NATIONS

UNIES

CRC

Convention relative aux

droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/MEX/CO/38 juin 2006

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante-deuxième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales: Mexique

1.Le Comité a examiné le troisième rapport périodique du Mexique (CRC/C/125/Add.7) à ses 1140e et 1141e séances (voir CRC/C/SR.1140 et 1141), tenues le 23 mai 2006, et a adopté les observations finales ci‑après à sa 1157e séance (voir CRC/C/SR.1157), tenue le 2 juin 2006.

A. Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du troisième rapport périodique de l’État partie, qui est conforme aux directives générales formulées à cet égard, ainsi que des réponses écrites à sa liste des points à traiter (CRC/C/MEX/Q/3). Il se félicite également du dialogue franc et ouvert qu’il a eu avec la délégation de l’État partie et qui lui a permis de mieux comprendre la complexité de la situation des enfants au Mexique.

B. Mesures de suivi adoptées par l’État partie et progrès réalisés

3.Le Comité accueille avec satisfaction les faits nouveaux positifs qui sont intervenus au cours de la période considérée, notamment:

a)Les modifications apportées aux articles 4 et 18 de la Constitution du Mexique, en 2000 et 2006 respectivement, qui renforcent la protection des droits de l’enfant;

b)La promulgation en 2000 de la loi sur la protection des droits des enfants et des adolescents;

c)La réforme en 2003 du Code pénal fédéral, du Code fédéral de procédure pénale, de la loi fédérale contre la criminalité organisée, de la loi fédérale portant prévention et élimination de la discrimination et de la loi établissant les règles minima relatives à la réinsertion sociale des condamnés;

d)La criminalisation de la violence familiale dans 15 États;

e)L’adoption du Programme d’action 2002‑2010 intitulé «Un Mexique digne des enfants et des adolescents», après consultation des organisations de la société civile, d’universitaires et d’experts;

f)La ratification, le 15 mars 2002, du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés;

g)La ratification, le 4 mars 2003, du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants;

h)La ratification, en 2000, de la Convention de l’OIT no 182 concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, 1999.

C. Principaux sujets de préoccupation, suggestions et recommandations

1. Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44, par. 6, de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

4.Tout en notant que la première partie du rapport de l’État partie fait expressément référence à ses observations finales antérieures, le Comité regrette que certaines de ses recommandations (voir CRC/C/15/Add.112) portant sur le deuxième rapport périodique de l’État partie (CRC/C/65/Add.6 et CRC/C/65/Add.16) n’aient pas été suffisamment prises en considération, notamment celles concernant les disparités sociales et les groupes vulnérables, la non‑discrimination, les enfants autochtones, l’exploitation économique et sexuelle d’enfants et la traite d’enfants migrants.

5. Le Comité engage instamment l’ État partie à s’employer à donner suite à ses recommandations antérieures, qui n’ont été que partiellement mises en œuvre, voire qui ne l’ont pas été du tout, ainsi qu’à celles formulées dans les présentes observations finales.

Législation et application

6.Tout en accueillant avec satisfaction les mesures prises pour aligner la législation nationale sur la Convention et d’autres normes internationales, le Comité s’inquiète du manque d’efficacité des mesures prises pour donner effet aux droits visés dans la Convention et permettre à leurs titulaires de les faire valoir. Il note aussi avec inquiétude que les textes de loi ne sont pas tous pleinement conformes à la Convention, en particulier les codes civils et les codes de procédure civile qui ne donnent pas aux enfants la possibilité d’être entendus par les autorités judiciaires. Le Comité est d’autre part préoccupé par le fait que la structure fédérale de l’État partie rend la mise en œuvre des lois complexe, en risquant de gêner l’application intégrale au niveau des États des nouvelles lois adoptées. Notamment, nombre de lois, comme la loi de 2000 sur la protection des droits des enfants et des adolescents, ne sont toujours pas intégralement transposées dans les législations des États.

7. Le Comité exhorte l’État partie à prendre toutes les mesures voulues afin que toutes les lois fédérales et toutes les lois des États fédérés soient alignées sur la Convention et les normes internationales applicables et dûment mises en œuvre. En outre, le Comité prie instamment l’État partie de veiller à ce que toutes les lois des États fédérés soient alignées sur les lois fédérales, notamment sur la loi de 2000 sur la protection des droits des enfants et des adolescents, et à ce que tous les États mettent en œuvre à titre prioritaire, les réformes administratives et institutionnelles nécessaires.

Coordination

8.Le Comité prend acte avec satisfaction de la création du Conseil national de l’enfance et de l’adolescence, qui est chargé de coordonner la mise en œuvre des objectifs nationaux fixés en faveur de l’enfance. Le Comité regrette cependant que le Conseil ne joue qu’un rôle modeste dans la conception de la politique des pouvoirs publics en faveur des droits de l’enfant; que, faute de ressources et de base législative, il ne soit pas doté d’un mandat formel; que des représentants de la société civile ne participent pas à ses travaux; et qu’il n’existe pas de coordination entre les autorités fédérales et les autorités des États.

9. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires en vue de confier au Conseil national de l’enfance et de l’adolescence un rôle plus dynamique dans la conception des politiques des pouvoirs publics de manière à donner effet à l’ensemble des dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant, notamment en assignant au Conseil un rôle officiel consacré par un texte de loi et un budget appropriés, et en vue d’assurer une représentation de la société civile au sein du Conseil.

Mécanismes indépendants de suivi

10.Tout en se félicitant de l’action de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) en faveur des droits de l’enfant, le Comité regrette que les recommandations qu’il a émises antérieurement (voir CRC/C/15/Add.112, par. 11) à propos du mandat et de l’indépendance de la Commission nationale des droits de l’homme et de la dotation en ressources des bureaux des 32 procureurs nommés dans les États pour assurer la défense des droits du mineur et de la famille n’aient pas été pleinement appliquées. Le Comité note par ailleurs que les comités de suivi et de surveillance de l’application de la Convention n’ont qu’une marge de manœuvre limitée, qu’ils ne disposent pas de ressources suffisantes, qu’ils sont peu connus et qu’ils n’ont pas le pouvoir d’agir efficacement. Il regrette aussi que ces comités n’aient pas été créés dans tous les États.

11. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de modifier les lois fédérales et les lois des États relatives à la protection des droits de manière à renforcer et à améliorer les mécanismes de responsabilisation, notamment en autorisant la Commission nationale des droits de l’homme à recevoir des plaintes émanant d’enfants. Il recommande également la création dans tous les États de la République d’un comité du Système national de suivi et de surveillance de l’application de la Convention. Le Comité renvoie l’État partie à son Observation générale n o  2 (2002) sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant. À cet égard, l’État partie est invité à solliciter l’assistance technique notamment du Haut ‑Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et de l’Institut interaméricain de l’enfance.

Plan d’action national

12.Le Comité prend note du Programme d’action 2002‑2010 intitulé «Un Mexique digne des enfants et des adolescents», qui s’inscrit dans le prolongement des accords conclus lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants en 2002. Le Comité recommande à l’État partie de communiquer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur le budget et la mise en œuvre du Programme d’action, de même que sur les résultats obtenus. Le Comité recommande également à l’État partie de promouvoir l’adoption d’un programme national d’ensemble pour la protection des droits des enfants et des adolescents, tel qu’il a été institué en vertu de l’article 7 de la loi sur la protection des droits des enfants et des adolescents.

Collecte de données

13.Tout en prenant note de certaines améliorations apportées au système de collecte de données, le Comité relève avec préoccupation que les données disponibles ne permettent pas de procéder à une analyse globale et systématique de la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Les données existantes ne sont pas systématiquement ventilées au niveau des États et au niveau local, de sorte qu’il est difficile de percevoir les décalages d’une région à l’autre et d’agir en conséquence. De plus, le Comité s’inquiète du manque de données à jour et ventilées sur le nombre et la localisation des enfants non scolarisés, des enfants de 6 à 14 ans qui travaillent, des cas de violence et de sévices infligés aux enfants, des enfants exploités à des fins commerciales et sexuelles, des enfants victimes de la traite des êtres humains, des enfants privés de liberté, des enfants migrants et des enfants issus de groupes autochtones et des enfants qui n’ont pas été enregistrés à leur naissance.

14. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à s’employer à mettre au point un système de collecte globale de données portant sur tous les enfants âgés de moins de 18 ans et ventilées par sexe et par groupe d’enfants nécessitant une protection spéciale. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer des indicateurs qui permettent de suivre et d’évaluer de fait les progrès réalisés dans l’application de la Convention et d’apprécier les effets des politiques concernant les enfants. À cet égard, l’État partie est encouragé à solliciter l’assistance technique de l’UNICEF, de la Division de statistique de l’ONU et de l’Institut interaméricain de l’enfance.

Ressources consacrées aux enfants

15.Le Comité note avec préoccupation que, bien que les crédits affectés à l’action sociale aient quelque peu augmenté au cours des dernières décennies, les crédits alloués aux politiques en faveur de l’enfance sont faibles et demeurent insuffisants, pour ce qui est en particulier de la santé et de l’éducation.

16. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts de manière à accroître sensiblement, en valeur nominale et en volume, la part du budget allouée à la réalisation des droits des enfants «dans toutes les limites des ressources dont il dispose», en portant une attention particulière aux enfants qui appartiennent à des groupes économiquement défavorisés.

Formation/diffusion de la Convention

17.Le Comité prend note de l’élaboration de politiques publiques interinstitutionnelles destinées à promouvoir les droits des enfants, ainsi que des activités conduites par la Commission nationale des droits de l’homme afin d’ouvrir un dialogue public, et tout particulièrement des programmes de formation du personnel judiciaire organisés en 1998 et 2003, du Programme de promotion des droits des enfants dont sont chargés des «DIFusores Infantiles» et qui relève du Système national pour le développement intégral de la famille (DIF), et du Programme des enfants promoteurs. Le Comité demeure toutefois préoccupé par le fait que les professionnels qui travaillent avec ou pour des enfants de même que la population en général, singulièrement les enfants eux‑mêmes, connaissent mal la Convention, et il regrette que celle‑ci ne soit pas disponible dans les langues vernaculaires.

18. Le Comité encourage l’État partie:

a) À prendre des mesures efficaces pour diffuser des informations sur la Convention et son application auprès des enfants et des parents, de la société civile et des pouvoirs publics dans tous les secteurs et à tous les niveaux, et à rechercher à cette fin la participation active des médias;

b) À élaborer des programmes de formation systématique et continue dans le domaine des droits de l’homme, et notamment des droits des enfants, à l’intention de tous ceux qui travaillent pour des enfants ou avec des enfants (par exemple, juges, avocats, responsables de l’application des lois, agents publics, agents des administrations locales, enseignants, travailleurs sociaux, personnel de santé) et en particulier à l’intention des enfants eux ‑mêmes;

c) À fournir des informations sur la Convention dans la mesure du possible dans les langues vernaculaires et compte tenu du contexte culturel, et à les diffuser largement auprès des communautés autochtones.

Coopération avec la société civile

19.Le Comité regrette que les organisations non gouvernementales ne soient pas systématiquement consultées lors de l’élaboration et de l’établissement des politiques et des programmes relatifs aux droits de l’enfant, pas plus que dans la mise en œuvre de ces programmes et de la Convention.

20. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à renforcer systématiquement le processus de participation et à associer activement les organisations non gouvernementales compétentes à l’élaboration, à l’établissement et à la mise en œuvre des politiques, de la législation et des programmes.

2. Définition de l’enfant (art. premier de la Convention)

21.Le Comité est préoccupé par le fait que l’âge minimum légal du mariage est bas et qu’il diffère selon qu’il s’agit des filles (14 ans) ou des garçons (16 ans).

22. Le Comité encourage l’État partie à relever l’âge minimum du mariage aussi bien pour les filles que pour les garçons et à fixer le même âge pour les deux sexes à un niveau internationalement acceptable. Il est également conseillé à l’État partie de conduire des campagnes de sensibilisation et de prendre d’autres mesures pour prévenir les mariages précoces. À cet égard, le Comité renvoie à la recommandation du Comité des droits économiques, sociaux et culturels (voir E/C.12/CO/MEX/4, par. 40).

3. Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non ‑discrimination

23.Le Comité est vivement préoccupé par les profondes disparités relevées dans l’État partie quant à la mise en œuvre des droits consacrés dans la Convention, ainsi que le montrent une série d’indicateurs sociaux comme la scolarisation et l’achèvement de la scolarité, les taux de mortalité infantile et l’accès aux soins de santé, autant d’indicateurs qui révèlent la persistance d’une discrimination à l’encontre des enfants autochtones, des filles, des enfants handicapés, des enfants vivant dans les zones rurales et reculées et des enfants issus de familles économiquement défavorisées.

24. Compte tenu de l’article 2 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts, à travers notamment des campagnes de sensibilisation, pour prévenir et éliminer toutes les formes de discrimination de fait à l’encontre des enfants autochtones, des enfants handicapés, des filles, des enfants vivant dans des zones rurales et reculées et des enfants issus de familles économiquement défavorisées.

Intérêt supérieur de l’enfant

25.Le Comité constate avec préoccupation que la législation et les politiques nationales ne tiennent pas dûment compte du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, dont la population n’appréhende pas vraiment la portée.

26. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour mieux faire prendre conscience de la signification et de l’application dans la pratique du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et faire en sorte que l’article 3 de la Convention soit dûment reflété dans la législation, les procédures judiciaires et les mesures administratives, en ce qui concerne par exemple l’affectation des fonds publics.

Respect des opinions de l’enfant

27.Le Comité accueille avec satisfaction les efforts que l’État partie déploie pour promouvoir et mettre en œuvre le droit de l’enfant d’exprimer ses opinions et de participer activement à la vie de la société à divers niveaux. En particulier, il prend note avec intérêt des sessions du Parlement des enfants tenues en 2003 et 2004 et de la Consultation des enfants et des adolescents organisée en 2003. Il demeure toutefois préoccupé par la persistance dans l’État partie d’attitudes traditionnelles qui, notamment, restreignent le droit des enfants à la participation et leur droit d’exprimer leurs opinions. Il note avec inquiétude que les enfants n’ont que peu de possibilités de participer aux procédures de prise de décisions qui les concernent et d’exprimer leurs opinions, en particulier dans les tribunaux, les écoles et les communautés.

28. Compte tenu de l’article 12 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:

a) D’intensifier ses efforts pour promouvoir au sein de la famille, des écoles et d’autres institutions, le respect des opinions des enfants, en particulier des filles, et pour faciliter l’expression des opinions des enfants sur toutes les questions les concernant;

b) De réviser les codes de procédure pénale afin que les enfants soient entendus dans les procédures judiciaires les concernant;

c) De renforcer les campagnes nationales de sensibilisation de manière à faire évoluer les attitudes traditionnelles qui restreignent le droit des enfants à la participation;

d) D’apprécier périodiquement la mesure dans laquelle les enfants prennent part à l’élaboration et à l’évaluation des lois et des politiques qui les concernent, à la fois au niveau national et au niveau local, et d’évaluer dans quelle mesure les opinions des enfants sont prises en considération, notamment leur influence sur les politiques et les programmes qui les concernent.

Droit à la vie, à la survie et au développement

29.Le Comité note avec préoccupation que le rapport de l’État partie ne contient pas d’informations sur la situation des enfants déplacés à l’intérieur du pays à la suite du conflit qui a pris fin en 1994, ni sur la situation actuelle d’insécurité qui règne dans certaines zones du pays et qui pourrait avoir des conséquences sur le droit à la vie, à l’accès aux soins de santé et à l’éducation.

30. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour protéger les droits de tous les enfants déplacés à l’intérieur du territoire et des enfants vivant dans des zones où règne l’insécurité, en particulier le droit à la vie, à la santé et à l’éducation.

4. Droits civils et libertés (art. 7, 8, 13 à 17, 19 et 37 a) de la Convention)

Enregistrement des naissances

31.Tout en notant les efforts que fait l’État partie pour que toutes les naissances soient enregistrées et qu’un acte de naissance soit établi pour chaque enfant, y compris à travers l’organisation de services de l’état civil mobiles, le Comité constate avec préoccupation que, dans l’État partie, un grand nombre d’enfants, en particulier des enfants autochtones et des enfants vivant dans des zones reculées, ne possèdent pas d’acte de naissance.

32. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts afin que tous les enfants soient enregistrés gratuitement, en portant une attention particulière aux enfants qui n’ont pas été enregistrés à la naissance, aux enfants autochtones et aux enfants qui vivent dans des zones reculées, en faisant appel à des dispositifs innovants et accessibles. Le Comité recommande en outre à l’État partie de mener une action ciblée et novatrice afin de faire prendre conscience de l’importance qu’il y a à déclarer les enfants à l’état civil afin qu’ils jouissent pleinement de leurs droits.

Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

33.Le Comité est profondément préoccupé par les informations faisant état d’actes de torture et de traitements cruels et dégradants, dirigés en particulier contre des enfants des rues, des enfants migrants, des groupes d’adolescents et des groupes d’enfants marginaux, et contre des enfants victimes d’exploitation sexuelle et économique. Il s’inquiète en outre de ce que la plupart des cas ne sont pas signalés ou encore de ce qu’ils ne font pas l’objet de poursuites faute d’instances compétentes et de procédures appropriées pour enregistrer et instruire les plaintes pour actes de torture et traitements cruels et dégradants à l’encontre d’enfants.

34. Le Comité réitère sa recommandation antérieure (CRC/C/15/Add.112, par. 23) et celle du Comité contre la torture (A/52/44, par. 166 à 170) et prie instamment l’État partie:

a) D’adopter des mesures pour prévenir et éliminer toutes les formes de violence institutionnelle, notamment la torture, les traitements cruels, inhumains et dégradants;

b) De renforcer ses mécanismes judiciaires pour que les plaintes relatives aux brutalités, aux mauvais traitements et aux sévices infligés à des enfants par la police soient dûment instruites;

c) De dûment enquêter sur les cas de violence et de sévices à l’encontre d’enfants de manière à ce que leurs auteurs ne demeurent pas impunis;

d) De veiller à ce que les enfants victimes bénéficient de services appropriés en matière de prise en charge, réadaptation et réinsertion sociale;

e) De poursuivre ses efforts tendant à former des professionnels qui travaillent avec et pour les enfants, notamment les autorités de police, les travailleurs sociaux, les juges et le personnel de santé, à l’identification, au signalement et à la gestion des cas de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le Comité renvoie l’État partie aux Lignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels établies par le Conseil économique et social (résolution 2005/20 du Conseil économique et social, du 22 juillet 2005).

Châtiments corporels

35.Le Comité s’inquiète vivement de ce que les châtiments corporels demeurent licites au foyer et qu’ils ne soient pas expressément interdits dans les écoles, les prisons et les centres assurant une protection de remplacement. Il est de plus préoccupé par le fait que la législation ne protège que de façon limitée les enfants contre la violence et les sévices et que, partant, il soit largement recouru aux châtiments corporels au sein de la famille, dans les écoles et autres établissements.

36. Le Comité, compte tenu de son Observation générale n o  8 (2006) sur le droit des enfants à être protégés contre les châtiments corporels et autres formes de peines cruelles ou dégradantes, recommande à l’État partie:

a) De réviser toutes les lois fédérales et toutes les lois des États pertinentes de manière à interdire expressément les châtiments corporels dans tous les milieux, notamment la famille, l’école, les prisons et les centres assurant une protection de remplacement, et de veiller à ce qu’elles soient effectivement appliquées;

b) De prendre des mesures efficaces, en particulier à travers des campagnes de sensibilisation de l’opinion publique, pour promouvoir des formes de discipline positives, participatives et non violentes à la place des châtiments corporels.

5. Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 18, par. 1 et 2, 9 à 11, 19 à 21, 25, 27, par. 4, et 39 de la Convention)

Enfants privés de milieu familial

37.Le Comité prend note avec intérêt du Programme pour le renforcement de la famille qui vise à sensibiliser les parents aux droits des enfants et à consolider la cellule familiale. Il prend note également des activités du Système national pour le développement intégral de la famille (DIF), dont l’objectif est de fournir une protection d’appoint aux enfants appartenant aux groupes vulnérables, notamment à travers son programme consacré aux mineurs et ses centres d’aide au développement de l’enfant. Le Comité s’inquiète de l’absence d’informations (nombre, conditions de vie, etc.) concernant les enfants séparés de leurs parents qui vivent dans des institutions. Il relève qu’un grand nombre d’enfants sont placés dans des institutions qui sont gérées par le secteur privé et regrette que l’État n’ait pas communiqué d’information sur ces institutions et que celles‑ci échappent à sa surveillance.

38. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures existantes pour empêcher que les enfants ne soient séparés de leur famille et de prendre des mesures efficaces pour évaluer le nombre et la situation des enfants placés dans des institutions, y compris celles administrées par le secteur privé. En particulier, le Comité recommande à l’État partie de mettre au point un règlement en s’appuyant sur les droits de l’enfant et d’adopter un programme visant à consolider et à élargir les dispositifs de protection de remplacement destinés aux enfants, notamment en adoptant une législation efficace, en renforçant les structures existantes comme celles constituées par les familles élargies, en améliorant la formation du personnel et en augmentant les ressources allouées aux organes compétents. L’État partie est encouragé à solliciter à cet égard une assistance technique, notamment auprès de l’UNICEF et de l’Institut interaméricain de l’enfance.

Enfants dont un parent est incarcéré

39.Le Comité exprime de nouveau sa préoccupation à propos des enfants qui vivent dans des centres de détention avec un de leurs parents et de leurs conditions de vie, ainsi que de leur prise en charge s’ils sont séparés de leur parent placé en détention.

40. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et d’appliquer des lignes directrices précises relatives au placement d’enfants dans des centres de détention avec leurs parents (concernant en particulier l’âge des enfants, la durée du séjour, les contacts avec le monde extérieur et les possibilités de circuler à l’intérieur et à l’extérieur de l’établissement) lorsque ce placement est dans l’intérêt supérieur des enfants, et de veiller à ce que les conditions de vie dans les centres de détention, pour ce qui est notamment des soins de santé, conviennent au développement de l’enfant, comme le requiert l’article 27 de la Convention. Il recommande en outre à l’État partie de prévoir et de mettre en place, pour les enfants qui sont retirés des centres de détention, des dispositifs de protection de remplacement appelés à faire l’objet d’un examen régulier et qui permettent à l’enfant de conserver des relations personnelles et des contacts directs avec son parent qui reste incarcéré.

Adoption

41.Le Comité note avec préoccupation:

a)Qu’il n’existe pas de mécanisme central chargé de contrôler l’enregistrement des adoptions;

b)Que, dans l’État partie, on comprend mal et on accepte mal que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être la considération primordiale dans toutes les procédures d’adoption;

c)Que les adoptions par des familles riches aient, semble t‑il, la priorité, sans qu’il soit dûment tenu compte de l’intérêt supérieur de l’enfant ou de ses origines culturelles;

d)Qu’il n’existe pas de mécanisme chargé de surveiller les adoptions internationales et de protéger les enfants adoptés à ce titre.

42. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De veiller à ce que sa législation et sa pratique en matière d’adoption dans le pays et à l’étranger soient alignées sur la Convention et sur la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale de 1993, que l’État partie a ratifiée en 1994;

b) De mettre en place des mécanismes efficaces chargés d’examiner, surveiller et suivre l’adoption des enfants, et de renforcer les mécanismes existants;

c) De faire en sorte que l’enfant puisse systématiquement exprimer ses opinions quant à son placement, et de veiller à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit la considération primordiale dans toutes les procédures d’adoption;

d) De faire en sorte que la personne ayant autorité pour décider si un enfant peut être adopté confirme que tous les efforts ont été déployés pour permettre à l’enfant de conserver ses liens avec sa famille [élargie] et sa communauté, et que l’adoption ne représente qu’une solution de dernier recours.

Brutalités et négligence, mauvais traitements et violence

43.Tout en prenant note du programme de traitement de la violence familiale du DIF, le Comité déplore l’absence de données sur ce phénomène et de politique nationale claire pour le combattre. À l’instar du Comité des droits économiques, sociaux et culturels (voir E/C.12/CO/MEX/4, par. 19), le Comité demeure préoccupé par le grand nombre de cas signalés de violence dans la famille et de brutalités à l’encontre d’enfants, de même que par l’absence de mesures propres à lutter contre ces pratiques graves. Le Comité est en outre préoccupé par l’absence de mesures préventives et de mesures de soutien psychologique et social en faveur des victimes.

44. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les efforts qu’il déploie actuellement pour s’attaquer aux problèmes de la violence dans la famille et de la maltraitance des enfants, notamment:

a) En veillant à élaborer et à mettre en œuvre des mesures de prévention, notamment des campagnes de sensibilisation;

b) En veillant à ce que toutes les victimes d’actes de violence aient accès à des services de conseil et d’aide à la réadaptation et à la réinsertion sociale et à ce qu’elles soient, au besoin, indemnisées;

c) En faisant en sorte que les auteurs de ces actes soient traduits en justice et bénéficient d’un programme de réinsertion;

d) En accordant aux enfants victimes d’actes de violence dans leur famille une protection appropriée.

45. Compte tenu de l’étude approfondie du Secrétaire général sur la question de la violence à l’encontre des enfants et du questionnaire connexe envoyé aux gouvernements, le Comité prend note avec appréciation des réponses écrites de l’État partie et de sa participation à la Consultation régionale pour l’Amérique latine qui s’est tenue en Argentine du 30 mai au 1 er  juin 2005. Le Comité recommande à l’État partie, en se basant sur les résultats de la Consultation régionale, de prendre des mesures, en partenariat avec la société civile, pour garantir à chaque enfant une protection contre toutes les formes de violence physique ou mentale et susciter une dynamique en faveur d’une action concrète, assortie, s’il y a lieu, de délais, en vue de prévenir et de combattre cette violence et cette maltraitance.

6. Santé de base et bien ‑être (art. 6, 18, par. 3, 23, 24, 26 et 27, par. 1 à 3, de la Convention)

Enfants handicapés

46.Tout en notant l’existence du Programme d’aide aux personnes handicapées et la création du Bureau de représentation pour la promotion et l’insertion sociale des personnes handicapées, le Comité regrette l’absence de données officielles sur le nombre d’enfants handicapés dans l’État partie et déplore le fait que des enfants handicapés continuent de subir diverses formes de discrimination. Le Comité, par ailleurs, relève avec préoccupation qu’un grand nombre d’enfants handicapés ne bénéficient d’aucune forme d’enseignement en milieu scolaire, en particulier dans des zones rurales, et qu’il n’existe pas de politique d’insertion à leur intention.

47. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour:

a) Recueillir des données et des informations sur la situation des enfants handicapés dans l’État partie et évaluer l’impact de l’action menée;

b) S’attaquer à la discrimination sous tous ses aspects, y compris la discrimination sociale et la discrimination contre les enfants handicapés en milieu rural, compte tenu des Règles pour l’égalisation des chances des handicapés (résolution 48/96 de l’Assemblée générale, annexe);

c) Assurer aux enfants handicapés les mêmes possibilités en matière d’éducation que celles offertes aux autres enfants, notamment en leur apportant l’appui voulu et en veillant à former des enseignants à la prise en charge des enfants handicapés dans les écoles ordinaires.

Santé de base et bien ‑être

48.Le Comité se félicite de la place que la santé des enfants occupe dans le Plan national de développement pour 2001‑2006 et le Programme national de santé pour 2001‑2006. Le Comité se félicite également du recul du taux de malnutrition dans les zones urbaines, de la régression des taux de mortalité chez les enfants de moins de 1 an et des taux de mortalité liée à des maladies infectieuses chez les enfants de moins de 5 ans, de même que du taux élevé de couverture vaccinale. Le Comité demeure préoccupé par les taux élevés de mortalité maternelle, l’émergence du phénomène d’obésité et la modicité de la part du PIB affectée à la santé. Le Comité demeure d’autre part vivement préoccupé par le fait que les soins de santé postnatals laissent toujours à désirer et que les taux de mortalité et de malnutrition ainsi que d’autres indicateurs de santé sont sensiblement moins bons dans les zones rurales et les zones reculées et en ce qui concerne les mères et les enfants autochtones.

49. Le Comité réitère les recommandations antérieures qu’il a formulées à l’intention de l’État partie (voir document CRC/C/15/Add.112, par. 26 et 27), en particulier celle consistant à prendre toutes les mesures nécessaires pour faire reculer les disparités régionales qui persistent dans l’accès aux soins de santé, ainsi que les taux élevés de malnutrition parmi les enfants de moins de 5 ans et les enfants d’âge scolaire, notamment dans les zones rurales et les zones reculées et chez les enfants autochtones. Il recommande également de mettre au point des programmes d’intervention pour faire face aux nouveaux défis qui découlent de la mondialisation et de l’urbanisation, à savoir l’obésité chez les enfants et la salubrité du milieu.

Santé des adolescents

50.Tout en relevant un recul du nombre de grossesses précoces, le Comité demeure préoccupé face à la prévalence des suicides dans les communautés autochtones, le pourcentage élevé du nombre de grossesses précoces et d’infections sexuellement transmissibles (IST), de même que par l’absence de programmes destinés à promouvoir l’hygiène sexuelle, la santé génésique et la santé mentale.

51. Le Comité recommande à l’État partie de porter une attention particulière à la santé des adolescents, en tenant compte de son Observation générale n o  4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l’enfant. En particulier, le Comité recommande à l’État partie:

a) De renforcer l’éducation pour la santé sexuelle et la santé génésique à l’intention des adolescents, singulièrement dans les établissements scolaires, de manière à réduire l’incidence des grossesses précoces et des infections sexuellement transmissibles, et de garantir aux adolescentes enceintes l’assistance nécessaire et l’accès aux soins de santé et à l’éducation sanitaire;

b) De renforcer les programmes axés sur les problèmes de santé mentale, comme les suicides chez les enfants et les adolescents;

c) De solliciter la coopération de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’UNICEF.

VIH/sida

52.Le Comité se félicite du Programme d’action pour la prévention du VIH/sida et des infections sexuellement transmissibles et la lutte contre ces maladies, 2001‑2006; du recul du taux de prévalence du VIH/sida, en particulier dans le cas des infections néonatales; ainsi que de l’engagement pris d’assurer un libre accès aux médicaments antirétroviraux. Il demeure cependant préoccupé par l’absence de données ventilées par âge sur les enfants infectés par le VIH ou atteints du sida et sur les enfants que le VIH/sida a rendus orphelins; par le niveau assez élevé du taux de prévalence de l’infection parmi les adolescents; et par l’absence de stratégies pour la prise en charge des enfants que le VIH/sida a rendus orphelins et d’autres enfants vulnérables.

53. Le Comité recommande à l’État partie, compte tenu de son Observation générale n o  3 (2003) sur le VIH/sida et les droits de l’enfant et des Directives internationales concernant le VIH/sida et les droits de l’homme:

a) De renforcer sa lutte contre le VIH/sida, notamment par des campagnes de sensibilisation;

b) De prévenir la discrimination à l’encontre des enfants infectés par le VIH ou atteints du sida;

c) D’assurer aux enfants qui en ont besoin l’accès, sans nécessairement le consentement parental, à des services de conseil qui leur soient adaptés et qui restent confidentiels;

d) De poursuivre et de renforcer ses efforts pour prévenir la transmission du VIH/sida et autres IST de la mère à l’enfant;

e) D’assurer le libre accès aux médicaments antirétroviraux;

f) D’élaborer à l’intention des enfants de parents décédés du VIH/sida et d’autres enfants vulnérables des programmes de protection et d’assistance;

g) De rechercher à cet effet une assistance internationale auprès notamment du Programme commun des Nations Unies sur le sida (ONUSIDA), du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et de l’UNICEF.

Niveau de vie

54.Le Comité se félicite du Programme Oportunidades (Chances), dont l’objectif est de lutter contre la pauvreté. Il demeure cependant fort préoccupé par le nombre élevé d’enfants qui vivent dans des conditions de pauvreté, ainsi que par la persistance et l’ampleur des disparités sociales, nonobstant la croissance économique que connaît le pays. Il note en outre que les enfants dont les parents travaillent bénéficient de la sécurité sociale à travers l’Institut mexicain de la sécurité sociale (IMSS). Il note également que les enfants scolarisés ont droit à une prise en charge médicale en cas d’accident survenu dans l’établissement scolaire. Le Comité s’inquiète toutefois du nombre élevé d’enfants qui ne sont pas couverts par le régime de sécurité sociale, comme par exemple les enfants dont les parents sont au chômage ou travaillent pour leur compte.

55.Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures destinées à faire reculer la pauvreté et les disparités sociales de manière à atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement, et de veiller à ce que tous les enfants aient, dans des conditions d’égalité, dûment accès à des soins de santé, à des services sociaux, à l’alimentation, à un toit et à une éducation de qualité. En particulier, l’État partie est encouragé à prendre toutes les mesures voulues pour faire en sorte que les programmes de protection sociale, comme le Programme Oportunidades, bénéficient à tous les enfants qui en ont besoin et produisent un effet positif sur la réalisation des droits humains des familles bénéficiaires.

7. Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29 et 31 de la Convention)

Éducation, notamment formation et orientation professionnelles

56.Le Comité accueille avec satisfaction la mise en place du Programme Oportunidades et du Programme de lutte contre le retard dans l’enseignement initial et l’éducation de base, la révision en 2001 de l’article 3 de la Constitution qui consacre l’enseignement préscolaire obligatoire pour tous dès 2008/09, ainsi que les mesures prises pour améliorer la qualité de l’enseignement, notamment dans les zones reculées. Le Comité est toutefois préoccupé par la persistance de taux de scolarisation bas, en particulier parmi les migrants et les enfants autochtones; par la modicité des ressources allouées à l’éducation; par les disparités énormes entre les zones urbaines et les zones rurales pour ce qui est de la couverture et de la qualité de l’enseignement; par les taux élevés d’abandon scolaire, en particulier parmi les adolescents, les enfants vivant en milieu rural, les enfants autochtones et les enfants migrants; et par la piètre qualité de l’enseignement. Les insuffisances de l’éducation bilingue interculturelle dans les zones habitées par les autochtones sont elles aussi un sujet de préoccupation, car elles interviennent dans le taux d’abandon scolaire dans ces zones. Le fait que les jeunes délinquants n’ont pas accès à des programmes éducatifs est lui aussi préoccupant. Le Comité note par ailleurs avec inquiétude que les écoles maternelles ne disposent pas des ressources humaines et matérielles voulues pour être gratuites et accessibles pour tous d’ici à 2008.

57. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’accroître les crédits budgétaires et de prendre des mesures effectives pour assurer un enseignement de qualité gratuit à tous les niveaux de l’enseignement primaire et secondaire, dans toutes les régions;

b) De redoubler d’efforts afin de combler à travers le pays les lacunes quant à la couverture et à la qualité de l’enseignement, en particulier en améliorant la formation des enseignants et le taux d’encadrement;

c) De renforcer les mesures prises pour réduire le taux d’abandon scolaire parmi les enfants autochtones, en particulier en leur assurant une éducation bilingue et biculturelle;

d) De prendre des mesures pour recenser les causes du taux élevé d’abandon scolaire, en particulier dans les zones rurales et l’enseignement secondaire, et s’attaquer à ce problème;

e) De renforcer les programmes éducatifs et les programmes de formation professionnelle, notamment à l’intention des enfants qui ne suivent pas le cursus scolaire habituel, en particulier les enfants migrants;

f) De veiller à ce que les jeunes délinquants aient accès à des programmes éducatifs et à des programmes de formation professionnelle adéquats;

g) De dégager les ressources nécessaires pour que tous les enfants du pays aient effectivement accès à un enseignement préscolaire de qualité d’ici à 2008.

Sport et loisirs

58.Le Comité note avec préoccupation que les activités récréatives, en particulier les équipements sportifs et les terrains de jeux, font défaut et que les ressources et les infrastructures sont insuffisantes pour garantir le droit aux activités sportives et aux loisirs. Le Comité note avec préoccupation le lien qui existe entre la non-application de ce droit et l’ampleur que prend le phénomène d’obésité chez les enfants.

59. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que tous les enfants aient accès aux activités sportives et récréatives:

a) En augmentant le nombre d’heures consacrées aux activités sportives dans les établissements scolaires et la qualité des programmes y afférents;

b) En mettant au point en matière d’activités sportives et récréatives des programmes spécifiques à l’intention des enfants et des adolescents;

c) En augmentant les ressources allouées au développement des infrastructures et des activités récréatives et culturelles.

8. Mesures spéciales de protection (art. 22, 30, 38, 39, 40, 37 b) à d), 32 à 36 de la Convention)

Enfants réfugiés

60.Le Comité prend note du lancement en 2002 du Programme de protection et d’assistance en faveur des enfants non accompagnés demandeurs d’asile et de la signature en 2004 avec les États‑Unis d’Amérique du Mémorandum d’accord sur le rapatriement de Mexicains dans des conditions de sécurité, d’ordre, de dignité et d’humanité. Le Comité demeure toutefois préoccupé par le nombre élevé d’enfants non accompagnés qui, du Mexique, sont renvoyés dans leur pays d’origine, et aussi par l’absence de mesures de protection à l’intention des enfants migrants et des enfants réfugiés non accompagnés. Il est en outre préoccupé par le grand nombre d’enfants non accompagnés qui sont renvoyés au Mexique et par le fait que l’État partie n’est pas en mesure de tous les protéger et réinsérer.

61. Le Comité recommande à l’État partie, compte tenu de son Observation générale n o  6 (2005) relative au traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine, de prendre les mesures nécessaires pour:

a) Faire en sorte qu’un cadre juridique et pratique de tutelle à l’intention des enfants étrangers non accompagnés soit mis au point;

b) Recenser les enfants non accompagnés et les enfants demandeurs d’asile qui se trouvent dans le grand flux migratoire le long de la frontière méridionale et s’assurer qu’ils sont dûment pris en charge;

c) Accroître les moyens du DIF et de la Commission mexicaine d’aide aux réfugiés (COMAR) pour leur permettre de veiller à la protection des enfants migrants non accompagnés, notamment en organisant des programmes de formation et de sensibilisation sur les droits spécifiques et la vulnérabilité des mineurs non accompagnés;

d) Veiller à ce que les enfants demandeurs d’asile et les enfants migrants en situation irrégulière ne soient pas placés dans des centres de rétention et à ce qu’ils aient accès à des structures d’accueil et à une prise en charge spécifiques, comme celles offertes par le Centre Tapachula;

e) Faire en sorte que tous les enfants non accompagnés qui sont renvoyés dans l’État partie bénéficient dûment d’une protection et d’une prise en charge, en particulier de mesures de réinsertion sociale;

f) Ouvrir de nouvelles discussions bilatérales ou multilatérales avec les États voisins afin d’assurer dans toute la région aux enfants non accompagnés un traitement adéquat;

g) Solliciter à cet effet une assistance technique, notamment auprès du HCR.

Exploitation économique

62.Tout en prenant note des activités menées par l’État partie pour lutter contre le travail des enfants et du recul du nombre d’enfants qui travaillent, le Comité se déclare préoccupé par l’ampleur du phénomène du travail des enfants, notamment parmi les enfants autochtones, et par les déficiences des politiques fondées sur les droits destinées à protéger les enfants et les adolescents qui travaillent. Il s’inquiète en particulier du grand nombre d’enfants travailleurs domestiques, qui sont exposés à des brutalités.

63. Le Comité demande instamment à l’État partie de renforcer les mesures de lutte contre le travail des enfants. Il lui recommande:

a) De formuler, agissant en consultation, une stratégie et un plan d’action dont l’objectif serait de faire reculer le travail des enfants et de protéger les droits des enfants qui travaillent;

b) De renforcer l’inspection du travail de manière à garantir l’application effective des lois relatives au travail des enfants, notamment l’interdiction d’employer des enfants n’ayant pas atteint l’âge minimum d’admission à l’emploi;

c) De ratifier la Convention ( n o  138) de l’OIT sur l’âge minimum d’admission à l’emploi, 1973;

d) De solliciter à cet égard l’aide de l’OIT/IPEC.

Exploitation sexuelle et traite

64.Le Comité prend note avec intérêt des différents programmes et initiatives qui existent dans l’État partie pour lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants, de même que de la conclusion avec le Guatemala d’un mémorandum d’accord en la matière. Il demeure préoccupé par l’ampleur de l’exploitation sexuelle, de la traite et de l’enlèvement d’enfants dans l’État partie, notamment à Ciudad Juárez, et par l’absence, à la fois au niveau des États et au niveau fédéral, de législation qui permette de s’attaquer efficacement à ce problème.

65. Le Comité exhorte l’État partie à veiller à ce que les projets de loi sur la traite et l’exploitation sexuelle en cours d’examen au Sénat et au Congrès protègent efficacement les enfants victimes et les enfants en danger. Il recommande par ailleurs à l’État partie:

a) De procéder à une étude exhaustive afin de déterminer les causes, la nature et l’ampleur de la traite des enfants à diverses fins, notamment à des fins d’exploitation sexuelle à but commercial;

b) De réviser le Code pénal afin d’ériger en infraction pénale l’exploitation sexuelle, la traite et l’enlèvement d’enfants;

c) De renforcer les mesures et d’adopter des stratégies multidisciplinaires et multisectorielles pour prévenir et combattre la traite d’enfants et l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents;

d) De lancer des campagnes de sensibilisation, en particulier auprès des parents et des enfants;

e) De veiller à ce que les enfants victimes de la traite des êtres humains et les enfants qui ont été soumis à une exploitation sexuelle et économique soient traités comme des victimes et à ce que les auteurs de ces actes soient poursuivis;

f) De mettre en place des programmes d’aide et de réinsertion sociale appropriés à l’intention des enfants victimes d’exploitation sexuelle et/ou de la traite des êtres humains, conformément à la Déclaration et Programme d’action et à l’Engagement global adoptés par le Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales en 1996 et 2001;

h) De collaborer avec les organisations non gouvernementales qui travaillent dans ces domaines et de solliciter l’assistance technique de l’UNICEF et de l’Institut interaméricain de l’enfance, notamment.

Drogues et abus de substances

66.Tout en prenant acte de l’existence du Programme de lutte contre les toxicomanies, le Comité est préoccupé par l’ampleur de l’usage de drogues et l’abus d’alcool dans l’État partie.

67. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre les efforts déployés pour venir à bout de l’usage de drogues et de l’abus d’alcool sur son territoire, notamment:

a) En renforçant les mesures en vigueur destinées à empêcher que les drogues et autres substances soient produites dans l’État partie et introduites dans l’État partie;

b) En communiquant aux enfants des informations précises et objectives sur les conséquences nuisibles de l’abus de substances;

c) En considérant que les enfants et les adolescents qui consomment des drogues et des substances dangereuses sont des victimes et en favorisant leur accès à un traitement de désintoxication et leur réinsertion sociale, et aussi en assurant leur protection sur le plan pénal;

d) En mettant en place des services de réadaptation et de réinsertion sociale à l’intention des enfants victimes d’abus de substances;

e) En formulant un plan d’action fondé sur les droits destiné à protéger les enfants et les adolescents contre les dangers que présentent les drogues et les substances dangereuses, et en associant les enfants à sa formulation et à sa mise en œuvre.

Enfants des rues

68.Le Comité prend note de l’information donnée selon laquelle le nombre des enfants des rues a baissé ces dernières années, ainsi que du programme en faveur de l’éducation des enfants des rues intitulé «de la Calle a la Vida». Il se déclare cependant préoccupé par le fait que le nombre des enfants des rues dans l’État partie demeure élevé, par l’absence d’études et de recherches comparatives et par l’insuffisance des mesures prises pour prévenir ce phénomène et protéger ces enfants. En particulier, le Comité regrette la violence à laquelle ces enfants sont soumis, de la part tant de policiers que d’autres personnes.

69. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les efforts qu’il déploie pour fournir une assistance aux enfants des rues, notamment: soins de santé; services de réadaptation à l’intention des enfants des rues victimes de violences physiques et sexuelles, de ceux qui abusent de substances et de ceux qui souffrent de troubles mentaux; services de réconciliation avec les familles; services éducatifs, y compris une formation professionnelle et un apprentissage de l’autonomie fonctionnelle. Le Comité recommande par ailleurs à l’État partie de prendre des mesures pour prévenir les violences contre les enfants des rues et pour protéger leurs droits. Il lui recommande en outre de coopérer avec la société civile et de coordonner ses efforts avec elle, et d’entreprendre périodiquement des études comparatives sur la nature et l’ampleur du problème. L’État partie est d’autre part encouragé à solliciter une assistance technique, notamment auprès de l’UNICEF.

Administration de la justice pour mineurs

70.Le Comité prend note avec satisfaction des modifications apportées en 2005 à l’article 18 de la Constitution, qui consacrent l’établissement d’un système de justice pour mineurs unifié. À cet égard, il se félicite en particulier de la mise en place de peines de substitution à la détention, ainsi que du règlement et de la spécialisation des tribunaux. Il est toutefois préoccupé par la mise en pratique de ces dispositions, car elles exigent l’élaboration et la mise en œuvre de textes d’application dans chaque État et aussi des ressources financières et humaines supplémentaires. Le Comité est en outre préoccupé par l’extrême précarité des conditions de vie des mineurs détenus dans les commissariats de police et d’autres établissements.

71. Compte tenu des recommandations qu’il a formulées lors de sa journée de débat général consacrée à l’administration de la justice pour mineurs, le Comité invite instamment l’ État partie à veiller à ce que les normes en matière de justice pour mineurs soient intégralement appliquées, en particulier les articles 37 b), 40 et 39 de la Convention, ainsi que l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing) et les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad). En particulier, le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les États mettent en œuvre à titre prioritaire l’article 18 révisé de la Constitution;

b) De s’assurer que les garanties d’une procédure régulière, notamment l’audition par un juge, sont observées, avant que la privation de liberté ne devienne effective;

c) Compte tenu de l’article 18 de la Constitution, qui fixe à 14 ans l’âge minimum pour la privation de liberté, d’envisager de porter au même niveau l’âge minimum de la responsabilité pénale;

d) De veiller à ce que les personnes âgées de moins de 18 ans ne soient pas traitées en justice en adultes;

e) De concevoir et de mettre en œuvre des peines de substitution à la détention provisoire et aux autres formes de détention afin que la privation de liberté ne soit vraiment qu’une mesure de dernier ressort et soit d’une durée aussi brève que possible;

f) D’élaborer et de mettre en œuvre des programmes socioéducatifs adéquats et des dispositifs appropriés à l’intention des jeunes délinquants, en particulier un système de médiation et de travaux d’intérêt général;

g) De procéder à une étude approfondie des conditions de détention et de prendre les mesures nécessaires pour améliorer considérablement les conditions de vie des mineurs privés de liberté;

h) De poursuivre et de renforcer la formation sur la Convention et les autres règles pertinentes qui est dispensée aux responsables de l’administration de la justice pour mineurs;

i) De solliciter l’assistance, notamment, du Haut ‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, du Groupe de coordination interinstitutions dans le domaine de la justice pour mineurs, des institutions régionales et de l’UNICEF.

Enfants autochtones

72.Tout en se félicitant des mesures prises pour encourager les enfants autochtones à fréquenter les établissements scolaires, le Comité demeure vivement préoccupé par le fait que les enfants autochtones ne jouissent pas pleinement de leurs droits, singulièrement chez les travailleurs migrants autochtones, et en particulier par les extrêmes difficultés à accéder à l’éducation et à la santé et par le taux de malnutrition démesurément élevé et les taux de mortalité infantile et maternelle. Il est spécialement préoccupé par le nombre démesurément élevé d’enfants autochtones qui travaillent.

73. Le Comité recommande à l’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les enfants autochtones contre la discrimination dans l’exercice de leurs droits et pour garantir à ces derniers la pleine jouissance des droits consacrés par la législation interne et par la Convention. Le Comité recommande en outre à l’État partie de fournir aux communautés autochtones dans leur langue et sous une forme accessible aux enfants, des renseignements suffisants sur les procédures d’enregistrement des naissances, sur le travail des enfants, sur l’éducation et la santé, sur le VIH/sida, sur la maltraitance et la négligence d’enfants, notamment les châtiments corporels, ainsi que sur les droits visés dans les protocoles facultatifs à la Convention. À cet égard, le Comité renvoie l’État partie aux recommandations qu’il a adoptées à la suite de la journée de débat général consacrée aux droits des enfants autochtones lors de sa trente ‑quatrième session, en 2003, de même qu’aux recommandations du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones contenues dans son rapport publié sous la cote E/CN.4/2004/80/Add.2.

9. Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant

74.Le Comité se félicite de la ratification par l’État partie du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, ainsi que du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

75. Le Comité encourage l’État partie à soumettre ses rapports initiaux en vertu des deux Protocoles facultatifs en temps voulu, et si possible simultanément, afin de faciliter leur examen.

10. Suivi et diffusion

Suivi

76.Prenant note avec appréciation de l’engagement pris par l’État partie, à l’appui de sa candidature à un siège au Conseil des droits de l’homme, de mettre en œuvre les recommandations des organes créés en vertu de traités, le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures adéquates pour assurer l’application intégrale des présentes recommandations, notamment en les communiquant aux membres du Congrès national, aux conseils départementaux et aux autorités municipales pour examen et mesures appropriées.

Diffusion

77. Le Comité recommande en outre à l’État partie d’assurer au troisième rapport périodique, aux réponses écrites qu’il a soumises ainsi qu’aux recommandations (observations finales) que lui ‑même a adoptées à leur sujet, une large diffusion auprès du public en général, des organisations de la société civile, des groupes de jeunes et des enfants par l’intermédiaire (mais pas exclusivement) d’Internet, de façon à susciter le débat et à faire connaître la Convention, sa mise en œuvre et son suivi.

11. Prochain rapport

78.Le Comité invite l’État partie à soumettre en un seul document ses quatrième et cinquième rapports d’ici au 20 avril 2011 (c’est‑à‑dire 18 mois avant la date prévue pour la présentation du cinquième rapport). Il s’agit là d’une mesure exceptionnelle qui s’impose en raison du grand nombre de rapports que le Comité reçoit chaque année et du délai qui s’ensuit entre la date de présentation du rapport d’un État partie et son examen par le Comité. Le document en question ne devrait pas compter plus de 120 pages (voir CRC/C/118). Le Comité s’attend à ce que, par la suite, l’État partie soumette son rapport tous les cinq ans, comme prévu par la Convention.

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