Nations Unies

CRPD/C/ESP/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

19 octobre 2011

Français

Original: anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Sixième session

Genève, 19-23 septembre 2011

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 35 de la Convention

Observations finales du Comité des droits des personnes handicapées

Espagne

1.Le Comité a examiné le rapport initial de l’Espagne (CRPD/C/ESP/1) à ses 56e et 57e séances (voir CRPD/C/6/SR.3 et SR.4), tenues le 20 septembre 2011, et a adopté les observations finales ci-après à sa 62e séance, tenue le 23 septembre 2011.

I.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’Espagne, premier État à soumettre son rapport initial. Il félicite l’État partie pour ses réponses écrites à la liste des points à traiter (CRPD/C/ESP/Q/1/Add.1) et pour les réponses détaillées qu’il a apportées aux questions posées au cours du dialogue.

3.Le Comité remercie l’État partie d’avoir dépêché une délégation, qui comptait parmi ses membres des représentants de plusieurs ministères du Gouvernement, dont de nombreux hauts représentants, et deux personnes handicapées. Il exprime sa satisfaction pour le dialogue animé et fructueux qui s’est tenu entre la délégation et les membres du Comité.

II.Aspects positifs

4.Le Comité félicite l’État partie pour les progrès réalisés dans de nombreux domaines liés aux droits des personnes handicapées, dont l’adoption de la loi no 26/2011 du 1er août 2011 portant adaptation de la législation nationale à la Convention qui a modifié plusieurs règlements et lois compte tenu de la Convention, et les mesures d’action positive importantes prises, notamment dans les secteurs de la santé, du logement et de l’emploi.

5.Le Comité prend note avec satisfaction de la loi no 51/2003 relative à l’égalité des chances, à la non-discrimination et à l’accessibilité universelle pour les personnes handicapées et de ses textes d’application, en particulier des décrets royaux qui prévoient l’application de normes fondamentales en matière d’accessibilité.

6.Le Comité félicite l’État partie d’avoir mis en place des mécanismes indépendants de suivi, en pleine conformité avec le paragraphe 2 de l’article 33 de la Convention.

7.Le Comité se félicite de l’adoption par l’État partie du troisième Plan d’action en faveur des personnes handicapées qui soumet la problématique du handicap à l’analyse par sexe, ainsi que de la Stratégie globale d’action en faveur de l’emploi des personnes handicapées 2008-2012, notamment de son premier plan d’action pour la période 2008-2010.

8.Le Comité salue l’adoption par l’État partie d’une stratégie à long terme en faveur des personnes handicapées 2012-2020, qui comprend des objectifs à court et à moyen terme.

9.Le Comité félicite l’État partie pour le pourcentage élevé (78,35 %) d’enfants handicapés scolarisés dans le système éducatif ordinaire, et pour les efforts qu’il a déployés afin de maintenir le financement des programmes en faveur des personnes handicapées en ces temps de crise économique. En cela, l’Espagne donne un très bel exemple de la manière dont on peut réaliser les objectifs inscrits au paragraphe 2 de l’article 4 de la Convention. Le Comité note aussi avec satisfaction que l’État partie met tout en œuvre pour éviter une diminution de l’aide sociale.

10.Le Comité reconnaît que l’État partie a fait des efforts pour s’engager plus fermement en faveur de la coopération internationale, en allouant des fonds spéciaux pour un développement qui intègre le handicap.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Obligations et principes généraux (art. 1er et 4)

11.Le Comité prend note de l’adoption de la loi no 26/2011 qui reprend la notion de personne handicapée telle qu’elle est définie dans la Convention, et qui étend la protection de ces personnes. Toutefois, le Comité s’inquiète de ce que la loi ne concerne pas toutes les personnes handicapées.

12. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de veiller à ce que toutes les personnes handicapées soient protégées contre les discriminations et bénéficient de l ’ égalité des chances, indépendamment de leur degré de handicap.

13.Le Comité accueille avec satisfaction la loi no 49/2007 du 26 décembre 2007, qui met en place le Bureau permanent spécialisé chargé de gérer le régime d’infractions et de sanctions s’agissant de l’égalité des chances, de la non-discrimination et de l’accessibilité universelle pour les personnes handicapées. Toutefois, le Comité est préoccupé par la lenteur de la mise en place du système d’arbitrage au niveau des administrations régionales, par l’absence de promotion du système, par le manque d’informations sur le nombre de cas présentés et résolus, et par le fait que l’État partie n’a pas rendu compte des mesures prises pour appliquer cette loi. Le Comité s’inquiète de l’efficacité globale du système.

14. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire mieux connaître le système d ’ arbitrage aux personnes handicapées, d ’ augmenter les seuils d ’ admissibilité à l ’ aide juridique gratuite, et de garantir l ’ application du régime d ’ infractions et de sanctions au niveau des gouvernements régionaux.

15.Le Comité regrette l’absence d’informations faisant état d’une réelle participation des personnes handicapées et des organisations qui les représentent au niveau régional à la conception, à l’évaluation et à la mise en œuvre de la législation, des politiques et des mécanismes de prise de décisions, et de renseignements sur la participation des enfants handicapés à tous les niveaux.

16. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures concrètes pour garantir la participation active des personnes handicapées aux mécanismes publics de prise de décisions au niveau régional, et d ’ inclure les enfants handicapés à tous les niveaux.

17.Le Comité prend note de la loi no 2/2010 du 3 mars 2010 relative à la santé sexuelle et procréative, qui dépénalise l’interruption volontaire de grossesse, autorise sa pratique jusqu’à quatorze semaines de grossesse et prévoit deux cas précis dans lesquels ce délai peut être repoussé en raison d’un handicap chez le fœtus: en cas de risque d’anomalie fœtale (délai repoussé à vingt-deux semaines de grossesse) et notamment en cas de «détection d’une maladie extrêmement grave ou incurable chez le fœtus» (avortement possible au-delà des vingt-deux semaines de grossesse). Le Comité prend également note des explications fournies par l’État partie pour justifier le maintien de cette distinction.

18. Le Comité recommande à l ’ État partie de supprimer dans la loi n o 2/2010 la distinction établie dans les délais légaux d ’ interruption volontaire de grossesse, qui repose exclusivement sur le handicap.

B.Droits spécifiques (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

19.Le Comité accueille avec satisfaction les modifications que la loi no 26/2011 apporte aux règlements actuels, qui auront pour effet d’abolir l’exigence de présentation d’une attestation de handicap pour le dépôt d’une plainte pour discrimination auprès d’une autorité judiciaire. Toutefois, il regrette l’absence d’informations sur les cas de discrimination, et craint que les personnes handicapées restent marginalisées. Le Comité est en outre préoccupé par le manque d’informations sur les aménagements raisonnables. Le Comité est également préoccupé de ce que, dans la pratique, le handicap influe sur l’exercice par les parents de la tutelle ou de la garde de leur enfant et de ce que les dispositions juridiques de protection contre la discrimination fondée sur le handicap ne puissent être appliquées dans les cas de discrimination fondés sur le handicap perçu ou sur l’association avec une personne handicapée.

20. Le Comité engage l ’ État partie à élargir la protection contre la discrimination fondée sur le handicap de sorte qu ’ elle englobe expressément le polyhandicap, le handicap perçu et l ’ association avec une personne handicapée, et à assurer une protection contre le refus d ’ aménagement raisonnable, qui constitue une forme de discrimination, indépendamment du degré de handicap. En outre, il faudrait organiser des activités d ’ orientation, de sensibilisation et de formation pour mieux faire comprendre la notion d ’ «aménagement raisonnable» à toutes les parties prenantes, y compris les personnes handicapées, et prévenir la discrimination.

Femmes handicapées (art. 6)

21.Le Comité est préoccupé de constater que les politiques et les programmes publics de prévention de la violence à caractère sexiste ne tiennent pas suffisamment compte de la situation particulière des femmes handicapées. Il est également inquiet de ce que les politiques relatives à l’emploi ne fasse aucune place aux questions globales de parité et que les taux de chômage, d’inactivité et de formation sont sensiblement plus élevés chez les femmes que chez les hommes handicapés.

22. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De p rendre en considération de manière plus générale les femmes handicapées dans les politiques et les programmes publics de prévention de la violence sexiste, en particulier pour veiller à ce que les femmes handicapées aient accès à un système d ’ intervention efficace et intégré;

b) De f aire une place aux questions de parité dans les politiques de l ’ emploi, et notamment prendre des mesures spécifiques en faveur des femmes handicapées;

c) D’é laborer et d ’ affiner des stratégies, des politiques et des programmes, surtout dans les domaines de l ’ éducation, de l ’ emploi, de la santé et de la protection sociale, pour promouvoir l ’ autonomie et la pleine participation des femmes et des filles handicapées à la société, et lutter contre la violence à leur égard.

Enfants handicapés (art. 7)

23.Le Comité est particulièrement préoccupé par les informations selon lesquelles le nombre de cas d’enfants handicapés maltraités serait plus élevé que celui des autres enfants maltraités. Le Comité est également inquiet de l’absence de détection précoce, d’interventions auprès des familles et de soutien avisé pour les enfants handicapés, ce qui compromet leur plein épanouissement et la possibilité pour eux de s’exprimer librement; et de l’insuffisance des ressources et du manque de coordination entre les services publics − dans les secteurs social, sanitaire et éducatif, notamment.

24. Le Comité recommande à l ’ État partie de:

a) Redoubler d ’ efforts pour promouvoir et protéger les droits des enfants handicapés, et d ’ entreprendre des travaux de recherche sur la violence à l ’ égard de ces enfants, en adoptant des mesures pour faire disparaître cette violation de leurs droits ;

b) Se doter de politiques et de programmes propres à garantir le droit des enfants handicapés d ’ exprimer leur avis;

c) Mettre au point des politiques publiques coordonnées, dotées de ressources suffisantes pour garantir un accès non exclusif aux services d ’ accompagnement, notamment les services de traitement en connaissance de cause, de réadaptation et d ’ adaptation, et une prise en charge intégrale qui réponde aux besoins sanitaires, psychosociaux et éducatifs des enfants handicapés, en particulier dans la petite enfance.

Sensibilisation (art. 8)

25.Le Comité salue les nombreuses initiatives prises par l’État partie pour appliquer la Convention. Il note toutefois qu’il faut redoubler d’efforts pour sensibiliser la société aux droits des personnes handicapées, dans les médias et auprès des personnes handicapées elles-mêmes.

26. Le Comité appelle l ’ État partie à prendre des mesures actives pour mieux faire connaître la Convention et son p rotocole facultatif à tous les niveaux, en particulier aux autorités et au personnel judiciaires, aux partis politiques, aux membres du Parlement et du Gouvernement, à la société civile, aux médias, aux personnes handicapées, ainsi qu ’ au public dans son ensemble.

Accessibilité (art. 9)

27.Le Comité prend note de la loi no 26/2011 qui apporte des modifications aux règlements existants et aura pour effet de raccourcir les délais prévus pour équiper les espaces et les biens et services d’intérêt public selon les normes d’accessibilité. Toutefois, il demeure préoccupé par l’application très insuffisante de ces règles, en particulier aux niveaux régional et local, dans le secteur privé, et en ce qui concerne les installations existantes. Le Comité a connaissance des situations de discrimination rencontrées par les passagers aériens handicapés, notamment des situations de refus d’embarquement. Le Comité rappelle à l’État partie que l’article 9 de la Convention impose également aux États d’assurer l’accès aux services d’information et de communication.

28. Le Comité recommande d ’ allouer dès que possible les ressources financières et humaines nécessaires pour mettre en œuvre et promouvoir la législation relative à l ’ accessibilité, et en surveiller l ’ application, par le biais de mesures nationales et de la coopération internationale.

Droit à la vie (art. 10)

29.Le Comité se félicite que la loi no 26/2011 modifie des dispositions réglementaires de façon qu’elles rendent compte du droit à l’accessibilité lorsqu’il s’agit d’accorder son consentement éclairé à un traitement médical. Le Comité regrette toutefois que le représentant d’une personne handicapée soi-disant «déclarée incapable» puisse valablement donner son consentement quant à l’arrêt ou la suspension d’un traitement médical, d’un régime alimentaire ou de tout autre élément nécessaire à la vie de la personne. Le Comité souhaite rappeler à l’État partie que le droit à la vie est absolu et que la prise de décisions substitutive quant à l’arrêt ou la suspension d’un traitement essentiel au maintien de la vie n’est pas compatible avec ce droit.

30. Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à ce que l ’ impératif du consentement éclairé des personnes handicapées soit garanti en toutes circonstances pour tout ce qui a trait au traitement médical, s ’ agissant en particulier de la suspension du traitement, du régime alimentaire ou de tout autre élément nécessaire à la vie.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

31.Le Comité est préoccupé par le défaut de protocoles se rapportant spécifiquement aux personnes handicapées dans les situations d’urgence.

32. Le Comité engage l ’ État partie à réviser sa législation et ses politiques relatives aux situations d ’ urgence en vue d ’ y inclure des dispositions qui garantissent la sécurité et la protection des personnes handicapées.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

33.Le Comité constate que la loi no 26/2011 prévoit une période d’une année après son entrée en vigueur pour la présentation d’un projet de loi régissant la portée de l’article 12 et son interprétation. Le Comité est en outre préoccupé par le fait qu’aucune mesure n’a été prise en vue de remplacer la prise de décisions substitutive par la prise de décisions assistée dans l’exercice de la capacité juridique.

34. Le Comité recommande à l ’ État partie de réviser les lois prévoyant les régimes de tutelle et de curatelle et de prendre des dispositions pour élaborer des lois et des politiques visant à remplacer les régimes de prise de décisions substitutive par la prise de décisions assistée, qui respecte l ’ autonomie, la volonté et les préférences de la personne. Il recommande en outre de dispenser une formation sur cette question à tous les agents de l ’ État intéressés et aux autres parties prenantes.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

35.Le Comité prend note du régime juridique qui prévoit le placement en institution des personnes handicapées, y compris des personnes atteintes d’un handicap intellectuel ou psychosocial («maladie mentale»). Il est préoccupé par les informations faisant état d’une tendance à recourir à des mesures de placement d’urgence en institution qui ne prévoient que des garanties a posteriori pour la personne concernée. Il s’inquiète également des informations faisant état de mauvais traitements infligés dans des établissements d’accueil et des hôpitaux psychiatriques aux personnes handicapées qui y ont été placées.

36. Le Comité recommande à l ’ État partie de réviser les lois autorisant la privation de liberté fondée sur le handicap, notamment le handicap mental, psychosocial ou intellectuel; d ’ abroger les dispositions qui autorisent l ’ internement sans consentement pour cause de handicap apparent ou diagnostiqué; et de prendre des mesures pour garantir que la prestation de services de santé, notamment de tous les services de santé mentale, soit assurée avec le consentement éclairé de la personne concernée.

Intégrité de la personne (art. 17)

37.Le Comité s’inquiète de ce qu’il soit possible de pratiquer une stérilisation sur une personne handicapée dont la capacité juridique n’est pas reconnue sans que l’intéressée ait donné son consentement libre et éclairé.

38. Le Comité engage l ’ État partie à abolir toute administration de traitements médicaux, en particulier de la stérilisation, sans que le patient y ait pleinement consenti en connaissance de cause, et de veiller à ce que la législation nationale respecte, en particulier, les droits des femmes visés par les articles 23 et 25 de la Convention.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

39.Le Comité est préoccupé par le manque de ressources et de services propres à garantir le droit de vivre de façon indépendante et d’être inclus dans la société, en particulier dans les zones rurales. Il s’inquiète en outre de ce que, pour une personne handicapée, le choix du lieu de résidence soit limité par la disponibilité des services requis, et que ceux qui vivent en établissement d’accueil semblent n’avoir d’autre possibilité que le placement en institution. Enfin, le Comité s’inquiète de ce que l’éligibilité en matière de services sociaux soit liée à un certain degré de handicap.

40. Le Comité encourage l ’ État partie à veiller à ce que les moyens financiers voulus soient mis à disposition pour que les personnes handicapées aient véritablement la possibilité de choisir, sur la base de l ’ égalité avec les autres, leur lieu de résidence, qu ’ elles aient accès à une gamme complète de services à domicile ou en établissement et autres services sociaux d ’ accompagnement, y compris l ’ aide personnelle nécessaire, et qu ’ elles disposent ainsi d ’ aménagements raisonnables pour pouvoir mieux s ’ intégrer dans la société.

41.Le Comité est préoccupé par le fait que la loi relative à la promotion de l’autonomie réserve les ressources mises à disposition pour l’embauche d’assistants personnels aux personnes présentant un handicap de niveau 3, et seulement à des fins d’éducation et de travail.

42. Le Comité encourage l ’ État partie à accroître les ressources relatives aux assistants personnels pour l ’ ensemble des personnes handicapées, conformément à leurs besoins.

Éducation (art. 24)

43.Le Comité se félicite que le principe d’intégration régisse la scolarisation des élèves qui présentent des besoins éducatifs spéciaux, que la discrimination dans l’éducation soit interdite et que la plupart des enfants handicapés soient pris en charge dans le système éducatif ordinaire. Le Comité salue la promulgation de la loi organique no 2/2006 sur l’éducation, qui fait obligation aux autorités éducatives de fournir des enseignants spécialisés, des professionnels qualifiés et le matériel et les ressources nécessaires, ainsi que les lois qui obligent les établissements scolaires à aménager et diversifier les programmes scolaires pour les adapter aux élèves handicapés. Toutefois, le Comité s’inquiète de la mise en œuvre de ces lois sur le plan pratique, compte tenu des informations faisant état de l’absence d’aménagement raisonnable, de la persistance de la ségrégation et de l’exclusion, des arguments financiers avancés pour justifier d’une discrimination, et des cas d’enfants inscrits dans le système éducatif spécialisé contre l’avis des parents. Le Comité note avec préoccupation que les parents qui contestent le placement de leur enfant handicapé dans le système éducatif spécialisé n’ont aucune voie de recours, et que la seule possibilité qu’il leur reste est d’éduquer leur enfant à leurs frais ou de payer les aménagements raisonnables requis permettant à leur enfant d’intégrer le système éducatif ordinaire.

44. Le Comité réaffirme que le refus d ’ aménagement raisonnable est constitutif de discrimination et que l ’ obligation de procéder à des aménagements raisonnables est d ’ application immédiate et ne peut être observée de façon progressive. Il recommande à l ’ État partie de:

a) Redoubler d ’ efforts pour procéder aux aménagements raisonnables nécessaires en matière d ’ éducation, en allouant les moyens financiers et humains requis pour mettre en œuvre le droit à l ’ éducation inclusive, en prêtant une attention particulière au recrutement d ’ enseignants présentant les compétences spécialisées voulues, et en veillant à ce que les départements de l ’ éducation des autorités locales comprennent leurs obligations au titre de la Convention et agissent conformément à ses dispositions;

b) Veiller à ce que la décision de placer un enfant handicapé dans une école spéciale ou dans des classes spéciales, ou de lui offrir simplement une version réduite du programme scolaire ordinaire, se prenne en concertation avec les parents;

c) Veiller à ce que les parents d ’ un enfant handicapé ne soient pas contraints de payer pour l ’ éducation de leur enfant ou pour les aménagements raisonnables des écoles ordinaires;

d) Veiller à ce qu ’ il puisse être fait appel, rapidement et efficacement, des décisions préconisant le placement séparé des enfants.

Droit au travail (art. 27)

45.Malgré les dispositions qui ont été prises pour maintenir dans l’emploi les personnes handicapées, le Comité est préoccupé par le faible taux d’emploi général des personnes handicapées.

46. Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre au point des programmes pointus et ouvert à tous pour augmenter les possibilités d ’ emploi des femmes et des hommes handicapés.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

47.Le Comité s’inquiète de ce que le droit de vote des personnes atteintes d’un handicap intellectuel ou psychosocial puisse être restreint si l’intéressé a été privé de sa capacité juridique, ou s’il a été placé dans un établissement. Le Comité s’inquiète également de ce que la privation de ce droit semble être la règle et non l’exception. Il regrette l’absence d’informations sur la norme appliquée en matière de preuve ou de recevabilité, et les critères utilisés par les juges lorsqu’ils privent des personnes de leur droit de vote. Le Comité prend note avec préoccupation du nombre de personnes handicapées auxquelles le droit de vote a été refusé.

48. Le Comité recommande de réviser l ’ ensemble de la législation pertinente afin de veiller à ce que toutes les personnes handicapées, quel que soit leur handicap, leur statut juridique ou leur lieu de résidence ait le droit de voter et de participer à la vie publique, sur la base de l ’ égalité avec les autres. Le Comité demande à l ’ État partie de modifier l ’ article 3 de la loi organique n o 5/1985, qui autorise le refus du droit de vote fondé sur les décisions au cas par cas d ’ un juge. Cette modification devrait garantir le droit de vote à toutes les personnes handicapées. En outre, le Comité recommande de fournir à toutes les personnes handicapées qui sont élues à des fonctions publiques tout l ’ appui dont elles peuvent avoir besoin, y compris des assistants personnels.

C.Obligations spécifiques (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte de données (art. 31)

49.Le Comité regrette le manque de données ventilées sur les personnes handicapées. Il rappelle que de telles informations sont indispensables pour connaître la situation de certains groupes de personnes handicapées dans l’État partie qui peuvent être vulnérables à des degrés divers, et pour élaborer les lois, les politiques et les programmes adaptés à leur situation, ainsi que pour évaluer la mise en œuvre de la Convention.

50. Le Comité recommande à l ’ État partie de systématiser la collecte, l ’ analyse et la diffusion de données ventilées par sexe, âge et handicap, d ’ accentuer les efforts de renforcement des capacités en la matière, et de mettre au point des indicateurs modulés en fonction du genre afin d ’ appuyer l ’ élaboration de lois et de politiques et le renforcement d ’ institutions permettant de suivre les progrès accomplis concernant la mise en œuvre des diverses dispositions de la Convention, et d ’ en rendre compte.

51.Le Comité regrette que la situation des enfants handicapés ne ressorte pas des données relatives à la protection des enfants.

52. Le Comité recommande à l ’ État partie de collecter, d ’ analyser et de diffuser systématiquement des données ventilées par sexe, âge et handicap sur la maltraitance et la violence dont les enfants sont victimes.

Suivi et diffusion

53.Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre les recommandations du Comité telles qu’énoncées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre ces observations finales aux membres du Gouvernement et du Parlement, aux responsables des différents ministères, aux membres des professions concernées, tels que les professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice, ainsi qu’aux autorités locales et aux médias, pour examen, en utilisant des stratégies de communication sociale modernes.

54.Le Comité encourage vivement l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de son deuxième rapport périodique.

55.Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations représentatives des personnes handicapées, et auprès des personnes handicapées et des membres de leur famille, sous un format accessible.

Prochain rapport

56.Le Comité demande à l’État partie de présenter son deuxième rapport périodique au plus tard le 3 décembre 2015, et d’y faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre des présentes observations finales.