NATIONS UNIES

CERD

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/RUS/CO/1922 septembre 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATIONDE LA DISCRIMINATION RACIALESoixante‑treizième session28 juillet‑15 août 2008

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’ élimination de la discrimination raciale

FÉDÉRATION DE RUSSIE

1.Le Comité a examiné les dix-huitième et dix-neuvième rapports périodiques de la Fédération de Russie, soumis en un seul document (CERD/C/RUS/19), à ses 1882e et 1883e séances (CERD/C/SR.1882 et 1883), tenues les 31 juillet et 4 août 2008. À ses 1897e et 1898e séances (CERD/C/SR.1897 et 1898), le 13 août 2008, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2. Le Comité se félicite de la soumission, dans les délais, du rapport et des réponses écrites détaillés de la Fédération de Russie (CERD/C/RUS/Q/19/Add.1). Il accueille avec satisfaction les explications exhaustives fournies par la délégation de haut niveau en réponse aux questions du Comité, ainsi que le dialogue constructif instauré entre la délégation et lui-même.

B. Aspects positifs

3. Le Comité note avec satisfaction que dans le Code pénal révisé (2007), le fait que certaines infractions pénales soient motivées par la haine ou l’hostilité fondée sur l’origine ethnique, la race ou la religion constitue une circonstance aggravante. C’est notamment le cas pour l’homicide (art. 105), les coups et blessures (art. 111, 112 et 115), les menaces de mort ou les atteintes graves à la santé (art. 119), le fait d’impliquer des mineurs dans un crime (art. 150), le hooliganisme (art. 213), le vandalisme (art. 214), la diffamation envers la mémoire d’un mort ou la profanation de lieux de sépulture (art. 244).

4. Le Comité note avec satisfaction l’adoption en 2006 de la loi fédérale sur la publicité, qui interdit de recourir dans des spots publicitaires à des images, des comparaisons ou des expressions choquantes et insultantes fondées sur la race ou l’origine ethnique.

5. Le Comité salue l’adoption en 2006 de la loi fédérale sur l’enregistrement des ressortissants étrangers et des apatrides ayant émigré dans la Fédération de Russie et des amendements apportés à la loi fédérale sur le statut juridique des ressortissants étrangers dans la Fédération de Russie, qui simplifient les démarches en vue de l’obtention d’un permis de travail et d’un permis de résidence temporaire, en particulier pour les «non-citoyens» récemment arrivés dans l’État partie.

6. Le Comité note avec satisfaction que la loi fédérale sur l’autonomie locale dans la Fédération de Russie (principes généraux d’organisation) du 6 octobre 2003 confère aux organes d’autonomie locale la responsabilité de garantir les droits des entités autonomes nationales et culturelles, y compris en appuyant les établissements d’enseignement dans le domaine de l’apprentissage des langues nationales.

7. Le Comité salue l’établissement d’un cadre institutionnel pour la protection des droits des minorités ethniques et des petits peuples autochtones, en particulier:

a)La création en 2004 du Ministère du développement régional qui comprend le Département des relations interethniques, instance phare dans ce domaine;

b)La création en 2004 du Conseil présidentiel d’aide au développement des organisations de la société civile et de promotion des droits de l’homme, chargé d’un vaste éventail d’activités;

c) La création en 2006 du «Forum social» comprenant la Commission chargée des questions liées à la tolérance et à la liberté de conscience qui a pour mandat de combattre en amont toutes les formes de nationalisme et d’intolérance;

d) La création récente du Conseil consultatif pour les questions d’autonomie ethnoculturelle.

8. Le Comité note en s’en félicitant que l’État partie a versé des contributions volontaires substantielles au Haut-Commissariat aux droits de l’homme, en vue de la préparation de la Conférence d’examen de Durban de 2009.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

9. Tout en notant que la loi fédérale modifiant et complétant le Code pénal du 8 décembre 2003 a inséré dans l’article 136 du Code pénal une définition des actes discriminatoires punissables, qui vise exclusivement les violations des droits, libertés et intérêts légitimes des personnes fondées notamment sur la race et l’origine ethnique, le Comité est préoccupé par l’absence de définition complète de la discrimination raciale couvrant tous les domaines du droit et de la vie publique (art. 1, par. 1).

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager d’adopter dans sa législation une définition claire et complè te de la discrimination raciale , qui couvre tous les actes de discrimination directe et indirecte et tous les domaines du droit et de la vie publique, conformément à l’article premier, paragraphe 1 , de la Convention.

10.Le Comité prend note de l’explication de l’État partie, qui affirme ne pas recueillir de données statistiques comparatives sur la jouissance, par les minorités ethniques, des droits protégés par la Convention afin de prévenir toute discrimination fondée sur l’origine ethnique. Il est toutefois préoccupé par le fait que, faute de données de ce type, il est très difficile d’évaluer la situation socioéconomique des différents groupes ethniques dans l’État partie et, partant, d’adopter des mesures spéciales pour corriger les inégalités en matière de jouissance de ces droits (art. 2).

Le Comité prie l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées sur la jouissance par les minorités ethniques et les non ‑ citoyens des droits protégés par la Convention, y compris le droit au travail, le droit au logement, le droit à la santé, le droit à la sécurité sociale et à l’éducation, ventilées par sexe, groupe ethnique et nationalité, et recommande qu’un mécanisme chargé de recueillir des données de manière systématique soit créé à cette fin.

11.Tout en notant qu’un certain nombre de lois sectorielles, telles que le Code du travail, contiennent des dispositions antidiscriminatoires, le Comité se dit préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas encore adopté de législation civile et administrative complète pour prévenir et combattre la discrimination raciale dans tous les domaines (art. 2, par. 1 d)).

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager d’adopter une législation antidiscriminatoire complète, qui couvre la discrimination directe et indirecte, et qui prévoie le partage de la charge de la preuve dans les procédures civiles et administratives relatives à des actes de discrimination raciale.

12.Le Comité note que l’article 286 du Code pénal érige en infraction les violations des droits et des intérêts légitimes des particuliers et des organisations commises par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles et outrepassant leurs prérogatives. Il est toutefois préoccupé par le fait qu’en dépit de cette disposition, les minorités ethniques telles que les Tchétchènes et les autres personnes originaires du Caucase ou de l’Asie centrale, ainsi que les Roms et les Africains, continueraient à faire plus souvent l’objet de contrôles d’identité, d’arrestations, de placements en détention et de harcèlement de la part des membres des forces de l’ordre et autres responsables de l’application des lois (art. 2, par. 1 a), 5 b) et 5 d) i)).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues, y compris disciplinaire s ou pénale s , contre les agents de l’État qu i se livrent à des arrestations ou des fouilles visant une race en particulier ou à d’autres actes injustifiés fondés uniquement sur l’apparence physique des personnes issues de minorités ethniques, de rendre la formation continue aux droits de l’homme obligatoire pour les membres des forces de l’ordre et autres responsables de l’application des lois afin de prévenir un tel profilage, et de modifier en conséquence les objectifs d’efficacité de la police. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur la Recommandation générale  XXXI (2005) concernant la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale.

13. Tout en prenant acte de la teneur du dialogue instauré avec la délégation russe, le Comité note avec préoccupation les informations portées à sa connaissance faisant état de perquisitions menées dans des entreprises géorgiennes, ou encore dénonçant l’établissement de listes de noms d’étudiants géorgiens à l’usage de la police, le recours à des contrôles d’identité, la destruction de papiers d’identité, la détention dans des conditions inhumaines, les expulsions prononcées au terme d’une procédure simplifiée et autres mesures répressives à l’endroit de ressortissants géorgiens ou de Géorgiens de souche en 2006 (art. 2, par. 1 a), 5 b) et 5 d) i)).

Le Comité recommande à l’État partie d’enquêter de manière approfondie, par l’intermédiaire d’un organe indépendant, sur tous les agissements illicites de membres des forces de l’ordre qui auraient visé les ressortissants géorgiens et les Géorgiens de souche en 2006, et de prendre des mesures pour éviter que de tels actes ne se reproduisent.

14.Le Comité est préoccupé par l’absence de programme gouvernemental au niveau fédéral qui permettrait de remédier à la marginalisation socioéconomique des Roms (art. 2 et 5) e)).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter un plan d’action national comprenant des mesur es spéciales pour promouvoir l’accès des Roms à l’emploi, à un logement convenable avec la garantie de ne pouvoir être expulsés, à l’éducation et aux autres droits économiques, sociaux et culturels, et leur permettre d’obtenir des papiers d’identité et d’enregistrer leur lieu de résidence conformément à la R ecommandation générale XXVII concernant la discrimination à l’égard des Roms (2000) , et enfin d’allouer suffisamment de ressources à la mise en œuvre effective de ce p lan.

15. Tout en notant les informations fournies par l’État partie au sujet de l’allocation, par le Gouvernement fédéral, de crédits importants au programme fédéral en faveur du développement socioéconomique des petits peuples autochtones à l’horizon 2011, le Comité est préoccupé par les informations faisant état d’une mise en œuvre inefficace de ce programme et par l’absence d’informations sur les résultats concrets auxquels il a abouti (art. 2).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier encore ses efforts pour mettre en œuvre efficacement le programme fédéral en faveur du développement socioéconomique des petits peuples autochtones, de l’élargir à tous les peuples qui se définissent eux-mêmes comme «autochtones» , et de fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur les résultats concrets de ce programme.

16. Tout en reconnaissant les efforts mis en œuvre par l’État partie pour combattre l’incitation à la haine fondée sur la race, la religion ou l’origine ethnique dans les médias et, dans une moindre mesure certes, dans le discours politique, le Comité note avec préoccupation l’accroissement du nombre de déclarations racistes et xénophobes dans les médias − y compris dans les médias traditionnels et dans les publications de maisons d’édition ayant pignon sur rue − sur l’Internet et au sein de la fonction publique et des partis politiques, qui visent des minorités ethniques telles que les Tchétchènes et d’autres personnes originaires du Caucase ou de l’Asie centrale, les Roms, les Africains et les minorités ethniques de confession musulmane ou juive (art. 4 a) et c)).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour combattre les propos haineux fondés sur l’origine ethnique dans les médias, sur l’Internet et dans le discours politique, en condamnant publiquement de telles déclarations, en imposant des sanctions adéquates aux auteurs de déclarations publiques à caractère raciste, en recourant chaque fois qu’il est nécessaire à toutes les mises en garde officielles prévues aux articles 4 et 16 de la loi fédérale sur les moyens des médias et en interdisant, le cas échéant, tout organe d’informat ion incitant à la haine raciale . Il recommande également à l’État partie de coopérer efficacement avec les États tiers où sont domiciliés les sites Internet russophones, et de former les juges, les procureurs, les agents des forces de l’ordre et les responsables de l’application des lois à l’application de l’article 282 du Code pénal et aux autres dispositions pertinentes du droit pénal.

17. Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles la portée générale de la législation sur la lutte contre les activités extrémistes serait propice à une application arbitraire et la législation ne serait pas appliquée de manière systématique aux groupes ultranationalistes, néonazis et de skinheads qui harcèlent et agressent les membres de minorités ethniques dans l’État partie (art. 4 b), 5 d) vii) et 6).

Le Comité recommande à l’État partie de se fixer comme objectif principal , la lutte dans le cadre de l’application de la législation sur la lutte contre les activités extrémistes et de l’article 282 du Code pénal , contre les organisations extrémistes et leurs membres qui se livrent à des activités motivées par la haine ou l’hostilité fondée sur la race, la religion ou l’origine ethnique.

18.Tout en notant avec satisfaction l’explication fournie par le chef de la délégation russe au sujet des causes sous-jacentes des attitudes racistes et xénophobes au sein de la société russe, le Comité est gravement préoccupé par l’accroissement alarmant du nombre et de la gravité des actes de violence à caractère racial, commis en particulier par des jeunes membres de groupes extrémistes et, dans certains cas, par des éléments extrémistes d’organisations de cosaques, contre des Tchétchènes et d’autres personnes originaires du Caucase ou de l’Asie centrale, des Roms, des Turcs meskhètes, des musulmans, des Africains et d’autres minorités ethniques (art. 5 b)).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier encore ses efforts pour combattre les actes de violence à caractère racial, notamment en veillant à ce que les juges, les procureurs et les membres des forces de l’ordre considèrent comme circonstance agg ravante la haine ou l’hostilité fondée sur la race, la religion ou l’origine ethnique dans toute procédure engagée en application des dispositions pénales mentionnées au paragraphe 3 ci-avant, et de fournir des données statistiques mises à jour et ventilées par âge, sexe et origine nationale ou ethnique des victimes, sur le nombre et la nature des crimes haineux ainsi que les actions pénales, les condamnations et les peines auxquelles ils ont donné lieu.

19.Le Comité note l’absence de données statistiques sur le nombre de demandes d’asile et de statut de réfugié présentées aux autorités compétentes de l’État partie, ainsi que sur le nombre de cas dans lesquels ces demandes ont abouti (art. 5 b)).

Le Comité prie l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des données statistiques à jour concernant le nombre de demandes d’asile et de statut de réf ugié reçues chaque année et le nombre de cas dans lesquels ces demandes ont abouti, ventilées par origine nationale ou ethnique des auteurs .

20.Le Comité note avec préoccupation qu’aucun des petits peuples autochtones de l’État partie n’est représenté à la Douma d’État de l’Assemblée fédérale et que, d’après des informations émanant d’instances intergouvernementales, les dispositions de la loi portant sur sa garantie des droits des petits peuples autochtones et la protection des droits des minorités nationales, qui déterminaient des quotas relatifs à la représentation des peuples autochtones au sein des organes législatifs des entités territoriales de l’État partie, ont été abrogées en 2004 (art. 5 c)).

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de réserver un certain nombre de sièges aux petits peuples du Nord, de Sibérie et de l’Extrême-Orient russe au sein des organes législatifs, ainsi que de l’exécutif et de la fonction publique, aux niveau x régional et fédéral, ou de fixer des quotas obligatoires en la matière et de veiller à ce que ces peuples participent dûment à toutes les décisions touchant leurs droits et leurs intérêts légitimes.

21. Tout en prenant acte des informations fournies par la délégation russe au sujet du nombre considérable de personnes déplacées à l’intérieur du pays qui ont regagné la République de Tchétchénie, et du fait que des fonds considérables ont été débloqués pour faciliter leur retour, le Comité est préoccupé par des informations selon lesquelles les personnes déplacées provenant de Tchétchénie seraient parfois contraintes d’y retourner et de quitter les centres d’hébergement temporaire en Ingouchie et à Grozny, et par le fait que les personnes déplacées au sein de la Tchétchénie ne peuvent prétendre au statut de migrant forcé, et que celles qui se trouvent en dehors de Tchétchénie se voient parfois refuser ce statut (art. 5 d) i) et 5) e) iii)).

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les personnes provenant de Tchétchénie qui ont été déplacées ne soient pas contraintes de retourner vivre là où elles résidaient avant le conflit si elles craignent pour leur sécurité, à ce que les rapatriés qui ont dû quitter les centres d’hébergement temporaire et regagn er l’Ingouchie et Grozny se voient octroyer un logement de substitution convenable, et à ce que toutes les personnes déplacées obtiennent le statut de migrant forcé et bénéficient des prestations associées à ce statut.

22. Tout en prenant acte de ce qu’en vertu de la loi fédérale no 5242-1 de 1993 sur la liberté de circulation et le libre choix du lieu de résidence des citoyens de la Fédération de Russie, l’enregistrement du lieu de résidence ne doit pas être une condition préalable nécessaire à l’exercice des droits des citoyens, le Comité est préoccupé par le fait que d’après les informations dont il dispose, la jouissance de nombreux droits et prestations serait en pratique subordonnée à cet enregistrement, et que les membres des forces de l’ordre seraient généralement peu disposés à procéder à l’enregistrement du lieu de résidence des Tchéchènes et d’autres personnes originaires du Caucase, des Roms, des Turcs meskhètes, des Yézidis, des Kurdes et des Hémichis du territoire de Krasnodar, des Tadjiks, de non-ressortissants originaires d’Afrique et d’Asie, ainsi que des demandeurs d’asile et des réfugiés (art. 5 d) i)).

Le Comité recommande à l’État partie de surveiller de près la mise en œuvre de son système d’enregistrement de la résidence, de sanctionner les agents qui refusent de procéder à l’enregistrement sur la base de considérations ethniques de nature discriminatoire, et d’offrir aux victimes des recours efficaces, afin d’éliminer l’impact discriminatoire du système d’enregistrement sur les minorités ethniques.

23. Le Comité est préoccupé par des informations selon lesquelles les ressortissants de l’ex‑Union soviétique qui n’ont pas obtenu la nationalité russe au début des années 90, comme de nombreux Turcs meskhètes, Yézidis, Kurdes et Hémichis du territoire de Krasnodar, ou encore des Afghans ainsi que des Arméniens et des Russes qui ont fui l’Azerbaïdjan pour Moscou, la région de Moscou, le territoire de Krasnodar, le territoire de Stavropol et la région de Rostov entre 1992 et 1998, ne pourraient bénéficier de la procédure simplifiée d’octroi de la citoyenneté russe prévue à l’article 14 de la loi fédérale de 2002 sur la citoyenneté de la Fédération de Russie s’ils ne peuvent prouver qu’ils ont fait enregistrer leur lieu de résidence, et seraient tenus de se soumettre, depuis l’entrée en vigueur le 1er novembre 2002 de la loi fédérale sur le statut juridique des ressortissants étrangers dans la Fédération de Russie, à la même procédure contraignante, voire, selon certaines allégations, arbitraires, de délivrance de permis de résidence temporaire, que tous les autres ressortissants étrangers ou apatrides fondée sur des quotas par région (art. 5 d) i) et iii)).

Le Comité recommande à l’État partie de faciliter l’accès de tous les ressortissants de l’ex ‑Union soviétique, quelle que soit leur origine ethnique, à l’enregistrement du lieu de résidence et à la citoyenneté russe au moyen d’une procédure simplifiée.

24. Le Comité note avec préoccupation que les changements apportés récemment à la législation fédérale portant réglementation de l’utilisation des terres, des forêts et des plans d’eau, en particulier les codes révisés de la terre (2001) et des forêts (2006) ainsi que le Code de l’eau adopté récemment, privent les peuples autochtones de leur droit d’accès privilégié, gratuit et non concurrentiel à la terre, à la faune et aux ressources biologiques et aquatiques dont dépendent leurs activités économiques traditionnelles, et que l’octroi à des entreprises privées de licences les autorisant à entreprendre certaines activités telles que l’abattage du bois, l’extraction des ressources souterraines et la construction de pipelines ou de barrages hydroélectriques aboutit à la privatisation et à l’appauvrissement de territoires traditionnellement occupés par des peuples autochtones (art. 5 d) v)).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures législatives et autres qui s’imposent pour mettre en œuvre efficacement la loi fédérale sur les territoires réservés à l’utilisation traditionnelle des ressources naturelles (2001), de réintroduire le principe d’exploitation gratuite des terres par les peuples autochtones dans le C ode révisé de la terre et la loi sur les territoires réservés à l’utilisation traditionnelle des ressources naturelles ainsi que le pri ncipe d’accès privilégié et non concurrentiel aux ressources naturelles dans les C odes des forêts et de l’eau; d’obtenir le consentement en connaissance de cause des communautés autochtones et de donner la priorité à leurs besoins spécifiques avant d’octroyer à des entreprises privées des licences les autorisant à entreprendre des activités économiques sur des territoires traditionnellement occupés ou utilisés par ces communautés; de veiller à ce que les contrats de licence prévoient d’indemniser suffisamment les communautés touchées, et de retirer son appui au projet de construction du barrage d’Evenki et aux autres projets d’envergure qui menacent le mode de vie traditionnel des peuples autochtones.

25. Le Comité est préoccupé par des informations selon lesquelles les travailleurs non citoyens et les membres de minorités ethniques seraient souvent exploités et victimes de discrimination à l’embauche (art. 5 e) i)).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour protéger les non ‑citoyens et les membres de communautés ethniques de l’exploitation ainsi que de la discrimination à l’embauche, en offrant par exemple aux victimes des recours efficaces et en formant les juges et les inspecteurs du travail à l’application des articles 2 et 3 du Code du travail.

26. Le Comité est préoccupé par la destruction, dans de nombreuses villes et régions de l’État partie, de campements de Roms, souvent en application de décisions de justice ordonnant la démolition de logements construits illégalement, ainsi que par les répercussions disproportionnées que ces démolitions et expulsions forcées peuvent avoir sur les familles roms concernées (art. 5 e) iii)).

Le Comité recommande à l’État partie de revoir sa politique de démolition des campements de Roms construits illégalement lorsque les logements existent depuis longtemps, de légaliser les campements existants dans la mesure du possible, et d’offrir d’autres logements, convenables, chaque fois que des Roms sont expulsés par la force.

27. Le Comité note avec préoccupation les informations portées à sa connaissance selon lesquelles les enfants appartenant à des minorités ethniques, en particulier les Roms, seraient victimes de ségrégation et placés dans des classes de rattrapage, ou encore se seraient vu refuser l’accès à l’éducation par les autorités scolaires locales au motif que leurs parents n’avaient pas pu enregistrer leur lieu de résidence, en dépit d’instructions contraires du Ministère fédéral de l’éducation (art. 5 e) v)).

Le Comité recommande à l’État partie de réexaminer soigneusement les critères d’orientation des enfants dans les classes de rattrapage et de prendre des mesures efficaces pour veiller à ce que les enfants appartenant à des minorités ethniques, y compris les Roms, soient pleinement intégrés dans l’enseignement général. Il lui recommande en outre de veiller à ce que les autorités scolaires locales admettent tous les enfants, quels que soient leur origine ethnique et le statut de leurs parents au regard de l’enregistrement de la résidence.

28. Le Comité note l’absence d’informations sur les plaintes et les décisions de justice dans le cadre de procédures civiles ou administratives relatives à des actes de discrimination raciale (art. 6).

Le Comité prie l’État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des informations à jour sur le nombre de plaintes dénonçant des actes de discrimination raciale et sur les décisions prises par des tribunaux civils et administratifs. Il rappelle à l’État partie que l’absence de plainte s et de procédure s judiciaire s pour discrimination raciale traduit peut-être uniquement la méconnaissance, par les victimes, des recours judiciaires existants ou le peu de volonté des autorités de faire en sorte que ces recours soient utilisés. À cet égard, le Comité appelle l’État partie à veiller à ce que les victimes de discrimination raciale aient accès à des recours judiciaires efficaces pour demander réparation, et à informer le public de l’ existence de ces recours .

29. Le Comité est préoccupé par l’augmentation des comportements racistes et xénophobes, en particulier chez les jeunes Russes (art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier encore ses campagnes d’éducation et de sensibilisation pour combattre les préjugés contre les minorités ethniques et promouvoir le dialogue interethnique et la tolérance au sein de la société, en particulier chez les jeunes Russes .

30. Le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille de 1990 ainsi que la Convention no 169 (1989) de l’Organisation internationale du Travail concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants.

31.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée (A/CONF.189/12, chap. I). Il demande instamment à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action et autres mesures prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

32.Le Comité recommande à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, il cite la résolution 61/148 de l’Assemblée générale, dans laquelle celle-ci a demandé instamment aux États parties à la Convention d’accélérer leurs procédures internes de ratification de l’amendement […] et d’informer par écrit le Secrétaire général, dans les meilleurs délais, de leur acceptation de cet amendement.

33.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports accessibles au public dès leur présentation et de diffuser de même les conclusions adoptées par le Comité à l’issue de l’examen de ces rapports.

34. Le Comité recommande à l’État partie de mener de larges consultations avec les organisations de la société civile œuvrant à la protection des droits de l’homme, et en particulier à la lutte contre la discrimination raciale, en vue de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

35. Le Comité invite l’État partie à mettre son document de base à jour conformément aux directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier les instructions relatives au document de base commun, qui ont été adoptées par les organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme à la cinquième réunion intercomités, tenue en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.4).

36.En application du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 du règlement intérieur du Comité, tel que modifié, le Comité invite l’État partie à l’informer, au plus tard le 15 août 2009, des mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre les recommandations figurant aux paragraphes 16, 18, 23 et 26 ci-dessus.

37.Le Comité recommande que les vingtième à vingt-deuxième rapports périodiques de l’État partie soient soumis en un seul document, attendu le 6 mars 2012, et soient établis en tenant compte des directives pour l’établissement des documents se rapportant à la Convention (CERD/C/2007/1), telles qu’elles ont a été adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session, et que ce document constitue une mise à jour du rapport précédent et porte sur tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

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