Cinquante-deuxième session

9-27 juillet 2012

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Bulgarie

Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a examiné le rapport regroupant les quatrième, cinquième, sixième et septième rapports périodiques de la Bulgarie (CEDAW/C/BGR/4-7) à ses 1045e et 1046e séances, le 12 juillet 2012 (voir CEDAW/C/SR.1045 et 1046). Le document CEDAW/C/BGR/Q/4-7 présente la liste des questions suscitées par les rapports périodiques. Les réponses du Gouvernement bulgare sont consignées dans le document CEDAW/C/BGR/Q/4-7/Add.1.

A.Introduction

Le Comité félicite l’État partie pour son rapport regroupant ses quatrième, cinquième, sixième et septième rapports périodiques. Il regrette cependant que ce rapport se soit tant fait attendre, qu’il ne soit que rarement conforme aux directives concernant l’établissement des rapports, et qu’il ne présente pas de statistiques ventilées selon le sexe ni de données qualitatives sur la situation des femmes dans les domaines visés par la Convention, en particulier concernant les femmes appartenant à des groupes défavorisés. Le Comité remercie l’État partie de ses réponses écrites à la liste des questions et interrogations soulevées par son groupe de travail d’avant-session et d’avoir répondu aux questions posées oralement par le Comité lui-même.

Le Comité remercie l’État partie de la présence de sa délégation, dirigée par le Représentant permanent de la Bulgarie auprès de l’Organisation des Nations Unies, Stephan Tafrov, et constituée de représentants de divers ministères et services gouvernementaux bulgares. Il se réjouit du dialogue qui s’est instauré entre la délégation et les membres du Comité, regrettant toutefois que certaines questions soient restées sans réponse et que les réponses aient parfois manqué de clarté et de précision.

B.Aspects positifs

Le Comité salue l’adoption, depuis l’examen du présent rapport, de plusieurs lois visant à l’élimination de la discrimination et de la violence à l’égard des femmes, notamment :

a)De la loi sur la protection contre la discrimination (janvier 2004), qui rejette la charge de la preuve sur le défendeur;

b)De la loi sur la protection contre la violence familiale (mars 2005, amendée en 2009), et l’amendement correspondant apporté à l’article 296 1) du Code pénal qui érige en infraction tout manquement à une ordonnance de protection;

c)De la loi sur la lutte contre la traite des êtres humains (mai 2003);

d)De la loi sur l’assistance judiciaire (janvier 2006) et de la loi sur la fourniture d’une aide et d’une compensation financière aux victimes (janvier 2007);

e)Du nouveau Code de la famille (octobre 2009).

Il félicite l’État partie d’avoir créé des institutions et adopté des mesures en vue d’accélérer cette élimination et de promouvoir l’égalité des sexes – on citera par exemple la création du Bureau de l’Ombudsman en 2005; de la Commission de protection contre les discrimination, en 2005 également; de la Commission nationale de lutte contre la traite de personnes; et du Mécanisme national d’orientation pour les victimes de la traite des êtres humains, en 2010; ainsi que l’adoption de la Stratégie nationale pour la promotion de l’égalité des sexes (2009-2015); du programme national de prévention et de protection en matière de violence domestique; de la Stratégie nationale d’intégration des Roms (2012-2020); et du Programme national pour la prévention et la neutralisation de la traite des êtres humains et la protection de ses victimes.

Il se réjouit que l’État partie ait ratifié, le 20 septembre 2006, le Protocole facultatif à la Convention, et qu’il ait accepté en 2010 l’amendement à l’article 20 de la Convention.

Le Comité se réjouit en outre que, depuis son examen du précédent rapport, l’État partie ait ratifié les instruments internationaux et régionaux ci-après, ou y ait adhéré :

a)La Convention concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (Convention no 182) (2000) de l’Organisation internationale du Travail;

b)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (2001) et le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (2001);

c)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (2002);

d)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2002);

e)La Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (2005);

f)La Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (2007);

g)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (2011);

h)La Convention relative aux droits des personnes handicapées (2012).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Le Comité rappelle que l’État partie a l’obligation d’appliquer toutes les dispositions de la Convention de façon permanente et systématique, et estime que l’État partie doit, d’ici à la présentation de son prochain rapport périodique, prêter en priorité attention aux préoccupations et recommandations faisant l’objet des présentes observations finales. Il lui demande donc de privilégier les domaines d’activité correspondants dans ses activités de mise en œuvre et de rendre compte, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu’il aura prises et des résultats qu’il aura obtenus. Il lui demande également de soumettre les présentes observations finales à tous les ministères et services gouvernementaux concernés, au Parlement et aux instances judiciaires, de façon à en assurer la pleine application.

Visibilité de la Convention

Conformément à l’article 5 de la Constitution, la Convention fait partie intégrante du droit interne de l’État partie. Le Comité note toutefois avec préoccupation que dans la pratique, la Convention n’a pas reçu une visibilité suffisante en tant que base juridique pour les mesures visant à éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir l’égalité des sexes, y compris les mesures législatives et de politique générale. Il s’inquiète également de l’insuffisance des connaissances et des informations des différentes branches du Gouvernement, de l’Assemblée nationale et du pouvoir judiciaire au sujet des droits des femmes énoncés dans la Convention, du concept d’égalité de fait ou d’égalité matérielle entre les hommes et les femmes, du Protocole facultatif à la Convention, des recommandations générales du Comité et de ses constatations sur les communications émanant de particuliers. Le Comité est aussi préoccupé par l’absence de dispositif national visant à donner suite à ses constatations faites dans le cadre du Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre toutes les mesures appropriées pour garantir que la Convention, en tant qu’instrument juridiquement contraignant, est suffisamment connue et utilisée par le Gouvernement, l’Assemblée nationale et le pouvoir judiciaire comme cadre pour les décisions d’ordre législatif, politique et judiciaire;

b) De veiller à ce que la Convention et son p rotocole facultatif, les recommandations générales du Comité, ses constations sur les communications émanant de particuliers et ses enquêtes, ainsi que la législation nationale applicable, soient intégrés dans la formation des juristes, des juges, des procureurs, des fonctionnaires de police et autres agents chargés du maintien de l’ordre, afin de leur permettre d’interpréter les dispositions juridiques nationales à la lumière de la Convention;

c) De continuer d’informer les femmes de leurs droits aux termes de la Convention et des procédures régissant les communication s et les enquêtes établies par le Protocole facultatif, notamment en traduisant en bulgare les recommandations générales du Comité et ses constatations, conformément à ce que demande le Protocole facultatif;

d) De mettre en place un dispositif national permettant de donner suite aux constatations du Comité, comme le demande le Protocole facultatif.

Cadre juridique pour l’égalité

Tout en notant que le principe général de non-discrimination est inscrit dans l’article 6 de la Constitution et qu’une définition générale de la discrimination figure dans la loi sur la protection contre la discrimination, le Comité demeure préoccupé par le fait que la discrimination à l’égard des femmes n’est pas expressément interdite et que le principe de l’égalité des sexes n’est pas intégré dans tous les domaines visés par la Convention, comme il est prescrit aux articles 1 et 2 de cette dernière, et le fait qu’aucune loi sur l’égalité des sexes n’a encore été adoptée malgré les recommandations faites à ce sujet par le Comité dans ses observations finales antérieures (A/53/38/Rev.1, par. 238 et 250) et par le Conseil des droits de l’homme dans l’examen périodique universel de la Bulgarie de novembre 2010 (A/HRC/16/9, par. 80.7).

Le Comité demande à l’État partie d’adopter une loi sur l’égalité des sexes interdisant toute forme de discrimination de nature sexuelle ou sexiste dans tous les domaines visés par la Convention, prévoyant notamment de s sanctions en cas de violation, et consacrant le principe de l’égalité entre les femmes et les hommes, conformément aux articles 1 et 2 de la Convention.

Mécanismes juridiques de dépôt de plaintes

S’il se félicite de la création du Bureau de l’Ombudsman et de la Commission pour la protection contre les discriminations, le Comité s’inquiète du fait que ces deux structures ne respectent pas pleinement les principes concernant le statut des institutions nationales (Principes de Paris). Il est également préoccupé par le faible nombre de plaintes pour discrimination sexuelle reçues par les deux institutions et déposées auprès des tribunaux de l’État partie. De plus, s’il se félicite de la promulgation par ce dernier d’une loi sur l’assistance juridique et de la création d’un bureau national en la matière, le Comité prend note avec inquiétude des obstacles concrets que doivent surmonter les femmes lorsqu’elles cherchent à obtenir réparation pour des actes de discrimination de nature sexuelle ou sexiste et de l’insuffisance des services d’assistance juridique et de conseils qui leur sont offerts, en particulier quand elles appartiennent à des groupes désavantagés.

Le Comité exhorte l’État partie à renforcer ses mécanismes de dépôt de plaintes afin de garantir que toutes les femmes ont effectivement accès à la justice et lui recommande  :

a) De continuer à renforcer le Bureau de l’Ombudsman et la Commission pour la protection contre les discriminations afin de les mettre pleinement en conformité avec les Principes de Paris, et de développer leurs activités en matière de discrimination de nature sexuelle ou sexiste;

b) De prendre des mesures pour mieux informer les femmes et leur faire mieux comprendre leurs droits en vertu de la Convention et le fonctionnement des mécanismes de dépôt de plaintes existants afin qu’elles soient mieux en mesure de demander réparation en cas de discrimination;

c) De permettre aux femmes d’accéder effectivement à l’assistance juridique en renforçant les dispositifs en place dans ce domaine et en veillant à ce qu’elles soient suffisamment informées de leurs droits au cours de la procédure lorsqu’elles recourent à des moyens de droit.

Institutions nationales de promotion de la femme

Le Comité se félicite de la mise en place du Département de l’égalité des chances, de la lutte contre la discrimination et de l’assistance sociale au sein du Ministère du travail et de la politique sociale, et du Conseil national sur l’égalité des sexes au sein du Conseil des ministres, mais il note le manque d’informations sur la façon dont les institutions nationales protègent les droits des femmes et en particulier surveillent la situation des femmes dans tous les domaines visés par la Convention. Il est aussi préoccupé par le fait que ces mécanismes n’ont pas une autorité et une visibilité suffisantes et que leurs ressources humaines et financières sont insuffisantes pour promouvoir efficacement l’application de la Convention. Le Comité est également préoccupé par le caractère limité des moyens dont dispose le Département pour assurer une coopération et une coordination effective avec les organisations non gouvernementales représentant les femmes.

Le Comité recommande à l’État partie de consolider rapidement les institutions nationales en renforçant leur autorité et leur visibilité, en les dotant de ressources humaines et financières suffisantes pour les rendre plus efficaces et en les aidant à établir, à coordonner et à suivre l’élaboration et l’application de mesures législatives et gouvernementales dans le domaine de l’égalité des sexes. Le Comité exhorte aussi l’État partie à coopérer plus activement avec les organisations non gouvernementales représentant les femmes pour assurer la mise en œuvre de la Convention et en surveiller l’application.

Le Comité apprécie le caractère global de la Stratégie nationale pour la promotion de l’égalité des sexes (2009-2015) et l’adoption des plans d’action nationaux annuels, mais il déplore le manque d’informations au sujet des résultats obtenus et des obstacles et difficultés rencontrés dans l’application.

Le Comité demande à l’État partie d’assurer l’application effective de la stratégie et des plans d’action, de suivre et d’évaluer régulièrement les progrès réalisés et de communiquer au Comité des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité prend note des mesures prises pour favoriser l’égalité des sexes dans les domaines de l’emploi et de l’éducation visés aux articles 24 et 38 de la loi sur la protection contre les discriminations, mais il demeure préoccupé par le fait que l’État partie ne comprenne pas le paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention sur les mesures temporaires spéciales et n’ait pas eu recours à ce type de mesures comme politique générale pour accélérer la réalisation de l’égalité de facto entre les femmes et les hommes, y compris en ce qui concerne la participation des femmes à la vie publique et politique.

Le Comité demande à l’État partie :

a) De mettre en place une base juridique, par exemple dans la future loi sur l’égalité des sexes, lui permettant de recourir aux mesures spéciales temporaires conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o  25 du Comité, et d’appliquer des quotas et d’autres mesures temporaires spéciales telles que les recrutements et les promotions ciblés, les incitations et l’allocation préférentielle de fonds dans les domaines où les femmes sont sous-représentées ou désavantagées;

b) D’informer tous les responsables concernés au sujet du concept de mesures spéciales temporaires en tant que stratégie nécessaire pour accélérer la réalisation sans délai de l’égalité de fait ou de l’égalité matérielle entre les hommes et les femmes dans tous les domaines visés par la Convention.

Stéréotypes et pratiques discriminatoires

Le Comité salue les efforts faits par l’État partie pour éradiquer les stéréotypes féminins ancrés dans les familles, les médias et l’ensemble de la société, notamment par le biais de mesures législatives comme le congé de paternité, mais réitère sa préoccupation quant à la persistance de schémas stéréotypés concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société qui insistent de façon excessive sur le rôle traditionnel des femmes en tant que mères et épouses et continuent à influencer leurs choix d’étude et de profession. Le Comité constate également avec préoccupation que les médias et le secteur de la publicité véhiculent systématiquement une image sexualisée et commercialisée des femmes.

Le Comité demande à l’État partie :

a) De redoubler d’efforts pour mettre en place une politique globale comportant des mesures proactives et soutenues, visant les femmes et les hommes, les filles et les garçons, afin de dépasser les mentalités stéréotypées concernant les rôles et responsabilités des femmes et des hommes au sein de la famille et de la société;

b) De prendre toutes les mesures appropriées pour sensibiliser davantage les médias et le secteur publicitaire afin qu’ils éliminent les stéréotypes sexuels, veillent à ce que les femmes ne soient pas représentées comme des produits sexualisés, et favorisent une image objective des femmes participant activement à la vie sociale, économique et politique.

Violence dirigée contre les femmes

Le Comité prend note des informations communiquées concernant la révision du Code pénal, mais il est gravement préoccupé par son article 158, qui prévoit l’abandon des poursuites pénales contre les violeurs lorsqu’ils épousent leur victime.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’abroger rapidement l’article 158 du C ode pénal et de veiller à ce que tout acte de violence sexuelle commis à l’encontre de femmes et de filles fasse effectivement l’objet d’une enquête et à ce que les auteurs soient poursuivis et condamnés en proportion de la gravité de leur crime.

Le Comité réaffirme qu’il est gravement préoccupé par le taux de prévalence élevé de la violence dans la famille, par la persistance de comportements socioculturels cautionnant cette violence et par le fait qu’elle est passée inaperçue. Il est particulièrement préoccupé par l’absence de dispositions spécifiques criminalisant la violence familiale et le viol conjugal, par l’absence de poursuites pénales pour les violences commises au sein de la famille, ainsi que par le fait que les autorités judiciaires ne suivent pas la pratique consistant à déplacer la charge de la preuve en faveur des victimes, prévue par la loi sur la protection contre la violence familiale. Le Comité est également préoccupé par le manque de ressources pour financer des centres d’accueil pour les femmes victimes de violence familiale. En ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations figurant dans sa décision sur la communication n° 20/2008 (CEDAW/C/49/D/20/2008, par. 9.16), le Comité prend note des informations indiquant qu’un groupe de travail avait été créé dans le cadre du Ministère de la justice afin de modifier la loi sur la protection contre la violence familiale et de prolonger d’un mois le délai permettant de déposer une demande d’ordonnance de protection.

Le Comité demande instamment à l’État partie :

a) De modifier son code pénal et son code de procédure pénale en vue de criminaliser expressément la violence familiale et le viol conjugal et d’introduire la possibilité de poursuivre d’office ces deux infractions;

b) De modifier le paragraphe 1 de l’article 10 de la loi sur la protection contre la violence familiale afin de supprimer le délai d’un mois accordé pour déposer une demande d’ordonnance de protection, et de veiller à ce que les autorités judiciaires respectent rigoureusement le paragraphe 3 de l’article 13 de la loi afin d’alléger la charge de la preuve en faveur de la victime;

c) De veiller à ce qu’un nombre suffisant de centres d’accueil financés par l’État soient à la disposition des femmes victimes de violence familiale et de leurs enfants, et de soutenir les organisations non gouvernementales qui offrent un refuge et d’autres formes d’aide aux victimes de violence familiale;

d) De dispenser aux juges, aux juristes et au personnel des services de police une formation obligatoire portant sur l’application de la loi sur la protection contre la violence familiale, y compris sur la définition de la violence familiale et sur les stéréotypes sexuels;

e) De fixer un calendrier pour la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

Traite et prostitution

27.Le Comité se félicite des mesures législatives, institutionnelles et gouvernementales prises pour lutter contre la traite de personnes, mais il demeure préoccupé par les lacunes dans la mise en œuvre de la législation et des stratégies, l’absence de mesures préventives visant les causes profondes de la traite, notamment en ce qui concerne les femmes roms, et par le manque de centres d’accueil pour les femmes victimes de traite. Il note également le caractère inadéquat de l’assistance et de la protection offertes aux victimes et l’absence de procédures de réinsertion, d’indemnisation et de financements pour la coopération avec des organisations non gouvernementales qui fournissent une aide et des refuges temporaires aux victimes. Conscient du fait que l’exploitation sexuelle est une infraction pénale dans l’État partie, le Comité déplore l’absence d’informations sur les femmes et les adolescentes victimes de traite aux fins d’exploitation sexuelle. Il note aussi un manque d’informations sur la prévalence de la prostitution dans l’État partie et sur les programmes prévus pour aider les femmes qui souhaitent abandonner la prostitution.

28. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De s’attaquer aux causes profondes de la traite et de l’exploitation des femmes, en redoublant d’efforts pour améliorer la situation économique des femmes et des filles, en particulier des femmes roms, éliminant ainsi leur vulnérabilité à l’exploitation et aux trafiquants;

b) De fournir à toutes les femmes victimes de la traite une aide et une protection suffisantes, d’augmenter le nombre de centres d’accueil, d’accélérer les efforts visant à mettre en place des mécanismes d’indemnisation des victimes et de renforcer les programmes de réinsertion sociale à leur intention;

c) De développer la coopération avec les organisations non gouvernementales visant à mettre en place et contrôler le mécanisme national d’orientation pour les victimes de traite et de fournir des financements aux activités de ces organisations ayant pour objectif de lutter contre la traite;

d) D’aborder la question de l’exploitation de la prostitution de façon globale, notamment en élaborant des stratégies de prévention de la prostitution et en exécutant des programmes de soutien et de réinsertion à l’intention des femmes qui souhaitent abandonner la prostitution, et de concentrer les efforts sur les enquêtes, les poursuites et les sanctions concernant les personnes qui exploitent la prostitution.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité se félicite de la participation des femmes aux activités électorales de l’État partie, de la présence de quelques femmes à des postes de haut niveau, ainsi que du pourcentage élevé de femmes juges et du nombre de femmes occupant des postes de décision de niveau intermédiaire au sein des ministères, mais il reste préoccupé par la sous-représentation persistante des femmes, en particulier les femmes roms, au niveau municipal, à l’Assemblée nationale, à des postes de haut rang dans les services diplomatiques et dans les établissements universitaires. Le Comité est également préoccupé par l’absence de mesures volontaristes et suivies visant à promouvoir et accélérer une augmentation de cette représentation.

Le Comité encourage l’État partie à accélérer la réalisation d’une participation pleine et égale des femmes à la vie publique et politique, et à faire augmenter le nombre de femmes occupant des postes de très haut niveau, y compris en recourant à des mesures temporaires spéciales. Il recommande également à l’État partie d’inciter les partis politiques à désigner des candidats et candidates en nombre égal, et d’adopter des règles électorales garantissant aux femmes des chances égales d’être élues, ainsi que d’instaurer un climat propice à la participation politique des femmes, y compris les femmes roms et celles appartenant à d’autres groupes de femmes défavorisées.

Éducation

Le Comité note avec préoccupation la persistance de la ségrégation des sexes dans l’éducation, en particulier dans l’enseignement professionnel, où les femmes et les filles continuent d’être en majorité cantonnées dans les spécialités non techniques. Il réitère en outre la préoccupation qu’il avait exprimée dans ses précédentes observations finales (A/53/38/Rev.1, par. 245) concernant les taux élevés d’abandon scolaire parmi les filles et femmes roms. Il note également avec préoccupation le très faible nombre de femmes roms dans l’enseignement supérieur. Le Comité déplore le manque de renseignements sur les résultats des diverses mesures prises pour y remédier.

Le Comité prie instamment l’État partie :

a) D’élaborer des mesures visant à diversifier les choix éducatifs et professionnels des femmes, y compris des programmes d’orientation sociale;

b) De prendre des mesures pour faire diminuer les taux d’abandon scolaire parmi les filles roms en s’attaquant à leurs causes profondes, et réintégrer ces dernières dans le système éducatif, en mettant pleinement en œuvre la Stratégie pour l’intégration dans l’éducation des enfants et étudiants issus de minorités ethniques et la Stratégie nationale d’intégration des Roms (2012-2020).

Emploi

Le Comité prend note avec satisfaction de l’incorporation du principe d’un salaire égal pour un travail de valeur égale dans le droit interne, de l’interdiction du harcèlement sexuel par la loi protégeant de la discrimination et de l’adoption d’une stratégie nationale pour l’emploi (2008-2015) et d’un plan national d’action pour l’emploi. Toutefois, il se déclare préoccupé par la persistance d’une ségrégation professionnelle verticale et horizontale ainsi que d’un écart entre les salaires des femmes et ceux des hommes, en particulier dans le secteur public, par l’augmentation du taux de chômage des femmes et par l’exclusion des femmes roms du marché du travail officiel. Il est également préoccupé par le manque de renseignements sur les plaintes liées à la discrimination au travail fondée sur le sexe, ainsi que par la faiblesse du nombre de cas signalés de harcèlement sexuel et du nombre d’hommes prenant un congé parental.

Le Comité recommande que l’État partie prenne des mesures en vue :

a) De réduire et de combler l’écart entre l es salaires des femmes et ceux des hommes en appliquant des systèmes d’évaluation des emplois dans les secteurs public et privé, concomitamment avec des augmentations de salaires dans les secteurs où les femmes sont les plus nombreuses, et de renforcer l’accès des femmes, y compris les femmes roms et celles appartenant à d’autres groupes défavorisés, aux emplois recensés et à l’entrepreneuriat;

b) De fournir des renseignements sur l’application des dispositions juridiques relatives à la discrimination au travail fondée sur le sexe et au harcèlement sexuel, et de faire figurer ces données dans son prochain rapport périodique;

c) D’encourager les hommes à partager les responsabilités parentales sur un pied d’égalité avec les femmes, y compris en prenant un congé parental.

Santé

Le Comité se félicite de la diminution de la mortalité maternelle et des efforts de l’État partie pour fournir une éducation en matière de santé sexuelle et reproductive dans les écoles, ainsi qu’un accès aux moyens contraceptifs, mais il demeure préoccupé par l’augmentation du nombre de grossesses précoces et le taux élevé d’avortements, en particulier chez les adolescentes et les femmes de moins de 20 ans, ce qui indique que l’avortement continue d’être utilisé comme une méthode de contrôle des naissances. Le Comité est en outre préoccupé par le manque d’information sur le degré d’intégration des femmes roms dans le système de santé obligatoire réformé.

Le Comité invite l’État partie à redoubler d’efforts pour promouvoir systématiquement l’éducation sur le droit à la santé sexuelle et reproductive et cibler les adolescents des deux sexes, notamment dans les écoles professionnelles, en prêtant une attention particulière à la prévention des grossesses précoces, ainsi qu’à fournir des services adéquats de planification familiale et des contraceptifs à un prix abordable, conformément aux recommandations formulées en novembre 2010 par le Conseil des droits de l’homme lors de l’examen périodique universel de la Bulgarie (A/HRC/16/19, par. 80.30). Le Comité prie l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur l’accès des femmes roms aux soins de santé.

Le Comité prend note des renseignements fournis à propos de l’adoption récente, par le Gouvernement, de la réglementation interdisant les demandes illégales de paiement supplémentaire par le personnel médical et de la création d’un groupe de travail chargé d’élaborer une charte des droits et devoirs du patient, mais exprime sa préoccupation au sujet de l’incidence particulière sur les femmes du climat défavorable en matière de soins de santé et du manque de mécanismes de recours efficaces.

Le Comité prie instamment l’État partie de veiller à ce que les prestataires de soins de santé soient pleinement sensibilisés aux besoins particuliers des femmes en la matière et d’adopter la Charte des droits et devoirs du patient, ainsi que de mettre en place des mécanismes de recours efficaces pour permettre aux femmes de demander réparation en cas de discrimination ou de mauvaises pratiques en matière de soins de santé.

Avantages économiques et sociaux

Le Comité prend note de l’objectif de réduire de 260 000 le nombre des personnes vivant dans la pauvreté mentionné dans le programme national de réforme (2011-2015), mais il est préoccupé de constater la féminisation de la pauvreté, en particulier chez les femmes roms, les femmes handicapées, les femmes rurales et les femmes âgées, et l’absence du souci de l’égalité des sexes dans la stratégie de lutte contre la pauvreté. Il regrette également le manque de renseignements à propos de l’impact de la crise économique actuelle sur les femmes, ainsi que de la réforme en cours de la protection sociale, notamment en ce qui concerne l’âge d’ouverture des droits à pension qui n’est pas le même pour les femmes et les hommes.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’intégrer le souci de l’égalité des sexes dans tous les programmes de réduction de la pauvreté et de développement, afin de garantir que les femmes en bénéficient pleinement de ces mesures selon leurs besoins ;

b) De veiller à ce que, dans la réforme en cours de la protection sociale, les taux des prestations sociales garantissent un niveau de vie suffisant aux femmes et à leur famille , et de fournir des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Femmes rurales

Le Comité se félicite que le Programme de développement rural (2007-2013) établisse le principe de l’égalité entre les hommes et les femmes et prévoie des activités de formation visant à améliorer les compétences techniques des femmes rurales, mais il se déclare préoccupé par l’insuffisance des renseignements disponibles en ce qui concerne leur accès aux services sociaux et aux prestations de retraite, par la faiblesse du pourcentage de femmes possédant des terres et ayant accès au microcrédit, et par le manque de renseignements sur le programme pour la promotion de l’entrepreneuriat féminin dans l’agriculture.

Le Comité invite l’État partie à redoubler d’efforts pour améliorer l’émancipation économique et politique des femmes dans les zones rurales, notamment en examinant les causes de la faiblesse du nombre de femmes possédant des terres et ayant accès à des facilités de crédit. Il prie également l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport des renseignements sur l’accès des femmes rurales aux services sociaux et aux prestations de retraite, ainsi que sur les résultats de la mise en œuvre du Programme de développement rural (2007-2013) et du Programme pour la promotion de l’entrepreneuriat féminin dans l’agriculture.

Femmes appartenant à des groupes défavorisés

Le Comité note que très peu d’informations et de statistiques sont disponibles sur la situation des femmes appartenant à des groupes défavorisés, comme les femmes issues de minorités ethniques, les femmes âgées et les femmes handicapées. Il s’inquiète de la vulnérabilité et de la marginalisation de ces femmes, qui souffrent souvent de multiples formes de discrimination, notamment en ce qui concerne l’accès à l’éducation, à l’emploi, à un logement décent, aux soins de santé, à une protection contre la violence, à la justice, et qui sont très peu informées des mesures temporaires spéciales qui pourraient les aider à améliorer leur situation.

Le Comité demande à l ’ État partie de fournir, dans son prochain rapport, des données statistiques complètes ventilées selon le sexe sur la situation des femmes appartenant à des groupes défavorisés, comme les femmes issues de minorités ethniques, les femmes âgées et les femmes handicapées, dans tous les domaines visés par la Convention, ainsi que des informations sur les programmes spécifiques lancés à cet égard. Il recommande que l ’ État partie prenne de s mesures concrètes, notamment d es mesures temporaires spéciales, en vue d ’ accélérer l ’ instauration d ’ une égalité de fait pour ces femmes appartenant à des groupes défavorisés.

Le Comité constate en outre avec inquiétude que l’État partie ne considère pas la persécution liée à l’appartenance sexuelle comme un motif justifiant l’octroi du statut de réfugié.

Sur la base de la déclaration faite par la délégation de l ’ État partie, qui affirme que la question est actuellement examinée par des commissions parlementaires, le Comité appelle l ’ État partie à considérer la persécution lié e à l ’ appartenance sexuelle comme un motif justifiant l ’ octroi du statut de réfugié, conformément à la Convention relative au statut des réfugiés (1951).

Mariage et relations familiales

S’il félicite l’État partie de l’adoption d’un nouveau Code de la famille en 2009, le Comité note que ce code ne définit pas bien le régime matrimonial de communauté des biens incorporels, ni ce qu’il recouvre exactement, en particulier s’agissant de déterminer si les pensions de retraite et les indemnités d’assurance et autres actifs professionnels font partie du patrimoine à diviser à parts égales en cas de divorce. Le Comité s’inquiète aussi d’avoir entendu dire que, dans la pratique, les femmes n’avaient pas suffisamment de voies de recours pour réclamer à leurs anciens conjoints ou compagnons le versement d’une pension alimentaire pour les enfants, et que le Gouvernement de l’État partie avait du mal à faire appliquer la loi à cet égard. Le Comité note également que l’État partie n’indique pas si des allocations sont prévues pour aider à subvenir aux besoins des enfants.

Le Comité appelle l ’ État partie à s ’ assurer que le régime matrimonial de la communauté recouvre les biens incorporels, not amment les pensions de retraite , indemnités d ’ assurance et autres actifs professionnels, et que les biens communs sont équitablement répartis . Il recommande en outre que des mesures correctives concrètes soient prises pour permettre aux femmes de réclam er et d ’ obtenir une pension alimentaire pour subvenir aux besoins des enfants nés de leur union avec leur ancien époux ou compagnon, et que des services d ’ aide juridique soient mis à la disposition des femmes aux moyens insuffisants. Le Comité demande à l ’ État partie de l ’ informer, dans son prochain rapport, de la situation concernant les allocations prévues par le Gouvernement pour aider à subvenir aux besoins des enfants.

Le Comité est préoccupé par le fait que les mariages arrangés et les mariages précoces se pratiquent toujours beaucoup dans les communautés roms, que peu d’informations soient disponibles à ce sujet et que la Stratégie nationale d’intégration des Roms (2012-2020) ne comporte pas de mesures spécifiques pour lutter contre cette pratique néfaste.

Le Comité recommande que l ’ État partie fournisse des efforts supplémentaires pour : recueillir des données concernant l ’ ampleur du mariage précoce ; faire savoir aux communautés r oms que le mariage des enfants est interdit et qu ’ il a des conséquences néfastes sur la santé des filles et leurs chances de terminer leurs études ; et enquêter, engager des poursuites judiciaires et infliger les sanctions nécessaires dans les affaires de mariage forcé et de mariage précoce.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité engage l ’ État partie à s ’ acquitter pleinement de ses obligations en vertu de la Convention en se fondant sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et le prie de présenter des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne que les dispositions de la Convention doivent être appliquées intégralement et efficacement afin que les objectifs du Millénaire pour le développement soient atteints. Il demande à l ’ État partie d ’ appliquer le principe de l ’ égalité des sexes et de s ’ appuyer expressément sur les dispositions de la Convention dans l ’ action qu ’ il mène pour atteindre ces objectifs et le prie de lui fournir des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Diffusion

Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées en Bulgarie pour que la population du pays, en particulier les fonctionnaires, les responsables politiques, les parlementaires et les membres d ’ organisations de femmes et de défense des droits de l ’ homme , soit au fait des mesures prises pour assurer l ’ égalité de droit et de fait entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Le Comité recommande d ’ en assurer la diffusion au niveau local. L ’ État partie est invité à organiser une série de réunions pour examiner les progrès réalisés dans la mise en œuvre des présentes observations. Le Comité demande également à l ’ État partie de continuer de diffuser largement, surtout au sein des organisations de femmes et de défense des droits de l ’ homme, les recommandations générales du Comité, la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing ainsi que les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l ’ Assemblée générale sur le thème «  Les femmes en l ’ an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e siècle  » .

Ratification d’autres instruments

Le Comité note que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme est de nature à renforcer la jouissance par les femmes de leurs libertés et droits fondamentaux dans tous les aspects de la vie. Il invite donc le Gouvernement de l ’ État partie à envisager de ratifier les instruments auxquels il n ’ est pas encore partie, à savoir la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des m embres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Suivi des observations finales

Le Comité demande à l ’ État partie de lui fournir, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu ’ il aura prises pour donner suite aux recommandations figurant ci-dessus aux paragraphes 16 et 26.

Élaboration du prochain rapport

Le Comité engage l ’ État partie à veiller à ce que tous les ministères et organismes publics participent largement à l ’ élaboration de son prochain rapport, ainsi qu ’ à consulter, lors de cette étape, une vaste gamme d ’ organisations de femmes et de défense des droits de l ’ homme.

57. Le Comité demande à l ’ État partie de répondre, dans le prochain rapport périodique qu ’ il établira en application de l ’ article 18 de la Convention, aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales. Il l ’ invite à présenter son prochain rapport périodique en juillet 2016.

58. Le Comité invite l ’ État partie à respecter les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument, approuvées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, qui s ’ est tenue en juin 2006 (HRI/MC/2006/3 et Corr.1). Les directives concernant l ’ établissement des rapports qui lui sont destinés, adoptées par le Comité à sa quarantième session en janvier -février 2008 (A/63/38, annexe  I), doivent être mises en œuvre concurremment avec les directives harmonisées concernant l ’ établissement du document de base commun. Ensemble, elles constituent les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre de la Convention. Le document propre à cet instrument ne devrait pas dépasser 40 pages et le document de base actualisé 80 pages.