Nations Unies

CCPR/C/KAZ/CO/1

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

19 août 2011

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ homme

102 e session

Genève, 11-29 juillet 2011

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte

Observations finales du Comité des droits de l’homme

Kazakhstan

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le rapport initial du Kazakhstan (CCPR/C/KAZ/1) à ses 2810e, 2811e et 2812e séances (CCPR/C/SR.2810, 2811 et 2812), les 14 et 15 juillet 2011 et a adopté les observations finales ci-après à sa 2826e séance (CCPR/C/SR.2826), le 26 juillet 2011.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction la soumission du rapport initial du Kazakhstan, encore qu’avec un certain retard, et les renseignements qu’il contient. Il exprime son appréciation pour la possibilité qui lui a été donnée de nouer un dialogue constructif avec la délégation de haut niveau au sujet des mesures que l’État partie a prises pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte depuis la ratification de l’instrument, en 2006. Le Comité accueille avec intérêt les réponses écrites (CCPR/C/KAZ/Q/1/Add.1) à la liste des points à traiter, complétées avec les réponses données oralement par la délégation et avec des informations complémentaires apportées par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures d’ordre législatif et institutionnel suivantes prises par l’État partie:

a)La mise en place de la Commission nationale pour la condition féminine et pour la politique familiale et démographique;

b)La promulgation, en 2009, de la loi sur les garanties d’égalité des droits et des chances pour les hommes et les femmes.

4.Le Comité relève avec satisfaction la ratification par l’État partie des instruments internationaux suivants:

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le 27 février 2009;

b)Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le 30 juin 2009;

c)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le 22 octobre 2008;

d)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, le 31 juillet 2008.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

5.Le Comité relève avec préoccupation l’absence dans le rapport de l’État partie d’informations appropriées concernant le cadre constitutionnel et le système politique qui permettent de garantir les droits protégés par le Pacte. Il s’inquiète également de ce que l’État partie n’ait pas encore soumis un document de base (art. 2 du Pacte).

L e Comité exhorte l’État partie à communiquer des informations complètes au sujet du cadre constitutionnel visant à garantir les droits protégés par le Pacte. À cet égard, il l’invite à soumettre un document de base conformément aux Directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I) adoptées par la Réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

6.Le Comité prend note de la norme prévue au paragraphe 3 de l’article 4 de la Constitution du Kazakhstan qui dispose que les instruments internationaux l’emportent sur les lois nationales et sont directement applicables, mais il est préoccupé par l’absence de précisions quant à la place du Pacte dans l’ordre juridique interne à la suite des arrêts du Conseil constitutionnel, qui a établi la primauté de la Constitution sur les dispositions des instruments internationaux et a déclaré inapplicable toute disposition d’un instrument qui est en conflit avec la Constitution. À cet égard, il s’inquiète aussi des effets que l’exercice par le Président de son pouvoir d’opposer un veto peut avoir sur l’application du Pacte. Il note également avec préoccupation que les dispositions du Pacte sont rarement invoquées devant les juridictions nationales (art. 2).

L ’ État partie devrait prendre toutes les mesures voulues pour assurer la précision juridique concernant la place et l ’ applicabilité du Pacte et des autres instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme qu ’ il a ratifiés. Il devrait également prendre les mesures appropriées pour faire mieux connaître le Pacte auprès des juges, des avocats et des autorités de poursuite de façon que les juridictions nationales prennent ses dispositions en considération .

7.Le Comité prend note de l’intention de l’État partie de faire de l’institution du Défenseur des droits de l’homme le mécanisme national de prévention de la torture, mandat qui lui serait conféré en vertu du projet «Ombudsman Plus», mais il est préoccupé par le fait que le Défenseur des droits de l’homme a été établi par décret présidentiel et n’a pas demandé l’accréditation auprès du Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme. Le Comité s’inquiète également du manque d’indépendance du Défenseur et de l’insuffisance des ressources budgétaires et humaines qui lui sont nécessaires pour s’acquitter de son mandat actuel (art. 2).

