Nations Unies

CERD/C/MRT/CO/8-14

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

30 mai 2018

Original : français

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport de la Mauritanie valant huitième à quatorzième rapports périodiques *

1.Le Comité a examiné le rapport de la Mauritanie valant huitième à quatorzième rapports périodiques (CERD/C/MRT/8-14), à ses 2628eet 2629eséances (voir CERD/C/SR.2628 et 2629), les 1er et 2 mai 2018. À ses 2640e et 2641e réunions, les 9 et 10 mai 2018, il a adopté les présentes observations finales.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport périodique de l’État partie valant huitième à quatorzième rapports périodiques, qui comprend des réponses aux préoccupations soulevées par le Comité dans ses précédentes observations finales (CERD/C/65/CO/5). Étant donné le retard de neuf ans dans la présentation de ce rapport, le Comité apprécie que l’État partie ait renoué avec lui, en soumettant ce rapport et se félicite du dialogue constructif et ouvert qu’il a eu avec la délégation de haut niveau de l’État partie.

B.Aspects positifs

3.Le Comité salue les mesures législatives et politiques ci-après prises par l’État partie :

a)La loi no 2015/031 portant incrimination de l’esclavage et réprimant les pratiques esclavagistes, du 10 septembre 2015 ;

b)La loi no 2015-034 instituant un mécanisme national de prévention de la torture, du 10 septembre 2015 ;

c)La loi no 2015-033 relative à la lutte contre la torture, du 10 septembre 2015 ;

d)La loi no 2010-031 du 20 juillet 2010 abrogeant et remplaçant l’ordonnance no 2006-015 du 12 juillet 2006 portant institution de la Commission nationale des droits de l’homme ;

e)La loi no 2010-021 du 10 février 2010 relative à la lutte contre le trafic illicite de migrants ;

f)La création de l’Agence nationale TADAMOUN chargée, entre autres, de l’éradication des séquelles de l’esclavage ;

g)L’adoption en 2014 de la Feuille de route pour la mise en œuvre des recommandations de la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences.

4.Le Comité se félicite de la ratification par l’État partie des instruments suivants ou de l’adhésion à ceux-ci :

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2012 ;

b)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2012 ;

c)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant, en 2012.

C.Préoccupations et recommandations

Collecte de données

5.Le Comité regrette que l’État partie ne lui ait fourni que des données très limitées et non ventilées selon l’origine ethnique ou nationale, la couleur ou l’ascendance, qui ne reflètent que de manière insuffisante la composition ethnique de la population et ne permettent pas d’évaluer dans quelle mesure les différents groupes de la population vivant sur son territoire jouissent de leurs droits au titre de la Convention, en particulier de leurs droits économiques, sociaux et culturels.

6. Le Comité recommande à l’ État partie de lui fournir des données statistiques complètes, fiables et récentes sur l es différents groupes qui composent sa population ainsi que des indicateurs socioéconomiques issus d’enquêtes ou d’études et ventilés selon l’origine ethnique ou nationale , la couleur ou l’ascendance, afin de permettre au Comité de mieux évaluer comment c es groupes , y compris le s non-ressortissants , jouissent de leurs droits au titre de la Convention, en particulier le ur s droits économiques, sociaux et culturels.

Nouvelle loi relative à l’incrimination de la discrimination

7.Le Comité note que l’État partie a adopté le 18 janvier 2018 la loi relative à l’incrimination de la discrimination. Il est néanmoins préoccupé par les critiques formulées conjointement par plusieurs Rapporteurs spéciaux du Conseil des droits de l’homme concernant l’absence d’une définition de la discrimination pleinement conforme à la Convention, l’absence de clarté juridique de nombreuses dispositions de cette loi, pouvant ouvrir la voie à des interprétations susceptibles de conduire à des restrictions dans la jouissance de certains droits de l’homme et à la persistance de pratiques discriminatoires, et l’insuffisance de protection juridique (art. 2).

8. Le Comité recommande à l’ État partie de réviser s a nouvelle loi relative à l’incrimination de la discrimination afin de la rendre pleinement conforme à la Convention, en tenant dûment compte des préoccupations soulevées par les Rapporteurs spéciaux du Conseil des droits de l’homme. L’ État partie devrait y inclure une définition de la discrimination raciale qui contienne tous les éléments prévus à l’article premier de la Convention et s’assurer que cette loi présente des garanties suffisantes de protection juridique contre l a discrimination raciale.

