Nations Unies

CCPR/C/SR.2839

Pacte international relatifaux droits civils et politiques

Distr. générale28 octobre 2011

Original: français

Comité des droits de l’homme

103esession

Compte rendu analytique de la 2839e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 20 octobre 2011, à 10 heures

Présidente:Mme Majodina

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Troisième rapport périodique de la Jamaïque (suite)

La séance est ouverte à 10 heures.

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40du Pacte (suite)

Troisième rapport périodique de la Jamaïque (CCPR/C/JAM/3; CCPR/C/JAM/Q/3; CCPR/C/JAM/Q/3/Add.1; HRI/CORE/1/Add.82) (suite)

1.Sur l’invitation de la Présidente, la délégation jamaïcaine reprend place à la table du Comité.

2.La Présidente invite la délégation jamaïcaine à continuer de répondre aux questions complémentaires concernant la première partie de la liste des points à traiter (CCPR/C/JAM/Q/3), posées par les membres du Comité à la séance précédente.

3.M. McCook (Jamaïque) dit que les recours en réparation en cas de violation des droits fondamentaux sont en général formés devant la Cour suprême au titre du paragraphe 1 de l’article 19 de la Charte des libertés et des droits fondamentaux. Le paragraphe 4 de l’article 19 de la Charte dispose que la Cour suprême peut refuser d’exercer ses pouvoirs et renvoyer l’affaire devant une autre juridiction ou autorité si elle estime que l’intéressé dispose ou a disposé de voies de recours suffisantes pour obtenir réparation en vertu d’une autre loi.

4.M. McCook réaffirme que la Jamaïque n’envisage pas d’adhérer de nouveau au Protocole facultatif se rapportant au Pacte. Il fournira ultérieurement par écrit des renseignements détaillés sur le mandat et les ressources financières et humaines des organes chargés de surveiller le respect des droits de l’homme dans différents domaines.

5.La loi sur la quarantaine n’est pas considérée comme portant préjudice aux personnes qui vivent avec le VIH/sida en Jamaïque. Elle vise avant tout à prévenir les risques pour la santé publique aux points d’entrée sur l’île par bateau ou par avion. Il a été proposé de modifier la loi sur la santé publique de sorte que le VIH/sida n’y soit pas considéré comme une maladie contagieuse.

6.Il n’y a pas eu en Jamaïque de cas avéré de harcèlement par la police ou de lynchage de lesbiennes, de gays, de bisexuels, de transsexuels ou de travailleurs du sexe, pas plus qu’il n’existe une politique officielle de discrimination à l’égard de ces personnes, dont la présence est de plus en plus visible dans la société jamaïcaine.

7.Par l’intermédiaire du Bureau des affaires féminines, le Gouvernement prend des mesuresincitant les partis politiques à désigner davantage de femmes pour les représenter. À l’issue de discussions menées en mars 2011 au sein de la Commission des ressources humaines du Cabinet et avec le Premier Ministre, concernant la politique nationale pour l’égalité des sexes, il a été décidé d’introduire un système de quotas au Sénat, dont les membres sont nommés et non élus. Un processus de sensibilisation, d’éducation et de consultation est en cours afin de faire comprendre et accepter ce système de quotas par les partis politiques et la société civile. Par ailleurs, des organisations non gouvernementales (ONG) ont récemment effectué des recherches sur la représentation des femmes aux niveaux élevés de prise de décisions.

8.L’interdiction de la discrimination fondée sur le sexe énoncée dans la Charte des libertés et des droits fondamentaux est de portée plus vaste que dans la version précédente de la Constitution puisqu’elle n’est pas limitée aux actes de discrimination commis par des organes de l’administration publique. Il est possible d’invoquer la Charte pour les questions concernant l’égalité des sexes en matière de recrutement, de promotion et de dénonciation de contrats de travail.

9.Une politique de lutte contre le harcèlement sexuel est en cours d’élaboration et le Gouvernement envisage aussi l’adoption d’une loi. Plusieurs fonctionnaires des services des ressources humaines et d’autres cadres de la fonction publique, ainsi que des organismes du secteur privé, ont suivi des formations ou des cours de sensibilisation sur la question.

10.Les statistiques les plus récentes du Ministère de l’éducation montrent que le taux de scolarisation des garçons est supérieur à celui des filles dans le primaire. Des mesures sont prises pour y remédier, mais il convient de noter que ce rapport est inversé dans le secondaire.

11.Des actions ont été entreprises pour former les fonctionnaires de la police et des organes de l’État aux droits des personnes vivant en couple avec une personne de même sexe, notamment dans le cadre d’unions conclues à l’étranger. Aucune mesure n’est prévue pour traiter la question de l’union de personnes de même sexe en Jamaïque. La police suit régulièrement des formations sur les droits des citoyens qui sont garantis par la législation jamaïcaine. Ainsi, le Comité international de la Croix-Rouge organise des cours de formation aux droits de l’homme à l’intention des forces de police et des forces de défense.

12.Le Bureau du Défenseur public poursuit son enquête sur les événements qui ont eu lieu dans l’ouest de Kingston en mai 2010 pendant l’état d’urgence. Une enquête est aussi menée par le Bureau des enquêtes spéciales et par la Commission indépendante d’enquête (INDECOM). Aucun délai n’a été fixé pour ces enquêtes. Lorsqu’elles seront achevées, un rapport sera soumis aux services du Procureur général pour examen et décision concernant les plaintes déposées. Il convient de mentionner que l’enquête judiciaire du Coroner n’est pas terminée.

13.L’enquête se poursuit également sur les homicides qui ont eu lieu en 2009.

14.Les enquêtes menées par l’INDECOM depuis qu’elle a commencé ses activités ont abouti à l’ouverture de poursuites pénales contre 12 fonctionnaires de police, dont le cas est actuellement devant les tribunaux, ce qui témoigne de l’indépendance de cet organe.

15.Il existe en common law une présomption de compatibilité entre les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par la Jamaïque et le droit interne, ce qui signifie que tout terme ambigu figurant dans la législation ou la Constitution doit être interprété dans le sens du respect des obligations internationales de la Jamaïque, en partant du postulat que le Parlement ne peut pas avoir eu l’intention d’élaborer des lois allant à l’encontre des obligations internationales de l’État. Le principe de la légalité est étroitement lié à la présomption de compatibilité. Les termes généraux figurant dans les lois et les textes réglementaires, y compris la Constitution, doivent être interprétés de manière compatible avec le respect des droits de l’homme fondamentaux. La nature et la portée des droits énoncés dans la législation nationale peuvent être influencées par le droit international coutumier ou par des traités non incorporés dans la législation nationale.

16.M. McCook n’est pas en mesure de donner un exemple de jugement renvoyant à des dispositions du Pacte ou à la jurisprudence du Comité. Il indique toutefois que, pour rendre une décision, le juge tient compte des observations du procureur, qui peuvent comporter des références aux dispositions du Pacte et à la jurisprudence du Comité mais qui ont une autorité persuasive. Cette pratique est plus particulièrement suivie dans les affaires portant sur des droits de l’homme garantis par la Constitution. Le juge n’est toutefois pas tenu d’accepter les observations du procureur.

17.Aucun condamné à mort n’a été exécuté en Jamaïque depuis 1998. Lorsque le Gouverneur général de la Jamaïque accorde la grâce, sur avis du Conseil privé, la peine de mort est commuée en emprisonnement à vie. Par suite de la décision rendue en 1994 par la section judiciaire du Conseil privé dans l’affaire Pratt and Morgan v. The Attorney General of Jamaica, dans laquelle il a été estimé que le délai de cinq années qui s’était écoulé entre le prononcé de la condamnation à mort et l’exécution de la sentence constituait un traitement inhumain ou dégradant, toutes les condamnations à la peine capitale ont été automatiquement commuées en peine de prison à vie une fois écoulé un délai de cinq ans.

18.En ce qui concerne les châtiments corporels, et en particulier la flagellation, le Gouvernement jamaïcain a donné des informations complètes dans ses réponses écrites à la liste de points à traiter.

19.Le Défenseur public est habilité à enquêter sur toute action d’un organe ou d’un agent de l’État dans l’exercice de ses fonctions dont il estime qu’elle constitue ou risque de constituer une violation des droits d’une personne ou d’une organisation garantis par la Constitution. Toutefois, il ne peut pas enquêter sur une action contre laquelle le plaignant dispose ou a disposé d’un recours devant les tribunaux nationaux et ne peut ordonner ni conduire de poursuites civiles ou pénales. L’INDECOM est chargée de mener des enquêtes ou des inspections concernant les organes de l’État, d’enquêter sur les allégations de violations des droits des citoyens par les forces de sécurité, de préserver les preuves et de faire rapport aux autorités compétentes sur les mesures à prendre. Elle est tenue de fournir les éléments de preuve au Directeur des poursuites et de lui apporter son appui lorsqu’il décide d’engager des poursuites dans le cadre d’une affaire sur laquelle elle a enquêté. Le Directeur des poursuites tient compte des enquêtes menées par l’INDECOM ou par le Défenseur public pour décider s’il déclenche l’action publique, mais il n’est pas lié par elles. Son indépendance dans l’exercice de ses fonctions est garantie par l’article 94 de la Constitution, qui dispose que le Directeur des poursuites n’est soumis au contrôle ou à l’autorité d’aucun organe.

20.La Charte des libertés et des droits fondamentaux annule l’effet de la décision rendue dans l’affaire Pratt and Morgan v. The Attorney General of Jamaica. En effet, le paragraphe 8 a) de l’article 13 de la Charte dispose expressément que l’exécution d’une condamnation à la peine capitale prononcée après l’entrée en vigueur de la Charte ne peut être considérée comme contraire à la Constitution en raison du délai qui s’est écoulé entre le prononcé de la peine et son exécution. Le paragraphe 8 b) du même article dispose que l’application de la peine de mort ne peut être considérée comme contraire à la Constitution en raison des conditions matérielles dans lesquelles est détenue la personne en attente de l’exécution de sa peine.

21.Les condamnés à mort ont dix-huit mois pour saisir un organe externe, y compris un organe de défense des droits de l’homme. Par la suite, leur affaire peut être examinée par le Gouverneur général en vertu de l’article 91 de la Constitution.

22.Il n’existe aucune loi traitant spécifiquement de la torture, mais les différentes dispositions législatives ayant trait à des infractions précises, prises ensemble, forment une interdiction claire de la torture. La question de la signature de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est à l’examen.

23.Sir Nigel Rodley demande confirmation du fait que le paragraphe 8 de l’article 13 de la Charte des libertés et des droits fondamentaux ne peut être appliqué de manière rétroactive et que toute personne condamnée à mort avant l’entrée en vigueur de la Charte en avril 2011 continuera à bénéficier de l’effet de la décision rendue dans l’affaire Pratt and Morgan v. The Attorney General of Jamaica. Il voudrait aussi savoir si les personnes qui bénéficient de l’effet de jurisprudence de l’affaire Pratt and Morgan v. The Attorney General of Jamaica et dont la peine est commuée en peine de prison à vie à l’issue d’un délai de cinq ans sont sorties du quartier des condamnés à mort.

24.M. Lallah dit que, selon les informations dont dispose le Comité, le Directeur des poursuites prend souvent beaucoup de temps pour engager des poursuites, notamment dans les affaires impliquant des fonctionnaires de police. Il demande si, malgré la disposition de la Constitution garantissant la totale indépendance du Directeur des poursuites, les tribunaux n’ont pas la possibilité d’exercer un contrôle judiciaire de son action.

25.La Charte des libertés et des droits fondamentaux n’interdit pas la discrimination fondée sur le sexe mais la discrimination «fondée sur le fait d’être un homme ou une femme». Son entrée en vigueur est sans doute trop récente pour que les tribunaux aient pu développer une jurisprudence en la matière, mais on peut se demander comment cette disposition sera interprétée à l’égard des personnes de sexe indéterminé et s’il n’y a pas un risque que celles-ci soient exclues de la protection contre la discrimination prévue par la Charte.

26.La Présidente remercie les membres du Comité pour leurs questions complémentaires et les invite à passer à la deuxième partie de la liste de points à traiter.

27.Mme Waterval dit qu’elle traitera des questions 14 à 18 de la liste des points à traiter. L’État partie indique au paragraphe 82 de ses réponses écrites que l’usage des châtiments corporels est toujours légal mais qu’il est limité à la famille et à «certains niveaux du système éducatif». Il faudrait savoir quels sont ces niveaux. La délégation a indiqué que les châtiments corporels étaient interdits dans les établissements publics d’accueil pour les enfants. Mme Waterval demande si cette interdiction vaut également pour les établissements privés. Elle souhaiterait également savoir si le document d’orientation relatif à l’abolition des châtiments corporels à l’école mentionné dans les réponses écrites de l’État partie (par. 83) a statut de loi ou s’il s’agit d’un simple document de politique générale sans réelle portée juridique, et quelles autres mesures l’État partie envisage de prendre pour supprimer toutes les formes de châtiments corporels dans tous les contextes.

28.Des statistiques relatives au nombre de victimes de mauvais traitements de la part de policiers qui ont été indemnisées seraient utiles, ainsi que des précisions concernant les mesures prises pour garantir que les policiers mis en cause soient suspendus de leurs fonctions pendant toute la durée de l’enquête. L’incidence très élevée de la violence au foyer dans l’État partie est une autre source de grave préoccupation et appelle des commentaires sur les mesures prises pour y remédier, notamment pour faire en sorte que la loi pertinente soit effectivement appliquée. La délégation voudra bien indiquer s’il est exact que le pays ne compte actuellement qu’un foyer d’accueil pour les victimes de violence au foyer et que le Gouvernement s’est engagé à en créer d’autres. Des renseignements concernant les mesures prises pour former et sensibiliser l’ensemble des juges et du personnel des forces de l’ordre à la question de la violence au foyer seraient utiles.

29.D’après les informations dont le Comité dispose, il n’est pas délivré de document d’identité aux personnes réfugiées dans l’État partie ni de document officiel attestant leur statut de réfugié, ce qui les empêche d’exercer un certain nombre de droits civils. Il semblerait également que les demandeurs d’asile déboutés n’aient à leur disposition aucun moyen de recours. La délégation voudra bien indiquer si des mesures sont prises pour remédier à ces problèmes.

30.M. Salvioli souhaiterait savoir combien de structures d’accueil pour les victimes de la traite existent dans le pays et combien de personnes y sont actuellement hébergées. Au regard de l’ampleur de ce phénomène dans l’État partie, il est surprenant que seulement sept personnes aient été arrêtées et jugées pour faits de traite entre 2007 et 2010. Il serait intéressant de savoir si les différents programmes de formation et de sensibilisation mis en œuvre en 2010 à l’intention des forces de police, des services des douanes et de l’immigration, des juges et des procureurs ont eu une quelconque incidence sur le nombre de cas de traite portés en justice.

31.La situation décrite dans le rapport d’Amnesty International sur l’état d’urgence dans l’État partie est extrêmement préoccupante. Il y est fait état entre autres violations de disparitions forcées et d’exécutions extrajudiciaires, et notamment des cas de Dale Anthony Davis et Andre Smith, arrêtés en mai 2010; le premier n’a pas été revu depuis son arrestation et le second a été retrouvé mort. M. Salvioli demande si une enquête a été ouverte pour faire la lumière sur ces événements et, dans l’affirmative, si des personnes ont été inculpées et condamnées. Il souhaiterait également savoir comment l’État partie envisage de donner suite à la recommandation du Rapporteur spécial sur la question de la torture (A/HRC/16/52/Add.3) l’engageant à mieux protéger les personnes privées de liberté contre la torture et les mauvais traitements, et s’il envisage à cet effet d’incorporer dans son droit interne l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement ou encore les Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus adoptés par les Nations Unies en 1990. Il serait en outre utile de savoir s’il existe dans la législation relative à l’état d’urgence des dispositions qui garantissent le droit de toute personne arrêtée de demander l’examen de la légalité de sa détention par une autorité judiciaire.

32.L’article 11 du Pacte dispose que nul ne peut être emprisonné pour la seule raison qu’il n’est pas en mesure d’exécuter une obligation contractuelle. M. Salvioli voudrait être sûr que l’emprisonnement pour dettes, qui est contraire à cet article, n’est pas autorisé dans l’État partie. Il souhaiterait également savoir s’il existe un organe indépendant et efficace chargé d’examiner la légalité des détentions et, dans l’affirmative, si la délégation pourrait donner des exemples de cas dans lesquels il a été mis fin à une détention arbitraire par suite de l’action de cet organe. Il semble que les autorités judiciaires ne fassent pas toujours preuve de la diligence voulue dans le traitement des plaintes de détenus pour mauvais traitements. Il serait intéressant de connaître le nombre de ces plaintes et de savoir combien ont donné lieu à une enquête, à des poursuites et à des condamnations. En ce qui concerne les établissements psychiatriques, des renseignements concernant les dispositifs en place pour garantir le réexamen périodique de la situation des personnes internées seraient souhaitables.

33.M. Salvioli souhaiterait enfin savoir quelles mesures sont prises par l’État partie pour lutter contre l’homophobie et promouvoir les droits des personnes homosexuelles, bisexuelles et transgenres dans les médias, notamment à la télévision. Il voudrait également savoir dans quelle mesure les Marrons participent à la vie politique et si cette participation est plus importante à l’heure actuelle que par le passé.

34.M. Thelin dit qu’il s’attachera aux questions 23 à 26 et 29 de la liste de points à traiter. Au sujet des conditions carcérales, il demande si l’État partie envisage de faire un plus grand usage des mesures non privatives de liberté telles que la libération conditionnelle ou le bracelet électronique pour contribuer à réduire le taux de surpopulation carcérale, qui est extrêmement élevé. L’absence de séparation systématique entre les mineurs et les adultes dans les lieux de détention expose les mineurs à des risques accrus de violence et de mauvais traitements. Des efforts ont été entrepris pour améliorer cette situation, mais M. Thelin voudrait savoir dans quel délai il devrait être possible de garantir une telle séparation en toutes circonstances. Des statistiques relatives au nombre total de mineurs actuellement en détention seraient utiles pour mesurer les besoins réels en termes de capacité. M. Thelin note avec préoccupation que la loi de 2004 sur la protection de l’enfance permet de placer en détention des mineurs jugés «incontrôlables». Il voudrait des précisions sur les critères et la procédure suivant lesquels le caractère «incontrôlable» du mineur est établi ainsi que sur les garanties prévues par la loi pour empêcher tout abus. À propos de l’incendie qui a causé la mort de sept filles détenues dans l’établissement pénitentiaire pour mineurs d’Armadale (question 25), la délégation pourra peut-être préciser à quel stade en est la procédure, notamment si les policiers mis en cause par l’enquête préliminaire ont été inculpés et dans quel délai il est prévu qu’ils soient jugés. Il faudrait également savoir si les familles des victimes ont été indemnisées et, dans l’affirmative, à hauteur de quel montant, ou si elles ne le seront qu’à l’issue de la procédure pénale. L’État partie indique au paragraphe 137 de ses réponses écrites qu’il a mis en œuvre plus de 60 % des recommandations formulées dans le rapport Keating sur la réforme des foyers et lieux de refuge pour enfants. Il serait intéressant de savoir sur quoi portent les recommandations restantes et si le Gouvernement pense être en mesure de les mettre en œuvre d’ici à la fin 2012 comme le préconise le rapport.

35.Dans sa réponse à la question 26 relative aux retards excessifs dans l’administration de la justice, l’État partie indique notamment que le nombre de juges a augmenté. Il serait utile de savoir combien de juges supplémentaires ont été nommés et quel est actuellement le nombre total de juges en activité par rapport au volume d’affaires en souffrance, au civil comme au pénal. En cas de refus de poursuivre de la part du Directeur des poursuites, la victime peut-elle engager elle-même une action pénale ou intenter une action au civil?

36.En ce qui concerne le système de l’aide juridictionnelle, il faudrait pouvoir comparer le nombre d’avocats inscrits auprès du Conseil de l’assistance judiciaire – 300 d’après le paragraphe 70 d) du rapport de l’État partie – avec le nombre de demandes d’aide juridictionnelle présentées. D’après certaines ONG, il est fréquent que le défendeur ne soit pas assisté par un avocat, y compris dans des affaires relatives à des infractions pénales graves. Enfin, à propos de la diffusion d’une information sur l’examen du troisième rapport périodique de l’État partie, M. Thelin demande dans quelle mesure et par quels moyens les observations finales du Comité seront diffusées auprès des juristes, juges, magistrats et procureurs. Il salue les dispositions que l’État partie a prises pour associer les ONG à l’établissement de son troisième rapport et l’encourage à favoriser davantage cette participation à l’avenir.

37.La Présidente remercie les membres du Comité pour leurs questions et propose de suspendre la séance pour permettre à la délégation jamaïcaine de préparer ses réponses.

La séance est suspendue à 11 h 10; elle est reprise à 11 h 40.

38.M. McCook (Jamaïque) dit que la non-rétroactivité de la loi est un principe clairement établi dans la pratique juridique de la Jamaïque, qui vaut pour les modifications apportées à la Constitution en vertu de la Charte des libertés et des droits fondamentaux comme pour leurs effets. En vertu de ce principe, les décisions de justice rendues avant l’entrée en vigueur de la Charte ne peuvent pas être modifiées en application des dispositions de cette dernière. Les détenus dont la condamnation à mort a été commuée en une peine de réclusion à perpétuité ne restent pas dans le quartier des condamnés à mort; ils exécutent leur peine dans les mêmes conditions que les autres condamnés à la réclusion à perpétuité. Le Directeur des poursuites est souverainement indépendant pour tout ce qui concerne la mise en mouvement de l’action publique et la conduite des poursuites mais ce sont les tribunaux qui décident en dernier ressort de la manière dont la loi doit être appliquée.

39.Il est exact que la Charte des libertés et des droits fondamentaux − qui remplace le chapitre III de la Constitution − ne mentionne pas expressément l’interdiction de la discrimination fondée sur le «sexe» mais consacre le droit de ne pas subir de discrimination fondée sur «le fait d’être un homme ou une femme». M. McCook ne voit pas en quoi cela pose problème, ni pourquoi cette disposition serait susceptible de donner lieu à des interprétations contraires aux engagements internationaux de l’État partie. L’éventualité d’actions en justice intentées par des personnes de sexe indéterminé, évoquée par M. Lallah, est pour le moins surprenante. Quoi qu’il en soit, la Charte n’a été adoptée que récemment, de sorte qu’on ne dispose pas encore de jurisprudence en la matière. Cette question sera examinée plus avant mais l’on peut d’ores et déjà considérer que le libellé de la Charte est suffisamment explicite pour assurer la protection des intéressés.

40.Mme Turner (Jamaïque) dit qu’il n’y a pas, en Jamaïque, de loi sur l’octroi du statut de réfugié et la protection des réfugiés. Toutefois, les autorités ont consenti d’importants efforts pour renforcer le cadre juridique applicable au droit d’asile et adopter une politique nationale en la matière. Ces dernières années, le statut de réfugié a été octroyé à des étrangers arrivés individuellement ou collectivement dans le pays. Les demandeurs d’asile déboutés peuvent faire appel devant un mécanisme spécial. Pour ce qui est des documents d’identité, en tant qu’État membre de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), la Jamaïque délivre des documents de voyage aux étrangers qui ont obtenu le statut de réfugié. Sur ces documents figurent un numéro d’immatriculation, le nom de famille et le lieu de naissance du titulaire, son pays d’origine ainsi qu’une photographie récente de l’intéressé.

41.M. McCook dit que le Document stratégique sur la sécurité à l’école vise à décourager l’utilisation des châtiments corporels mais que ceux-ci demeurent légaux dans la mesure où ce document n’a pas force de loi. Il reste donc à adopter une loi interdisant purement et simplement les châtiments corporels, même si la stratégie susmentionnée représente un important pas en avant dans cette direction.

42.Concernant les données relatives aux indemnisations accordées aux particuliers ayant engagé une action en responsabilité contre l’État pour mauvais traitements infligés par des fonctionnaires de police, la délégation tient à la disposition du Comité un document qui compile l’ensemble des plaintes déposées et la suite qui leur a été donnée. De manière générale, tout fonctionnaire visé par une enquête est suspendu de ses fonctions.

43.Pour ce qui est de la surpopulation carcérale et des conditions de détention, questions que la Jamaïque a déjà eu l’occasion d’aborder avec le Rapporteur spécial sur la question de la torture et dans le cadre de l’Examen périodique universel, il faut savoir que la politique de construction de nouveaux établissements pénitentiaires n’a pas pu être mise en œuvre faute de ressources suffisantes. Bien qu’elles ne soient pas de nature à régler le problème de la capacité d’accueil, des mesures ont été prises pour rénover un certain nombre d’établissements. Le Gouvernement jamaïcain s’emploie par ailleurs à mettre un terme à la pratique consistant à détenir les délinquants mineurs dans les locaux de la police. Le nouveau centre de détention provisoire pour garçons de Metcalfe Street, d’une capacité d’accueil de 208 lits, est désormais opérationnel, ainsi qu’un centre de détention pour filles. La Jamaïque accorde également la plus grande attention aux recommandations relatives à la justice pour mineurs formulées par d’autres organes de l’ONU qui s’occupent des droits de l’homme. Elle a donc pris des mesures pour faire en sorte que les filles ne soient pas détenues dans les mêmes établissements pénitentiaires que les garçons, pour que les mineurs ne soient pas détenus avec des adultes et pour que les prévenus mineurs soient séparés des condamnés. Aucun effort ne sera épargné pour donner suite aux recommandations en question. En ce qui concerne le décès de sept filles dans l’incendie de l’établissement pénitentiaire pour mineurs d’Armadale, le pouvoir exécutif veille à ce que les autorités disposent des moyens nécessaires pour s’acquitter de leur tâche. Il serait mal avisé, comme l’a suggéré un membre du Comité, d’exiger que ces affaires soient traitées dans un délai précis. Pour ce qui est du montant des indemnisations accordées aux familles des victimes, des données seront communiquées ultérieurement au Comité mais on peut d’ores et déjà indiquer qu’une première indemnisation a été versée par l’État, qui a reconnu d’emblée sa responsabilité, indépendamment du résultat des actions pénales engagées qui suivent leur cours. Quant aux recommandations formulées dans le rapport Keating sur la réforme des foyers et lieux de refuge pour enfants, la Jamaïque n’épargne aucun effort pour y donner suite. Il lui sera toutefois difficile d’atteindre les objectifs fixés d’ici à 2012 vu les ressources financières limitées dont elle dispose.

44.Pour résorber l’arriéré de plus de 400 000 affaires à juger, les autorités appliquent un programme de recrutement de nouveaux magistrats. Des mesures, notamment technologiques, ont été prises pour renforcer l’efficacité du traitement des affaires. Une nouvelle chambre a été créée au sein de la Cour suprême pour promouvoir un meilleur accès à la justice. D’importantes mesures ont également été prises pour renforcer la capacité des juges de paix de traiter les affaires relevant de leur compétence. En ce qui concerne l’aide juridictionnelle, le Ministère de la justice, l’Association du barreau et d’autres professionnels de la justice ont engagé des discussions sur les moyens d’accroître le nombre d’avocats dans le pays.

45.Des mesures ont été prises pour intégrer les dispositions du Pacte dans les programmes de formation des fonctionnaires de police et pour promouvoir l’enseignement des droits de l’homme dans les écoles. Les ONG participent activement à la sensibilisation de la population aux droits de l’homme, de même que les médias. À propos de la violence dans la famille, il existe un service d’aide aux victimes qui dispose de bureaux dans l’ensemble des collectivités locales. Des données complémentaires relatives au nombre de personnes prises en charge seront communiquées ultérieurement au Comité. Enfin, les Marrons sont des citoyens à part entière, et aucun obstacle n’entrave leur participation à la vie politique, économique et sociale. S’ils étaient en butte à la discrimination, les autorités prendraient sans délai les mesures nécessaires pour y mettre fin.

46.M. Lallah remercie la délégation jamaïcaine de ses réponses et dit qu’en imposant à l’État l’obligation de promouvoir et de respecter les droits de l’homme, et à l’ensemble des Jamaïcains le devoir de respecter les droits fondamentaux d’autrui − ce qui est plus inhabituel − la Charte des libertés et des droits fondamentaux offre un moyen efficace de donner pleinement effet à l’article 2 du Pacte et d’améliorer la protection de tous les droits en lien avec la dignité de la personne. M. Lallah comprend qu’il est encore trop tôt pour répondre à la question de savoir comment les tribunaux interprètent les dispositions du nouveau chapitre III de la Constitution dans les affaires concernant des personnes de sexe indéterminé. S’il a posé cette question, c’est parce que selon certaines informations, ces personnes seraient victimes de discrimination. Il voulait aussi souligner la nécessité pour les États parties de veiller à ce que les groupes minoritaires ne soient pas considérés par la population comme une cible facile d’insultes et de faire en sorte que leur intégrité soit adéquatement protégée. Il importe en effet, conformément au Pacte, que les États parties recherchent les meilleurs moyens de protéger les minorités sexuelles et d’éviter leur marginalisation. Enfin, les réponses de la délégation aux questions relatives au statut des réfugiés en Jamaïque sont pleinement satisfaisantes.

47.M. Flintermann se réjouit que le Gouvernement jamaïcain continue de faire de la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles une de ses priorités et ajoute que la question relève du champ d’application du Pacte (art. 2, 3, 6, 7 et 26), dans la mesure où ce type de violence peut être considéré comme une forme de discrimination. Relevant le nombre élevé de cas signalés de viols, il s’étonne que seuls la moitié d’entre eux aient été élucidés et voudrait savoir quelles condamnations ont été prononcées à l’encontre des auteurs. Il serait également utile de savoir si les femmes tombées enceintes à la suite d’un viol ont le droit d’avorter. En d’autres termes, existe-t-il en droit jamaïcain une exception au principe de l’interdiction de l’avortement pour raisons autres que médicales? Dans la négative, l’État partie pourrait peut-être engager le débat sur cette question au Parlement. La délégation a indiqué que les personnes pratiquant des avortements clandestins étaient passibles de sanctions pénales. Il serait bon de savoir, le cas échéant, quelles peines ont été prononcées à leur encontre. Le Comité a appris qu’en dépit de l’interdiction de l’avortement, il était possible d’avorter dans des cliniques privées moyennant finance, ce qui est pour le moins préoccupant. Quelles sont les observations de la délégation à ce sujet?

48.M. Thelin voudrait savoir si la Jamaïque envisage de prendre des mesures de substitution à la privation de liberté pour remédier à la surpopulation carcérale. La loi de 2004 sur la protection de l’enfance prévoit la possibilité de placer en détention des mineurs dont on considère qu’ils sont «incontrôlables». Des précisions sur la manière dont les autorités interprètent cette notion seraient bienvenues.

49.À propos de la question 26 de la liste des points à traiter, la délégation n’a pas indiqué si les particuliers sont habilités à engager des actions au pénal ou, à défaut, des actions civiles. Elle n’a pas commenté non plus la remarque de M. Thelin concernant le fait qu’il serait utile de diffuser les observations finales du Comité de façon ciblée à la profession juridique de façon à encourager les juridictions nationales à se référer au Pacte.

50.M.Salvioli  note qu’il n’a pas été répondu à toutes ses questions, notamment celles qui portaient sur le nombre de personnes jugées pour mauvais traitements ou torture, et espère que le Comité recevra des informations écrites à ce sujet. Il souhaite également savoir s’il est exact que, comme il croit l’avoir compris, les décisions rendues par le Directeur des poursuites ne peuvent être contestées que devant cette même autorité. Il demande en outre, quand les familles des victimes des événements survenus à Armadale recevront effectivement réparation et si des poursuites pénales ont été engagées pour actes de violence à l’égard d’homosexuels, notamment contre des agents des forces de l’ordre. Il souhaiterait enfin connaître la définition de la torture en droit jamaïcain.

51.M. Neuman remercie la délégation jamaïcaine pour les réponses complètes qu’elle a données, concernant notamment l’utilité de la Charte des libertés et des droits fondamentaux pour combattre la discrimination fondée sur le sexe dans le secteur privé. Toutefois, la formulation de la Charte à ce sujet étant floue, il serait utile d’élaborer une loi énonçant clairement les obligations des employeurs et les droits des employés dans ce domaine.

52.M. McCook (Jamaïque), après avoir indiqué que les questions et les commentaires des membres du Comité seront transmis au Gouvernement, dit que les interruptions de grossesse sont autorisées si la vie ou la sécurité de la mère sont menacées, mais qu’il n’existe aucune disposition prévoyant l’interruption d’une grossesse résultant d’un viol. En ce qui concerne les mesures de substitution à la privation de liberté, il a déjà évoqué la possibilité d’élargir la palette des mesures existantes et d’utiliser les institutions judiciaires de degré inférieur, notamment celle des juges de paix. Quant à la diffusion d’une information relative au Pacte auprès des membres de la profession juridique, ceux-ci manifestent déjà un fort engagement et s’intéressent à tous les moyens susceptibles de les aider à mieux défendre leurs clients. La délégation prend néanmoins note de la recommandation du Comité à ce sujet.

53.Il n’existe pas de loi portant spécifiquement sur la torture ni de définition de la torture mais diverses lois qualifiant les faits qui constituent des actes de torture. En revanche, la Jamaïque examine actuellement la possibilité d’adhérer à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. La suggestion relative à l’élaboration d’une loi contre la discrimination fondée sur le sexe sera transmise au Gouvernement. La Charte venant d’être adoptée, tous les textes législatifs ou réglementaires qui pourraient en découler devront être étudiés ultérieurement.

54.Le Gouvernement jamaïcain communiquera par écrit des informations supplémentaires concernant les questions auxquelles il n’a pu être répondu dans le cadre du dialogue avec le Comité, et notamment: les données relatives aux condamnations et aux incarcérations; la définition des enfants «incontrôlables» ou, à défaut, la jurisprudence y relative; l’état d’avancement des enquêtes mentionnées; les recours en common law; la possibilité de faire appel de la décision du Directeur des poursuites de ne pas engager d’action en justice; les événements survenus dans l’établissement pénitentiaire d’Armadale; et le nombre de plaintes qui auraient pu être déposées pour homophobie.

55.La Présidente invite le chef de la délégation jamaïcaine à faire une déclaration finale.

56.M. McCook (Jamaïque) dit que la délégation a bénéficié du soutien d’une équipe coordonnée par le Département des organisations multilatérales du Ministère des affaires étrangères et le Département international relevant du Bureau du Procureur général, ce qui lui a permis de répondre aux questions du Comité, parfois en temps réel, en consultation avec d’autres organismes tels que le Bureau des affaires féminines. Certaines de ces réponses étaient trop détaillées pour pouvoir être présentées oralement au Comité, c’est pourquoi elles lui seront fournies par écrit.

57.La délégation jamaïcaine a été surprise par les remarques de certains membres du Comité semblant insinuer que la composition de la délégation dénotait un manque d’engagement en faveur des droits de l’homme de la part du Gouvernement jamaïcain. C’est la troisième fois en 2011, après l’Examen périodique universel et le rapport du Rapporteur spécial sur la question de la torture, que la Mission permanente de la Jamaïque se présente devant des organes de protection des droits de l’homme, et jamais auparavant il n’a été insinué que l’absence d’experts spécialement venus du pays démontrait un manque d’engagement. La Jamaïque, petit pays en développement soumis à différentes contraintes imposées par l’accord conclu avec le Fonds monétaire international, qui l’oblige à des coupes budgétaires, notamment pour ce qui est des voyages à l’étranger, a choisi de mettre pleinement à profit ses représentations dans les pays, en particulier lorsqu’elles sont spécialement accréditées comme cela est le cas à Genève. M. McCook est le Représentant permanent de la Jamaïque auprès de toutes les institutions spécialisées des Nations Unies à Genève, y compris celles des droits de l’homme. Il est entouré d’une équipe zélée qui entretient une collaboration constructive avec les institutions jamaïcaines concernées. Le Comité souhaite recevoir des réponses du Gouvernement jamaïcain, et la délégation est habilitée à les donner au nom de celui-ci.

58.Compte tenu de la vaste portée du rapport présenté, les réponses ont émané de différentes institutions. Lors de l’élaboration du rapport, la délégation a bénéficié de l’aide d’un avocat principal du Bureau du Procureur général, du Ministère des affaires étrangères et d’autres institutions. Idéalement, des représentants de tous ces organismes auraient dû être présents, mais cela n’a pas été possible en raison de contraintes budgétaires. La meilleure solution était donc de créer une équipe à Kingston pour contribuer à l’élaboration du rapport et des réponses requises. La délégation a essayé de mettre en place une liaison vidéo pour faciliter les consultations en temps réel avec des experts à Kingston, sans succès. Elle a donc mis sur pied d’autres moyens pour communiquer avec ces personnes, grâce à quoi elle a pu obtenir des informations ciblées qui ont permis de compléter les réponses élaborées par la délégation conformément aux instructions reçues de la capitale. Il semblerait que toutes les institutions intergouvernementales demandent que des économies soient faites et que les ressources existantes soient exploitées le plus efficacement possible, par exemple en généralisant l’utilisation des technologies de l’information et de la communication pour les réunions et les consultations. M. McCook ne doute pas que le Comité prenne acte du fait que le Gouvernement jamaïcain est représenté par une délégation dûment accréditée, qui a mis en place les meilleurs moyens possibles pour communiquer avec la capitale et dialoguer avec le Comité.

59.La Présidente remercie M.McCook pour sa déclaration finale, le Gouvernement jamaïcain pour la présentation de son troisième rapport périodique et ses réponses à la liste de points à traiter, ainsi que la délégation pour sa présence et les réponses claires et informatives qu’elle a apportées oralement. Le Comité estime toutefois que la présence de représentants de la capitale est souhaitable pour que, conformément à l’article 68 de son règlement intérieur, il puisse s’acquitter de son mandat tel que défini à l’article 20 du Pacte et que l’État partie puisse tirer pleinement profit du dialogue avec le Comité.

60.Le Comité espère que le débat qui vient d’avoir lieu contribuera à améliorer la vie des citoyens jamaïcains et la situation des droits de l’homme dans l’État partie. Il a pris note des faits nouveaux positifs survenus dans le pays, notamment l’adoption récente de la Charte des libertés et des droits fondamentaux qui contient toutefois des dispositions incompatibles avec le Pacte. La création d’Indecom constitue également une évolution positive pour lutter contre l’usage excessif de la force par les forces de sécurité, mais cet organe devrait être doté de pouvoirs plus étendus pour pouvoir s’acquitter efficacement de son mandat.

61.De nombreuses préoccupations ont également été soulevées. Il semblerait que la discrimination, qu’elle soit fondée sur la situation sociale ou économique, l’orientation sexuelle, le handicap ou l’infection au VIH/sida, soit à l’origine de nombreuses violations des droits de l’homme en Jamaïque. Il faudrait prendre des mesures non seulement politiques, mais également concrètes. Les exécutions extrajudiciaires et l’absence d’enquêtes sur les homicides imputés aux forces de l’ordre, qui contribuent à renforcer une culture de l’impunité dans le pays, sont également des sujets d’inquiétude, tout comme les droits de l’enfant, en particulier dans les lieux de détention. Enfin, le Comité a pris note du fait que la Jamaïque n’a pas l’intention de ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte. Le Comité demande au Gouvernement jamaïcain de revoir sa position à ce sujet et de faire appliquer le moratoire sur la peine de mort.

La délégation jamaïcaine se retire.

La séance est levée à 12 h 50.