L ’ État partie devrait intensifier ses efforts pour garantir la totale indépendance de l ’ institution du Défenseur des droits de l ’ h omme. Il devrait également dot er celle-ci de ressources financières et humaines suffisantes, conformément aux Principes de Paris (résolution 48/134 de l ’ Assemblée générale , annexe ). Le Comité recommande en outre que l ’ institution du Défenseur des droits de l ’ homme demande son accréditation auprès du Sous - Comité d ’ accréditation du Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme. Enfin, quand il établira le mécanisme national de prévention selon les dispositions du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, l ’ État partie d evrait veiller à ce qu ’ il en résulte non pas un amoindrissement mais au contraire une amélioration de l ’ exécution de ses fonctions essentiel les d ’ institution nationale des droits de l ’ homme, conformément aux Principes de Paris.

8.Le Comité reconnaît la nécessité pour l’État partie de prendre des mesures pour lutter contre les actes de terrorisme, y compris en élaborant des textes législatifs appropriés pour réprimer de tels actes, mais il regrette que, d’après les renseignements qu’il a reçus, les agents des forces de l’ordre visent des groupes vulnérables comme les demandeurs d’asile, et des membres de groupes islamiques dans leurs opérations de lutte contre le terrorisme (art. 2 et 26).

L ’ État partie devrait prendre des mesures pour garantir que les activités de s es forces de l ’ ordre dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ne visent pas des individus exclusivement en fonction de leur statut ou leurs conviction s religieuse s et de la manifestation de celles- ci. De plu s , il devrait garantir que toute mesure de lutte contre le terrorisme soit compatible avec le Pacte et avec le droit international des droits de l ’ homme. À ce sujet, l ’ État partie devrait rassembler des données détaillées, qu ’ il dev rait faire figurer dans son prochain rapport périodique, relatives à l ’ application de sa législation antiterroriste e n montrant la façon dont elle touche l ’ exercice des droits énoncés dans le Pacte.

9.Le Comité est préoccupé par le fait que les femmes sont toujours sous-représentées dans le secteur public et dans le secteur privé, en particulier aux postes de prise de décisions, bien que les femmes aient de meilleurs résultats dans l’enseignement supérieur que les hommes. Le Comité s’inquiète également de l’existence de stéréotypes négatifs concernant le rôle des femmes dans la société. Il prend toutefois note des initiatives lancées par l’État partie pour accroître l’égalité des hommes et des femmes, comme l’adoption de la Stratégie relative à l’égalité des sexes, qui fixe un objectif de 30 % de femmes dans tous les domaines de la vie (art. 2, 3 et 26).

L ’ État partie devrait intensifier ses efforts pour accroître la participation des femmes dans les secteurs public et privé, si nécessaire en introduisant des mesures spéciales temporaires appropriées pour donner effet aux dispositions du Pacte. Il devrait prendre les mesures voulues pour faire disparaître les stéréotypes négatifs au détriment des femmes et aussi pour garantir que la représentation des femmes dans les secteurs public et privé reflète les progrès accomp lis dans l ’ amélioration de leur niveau d ’ é tudes .

10.Le Comité se déclare préoccupé par la prévalence de la violence contre les femmes et s’inquiète de ce que la loi sur la violence dans la famille ne contient pas de disposition qui encourage les femmes à signaler les cas de violence dont elles sont victimes. Le Comité est également préoccupé par l’augmentation du nombre d’enfants qui meurent à cause de la violence au foyer. Il prend toutefois note de la promulgation de la loi de 2009 relative à la violence dans la famille (art. 3 et 7).

L ’ État partie devrait ad opter un mode d ’ approche global pour préveni r la violence contre les femmes, notamment dans la famille, sous toutes ses formes et manifestations et pour tendre à y remédier, notamment en faisant prendre conscience de s effets préjudiciables de cette violence. À cette fin , l ’ État partie devrait réviser la loi sur la violence dans la famille de façon qu ’ elle garantisse que les femmes victimes de violence soient encouragées à signaler les cas de violence à la police. L ’ État partie devrait veiller à ce que les cas de violence à l ’ égard des femmes fassent l ’ objet d ’ enquêtes approfondies, que leurs auteurs soient traduits en justice, et s ’ ils sont reconnus coupables, punis de peines appropriées, et que les v ictimes reçoivent une réparation adéquate.

11.Le Comité est préoccupé par la prévalence des grossesses d’adolescentes et des avortements clandestins à l’origine de décès. Il regrette l’absence de programmes spécifiquement conçus pour prévenir les grossesses chez les adolescentes et toutes les conséquences du recours à l’avortement illégal (art. 6 et 7).

L ’ État partie devrait prendre des mesures pour aider les jeunes filles à éviter les grossesses non désirées et à ne pas recourir à l ’ avortement clandestin, qui peut mettre leur vie en danger. Il devrait prendre les initiatives voulues pour sensibiliser la population et faire en sorte que d es services et des structures de santé de la procréation soient facilement disponibles et accessibles.

12.Le Comité est préoccupé par la contradiction concernant les infractions qui emportent la peine de mort entre la Constitution et le Code pénal. Il relève en particulier que, alors que la Constitution dispose que la peine capitale peut être prévue par la loi uniquement pour des actes terroristes qui causent des pertes en vie humaine et pour des crimes graves en temps de guerre, le Code pénal de son côté énonce une liste plus longue d’infractions qui emportent la peine de mort. Le Comité note également que l’État partie a uniquement signé mais n’a pas ratifié le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte. Il donne acte à l’État partie du moratoire sur les exécutions pour certaines infractions pénales (art. 6).

Le Comité engage l ’ État partie à abolir la peine de mort et à ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

13.Le Comité note que la délégation a reconnu que les assurances diplomatiques données dans le cadre de l’Organisation de coopération de Shanghai n’exonèrent pas l’État partie de surveiller le comportement de l’État requérant après le renvoi d’un individu dans cet État, mais il est préoccupé par le fait que l’État partie peut vouloir recourir à ces assurances diplomatiques pour renvoyer des étrangers vers des pays où la torture et des violations graves des droits de l’homme pourraient se produire. Le Comité est également préoccupé par les informations qu’il a reçues, indiquant que des individus, en particulier des ressortissants ouzbeks et chinois, qui pourraient avoir des raisons valables de demander l’asile ou le statut de réfugié ne bénéficient pas de la protection assurée en vertu du principe du non-refoulement du fait des obligations contractées par l’État partie en vertu de la Convention de Minsk relative à l’entraide judiciaire pour les personnes de la communauté d’États indépendants (art. 7 et 13).

L ’ État partie devrait faire preuve de la plus grande circonspection dans le recours aux assurances diplomatiques quand il envisage de renvoyer des étrangers dans des pays où ils risquent d ’ être soumis à la torture ou de subir des violations graves des droits de l ’ homme. L ’ État partie est encouragé à continuer de surveiller la façon dont ces personnes sont traitées après leur retour et prendre l es mesures appropriées quand les assurances ne sont pas honorées. De plus, l ’ État partie devrait faire en sorte que le principe du non-refoulement soit respecté sans réserve et que toutes les personnes qui ont besoin d ’ une protection internationale reçoivent, à tous les stades, un traitement approprié et équitable, conformément au Pacte.

14.Le Comité prend acte de l’adoption d’un plan d’action pour 2010-2012 concernant la mise en œuvre des recommandations du Comité contre la torture, mais il est préoccupé par le fait qu’il a reçu d’un plus grand nombre de sources des informations indiquant la pratique de la torture et le petit nombre d’enquêtes réalisées sur les allégations de torture par les «procureurs spéciaux». Il relève aussi avec préoccupation que la peine maximale (dix ans d’emprisonnement) pour les actes de torture ayant entraîné la mort de la victime prévue à l’article 347, paragraphe 1, du Code pénal est trop légère (art. 7).

L ’ État partie devrait prendre des mesures appropriées pour faire cesser la pratique de la torture, notamment en renforçant le mandat des «procureurs spéciaux» de façon à leur permettre de mener des enquêtes indépendantes sur les comportements illicites imputés à des agents des forces de l ’ ordre. À ce t eff et, l ’ État partie devrait veiller à ce que tous les personnels des services de police continuent de recevoir une formation sur la prévention de la torture et des mauvais traitements en intégrant le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d ’ Istanbul ) de 1999 dans tous les programmes de formation à l ’ intention des agents des forces de l ’ ordre. L ’ État partie devrait ainsi veiller à ce que toutes les plaintes pour torture et mauvais traitements fassent l ’ objet d ’ une enquête effective, que les responsables soient traduits en justice et punis de peines appropriées et que les victimes reçoivent une réparation adéquate. À ce sujet, l ’ État partie est engagé à réviser son Code pénal de façon à prévoir pour les actes de torture des peines à la mesure de la nature et de la gravité des crimes commis.

15.Le Comité prend note de l’existence de la loi de 2002 relative aux droits de l’enfant et de l’interdiction des châtiments corporels à l’école et dans les institutions du système pénal, mais il est préoccupé par le fait que les châtiments corporels restent autorisés à la maison et dans les foyers d’accueil où ils sont toujours acceptés et pratiqués comme méthode de discipline par les parents et les familles d’accueil (art. 7 et 24).

L ’ État partie devrait prendre des mesures concrètes pour mettre fin à la pratique des châtiments corporels dans les établissements scolaires et dans les institutions. Il devrait également encourager l ’ application de méthodes non violentes de discipline à la place des châtiments corporels dans le contexte familial et mener des campagnes d ’ information du public pour faire prendre conscience de leurs effets préjudiciables.

16.Le Comité regrette l’augmentation du nombre de crimes qui seraient liés à la traite des êtres humains. Il regrette également l’augmentation du nombre d’enfants qui travaillent dans les champs de coton et de tabac. Il donne acte à l’État partie des efforts qu’il consent pour lutter contre la traite des êtres humains, par exemple avec la mise en place de la Commission interministérielle de lutte contre la traite (art. 8).

L ’ État partie devrait intensifier ses efforts pour lutter contre la traite des êtres humains en faisant en sorte que son action vise à établir les causes profondes de la traite et à s ’ y attaquer . De plus, l ’ État partie devrait garantir que les enfants soient protégés des incidences préjudiciables du travail, en particulier pour ceux qui sont employés dans les champs de coton et de tabac. À ce sujet, il devrait veiller à ce que tous les cas de traite des êtres humains et d ’ exploit ation du travail des enfants fassent l ’ objet d ’ une enquête effective , que les responsables soient traduits en justice et punis de façon appropriée et que les victimes soient dûment indemnisées.

17.Le Comité est préoccupé par la surpopulation dans les centres de détention et dans les établissements pénitentiaires, qui continue de poser problème. Le Comité est également préoccupé par l’augmentation du nombre de cas signalés de violence entre prisonniers, d’automutilation et de décès en prison. Il prend note des efforts déployés par l’État partie pour construire de nouveaux centres pénitentiaires afin d’améliorer les conditions carcérales (art. 6 et 10).

L ’ État partie devrait prendre d ’ urgence des mesures pour remédier à la surpopulation dans les centres de détention et les établissements pénitentiaires, notamment en appliquant davantage les moyens de substitution à l ’ emprisonnement , comme la surveillance électronique, la libération conditionnelle et le travail d ’ intérêt général. L ’ État partie devrait faire cesser la pratique consistant à tolérer la violence entre prisonniers et prendre des mesures tendant à s ’ attaquer aux causes profondes de l ’ automutilation par les prisonniers. À ce sujet, l ’ État partie devrait veiller à ce que tous les cas de violence entre prisonniers et de décès de prisonniers fassent l ’ objet d ’ enquêtes approfondies et que les responsables soient poursuivis et punis de sanctions appropriées. De plus, les commissions de surveillance publique devraient être habilitées à faire des inspections sans préavis de tous les établissements pénitentiaires et centres de détention.

18.Le Comité relève avec préoccupation qu’il faut un visa de sortie pour pouvoir voyager à l’étranger et que les démarches pour obtenir ce visa seraient lourdes et bureaucratiques. Il est également préoccupé par le fait que l’État partie maintient le système d’enregistrement obligatoire du domicile sur le lieu de résidence, ce qui peut entraver l’exercice des droits consacrés à l’article 12 du Pacte (art. 12).

L ’ État partie devrait supprimer l ’ obligation d ’ obtenir un visa de sortie et veiller à ce que l ’ obligation faite aux individus de s ’ enregistrer sur leu r lieu de résidence soit entièr ement compatible ave c les dispositions de l ’ article 12 du Pacte.

19.Le Comité se dit préoccupé par le fait que, bien qu’une loi de 2010 relative aux réfugiés ait été promulguée, son application ne permet pas de garantir l’exercice des droits protégés par le Pacte. Le Comité est également préoccupé par l’absence de coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) dans le cadre du mandat de celui-ci consistant à déterminer le statut de réfugié qui, dans les faits, exclut la protection assurée par le HCR en vertu du principe de non-refoulement (art. 7 et 13).

L ’ État partie devrait revoir sa législation relative aux réfugiés de façon à garantir qu ’ elle soit conforme au Pacte et aux normes internationales en matière de droit de s réfugiés et de droit d ’ asile. L ’ État partie devrait également veiller à apporter au HCR la coopération voulue pour permettre à celui-ci de s ’ acquitter du mandat et des attributions qui lui sont confiés en vertu de ses statuts, de la Convention de 1951 et d ’ autres instruments internationaux ratifiés par l ’ État partie afin de garantir l’exercice des droits protégés par le Pacte .

20.Le Comité est préoccupé par les informations faisant état de restrictions injustifiées à l’accès à un avocat par des particuliers, spécialement dans les affaires portant sur des secrets d’États, où les avocats sont notamment obligés de demander l’approbation de l’État avant de pouvoir représenter leur client. Il est également préoccupé par le fait que la loi n’établit pas l’obligation pour les fonctionnaires de police d’informer les personnes soupçonnées de leur droit à l’assistance d’un avocat (art. 14).

L ’ État partie devrait faire en sorte que toute mesure prise pour protéger des secrets d ’ États n ’ entraîne pas des restrictions injustifiées au droit d ’ un individu de consulter l ’ avocat de son choix. De plus, l ’ État partie devrait veiller à ce que dans tous les cas d ’ arrestation , les policiers qui procèdent à l ’ interpellation s’acquittent de l’obligation , au moment de l ’ arrestation, d ’ informer l ’ intéressé de son droit à l ’ assistance d ’ un avocat.

21.Le Comité se déclare préoccupé par les informations reçues indiquant que la corruption est généralisée dans le système judiciaire. Il s’inquiète aussi de l’absence d’une magistrature indépendante dans l’État partie et des conditions de nomination et de révocation des juges, système qui ne garantit pas la séparation voulue entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. Il prend également note avec préoccupation de la réponse apportée par l’État partie au sujet du rôle du Président en tant que «coordonnateur» des trois branches du Gouvernement. Le Comité est particulièrement préoccupé d’apprendre que le Bureau du Procureur général joue un rôle prédominant dans l’administration judiciaire au point qu’il a la faculté de suspendre l’exécution de jugements rendus par les tribunaux (art. 2 et 14).

L ’ État partie devrait prendre des mesures pour préserver, dans la loi et dans la pratique, l ’ indépendance de l ’ appareil judiciaire et de son rôle en tant qu ’ unique administrateur de la justice et pour assurer la compétence, l ’ indépendance et l ’ inamovibilité des juges. Il devrait en particulier agir pour faire disparaître toutes les formes d ’ interférence avec le pouvoir judiciaire et veiller à ce que des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales soient rapidement menées sur toutes les allégations d ’ ingérence, notamment par la corruption; il devrait faire en sorte que les responsables soient poursuivis et punis, y compris les juges qui peuvent être complices. L ’ État partie devrait réexaminer les pouvoirs conférés au Bureau du Procureur général de façon à garantir que ses services n ’ interfèrent pas avec l ’ indépendance du pouvoir judiciaire.

22.Le Comité est préoccupé d’apprendre que les organes de poursuite exercent une influence excessive sur le pouvoir judiciaire, ce qui a une incidence sur les décisions de justice, au point que dans les affaires pénales le taux d’acquittement est extrêmement faible (1 %). Le Comité est également préoccupé par les informations de plus en plus nombreuses indiquant que les juges admettent comme preuves des déclarations obtenues par la torture (art. 2 et 14).

L ’ État partie devrait mener une étude pour déterminer les causes du très faible nombre d ’ acquittements dans les affaires pénales de façon à garantir que les droits des personnes accusées d ’ une infraction pénale tels qu ’ ils sont consacrés dans le Pacte soient assurés et protégés pendant tout le procès. L ’ État partie devrait en outre veiller à ce que des mesures soient mises en place pour que dans tous les cas les juges rejettent des preuves obtenues par la torture.

23.Le Comité relève que la loi sur les obligations militaires et le service militaire permet l’exemption du service militaire pour les citoyens qui exercent un ministère religieux ou sont employés à titre permanent dans une association religieuse enregistrée, mais il regrette que la loi ne reconnaisse pas expressément le droit de toute personne à l’objection de conscience au service militaire et ne prévoie pas un service civil de remplacement (art. 18).

Le Comité engage l ’ État partie à faire le nécessaire pour réviser sa législation de façon à mettre en place un service civil de remplacement au service militaire. L ’ État partie devrait également veiller à ce que la loi dispose clairement que les individus ont le droit d ’ opposer l ’ objection de conscience au service militaire, et devraient pouvoir l’ exercer avant d ’ être appelés sous les drapeaux et à tout moment pendant le service militaire.

24.Le Comité est préoccupé par le fait que la loi relative à la liberté de religion et aux associations religieuses et la loi relative à l’enregistrement auprès de l’État des personnes morales et à l’enregistrement des sections et bureaux représentatifs imposent l’enregistrement obligatoire des associations et groupes religieux. Il note également avec préoccupation que la pratique d’une religion et toute activité religieuse menée par un groupe non enregistré sont passibles de sanctions administratives (art. 18).

L ’ État partie devrait faire en sorte que la législation relative à l ’ enregistrement des organisations religieuses respecte le droit de pratiquer librement son culte et le droit de manifester ses convictions religieuses, comme l ’ exige le Pacte.

25.Le Comité prend note avec préoccupation d’informations selon lesquelles l’État partie ne respecte pas la liberté d’expression. En particulier, il est préoccupé par les informations indiquant que des menaces, des agressions, des actes de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de journalistes et de défenseurs de droits de l’homme ont grandement restreint l’exercice de la liberté d’expression. Le Comité est également préoccupé par l’existence de dispositions du Code pénal relatives à la diffamation de personnalités publiques et par la promulgation récente de la loi sur le chef de la nation qui introduit un nouvel article (art. 317, par. 1) dans le Code pénal interdisant et punissant les propos insultants et autres atteintes à l’honneur du Président (art. 19).