Application interne de la Convention

9.Le Comité est préoccupé par le fait que la référence à la charia dans le préambule de la Constitution comme seule source du droit peut conduire à des dispositions législatives qui ne soient pas pleinement compatibles avec les dispositions de la Convention (art. 2).

10. Le Comité recommande à l’ État partie de s’assurer que la référence à la charia n’empêche pas la pleine application dans son ordre juridique des dispositions de la Convention ou n’aboutisse à une interprétation ou à une application qui constituent un obstacle à la jouissance des droits prévus par la Convention.

Discrimination à l’égard des Haratines et des Négro-Africains

11.Le Comité est préoccupé de ce que la survivance de certaines structures sociales traditionnelles et des préjugés culturels continuent d’alimenter la discrimination raciale et la marginalisation des Haratines, en particulier dans l’accès à l’éducation, à l’emploi, au logement, à la santé et aux services sociaux. Tout en notant les informations fournies par l’État partie, le Comité est également préoccupé par la représentation très limitée des Négro-Africains (Halpular, Soninké et Wolof) et des Haratines dans les affaires politiques et publiques, notamment dans les postes de responsabilité et de décision au sein de l’administration, de l’armée et de la police, des postes électifs au niveau national, ainsi que dans le secteur privé et les médias (art. 2 et 5).

12. Le Comité recommande à l’ État partie :

a) De v eiller à une application effective de s dispositions législatives actuelles contre la discrimination raciale et de les faire connaître auprès de la population, mais aussi auprès des juges, des avocats, de la police et des autres agents d’application des lois ;

b) De v eiller à une meilleure représentation des Négro- A fricains et des Haratines dans toutes les sphères de la vie politique, publique et sociale , ainsi que dans le secteur privé, notamment à des postes électifs, et des postes de décision dans les organes exécutifs, l ’ administr ation, l’armée, la police et les médias ; et de fournir des données statistiques à ce sujet dans son prochain rapport périodique  ;

c) D’a ccro î tre les mesures spéciales à l ’ égard des Négro- A fricains et des Haratines afin de favoriser leur pleine intégration dans la société, en particulier s’agissant de l’éducation, de l’emploi et des soins de santé ;

d) D’i ntensifier ses campagnes de sensibilisation de l a population et des chefs religieux et communautaires de manière à lutter efficacement contre les préjugés raciaux à l’égard des Haratines.

Lutte contre l’esclavage et les pratiques esclavagistes

13.Le Comité note les mesures prises par l’État partie pour lutter contre l’esclavage et les pratiques esclavagistes ainsi que leurs séquelles, en particulier l’adoption de la loi no 2015/031 portant incrimination de l’esclavage et réprimant les pratiques esclavagistes ainsi que la mise en place de l’agence nationale TADAMOUN chargée, entre autres, de l’éradication des séquelles de l’esclavage. Néanmoins, le Comité reste préoccupé par : a) la survivance de situations d’esclavage et la persistance de préjugés solidement ancrés dans certaines traditions à ce sujet ; b) l’absence de données permettant de mesurer toute l’étendue de cette pratique; et c) les difficultés rencontrées par des personnes soumises à l’esclavage pour se réinsérer dans la société en raison du fait qu’elles n’ont pas de papiers d’identité et n’ont pas accès à l’emploi, à l’éducation ni à la propriété foncière, y compris celle de leurs parents, et risquent, en conséquence, de n’avoir pas d’autre perspective que le retour à des situations d’esclavage (art. 2 et 5).

14. À la lumière de sa r ecommandation générale n o 29 (2002) concernant la discrimination fondée sur l’ascendance, l e Comité recommande à l’ État partie :

a) De c ollecter des données sur l’étendue des situations d’esclavage encore existantes et d’intensifier sa lutte en vue d’éliminer toute survivance de telles situations notamment en veillant à une application effective de la l oi n o 2015 /031 portant incrimination de l’esclavage et réprimant les pratiques esclavagistes ;

b) D’ i ntensifier ses campagnes de sensibilisation sur la loi de 2015 auprès de sa population, en particulier des groupes les plus à risque d’être victimes de ce type de pratique, auprès des juges, des avocats , des agents d’application des lois , et des chefs religieux et communautaires , et de combattre les traditions et préjugés justifiant ces pratiques  ;

c) De v eiller à ce que les manuels d’histoire utilisés dans l e cursus scolaire reflètent la contribution des populations victimes de l’esclavage ;

d) D’a ccélérer la pleine réalisation des recommandations de la Feuille de route et d’ en évaluer régulièrement la mise en œuvre en consultation avec les communautés concernées  ;

e) D ans le cadre de l’application de la Feuille de route, de veiller à ce que les personnes libérées de situations d’esclavage aient accès à des documents d’identité , à l’emploi , à l’éducation et à la propriété foncière, qu’ elles puissent en hériter et que des terres leur soient attribuée s  ;

f) De f ournir au Comité des indicateurs socio économiques sur la situation des populations concernées.

15.Le Comité est préoccupé par les difficultés rencontrées par les victimes de l’esclavage pour déposer plainte en vue de faire valoir leurs droits auprès des autorités de police et judiciaires, les difficultés persistantes pour enquêter sur ces cas, rassembler des preuves, poursuivre de manière efficace et rapide les auteurs de telles pratiques et les sanctionner de manière adéquate. Le Comité est également préoccupé par l’absence de moyens adéquats au bon fonctionnement des trois tribunaux spécialisés de Nouakchott, Nouadhibou et Néma et par le fait que les peines prononcées jusqu’à présent dans les affaires d’esclavage ne sont pas toujours proportionnelles à la gravité des faits (art. 2, 5 et 6).

16. Le Comité recommande à l’ État partie de veiller à ce que les victimes de l’esclavage puissent effectivement porter plainte sans subir aucun e forme de pression et de veiller à ce que celles-ci soient enregistrées, que les enqu êtes soient diligentées, les poursuites engagées et que les responsables soient condamnés à des peines proportionnelles à la gravité des faits . Il recommande également à l’ État partie de doter les trois tribunaux spéciaux de Nouakchott, Nouadhibou et Néma de moyens financiers et humains adéquats à leur bon fonctionnement . L’ État partie devrait i nformer le Comité de l’issue des affaires relatives à l’esclavage pendantes devant les différents tribunaux .

Promotion des langues nationales pular, soninké et wolof

17.Le Comité note que l’État partie reconnaît le wolof, le soninké, le pular et l’arabe comme langues nationales, mais que seul l’arabe est langue officielle. Le Comité regrette l’absence d’informations sur la promotion effective, l’enseignement et l’utilisation des langues autres que l’arabe dans les administrations, les services sociaux, les tribunaux et les médias. Le Comité note qu’une utilisation limitée de ces langues ou leur non-utilisation est susceptible de limiter l’exercice par certains groupes ethniques des droits reconnus dans la Convention (art. 5).

18. Le Comité recommande à l’ État partie d’envisager, en consultation avec les populations concernées, d’ériger le p ular, le s oninké et le w olof en langues officielles. Il  réitère sa recommandation faite à l’ État partie dans ses précédentes observations finales (CERD/C/65/CO/5, par. 20) d’inclure les langues nationales dans l’éducation pour les enfants désireux de suivre un tel enseignement et d’éviter que l’utilisation de langues soit un facteur d’exclusion d’un groupe donné. Le Comité recommande également à l’ État partie de promouvoir l’utilisation des langues nationales autre s que l’ a rabe dans les administrations, les services sociaux et le système judiciaire et de police, afin que les personnes qui ne parlent pas l’ a rabe ne soient pas discriminées dans l’exercice des droits prévus dans la Convention.

Dimension sexiste de la discrimination raciale

19.Le Comité est préoccupé par la subsistance au sein de certains groupes ethniques de pratiques coutumières préjudiciables qui empêchent les femmes d’exercer pleinement leurs droits au titre de la Convention, en particulier en ce qui concerne le droit de posséder la terre ou d’en hériter. Le Comité est également préoccupé par le fait qu’un grand nombre de filles descendantes de personnes soumises à l’esclavage et négro-africaines présentent un taux d’analphabétisme et d’abandon scolaire très élevé, ont des difficultés d’accès à l’enseignement supérieur et restent souvent marginalisées (art. 2 et 5).

20. Rappelant sa recommandation générale n o 25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale, le Comité recommande à l’État partie de prendre l es mesures nécessaires afin de mettre fin aux pratiques coutumières préjudiciables qui empêchent les femmes et les filles de jouir pleinement de leurs droits, en particulier le droit de posséder une terre ou d’en hériter. L e Comité demande à l’État partie de réviser le Code du Statut personnel et de mener des campagnes de sensibilisation auprès du public, notamment les chefs traditionnels et religieux, sur l’égalité des droits entre hommes et femmes. Il recommande également à l’ État partie d’intensifier ses mesures de promotion de l’enseignement en direction des filles d e s groupes ethniques h aratine et négro- africain s , afin de réduire leur taux d’analphabétisme et d’abandon scolaire. Le Comité invite l’ État partie à lui fournir des données à ce sujet d a ns son prochain rapport périodique .

Discrimination dans la transmission de la nationalité

21.Le Comité est préoccupé par le fait que l’article 8 du Code de la nationalité (loi no 1961-112 du 12 juin 1961) et les articles 13 et 16 de la loi no 2010-023 du 11 février 2010 abrogeant et remplaçant certaines dispositions de la loi de 1961 établissent des règles différentes entre hommes et femmes en matière de transmission de la nationalité aux enfants nés à l’étranger et aux époux d’origine étrangère (art. 5).

22. L e Comité recommande à l’ État partie de s’assurer que les hommes et les femmes mauritanien s o nt d es droits égaux en matière de transmission de la nationalité aux enfants ou aux époux.

Situation des réfugiés mauritaniens rapatriés du Sénégal

23.Tout en notant les informations fournies par l’État partie, le Comité est préoccupé par des informations relatives aux difficultés continuelles rencontrées par certains Mauritaniens rapatriés du Sénégal dans l’accès à l’assistance nécessaire à leur réintégration dans la société et dans l’administration, dans l’accès à l’éducation, aux services de soins de santé et à l’emploi, ainsi que dans l’obtention de documents d’état civil et le recouvrement des terres dont ils réclament la propriété. Le Comité est également préoccupé par les risques d’apatridie encourus par certains rapatriés. Il regrette, en outre, que l’État partie n’ait pas encore adopté une loi sur l’asile (art. 5).

24. Le Comité recommande à l’ État partie d’intensifier ses efforts afin de trouver des solutions durables à la réinstallation de tous les rapatriés mauritaniens du Sénégal dans la vie économique et sociale , notamment en favorisant leur accès à l’emploi, à l’éducation, à la santé, et en accélérant la réintégration dans l’administration , l’accès à la propriété foncière ainsi que la délivrance des documents d’état civil, y compris pour les enfants. Le Comité recommande à l’ État partie de ratifie r et de mett r e en œuvre la Convention de 1954 relative au statut des apatrides ainsi que la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie. Le Com ité recommande également à l’ État partie d’accélérer l’adoption du projet de loi relatif au droit d ’asile en Mauritanie .

Passif humanitaire des événements de 1989-1991

25.Le Comité note les informations fournies par l’État partie, mais reste préoccupé par le fait que l’État partie n’a jamais établi les responsabilités sur les cas des militaires négro-africains tués ou portés disparus lors des événements de 1989-1991, ni accordé une indemnisation adéquate aux victimes ou à leurs ayants droit. Le Comité regrette que l’État partie ait adopté la loi no 93-23 du 14 juin 1993 portant amnistie, qui empêche d’établir les responsabilités pour les violations des droits de l’homme qui ont eu lieu durant ces événements. Le Comité note que l’absence d’une solution visant à faire la lumière sur ces événements pourrait constituer, à terme, une menace à la cohésion sociale et nationale au sein de l’État partie (art. 5 et 6).

26. Le Comité recommande à l ’ État partie d’envisager des mesures visant à solder de manière définitive le passif humanitaire, notamment en abrogeant la loi d’amnistie de 1993 afin d’établir la vérité et l es responsabilités sur ces év é nements et de pourvoir à une réparation adéquate de toutes les victimes et de leurs ayants droit.

Données sur des cas de discrimination raciale

27.Le Comité regrette que l’État partie n’ait fourni que très peu de données sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites, les jugements, les condamnations et les sanctions prononcées pour des cas de discrimination raciale par les tribunaux de l’État partie ou de décisions adoptées par d’autres organes sur de tels cas (art. 6).

28. Se référant à sa recommandation générale n o 31 (2005) sur la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité rappelle à l’État partie que l’absence de plaintes et d’actions en justice engagées par les victimes de discrimination raciale peut révéler une absence de législation spécifique pertinente, une mauvaise connaissance des recours juridiques existants, une volonté insuffisante de la part des autorités de poursuivre les auteurs de tels actes, une absence de confiance dans le système pénal ou la peur de représailles par les victimes. Le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que la législation nationale contienne des dispositions appropriées et de faire en sorte que le public, notamment les populations vivant dans des camps de réfugiés et les rapatriés, les populations nomades ou semi-nomades ainsi que les populations rurales, les personnes libérées de l’esclavage, connaisse ses droits, y compris tous les recours juridiques en matière de discrimination raciale.

Organisations non gouvernementales et associations des droits de l’homme

29.Le Comité est préoccupé par le régime d’autorisation préalable en ce qui concerne les organisations non gouvernementales et les associations de défense des droits de l’homme et par le fait que certaines d’entre elles rencontrent des obstacles administratifs à obtenir une telle autorisation et sont contraintes de mener leurs activités dans la clandestinité. Il est également préoccupé par les informations relatives à l’intimidation, au harcèlement et à la détention de certains membres d’associations et d’organisations de défense des droits de l’homme. Le Comité est préoccupé par les poursuites pénales diligentées contre Mohamed Cheick Ould Mkhaitir pour avoir critiqué la référence faite par certaines personnes à l’islam pour justifier la discrimination raciale et l’esclavage, ainsi que par les poursuites engagées contre Oumar Ould Beibacar pour avoir dénoncé l’attitude des autorités dans le cadre du passif humanitaire ; il craint que de tels actes ne créent un climat empêchant toute critique de violations des droits de l’homme, y compris de la Convention (art. 5).

30. Le Comité encourage l’ État partie à adopter un régime déclaratif en ce qui concerne les organisations non gouvernementales et l es associations de défense des droits de l’homme, y compris celles qui travaillent dans la lutte contre la discrimination raciale et contre l’esclavage et les pratiques esclavagistes. Il recommande à l’État partie de prévenir et de protéger celles-ci contre toutes immixtions arbitraires dans leurs activités et contre to ute intimidation ou tout harcèlement , et d’enquêter sur de tels cas , lorsqu’ils sont portés à sa connaissance. Le Comité recommande également à l’ État partie de s’assurer que ses lois n’empêchent pas toute critique de violations des droits de l’homme .

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

31. Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions intéressent directement les communautés qui peuvent faire l’objet de discrimination raciale , notamment la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques ( n o 189) de l’Organisation internationale du Travail .

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

32. À la lumière de sa r ecommandation générale n o 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, quand il applique la Convention. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

33. À la lumière de la résolution 68/237 de l’Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour 2015-2024 et de la résolution 69/16 sur le programme d’activités de la Décennie, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et de mettre en œuvre un programme adapté de mesures et de politiques. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des renseignements précis sur les mesures concrètes qu’il aura adoptées dans ce cadre, compte tenu de sa r ecommandation générale n o 34 (2011) sur la discrimination raciale envers les personnes d’ascendance africaine.

Consultations avec la société civile

34. Le Comité recommande à l’État partie de s’engager dans un dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

Déclaration visée à l’article 14 de la Convention

35. Le Comité encourage l’État partie à faire la déclaration facultative visée à l’article 14 de la Convention , par laquelle les États parties reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles .

Amendement à l’article 8 de la Convention

36.Le Comité recommande à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111.

Document de base commun

37. Le Comité encourage l’ État partie à mettre à jour son document de base commun, qui date de 2001 , conformément aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant le document de base commun, adoptées à la cinquième r éunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme tenue en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I). À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’ État partie de respect er la limite de 42 400 mots fixée pour ce document .

Suite donnée aux présentes observations finales

38. Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son r èglement intérieur, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 8, 24 et 30.

Paragraphes d’importance particulière

39. Le Comité souhaite aussi appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant dans les paragraphes 14, 20 et 26 , et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

Diffusion d’information

40. Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également les observations finales du Comité qui s’y rapportent dans l a langue officielle et les autres langues nationales couramment utilisées, selon qu’il conviendra.

Élaboration du prochain rapport périodique

41. Le Comité recommande à l’État partie de soumettre son rapport valant quinzième à seizième rapports périodiques, d’ici au 12 janvier 202 2 , en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1) et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques.