Comité des droits de l ’ enfant
Observations finales concernant le deuxième rapport périodique des États fédérés de Micronésie *
I.Introduction
1.Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique des États fédérés de Micronésie (CRC/C/FSM/2) à ses 2465e et 2466e séances (voir CRC/C/SR.2465 et 2466), le 4 mars 2020, et a adopté les présentes observations finales à sa 2469e séance, le 6 mars2020.
2.Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique des États fédérés de Micronésie, ainsi que les réponses écrites à la liste de points (CRC/C/FSM/RQ/2), qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de l’État partie.
II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie
3.Le Comité accueille avec satisfaction les diverses mesures législatives, institutionnelles et stratégiques qui ont été adoptées afin de mettre en œuvre la Convention, en particulier la loi relative à la protection de la famille de l’État de Kosrae, la loi relative à la sécurité de la famille de l’État de Pohnpei et la loi relative à la traite des personnes, ainsi que la politique nationale en faveur de l’égalité des sexes et la politique nationale en faveur de la jeunesse et de la politique nationale en matière de handicap.
4.Le Comité accueille également avec satisfaction la ratification du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2012, du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en 2015, de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en 2004, et de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2016.
5.Le Comité prend note avec satisfaction des progrès accomplis en ce qui concerne la réduction des taux de mortalité chez les nourrissons et les enfants de moins de 5 ans, la représentation égale des deux sexes dans le primaire et de l’amélioration de l’accès des enfants aux installations sanitaires.
III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations
6. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir la réalisation des droits de l ’ enfant conformément aux dispositions de la Convention et du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés et au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants tout au long de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030. Il lui demande instamment de faire en sorte que les enfants participent activement à l ’ élaboration et à la mise en œuvre des politiques et programmes visant à atteindre les 17 objectifs de développement durable, dans la mesure où ceux-ci les concernent.
A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6) de la Convention)
Législation
7.Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption de la loi relative à la protection de la famille de Kosrae et de la loi relative à la sécurité de la famille de Pohnpei, ainsi que l’intention manifestée par l’État partie d’adopter une loi générale sur la protection de l’enfance, mais il est préoccupé par le fait que les États de Yap et de Chuuk ne se sont pas encore dotés d’une législation sur la protection de la famille.
8. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que des lois sur la protection de la famille soient adoptées à Yap et à Chuuk et d ’ affecter des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à leur application.
Politique et stratégie globales
9.Le Comité prend note de l’adoption de la politique nationale en faveur de la jeunesse 2017-2023 et de l’adoption à Kosrae et à Pohnpei de stratégies de protection de la famille. Il constate toutefois avec préoccupation que l’État partie ne s’est pas encore doté d’une politique globale portant expressément sur la promotion et la protection des droits de l’enfant.
10. Le Comité recommande à l ’ État partie :
a) D ’ élaborer et d ’ adopter une politique globale en faveur de l ’ enfance couvrant tous les domaines visés par la Convention et, sur la base de cette politique, de définir une stratégie de mise en œuvre dotée de ressources humaines, techniques et financières suffisantes ;
b) De veiller à ce que les enfants et les organisations de la société civile soient pleinement associés à l ’ élaboration des politiques qui concernent les enfants, en particulier la politique nationale en faveur de la jeunesse ;
c) De veiller à ce que les besoins spéciaux et l ’ opinion des enfants soient pris en considération dans le cadre de l ’ élaboration du plan national de développement qui succédera au plan de développement stratégique 2004-2023.
Coordination
11.Le Comité prend note du fait que l’organe public chargé de l’application de la Convention est la Division des affaires sociales, qui relève du Ministère de la santé et des affaires sociales, mais il relève avec inquiétude que les activités liées à la mise en œuvre de la Convention ne sont pas suffisamment bien coordonnées entre tous les services concernés, au niveau des États et des municipalités, ce qui est d’autant plus inquiétant que le Conseil consultatif national chargé de l’enfance n’est plus en activité et qu’il n’existe pas d’autre organe de coordination.
12. Le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De mettre en place, au niveau interministériel, un organe de coordination adéquat qui soit doté d ’ un mandat clair et investi de compétences suffisamment larges pour coordonner l ’ ensemble des activités liées à la mise en œuvre de la Convention entre tous les services concernés, à l ’ échelon du pays, des États et des municipalités ;
b) De faire en sorte que cet organe de coordination soit doté des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement.
Allocation de ressources
13.Le Comité relève que la plupart des crédits budgétaires destinés à la mise en œuvre de la Convention sont affectés à la santé et à l’éducation, mais il est préoccupé par le fait qu’il n’y a pas d’allocations budgétaires consacrées à la protection de l’enfance ni d’évaluation de l’efficacité du budget national. Il est également préoccupé par le fait que l’État partie est fortement tributaire de l’aide allouée des donateurs ainsi que par les incidences que pourraient avoir sur le bien-être des enfants l’expiration en 2023 des dispositions financières de l’Accord de libre association que l’État partie a conclu avec les États-Unis d’Amérique, au cas où cet accord ne serait pas reconduit.
14. Rappelant son observation générale n o 19 (2016) sur l ’ élaboration de budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l ’ enfant, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) D ’ élaborer le budget de l ’ État en adoptant une approche fondée sur les droits de l ’ enfant et d ’ introduire un système de suivi de l ’ affectation et de l ’ utilisation des ressources destinées aux enfants applicable à l ’ ensemble du budget ;
b) D ’ accroître les crédits budgétaires destinés aux enfants dans toutes les limites des ressources disponibles comme le préconise l ’ article 4 de la Convention, et de s ’ employer ainsi à réduire sa dépendance à l ’ égard de l ’ aide étrangère ;
c) Établir des postes budgétaires expressément consacrés aux enfants handicapés et à la protection de l ’ enfance ainsi qu ’ à l ’ enregistrement des naissances et à la lutte contre la violence à l ’ égard des enfants.
Collecte de données
15.Le Comité relève qu’un certain nombre d’organismes et d’organisations actives au niveau du pays, des États et des municipalités collectent des données sur la situation des enfants, lesquelles sont ensuite compilées dans les rapports nationaux, en collaboration avec des organismes des Nations Unies. Il est toutefois préoccupé par le fait que la collecte de données sur la situation des droits de l’enfant continue de laisser à désirer et ne permet pas d’établir des statistiques ventilées ni de procéder à des analyses.
16. Compte tenu de son observation générale n o 5 (2003) sur les mesures d ’ application générales de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De redoubler d ’ efforts pour mettre au point un système général de collecte de données qui permette de ventiler celles-ci par facteurs pertinents et qui couvre tous les domaines visés par la Convention et tous les enfants, y compris les enfants handicapés et ceux vivant dans les îles périphériques, en particulier en ce qui concerne l ’ enregistrement des naissances, les mariages d ’ enfants, la santé, l ’ éducation, le travail des enfants et la justice pour mineurs ;
b) D ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à l ’ organisme national de statistique afin de garantir la collecte continue de données ;
c) De veiller à ce que les données et les indicateurs soient communiqués à tous les ministères concernés et utilisés pour définir, superviser et évaluer les politiques, programmes et projets adoptés pour mettre la Convention effectivement en œuvre.
Mécanisme indépendant de surveillance
17.Le Comité est préoccupé par l’absence dans l’État partie de mécanisme national des droits de l’homme chargé de surveiller les droits de l’enfant et de recevoir les plaintes faisant état de violations des droits de l’enfant.
18. Compte tenu de son observation générale n o 2 (2002) sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l ’ homme dans la protection et la promotion des droits de l ’ enfant, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De mettre en place un mécanisme indépendant chargé de surveiller les droits de l ’ enfant qui ait pour mandat de recevoir les plaintes émanant d ’ enfants, d ’ enquêter sur ces plaintes et de les examiner en respectant la sensibilité de l ’ enfant ;
b) De garantir l ’ indépendance de ce mécanisme, notamment en ce qui concerne son budget, son mandat et son immunité, afin que celui-ci soit pleinement conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris).
Diffusion, sensibilisation et formation
19.Le Comité relève avec satisfaction que diverses activités de sensibilisation ont été menées afin de promouvoir le dialogue communautaire et la diffusion d’informations sur les droits de l’enfant, ce qui a abouti à l’adoption à Chuuk, Kosrae et Pohnpei de mesures législatives relatives à la protection des droits de l’enfant. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que les enfants, les parents et les professionnels travaillant avec et pour les enfants ne sont pas suffisamment sensibilisés à la Convention.
20. Rappelant ses recommandations précédentes (CRC/C/15/Add.86, par. 28 et 29), le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De renforcer les programmes communautaires afin de mieux faire connaître la Convention à la population en adoptant une approche tenant compte de la sensibilité des enfants, en encourageant la participation active des enfants aux activités de vulgarisation de la Convention et en veillant à ce que des mesures ciblées soient prises à l ’ intention des parents, des membres des forces de l ’ ordre, des chefs religieux et des professionnels travaillant avec et pour les enfants ;
b) D ’ organiser des débats avec les communautés et les parents sur des questions liées aux droits de l ’ enfant, en particulier la violence à l ’ égard des enfants, le mariage d ’ enfants et la santé sexuelle et procréative.
B.Définition de l’enfant (art. 1er)
21.Le Comité est gravement préoccupé par :
a)L’incompatibilité de la définition de l’enfant énoncée dans la législation de l’État de Yap avec celle figurant dans la Convention ;
b)L’absence dans la législation nationale de disposition interdisant le mariage d’enfants de moins de 18 ans ;
c)Le fait que, dans les États de Chuuk, Kosrae et Yap, l’âge minimum du mariage continue d’être fixé à 16 ans pour les filles ;
d)Le fait que les mariages coutumiers, pour lesquels aucun âge minimum n’est fixé, sont encore considérés comme valables.
22. Le Comité invite instamment l ’ État partie à :
a) Faire en sorte que toutes les définitions de l ’ enfant énoncées dans les lois nationales et les lois des États soient conformes à celle figurant dans la Convention ;
b) Faire en sorte que la législation interne interdise expressément les mariages, y compris les mariages coutumiers, de garçons et de filles de moins de 18 ans et que, dans tous les États, y compris dans les îles périphériques, l ’ âge légal du mariage soit fixé à 18 ans aussi bien pour les filles que pour les garçons.
C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)
Non-discrimination
23.Le Comité accueille avec satisfaction l’information fournie au cours du dialogue selon laquelle l’État partie a pris des mesures législatives en vue de compléter la liste des motifs interdits de discrimination. Il relève que la Constitution fédérale et les constitutions respectives des États micronésiens garantissent le principe d’égalité ainsi que le droit de bénéficier d’une égale protection de la loi, et que toute discrimination fondée sur la race, le sexe, la langue, l’origine nationale, ethnique ou sociale et la fortune est interdite. Il constate toutefois avec préoccupation que la législation interne ne couvre par tous les motifs interdits de discrimination expressément énoncés dans la Convention, en particulier le handicap et la religion. Il est également préoccupé par la discrimination de fait dont sont victimes des enfants en raison de leur sexe ou de leur situation économique.
24. Ayant à l ’ esprit la cible 10.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De faire en sorte que la législation interne couvre tous les motifs interdits de discrimination énumérés dans la Convention, y compris la religion et le handicap ;
b) De prendre des mesures énergiques pour éliminer toutes les formes de discrimination exercée contre les enfants, en particulier la discrimination à l ’ égard des filles et des enfants vivant dans la pauvreté.
Intérêt supérieur de l’enfant
25.Le Comité prend note avec satisfaction des informations fournies au cours du dialogue selon lesquelles la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant fait partie de la vie en communauté dans l’État partie et que le Code fédéral reconnaît le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale dans toute procédure judiciaire, en particulier dans les affaires de divorce et les litiges relatifs à la garde des enfants et à la pension alimentaire. Le Comité est toutefois préoccupé par la réalisation effective de ce droit et son application dans d’autres domaines que le droit de la famille, la santé et la justice pour mineurs.
26. Compte tenu de son observation générale n o 14 (2013) sur le droit de l ’ enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir des procédures et de fixer des critères à l ’ intention de tous les responsables concernés afin de garantir que l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant soit une considération primordiale dans tous les domaines couverts par la Convention.
Droit à la vie, à la survie et au développement
27.Le Comité prend note avec satisfaction des mesures prises par l’État partie pour protéger le droit des enfants à la vie, à la survie et au développement, notamment dans le domaine de la vaccination et de la lutte contre la mortalité infantile, ainsi que de l’importance cruciale de certaines initiatives telles que le programme d’éducation à la responsabilité personnelle destiné aux enfants de 10 à 14 ans. Le Comité est toutefois préoccupé par les taux élevés de suicide et de décès par noyade chez les adolescents et d’autres accidents ayant une incidence sur le droit des enfants à la vie, à la survie et au développement.
28. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ agir de toute urgence pour intensifier les efforts qu ’ il déploie pour prévenir les suicides chez les enfants, y compris les enfants handicapés, en veillant à ce que des services d ’ accompagnement psychologique soient disponibles dans les écoles et au sein des communautés. L ’ État partie devrait également intensifier ses efforts afin de prévenir les noyades et d ’ autres accidents dont des enfants sont victimes.
Respect de l’opinion de l’enfant
29.Le Comité est préoccupé par la reconnaissance limitée, en droit et dans la pratique, du droit de l’enfant d’être entendu et de son droit à ce que son opinion soit dûment prise en considération.
30. Le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De veiller à ce que les enfants soient entendus et à ce que leur opinion soit dûment prise en considération dans toute procédure administrative ou judiciaire les concernant , et ce, pour tous les droits couverts par la Convention ;
b) De promouvoir la participation active et effective de tous les enfants dans tous les contextes, y compris dans la famille , la communauté et à l ’ école, et d ’ associer les enfants à la prise de décisions sur toutes les questions qui les concernent, y compris les questions relatives à l ’ environnement ;
c) De créer des mécanismes rendant possible la participation systématique des enfants à l ’ élaboration et à la mise en œuvre des lois, des politiques et des programmes qui les concernent.
D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)
Enregistrement des naissances
31.Le Comité relève avec satisfaction que l’État partie a pris des mesures efficaces afin que la plupart des enfants soient enregistrés à la naissance dans les établissements de santé, mais il est préoccupé par la situation des enfants qui ne sont pas encore enregistrés, en particulier ceux vivant dans les îles périphériques, et par les cas d’enfants non enregistrés en raison de l’inexactitude des informations fournies à leur naissance.
32. Ayant à l ’ esprit la cible 16.9 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour enregistrer tous les enfants, y compris dans les îles périphériques, notamment en y mettant en place des unités mobiles d ’ enregistrement, en sensibilisant le public à l ’ importance de l ’ enregistrement des naissances, et en veillant à ce que les informations recueillies à la naissance soient exhaustives et exactes.
Droit à la vie privée
33.Le Comité relève que la Constitution fédérale garantit le droit à la vie privée et la protection contre les immixtions de l’exécutif dans la vie privée, mais il constate avec préoccupation que, d’après le rapport de l’État partie, le droit des enfants à la vie privée n’est pas protégé contre les violations commises par des particuliers ou des entités privées.
34. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir pleinement le droit de l ’ enfant à la vie privée en modifiant la législation de façon qu ’ elle protège expressément les enfants contre toute immixtion de particuliers ou d ’ entités privées dans leur vie privée, et en élaborant des lignes directrices destinées aux parents, aux enseignants et aux professionnels travaillant avec et pour les enfants afin que ceux-ci comprennent l ’ importance du droit de l ’ enfant à la vie privée et respectent ce droit.
Accès à une information appropriée
35. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir l ’ accès des enfants à une information appropriée provenant de sources diverses, y compris Internet, et de veiller à ce que les enfants soient efficacement protégés contre les informations et les contenus susceptibles de nuire à leur bien-être.
E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39)
Châtiments corporels
36.Le Comité relève avec satisfaction que l’État partie a accepté la recommandation formulée en 2015 dans le cadre du deuxième cycle de l’Examen périodique universel, par laquelle il avait été invité à interdire toutes les formes de châtiments corporels infligés aux enfants, et ce, dans tous les contextes. Il est toutefois vivement préoccupé par le fait que, bien que les châtiments corporels ne puissent pas être imposés à titre de sanction en cas d’infraction pénale, ils ne sont pas interdits à la maison, à l’école, dans les institutions accueillant des enfants, dans les structures offrant une protection de remplacement ou dans les établissements pénitentiaires.
37. Le Comité invite instamment l ’ État partie à :
a) Introduire sans tarder dans la législation une disposition interdisant expressément les châtiments corporels dans tous les contextes, y compris à la maison, à l ’ école, dans les institutions qui accueillent des enfants, dans les établissements offrant une protection de remplacement et dans les établissements pénitentiaires ;
b) Former les enseignants à des méthodes de discipline non violentes et veiller à ce que cette formation fasse partie des programmes de formation initiale et continue du personnel enseignant ;
c) Mettre à la disposition des enfants des mécanismes de plainte, en particulier dans les écoles, afin que ceux-ci puissent signaler en toute confidentialité et en toute sécurité les agissements des enseignants et des autres personnes qui continuent d ’ imposer des châtiments corporels aux élèves ;
d) Lancer des programmes de sensibilisation conçus à l ’ intention des parents et des professionnels travaillant avec et pour les enfants afin de promouvoir un changement d ’ attitude, au sein de la famille et de la communauté, à l ’ égard des châtiments corporels, et d ’ encourager l ’ emploi de méthodes de discipline non violentes.
Maltraitance et négligence, et exploitation et violences sexuelles
38.Le Comité est vivement préoccupé par :
a)Le nombre apparemment élevé de cas de maltraitance d’enfants, y compris de violence familiale, de maltraitance psychologique et d’atteintes sexuelles, et le fait que, pour diverses raisons, dont la crainte de la stigmatisation, les signalements sont rares ;
b)Le fait que la protection offerte aux enfants par la législation nationale ne couvre que les violences physiques ;
c)Le fait qu’à Yap l’âge légal du consentement à des relations sexuelles est établi à 13 ans, ce qui expose les enfants à un risque accru d’atteintes et de violence sexuelles, et qu’à Chuuk et Pohnpei, cet âge est fixé à 18 ans, ce qui signifie que les adolescents qui ont des relations sexuelles consenties entre eux avant 18 ans peuvent faire l’objet de poursuites injustifiées ;
d)Le fait qu’il n’existe pas de mécanismes respectueux de la sensibilité des enfants permettant à ceux qui sont victimes de mauvais traitements de signaler ces actes et la méconnaissance de la législation en vigueur par les enfants eux-mêmes ;
e)Le fait que les mesures adoptées afin d’apporter un soutien aux enfants victimes de violence, dont les services d’accompagnement psychologique, de réadaptation et de réinsertion, laissent à désirer et qu’il n’existe pas de procédures judiciaires spéciales pour l’audition des mineurs ;
f)Le manque de personnel spécialisé, notamment de travailleurs sociaux, et l’absence de services de police spécialisés dans la prise en charge des victimes mineures ;
g)L’absence d’interdiction dans la législation de l’utilisation d’enfants à des fins de prostitution ou de production de matériel pornographique.
39. Rappelant son observation générale n o 13 (2011) sur le droit de l’enfant d’être protégé contre toutes les formes de violence et ayant à l’esprit les cibles 5.2 et 16.2 des objectifs de développement durable, le Comité engage l’État partie à :
a) Renforcer, avec la participation des enfants, les programmes communautaires de sensibilisation et d ’ éducation visant à prévenir et à combattre la violence familiale, la maltraitance et l ’ exploitation sexuelle d ’ enfants, en se concentrant en particulier sur les enfants, les familles, les communautés et les établissements scolaires ;
b) Modifier la législation afin de garantir que celle-ci protège les enfants contre toutes les formes de violence et de maltraitance, y compris la cruauté mentale et verbale et la maltraitance psychologique ;
c) Harmoniser l ’ âge minimum du consentement à des relations sexuelles dans tous les États et faire en sorte que les adolescents qui ont des relations sexuelles consenties entre eux n ’ encourent pas de poursuites pénales ;
d) Mettre en place des mécanismes, des procédures et des lignes directrices tenant compte de la nécessité de respecter la confidentialité et la sensibilité des enfants et instaurant l ’ obligation de signaler tous les cas de maltraitance d ’ enfants, et veiller à ce que tous les cas signalés fassent immédiatement l ’ objet d ’ enquêtes et de poursuites et à ce que les responsables soient dûment sanctionnés ;
e) Offrir aux enfants victimes des recours multisectoriels adaptés à leur sensibilité ainsi qu ’ un soutien complet comprenant un accompagnement psychologique et une assistance à la réadaptation et à la réinsertion, et encourager les tribunaux à faire appel à des mécanismes multisectoriels adaptés aux enfants pour auditionner les victimes mineures ;
f) Examiner la possibilité de créer un service de police spécialisé dans le traitement des affaires de violence et d ’ exploitation et d ’ atteintes sexuelles dans lesquelles la victime est un enfant, et faire en sorte que ces services soient dotés de personnel spécialisé dans le traitement d ’ affaires de ce type ;
g) Prévenir la revictimisation des enfants victimes ou témoins d ’ infractions en faisant en sorte que les procédures pénales portant sur des affaires concernant des mineurs soient sûres et respectueuses de leur sensibilité et se tiennent à huis clos, l ’ accent devant être mis en particulier sur la protection des victimes et le respect de la confidentialité, compte tenu des Lignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d ’ actes criminels ;
h) Ériger en infraction la vente et l ’ exploitation d ’ enfants à des fins de prostitution et de production de matériel pédopornographique conformément aux articles 2 et 3 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, que l ’ État partie a ratifié en 2012.
Pratiques préjudiciables
40.Le Comité est gravement préoccupé par les informations indiquant que des mariages coutumiers seraient célébrés entre des hommes et des filles de 13 ans seulement.
41. Compte tenu de la recommandation générale n o 31 du Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et de l’observation générale n o 18 du Comité des droits de l ’ enfant sur les pratiques préjudiciables, adoptées conjointement (2019), le Comité exhorte l ’ État partie à prendre toutes les mesures voulues pour éliminer le mariage d ’ enfants et sensibiliser la population aux effets préjudiciables des mariages d ’ enfants sur le bien-être physique et psychologique des filles.
Lignes téléphoniques d’assistance
42.Le Comité relève qu’il existe deux lignes d’assistance téléphonique auxquelles les enfants victimes de maltraitance ou de la traite peuvent s’adresser pour obtenir de l’aide.
43. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ étudier la possibilité de regrouper les services d ’ assistance téléphonique existants en une seule ligne nationale d ’ urgence à trois chiffres adaptée aux enfants et accessible gratuitement 24 heures sur 24 et sept jours sur sept , par souci d ’ efficacité, ainsi que de s ’ employer à sensibiliser les enfants aux moyens d ’ y accéder, notamment en collaborant avec les organisations non gouvernementales concernées et les chefs religieux, et de doter cette ligne téléphonique des ressources humaines, financières et techniques nécessaires à son bon fonctionnement.
F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))
Enfants privés de milieu familial
44.Le Comité note qu’en raison de l’absence de services de protection sociale, la plupart des enfants qui ne peuvent pas vivre avec leur famille sont confiés à des membres de leur famille élargie. Il est toutefois préoccupé par l’absence de solutions d’accueil temporaires et sûres permettant de couvrir les cas dans lesquels l’enfant n’est pas pris en charge par la famille élargie et par les stéréotypes discriminatoires relatifs à la place et aux responsabilités respectives des femmes et des hommes au sein de la famille.
45. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants, et l ’ invite à :
a) Mettre en place un service d’aide sociale opérationnel et un réseau de services destinés aux enfants ;
b) Prévoir des possibilités d’accueil temporaires et sûres et mettre en place un système de placement en famille d ’ accueil pour les enfants qui ne peuvent pas vivre avec leur famille ;
c) Fournir tous les services de protection sociale et d’assistance nécessaires aux familles et aux personnes qui s’occupent d’enfants en remplacement de leur famille ;
d) Définir des normes de qualité applicables à toutes les formes existantes de protection de remplacement et prendre en considération l ’ opinion de l ’ enfant dans toute décision touchant la protection de remplacement ;
e) Examiner régulièrement le placement d’enfants dans les structures offrant une protection de remplacement et contrôler la qualité de la prise en charge dans ces institutions ;
f) Fournir des efforts constants et soutenus pour promouvoir l ’ égalité des pères et des mères en matière de responsabilité parentale.
Adoption
46.Le Comité relève que la plupart des adoptions dans l’État partie ont lieu au sein de la famille élargie ou dans le cadre de l’adoption coutumière et qu’il n’existe pas de directives établies en bonne et due forme pour réglementer la procédure d’adoption.
47. Le Comité recommande à l ’ État partie :
a) D’établir des directives relatives à l’adoption et de mettre en place un service doté de ressources suffisantes qui ait pour mandat de surveiller la procédure d’adoption officielle ;
b) De sensibiliser les populations locales à la procédure d ’ adoption officielle ;
c) De mettre en place des mécanismes chargés d ’ enregistrer, de réglementer et de surveiller toutes les adoptions, y compris les adoptions par un membre de la famille élargie et les adoptions coutumières.
G.Enfants présentant un handicap (art. 23)
48.Le Comité prend note de la politique nationale sur le handicap 2009-2016, du programme d’éducation spécialisée et du programme en faveur des enfants ayant des besoins spéciaux en matière de soins de santé, et relève que les États de Kosrae, Pohnpei et Yap se sont dotés d’une loi sur le handicap. Il est toutefois préoccupé par :
a)Le fait que la politique nationale en matière de handicap est parvenue à échéance en 2016 et que son applicabilité n’a pas encore été prorogée ;
b)L’accès limité des enfants présentant un handicap à l’éducation inclusive, aux soins de santé, aux transports, aux espaces publics, à la réadaptation et la prestation de services dans tous les domaines ;
c)Le fait que les prestataires de services qui aident les enfants présentant un handicap ou leurs parents ne bénéficient pas d’un soutien financier et technique.
49. Compte tenu de son observation générale nº 9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) D’adopter une politique nationale sur le handicap qui ait pour objectif de renforcer les services de soins de santé destinés aux enfants présentant un handicap et de garantir que tous ces enfants bénéficient d’une éducation inclusive, quel que soit leur handicap ;
b) D ’ augmenter les crédits et les dépenses destinés aux enfants présentant un handicap ;
c) D ’ améliorer l ’ accès des enfants présentant un handicap à tous les bâtiments, espaces, services et moyens de transport publics ou privés sur l ’ ensemble du territoire, en particulier dans les îles périphériques ;
d) De veiller à ce que tous les établissements scolaires comptent parmi leur personnel des enseignants et des professionnels spécialisés dans le soutien individualisé, et à ce que le personnel enseignant soit adéquatement formé ;
e) D ’ élargir la couverture des programmes de réadaptation à base communautaire, de dépistage précoce et d ’ orientation afin que tous les enfants présentant un handicap puissent en bénéficier, et d ’ apporter aux prestataires de services et aux familles d ’ enfants présentant un handicap le soutien personnel, technique et financier dont ils ont besoin.
H.Santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)
Santé et services de santé
50.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises par l’État partie pour réduire les taux de mortalité chez les nourrissons et les enfants de moins de 5 ans et l’incidence de l’anémie, ainsi que pour améliorer la couverture vaccinale. Il est toutefois préoccupé par :
a)L’accès insuffisant des enfants vivant dans les îles périphériques et les villages reculés aux services de santé ;
b)Les taux élevés de mortalité liée à des causes évitables chez les nourrissons et les enfants de moins de 5 ans, telles que l’insuffisance pondérale à la naissance, les infections respiratoires, la dénutrition, la prématurité, la pneumonie, la septicémie et la diarrhée ;
c)La faible couverture vaccinale, qui a même diminué depuis quelques années, et les grandes disparités entre États, la couverture vaccinale étant particulièrement faible à Pohnpei et à Chuuk ;
d)La forte prévalence de l’anémie chez les femmes enceintes et les nouveau-nés et de la tuberculose ;
e)Le manque de données sur des questions liées à la santé des enfants, dont la malnutrition, les retards de croissance, l’obésité, la santé mentale, les grossesses précoces, la toxicomanie et les pratiques en matière d’allaitement ;
f)Le manque de renseignements sur la portée de l’initiative Hôpitaux amis des bébés.
51. Rappelant son observation générale n o 15 (2013) sur le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible, et prenant note de la cible 3.8 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :
a) De redoubler d ’ efforts pour améliorer l ’ accès de tous les enfants aux services de santé de base, en particulier dans les îles périphériques et les villages reculés, et d ’ allouer des ressources à la création de cliniques mobiles ;
b) De renforcer les mesures visant à réduire les taux de mortalité liée à des causes évitables chez les nourrissons et les enfants de moins de 5 ans, et de prévenir et traiter l ’ anémie, la tuberculose ainsi que les retards de croissance, la cachexie et la sous-alimentation chez les enfants ;
c) D ’ intensifier les campagnes de vaccination, en particulier dans les îles périphériques, de réaliser des investissements suffisants dans les technologies adaptées telles que les drones de livraison, et de renforcer les capacités humaines en vue de la prestation de services de vaccination ;
d) De recueillir des données sur la malnutrition chronique, le retard de croissance et l ’ obésité, de faire en sorte que les enfants de moins de 5 ans puissent recevoir des micronutriments essentiels, notamment de la vitamine A et du fer ainsi que du sel iodé, et de renforcer les mesures de prévention, notamment en sensibilisant la population à des questions liées à la nutrition et aux bonnes pratiques dans ce domaine, et en apportant un soutien nutritionnel aux mères allaitantes ;
e) D ’ incorporer pleinement dans le droit interne les normes définies dans le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel et de mettre en œuvre l ’ initiative Hôpitaux amis des bébés sur l ’ ensemble du territoire ;
f) De diffuser et d ’ appliquer le g uide technique concernant l ’ application d ’ une approche fondée sur les droits de l ’ homme à la mise en œuvre des politiques et des programmes visant à réduire et à éliminer la mortalité et la morbidité évitables des enfants de moins de 5 ans (A/HRC/27/31) publié par le Haut-Commissariat aux droits de l ’ homme.
Santé mentale
52.Le Comité est gravement préoccupé par l’absence de cadre juridique ou de politique en matière de santé mentale et par l’attention insuffisante accordée à la santé mentale des enfants, ainsi que par l’absence de pédopsychiatres, de psychologues, de travailleurs sociaux spécialisés dans la santé mentale et d’autres personnels spécialisés.
53. Ayant à l ’ esprit la cible 3.4 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De promouvoir l’élaboration d’une législation et d’une politique relatives à la santé mentale des enfants et affecter des ressources suffisantes à leur application ;
b) De mettre en place des services et des programmes de santé mentale destinés aux enfants et de veiller à ce que tous les États soient dotés de personnel qualifié, notamment des pédopsychiatres, des psychologues, des travailleurs sociaux spécialisés dans la santé mentale et d ’ autres personnels spécialisés.
Santé des adolescents
54.Le Comité prend note avec satisfaction des mesures prises par l’État partie pour faire face à la toxicomanie chez les adolescents, notamment des campagnes de sensibilisation menées dans ce domaine. Il est toutefois préoccupé par :
a)Le taux élevé de grossesses précoces et d’infections sexuellement transmissibles chez les adolescents ;
b)Le fait que l’avortement est considéré comme une infraction pénale dans tous les cas, sauf si la grossesse fait courir un risque mortel à la jeune fille enceinte ;
c)L’accès limité à des services de santé procréative et sexuelle sûrs et à l’éducation sexuelle et aux contraceptifs, en particulier dans les îles périphériques, en raison de l’offre restreinte de services de ce type, des pratiques culturelles et de la crainte de la stigmatisation ;
d)La prévalence de l’usage de substances chez les adolescents en raison du non-respect de la législation sur la vente d’alcool aux mineurs et de l’absence de cadre juridique réglementant la vente de sakau.
55. Rappelant son observation générale n o 2 0 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l ’ enfant pendant l ’ adolescence, et ayant à l ’ esprit les cibles 3.7 et 5.6 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De veiller à ce que l’éducation sexuelle et procréative fasse partie du programme scolaire obligatoire et cible surtout les adolescents, filles et garçons, l’accent devant être mis sur la prévention des grossesses précoces et des infections sexuellement transmissibles ;
b) De dépénaliser l’avortement en toutes circonstances et de garantir l’accès des adolescentes à des services d’avortement sécurisé et de soins postérieurs à un avortement, en veillant à ce que le point de vue des intéressées soit toujours entendu et pris en considération dans le cadre de la prise de décision s ;
c) D’améliorer l ’ accès des adolescents à la médecine de la procréation et aux services connexes, et d ’ apporter un soutien accru aux services de santé procréative et de planification familiale, notamment en les approvisionnant en contraceptifs, en particulier dans les îles périphériques ;
d) De renforcer les mesures visant à fournir aux enfants et aux adolescents des informations précises et objectives sur les effets néfastes de l ’ alcool, de la drogue et de l ’ usage de substances, et à leur donner des connaissances de base sur la prévention de l ’ abus de substances, notamment le tabagisme et l ’ alcoolisme, d ’ appliquer la législation relative à la vente d ’ alcool aux mineurs, d ’ établir un cadre juridique réglementant la vente de sakau et de mettre en place des services de traitement de la toxicomanie et de réduction des risques qui soient accessibles et adaptés aux jeunes.
Incidences des changements climatiques sur les droits de l’enfant
56.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption en 2013 de la loi sur le changement climatique, mais il relève avec préoccupation que l’État partie n’a pas fait en sorte que les vulnérabilités et les besoins particuliers des enfants soient pris en considération dans ses politiques et programmes relatifs aux changements climatiques et à la gestion des risques de catastrophe.
57. Ayant à l ’ esprit les cibles 13.2, 13.3 et 13.b des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De veiller à ce que les vulnérabilités et les besoins particuliers des enfants, ainsi que leur opinion, soient pris en considération dans le cadre de l ’ élaboration des politiques et programmes relatifs aux changements climatiques et à la gestion des risques de catastrophe ;
b) De sensibiliser davantage et de mieux préparer les enfants aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles en intégrant ces questions dans les programmes scolaires et les programmes de formation des enseignants, et de renforcer la sécurité matérielle et la capacité de résistance des infrastructures scolaires ;
c) De revoir les protocoles applicables en cas d’urgence afin que ceux-ci prévoient d ’ apporter une assistance et d ’ autres formes d ’ aide à tous les enfants, en particulier ceux qui présentent un handicap, dans les situations d ’ urgence et en cas de catastrophe naturelle ;
d) D’améliorer la collecte de données et la qualité des évaluations afin de disposer d’une base factuelle sur laquelle s’appuyer pour prendre des mesures de réduction des risques et de préparation aux catastrophes et, en particulier, pour répondre aux besoins propres aux enfants handicapés et établir les priorités à cet égard.
I.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)
Éducation, y compris formation et orientation professionnelles
58.Le Comité constate avec satisfaction que l’enseignement primaire est gratuit et obligatoire pour tous les enfants et qu’en 2015, les objectifs en matière d’éducation fixés dans le plan de développement stratégique ont été révisés afin de mettre l’accent sur l’amélioration de la qualité de l’éducation. Il est toutefois préoccupé par :
a)La baisse des taux de scolarisation et de réussite dans le primaire et le secondaire, ainsi que l’augmentation des taux d’abandon scolaire chez les garçons et les filles ;
b)Les disparités régionales en ce qui concerne la qualité de l’éducation, qui sont imputables au manque d’enseignants qualifiés et de ressources pédagogiques, en particulier dans les îles périphériques ;
c)L’absence de mesures visant à garantir que les filles enceintes et les adolescentes qui ont un enfant puissent poursuivre leur scolarité.
59. Ayant à l ’ esprit les cibles 4.1 et 4.2 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) De veiller à ce que toutes les filles et tous les garçons suivent, sur un pied d’égalité, un cycle complet d’enseignement primaire et secondaire de qualité, les dotant d’acquis véritablement utiles ;
b) De redoubler d’efforts afin d’améliorer l’accessibilité et la qualité de l’éducation dans tout le pays, notamment en affectant des ressources humaines, financières et techniques suffisantes à ce secteur, en créant davantage d ’ écoles secondaires, en offrant une formation continue aux enseignants et en améliorant la qualité du matériel, des infrastructures et des manuels scolaires, en particulier dans les îles périphériques ;
c) D’analyser les causes profondes de la baisse des taux de scolarisation dans le primaire et le secondaire et de prendre des mesures appropriées pour y remédier, notamment en mettant en place une formation professionnelle de qualité propre à renforcer les compétences des enfants qui abandonnent l’école, et en encourageant ces enfants à suivre une telle formation ;
d) D ’ aider les filles enceintes et les adolescentes qui ont un enfant à poursuivre leur scolarité dans les établissements ordinaires, en leur dispensant des conseils sur les compétences parentales et les services de garde d ’ enfants ;
e) D ’ allouer des ressources financières suffisantes au développement de l ’ éducation de la petite enfance.
Éducation aux droits de l’homme
60.Le Comité relève qu’un projet de programme d’études consacré aux droits de l’homme a été élaboré, mais il constate avec inquiétude que l’éducation aux droits de l’homme n’a pas encore été intégrée dans les programmes scolaires ni dans la formation des enseignants et d’autres professionnels et personnels de l’éducation.
61. Ayant à l ’ esprit la cible 4.7 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que l ’ éducation aux droits de l ’ homme et les principes consacrés par la Convention soient intégrés dans les programmes scolaires et les programmes de formation des enseignants et des professionnels de l ’ éducation, compte tenu du cadre institué par le Programme mondial d ’ éducation dans le domaine des droits de l ’ homme.
Repos, loisirs et activités récréatives, culturelles et artistiques
62.Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour promouvoir les activités culturelles, sportives et récréatives dans les écoles, mais il est préoccupé par le manque d’informations sur l’accès régulier des enfants au repos, aux loisirs et aux activités récréatives et par les possibilités limitées qu’ont les filles de pratiquer un sport en raison des responsabilités familiales qui leur sont confiées.
63. Rappelant son observation générale n o 17 (2013) sur le droit de l ’ enfant au repos et aux loisirs, de se livrer au jeu et à des activités récréatives et de participer à la vie culturelle et artistique, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) D’intensifier ses efforts pour garantir le droit de l’enfant au repos et aux loisirs ainsi que le droit de se livrer à des activités récréatives, sportives, culturelles et artistiques adaptées à son âge et d’utiliser des espaces de jeux sûrs et accessibles ;
b) De veiller à ce que l’accès des filles aux activités de loisirs, y compris aux activités sportives, ne soit pas compromis par les responsabilités familiales qui leur sont confiées.
J.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 b) à d) et 38 à 40)
Exploitation économique, notamment travail des enfants
64.Le Comité est préoccupé par l’absence de législation interdisant le travail des enfants ou fixant un âge minimum d’admission aux travaux dangereux et non dangereux, ainsi que par l’absence de programmes visant à prévenir le travail des enfants ou à aider ceux qui travaillent.
65. Ayant à l ’ esprit la cible 8.7 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :
a) D’introduire dans sa législation des dispositions définissant l’âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail et prévoyant des normes claires sur les horaires de travail, et d’élaborer et d’adopter une politique relative au travail des enfants ;
b) D’interdire expressément l’emploi d’enfants à des travaux dangereux ou nocifs pour la santé, et d’établir une liste des travaux dangereux auxquels il est expressément interdit d’affecter des enfants ;
c) De veiller à ce qu ’ aucun enfant ne réalise des travaux dangereux et de mettre en place des programmes sociaux visant à éliminer ou prévenir le travail des enfants, en particulier ses pires formes ;
d) De déterminer les conditions dans lesquelles les enfants peuvent être affectés à des travaux légers et le nombre d ’ heures pendant lesquels ils peuvent mener ce type d ’ activités, en s ’ assurant qu ’ ils aient suffisamment de loisirs et ne manquent pas l ’ école ;
e) D ’ examiner la possibilité de ratifier la Convention ( n o 182) sur les pires formes de travail des enfants , 1999 , et la Convention ( n o 138) sur l ’ âge minimum , 1973 , de l ’ Organisation internationale du Travail .
Vente, traite et enlèvement
66.Le Comité prend acte avec satisfaction de l’adoption d’une loi et d’un plan d’action relatifs à la lutte contre la traite, ainsi que de la formation dispensée dans ce domaine aux membres des forces de l’ordre et aux fonctionnaires. Il est cependant préoccupé par le fait que la législation en vigueur n’incrimine pas expressément la vente et l’enlèvement d’enfants et qu’il n’existe pas de procédures officielles pour la détection des enfants victimes de la traite. Il est également vivement préoccupé par les informations selon lesquelles des jeunes filles seraient victimes de la traite et d’exploitation par la prostitution, notamment sur des navires de pêche étrangers.
67. Ayant à l ’ esprit la cible 8.7 des objectifs de développement durable et rappelant ses lignes directrices concernant l ’ application du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/156), le Comité recommande à l ’ État partie :
a) D’ériger en infraction la vente, la traite et l’enlèvement d’enfants et de rendre ces actes passibles de sanctions proportionnées à leur gravité ;
b) D’élaborer et de mettre en œuvre des procédures visant à détecter à un stade précoce les enfants victimes de la traite et les enfants vendus ou enlevés ;
c) De continuer d’enquêter sur toutes les affaires de traite et d’exploitation sexuelle d’enfants et de traduire les responsables en justice ;
d) De mener des activités de sensibilisation afin de rendre les parents et les enfants conscients des dangers de la traite .
Enfants en situation de migration
68. Soulignant que les migrations internationales liées aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles risquent d ’ avoir de plus en plus d ’ incidences sur les enfants, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ examiner la possibilité d ’ élaborer une législation, des politiques et des programmes relatifs aux migrations internationales d ’ enfants qui tiennent compte des droits et des besoins des enfants.
Administration de la justice pour mineurs
69.Le Comité note avec satisfaction que le Code fédéral et les codes respectifs des États comportent nombre de dispositions relatives à la justice pour mineurs qui prévoient des mesures « souples » applicables dans le cadre des procédures pénales intentées contre les enfants, parmi lesquelles la tenue d’audiences informelles se déroulant à huis clos et la possibilité offerte aux enfants concernés d’être représentés en justice. Le Comité est toutefois vivement préoccupé par :
a)L’âge de la responsabilité pénale prévu par les codes respectifs des États, qui est fixé à 10 ans seulement ;
b)La pénurie de juges pour mineurs ;
c)L’absence de loi relative à l’administration de la justice pour mineurs ;
d)L’absence de dispositions limitant la durée de la détention provisoire et prévoyant que la détention ne doit être imposée qu’en dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible ;
e)Le recours limité aux mesures non judiciaires et non privatives de liberté ;
f)L’absence de données statistiques sur les enfants soupçonnés, accusés ou reconnus coupables d’infractions à la législation pénale.
70. Compte tenu de son observation générale n o 24 (2019) sur les droits de l ’ enfant dans le système de justice pour enfants, le Comité engage l ’ État partie à rendre son système d ’ administration de la justice pour mineurs pleinement conforme aux dispositions de la Convention et de prendre les mesures suivantes :
a) Relever l ’ âge de la responsabilité pénale à 14 ans au minimum dans tous les États, adopter une législation relative à l ’ administration de la justice pour mineurs, et veiller à ce que tous les enfants de moins de 18 ans bénéficient de toutes les garanties juridiques voulues ;
b) Désigner des juges pour mineurs et faire en sorte que ces magistrats, de même que les procureurs, les policiers et les autres professionnels concernés, reçoivent une formation sur les dispositions de la Convention ;
c) Éviter les placements en détention provisoire et limiter la durée de cette détention en veillant à ce que les enfants arrêtés et privés de liberté soient présentés sans délai à une autorité habilitée à examiner la légalité de la mesure privative de liberté ou de sa prorogation, et accélérer les procédures qui concernent des enfants ;
d) Faire en sorte que la détention ne soit qu’une solution de dernier ressort, soit d’une durée aussi brève que possible et soit régulièrement réexaminée en vue d’y mettre fin ;
e) Faire en sorte que, lorsqu ’ un placement en détention est inévitable, l ’ enfant soit séparé des adultes et que ses conditions de détention soient conformes aux normes internationales, y compris en ce qui concerne l ’ accès à l ’ éducation et aux services de santé ;
f) D ’ encourager le recours à des mesures non judiciaires telles que la déjudiciarisation, la médiation et l ’ accompagnement par un travailleur social dans les affaires qui concernent des délinquants mineurs et promouvoir, lorsque cela est possible, l ’ application de peines non privatives de liberté telles que la probation ou les travaux d ’ intérêt général ;
g) Recueillir des données sur le nombre d ’ enfants privés de liberté, y compris sur le nombre et la nature des infractions commises par des enfants.
K.Ratification du Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications
71. Le Comité recommande à l ’ État partie de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant établissant une procédure de présentation de communications, afin de renforcer encore le respect des droits de l ’ enfant.
L.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme
72. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de ratifier les instruments relatifs aux droits de l ’ homme fondamentaux ci-après auxquels il n ’ est pas encore partie, afin de renforcer encore le respect des droits de l ’ enfant :
a) Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
b) Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
c) Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;
d) Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ;
e) Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ;
f) Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
73. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de s ’ acquitter de l ’ obligation qui lui incombe de présenter des rapports au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés et du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, les rapports pertinents étant attendus depuis le 26 novembre 2018 et le 23 mai 2014, respectivement.
M.Coopération avec les organismes régionaux
74. Le Comité recommande à l ’ État partie de coopérer notamment avec des organisations régionales telles que la Communauté du Pacifique et le Forum des îles du Pacifique.
IV.Mise en œuvre et soumission de rapports
A.Suivi et diffusion
75. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement mises en œuvre. Il recommande également que le deuxième rapport périodique, les réponses écrites à la liste de points et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.
B.Mécanisme national d’établissement des rapports et du suivi
76. Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer le Groupe chargé de l ’ Examen périodique universel et des droits de l ’ homme et de veiller à ce qu ’ il soit habilité à coordonner et à élaborer les rapports devant être présentés aux mécanismes internationaux et régionaux des droits de l ’ homme et de nouer un dialogue avec ces mécanismes, et de coordonner et suivre l ’ exécution des obligations conventionnelles et la mise en œuvre des recommandations et des décisions émanant desdits mécanismes. Le Comité souligne que ce groupe devrait être appuyé de manière appropriée et en permanence par un personnel qui lui soit spécialement affecté et devrait être à même de consulter systématiquement les institutions nationales des droits de l ’ homme et la société civile.
C.Prochain rapport
77.Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son rapport valant troisième à septième rapports périodiques le 3 juin 2025 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devra être conforme aux directives spécifiques à l ’ instrument (CRC/C/58/Rev.3) que le Comité a adoptées le 31 janvier 2014 et ne pas dépasser 21 200 mots (voir la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale, par. 16). Si l ’ État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur de manière à se conformer à la résolution susmentionnée. S ’ il n ’ est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d ’ examen par le Comité ne pourra pas être garantie.
78. Le Comité invite en outre l ’ État partie à soumettre un document de base actualisé qui ne dépasse pas 42 400 mots et soit conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées pour l ’ établissement des rapports à présenter en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I), et au paragraphe 16 de la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale.