ont aucun rôle au sein de la commission de surveillance.

12. Le Comité recommande à l’État partie de fournir les moyens nécessaires à la mise en œuvre du Plan d’action national pour l’enfance (2002-2010), au niveau tant national que local, afin de donner effet aux principes et dispositions de la Convention, en tenant compte, notamment, du document final intitulé «Un monde digne des enfants», adopté par l’Assemblée générale lors de sa session extraordinaire de mai 2002. Le Comité recommande également que la société civile, en particulier les organisations œuvrant en faveur des enfants, soit représentée au sein de la commission chargée de la surveillance du Plan d’action .

Coordination

13.Le Comité constate avec préoccupation qu’une récente restructuration du Ministère de la femme et du développement social a eu pour effet de réduire la Direction générale de l’enfance à un sous-département du nouveau département chargé de la famille et de la collectivité, ce qui pourrait avoir une incidence négative sur sa capacité à coordonner efficacement les activités liées à l’application de la Convention à tous les niveaux de l’administration.

14. Le Comité recommande à l’État partie de donner un mandat suffisant à la Direction générale de l’enfance afin que celle-ci soit en mesure de coordonner les activités liées à l’application de la Convention. À cet égard, l’État partie devrait veiller tout particulièrement à ce que les fonctions soient effectivement décentralisées, avec les ressources financières et humaines correspondantes et les délégations de pouvoir nécessaires, et assurer une coordination efficace des organismes décentralisés.

15.Le Comité juge en outre préoccupant que les services de «médiateurs-défenseurs de l’enfance» (Defensorías del Niño et del Adolescente) établis au niveau municipal ne disposent pas de ressources financières et humaines suffisantes pour pouvoir travailler de manière satisfaisante.

16.Le Comité recommande que la Direction générale de l’enfance dispense systématiquement des formations sur les droits de l’enfant au personnel des services de «médiateurs-défenseurs» (Defensorías) municipaux, et qu’elle fournisse à ces services des ressources financières suffisantes issues du budget national et des fonds internationaux de coopération.

Surveillance indépendante

17.Le Comité est préoccupé par l’absence de médiateur-défenseur (Defensor del Pueblo) spécialement chargé de surveiller le respect des droits de l’enfant.

18. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager la nomination d’un médiateur ‑défenseur de l’enfance au niveau national, qui aurait un rôle de coordonnateur, et qui devra disposer de ressources humaines et financières suffisantes. Le Comité recommande également que le service du médiateur-défenseur soit habilité à recevoir des plaintes émanant d’enfants et à les traiter rapidement et dans le respect de leur sensibilité. À cet égard, il renvoie l’État partie à son observation générale n o  2 sur les institutions nationales de défense des droits de l’homme (2002), ainsi qu’aux Principes de Paris (résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe).

Ressources consacrées aux enfants

19.Le Comité regrette qu’en dépit d’une croissance économique constante (24 % entre 2001 et 2005), et alors même que les questions propres aux enfants ont été incluses parmi les priorités de l’action gouvernementale, le montant des crédits budgétaires consacrés à l’enfance laisse à désirer, de même que l’utilisation qui en est faite. En outre, tout en saluant l’élaboration de critères minimaux pour la budgétisation, le Comité constate avec préoccupation qu’une partie des crédits budgétaires alloués à l’éducation, à la santé et à d’autres services a diminué récemment (en pourcentage du budget/PIB) et que certaines sommes destinées à des catégories précises d’enfants n’ont pas été dépensées exclusivement au profit de ces groupes cibles.

20. Le Comité recommande à l’État partie d’augmenter les crédits budgétaires consacrés à la réalisation des droits reconnus par la Convention, conformément à l’article 4 de la Convention, et de les assortir de priorités afin de donner effet aux droits économiques, sociaux et culturels de tous les enfants, en particulier ceux des groupes économiquement défavorisés, comme les autochtones.

Collecte de données

21.Tout en se félicitant que l’État partie ait fourni des statistiques et d’autres informations utiles tout au long de son rapport et de ses réponses écrites, le Comité regrette que les renseignements sur les enfants handicapés et les enfants autochtones soient insuffisants et qu’il n’existe pas de système de gestion centralisée des données pour surveiller les progrès accomplis par rapport aux indicateurs définis dans le Plan d’action national pour l’enfance et d’autres programmes ou plans sociaux.

22. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et accroître ses efforts pour mettre en place un système global de collecte de données sur la mise en œuvre de la Convention. Ces données devraient porter sur tous les enfants âgés de moins de 18 ans et être ventilées de façon à distinguer les groupes nécessitant une protection particulière, notamment les enfants appartenant à des communautés autochtones ou minoritaires, les enfants qui vivent ou travaillent dans la rue, les enfants employés comme domestiques, les enfants handicapés et les enfants placés en institution.

Formation et diffusion de la Convention

23.Le Comité regrette l’insuffisance des informations fournies sur la formation relative à la Convention et sur la diffusion de cette dernière.

24. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour diffuser systématiquement et continuellement la Convention dans l’ensemble du pays, ainsi que pour sensibiliser le public, en particulier les enfants eux-mêmes et leurs parents, aux principes qu’elle énonce et aux dispositions qu’elle contient.

25. Le Comité encourage en outre l’État partie à intensifier ses efforts pour proposer systématiquement des programmes de formation ou de sensibilisation aux droits de l’enfant aux groupes professionnels qui travaillent avec ou pour les enfants, en particulier les agents de la force publique, les parlementaires, les juges, les avocats, le personnel de santé, les fonctionnaires des administrations locales, les professionnels des médias, les assistants sociaux, les enseignants, les directeurs d’établissements scolaires et d’autres professionnels, selon les besoins.

2. Principes généraux(art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non-discrimination

26.Le Comité est préoccupé par la discrimination de fait dont continuent de souffrir certains groupes vulnérables comme les enfants handicapés, les enfants autochtones, les enfants qui vivent dans les régions rurales et reculées, et les enfants qui vivent ou travaillent dans la rue.

27. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour faire appliquer les lois qui consacrent le principe de non-discrimination et donnent effet à l’article 2 de la Convention, et d’adopter une stratégie volontariste et globale pour éliminer toute forme de discrimination, quel qu’en soit le motif, à l’égard de tous les groupes vulnérables dans l’ensemble du pays.

28. Le Comité demande aussi que le prochain rapport périodique fournisse des renseignements précis sur les mesures et les programmes touchant la Convention que l’État partie aura mis en œuvre pour donner suite à la Déclaration et au Programme d’action adoptés lors de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée (2001), en tenant compte également de l’observation générale n o  1 du Comité concernant le paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention (buts de l’éducation).

Intérêt supérieur de l’enfant

29.Tout en se félicitant que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant soit consacré dans l’article VIII du Code de l’enfance, le Comité craint que ce principe ne soit pas suffisamment pris en considération dans la pratique, notamment lorsqu’il s’agit d’allouer des ressources aux activités en faveur de l’enfance, de placer un enfant sous une protection de remplacement, de réexaminer une décision concernant un tel placement ou d’administrer la justice.

30. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour que le principe général de l’intérêt supérieur de l’enfant soit dûment compris et appliqué dans tous les textes de loi ainsi que dans les décisions judiciaires et administratives, et dans les projets, programmes et services ayant des incidences sur les enfants.

Respect des opinions de l’enfant

31.Le Comité prend note des efforts de l’État partie pour promouvoir le respect des opinions de l’enfant dans les établissements scolaires, mais il reste préoccupé par la participation encore limitée des enfants aux questions qui les intéressent, en particulier au sein de la famille ou de la collectivité et à l’école. Le Comité est en outre préoccupé par des informations selon lesquelles les autorités locales n’ont pas permis aux enfants de prendre part à des décisions ayant des conséquences importantes pour des groupes d’enfants vulnérables.

32. Le Comité recommande à l’État partie de promouvoir au sein de la famille et de la collectivité, ainsi que dans les établissements scolaires et autres institutions et dans le cadre des procédures judiciaires et administratives, le principe du respect des opinions de l’enfant et de sa participation à l’examen de toute question le concernant, et d’en faciliter l’application dans la pratique, conformément à l’article 12 de la Convention.

3. Libertés et droits civils (art. 7, 8, 13 à 17 et 37 a) de la Convention)

Enregistrement des naissances

33.Le Comité prend note avec satisfaction des efforts considérables déployés par l’État partie pour garantir l’enregistrement de toutes les naissances. Il constate cependant avec inquiétude qu’encore 15 % environ des enfants péruviens − le plus souvent des enfants vivant dans les régions rurales et reculées − ne sont pas inscrits à l’état civil comme ils devraient l’être.

34. Le Comité, à la lumière de l’article 7 de la Convention, réitère sa recommandation antérieure, dans laquelle il invitait instamment l’État partie à considérer l’enregistrement immédiat de toutes les naissances comme une priorité et à promouvoir et faciliter l’enregistrement des enfants qui n’ont pas été enregistrés à la naissance. L’État partie devrait, en particulier, moderniser et mettre à jour le système des registres d’état civil et veiller à ce qu’il soit efficace; à cette fin, il devrait notamment doter ce système de ressources financières suffisantes et de personnel qualifié et formé, et le rendre plus accessible dans tout le pays.

4. Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 19 à 21, 25, 27 (par. 4) et 39 de la Convention)

Protection familiale et responsabilités parentales

35.Le Comité se félicite que l’un des objectifs du Plan d’action national soit d’aider les parents à assumer leurs responsabilités, mais il constate avec préoccupation qu’aucun ensemble complet de mesures n’a été pris pour soutenir et autonomiser les familles les plus vulnérables.

36. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour apporter le soutien nécessaire aux familles vulnérables, notamment en augmentant les crédits budgétaires destinés à leur fournir une aide financière et d’autres formes d’assistance comme des conseils ou l’aide à l’autonomisation.

Protection de remplacement

37.Le Comité note avec préoccupation que le placement en institution n’est pas toujours une mesure de dernier recours. Il constate en outre avec inquiétude que certains établissements accueillant les enfants temporairement ou définitivement privés de leur milieu familial offrent des conditions de vie précaires, et qu’il n’y a pas assez de places pour tous les enfants qui ne peuvent pas bénéficier d’une protection de remplacement de type familial.

38. Le Comité recommande à l’État partie de prévoir des établissements adaptés pour accueillir les enfants temporairement ou définitivement privés de leur milieu familial dont le placement en institution a été décidé comme mesure nécessaire de dernier recours. Le Comité recommande aussi à l’État partie de reconnaître aux enfants placés en institution le droit de faire réexaminer régulièrement le traitement qui leur est appliqué ainsi que toutes les circonstances liées à leur placement. Les enfants placés en institution devraient en outre avoir accès à un mécanisme de plainte.

Violence, sévices, négligence et maltraitance

39.Le Comité constate avec préoccupation qu’en dépit de mesures récentes, la violence familiale et les sévices à enfant, y compris les sévices sexuels, sont des pratiques courantes dans la société péruvienne et ne sont pas suffisamment réprimés dans le Code pénal.

40. Le Comité invite instamment l’État partie à redoubler d’efforts pour:

a) Prévenir et combattre la maltraitance des enfants au sein de la famille;

b) Renforcer les mécanismes qui permettent de surveiller l’ampleur des formes de violence, de brutalités physiques ou psychologiques, de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation visées à l’article 19, notamment au sein de la famille, dans les établissements scolaires, dans les institutions ou dans le cadre d’autres formes de prise en charge;

c) Inclure dans le Code pénal des dispositions qui sanctionnent spécifiquement ces formes de violence et de maltraitance;

d) Étendre le service gratuit d’assistance téléphonique aux enfants (Teléfono Anar) afin qu’il soit également accessible aux enfants des régions reculées dans tout le pays.

41. Le Comité accueille avec satisfaction les réponses écrites de l’État partie au questionnaire qui avait été envoyé à son gouvernement dans le cadre de l’étude approfondie du Secrétaire général sur la violence contre les enfants, et se félicite également de sa participation à la consultation régionale pour l’Amérique latine qui s’est tenue en Argentine du 30 mai au 1 er  juin 2005. Le Comité recommande à l’État partie de s’appuyer sur les résultats de cette consultation régionale pour mener, en partenariat avec la société civile, des actions visant à garantir à chaque enfant une protection contre toutes les formes de violence physique, sexuelle ou psychologique, et pour promouvoir des initiatives concrètes, éventuellement assorties de délais, visant à prévenir et à combattre ces violences et maltraitances.

Châtiments corporels

42.Tout en se félicitant que les châtiments corporels soient interdits à la fois par le Code pénal et par la loi no 26260, le Comité regrette qu’ils restent légaux dans la sphère privée, et soient encore largement utilisés au sein de la famille et à l’école en tant que mesure de discipline socialement acceptée. Le Comité est d’autant plus préoccupé que d’après une enquête récente les enfants eux-mêmes considèrent cette pratique comme une méthode normale de discipline et d’éducation.

43. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter et de faire appliquer des dispositions législatives interdisant explicitement toute forme de châtiment corporel sur la personne d’un enfant, et ce, dans tous les contextes, y compris à la maison. L’État partie devrait également mener des campagnes de sensibilisation et d’éducation du public pour combattre la pratique des châtiments corporels, et promouvoir le recours à des méthodes de discipline et d’éducation non violentes et participatives.

5. Santé et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26 et 27 (par. 1 à 3) de la Convention)

Enfants handicapés

44.Le Comité salue la création du Conseil national pour l’intégration de la personne handicapée (CONADIS) au sein du Ministère de la femme et du développement social, ainsi que les campagnes de sensibilisation menées pour lutter contre la marginalisation et les préjugés dont sont victimes les handicapés, y compris les enfants. Il reste toutefois préoccupé par la situation générale des enfants handicapés au Pérou, qui continuent de faire l’objet de discrimination, et par le fait qu’il existe très peu d’infrastructures adaptées à leurs besoins, si l’on en croit les informations reçues.

45. Le Comité invite l’État partie à poursuivre activement ses efforts pour:

a) Faire en sorte que les politiques et les pratiques concernant les enfants handicapés tiennent dûment compte des Règles pour l’égalisation des chances des handicapés (résolution 48/96 de l’Assemblée générale) ainsi que des recommandations adoptées par le Comité lors de la journée de débat général consacrée aux droits des enfants handicapés (CRC/C/69);

b) Continuer de faciliter l’intégration totale des enfants handicapés, notamment dans le système scolaire ordinaire, et leur participation aux activités sociales, culturelles et sportives;

c) S’attacher davantage à mettre en place les compétences professionnelles − par exemple des services de spécialistes du handicap − et les ressources financières nécessaires, en particulier au niveau local, et à promouvoir et étendre les programmes de réadaptation et de réinsertion sociale reposant sur la collectivité, notamment les groupes de soutien parental; et

d) Renforcer les campagnes de sensibilisation visant à modifier le regard négatif que la société porte sur les handicapés.

Santé et services de santé

46.Le Comité constate avec préoccupation que:

a)L’accès aux services de santé est insuffisant, en particulier dans les régions rurales et reculées du pays, ce qui se traduit par des disparités importantes entre les prestations fournies;

b)Malgré une certaine amélioration, les taux de mortalité maternelle et infantile et de mortalité des moins de 5 ans restent parmi les plus élevés d’Amérique latine;

c)La prévalence de l’hépatite B et de l’anémie est élevée, en particulier dans certains groupes autochtones;

d)Un grand nombre de personnes vivant dans la pauvreté ou la pauvreté extrême, notamment des femmes et des enfants de moins de 18 ans, ne sont apparemment pas inscrites au Seguro Integral de Salud, qui garantit une couverture médicale gratuite aux personnes défavorisées;

e)Malgré la mise en œuvre de plusieurs programmes d’assistance tels que le Programme national d’aide alimentaire, 25 % des enfants de moins de 5 ans et 32 % des enfants de moins de 2 ans continuent de souffrir de malnutrition chronique.

47. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De faire en sorte que tous les enfants du pays aient accès aux soins et services de santé de base et de continuer à lutter contre le problème de la malnutrition, en particulier dans les régions rurales et reculées;

b) De redoubler d’efforts pour réduire sans tarder la mortalité infantile, enfantine et maternelle dans l’ensemble du pays;

c) D’étendre la couverture médicale gratuite destinée aux familles vivant dans la pauvreté ou dans la pauvreté extrême ( Seguro Integral de Salud );

d) D’accorder une attention particulière au problème des épidémies d’hépatite B qui touchent les communautés autochtones, et en particulier d’organiser sans tarder la vaccination des nouveau ‑nés.

48.Le Comité prend note des préoccupations exprimées par le Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, à la suite d’une récente visite dans l’État partie, à propos de l’incidence que pourraient avoir les accords de commerce bilatéraux sur l’accès de certaines personnes ou groupes de personnes aux médicaments essentiels abordables, notamment sur l’accès des personnes séropositives ou atteintes du sida aux antirétroviraux (E/CN.4/2005/51/Add.3).

49.Le Comité recommande à l’État partie de toujours tenir compte de ses obligations en matière de droits de l’homme lorsqu’il négocie des accords de commerce, en particulier eu égard aux conséquences possibles de ce genre d’accords sur la jouissance effective du droit à la santé.

Salubrité de l’environnement

50.Le Comité est préoccupé par les problèmes de salubrité de l’environnement, qui sont dus aux difficultés d’accès à une eau potable sûre, à l’insuffisance des systèmes d’assainissement et à la pollution provoquée par l’industrie minière, et qui nuisent principalement à la santé et aux moyens d’existence des groupes vulnérables, dont les enfants.

51.Le Comité réitère la recommandation du Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, qui avait demandé à l’État partie de veiller à ce qu’aucun projet d’exploitation minière ou autre activité industrielle susceptible de porter atteinte au droit des enfants à la santé ne soit mis en œuvre sans une étude préalable de son impact potentiel sur l’environnement et de ses conséquences sur le plan social. Le Comité recommande en outre à l’État partie de redoubler d’efforts pour que l’ensemble de la population ait accès à une eau potable sûre et aux systèmes d’assainissement, en particulier dans les régions rurales et reculées.

Santé des adolescents

52.Le Comité est préoccupé par le taux élevé de grossesses précoces et par le nombre d’adolescentes qui meurent des suites d’un avortement. Il est également préoccupé par le manque de services spécialisés en santé sexuelle et procréative, dû à l’insuffisance des crédits budgétaires alloués à ce secteur.

53. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte, en tenant compte de son observation générale sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/GC/2003/4), que tous les adolescents aient accès à des services de santé procréative, et qu’ils soient dûment informés, par des campagnes de sensibilisation, de leurs droits dans ce domaine, notamment en ce qui concerne les maladies sexuellement transmissibles (MST) et les grossesses précoces. L’État partie devrait en outre prendre toutes les mesures possibles pour prévenir les décès d’adolescentes causés par un avortement.

Santé mentale

54.Le Comitéest préoccupé par la fréquence de la consommation de stupéfiants, d’alcool et de tabac chez les adolescents, ainsi que par le taux de suicide de jeunes, en particulier dans certains départements comme ceux d’Arequipa et de Junín.

55. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que tous les enfants aient accès à des services de santé mentale, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre la toxicomanie, l’alcoolisme et le tabagisme, notamment en prévoyant des services spéciaux de réinsertion.

VIH/sida

56.Le Comité constate avec inquiétude que la prévalence du VIH/sida augmente parmi les enfants et les adolescents, en partie à cause de la transmission mère‑enfant. Le Comité trouve également préoccupant que:

a)Seules 8 % des femmes séropositives puissent bénéficier d’un traitement aux antirétroviraux, pourtant essentiel pour prévenir la transmission du VIH/sida de la mère à l’enfant;

b)Les enfants devenus orphelins à cause du VIH/sida et les enfants séropositifs soient victimes de discrimination à l’école et dans la société;

c)L’accès au dépistage du VIH/sida soit limité.

57. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures suivantes, en tenant compte de son observation générale n o 3 sur le VIH/sida et les droits de l’enfant ainsi que des Directives internationales concernant le VIH/sida et les droits de l’homme (E/CN.4/1997/37):

a) Renforcer les mesures déjà engagées pour prévenir la transmission du VIH/sida de la mère à l’enfant, notamment par la coordination de ces mesures avec les initiatives visant à réduire la mortalité maternelle;

b) Fournir un traitement aux antirétroviraux aux femmes séropositives et renforcer le dépistage du VIH/sida chez les femmes enceintes;

c) Prêter une attention particulière aux enfants qui sont touchés par le VIH/sida ou dont les parents sont morts du VIH/sida, en leur offrant une aide médicale, psychologique et matérielle adaptée et en sollicitant la participation de la collectivité;

d) Redoubler d’efforts pour réduire la discrimination qui vise les enfants touchés par le VIH/sida, notamment en mettant sur pied des campagnes et des programmes de sensibilisation au VIH/sida destinés aux adolescents, en particulier à ceux des groupes vulnérables, mais aussi à l’ensemble de la population;

e) Fournir les ressources financières et humaines nécessaires à une mise en œuvre efficace du Plan stratégique national de lutte contre le VIH/sida;

f) Solliciter une assistance technique supplémentaire, notamment auprès du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).

Niveau de vie

58.Le Comité est préoccupé par le taux élevé de pauvreté au Pérou, où environ deux tiers des enfants vivent dans la pauvreté et environ 30 % dans la pauvreté extrême, d’après les chiffres communiqués par l’État partie dans ses réponses écrites. Le Comité constate aussi avec inquiétude que les conditions de vie et de logement dans les zones rurales sont très mauvaises et que seules 34 % des familles y ont accès à l’eau (contre 74 % en zone urbaine).

59. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures possibles, et notamment de prévoir des ressources plus importantes et mieux gérées, pour réduire la pauvreté et garantir à tous l’accès aux biens et services de base, tels que le logement et une eau potable sûre, en particulier dans les régions rurales et reculées.

6. Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29 et 31 de la Convention)

60.Le Comité prend note avec satisfaction du rôle actif joué par les conseils d’école ainsi que des programmes mis en place par l’État partie, en particulier ceux qui concernent l’éducation préprimaire, comme les programmes PRONEI et WAWA WASI. Le Comité se félicite également que les enfants péruviens soient plus nombreux à terminer le cycle de l’enseignement primaire. Il reste cependant préoccupé par:

a)L’insuffisance des crédits budgétaires destinés à l’éducation, et les faibles augmentations prévues à cet égard par le Gouvernement;

b)Les disparités − en ce qui concerne la qualité de l’enseignement comme les infrastructures disponibles − entre les écoles des zones urbaines et celles des zones rurales, et entre les établissements publics et les établissements privés. Le Comité s’inquiète en particulier de l’état déplorable des écoles des régions reculées et de la qualité médiocre de l’enseignement qu’elles dispensent;

c)L’absence de formation adaptée pour les enseignants, qui manquent notamment des compétences nécessaires pour dispenser une éducation bilingue interculturelle aux communautés autochtones;

d)Le manque d’assiduité des élèves aussi bien dans le primaire que dans le secondaire, les taux très élevés d’abandon et de redoublement, et le fait que près d’un quart des adolescents (12 à 17 ans) aient arrêté leur scolarité, notamment en raison du manque d’établissements scolaires;

e)L’absentéisme encore plus important et l’abandon scolaire encore plus précoce chez les filles, en raison d’une conception traditionnelle de leur place dans la société, mais aussi à cause des grossesses précoces;

f)L’accès limité aux formations professionnelles;

g)Les frais indirectement liés à la scolarité;

h)Les résultats du Programme international pour le suivi des acquis des élèves, qui a montré en 2002 que les élèves péruviens arrivaient en dernière position.

61. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De mettre l’accent sur la qualité de l’enseignement et de consacrer davantage de ressources à l’éducation dans le budget national, en les ciblant de manière plus précise;

b) De redoubler d’efforts pour améliorer les conditions d’accueil dans les écoles des régions rurales et reculées, et d’éliminer les disparités dans l’accès à un enseignement de qualité entre les zones rurales et les zones urbaines;

c) De renforcer les mesures visant à accroître les taux de scolarisation et de réussite scolaire et à réduire le taux d’abandon;

d) D’accroître les initiatives en faveur de la formation des enseignants, et améliorer leurs conditions de travail, notamment leurs salaires;

e) D’améliorer l’éducation bilingue interculturelle;

f) De redoubler d’efforts pour éviter aux familles les frais supplémentaires qui sont indirectement liés à la scolarité;

g) D’offrir davantage de formations techniques et professionnelles axées sur la demande et de mettre en place des services d’orientation professionnelle à l’intention des enfants;

h) D’offrir aux enfants non scolarisés et aux enfants qui travaillent davantage de possibilités de recevoir une éducation au moyen de programmes spécifiques adaptés à leurs conditions de vie;

i) De solliciter une assistance technique auprès de l’Organisation des Nations Unies pour la science et la culture (UNESCO) et de l’UNICEF.

7. Mesures spéciales de protection de l’enfance (art. 22, 30, 32 à 36, 37 b) à d) et 38 à 40 de la Convention)

Exploitation économique, notamment le travail des enfants

62.Tout en accueillant avec satisfaction les mesures législatives et les autres initiatives prises par l’État partie au sujet du travail des enfants, comme celles qui sont mises en œuvre dans le cadre des fonctions des inspecteurs du travail, le Comité demeure profondément préoccupé par les informations qui font état de la présence sur le marché du travail, en particulier dans les secteurs de l’économie souterraine, de centaines de milliers d’enfants et d’adolescents, qui se retrouvent écartés du système éducatif et victimes d’exploitation et d’abus. Le Comité constate en outre avec inquiétude que, souvent, les dispositions législatives visant à protéger les enfants contre l’exploitation économique ne sont pas respectées, et que des enfants sont exposés à des conditions de travail dangereuses ou dégradantes, notamment dans les mines, les décharges et les centres de recyclage de piles.

63.Le Comité trouve également préoccupant que l’âge minimum d’admission à l’emploi soit fixé à 14 ans, alors que la scolarité est obligatoire jusqu’à 15 ans.

64. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De réaliser une enquête sur le nombre d’enfants qui travaillent, y compris comme domestiques et dans le secteur agricole, afin de concevoir et de mettre en œuvre des stratégies et des politiques globales visant à prévenir et à combattre l’exploitation économique des enfants, en tenant dûment compte de l’avis des organisations qui œuvrent en faveur des enfants;

b) De veiller à l’application effective des dispositions législatives qui donnent effet à l’article 32 de la Convention, ainsi que des Conventions n os  138 et 182 de l’OIT, afin de combattre notamment les pires formes de travail des enfants interdites par ces instruments;

c) D’élever à 15 ans l’âge minimum d’admission à l’emploi, de façon qu’il corresponde à la fin de la scolarité obligatoire;

d) D’allouer des crédits budgétaires suffisants à la mise en œuvre du Plan d’action national pour la prévention et l’élimination du travail des enfants;

e) D’entreprendre des campagnes de sensibilisation pour prévenir et combattre l’exploitation économique des enfants;

f) De continuer de solliciter l’assistance technique du Programme international pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) de l’OIT et de l’UNICEF, entre autres.

Enfants des rues

65.Le Comité accueille avec satisfaction le programme «Educadores de Calle» (PEC), mais reste préoccupé par le nombre élevé d’enfants des rues, qui s’explique principalement par des facteurs socioéconomiques mais aussi par la violence et la maltraitance au sein des familles. Le Comité s’inquiète également de la montée de la violence adolescente et de la prolifération des bandes de jeunes (pandillas), en particulier à Lima.

66. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’offrir aux enfants des rues, en concertation avec eux, des services de réadaptation et de réinsertion sociale ainsi qu’une alimentation et un logement adéquats, les soins médicaux nécessaires et des possibilités d’accéder à l’éducation;

b) D’aider ces enfants à retourner dans leur famille, chaque fois que cela est possible;

c) De soutenir les activités des organisations non gouvernementales qui s’occupent des enfants des rues;

d) De dispenser une formation sur les principes de la Convention, en particulier la non ‑discrimination et l’intérêt supérieur de l’enfant, aux autorités judiciaires et administratives ainsi qu’au personnel des organisations non gouvernementales qui s’occupent des enfants des rues;

e) De mettre au point des stratégies et des plans socioéducatifs pour faire face au problème des bandes de jeunes ( pandillas );

f) De solliciter l’assistance de l’UNICEF, entre autres.

Exploitation sexuelle et traite

67.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures adoptées par l’État partie pour combattre l’exploitation sexuelle et la traite des enfants, notamment la loi no 28251 de juin 2004 qui a considérablement alourdi les peines applicables aux auteurs de violences sexuelles contre des enfants et a introduit de nouveaux crimes comme le tourisme sexuel et la pédopornographie sur Internet. Le Comité est cependant préoccupé par des informations selon lesquelles un très grand nombre d’enfants − 500 000 d’après les données reçues − seraient victimes d’exploitation sexuelle et de violence sexuelle.

68. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De définir la traite des personnes dans sa législation pénale, en s’inspirant de la définition donnée dans le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants;

b) De mettre en œuvre des programmes d’assistance et de réinsertion pour les enfants victimes d’exploitation sexuelle et/ou de traite, qui devraient être traités en victimes et ne jamais être considérés comme des délinquants ni être punis;

c) D’adopter et de mettre en œuvre un plan d’action national contre l’exploitation sexuelle et la traite des enfants, en tenant compte de la Déclaration et du Programme d’action et de l’Engagement mondial adoptés, respectivement, lors des Congrès mondiaux de 1996 et de 2001 contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales;

d) De dispenser une formation aux agents de la force publique, aux travailleurs sociaux et aux procureurs, de façon qu’ils soient en mesure de recevoir des plaintes émanant d’enfants, de les examiner, d’enquêter à leur sujet et d’engager des poursuites tout en respectant la sensibilité et la vie privée de la victime;

e) De solliciter une assistance technique à l’UNICEF et à l’OIT, entre autres.

69.Le Comité constate avec préoccupation que près de 5 000 disparitions liées à la traite transfrontalière ont été signalées entre 2002 et 2005, parmi lesquelles 35,3 % concernaient des enfants. Le Comité se déclare préoccupé en particulier par les informations faisant état de disparitions d’enfants dans les régions rurales, comme le département d’Ayacucho.

70. Tout en prenant bonne note des mesures prises par l’État partie face aux disparitions d’enfants, le Comité recommande de poursuivre et d’accroître ses efforts pour empêcher de nouvelles disparitions, mener des enquêtes exhaustives sur celles qui ont eu lieu et traduire les responsables en justice.

Administration de la justice pour mineurs

71.Tout en notant que des améliorations ont été apportées au système de justice pour mineurs, notamment avec l’adoption du Code de l’enfance qui a permis de rendre la législation péruvienne globalement conforme à la Convention, le Comité est préoccupé par:

a)L’absence de tribunaux ou de juges spécialement chargés des mineurs de 18 ans dans l’intérieur du pays;

b)Le recours limité aux mesures de «déjudiciarisation» dans le système de justice pour mineurs;

c)Les mauvaises conditions de détention et l’absence de programmes de réadaptation et de réinsertion sociale destinés aux enfants.

72. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’accroître ses efforts pour rendre l’administration de la justice pour mineurs totalement conforme aux dispositions de la Convention, en particulier les articles 37, 39 et 40, ainsi qu’aux autres normes adoptées par les Nations Unies dans ce domaine, notamment l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale, sans oublier les recommandations formulées par le Comité lors de la journée de débat général consacrée à l’administration de la justice pour mineurs (CRC/C/46, par. 203 à 238). À cet égard, le Comité recommande à l’État partie:

a) D’établir dans tout le pays des tribunaux pour mineurs dotés de personnel dûment formé;

b) D’instituer un système fonctionnel de mesures socioéducatives et de veiller à ce que la privation de liberté soit une mesure de dernier recours exclusivement, d’une durée aussi courte que possible eu égard à chaque cas;

c) D’améliorer les conditions de détention des mineurs de 18 ans, en veillant notamment à ce qu’elles soient conformes aux normes internationales en ce qui concerne la superficie, la ventilation, l’accès à l’air frais, la lumière naturelle et artificielle, l’alimentation, l’eau potable et l’hygiène;

d) De créer un mécanisme indépendant, accessible et à l’écoute des enfants, pour recevoir les plaintes émanant d’enfants et leur donner suite, et d’ordonner une enquête sur tous les cas de mauvais traitements en vue de poursuivre et punir leurs auteurs;

e) De veiller à ce que les enfants privés de liberté comme suite à une mesure prise par le système de justice pour mineurs puissent avoir des contacts réguliers avec leur famille, au premier chef en informant les parents du placement en détention de leur enfant;

f) D’offrir au personnel des établissements pénitentiaires une formation sur les droits et les besoins particuliers des enfants;

g) De solliciter une assistance technique dans les domaines de la justice pour mineurs et de la formation du personnel de police, notamment au Haut ‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), à l’UNICEF et à l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).

Enfants appartenant à des groupes autochtones

73.Tout en saluant les initiatives de l’État partie en faveur des communautés autochtones, le Comité note avec préoccupation que ces dernières continuent d’avoir beaucoup de difficultés à exercer leurs droits, surtout leurs droits économiques, sociaux et culturels. En particulier, le Comité constate avec inquiétude que leurs droits fonciers ne sont pas suffisamment reconnus, que leurs ressources sont pillées, qu’elles n’ont qu’un accès limité aux services de base, aux services de santé et à l’éducation, et qu’elles font l’objet d’exclusion sociale et de discrimination.

74. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour réduire de manière effective les inégalités dont souffrent les enfants autochtones face aux perspectives d’avenir et de prendre les dispositions nécessaires pour protéger leurs droits énoncés dans la Constitution, en tenant dûment compte des recommandations adoptées par le Comité à l’issue de la journée de débat général qu’il a consacrée aux droits des enfants autochtones en septembre 2003.

8. Suivi et diffusion

Suivi

75. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour assurer la pleine application des présentes recommandations, notamment en les transmettant aux membres du Gouvernement, au Parlement, et aux autorités et parlements locaux, le cas échéant, pour examen et suite à donner.

Diffusion

76. Le Comité recommande en outre à l’État partie de diffuser largement son troisième rapport périodique et les recommandations y afférentes (observations finales) adoptées par le Comité, notamment (mais non exclusivement) par Internet, auprès du grand public, des organisations de la société civile, des groupements de jeunesse et des enfants, de façon à susciter un débat et à faire connaître la Convention, sa mise en œuvre et son suivi.

9. Prochain rapport

77. Le Comité invite l’État partie à présenter son prochain rapport périodique avant la date fixée pour le cinquième rapport périodique conformément à la Convention, en l’occurrence le 3 octobre 2012. Toutefois, étant donné que le Comité reçoit chaque année un grand nombre de rapports et qu’il s’écoule donc beaucoup de temps entre la date où l’État partie présente son rapport et celle où le Comité l’examine, ce dernier invite l’État partie à présenter un document de synthèse comprenant ses quatrième et cinquième rapports 18 mois avant la date fixée, soit le 3 avril 2011. Ce document ne devra pas dépasser 120 pages (voir CRC/C/148). Le Comité attend de l’État partie qu’il présente par la suite un rapport tous les cinq ans, comme le prévoit la Convention.

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