L ’ État partie devrait veiller à ce que les journalistes, les défenseurs des droits de l ’ homme et les particuliers soient en mesure d ’ exercer sans entrave le droit à la liberté d ’ expression, dans le respect du Pacte. À cette fin, L ’ État partie devrait réviser sa législation relative à la diffamation et aux propos insultants de façon à la rendre entièrement conforme aux dispositions du Pacte. De plus, il devrait renoncer à utiliser la loi relative à la diffamation à seule fin de harc eler ou d ’ intimider des particuliers, de s journalistes et de s défenseurs des droits de l ’ homme. Ainsi toute restriction à l ’ exercice de la liberté d ’ expression devrait satisfaire aux conditions strictes énoncées au paragraphe 3 de l ’ article 19 du Pacte.

26.Le Comité prend note avec préoccupation des informations selon lesquelles le droit à la liberté de réunion n’est pas respecté dans l’État partie. Il est particulièrement préoccupé d’apprendre que des restrictions injustifiées sont imposées au droit à la liberté de réunion, comme la désignation de lieux pour tenir des rassemblements, qui sont systématiquement situés loin du centre des villes pour que la fréquentation soit moins nombreuse. Le Comité est également préoccupé par les renseignements qu’il a reçus indiquant que les demandes d’autorisation de tenir une réunion sont souvent rejetées pour des motifs d’ordre public et de sécurité nationale, mais que la population continue d’organiser des rassemblements non autorisés, au risque pour les participants d’être arrêtés et inculpés pour infraction à un certain nombre de règlements administratifs, ce qui restreint grandement le droit à la liberté de réunion (art. 21).

L ’ État partie devrait revoir sa réglementation , sa politique et sa pratique et veiller à ce que tous les individus relevant de sa juridiction puissent exercer sans réserve les droits garantis à l ’ article 21 du Pacte . Il devrait faire en sorte que les restrictions à l ’ exercice de ce droit respectent les prescriptions str ictes de l ’ article 21 du Pacte.

27.Le Comité est préoccupé par l’application de la loi sur l’enregistrement des partis politiques, qui impose des restrictions injustifiées à l’enregistrement des partis politiques et des associations publiques avec pour résultat, dans la pratique, des obstacles et des retards importants dans l’enregistrement des partis et groupes d’opposition (art. 22 et 25).

L ’ État partie devrait rendre ses textes législatifs et réglementaires ainsi que sa pratique régissant l ’ enregistrement des partis politique s conformes aux dispositions du Pacte. Il devrait en particulier veiller à ce que la procédure d’enregistrement soit compatible avec les a rticles 22 ( par.  2) et 25 du Pacte. Il ne devrait pas utiliser la procédure d ’ enregistrement pour cibler des groupes qui sont considérés comme ayant des opinions politique s contraires à celles du parti politique dirigeant.

28.Le Comité note que les groupes minoritaires, notamment les minorités ethniques, sont représentés à l’Assemblée du peuple mais il est préoccupé par le fait que leur participation à d’autres organes de décision, en particulier aux chambres du Parlement, le Majilis et le Sénat, est limitée (art. 26 et 27).

L ’ État partie devrait accroître ses efforts pour promouvoir la participation de s groupes minoritaires à la vie politique et aux organes de prises de décisions en adoptant notamment des mesures spéciales temporaires. Il lui est demandé de faire figurer d ans son deuxième rapport périodique des données ventilées par groupe ethnique montrant la représentation des groupes minoritaires aux organes politique s et aux postes de décision.

29.L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, des deux Protocoles facultatifs s’y rapportant, du rapport initial, des réponses écrites à la liste des points à traiter établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public. Le rapport et les observations finales devraient être traduits dans l’autre langue officielle de l’État partie.

30.Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait faire parvenir, dans délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 7, 21, 25 et 26.

31.Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique, qui devrait lui parvenir d’ici au 29 juillet 2014, des renseignements à jour et précis sur la suite donnée à toutes ses recommandations et l’application du Pacte dans son ensemble. Il demande en outre que le deuxième rapport périodique soit élaboré en consultation avec la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays.