NATIONS

UNIES

CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/SR.167428 février 2005

Original: FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑sixième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1674e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mardi 22 février 2005, à 10 heures

Président: M. YUTZIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Sixième à quinzième rapports périodiques de la République démocratique populaire lao (suite)

La séance est ouverte à 10 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT A L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Sixième à quinzième rapports périodiques de la République démocratique populaire lao (CERD/C/451/Add.1) (suite)

Sur l’invitation du Président, la délégation de la République démocratique populaire lao reprend place à la table du Comité.

2.M. KIETTISACK (République démocratique populaire lao) se félicite du dialogue fructueux qui s’est engagé à la précédente séance avec les membres du Comité. Ceux-ci ont effectué une analyse complète et approfondie de l’état d’application de la Convention dans le pays, mais certains points spécifiques méritent d’être éclaircis.

3.Tout d’abord, le bouddhisme n’est pas la religion officielle du pays, même si le débat autour de cette question resurgit régulièrement depuis l’adoption de la Constitution, en 1991. En l’espèce, les autorités lao jugent préférable de respecter la liberté de conscience et de religion de chacun.

4.S’agissant de la prostitution infantile, le représentant du Laos reconnaît que ce phénomène existe dans le pays et qu’il progresse. Le Gouvernement lao a décidé de lutter énergiquement contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, et une loi sur la protection des femmes, adoptée fin 2004, criminalise la traite de celles-ci. À la fin de 2004, la République démocratique populaire lao, qui coopère également avec les pays voisins dans la lutte contre ce fléau, a signé à Rangoon (Myanmar) un mémorandum d’accord sur la lutte contre la traite des êtres humains dans le bassin du Mékong.

5.Les pratiques dites «arriérées», telles que le meurtre des enfants jumeaux, suivies par certains groupes ethniques, en particulier ceux qui vivent dans le nord du pays, découlent bien souvent de croyances millénaires qu’il est difficile de modifier. Le Gouvernement a donc entrepris à la fois d’éduquer et d’informer ces populations tout en venant en aide aux femmes enceintes de jumeaux pour leur permettre de mettre leurs enfants au monde et d’échapper au châtiment de l’ethnie.

6.M. Kiettisack reconnaît par ailleurs que la législation pénale lao ne contient pas suffisamment de dispositions interdisant la discrimination raciale et que la criminalisation des actes de violence ou d’incitation à la violence motivés par des considérations raciales est nécessaire.

7.M. KITTIKHOUN (République démocratique populaire lao) dit que les coupables de la tuerie de touristes de 2003 ont effectivement été punis en vertu du droit pénal national. En revanche, l’enquête approfondie menée sur le meurtre de cinq enfants hmongs a totalement innocenté le général qui avait prétendument ordonné cet acte. Ces allégations totalement fausses ont été diffusées dans le seul et unique but de discréditer les autorités militaires du pays.

8.S’agissant de la classification des groupes ethniques vivant dans le pays, le représentant du Laos rappelle que le pays comptait, avant 1981, 68 groupes ethniques classés en trois nationalités en fonction de leur lieu de résidence géographique et de leur habitat. Il y avait ainsi les Lao Loum, habitant les plaines le long du Mékong, les Lao Theung, vivant sur les hauts plateaux, à 700 mètres d’altitude, et les Lao Sung habitant dans les montagnes, à 1 000 mètres d’altitude. Les Lao Loum comptaient 12 ethnies, les Lao Theung 36, et les Lao Sung 20. Cette classification avait eu pour but de renforcer la solidarité entre les ethnies montagnardes au moment de la lutte pour la libération nationale et n’obéissait pas vraiment à des critères ethnologiques scientifiques. Après 1981, elle s’est avérée inadaptée, raison pour laquelle le Gouvernement a demandé, en 1989, au Front lao d’édification nationale de mener des recherches approfondies afin d’établir une nouvelle classification des ethnies vivant en République démocratique populaire lao suivant des critères scientifiques. Le Front lao d’édification nationale a retenu quatre critères aux fins de la classification: la langue écrite et orale, les traditions, les coutumes et l’histoire, ainsi que le nom d’origine des ethnies. D’après cette nouvelle classification, le pays compte désormais 49 ethnies réunies en quatre familles ethnolinguistiques: la langue lao-tay, parlée par huit groupes ethniques, la langue môn-khmère, parlée par 32 groupes, la langue hmong-iumien, parlée par deux groupes ethniques, et la langue tibéto-chinoise, parlée par sept ethnies.

9.Le représentant du Laos explique que les autorités lao n’emploient pas le terme «minorités» pour deux raisons. Premièrement, elles estiment que cela équivaudrait à une discrimination raciale, sachant que l’article 35 de la Constitution stipule que tous les citoyens sont égaux devant la loi et que l’égalité pour tous les groupes ethniques exige qu’aucun ne soit taxé de minorité. Certains experts ont signalé que les termes «populations autochtones» sont utilisés par la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement, mais le Gouvernement lao ne les emploie pas non plus. Son objectif étant de mener une politique d’égalité entre les ethnies, il s’abstient d’accorder un traitement différencié à telle ou telle ethnie parce qu’elle serait autochtone, le problème de savoir quelle population est arrivée la première au Laos étant d’ailleurs un point que les historiens n’ont toujours pas tranché. Deuxièmement, aucune des familles ethniques qui se sont installées au Laos n’a colonisé les autres. Bien au contraire, elles ont été colonisées par des populations étrangères. Aucun groupe ethnique ne vit séparément au Laos sur un territoire vaste et le pays est une mosaïque d’ethnies différentes.

10.Le représentant du Laos indique que le programme des huit priorités nationales poursuivi dans le cadre des quatrième et cinquième plans quinquennaux a permis d’améliorer de façon importante les conditions de vie des groupes ethniques vivant dans les régions éloignées et isolées, notamment sur le plan de la scolarisation. Le Gouvernement a notamment pour stratégie de former des enseignants pour qu’ils puissent retourner dans leurs villages enseigner à leur tour.

11.Outre le fait qu’une grande partie de sa population vit dans des zones rurales difficiles d’accès, le Laos fait partie des pays les moins avancés, étant donné son faible revenu par habitant, la qualité de vie médiocre de sa population et sa vulnérabilité économique. De plus, en tant que pays sans littoral, il se heurte à deux problèmes: celui des distances lui impose de consacrer 11 % de ses recettes d’exportation aux services d’assurance et de transport – contre 7 % généralement pour les pays en développement –, ce qui désavantage le pays vis-à-vis des investisseurs au profit de pays voisins comme la Thaïlande et le Viet Nam. Le problème du franchissement des frontières le rend tributaire, pour ses échanges, de la stabilité sociopolitique et du degré d’ouverture des frontières des pays voisins et des pays de transit.

12.Certaines des statistiques citées par le Comité sont différentes de celles dont dispose la délégation. Par exemple, le chiffre de 46 % qui représenterait le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté reflétait la situation en 1990, mais a été ramené à 32 % grâce aux efforts faits par le Gouvernement dans le cadre du plan quinquennal et de sa stratégie de réduction de la pauvreté, et à l’aide internationale. Le pays semble donc bien parti pour atteindre l’objectif de réduire de moitié la pauvreté dès 2015 énoncé dans la Déclaration du Millénaire.

13.à propos de la réinstallation dans les plaines de certains groupes ethniques vivant dans les régions montagneuses, M. Kittikhoun explique que le but de cette politique, qui visait initialement à ne pas abandonner ces populations à leur sort, n’est pas de forcer ces personnes à partir vers les plaines mais de les y encourager, l’objectif étant qu’elles s’engagent dans des projets de développement qui leur permettent d’améliorer leur niveau de vie. La construction de logements et d’infrastructures dans les régions montagneuses est en effet très difficile pour un pays pauvre. Il est de plus nécessaire de trouver des substituts à l’agriculture itinérante pratiquée par ces populations, qui détruit les forêts, ressource très précieuse pour le pays. À défaut de pouvoir l’éliminer totalement, le Gouvernement s’efforce de stabiliser ce mode d’agriculture et d’offrir des alternatives. En aucun cas les populations ne sont contraintes au départ et elles sont libres de retourner chez elles, ce qu’elles font parfois, par exemple lorsqu’un projet échoue.

14.S’agissant de l’impact de la construction de barrages sur les populations des zones rurales éloignées et isolées, M. Kittikhoun souligne que l’une des ressources du Laos est l’eau, dont elle se sert pour produire de l’électricité au moyen de barrages. Le Gouvernement, étant conscient qu’un projet peut avoir un impact dommageable, fait avant toute chose des études de faisabilité et organise des consultations auprès des populations concernées et de la communauté internationale dans le cadre d’un processus ouvert et transparent.

15.M. KAIXION (République démocratique populaire lao), répondant à une question posée à la séance précédente concernant l’existence d’un mécanisme de coordination pour les questions relatives aux droits de l’homme, dit que le service créé en 1997 au Département des traités et du droit international du Ministère des affaires étrangères continue d’assumer la responsabilité de cette coordination. En outre, depuis 2001, un groupe de travail sur les droits de l’homme établi entre le Laos et la Suède organise des réunions de dialogue deux fois par an et s’occupe d’un grand nombre de questions comme la liberté d’expression. Des visites d’observation dans les prisons et dans les tribunaux ont aussi été organisées dans ce cadre. L’Union européenne a engagé un dialogue de ce type avec le Laos au début de 2004, mais la première réunion prévue a malheureusement été reportée à plusieurs reprises. Le Gouvernement lao invite également les responsables suédois à participer à des séminaires sur des questions de droits de l’homme, lesquelles font également l’objet d’ateliers organisés avec d’autres partenaires internationaux. Le Gouvernement fait tout son possible pour incorporer les accords internationaux relatifs aux droits de l’homme dans la législation interne et pour en diffuser le contenu auprès non seulement des responsables, mais aussi de la population dans les différentes provinces.

16.À propos des visas de sortie, le représentant du Laos dit que la préoccupation du Gouvernement n’est pas d’imposer des restrictions ou des contrôles mais de constituer des statistiques et de pouvoir venir en aide aux citoyens qui pourraient en avoir besoin en cas d’urgence. Par exemple, quelque 160 000 Lao travaillent en Thaïlande selon les statistiques de ce pays, mais s’y rendent illégalement de sorte que les autorités lao ne possèdent aucune statistique à leur sujet. Au lendemain de la catastrophe naturelle qui a touché la Thaïlande, les autorités ont tenté d’informer les familles des victimes, mais cet effort s’est heurté au problème de l’absence de statistiques. En coopération avec le Gouvernement thaïlandais, le Ministère des affaires étrangères a envoyé une mission d’un mois en Thaïlande pour inviter les travailleurs lao à venir s’enregistrer et leur délivrer des papiers d’identité. Cette initiative doit se poursuivre.

17.Concernant les observations qui ont été formulées à propos des restrictions aux voyages, M. Kaixion dit que le Laos a été le premier pays d’Asie à l’initiative d’accords régionaux concernant la délivrance de visas gratuits et que des mémorandums d’accord ont été conclus avec le Viet Nam, la Malaisie et Singapour en vue de permettre à leurs ressortissants de voyager sans visa pendant un mois entre leurs territoires respectifs à partir de janvier 2006. Le Gouvernement n’a reçu aucune plainte concernant les visas de sortie dont les frais d’émission sont très peu élevés (50 000 nouveaux kips, soit 4,5 dollars é.-U.). En revanche, des citoyens lao désireux de se rendre à l’étranger se sont plaints de ce que certaines ambassades refusent d’accorder des visas d’entrée ou imposent une taxe très élevée pour le faire (jusqu’à 200 dollars é.-U).

18.Afin de faciliter la circulation des personnes, les autorités lao ont ouvert plus d’une dizaine de points de contrôle aux frontières dans le cadre d’une politique qui a pour objectif de faciliter le transport des marchandises et la libre circulation des voyageurs. Dans cette même optique, des fonctionnaires du Ministère des affaires étrangères se rendent de temps à autre dans les provinces pour délivrer des passeports et des visas de sortie, mais les habitants des régions éloignées doivent toujours se rendre à Vientiane, où sont concentrées les ambassades étrangères, pour obtenir des visas.

19.M. AVTONOMOV se félicite du contenu du rapport et du dialogue constructif avec la délégation lao. Bien que le Laos soit un pays dont le niveau de développement est encore relativement bas, il rappelle que l’application de la Convention s’inscrit dans une démarche universelle, et que certaines questions fondamentales devront être traitées de façon plus complète dans le prochain rapport. Il souligne que certains aspects positifs de l’action menée dans l’État partie méritent d’être signalés, comme la coopération menée sous les auspices de l’ONU, dans le cadre régional et sur le plan bilatéral, en vue d’appliquer la Convention.

20.M. Avtonomov se félicite de l’existence, à l’échelon des villages, de l’unité de règlement des différends, organe de conciliation permettant de résoudre les conflits tout en respectant les us et coutumes des autochtones, et insiste sur la nécessité de préserver l’identité des différents groupes et tribus qui coexistent sur le territoire lao.

21.M. Avtonomov fait observer que les informations figurant au paragraphe 16 du rapport selon lesquelles «toutes les ethnies doivent se respecter mutuellement, éliminer définitivement les préjugés et les traces de méfiance des unes vis-à-vis des autres, que l’histoire a laissés et qui pourraient constituer des obstacles et des ressentiments entre elles» attestent que des actes de racisme ou de discrimination fondés sur l’origine ethnique sont commis dans le pays, contrairement à ce que laisse entendre le paragraphe 9 du rapport. Aussi juge‑t‑il opportun que l’État partie communique au Comité, à l’occasion de son prochain rapport périodique, un complément d’information sur les mesures qui auront été prises pour combattre ces phénomènes.

22.M. Avtonomov apprécierait en outre des informations complémentaires sur le statut et la composition ethnique des «zones spéciales» mentionnées au paragraphe 42 du rapport à l’examen, qui permettraient de déterminer si les droits et les libertés des minorités qui y vivent sont respectés. Il voudrait de plus savoir si les actes de discrimination, qu’ils soient commis par les autorités lao, les organismes publics ou les individus, donnent systématiquement lieu à l’ouverture d’une enquête. Par ailleurs, il aimerait savoir si l’article 83 (nouveau) du Code pénal cité au paragraphe 39 du rapport à l’examen a déjà été appliqué et si des actes de racisme ou de discrimination raciale ont déjà été dénoncés devant les tribunaux. Dans la négative, il aimerait que la délégation lao explique pourquoi cette disposition n’a pas été invoquée. Enfin, M. Avtonomov voudrait savoir si les Hmongs sont représentés dans l’appareil d’État.

23.M. CALI TZAY voudrait savoir si l’État s’est interrogé sur le rôle qu’ont joué les différentes ethnies présentes en République populaire démocratique lao dans la construction de l’identité nationale et quelles mesures concrètes le Gouvernement a prises pour lutter contre la discrimination dans le domaine de l’éducation et faire en sorte, notamment, que tous les enfants des différents groupes ethniques aient accès à un enseignement dans leur langue.

24.M. Cali Tzay se demande sur quels thèmes porte exactement le «travail de propagande, d’éducation politique et idéologique des ethnies et des couches sociales» que le Front lao d’édification nationale a la tâche d’accomplir (par. 20) et, enfin, si le Gouvernement a pris le soin de consulter les différentes ethnies présentes sur le territoire lao et de leur demander si elles prétendaient ou non au statut de «peuple autochtone».

25.M. SHAHI, rappelant que les Hmongs, qui sont dépourvus de tout moyen de subsistance, constituent 75,5 % de la population, demande si l’État partie a veillé à ce que ce groupe de population bénéficie d’une assistance humanitaire sous la forme de nourriture et de services divers qui leur font cruellement défaut.

26.M. Shahi formule l’espoir que la République démocratique populaire lao adoptera rapidement une législation pénalisant les crimes motivés par la haine raciale et se dotera des moyens d’exécution requis en vue de donner plein effet aux dispositions pertinentes de la Convention et qu’elle assouplira sa législation réglementant l’exercice de la religion.

27.Par ailleurs, M. Shahi se demande si le fait que les tribunaux n’ont été saisis d’aucune plainte depuis la mise en place de l’unité de règlement des différends au niveau des villages n’est pas le signe que la population ne connaît pas suffisamment ses droits ni l’existence de cette instance de conciliation. Enfin, il juge utile que l’État partie fournisse dans son prochain rapport périodique des informations sur le niveau de représentation des différents groupes linguistiques, des femmes et des Hmongs au sein du Front lao d’édification nationale, ainsi que sur les recours dont disposent les victimes de discriminations.

28.Mme JANUARY-BARDILL dit qu’il est indispensable, pour combattre les inégalités et la discrimination au sein de la société, de disposer de données ventilées sur les différents groupes ethniques qui coexistent dans le pays afin d’avoir une idée aussi précise que possible de la situation de chacun d’entre eux. Il ne s’agit pas de diviser la population selon des critères ethniques mais de déceler les inégalités fondées sur l’appartenance ethnique afin de mieux les corriger. Qu’aucun groupe ne constitue plus de 50 % de la population totale du pays ne change rien au fait que certains groupes sont inéluctablement moins bien lotis que d’autres dans certains domaines.

29.M. THORNBERRY dit que les pratiques religieuses ou traditionnelles de certains groupes sont archaïques et contraires aux normes internationales relatives aux droits de l’homme mais que l’État ne peut pas pour autant les interdire car cela reviendrait à violer la liberté de pensée, de conscience et de religion des groupes en question. L’État doit donc recourir à des moyens autres que la pénalisation − comme l’éducation ou encore la consultation des membres du groupe concerné − pour tenter d’y mettre un terme.

30.M. Thornberry fait observer que plusieurs des minorités présentes sur le territoire lao réunissent les conditions requises pour être qualifiées de «peuples autochtones» au sens de l’article 1er de la Convention n° 169 de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux mais que, quel que soit le qualificatif employé pour les désigner, les minorités en question doivent pouvoir prétendre aux droits inhérents aux minorités dans les domaines des droits fonciers, des droits de succession ou du droit à l’éducation. Il ajoute que, bien souvent, la diversité ethnique est la force d’un pays, notamment dans le cas de la République populaire démocratique lao.

31.M. BOYD se félicite que la République démocratique populaire lao ait saisi l’ampleur du phénomène de la traite des personnes dans le pays et ait entrepris des réformes d’ordre juridique pour le combattre. Il s’inquiète en revanche des problèmes que continue de rencontrer la communauté hmong, notamment des actes de violence commis par les forces de sécurité, et engage le Gouvernement lao à nouer le dialogue avec les Hmongs, en particulier avec ceux qui vivent dans les régions reculées du pays. Il note que la délégation lao rejette les allégations selon lesquelles des enfants hmongs auraient été tués par des militaires, mais s’étonne de ce qu’elle n’ait fourni aucun renseignement sur les enquêtes conduites pour élucider les faits.

32.M. de GOUTTES se félicite de l’engagement pris par la délégation lao de modifier la législation pénale afin d’incriminer les actes de discrimination raciale. Il se félicite que l’État partie ait décidé de renouer le dialogue avec le Comité car seule la réconciliation nationale et l’ouverture du pays à la communauté internationale constituent des solutions durables aux problèmes auxquels la République démocratique populaire lao fait face depuis 1975.

33.M. KJAERUM est conscient de l’importance des travaux entrepris par la République démocratique populaire lao afin de moderniser ses infrastructures de base, mais souhaiterait obtenir des informations sur le sort réservé aux groupes ethniques qui ont été expulsés de leurs terres afin que l’État puisse y construire des barrages. Les personnes expulsées n’auraient pas été indemnisées, n’auraient pas reçu les vivres qui leur avaient été promis et auraient été réinstallées sur des lopins de terre peu fertiles. Il demande en outre si ces personnes sont consultées et si l’État partie entend remédier à cette approche lors de la construction des prochains barrages. Par ailleurs, M. Kjaerum se félicite de l’établissement d’un centre de coordination pour les questions relatives aux droits de l’homme au sein du Ministère des affaires étrangères, mais engage l’État partie à créer une institution nationale des droits de l’homme pleinement conforme aux Principes de Paris.

34.M. KIETTISACK (République populaire démocratique lao) dit que la société lao est régie par des traditions et des coutumes et qu’il n’existe qu’une cinquantaine de lois en plus de la Constitution de 1991. Les problèmes sont essentiellement réglés par la voie de la conciliation et la plupart des différends arrivent rarement devant les tribunaux. De toute évidence, les infractions pénales les plus graves sont réglées selon la procédure pénale en vigueur. Le pays ne connaît guère de problèmes d’ordre racial et ne fait pas de différence entre les Hmongs et les autres citoyens. En ce qui la concerne, la zone spéciale n’est en aucun cas une zone militaire, comme certains membres du Comité semblent le croire, mais une zone de développement économique située dans une région montagneuse difficile d’accès.

35.M. KITTIKHOUN (République populaire démocratique lao) prend note des observations formulées par les membres du Comité au sujet des groupes ethniques et des peuples autochtones, mais souhaite également que le Comité comprenne la position de la délégation lao sur ces questions. Le Gouvernement lao est conscient des difficultés rencontrées par la communauté hmong dans certaines régions reculées et a mis en œuvre un projet de développement visant à améliorer ses conditions de vie. M. Kittikhoun insiste sur le fait que la liberté de religion est totale et que nul n’est persécuté à cause de ses croyances ou de ses pratiques religieuses. Les chrétiens, qui sont environ 50 000, peuvent librement pratiquer leur religion dans des églises. Seules les personnes qui enfreignent la loi sont poursuivies en justice.

36.M. KIETTISACK (République démocratique populaire lao) dit que sa délégation a pris note avec beaucoup d’intérêt des observations et des recommandations formulées par les membres du Comité et qu’elle comprend ainsi mieux les attentes du Comité à l’égard de la République démocratique populaire lao. La délégation espère avoir apporté quelques éclaircissements et s’engage à transmettre au Gouvernement lao toutes les interrogations des membres du Comité et à donner suite aux questions demeurées sans réponse. En tout état de cause, elle est résolue à poursuivre le dialogue qui vient d’être renoué avec le Comité.

37.M. AMIR (Rapporteur pour la République démocratique populaire lao) se félicite d’un certain nombre de points positifs concernant l’État partie, à savoir la reconnaissance officielle du problème de la prostitution des enfants, le projet visant à criminaliser la haine raciale et la lutte contre la traite des femmes et des enfants et la volonté affichée par les pouvoirs publics depuis 1981 de procéder à une classification plus scientifique des groupes ethniques. Parmi les points négatifs, M. Amir note que l’article 60 du Code pénal ne réprime pas suffisamment les actes de haine raciale, que le Gouvernement a beaucoup de difficulté à combattre les croyances et pratiques millénaires, telles que le meurtre des jumeaux à la naissance, et qu’un trop grand nombre de problèmes continuent d’être réglés par la force. En tout état de cause, il faut se féliciter de la volonté de la République démocratique populaire lao de renforcer sa coopération avec le Comité afin de mieux appliquer la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. M. Amir engage l’État partie à poursuivre le processus de réconciliation nationale en recherchant des solutions durables aux problèmes qui perdurent depuis 1975 et en respectant le principe de l’égalité entre les citoyens.

38.Le PRÉSIDENT déclare que le Comité a ainsi achevé l’examen des sixième à quinzième rapports périodiques de la République démocratique populaire lao.

La délégation lao se retire.

La séance est levée à 13 h 5.

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