Observations finales concernant le sixième rapport périodique des Bahamas *

Le Comité a examiné le sixième rapport périodique des Bahamas (CEDAW/C/BHS/6) à ses 1635e et 1636e séances (voir CEDAW/C/SR.1635 et CEDAW/C/SR.1636), le 25 octobre 2018. La liste de points établie par le Comité figure dans CEDAW/C/BHS/Q/6 et les réponses de l’État partie, dans CEDAW/C/BHS/Q/6/Add.1.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique de l’État partie. Il le remercie des renseignements reçus au sujet de la suite donnée aux observations finales (CEDAW/C/BHS/CO/1-5/Add.1), des réponses écrites apportées à la liste de points établie par le groupe de travail d’avant-session, complétées oralement par la délégation, et des éclaircissements complémentaires donnés en réponse aux questions orales posées par le Comité pendant le dialogue.

Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau, conduite par le Ministre des services sociaux et de l’urbanisation, Frankie A. Campbell. La délégation comprenait aussi des représentants du Département du genre et des affaires familiales, du Bureau du Procureur général et du Ministère des affaires juridiques, du Ministère de l’éducation, du Ministère de la santé, du Ministère des affaires étrangères et de la Mission permanente des Bahamas auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis dans la mise en œuvre de réformes législatives depuis l’examen, en 2012, du rapport unique valant rapport initial et deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques (CEDAW/C/BHS/4) et du cinquième rapport périodique (CEDAW/C/BHS/5) de l’État partie, en particulier l’adoption des textes suivants :

* Adopté par le Comité à sa soixante et onzième session (22 octobre-9 novembre 2018).

a)Amendement à la loi relative aux infractions sexuelles, portant création d’un registre et d’un service d’enregistrement des délinquants sexuels, en 2014 ;

b)Loi relative à l’égalité des chances pour les personnes handicapées, en 2014.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique et ainsi accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et promouvoir l’égalité des sexes, notamment par :

a)La conversion du Bureau des affaires féminines en Département du genre et des affaires familiales, rattaché au Ministère des services sociaux et l’urbanisation, et l’augmentation des ressources qui lui sont allouées, en 2016 ;

b)L’établissement d’une Commission nationale pour les personnes handicapées, en 2014 ;

c)La création d’une équipe spéciale chargée de la violence fondée sur le genre, en 2013, suivie de l’élaboration de plans de mise en œuvre stratégiques ;

d)La création d’un comité interministériel sur la traite des êtres humains et d’une équipe spéciale chargée de la traite des êtres humains, en 2013.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié les instruments internationaux suivants, ou d’y avoir adhéré, au cours de la période écoulée depuis l’examen des précédents rapports :

a)Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2018 ;

b)Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2015 ;

c)Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en 2015 ;

d)Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2015.

Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite de l’appui apporté par la communauté internationale aux objectifs de développement durable et invite l’État partie à réaliser l’égalité de jure (dans la loi) et de facto (effective) des femmes et des hommes, conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les aspects de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il rappelle l’importance de l’objectif 5 et de l’intégration des principes d’égalité et de non-discrimination dans l’ensemble des 17 objectifs. Il exhorte l’État partie à reconnaître que les femmes sont la force motrice de son développement durable et à adopter des politiques et des stratégies pertinentes à cet effet.

C.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif s’agissant de garantir la pleine mise en œuvre de la Convention (voir A/65/38 , deuxième partie, annexe VI). Il invite le Parlement, dans le cadre de son mandat, à prendre les mesures nécessaires en vue de mettre en œuvre les présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique, en application de la Convention.

D.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Réserves

Le Comité demeure préoccupé par le fait que l’État partie maintienne ses réserves à l’alinéa a) de l’article 2 concernant les obligations légales générales que la Convention fait aux États parties, et au paragraphe 2 de l’article 9 concernant la nationalité.

Le Comité recommande à l’État partie de démontrer son attachement à l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes en retirant ses réserves aux articles 2 a) et 9 2) selon un calendrier précis, de façon à garantir la pleine applicabilité de la Convention dans l’État partie.

Protection des femmes contre la discrimination aux plans constitutionnel et législatif

Le Comité relève avec inquiétude que les quatre projets de loi portant modification de la Constitution qui visaient à garantir l’égalité des sexes ont été rejetés par les électeurs lors du référendum tenu en juin 2016. Il note une nouvelle fois avec préoccupation que la Constitution et la législation nationale de l’État partie ne comportent pas de définition expresse de la discrimination à l’égard des femmes ni de dispositions consacrées à l’égalité des sexes qui soient conformes à la Convention. Il est préoccupé de constater, en particulier :

a)Que le paragraphe 1 de l’article 26 n’interdit pas la discrimination sexiste et ne protège pas les femmes contre la discrimination ;

b)Qu’il n’existe pas de mécanisme efficace permettant de faire appliquer les lois sur l’égalité des sexes et d’en contrôler la mise en œuvre et que la part du budget de l’État allouée à ces fins est insuffisante ;

c)Que l’État partie n’a pas mis fin à la discrimination, notamment à la discrimination croisée, en particulier à l’égard des femmes d’ascendance haïtienne, des migrantes, des femmes handicapées, des lesbiennes, bisexuelles, transgenres et intersexes, et des femmes qui vivent dans les Family Islands.

Rappelant sa recommandation précédente ( CEDAW/C/BHS/CO/1-5 , par. 14), le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures ci-après, conformément aux articles 1 er et 2 de la Convention et à sa recommandation générale n o  28 (2010) concernant les obligations fondamentales des États parties découlant de l’article 2 de la Convention  :

a) Fixer des échéances claires en vue de la mise en œuvre d’une réforme constitutionnelle qui s’appuiera sur une campagne d’information et de sensibilisation globale et sur la participation de l’ensemble de la société civile, le but étant d’étendre la protection garantie contre la discrimination par le paragraphe 1 de l’article 26 de la Constitution de sorte qu’elle s’applique aussi, au moins, à la discrimination fondée sur le sexe et le genre  ;

b) Veiller, dans les meilleurs délais, à procéder à une révision de fond de la législation en vigueur, à adopter une définition exhaustive de la discrimination à l’égard des femmes qui soit conforme à la Convention, et à introduire dans toutes les lois le principe de l’égalité des sexes  ;

c) Veiller à ce que l’interdiction de la discrimination fondée sur le sexe et le genre soit respectée dans la pratique en prévoyant des sanctions et des mécanismes d’application adaptés  ;

d) Adopter un plan d’action qui prévoie l’affectation de ressources suffisantes et comporte des échéances et des objectifs mesurables en vue de la mise en œuvre, par les autorités, des lois pertinentes, le but étant de prévenir et d’éliminer toutes les formes de discrimination de fait à l’égard des femmes et des filles, en particulier des femmes d’ascendance haïtienne, des migrantes et des demandeuses d’asile, des femmes handicapées, des lesbiennes, bisexuelles, transgenres et intersexes, et des résidentes des Family Islands.

Accès à la justice

Le Comité salue les efforts faits par l’État partie pour mettre en œuvre des programmes de renforcement des capacités à l’intention des magistrats. Il s’inquiète toutefois des moyens limités dont disposent la police et les tribunaux pour traiter les plaintes pour violence fondée sur le genre déposées par des femmes en tenant compte de la problématique du genre. Il note en outre avec préoccupation que, dans l’État partie, les femmes, en particulier celles qui appartiennent à des groupes de population défavorisés, ne connaissent pas les droits qui leur sont reconnus par la Convention et ne disposent donc pas des informations nécessaires pour pouvoir les faire valoir.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De renforcer le système judiciaire, notamment par l’affectation de ressources humaines, techniques et financières suffisantes et la mise en œuvre systématique, à l’intention des juges, des procureurs, des avocats, des policiers et autres responsables de l’application des lois, de programmes de formation juridique et de renforcement des capacités dans le domaine des droits de la femme et de l’égalité des sexes, et de sensibiliser la population pour mettre fin à la discrimination et la stigmatisation dont sont victimes les femmes et les filles qui revendiquent leurs droits  ;

b) De veiller à ce que la police et les tribunaux traitent rapidement et efficacement les plaintes pour violence fondée sur le genre déposées par des femmes et des filles, en tenant compte de la problématique du genre  ;

c) De mieux informer les femmes et les filles de leurs droits et des recours dont elles disposent en vertu de la Convention, notamment en menant des campagnes de sensibilisation en collaboration avec les organisations de la société civile et les associations locales de femmes.

Mécanismes nationaux pour la promotion de la femme

Le Comité note avec satisfaction qu’en octobre 2016, le Bureau des affaires féminines s’est converti en Département du genre et des affaires familiales, rattaché au Ministère des services sociaux et de l’urbanisation. Il est toutefois préoccupé par :

a)Les moyens humains limités dont dispose le Département du genre et des affaires familiales et par le fait que celui-ci n’utilise pas l’ensemble des ressources financières qui lui sont allouées ;

b)L’autonomie et l’autorité limitées dont jouit le Département du genre et des affaires familiales pour pouvoir exercer efficacement son mandat ;

c)La structure institutionnelle insuffisante du Département du genre et des affaires familiales, qui ne permet pas d’assurer la continuité des programmes fondamentaux mis en place en faveur de l’égalité des sexes dans tous les secteurs et à tous les niveaux de l’État dans l’ensemble du pays ;

d)Le retard pris dans l’adoption du projet de politique pour l’égalité des sexes et du projet de plan stratégique du Département du genre et des affaires familiales ;

e)La participation limitée de la société civile à la planification et à l’élaboration des politiques, programmes et activités menés dans le domaine des droits de la femme.

Rappelant les orientations du Programme d’action de Beijing, en particulier celles ayant trait aux conditions nécessaires au bon fonctionnement des mécanismes nationaux de promotion de la femme, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De dispenser une formation sur le genre au personnel du Département du genre et des affaires familiales et à tous les agents des différents ministères qui s’occupent de questions ayant trait à l’égalité des sexes et aux droits des femmes  ;

b) De déterminer de façon rationnelle les domaines et les lieux dans lesquels des efforts restent à faire, pour utiliser plus utilement les ressources financières allouées au Département du genre et des affaires familiales  ;

c) De renforcer l’autorité du Département, ainsi que son rôle en matière de réglementation et de contrôle, et de lui assurer l’autonomie nécessaire pour lui permettre d’exercer plus efficacement son mandat  ;

d) De renforcer l’architecture institutionnelle du Département pour l’adapter à l’objectif visé et veiller ainsi à ce qu’il puisse continuer d’exercer ses fonctions et de mettre en œuvre ses programmes fondamentaux dans tous les secteurs et à tous les niveaux de l’État  ;

e) D’accélérer l’adoption du projet de plan stratégique du Département du genre et des affaires familiales et du projet de politique pour l’égalité des sexes et de veiller à ce que cette politique comporte des indicateurs et des objectifs précis, le but étant d’aider les différentes parties prenantes à s’acquitter de leur obligation de rendre des comptes  ;

f) De renforcer la participation des organisations de la société civile dans le cadre de tous les mécanismes nationaux destinés à mettre en œuvre la Convention et les recommandations du Comité en vue de parvenir à l’égalité des sexes de façon globale et effective.

Institution nationale des droits de l’homme

Le Comité note qu’en octobre 2017, le projet de loi relatif au Médiateur a été présenté au Parlement, qui l’examine actuellement pour s’assurer que les modalités qu’il prévoit sont conformes aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Cependant, il relève une nouvelle fois avec préoccupation qu’il n’existe pas d’institution nationale des droits de l’homme indépendante et efficace qui soit investie d’un mandat conforme aux Principes de Paris en matière de droits de la femme.

Rappelant sa recommandation précédente ( CEDAW/C/BHS/CO/1-5 , par. 40), le Comité recommande à l’État partie de créer, dans les meilleurs délais, une institution nationale des droits de l’homme dotée d’un vaste mandat en pleine conformité avec les Principes de Paris, de lui fournir des ressources suffisantes et de lui confier un mandat bien défini en matière de droits de la femme.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité s’inquiète de l’absence d’une stratégie globale pour l’adoption et la mise en œuvre de mesures temporaires spéciales visant à instaurer une égalité réelle entre les femmes et les hommes dans l’État partie dans tous les domaines relevant de la Convention où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées, notamment dans la vie politique et publique, l’éducation, l’emploi et la santé.

Le Comité recommande à l’État partie de se prévaloir davantage de la possibilité de mettre en œuvre des mesures temporaires spéciales pour parvenir plus rapidement à l’égalité des sexes, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à sa recommandation générale n o  25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, en s’appuyant notamment sur les politiques et objectifs sectoriels, les plans à moyen terme et les modalités de réalisation des objectifs de développement durable, et d’envisager d’imposer des quotas et de prendre d’autres mesures axées sur une démarche préventive, assorties de sanctions en cas de non-respect, en vue d’instaurer une égalité réelle entre hommes et femmes dans tous les domaines relevant de la Convention dans lesquels les femmes sont sous-représentées ou défavorisées, notamment dans la vie publique et politique, l’éducation, la santé et l’emploi.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

Le Comité relève avec satisfaction que le Programme d’éducation sur la santé et la vie de famille comporte un volet consacré à la lutte contre les stéréotypes discriminatoires relatifs au genre. Il note en outre que le plan de mise en œuvre du projet de politique pour l’égalité des sexes comportera une stratégie globale de lutte contre les stéréotypes discriminatoires et les pratiques préjudiciables. Il n’en est pas moins vivement préoccupé par :

a)Les comportements patriarcaux et les stéréotypes discriminatoires profondément ancrés qui subsistent au sujet des rôles et des responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société, ces comportements et stéréotypes se traduisant par une méconnaissance, par la population, des questions touchant les droits des femmes et l’égalité des sexes, et par un débat public insuffisant sur ces questions ;

b)Le fait que ces stéréotypes constituent aussi les causes profondes de la violence à l’égard des femmes et que l’État partie n’a pas pris de mesures soutenues pour faire évoluer les stéréotypes discriminatoires à l’égard des femmes, en particulier des groupes de femmes défavorisées, ou venir à bout de ces stéréotypes.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’adopter sans délai le plan de mise en œuvre du projet de politique pour l’égalité des sexes et sa stratégie globale assortie de mesures soutenues, axées sur une démarche préventive, visant à lutter contre les stéréotypes discriminatoires et les pratiques préjudiciables à l’école, dans les médias et dans la sphère publique  ;

b) De mener de nouvelles campagnes de sensibilisation aux stéréotypes sexistes à l’intention de tous les agents de l’État, des notables, des chefs religieux et du grand public  ;

c) De renforcer , dans les établissements d’enseignement primaire et secondaire, la sensibilisation aux stéréotypes et aux préjugés sexistes, ainsi qu’aux rôles des hommes et des femmes au sein de la famille  ;

d) D’élaborer un plan d’action visant à éliminer les stéréotypes sexistes qui incitent à la violence à l’égard des femmes et des filles et de créer un mécanisme de suivi pour évaluer l’incidence des mesures mises en œuvre dans le cadre de cette démarche, en particulier sur la situation des femmes et des filles victimes de discrimination multiple et croisée.

Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

Le Comité note avec satisfaction qu’un certain nombre de mesures ont été prises pour lutter contre la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre, comme la création du Groupe de la prise en charge des cas de violence intrafamiliale et de l’accompagnement psychologique (DVCU), la désignation de l’Équipe spéciale nationale pour la question de la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, et l’élaboration d’un projet de plan stratégique national contre la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre. Le Comité note avec satisfaction également que des mesures ont été prises par la Police royale des Bahamas et les autorités judiciaires, dont la création d’un groupe des infractions sexuelles au sein du ministère public et l’initiative « Swift Justice » pour remédier aux retards dans l’accès à la justice. Il est préoccupé néanmoins par :

a)Le nombre élevé de cas de violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre, y compris de violence domestique et sexuelle et de viol, et le nombre élevé de cas signalés de crimes de haine visant des femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres et des personnes intersexuées, qui restent culturellement acceptés et peu dénoncés ;

b)L’absence de loi générale sur la question de la violence à l’égard des femmes et le retard pris dans la mise au point et l’adoption du projet de loi sur la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre et du projet de plan stratégique national contre la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre ;

c)Le retard pris dans l’adoption de projets de modification de la loi sur les infractions sexuelles qui soient pleinement conformes à la recommandation générale no 35 (2017) sur la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, portant actualisation de la recommandation générale no 19 ; et le projet de modification qui limite le droit de porter plainte pour viol conjugal à une période d’un an à compter du moment de l’infraction ;

d)Le retard pris dans la mise en place du registre et du service d’enregistrement des délinquants sexuels et l’absence de calendrier à cet égard ;

e)La pratique répandue des châtiments corporels qui constituent un moyen largement admis de discipliner les enfants à l’école et à la maison ;

f)L’arriéré judiciaire important d’affaires de violence à l’égard de femmes et de filles ;

g)Le nombre limité de foyers d’accueil publics pour les femmes et les filles victimes de violence fondée sur le genre et de violence sexuelle ;

h)L’absence de données, ventilées en fonction de l’âge et des liens entre victime et auteur, sur les cas de violence à l’égard des femmes et des filles qui ont donné lieu à une enquête et des poursuites, et sur les sanctions imposées aux auteurs, dans l’État partie.

Rappelant sa recommandation générale n o  35 et vu la cible 5.2 associée aux objectifs du développement durable (éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles) , le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’élaborer et d’appliquer des mesures globales de prévention et d’élimination de la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre, en particulier la violence domestique et sexuelle et le viol, d’évaluer le nombre de cas signalé s de crimes visant des femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres et des personnes intersexuelles, et d’ accentuer les efforts pour modifier les normes sociales et les perceptions culturelles qui tolèrent la violence fondée sur le genre en considérant celle-ci comme acceptable culturellement  ;

b) D’accélérer l’adoption du projet de loi complet sur la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre et du projet de plan stratégique national contre la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, conformément à la recommandation générale n o  35 du Comité  ;

c) D’adopter sans délai les modifications de la loi sur les infractions sexuelles qui répriment expressément le viol conjugal , de lever toute restriction temporelle au droit de porter plainte pour viol conjugal dans le projet de modification de ladite loi et de mettre en place un registre et un service d’enregis trement des délinquants sexuels  ;

d) D’interdire, en droit et dans la pratique, le recours aux châtiments corporels à l’égard des filles à l’école et à la maison et de renforcer les programmes de sensibilisation, afin de promouvoir des formes non violentes d’éducation et de discipline des enfants  ;

e) De veiller à ce que les cas de violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre donnent lieu à des enquêtes et des poursuites effectives et à ce que les sanctions imposées aux auteurs soient proportionnelles à la gravité des délits commis  ;

f) Prévoir des programmes obligatoires de renforcement des capacités à l’intention des juges, des procureurs, des avocats et des policiers et des autres responsables de l’application des lois sur le strict respect de la législation réprimant la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre ainsi que sur les méthodes et les procédures adaptées à employer avec les femmes et les filles qui sont victimes de cette violence  ;

g) D’offrir une assistance, une protection et une réadaptation appropriées aux femmes et aux filles qui sont victimes de violence, notamment en renforçant les moyens des centres d’accueil existants et en améliorant d’une part la coopération avec les organisations non gouvernementales qui offrent des services d’accueil et de réadaptation aux victimes et d’autre part le financement dont elles disposent  ;

h) De recueillir des données statistiques, ventilées en fonction de l’âge et des liens entre victime et auteur, sur les formes domestiques, sexuelles et autres de la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a pris diverses initiatives et mesures pour lutter contre la traite, dont la création du Comité interministériel et de l’Équipe spéciale chargés de la traite des personnes. Il demeure préoccupé cependant par le faible nombre d’affaires de traite portées devant les tribunaux et par le manque de travaux de recherche sur les tendances et l’ampleur de la traite des femmes et des filles dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De renforcer les capacités des autorités judiciaires, des responsables de l’application des lois, de la police des frontières, des travailleurs sociaux et des professionnels de la santé pour ce qui est de l’identification des femmes et des filles victimes de la traite, de leur orientation vers les services sociaux appropriés et de l’application de protocoles de traitement adaptés  ;

b) De renforcer l’application de la loi de 2008 sur la traite des personnes (prévention et suppression), augmenter les ressources financières allouées aux programmes du Comité et de l’Équipe spéciale chargés de la lutte contre la traite des personnes et accélérer la mise en place d’un secrétariat ad hoc disposant de professionnels qualifiés pour exécuter efficacement la mission de ces organes  ;

c) De mener une étude afin de déterminer un point de référence en ce qui concerne les tendances relatives à la traite des femmes et des filles dans l’État partie , ainsi que l’ampleur de ce phénomène .

Le Comité demeure préoccupé par le fait que les prostituées soient considérées comme des délinquantes d’après la loi sur les infractions sexuelles et la violence domestique, par le manque d’informations sur ce phénomène, et par le nombre élevé de femmes qui se livrent à la prostitution dans l’État partie et sont donc touchées, ainsi que par l’absence totale d’informations sur les programmes de sortie offerts aux femmes qui souhaitent quitter la prostitution. Le Comité s’inquiète également du nombre d’enfants qui se livrent à la prostitution et à la pornographie, notamment dans le contexte du tourisme.

Le Comité rappelle sa recommandation antérieure ( CEDAW/C/BHS/CO/ 1-5 , par. 26) et recommande à l’État partie  :

a) De dépénaliser la prostitution  ;

b) De traiter les causes profondes de l’exploitation des femmes et des filles par la prostitution en offrant des possibilités éducatives et d’autres sources de revenus aux femmes qui risquent d’être exploitées, en particulier aux filles de familles pauvres qui sont contraintes de se prostituer pour faire vivre leur famille, ainsi que des programmes de sortie aux prostituées, y compris des stratégies de réinsertion sociale et professionnelle  ;

c) De prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer la pornographie mettant en scène des enfants, y compris dans le contexte du tourisme, et de sensibiliser les acteurs directement associés au secteur du tourisme à la question des enfants, notamment les filles, qui se livrent à certaines activités liées au tourisme et risquent de devenir victimes de l’exploitation sexuelle commerciale.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité reste préoccupé par la faible participation des femmes dans la vie politique, en particulier aux postes de décision, ce que l’on attribue en partie à des attitudes patriarcales, à l’absence de mesures telles que des quotas imposés par la loi ou un système de parité pour les nominations politiques, à un accès limité aux réseaux politiques et à la formation insuffisante des femmes à l’exercice des responsabilités politiques.

Conformément à sa recommandation générale n o  23 (1997) concernant la participation des femmes à la vie politique et publique, le Comité rappelle sa recommandation antérieure ( CEDAW/C/BHS/CO/1-5 , par. 28) et recommande à l’État partie  :

a) De fixer des objectifs et des calendriers concrets en vue renforcer l’égale participation des femmes à la vie publique et politique à tous les niveaux, et de créer les conditions nécessaires pour que ces objectifs soient atteints, notamment en adoptant des quotas obligatoires  ;

b) D’adopter des mesures pour garantir en droit et en pratique la parité entre les sexes au sein des partis politiques, et d’encourager les femmes à se présenter aux élections nationales et locales  ;

c) D’accroître l’offre de programmes de formation et de renforcement des capacités à l’intention des femmes qui souhaitent entrer dans la vie politique ou occuper une charge publique  ;

d) Sensibiliser les responsables politiques, les médias, les responsables religieux et le grand public afin de garantir la participation pleine, égale, libre et démocratique des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, à la vie politique et publique.

Nationalité

Le Comité note que l’État partie a annoncé, en novembre 2017, que la loi sur la nationalité bahamienne serait modifiée afin de garantir l’égalité des droits entre les femmes et les hommes s’agissant de la transmission de la nationalité aux enfants. Il regrette toutefois que les référendums organisés en 2012 et 2016 aient rejeté des propositions visant à modifier la Constitution afin que les femmes bahamiennes puissent transmettre leur nationalité à leurs enfants sur un pied d’égalité avec les hommes. Le Comité note aussi avec préoccupation que les enfants qui ont le statut d’apatride aux Bahamas, y compris les orphelins de parents eux-mêmes apatrides ou de nationalité inconnue, ne peuvent appliquer ni le principe du droit du sang ni celui du droit du sol pour obtenir la nationalité, et que l’on ne dispose pas d’informations ni de statistiques sur les femmes et filles apatrides vivant dans l’État partie.

Rappelant sa recommandation antérieure ( CEDAW/C/BHS/CO/1-5 , par. 30) et sa recommandation générale n o  32 (2014) sur les femmes et les situations de réfugiés, d’asile, de nationalité et d’apatridie, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre diverses mesures pour sensibiliser les responsables politiques et le grand public à la nécessité de modifier la Constitution afin d’en abroger les dispositions relatives à la nationalité qui sont discriminatoires à l’égard des femmes  ;

b) De modifier la loi de 1973 sur la nationalité pour y inclure des dispositions permettant aux Bahamiens et aux Bahamiennes de transmettre la nationalité à leurs enfants sur un pied d’égalité, et de prendre des dispositions législatives supplémentaires afin que les Bahamiennes puissent transmettre leur nationalité à leur conjoint non bahamien conformément à l’article 9 de la Convention  ;

c) D’introduire une procédure de détermination du statut d’apatride pour identifier les femmes et les enfants apatrides, y compris les orphelins de parents eux-mêmes apatrides ou de nationalité inconnue, et leur assurer une protection dans l’État partie, dont une procédure de naturalisation simplifiée accessible avant l’âge de 18 ans .

Éducation

Le Comité note avec satisfaction les progrès réalisés en ce qui concerne l’accès des filles à l’éducation et le rétablissement de l’Agence nationale de formation en 2017. Il est toutefois préoccupé par :

a)Les mesures insuffisantes prises pour faire accéder à une éducation de qualité toutes les filles, en particulier celles vivant dans les Family Islands ou appartenant à des groupes défavorisés, dont les filles d’ascendance haïtienne, et pour améliorer l’enseignement, notamment dans les écoles publiques ;

b)Le retard pris dans la révision de la loi relative à l’éducation et dans la réforme des programmes, ces deux actions visant à un traitement plus efficace de la question de l’égalité des sexes ;

c)La concentration des femmes et des filles dans des domaines d’étude traditionnellement féminins et leur sous-représentation dans les sciences, les technologies, l’ingénierie et les mathématiques, ainsi que leur faible participation au programme technique des élèves-officiers ;

d)Le placement des filles enceintes dans des écoles spéciales administrées par la Fondation pour un accès continu à l’éducation afin de leur éviter d’être en butte à la stigmatisation, et l’absence de mesures concrètes visant à leur réintégration et à leur maintien dans le système scolaire après la naissance de leur enfant ;

e)L’accès limité des filles handicapées à une éducation ouverte à tous.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De veiller à ce que les filles vivant dans les Family Islands et celles qui appartiennent à des groupes défavorisés, dont les filles d’ascendance haïtienne, aient elles aussi accès à une éducation de qualité dans les cycles primaire et secondaire  ;

b) D’accélérer le processus de révision de la loi relative à l’éducation et la réforme des programmes afin de traiter plus efficacement la question de l’égalité des sexes  ;

c) D’éliminer les stéréotypes négatifs et les obstacles structurels à la scolarisation des filles dans des domaines d’éducation non traditionnels comme les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques, et de fournir des conseils d’orientation professionnelle aux filles sur les filières moins conventionnelles  ;

d) D’adopter une politique de maintien des femmes et des filles enceintes dans le système scolaire durant leur grossesse, qui permette aux jeunes mères de retourner à l’école après la naissance de leur enfant pour achever leurs études  ;

e) De prendre des mesures visant à l’élaboration d’une stratégie éducative inclusive au bénéfice de toutes les filles handicapées.

Emploi

Le Comité regrette que l’État partie ne lui ait pas fourni assez d’informations pour prendre la pleine mesure des progrès accomplis en vue de parvenir à l’égalité des sexes dans le domaine de l’emploi. Il demeure préoccupé par la législation qui limite l’application du principe du salaire égal pour un travail de valeur égale et par les dispositions relatives au congé maternité qui ne confèrent pas les droits et la protection prévus par la Convention. Il est préoccupé, en particulier, par :

a)Le taux de chômage disproportionnellement élevé chez les femmes en dépit de l’élévation de leur niveau d’études, le maintien de la ségrégation professionnelle sur le marché du travail et la concentration des femmes dans des emplois mal rémunérés, dans les secteurs formel et informel ;

b)L’important volume du travail accompli par les femmes qui n’est ni rémunéré ni reconnu et n’entre pas en ligne de compte dans leur droit à une retraite ou à d’autres avantages liés au travail ;

c)L’absence d’informations sur les mesures concrètes de mise en œuvre des dispositions légales, dont le chapitre 99 du droit écrit des Bahamas et la loi relative aux infractions sexuelles et à la violence domestique, qui interdisent le harcèlement sexuel des femmes et la violence exercée à leur endroit sur le lieu de travail ;

d) Les possibilités limitées d’entrer sur le marché du travail offertes aux femmes handicapées ;

e)L’insuffisance des informations disponibles sur l’étendue des inégalités entre hommes et femmes en matière d’emploi et sur la situation vulnérable des travailleuses domestiques, dont beaucoup ont des difficultés d’accès aux prestations sociales et sont en butte au harcèlement sexuel sur leur lieu de travail.

Le Comité réitère sa précédente recommandation ( CEDAW/C/BHS/CO/ 1-5 , par. 34) et recommande à l’État partie  :

a) De promulguer une législation appropriée garantissant le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale dans tous les domaines d’activité et modifie les dispositions législatives sur le droit au congé de maternité, de sorte que ce droit soit garanti et protégé comme le prévoit la Convention, notamment en ce qui concerne le congé obligatoire de six semaines après l’accouchement, les interruptions de travail aux fins d’allaitement et la protection contre la perte d’emploi pendant le congé de maternité  ;

b) D’intensifier ses efforts afin de créer un environnement favorable permettant aux femmes de devenir économiquement indépendantes, notamment en sensibilisant les employeurs et les syndicats, dans les secteurs public et privé, sur l’interdiction de la discrimination à l’égard des femmes dans le domaine de l’emploi, et de promouvoir l’accès des femmes à l’économie formelle, notamment par la formation professionnelle et technique  ;

c) De veiller à ce que les femmes accomplissant un travail non rémunéré soient admissibles à la retraite et à d’autres prestations liées au travail, en particulier après avoir cessé de travailler  ;

d) De faire en sorte que les dispositions législatives soient effectivement appliquées, notamment le chapitre 99 du droit écrit et la loi relative aux infractions sexuelles et à la violence domestique qui protègent les femmes contre le harcèlement sexuel et la violence dans le travail  ;

e) D’adopter des mesures temporaires spéciales en vue d’accroître la présence des femmes handicapées sur le marché du travail  ;

f) D’adopter une stratégie de protection des travailleuses domestiques passant entre autres par le recours à l’inspection du travail et de ratifier la Convention n o  189 sur les travailleuses et travailleurs domestiques de l’Organisation internationale du Travail, qui prône le travail décent pour cette catégorie professionnelle.

Santé

Le Comité est préoccupé par :

a)L’absence dans les programmes scolaires d’une éducation à la santé sexuelle et procréative et aux droits y afférents, complète et adaptée à l’âge, dont les comportements sexuels responsables attendus des filles et des garçons, et le manque de services de planification de la famille ;

b)L’inadéquation entre l’âge de consentement sexuel, fixé à 16 ans, et l’âge auquel le consentement parental n’est pas nécessaire pour obtenir un contraceptif ou d’autres services médicaux, fixé à 18 ans ;

c)Les limitations très strictes mises à l’avortement légal, qui peuvent conduire les femmes à rechercher des pratiques abortives dangereuses et illégales ;

d)Le taux élevé de mortalité maternelle et les facteurs d’exacerbation de la morbidité et de la mortalité maternelles, dont les possibles effets des grossesses précoces et des avortements non sécurisés sur ce taux ;

e)La prévalence de nouveaux cas de VIH/sida diagnostiqués chez les femmes ;

f)L’absence de services spécialisés, s’agissant notamment du dépistage et du traitement du cancer du sein et des services de santé mentale, en particulier dans les Family Islands.

Rappelant sa précédente recommandation ( CEDAW/C/BHS/CO/1-5 , par. 36) et sa recommandation générale n o 24 (1999) sur les femmes et la santé, le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’intégrer aux programmes scolaires et aux campagnes publiques de sensibilisation une éducation à la santé sexuelle et procréative et aux droits y afférents, qui soit adaptée à l’âge et traite notamment des comportements sexuels responsables et de la prévention des grossesses précoces et des maladies sexuellement transmissibles, dont le VIH, et de former les enseignants et d’autres professionnels à la mise en œuvre de ces stratégies et campagnes d’information  ;

b) De faire en sorte que les filles, y compris dans les Family Islands, aient dès l’âge de 16 ans un accès libre et adéquat aux contraceptifs et aux services de santé sexuelle et procréative  ;

c) De dépénaliser l’avortement dans tous les cas et de le légaliser dans les cas de viol, d’inceste ou de malformation grave du fœtus, et de donner aux femmes ayant subi un avortement l’accès à des soins de haute qualité, en particulier lors de complications résultant d’un avortement non sécurisé  ;

d) De redoubler d’efforts pour faire baisser le taux de mortalité maternelle et de s’attaquer aux facteurs qui l’exacerbe, tels que les grossesses précoces et les avortements non sécurisés, par une offre de soins appropriés, des installations et une aide médicale fournie par du personnel qualifié  ;

e) De déployer des stratégies de lutte contre le VIH, assorties notamment de mesures préventives, et de fixer un point de référence pour définir la prévalence de cette maladie, notamment dans les groupes à risques et en particulier chez les jeunes âgés de moins de 25 ans, et d’encourager les femmes qui se prostituent à utiliser des préservatifs tout en leur assurant l’accès voulu à des soins respectueux de la personne  ;

f) D’améliorer l’accès des femmes dans l’État partie, les Family Islands incluses, aux services de santé mentale et à ceux spécialisés dans le traitement du cancer du sein, et de dispenser une formation au personnel de santé afin qu’il soit apte à détecter précocement les pathologies visées.

Émancipation économique des femmes

Le Comité est préoccupé par le nombre disproportionné de femmes vivant dans la pauvreté et par la suspension, en 2017, du programme RISE (Renewing, Inspiring, Sustaining and Empowering), lancé en 2015, qui visait à réduire le nombre de Bahamiens qui avaient atteint le seuil de pauvreté ou vivaient en-dessous de ce seuil. Il est également inquiet face à la quantité limitée d’informations disponibles sur les nouvelles mesures d’ajustement structurel des stratégies de développement de l’État partie, sur les politiques de libéralisation du commerce et leurs effets sur la situation des femmes et sur les programmes destinés à atténuer la pauvreté des groupes de femmes les plus défavorisés, dont les femmes âgées et les femmes handicapées.

Le Comité recommande à l’État partie de procéder à l’évaluation de l’impact sur les femmes de l’interruption du programme RISE et d’en publier les résultats. Il recommande également à l’État partie de faire en sorte que les femmes dans le besoin ne subissent pas les conséquences néfastes de l’interruption du programme et de remplacer ce dernier par un nouveau programme approprié de transfert d’espèces afin d’aider en priorité les groupes défavorisés de femmes et de filles, dont les femmes âgées et les femmes handicapées. Il recommande en outre d’adopter des dispositifs visant à atténuer la pauvreté dans les groupes de femmes les plus défavorisés, de suivre une démarche soucieuse de l’égalité des sexes pour mettre en œuvre les mesures associées aux ajustements structurels et à la libéralisation du commerce, et d’évaluer leur impact sur les femmes. Il recommande à l’État partie de veiller, dans le respect de ses obligations extraterritoriales, à ce que ses politiques financières et fiscales n’aient pas de retombées négatives sur les droits des femmes et sur l’action menée en faveur de l’égalité réelle entre femmes et hommes.

Femmes rurales

Le Comité est préoccupé par le statut défavorable des femmes vivant dans les Family Islands, qui ont des difficultés d’accès aux services de soins de santé et d’éducation, au niveau supérieur en particulier, à la justice, à l’emploi, aux possibilités de développement de leurs compétences et de formation, à la gestion des terres agricoles et aux activités rémunératrices.

Rappelant sa recommandation générale n o 34 (2016) sur les droits des femmes rurales, le Comité recommande à l’État partie de promouvoir la participation des femmes des Family Islands aux prises de décision, et de leur donner accès à des soins médicaux de qualité, à l’éducation, à la justice, à l’emploi, aux possibilités de développement de leurs compétences et de formation, à la gestion des terres agricoles et aux activités rémunératrices.

Groupes de femmes défavorisées

Femmes migrantes, réfugiées et demandeuses d’asile

Le Comité note avec satisfaction la volonté de l’État partie de renforcer la coopération régionale en ce qui concerne la protection des réfugiés et des personnes apatrides, qui s’est manifestée par l’organisation de consultations sur les migrations dans les Caraïbes, en décembre 2017. Il note également l’existence du Groupe de travail sur les migrations. Il est néanmoins préoccupé par :

a)L’absence de législation spécifique dotée d’une dimension de genre, régissant les procédures touchant les réfugiés et les demandeurs d’asile ;

b)La détention de demandeuses d’asile, y compris accompagnées d’enfants ;

c)L’absence de programmes visant à l’intégration sociale et économique des migrantes, des femmes d’ascendance haïtienne et des réfugiées et des demandeuses d’asile dans l’État partie ;

d)La situation des demandeuses d’asile, des migrantes et des femmes d’ascendance haïtienne dépourvues de papiers d’identité ou de passeports nationaux, qui ne signalent pas aux autorités les violations de leurs droits, notamment la violence fondée sur le genre, par peur d’être déportées.

Conformément à sa recommandation générale n o 32, le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’adopter une législation spécifique dotée d’une dimension de genre régissant les procédures touchant aux réfugiés et aux demandeurs d’asile  ;

b) De suivre une démarche tenant compte des questions de genre pour accueillir les demandeuses d’asile et pour examiner leurs demandes, de sorte que ces femmes soient protégées de l’exploitation et des violences durant leur détention et aient accès aux soins dont elles ont besoin et à d’autres services  ;

c) De prendre des mesures de remplacement moins contraignantes pour traiter du statut des demandeuses d’asile ou des réfugiées entrées dans le pays de manière illégale avec leurs enfants, et de n’utiliser la détention qu’en dernier recours  ;

d) D’adopter des mesures visant à améliorer la condition sociale et économique des réfugiées, des demandeuses d’asile, des migrantes et des femmes d’ascendance haïtienne et à les rendre ainsi moins vulnérables à de multiples formes de discrimination et de violence croisées, dont la violence domestique, et à leur donner accès aux services de base, quelle que soit leur situation administrative  ;

e) De faire en sorte d’examiner les demandes d’asile des femmes et des filles en tenant compte des questions de genre, et de conseiller à titre gracieux les réfugiées, les demandeuses d’asile et les migrantes sur les procédures existantes d’obtention d’un statut juridique dans l’État partie et de documents relatifs à la nationalité.

Mariage et relations familiales

Le Comité est préoccupé par les dispositions de la section 50 de la loi relative au mariage, qui fixent l’âge minimum du mariage à 15 ans mais autorisent à titre exceptionnel le mariage de filles âgées de 13 à 15 ans. Il continue d’être inquiet face au manque de dispositions juridiques régissant les unions libres, ce qui peut priver les femmes de protection et de réparation en cas de séparation. De même, il note que la création d’un appareil judiciaire unifié et la mise en place d’un tribunal des affaires familiales n’ont guère progressé. En outre, il est préoccupé par le fait que les mères, en particulier les mères célibataires, portent de manière disproportionnée la charge d’éduquer les enfants, ceci en raison de facteurs culturels et de l’absence d’un mécanisme imposant le paiement d’une pension alimentaire.

Le Comité réitère sa précédente recommandation ( CEDAW/C/BHS/CO/ 1-5 , par. 38) et recommande à l’État partie  :

a) D’inscrire dans la loi et de faire respecter en pratique, sans exception, l’âge minimum du mariage fixé à 18 ans  ;

b) De revoir les dispositions juridiques régissant actuellement le mariage et les relations familiales pour en élargir la portée aux couples vivant en union libre  ;

c) D’accélérer la création d’un appareil judiciaire unifié doté de tribunaux de la famille et d’autres services d’aide au règlement des différends, conformément aux recommandations du rapport du Comité du système de tribunaux des affaires familiales, et d’allouer les ressources humaines, financières et techniques voulues aux fins de la création et du fonctionnement efficace de cet appareil judiciaire unifié, selon un calendrier bien défini  ;

d) D’améliorer l’offre d’éducation parentale aux parents, aux familles et au public en vue de promouvoir la responsabilité partagée des deux parents dans les soins et l’entretien des enfants, de réviser la législation et les procédures y relatives et de lever d’urgence les obstacles de sorte que les mères célibataires perçoivent rapidement une pension alimentaire.

Incidence des changements climatiques et des catastrophes naturellessur les femmes

le Comité note avec satisfaction que les femmes occupent des postes de responsable à l’Agence nationale de gestion des situations d’urgence et qu’une évaluation fondée sur le genre a été effectuée après le passage de l’ouragan Matthew. Il rappelle toutefois la vulnérabilité de l’État partie aux violents changements environnementaux et climatiques et aux catastrophes naturelles. À cet égard, il s’inquiète de ce que les changements climatiques et autres catastrophes liées au climat touchent les femmes de façon disproportionnée, alors qu’il serait possible de faire davantage pour prendre en compte leurs besoins spécifiques, en particulier dans les groupes vulnérables, en ce qui concerne la réduction des risques, l’état de préparation, l’intervention et le relèvement.

Conformément à la Recommandation générale n o 37 (2018) relative aux aspects liés au genre de la réduction des risques de catastrophe dans le contexte des changements climatiques, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De faire en sorte que les femmes soient représentées aux processus de décision à tous les niveaux en ce qui concerne l’élaboration et la mise en œuvre des politiques relatives à la réduction des risques de catastrophe, à la gestion de l’après-catastrophe et aux changements climatiques  ;

b) De veiller à ce que les résultats de l’évaluation fondée sur le genre entreprise à la suite des derniers ouragans soient utilisés lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des futurs politiques et programmes relatifs à la réduction des risques de catastrophe et aux changements climatiques, sans compter les autres urgences, que ces programmes et politiques reposent sur une analyse détaillée par sexe et qu’ils prennent en compte les besoins spécifiques des femmes, notamment celles appartenant aux groupes vulnérables.

Protocole facultatif à la Convention

Le Comité accueille avec satisfaction le fait que l’État partie ait assuré, durant le dialogue, de son intention de ratifier dès que possible le Protocole facultatif à la Convention.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing dans l ’ action qu ’ il mène pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Diffusion

Le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que les présentes observations finales soient communiquées en temps utile, dans la langue officielle de l’État partie, aux institutions publiques compétentes à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au Gouvernement, aux ministères, au Parlement et à l’appareil judiciaire, afin d’en assurer l’application.

Assistance technique

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir un lien entre l ’ application de la Convention et l ’ action qu ’ il mène en faveur du développement, et de faire appel à cette fin à l ’ assistance technique régionale ou internationale.

Ratification d’autres instruments

Le Comité note que l’adhésion de l’État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme contribuerait à favoriser l’exercice effectif par les femmes de leurs droits individuels et de leurs libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Il l’invite donc à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, auxquelles il n’est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité prie l’État partie de lui communiquer par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer les recommandations énoncé es aux paragraphes 12 a), 16 d), 24 b) et 26 b) ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à soumettre son septième rapport périodique en novembre 2022 , comme prévu . Le rapport devra être présenté dans les délais et couvrir toute la période écoulée jusqu’à la date de présentation .

Le Comité invite l’État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, dont le document de base commun et les rapports correspondant à chaque instrument (voir HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).