Nations Unies

CERD/C/SR.1979

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

25 octobre 2010

Français

Original: anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Soixante-seizième session

Compte rendu analytique de la 1979 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 18 février 2010, à 15 heures

Président: M. Kemal

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Huitième à treizième rapports périodiques du Cambodge

La séance est ouverte à 15 h 10.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Huitième à treizième rapports périodiques du Cambodge (CERD/C/KHM/8-13; CERD/C/ KHM/Q/8-13 et Add.1; HRI/CORE/1/Add.94)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation cambodgienne reprend place à la table du Comité.

2.M. Sun Suon(Cambodge) dit que les huitième à treizième rapports périodiques du Cambodge (CERD/C/KHM/8-13) témoignent de la constance avec laquelle le pays s’emploie à mettre en œuvre des programmes de réforme dans tous les domaines en vue, notamment, de promouvoir la paix sociale et le respect de la diversité. Les suggestions, observations et recommandations constructives formulées par le Comité aideront le pays à évaluer les résultats qu’il a obtenus et les points faibles qu’il doit surmonter dans la lutte contre toutes les formes de discrimination raciale.

3.Le Cambodge a un passé glorieux et sa culture est riche, mais au cours des dernières décennies le pays a été en proie à une guerre civile et à des conflits, et la population lutte désormais pour survivre. Les structures sociales et culturelles, notamment les services éducatifs, sanitaires et sociaux, ont été détruits. Le régime khmer rouge a infligé des souffrances inouïes à la population et a privé le pays d’un capital humain, notamment celui des groupes minoritaires. Le Cambodge a pris des mesures importantes pour se relever de cette situation en engageant des processus de consolidation de la paix, de réconciliation nationale, de reconstruction et de développement, en particulier à la fin des années 90. Toute évaluation de la situation des droits de l’homme dans le pays doit tenir compte de ces circonstances.

4.Bien que la population cambodgienne soit relativement homogène, il existe plusieurs minorités ethniques. La société est naturellement ouverte et tolérante et encline à respecter la diversité culturelle. Avec le rétablissement de la paix et de la stabilité, le Gouvernement s’est employé à promouvoir le développement politique, économique, social et culturel dans tous les domaines, notamment celui des droits de l’homme, tout en accordant une grande importance à l’unité nationale et à la paix sociale. Des progrès considérables ont été accomplis dans de nombreux domaines au cours du processus de démocratisation. En outre, des taux élevés de croissance économique ont été enregistrés durant les cinq années précédant la crise financière mondiale.

5.Le Cambodge reconnaît l’universalité, l’interdépendance, l’indissociabilité et l’indivisibilité des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il respecte les droits des minorités et des groupes autochtones, tout en préservant son héritage historique. Le principe de la tolérance, qui est une valeur politique et constitutionnelle consacrée, est scrupuleusement observé dans la pratique.

6.L’article 31 de la Constitution dispose que les citoyens sont égaux devant la loi, jouissent des mêmes droits et des mêmes libertés et ont les mêmes devoirs sans distinction fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, les croyances religieuses, l’opinion politique, l’origine nationale, la condition sociale, la richesse ou autre statut. Il garantit donc l’égalité devant la loi et l’égalité des chances, tout en prévoyant des mesures en faveur des groupes défavorisés. Le Gouvernement a placé au rang de ses priorités la promulgation d’une législation destinée à protéger et à renforcer le droit de tous à la dignité humaine et à réduire les inégalités sociales, économiques et politiques.

7.Au niveau international, le Cambodge a soutenu les actions contre les pratiques racistes et l’intolérance raciale menées conformément aux instruments des Nations Unies, notamment la Déclaration et le Programme d’action de Durban, ainsi que le document final de la Conférence d’examen de Durban. Il a participé à la lutte mondiale contre l’apartheid en Afrique du Sud et d’autres formes de racisme à travers le monde. Il a également adhéré aux principaux instruments relatifs aux droits de l’homme et au droit humanitaire et a participé activement aux conférences et aux réunions internationales visant à promouvoir la paix, la diversité, la tolérance et l’harmonie sociale. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a établi un bureau au Cambodge, et le Gouvernement a pleinement coopéré avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour les droits de l’homme au Cambodge.

8.Dans le cadre de son programme de réforme, le Gouvernement continue de mettre l’accent sur l’intégration sociale, l’égalité entre hommes et femmes, le système de protection sociale et la réforme de la politique démographique. Il a interdit les actes d’encouragement ou d’incitation à la discrimination raciale. La société civile participe activement au processus de développement, notamment à la promotion de l’harmonie nationale et au respect des intérêts ethniques et religieux.

9.Ces dix dernières années, le Cambodge s’est employé avec un certain succès à mettre son système législatif en conformité avec les normes internationales dans les domaines des droits politiques, civils, économiques, sociaux et culturels. Les articles 494 à 496 du Code pénal portent sur la prévention de la discrimination raciale. Le Gouvernement a notamment pris des mesures pour assurer le respect des identités nationales et culturelles, le droit d’être protégé contre le génocide, le droit aux ressources naturelles et le droit de ne pas être soumis à une quelconque forme de distinction, d’exclusion ou de discrimination raciale.

10.Le Cambodge a créé un Comité national des droits de l’homme relevant du Gouvernement, qui coopère avec les organismes nationaux et internationaux et d’autres acteurs en vue de régler les problèmes relatifs aux droits de l’homme. En outre, une Commission des droits de l’homme a été établie au Parlement et le Gouvernement a mis en place plusieurs cadres institutionnels et juridiques afin de traiter toutes les questions relatives aux communautés minoritaires et autochtones.

11.Le Gouvernement cherche à promouvoir un esprit de tolérance et de respect mutuel entre les différentes communautés du pays en mettant en œuvre des programmes éducatifs et en favorisant un dialogue propice à la réconciliation, une attention particulière étant portée au développement économique, éducatif et social, notamment des groupes vulnérables et défavorisés. La réduction de la pauvreté, en particulier dans les zones rurales et reculées, était au cœur de la Stratégie rectangulaire et du Plan national de développement stratégique pour la période 1996-2010. La Stratégie rectangulaire s’est révélée très efficace de 2003 à 2008. La pauvreté a été réduite de plus de 1 % par année, et les principaux indicateurs sociaux se sont améliorés, notamment l’éducation, la santé et l’égalité entre hommes et femmes. Un plan cambodgien relatif aux objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) a également été élaboré.

12.Le Gouvernement attache une grande importance à la réforme foncière en vue d’un développement socioéconomique durable. Il s’efforce en particulier de renforcer le système de gestion, de répartition et d’utilisation des terres, et de traiter les questions telles que la propriété terrienne, la sécurité des titres de propriété, la lutte contre l’invasion illégale des terres, et la prévention de la concentration de terres inutilisées et improductives. Des cadres institutionnels et juridiques sont en train d’être établis afin de régler les problèmes actuels et futurs posés par la réforme foncière, concernant notamment les droits et les intérêts des communautés ethniques et minoritaires.

13.Parmi les résultats obtenus depuis 2002, on peut citer la mise en œuvre d’une politique relative au développement, à l’enregistrement et aux droits d’utilisation des terres des communautés autochtones, et l’adoption de sous-décrets sur l’enregistrement des terres appartenant aux communautés autochtones, la protection des propriétés foncières des communautés autochtones, la planification communale de l’utilisation des terres et la gestion des terres domaniales. Des circulaires ont été publiées sur l’occupation illégale de terres domaniales et sur la mise en œuvre de la politique relative à l’identité des peuples autochtones. Des dispositions sont également prises pour établir des procédures de délimitation des terres dans les villages reculés. Les organismes nationaux, les ministères et autres acteurs concernés, parmi lesquels des représentants de communautés autochtones ayant une fonction politique, ont participé à l’élaboration des politiques et du cadre législatif.

14.Le droit à l’éducation est protégé par la Constitution. Le Gouvernement a publié un Plan stratégique pour l’éducation pour la période 2006-2010 dans le cadre de la Stratégie rectangulaire et du Plan national de développement stratégique pour la période 2006-2010. Ce plan vise à faire en sorte que tous les Cambodgiens, enfants et adultes, y compris les membres des groupes défavorisés ou autochtones, aient accès à l’éducation de base, scolaire et extrascolaire, sans discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l’opinion politique, l’origine ou la condition sociale. Il prévoit également des mesures de lutte contre la violence, la consommation de drogues, la traite des enfants et des femmes, et toutes les formes de discrimination dans la société. En outre, il comprend des éléments relatifs à l’éducation interculturelle. Le budget alloué à l’éducation a augmenté régulièrement ces dernières années. Le Gouvernement a lancé un programme éducatif en faveur des enfants issus des familles démunies, afin de rendre l’accès à l’éducation de base plus équitable en éliminant les obstacles à la scolarisation universelle dans le primaire et à l’achèvement de ce cycle. Il a notamment été décidé, en 2001, de supprimer les frais de scolarité pour les enfants des minorités ethniques et défavorisées et, à partir de 2002, de leur attribuer des bourses d’étude dans le premier degré de l’enseignement secondaire. Un programme d’alphabétisation est mis en œuvre dans tout le pays, et les adultes analphabètes vivant dans les communautés autochtones bénéficient d’un programme d’éducation bilingue en langue khmer et dans leur langue maternelle. Des stratégies telles que l’enseignement bilingue, l’attribution de bourses d’étude et la formation d’enseignants dans les régions comptant des minorités ethniques sont mises en œuvre afin de garantir aux groupes ethniques minoritaires un accès équitable à l’éducation.

15.Des efforts sont faits pour réduire la discrimination fondée sur le sexe, avec le soutien de l’UNESCO, de l’UNICEF et d’autres partenaires du développement. En effet, les statistiques montrent que les filles et les femmes sont nettement désavantagées dans le système scolaire et que les taux d’analphabétisme sont plus élevés chez les femmes que chez les hommes. Ces dix dernières années, le Ministère de l’éducation est parvenu à assurer la parité des sexes dans l’enseignement primaire. Il faudra probablement une décennie de plus pour parvenir au même résultat dans l’enseignement secondaire.

16.Grâce à la politique de santé mise en place par le Gouvernement, le taux de mortalité infantile a chuté de 95 pour 1 000 naissances vivantes en 2000 à 66 en 2005. Dans les zones rurales, les services de soins de santé, l’assainissement et l’approvisionnement en eau potable n’atteignent pas les niveaux fixés dans le cadre des OMD. La prévalence du VIH/sida est passée de 1,9 % en 2005 à 0,9 % et elle devrait encore baisser à moins de 0,6 % au cours de l’année 2010. Le Ministère de la santé a privilégié le déploiement de personnel afin que des services de santé soient disponibles dans les régions reculées, notamment pour les groupes minoritaires. Des sages-femmes ont été recrutées dans tous les nouveaux centres de santé, dont beaucoup ont été construits dans des communautés autochtones. L’objectif final est de fournir des services de soins de santé de qualité à l’ensemble de la population sans aucune forme de discrimination. Un nouveau plan dans le secteur de la santé a été adopté pour la période 2008-2015, et les crédits alloués à ce secteur sont restés stables ou ont augmenté. Quelque 130 organisations non gouvernementales (ONG) soutiennent les activités de soins de santé, en particulier dans les régions reculées, y compris celles habitées par des communautés autochtones.

17.Le Gouvernement attache de l’importance au respect de la diversité culturelle. La Constitution réaffirme que l’État reconnaît et promeut les droits des communautés culturelles autochtones dans le cadre de l’unité et du développement de la nation. En 1993, le Gouvernement a établi un comité interministériel chargé de collaborer avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour élaborer un projet sur le développement des peuples autochtones. Ce comité est présidé par le Ministère du développement rural, qui est chargé de la mise en œuvre. Un Département du développement des minorités ethniques a été créé au sein du Ministère afin d’améliorer les conditions de vie des peuples autochtones et de préserver leur culture, leurs coutumes, leurs traditions et leurs croyances, et le Conseil des ministres a adopté une politique nationale sur le développement des peuple autochtones en avril 2009. Dans le même contexte, un Conseil national sur les questions ethniques et démographiques a été établi pour assurer les consultations et la coordination entre les organismes gouvernementaux et les ONG pour ce qui est de la mise en œuvre des politiques concernant les programmes et les intérêts ethniques.

18.En ce qui concerne les droits des migrants, une loi sur l’immigration et ses textes d’application ont été mis en œuvre pendant la période qui a suivi le conflit. Des mesures ont été progressivement adoptées afin d’améliorer les procédures existantes et de protéger les groupes vulnérables, y compris les victimes de la traite. Depuis 2001, le Cambodge coopère étroitement avec le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) et d’autres organisations internationales et partenaires concernés afin de mettre en œuvre la Convention relative au statut des réfugiés.

19.La Constitution garantit le droit des hommes et des femmes cambodgiens à l’emploi en fonction de leurs compétences et des besoins de la société. Des programmes de formation technique et professionnelle ont été élaborés à l’intention des groupes les plus vulnérables et des personnes de toutes les races, et ils ont été promus afin de répondre aux besoins du marché de l’emploi. Des lignes directrices ont été publiées pour protéger les résidents étrangers qui travaillent ou investissent au Cambodge, conformément aux lois et aux règlements en vigueur.

20.Le Gouvernement promeut également le droit des personnes handicapées à l’intégration sociétale.

21.Le système politique cambodgien est fondé sur une démocratie multipartite et sur le pluralisme. La Constitution de 1993 garantit la liberté d’expression, la liberté de circulation, la liberté d’association et de réunion, la liberté de religion et de croyance, et le droit à la propriété et à la sécurité. Toutes les personnes, indépendamment de leur race et de leur statut social, jouissent de la liberté d’association en vertu de l’article 42 de la Constitution, et les membres des nombreux différents groupes religieux du pays jouissent de la liberté de culte, indépendamment de leur couleur, de leur condition sociale ou de leur race. Les religions minoritaires ne sont soumises à aucune restriction majeure.

22.Ces dix dernières années, le Cambodge a fait des progrès dans l’organisation d’élections libres et équitables aux niveaux national et local, en assurant des conditions de paix et de sécurité lors des élections. La démocratie a été consolidée au niveau local par la mise en œuvre d’un programme de décentralisation.

23.La peine de mort a été abolie par la Constitution de 1993.

24.En résumé, le Cambodge a fait preuve de courage et de persévérance face à un grand nombre de problèmes. Il est reconnaissant de la coopération et de l’assistance que ses partenaires de développement lui ont offertes à cette occasion. Il reste résolument engagé dans l’action mondiale menée pour combattre toutes les formes et manifestations de racisme, qui constituent la cause profonde des conflits armés et de l’injustice sociale, économique, politique et culturelle dans de nombreuses parties du monde.

25.M. Prosper (Rapporteur pour le Cambodge) dit que le Cambodge a connu ces dernières années une croissance et des changements extrêmement positifs, notamment dans la société civile, comme le montre le grand nombre d’ONG nationales qui ont été fondées. Le Comité prend la mesure des problèmes qu’a dû résoudre le Cambodge et salue l’instauration de la démocratie, de la séparation des pouvoirs et de l’état de droit. Bien qu’il existe une législation complète qui devrait protéger largement les Cambodgiens, le Comité souhaite avoir des éclaircissements sur la mise en œuvre effective de cette législation. M. Prosper s’inquiète de ce que la législation cambodgienne ne contienne pas de définition de la discrimination raciale et, relevant que les victimes de discrimination raciale ont le droit de demander réparation en vertu des lois applicables, souhaite savoir dans quelle mesure cette procédure est efficace dans la pratique.

26.Passant à la question de l’indépendance de la justice, M. Prosper dit que le Comité a appris que le système judiciaire cambodgien pouvait être politisé et corrompu. Récemment, la responsabilité de décider des demandes de statut de réfugié a été transférée du HCR au Gouvernement cambodgien.

27.M. Prosper demande combien de groupes autochtones sont reconnus au Cambodge. Bien qu’il existe des textes solides qui protègent les droits fonciers des autochtones, le pays se développe particulièrement vite et des concessions ont été accordées à des entreprises multinationales. Les processus de consultation prévus par la loi pour la vente de terres ne sont pas respectés. Les autochtones doivent entreprendre des démarches administratives longues et pénibles pour se voir accorder des droits fonciers − ils doivent notamment recevoir une reconnaissance officielle de la part du Ministère de l’intérieur. Compte tenu de la lenteur des procédures, M. Prosper craint que des concessions soient accordées alors que celles-ci sont toujours en cours. Le Comité a appris que certains autochtones ont été empêchés d’exploiter leurs terres, expulsés, harcelés et intimidés par les autorités locales, et contraints d’accepter les concessions proposées. M. Prosper souhaiterait avoir un complément d’information sur les mesures prises pour protéger de manière appropriée les droits fonciers des peuples autochtones.

28.En ce qui concerne la nationalité des Khmers kroms, ceux-ci, bien qu’ils aient toujours été considérés comme des Cambodgiens, se sont retrouvés en territoire vietnamien, après que les frontières avec le Viet Nam ont été redessinées. Quand ils ont essayé de retourner au Cambodge, ils ont été reconnus en tant qu’ethnie cambodgienne mais ont eu des problèmes lorsqu’ils ont demandé la nationalité cambodgienne: ils devaient avoir une adresse permanente au Cambodge et un certificat de naissance cambodgien, ce qui était particulièrement difficile lorsqu’ils étaient nés au Viet Nam. M. Prosper demande s’il ne faudrait pas modifier la politique et la loi en la matière, afin de supprimer les incohérences entre les principes et la pratique. Peut-être faudrait-il également établir un accord bilatéral avec le Viet Nam sur cette question.

29.M. Prosper appelle l’attention sur les cas dans lesquels le sentiment antithaï a été exploité par des politiques pour mobiliser des soutiens, ce qui a parfois conduit à des violences. Il demande quelles mesures ont été prises pour empêcher ce genre d’activité, car les discours politiques ne doivent pas devenir un moyen d’attiser la violence.

30.M. Avtonomov dit que, alors que le Cambodge a fait face à de nombreux problèmes et qu’il connaît actuellement un développement particulièrement rapide, il a ratifié la plupart des principaux instruments relatifs aux droits de l’homme, ce qui témoigne de la volonté du Gouvernement de promouvoir et de protéger les droits de l’homme. Étant donné la grande diversité ethnique au Cambodge et le grand nombre de peuples autochtones, il demande si le Gouvernement envisage d’adhérer à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Il aimerait savoir si la question de la citoyenneté des peuples autochtones a été réglée ou si des difficultés persistent. Il voudrait connaître les garanties mises en place pour protéger les droits fonciers des peuples autochtones, et savoir si ceux qui perdent leurs terres sont indemnisés. Il demande quelles mesures sont prises pour veiller à ce que la législation soit effectivement appliquée et ce que le pays pourrait faire de plus pour améliorer la situation des peuples autochtones. Il souhaite également savoir si le seul moyen pour des étrangers d’obtenir la nationalité cambodgienne est d’épouser des Cambodgiens, ou si les enfants de parents étrangers qui sont nés au Cambodge peuvent obtenir la nationalité en vertu du droit du sol.

31.M. Huang Yong’an fait observer que même si le Cambodge a déployé beaucoup d’efforts pour promouvoir les droits de l’homme, il lui reste beaucoup à faire dans ce domaine. Les questions les plus pressantes sont l’égalité des droits pour les Khmers kroms et les tribus vivant sur les collines en ce qui concerne la distribution des terres, l’éducation et l’égalité des chances dans le domaine de l’emploi.

32.M. Huang Yong’an espère que le Cambodge réglera pacifiquement son différend frontalier avec la Thaïlande et que les relations entre les deux pays s’amélioreront. Cette question n’est pas uniquement politique mais concerne aussi les droits de l’homme, et les personnes touchées par le conflit appartiennent pour la plupart à des minorités ethniques.

33.M. Cali Tzay note avec satisfaction que le Cambodge a voté en faveur de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones à l’Assemblée générale tenue en septembre 2007. Bien que le pays ait fait de gros efforts sur le plan législatif pour défendre les droits fonciers des peuples autochtones, les lois doivent être mises en œuvre et les communautés autochtones doivent participer pleinement au processus d’enregistrement des terres. Certaines terres ont été données en concession à des entreprises multinationales. M. Cali Tzay souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement sur la vente ou la concession de terres autochtones et savoir s’il compte prendre des mesures pour protéger les terres autochtones en attendant que la législation foncière soit appliquée dans tout le pays.

34.M. Cali Tzay demande pourquoi le Cambodge a expulsé le moine khmer krom Tim Sakhorn vers le Viet Nam en 2007, alors que le Gouvernement avait affirmé que tous les Khmers kroms étaient citoyens cambodgiens. Il aimerait savoir si le Cambodge envisage de ratifier la Convention no 169 de l’OIT concernant les peuples autochtones et tribaux dans les pays indépendants. Il souhaiterait également avoir des informations sur la politique de l’État partie concernant la reconnaissance des langues minoritaires et sur le type d’enseignement offert aux peuples autochtones.

35.M. Thornberry souhaiterait avoir des éclaircissements sur le système cambodgien de droits fonciers. Il aimerait en particulier savoir si les communautés autochtones peuvent posséder des ressources naturelles ou si elles ont uniquement le droit de les exploiter.

36.Il note que le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, dans ses observations finales les plus récentes (E/C.12/KHM/CO/1), s’est dit préoccupé par la destruction de la forêt Prey Long dans le nord du pays, qui a entraîné le déplacement de personnes sans qu’aucune mesure de compensation équitable ou de réinstallation ne soit prise. Il demande quelle a été la suite donnée à cette affaire.

37.Faisant observer que dans certains cas, les «sous-décrets» ne semblent pas conformes aux lois votées par le Parlement, il demande quelle est la relation entre ces deux législations, et qui est chargé d’assurer la cohérence législative. En ce qui concerne le droit foncier, la législation cambodgienne prévoit des «titres collectifs» pour les peuples autochtones: ces titres équivalent-ils à des titres de propriété et, dans l’affirmative, sur quoi portent-ils? M. Thornberry souhaite en outre savoir si des titres de propriété ont déjà été attribués.

38.Il souhaiterait également savoir si, comme l’affirment certaines ONG, les peuples autochtones sont considérés comme des éléments transitoires du paysage culturel cambodgien. Il note avec satisfaction qu’en 2007, le Conseil constitutionnel a décidé que les juges devraient interpréter la législation et rendre leurs décisions en tenant compte des obligations qui incombent au Cambodge en vertu des instruments des Nations Unies, relatifs aux droits de l’homme. Il aimerait savoir comment les frontières des territoires autochtones sont délimitées et qui participe à ces délimitations.

39.Relevant que, conformément à la loi de 2001 sur la gestion des ressources minières, le propriétaire de terres données en vue d’une exploitation minière doit recevoir une compensation. Il craint que cette disposition ne soit discriminatoire pour les autochtones qui n’ont pas encore reçu de titre de propriété pour leurs terres.

40.En ce qui concerne la réponse du pays (CERD/C/KHM/Q/8-13/Add.1) à la question de savoir s’il envisage de faire la déclaration visée à l’article 14 de la Convention, M. Thornberry explique que la déclaration ne dit rien de la compétence des organes locaux à traiter les questions de discrimination raciale. Il s’agit simplement d’une réaffirmation, et non d’un affaiblissement, de la souveraineté de l’État partie.

41.M. Thornberry demande si la législation cambodgienne interdit la diffusion d’idées fondées sur la supériorité d’une race ou la haine raciale. Il voudrait aussi connaître la position du Cambodge sur les organisations racistes, et savoir si elles sont illégales.

42.Il souhaiterait obtenir des statistiques récentes sur la composition ethnique de la population, notamment des estimations de l’ampleur de l’immigration ces dernières années, en particulier en provenance du Viet Nam.

43.M. de Gouttes espère que le processus de reconstruction et de rétablissement de l’état de droit au Cambodge sera achevé. Il souhaiterait que la délégation réponde aux allégations d’ONG faisant état d’attaques violentes contre des communautés autochtones. Il ne suffit pas de créer des institutions pour protéger les personnes contre la discrimination raciale; encore faut-il que la législation soit mise en œuvre. Il est essentiel de lutter contre la corruption dans le système judiciaire si l’on veut que les lois sur la non-discrimination soient effectivement appliquées. Les normes internationales doivent être respectées afin de protéger les droits des minorités ethniques, des réfugiés et des migrants.

44.Le Cambodge doit améliorer ses services d’aide sanitaire et sociale et renforcer l’aide qu'il apporte aux personnes handicapées, notamment les victimes de mines terrestres. M. de Gouttes aimerait savoir où en sont les procédures judiciaires qui ont été engagées pour juger les responsables de crimes contre l’humanité lors de la période khmère rouge.

45.Il note que, d’après une définition tirée d’un dictionnaire khmer et citée dans le rapport, le terme discrimination signifie «accepter ou demander quelque chose pour satisfaire les souhaits d’une personne». Cette définition lui semblant erronée, il souhaiterait avoir des éclaircissements.

46.M. Lahiri relève que si le Cambodge a fait de grands progrès en promulguant des lois pour protéger les droits de l’homme, il doit encore renforcer l’indépendance de la justice. Le rapport ne contient pas suffisamment de statistiques détaillées sur la population au regard du caractère multiethnique du Cambodge. M. Lahiri souhaiterait avoir une version plus claire du tableau fourni en annexe, car celui-ci n’est pas lisible.

47.Il souhaiterait également avoir des éclaircissements sur le processus permettant aux Khmers kroms d’obtenir des cartes nationales d’identité. Comme les estimations du nombre de Vietnamiens, de Khmers kroms et d’autres minorités au Cambodge semblent varier considérablement, il demande à la délégation d’éclaircir également ce point. Il aimerait aussi savoir si le Cambodge envisage d’établir une institution nationale des droits de l’homme.

48.M. Saidou souhaiterait avoir des informations supplémentaires sur les rôles respectifs de la Commission de l’Assemblée nationale pour les droits de l’homme et du Comité cambodgien des droits de l’homme. Il serait également intéressant d’avoir plus d’informations sur le rôle et la composition du Comité cambodgien des droits de l’homme. M. Saidou demande également si la notion de bannissement existe dans le droit pénal de l’État partie et quelle est la procédure suivie en cas d’expropriation.

49.M. Lindgren Alves dit qu’il semble y avoir une erreur dans le paragraphe 42 du rapport, qui contient une définition du terme «discrimination». Il aimerait savoir quand l’État partie a prévu de réviser sa législation nationale pour interdire et réprimer la discrimination raciale, de façon à rendre le droit cambodgien conforme aux dispositions de la Convention. Il serait utile de savoir si les personnes qui pratiquent une autre religion que le bouddhisme ou qui ne pratiquent aucune religion peuvent être employées dans le secteur public.

50.M. Peter demande comment le Gouvernement compte sortir du dilemme posé par la nécessité de protéger les droits fonciers des communautés autochtones tout en encourageant l’investissement multinational en accordant des concessions foncières. Selon certaines informations, l’État partie ne respecte pas les conditions établies pour accorder des concessions, à savoir évaluer les incidences sociales et l’impact environnemental, éviter que les propriétaires légitimes soient contraints de se réinstaller contre leur gré et restreindre l’accès aux propriétés privées. D’après les rapports établis par les Représentants spéciaux du Secrétaire général pour les droits de l’homme au Cambodge qui se sont succédé, les peuples autochtones ont en fait été chassés de leurs terres, et dans certains cas leurs maisons ont été brûlées. Un complément d’information sur le sort de ces personnes serait bienvenu.

51.M. Ewomsan souhaiterait avoir des informations supplémentaires sur la situation des personnes d’origine africaine vivant dans l’État partie.

52.M. Diaconu dit que le rapport de l’État partie montre clairement que le Gouvernement a besoin de renouer le dialogue avec le Comité. La définition du terme «discrimination» donnée au paragraphe 42 est, contrairement à ce qui est affirmé dans le paragraphe, très éloignée de ce qui figure dans la Convention. La définition de la discrimination raciale citée au paragraphe 70, si elle est plus proche de celle énoncée par la Convention, ne fait cependant aucune référence à l’égalité des droits. La délégation devrait s’assurer que le Gouvernement comprend bien qu’il est indispensable de modifier ces définitions pour les rendre conformes à celle énoncée à l’article premier de la Convention.

53.M. Diaconu souhaite que la délégation fasse des observations sur les informations que le Comité a reçues, selon lesquelles les procédures à suivre pour obtenir des titres de propriété foncière sont si complexes et longues que de nombreuses communautés autochtones ont peu de chances d’aboutir dans leurs démarches. En outre, le Gouvernement n’aurait pas veillé à ce que des évaluations des incidences sociales et de l’impact environnemental soient réalisées, ni à ce que la population locale soit consultée, avant que des concessions foncières soient accordées à des investisseurs, ce qui viole les droits des communautés autochtones occupant les terres en question.

54.Le prochain rapport périodique devra contenir des informations sur l’exercice, par les groupes ethniques de l’État partie, des droits consacrés à l’article 5 de la Convention.

55.M me Dah félicite la délégation d’avoir renoué le dialogue entre l’État partie et le Comité et l’engage vivement à veiller à ce qu’il se maintienne à l’avenir. Elle recommande au Gouvernement de prendre note des rapports des ONG et d’encourager leur travail.

La séance est levée à 17 h 50.