Cinquante-neuvième session

Compte rendu analytique de la 1579e séance

Tenue au Siège, à New York, le lundi 7 avril 1997, à 15 heures

Présidente :Mme Chanet

puis :M. Bhagwati (Vice-Président)

puis :Mme Chanet (Présidente)

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Deuxième rapport périodique du Liban (suite)

Observations générales du Comité

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Deuxième rapport périodique du Liban (suite) (CCPR/C/42/Add.14)

À l’invitation de la Présidente, M. Maamari (Liban) prend place à la table du Comité.

Partie II de la liste de points à traiter

Point 11 : Le Statut du Pacte (article 2 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 11 : statut du Pacte dans le cadre du droit libanais, et question de savoir si le Pacte prévaut par rapport aux dispositions de la législation libanaise qui y sont contraires.

M. Maamari (Liban) déclare que la Constitution adoptée en 1990 établit le statut constitutionnel des dispositions du Pacte et de la Déclaration universelle des droits de l’homme. La Constitution libanaise stipule également qu’aucune autre formalité que la ratification des textes en question n’est nécessaire pour conférer aux traités internationaux le même statut que la législation nationale. En cas de conflit entre les dispositions légales nationales et celles d’un traité international, c’est ce dernier qui prévaut – comme en témoigne le cas de plusieurs Conventions de l’Organisation internationale du travail qui étaient contraires à la législation libanaise. M. Maamari ajoute qu’à sa connaissance, il n’y a pas eu, à ce jour, de cas de priorité du Pacte par rapport à la législation nationale; cependant, le Code civil libanais établit la priorité du Pacte.

Point 12 : L’égalité entre les sexes (article 3 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 12 : toute information relative à la participation des femmes à la vie politique et économique du Liban; les mesures prises en vue de garantir l’égalité entre les sexes; l’application des lois religieuses, et, par voie de conséquence, une éventuelle discrimination à l’égard des femmes en matière de divorce et d’héritage; enfin, les mesures de lutte contre la violence à l’égard des femmes.

M. Maamari (Liban) déclare qu’il n’y a, dans son pays, aucune restriction concernant la participation des femmes à la vie politique; les femmes ont le droit de vote, et celui d’être candidates aux élections. Cependant, dans les faits, on constate que leur participation est limitée : on ne compte que trois femmes députées au Parlement libanais, et sur les 30 ministres du gouvernement, il n’y a pas une seule femme; on ne compte qu’une femme à un poste exécutif (cela se situe dans le domaine des Affaires sociales). Cependant, on espère que les femmes candidates seront plus nombreuses lors des prochaines élections municipales.

Le délégué libanais ajoute que les lois religieuses ne sont pas discriminatoires à l’égard des femmes en matière de divorce et d’héritage. Dans ce contexte, l’idée fondamentale est qu’aux termes de la loi islamique, c’est l’homme qui assure les ressources et le bien-être de la femme. Il faut noter toutefois qu’aucune loi ne soutient les actes de violence à l’égard des femmes, sous quelque forme que ce soit, et que de tels crimes sont sévèrement sanctionnés.

Point 13 : Les lois pénales discriminatoires (articles 3 et 6 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 13 : de quelle manière pourrait-on dire que les « crimes d’honneur » bénéficiant de circonstances atténuantes ne sont pas contraires aux articles 3 et 6 du Pacte? d’autre part, la question de la compatibilité avec le Pacte de diverses peines sanctionnant les hommes et les femmes adultères.

M. Maamari (Liban) déclare que, bien que le Code pénal libanais prévoie divers types de sanctions pour les hommes et les femmes jugés coupables d’adultère, des groupes de la société civile exigent la révision de ces dispositions, et cette demande sera probablement satisfaite dans un proche avenir.

Point 14 : Liberté de circulation (article 12 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 14 : quelles mesures ont été prises en vue de protéger les travailleurs étrangers dont le passeport a été confisqué par leur employeur, désireux de les empêcher de rentrer dans leur pays, et en vue de prévenir de nouveaux abus de ce type?

M. Maamari (Liban) déclare que les travailleurs domestiques étrangers sont les principales victimes de tels abus – de la part de leurs employeurs –, si bien que l’on a demandé l’adoption d’une législation spécifique pour protéger cette catégorie de travailleurs. À l’heure actuelle, il n’existe pas, au Liban, de protection juridique officielle pour ces travailleurs étrangers; toutefois, plusieurs associations communautaires sont très actives dans le sens de la protection de ces travailleurs.

Point 15 : Liberté de conscience et de religion (articles 18 et 25 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 15 : les lois et réglementations régissant la reconnaissance des différentes confessions religieuses, et l’application concrète de ces textes; préciser de quelle manière l’obligation, pour tous les citoyens libanais, de se réclamer de l’une des religions officiellement reconnues dans le pays, pourrait être considérée comme conforme à l’article 18 du Pacte; enfin, comment l’interdiction, pour tout citoyen athée, de participer aux affaires publiques du pays, pourrait être jugée compatible avec l’article 25 du Pacte.

M. Maamari (Liban) déclare que la liberté de religion est garantie par la Constitution libanaise, et qu’il n’existe pas de loi interdisant la pratique d’une religion, quelle qu’elle soit. Par conséquent, tout travailleur étranger est totalement libre de pratiquer sa religion. M. Maamari ajoute qu’il ne considère pas le fait que la loi religieuse soit prédominante par rapport aux lois civiles, en matière de mariage et d’héritage, comme une violation de l’article 18 du Pacte. Les seuls mariages civils reconnus au Liban sont ceux célébrés dans un pays étranger. En ce qui concerne ces unions, un divorce éventuel est traité dans le cadre de la loi civile sur le mariage.

On a évoqué précédemment une proposition en vue de la création d’une « dix-neuvième dénomination », qui recouvrirait l’ensemble des athées et les personnes sans aucune obédience religieuse. À défaut, il faudrait supprimer le système de la reconnaissance officielle d’un certain nombre de religions, ou encore inclure cette catégorie de personnes sans obédience dans le système des quotas relatif à la répartition des postes politiques et administratifs.

Point 16 : La liberté d’expression (article 19 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 16 : quel type de contrôle est éventuellement exercé sur la liberté de la presse et des médias de masse?

M. Maamari (Liban) déclare qu’au Liban, les médias ne font l’objet d’aucune censure. Les autorités imposent seulement des restrictions aux transmissions, par satellite, de programmes de télévisions étrangères.

Point 17 : La liberté de réunion et d’association (articles 21 et 22 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 17 : informations sur les lois et pratiques en matière de réunions publiques, et notamment la question de savoir si l’interdiction provisoire de ce type de réunion est toujours en vigueur; les conditions d’enregistrement des associations; de quelle manière l’interdiction faite aux fonctionnaires d’adhérer à un syndicat, de faire grève et de participer à des négociations collectives pourrait être considérée comme conforme à l’article 22 du Pacte?

M. Maamari (Liban) précise, au sujet de la liberté d’association, que seules les manifestations de rue sont interdites; il n’y a aucune restriction en ce qui concerne les réunions publiques. Par ailleurs, si les fonctionnaires n’ont pas le droit, effectivement, d’être membres d’un syndicat ou de faire grève, cette interdiction est contournée de diverses manières. Il faut noter tout d’abord que certains syndicats sont disposés à représenter les fonctionnaires et à défendre les droits de ces derniers sans qu’ils aient pour autant l’obligation d’adhérer officiellement aux syndicats en question. D’autre part, des enseignants d’établissements publics n’ont tenu aucun compte de l’interdiction officielle, et se sont mis en grève afin de faire pression sur l’administration scolaire – comme cela est possible dans le secteur privé. Il faut noter enfin que les diplômés de l’École d’Administration ont créé une association de promotion de leurs droits; ils ont également exigé des améliorations de leur condition.

Point 18 : Les droits de l’enfant (article 24 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 18 : les progrès accomplis dans le sens de l’adoption du projet de loi élevant à 15 ans l’âge minimum légal pour occuper un emploi; les mécanismes d’interdiction de l’emploi d’enfants se situant au-dessous de l’âge minimum légal pour travailler, et les lois et pratiques relatives à l’emploi d’enfants se situant au-dessus de l’âge minimum légal; les mesures prises pour répondre aux besoins des enfants vivant dans la pauvreté et sans domicile, et les résultats obtenus dans ce domaine.

M. Maamari (Liban) déclare que l’âge minimum légal pour occuper un emploi est passé de 8 à 13 ans; à ce jour, il n’a pas été possible de l’élever encore jusqu’à 16 ans, étant donné que les familles vivent dans des conditions économiques telles que de nombreux enfants sont obligés de travailler pour subvenir aux besoins familiaux. Il faut noter toutefois que certains emplois dangereux et le travail de nuit sont interdits aux jeunes de moins de 18 ans. On ne peut répondre aux besoins des enfants de la rue que par des efforts concertés des Ministères du Travail, des Affaires sociales, de l’Intérieur et de la Justice. Une unité spéciale, chargée du problème des enfants des rues, a été créée au sein du ministère des Affaires sociales; elle propose les services de travailleurs sociaux, ainsi qu’un hébergement, aux jeunes sans domicile. Par ailleurs, un certain nombre d’organisations non gouvernementales sont également engagées dans cette action; mais le problème persiste.

Point 19 : La diffusion d’informations au sujet du Pacte (article 2 du Pacte)

La Présidente fait lecture des questions liées au Point 19 : les mesures prises en vue d’informer au sujet des droits garantis par le Pacte; et la question de savoir si l’opinion publique libanaise a été informée de l’examen, par le Comité, du rapport du Liban.

M. Maamari (Liban) déclare que des organisations non gouvernementales et communautaires informent la population au sujet des droits de l’homme et des dispositions du Pacte; cependant, ajoute-t-il, le gouvernement libanais n’a pas pris d’initiatives officielles dans ce domaine, et n’a mis en place aucun programme d’éducation aux droits de l’homme.

M. Yalden déclare que, lors de la présentation du rapport initial du Liban, on avait également soulevé la question de la condition de la femme, et que les données chiffrées fournies à ce sujet semblent indiquer certains progrès. Cependant, note encore M. Yalden, la participation des Libanaises à la vie publique reste malheureusement très faible; par conséquent, l’orateur se demande si le gouvernement a fait en sorte d’assurer le recrutement et la promotion des femmes.

La situation des minorités est un autre domaine abordé dans le cadre de l’examen du rapport initial; à cet égard, M. Yalden n’est pas satisfait de la déclaration qui est faite au dernier paragraphe du rapport présenté aujourd’hui au Comité, et selon laquelle il n’y a rien de nouveau à ajouter sur ce chapitre. L’orateur souhaiterait donc obtenir davantage d’informations sur toute action du gouvernement libanais dans le sens de la protection des droits des minorités ethniques et linguistiques du pays.

M. Yalden ajoute qu’en dehors d’une référence à la Commission parlementaire sur les Procédures et les Droits de l’Homme – allusion qui, cependant, ne dit rien des activités concrètes de cette commission –, on ne dispose pratiquement d’aucune information au sujet d’éventuels mécanismes de protection des droits de l’homme. L’orateur souhaite savoir si de tels mécanismes ou instances existent effectivement, et si la mission du Procureur Général, évoquée dans le rapport, a un lien quelconque avec la protection des droits de l’homme.

M me  Gaitan de Pombo déclare que l’on n’a pas répondu aux questions du Comité concernant l’application de l’article 19 du Pacte. L’oratrice ajoute qu’elle est préoccupée par le manque de communication apparent entre les instances gouvernementales, d’une part, et les organisations non gouvernementales et communautaires appartenant à la société civile, d’autre part. À titre d’exemple, l’oratrice déclare que la délégation libanaise semblait ignorer totalement le cas des ressortissants libanais détenus en Syrie, alors que l’on pouvait facilement obtenir cette information auprès de diverses sources extérieures. Mme Gaitan de Pombo souhaite également savoir ce que les autorités libanaises comptent faire pour traiter le problème des disparitions forcées qui ont eu lieu à partir de 1990.

L’oratrice juge également préoccupant que les organisations non gouvernementales soient les seules instances qui informent la population au sujet des dispositions du Pacte. À son avis, il paraît très difficile de créer une véritable « culture des droits de l’homme » sans le concours des institutions officielles et sans l’engagement concret du gouvernement libanais.

M. El-Shafei, abordant la question de la liberté d’expression, déclare que, lors de la guerre civile qui a eu lieu au Liban, on avait assisté à une augmentation importante du nombre de stations de radio et de chaînes de télévision dans le pays. Puis, aux termes d’un décret de 1994 – qui visait à la régulation de ce domaine audiovisuel –, il a fallu obtenir des licences de diffusion, et la délivrance de ces licences a souvent été liée à l’appartenance politique; dès lors, cela a contribué à une réduction du champ des programmes politiques. Par conséquent, M. El-Shafei demande à la délégation de préciser si le décret en question est compatible avec l’article 19 du Pacte, et d’indiquer quelle pourrait être l’action du gouvernement libanais pour remédier à cette situation.

Concernant la condition de la femme, M. El-Shafei demande si le Liban a adhéré à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, et si des mesures ont été prises en vue de remédier à la discrimination pouvant exister en matière de nationalité des enfants. L’orateur demande également à la délégation libanaise de commenter les informations selon lesquelles les hôtesses de l’air de la compagnie aérienne nationale seraient contraintes de prendre leur retraite au terme de 25 ans d’activité, alors que leurs homologues masculins ne sont pas soumis aux mêmes limites de temps.

M me  Medina Quiroga se déclare surprise par le fait que le sexe ne figure pas parmi les motifs de discrimination possibles énoncés au paragraphe 7 du rapport. Elle souligne en outre que les autorités libanaises n’ont pris aucun engagement en ce qui concerne une éventuelle réforme, dans un délai donné, de la législation sur les « crimes d’honneur », par exemple – cette pratique étant évidemment une forme de discrimination. L’oratrice se dit également étonnée que ni le rapport écrit ni la présentation orale n’aient fait mention d’une quelconque étude sur la violence domestique et le viol conjugal; l’oratrice souhaite savoir de quelle manière de tels crimes sont sanctionnés, et quelle est l’action des autorités en vue d’empêcher ce type de pratiques. Mme Medina Quiroga ajoute qu’elle considère que les lois religieuses sur le mariage sont incompatibles avec le Pacte. Par ailleurs, elle estime que le gouvernement libanais devrait prendre des mesures afin de remédier à l’absence de protection des travailleurs domestiques étrangers et aux restrictions qui frappent leur liberté de circulation.

L’oratrice ajoute que l’article 18 du Pacte ne garantit pas seulement la liberté de religion, mais aussi le droit d’avoir des convictions. C’est une grave violation de cet article que de contraindre les personnes à déclarer une obédience religieuse, quelle qu’elle soit. Mme Medina Quiroga souhaiterait également être plus amplement informée des mécanismes de protection de l’« honneur » des fonctionnaires, et savoir aussi si la loi permet de critiquer publiquement l’action de ces hauts responsables. Elle souhaite encore savoir qui délivre les licences de diffusion radiophonique et télévisuelle, si les journaux étrangers sont librement diffusés au Liban et pour quelles raisons les émissions de télévision par satellite sont interdites. Il conviendrait également d’obtenir davantage d’informations sur ce qui apparaît comme un ensemble de restrictions à la liberté d’association.

M me  Medina Quiroga interroge enfin la délégation libanaise sur le droit de contracter une union matrimoniale et ses implications, qui sont mentionnées au paragraphe 78 b) du rapport – à savoir, notamment, que tout homme et toute femme souhaitant se marier doit obligatoirement passer une visite médicale.

M me  Evatt se déclare déçue par l’imprécision de la réponse de l’État partie aux questions soulevées dans la liste du Comité. Dans le contexte de la Partie I de cette liste, Mme Evatt souhaite savoir si une date a été fixée pour les élections municipales. Dans le contexte de la Partie II (Point 11), l’oratrice note que les traités ont immédiatement force de loi (HRI/CORE/1/Add.27, paragraphes 31 et 35), et demande de quelle manière les dispositions du Pacte peuvent être directement invoquées devant les tribunaux. Elle souhaite également savoir si cet aspect a occupé une place quelconque, à ce jour, dans les délibérations du Conseil constitutionnel, créé récemment. L’oratrice apprécierait également des informations sur la conformité ou non des dispositions du Pacte avec la législation libanaise sur la famille et le mariage – qui relève en fait de la loi religieuse. Mme Evatt se demande en particulier quel organe gouvernemental est chargé de veiller à cette conformité. Elle ajoute que l’État partie devrait indiquer si sa législation prévoit des mesures réparatrices au bénéfice des femmes victimes d’une discrimination de la part d’une compagnie aérienne libanaise – autrement dit, le cas évoqué par M. El-Shafei.

D’autre part, M me  Evatt demande des précisions sur l’égalité entre les hommes et les femmes en ce qui concerne le droit de quitter le pays (cf. le paragraphe 9 du rapport). D’après le rapport, les Libanaises peuvent obtenir un passeport; mais, selon des informations émanant d’organisations non gouvernementales, un mari pourrait empêcher son épouse et ses enfants de partir à l’étranger. Par ailleurs, il serait également utile de savoir de quelle manière les droits inscrits à l’article 18 du Pacte sont garantis aux personnes d’une autre confession que les 18 religions officiellement reconnues au Liban. Mme Evatt demande également s’il existe une instance indépendante qui soit chargée de décider de l’octroi ou non d’une licence de diffusion audiovisuelle, et requiert des informations sur les critères éventuellement appliqués par cet organisme. Étant donné la réduction du nombre de licences accordées dans ce domaine, l’absence apparente d’un organisme indépendant et le manque de normes communes agréées, on peut avoir des doutes sur la compatibilité des pratiques de l’État partie avec la liberté d’expression telle qu’elle est définie par le Pacte. Mme Evatt émet également des doutes sur le bien-fondé de l’autorisation obligatoire préalable à la publication ou à l’importation de journaux et périodiques, ou encore d’essais polémiques.

M me  Evatt soutient également les observations de Mme Medina Quiroga au sujet du droit pénal de l’État partie – notamment en ce qui concerne les interdictions mentionnées par sa collègue – et se demande quelle pourrait être la compatibilité des dispositions en question avec l’article 9, paragraphe 3 du Pacte. Par ailleurs, l’interdiction sélective de certains syndicats est restée en vigueur très longtemps; Mme Evatt déclare que l’on peut douter de la conformité de cette mesure avec les articles 21 et 22 du Pacte. Elle demande, par conséquent, des précisions sur l’application concrète des lois relatives aux syndicats, et notamment au sujet de l’autorisation préalable à laquelle est soumise la création d’un syndicat , ou encore l’obligation, pour les syndicats, de se conformer à des critères de nature politique. Enfin, Mme Evatt considère qu’il n’appartient pas au gouvernement de décider si les fonctionnaires ont ou non le droit de constituer des syndicats.

M. Bhagwati (Vice-président) remplace Mme Chanet au fauteuil présidentiel.

M. Pocar demande si les autorités libanaises ont pris des mesures administratives ou légales en vue de régler le problème de la confiscation des passeports d’ouvriers – et notamment des ouvrières. L’orateur se demande si des associations non gouvernementales qui visent à défendre ces travailleurs peuvent revendiquer des mesures de réparation judiciaires au bénéfice de ces ouvriers, dans la mesure où ces derniers sont à la merci de leurs employeurs – lesquels imposent ce que l’on peut appeler un « travail forcé », à la limite de l’esclavage.

Par ailleurs, M. Pocar partage les préoccupations formulées par Mme Medina Quiroga au sujet de l’obligation de visite médicale avant le mariage (article 78 b) du rapport), qui revient finalement à établir une autorisation de mariage. M. Pocar se demande également s’il existe, dans le cadre de l’état civil libanais, une section spéciale concernant les mariages contractés à l’étranger. D’autre part, on ne parvient pas à déterminer clairement si les personnes qui se sont mariées à l’étranger doivent quitter le Liban pour pouvoir éventuellement divorcer. Il serait également intéressant de savoir si les autorités libanaises pourraient créer une catégorie spéciale pour les personnes n’appartenant à aucune des 18 religions officiellement reconnues. L’orateur demande à être également informé des règles qui pourraient régir le mariage des personnes membres d’une telle catégorie, ainsi que les mariages interconfessionnels.

En ce qui concerne la liberté d’association (article 22 du Pacte), M. Pocar se demande si la non-délivrance d’une attestation aux personnes ayant déclaré la création d’une association était due « mécaniquement », pour ainsi dire, aux retards bureaucratiques, ou, plutôt, à une forme de « filtrage ». Dans ce dernier cas, M. Pocar déclare qu’il apprécierait des informations sur les critères d’autorisation des associations.

M. Ando demande si la loi interdisant toute atteinte à la dignité du Chef de l’État est appliquée dans les faits. L’orateur souhaite également connaître les raisons de l’interdiction, au Liban, de l’ouvrage intitulé In the Face of Christ, ainsi que les implications qu’a pu avoir cette mesure d’interdiction. Il demande également si les informations selon lesquelles le Service de la Sûreté publique du ministère de l’Intérieur serait habilité à exercer une censure sur les œuvres cinématographiques sont fondées, et, le cas échéant, si le service en question a effectivement exercé un tel pouvoir. Par ailleurs, l’État partie devrait indiquer pour quelles raisons il a ratifié un nombre aussi restreint de Conventions de l’Organisation internationale du travail – notamment la Convention No 87 concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical. M. Ando déclare enfin qu’il serait utile de savoir jusqu’à quel âge la scolarité est obligatoire au Liban, et de mettre cette donnée en balance avec l’âge minimum auquel on autorise le travail des enfants – à savoir 13 ans.

M me  Chan et as sume de nouveau la Présidence.

M. Maamari (Liban), répondant aux questions de certains membres du Comité, déclare que le gouvernement libanais n’a pas entrepris de programme particulier de promotion de la participation des femmes à la vie politique et économique du pays. Il faut noter d’autre part que, comme tous les autres ressortissants étrangers et les membres de minorités ethniques et linguistiques, les Palestiniens ont accès au secteur judiciaire. Quant à la Commission parlementaire sur les Procédures et les Droits de l’Homme, elle examine tous les projets de loi concernant les droits de l’homme, et peut directement interpeller le gouvernement. D’autre part, le Barreau libanais a également mis en place une commission des droits de l’homme. Il n’existe pas de Médiateur au Liban. Les tribunaux sont habilités à entendre les différends entre des particuliers et l’État; le Conseil d’État peut éventuellement annuler des décrets de l’exécutif, et ordonner au gouvernement de verser des dommages et intérêts à toute personne ayant subi un préjudice du fait de l’action gouvernementale. Quant au Procureur Général, il représente la société dans les affaires pénales.

En ce qui concerne la liberté d’association, M. Maamari fait observer qu’il n’existe pas de filières de communication particulières entre les associations et l’État; les parties en question communiquent par les voies traditionnelles. En réponse à M. El-Shafei, le délégué libanais déclare que les licences de diffusion radiophonique et télévisuelle sont accordées sur la base de critères techniques et non pas politiques; ces critères, qui ont un caractère objectif, sont examinés par une commission d’information nationale. Il n’y a aucune restriction quant au contenu des programmes télévisuels; mais, en revanche, des quotas ont été établis en matière de temps d’antenne, afin de garantir la diversité des programmes. Enfin, dans ce domaine, les journalistes étrangers ne sont soumis à aucun contrôle.

M. Maamari ajoute que le Liban a effectivement ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Par ailleurs, il faut être très vigilant en ce qui concerne la détermination de la nationalité d’un enfant né d’un parent libanais et d’un parent non libanais; c’est là une question très sensible, d’autant plus que le Liban compte de nombreuses nationalités – notamment des ressortissants palestiniens. D’autre part, les associations de défense des droits de la femme luttent très activement contre la discrimination à l’égard des femmes, au Liban, et l’on constate que leur action est prometteuse.

Par ailleurs, le gouvernement libanais n’est pas partie prenante dans le différend entre les hôtesses de l’air et leur employeur. Cette question sera réglée par les tribunaux conformément au Code du travail libanais.

M. Maamari reconnaît certaines faiblesses de son gouvernement en ce qui concerne l’application des dispositions du Pacte. Cependant, il dément que le processus d’amendement de la législation libanaise visant à mettre celle-ci en conformité avec le Pacte soit au point mort : en fait, cela prend du temps. Il faut noter que le Conseil constitutionnel libanais vérifie la conformité des lois avec la Constitution du pays, mais non pas avec les dispositions du Pacte.

M. Maamari souligne par ailleurs qu’il n’a pas connaissance de procès récents concernant des atteintes éventuelles à la dignité du Chef de l’État.

D’autre part, les athées ont toute liberté de se déclarer en tant que tels, et jouissent également de la liberté d’expression; toutefois, ils sont soumis à des dispositions particulières en matière matrimoniale et familiale et il leur est interdit de participer à la vie publique du pays. Le délégué libanais reconnaît que la non-délivrance d’une attestation de création d’association constitue, de fait, une forme de contrôle inacceptable. Par ailleurs, il faut noter qu’il y a, au Liban, interdiction absolue de manifester. Quant à l’interdiction faite aux fonctionnaires de constituer des syndicats, il s’agit d’un problème différent, qui doit effectivement être traité.

D’autre part, les élections municipales n’ont pas été annulées; elles ont seulement été reportées dans l’attente du vote sur le projet de législation pertinent, élaboré par un comité ministériel. En ce qui concerne les organisations non gouvernementales qui défendent les travailleurs étrangers, elles peuvent avoir recours à la justice, à l’État libanais ou encore au Consul du pays étranger en question. Les passeports confisqués sont généralement remplacés par les Consulats concernés.

La visite médicale prénuptiale est considérée comme un service rendu aux couples; de toute manière, le gouvernement n’intervient pas dans ce domaine, et nul n’est empêché de contracter mariage, même si les résultats de l’examen médical en question sont négatifs. Les couples mariés à l’étranger peuvent entamer une procédure de divorce devant un tribunal libanais. S’il peut y avoir, parfois, des problèmes d’ordre administratif dans les cas de mariage interconfessionnel, ce n’est pas la règle générale : ainsi, la communauté chrétienne autorise ces mariages mixtes. Enfin, le délégué libanais déclare ne pas avoir connaissance de l’interdiction du livre mentionné par M. Ando, et précise que, dans son pays, la scolarité est obligatoire jusqu’à l’âge de 12 ans.

M. Scheinin demande certains éclaircissements : il souhaite savoir si des diffuseurs audiovisuels indépendants ont obtenu une licence, et, dans l’affirmative, à quelles conditions, et si des représentants de l’État en mesure d’exercer un contrôle sur les médias se sont vu accorder des licences de diffusion. M. Scheinin ajoute que, dans ce domaine, les critères techniques ne devraient pas être le facteur déterminant; selon lui, il serait préférable de garantir un processus impartial d’octroi de licences.

M. Maamari (Liban) déclare que les critères d’octroi de fréquences audiovisuelles – qui sont en nombre limité – ne favorisent pas particulièrement les hauts fonctionnaires; ils privilégient plutôt les organisations possédant les moyens techniques sophistiqués qui permettent d’opérer sur les fréquences en question. Par conséquent, le gouvernement libanais a encouragé les fusions d’organismes audiovisuels, et a ainsi augmenté le nombre de fréquences disponibles. Les demandes d’obtention de fréquences, qui ne sont restreintes ni par la loi ni par une quelconque politique du gouvernement, sont examinées de manière impartiale sur des bases techniques.

M. Klein déclare que le fait de reconnaître les difficultés actuelles du Liban – dans le contexte général de la situation au Moyen-Orient – ne doit pas occulter une autre réalité, à savoir que le gouvernement libanais ne respecte pas les obligations que lui a fixées le Pacte en matière de protection des personnes de toute violation des droits de l’homme, en territoire libanais. On peut être légitimement préoccupé par les tribunaux militaires – leur domaine de juridiction, l’indépendance des magistrats qui y siègent, les procédures qu’ils appliquent, ou encore les problèmes de défense des personnes passant en jugement.

L’action du Comité en tant qu’organe de contrôle n’a pas été facilitée du fait que la délégation de l’État partie a adopté une attitude évasive au sujet des informations documentées signalant des cas de torture – et notamment des allégations formulées en 1996 au sein du Parlement même, et disant que des détenus avaient été torturés par les forces de sécurité du pays (deux de ces détenus ayant notoirement trouvé la mort au cours des interrogatoires en question).

Le gouvernement libanais devrait développer sa coopération avec les organisations non gouvernementales les plus actives dans le domaine des droits de l’homme, et devrait aussi rendre largement public son dialogue avec le Comité.

M. El-Shafei déclare que le Comité se félicite d’avoir renoué son dialogue avec le Liban par le biais de l’examen du rapport présenté par ce pays, après une longue période d’interruption et l’effondrement de toutes les structures de l’État libanais. Ce n’est que ces dernières années que les institutions libanaises ont recommencé à fonctionner normalement; à cet égard, tous ceux qui s’efforcent de faire respecter les dispositions du Pacte et d’autres instruments internationaux – c’est-à-dire les magistrats, les avocats, et le Procureur Général, entre autres – méritent d’être encouragés. Pour le gouvernement libanais, la première question à l’ordre du jour est celle de la défense des droits et libertés; cependant, il ne semble pas y avoir de véritable coopération entre l’appareil d’État et les organisations non gouvernementales qui défendent les droits de l’homme; par conséquent, il faut espérer une meilleure communication entre ces deux parties.

M. El-Shafei ajoute que le statut des divers traités internationaux au sein du système juridique libanais n’apparaît toujours pas très clairement; et on peut en dire autant de la capacité des tribunaux libanais à appliquer directement les dispositions des traités en question. L’orateur se dit également préoccupé par un certain nombre de problèmes – à savoir : les périodes d’état d’urgence, au cours desquelles l’armée prend en charge la sûreté de l’État; le rôle et la juridiction des tribunaux militaires; les enquêtes policières, et notamment les procédures menées en l’absence du suspect; l’indépendance de la Justice; et, enfin, la condition des travailleurs étrangers. Sur ce dernier point, les dispositions du Code du travail libanais doivent être complétées par l’application des Conventions de l’Organisation internationale du travail auxquelles le Liban est partie – notamment en ce qui concerne la liberté de circulation de ces travailleurs sur le territoire libanais, et leur droit de quitter leur pays d’origine ou d’y retourner, comme le garantit l’article 12 du Pacte.

M me  Medina Quiroga se déclare déçue par la brièveté des réponses de la délégation aux questions et à la liste de points du Comité. L’oratrice ajoute qu’au Liban, non seulement les dispositions du Pacte ne prévalent pas par rapport à la législation nationale, mais, de plus, il semble que l’on n’ait pas encore adopté, dans ce pays, les textes de loi qui permettraient l’application du Pacte. Il semble également que le gouvernement libanais n’ait pas conscience de son obligation de prendre l’initiative en matière de défense des droits de l’homme. Mme Medina Quiroga ajoute que, dans ce contexte, les problèmes de passeport relèvent exclusivement des consulats étrangers, que les Libanais sont contraints de contourner les restrictions imposées en matière de droit d’association, que le progrès des droits de la femme dépend uniquement de diverses organisations privées, et que les informations – crédibles – signalant des cas de torture sont tout simplement démenties et ne font pas l’objet d’enquêtes immédiates. Dans le rapport même, il n’est pas une seule page qui ne révèle une certaine incompatibilité entre les dispositions du Pacte et soit la législation libanaise, soit son mode d’application. En conclusion, Mme Medina Quiroga déclare espérer que le prochain rapport du Liban indiquera des progrès dans ces domaines.

M. Pocar fait observer que le gouvernement libanais n’a pas déployé suffisamment d’efforts pour appliquer les dispositions du Pacte. Dans ce contexte, l’un des problèmes majeurs est que, d’une manière générale, la population libanaise ne participe pas à la vie politique; or, ce principe de participation est l’un des fondements du Pacte. L’orateur ajoute que les lois libanaises sur la famille, sur les femmes et les enfants sont inappropriées, que le Code du travail n’est pas correctement appliqué, et que, dans les faits, on constate des restrictions aux libertés d’expression et d’association.

M. Pocar dit encore que les failles les plus importantes du système libanais concernent les processus d’administration et de réparation judiciaires. La délégation a donné l’impression que la protection des droits de l’homme est assurée exclusivement par la société civile et les organisations qui y sont liées. La ratification du Protocole facultatif serait un excellent moyen de renforcer les processus de réparation prévus par la législation nationale, dans la mesure où cela permettrait de contrôler les procédures au niveau international et de soutenir les efforts des autorités libanaises.

M me  Evatt déclare comprendre les problèmes du Liban, et notamment les problèmes de violence, qui se sont développés dans tous les cas de non respect des droits de l’homme.

Les allégations de tortures révèlent un véritable déficit de crédibilité du gouvernement : en effet, on ne peut pas concevoir que les autorités libanaises n’aient pas connaissance d’informations transmises par des documents d’organisations non gouvernementales accessibles au public, et également reçues par le Comité. Par conséquent, le gouvernement libanais devrait trouver un terrain de coopération avec les organisations non gouvernementales opérant dans le domaine des droits de l’homme.

Il semble que les dispositions du Pacte ne jouent aucun rôle au Liban, que ce soit au niveau des lois ou dans les faits. Ces dispositions sont totalement ignorées en ce qui concerne la sanction des actes de violence, et cette situation ne conduit à aucune mesure de réparation au niveau juridique. Mme Evatt est particulièrement inquiète face aux arrestations et détentions arbitraires – opérées notamment par l’Armée –, face au mauvais traitement, voire à la disparition, de détenus, à la durée des détentions et aux mauvaises conditions carcérales; l’oratrice est également préoccupée par le recours important aux tribunaux militaires pour juger des civils, par l’interdiction des manifestations, par la tolérance, au niveau de la loi et des pratiques, d’une certaine discrimination à l’égard des femmes, et par l’absence de tout projet de lutte contre ce type de violence; enfin, Mme Evatt est préoccupée par les inégalités en matière d’application des lois et par la violation des droits des travailleurs domestiques. Il semble que le gouvernement libanais fasse preuve d’une certaine indulgence vis-à-vis de situations incompatibles avec les droits garantis par le Pacte, et qu’il hésite à prendre les mesures de réparation qui s’imposent.

M. Ando, allant dans le même sens que Mme Evatt, déclare espérer que le Liban assumera ses responsabilités en tant qu’État partie au Pacte et qu’il en appliquera intégralement les dispositions. Cependant, ajoute l’orateur, il semble que la religion constitue un obstacle sur cette voie. Le Liban devrait adopter une approche impartiale dans ce domaine, et s’efforcer d’éliminer les principes et pratiques encouragés par des spécificités religieuses incompatibles avec le Pacte.

M. Bhagwati fait observer que les informations supplémentaires fournies par la délégation libanaise afin de compléter le rapport de l’État partie – d’une brièveté inacceptable – ne permettent toujours pas de disposer d’un tableau complet de la situation au Liban en matière de droits de l’homme. M. Bhagwati partage les préoccupations d’autres membres du Comité, en particulier en ce qui concerne le statut du Pacte dans le cadre de la législation nationale libanaise : en effet, les dispositions du Pacte n’ont été incorporées dans aucune partie de la Constitution en vigueur, et n’ont jamais été invoquées dans les décisions du Conseil constitutionnel. L’orateur ajoute que l’insistance des autorités libanaises sur la nécessité d’un mariage religieux constitue une violation non seulement du principe de liberté de religion, mais aussi du droit à fonder une famille. Pour garantir la liberté d’expression, il faut absolument adopter des critères objectifs pour l’octroi des licences de diffusion audiovisuelle. Quant aux violations des droits des travailleurs domestiques, le Liban parviendrait probablement à les limiter s’il devenait partie au Protocole facultatif. Par ailleurs, le gouvernement libanais doit agir de toute urgence en vue de modifier le mode de désignation des magistrats et leur mandat – et ce, afin de garantir l’impartialité de la Justice. Les autorités libanaises devraient mettre en place des programmes de formation du personnel judiciaire, de la police et des fonctionnaires en matière de respect des droits de l’homme.

M me  Gaitan de Pombo déclare que, si le Comité peut comprendre les difficultés actuelles du Liban, il n’en demande pas moins instamment à l’État partie de déployer tous les efforts possibles pour respecter son obligation de garantir les droits inscrits dans le Pacte. Ainsi, le Comité est très préoccupé par l’absence d’informations au sujet des cas de détention arbitraire et de disparition de personnes signalés par certaines sources. Par conséquent, le Comité apprécierait toute information au sujet d’éventuelles procédures d’enquête de la part du gouvernement, dans ce domaine. D’autre part, il est également assez inquiétant de constater que certaines dispositions de la Constitution et de la législation libanaises sont ouvertement discriminatoires à l’égard des femmes. Enfin, l’oratrice souligne que les autorités libanaises devraient déployer beaucoup plus d’efforts en vue d’informer le grand public des droits garantis par le Pacte.

La Présidente déclare que l’effet le plus positif de l’examen, par le Comité, du deuxième rapport périodique du Liban est d’avoir permis de renouer le dialogue avec l’État partie. Même si le Comité est tout à fait conscient des problèmes actuels du Liban, l’État partie doit respecter les obligations contractées dans le cadre de l’adhésion au Pacte. On a souligné tout particulièrement les préoccupations concernant l’indépendance de la Justice, l’absence de voies de recours au niveau national, ainsi que les nombreux cas de torture, de détention arbitraire et de disparition de personnes. L’État partie devrait envisager l’éventualité d’un moratoire en ce qui concerne le recours à la peine de mort. D’autre part, le Comité s’est également déclaré profondément préoccupé par la discrimination à l’égard des femmes, par le traitement des employés domestiques – qui constitue une violation de l’article 12 du Pacte –, ainsi que par la discrimination à l’égard des athées, ou encore par le travail des enfants. D’une manière générale, le Liban devrait tendre à l’instauration de l’État de droit et à l’élaboration d’un cadre juridique et d’une culture de protection des droits garantis par le Pacte.

M. Maamari (Liban) déplore que le rapport périodique de son pays et les réponses aux questions soulevées par les membres du Comité n’aient pas été assez clairs et précis; le délégué libanais ajoute qu’il transmettra au gouvernement de son pays les avis du Comité.

La séance, suspendue à 17h 30, reprend à 17h 45.

Observations générales du Comité

M. Klein déclare que, lors de la préparation d’un projet d’observation générale au sujet de l’article 12 du Pacte, il a utilisé tous les éléments pertinents des rapports des États parties, et les opinions exprimées par les membres du Comité. Sur la base de l’ensemble de ces matériels, il a pu définir les thèmes à aborder dans le cadre de l’Observation générale.

Ainsi, plutôt que d’exposer des questions très générales et très théoriques, il va s’efforcer de mettre l’accent sur les pratiques concrètes des États parties en ce qui concerne l’application de l’article 12 du Pacte. Ce processus se heurtera forcément à un certain nombre de problèmes, sur les points n’ayant pas fait l’unanimité au sein du Comité. Par conséquent, M. Klein ajoute qu’il envisage de présenter un projet de texte à la session d’été : ce projet dressera la liste des éléments utilisés et indiquera les points qui devront être abordés dans le cadre de l’Observation générale.

M me  Medina Quiroga déclare que, lors de la préparation du projet d’observation générale sur l’article 3 du Pacte, elle a réuni les avis exprimés par le Comité dans le cadre de ses observations sur les rapports des États parties. L’oratrice ajoute qu’elle compte définir le lien entre les différents droits inscrits dans le Pacte et les questions d’égalité entre les sexes, et elle encourage les membres du Comité à communiquer leurs opinions sur ce sujet.

M. Kretzmer se déclare en accord total avec l’approche de M. Klein. Il reconnaît lui aussi qu’il serait très délicat de faire des observations au sujet de grands principes généraux avant d’avoir tranché sur l’interprétation de tel ou tel article dans des cas très précis; par conséquent, ajoute M. Kretzmer, ce type d’approche devrait être évité.

M me  Evatt déclare que l’article 12 est l’un des plus importants du Pacte dans la mesure où il traite de questions qui devraient retenir l’attention du Comité pendant longtemps. L’oratrice considère que, dans une certaine mesure, une vision globale est nécessaire. En effet, on ne peut pas toujours se prononcer sur une situation précise si l’on n’a pas au préalable une idée claire des principes généraux qui sous-tendent l’article en question. Mme Evatt estime, par conséquent, que la connaissance de ces grands principes et l’examen de cas précis doivent aller de pair.

M. Pocar souligne la nécessité d’un équilibre entre, d’une part, la vision globale de tel ou tel article du Pacte, et, de l’autre, le commentaire détaillé de points très spécifiques. Le projet d’Observation générale sur l’article 12 devrait également souligner le lien avec l’article 4. À cet égard, il pourrait être utile de déterminer dans quelle mesure les obligations fixées par l’article 12 pourraient faire l’objet de dérogations.

M. Ando est d’accord pour dire qu’il faut établir un équilibre satisfaisant entre les idées générales fondamentales et certaines situations précises révélées par l’examen des rapports. De nombreux articles du Pacte sont liés aux droits définis à l’article 12 et pourront donc être traités dans le cadre du projet d’Observation générale sur cet article.

La séance est levée à 18  h  5 .