Nations Unies

CERD/C/CHE/10-12

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

29 janvier 2019

Original : français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

Rapport valant dixième à douzième rapports périodiques soumis par la Suisse en application de l’article 9 de la Convention, attendu en 2017 * , **

[Date de réception : 3 décembre 2018]

Table des matières

Page

Liste des abréviations3

Introduction6

Première partie : Informations générales6

1.Évolution de la population en Suisse6

2.Bases constitutionnelles et légales6

3.Politique générale de lutte contre la discrimination raciale9

Deuxième partie : Examen de l’application des articles 1 à 7 de la Convention12

1.Article 1: Définition de la discrimination raciale12

2.Article 2 : Condamnation de la discrimination raciale13

3.Article 3 : Condamnation de l’apartheid16

4.Article 4 : Mesures visant à punir certains actes de discrimination raciale17

5.Article 5 : Élimination de la discrimination raciale touchant à certains droits de l’homme19

6.Article 6 : Garantie de voies de recours effectives30

7.Article 7 : Mesures dans les domaines de l’enseignement, de l’éducation, de la culture et de l’information31

8.Autres recommandations35

Liste des abréviations

AELEAssociation européenne de libre-échange

AIEPAutorité indépendante d’examen des plaintes en matière de radio-télévision

AREOffice fédéral du développement territorial

CCCode civil suisse du 19 décembre1907 (RS 210)

CCDCommon Core Document

CCPCode de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (RS 312.0)

CdCConférence des gouvernements cantonaux

CDEConvention relative aux droits de l’enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989 (RS 0.107)

CDIConférence suisse des délégués à l’intégration

CDIPConférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique

CEDHConvention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Convention européenne des droits de l’homme) (RS 0.101)

CERDConvention du 21 décembre 1961 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (RS 0.104)

cfdChristlicher Friedensdienst

CFJMCentre de formation au journalisme et aux médias

CFMCommission fédérale des migrations

CFRCommission fédérale contre le racisme

CICADCoordination Intercommunautaire contre l’Antisémitisme et la Diffamation

COISCoordination des organisations islamiques en Suisse

Consid.Considérants

CPCode pénal suisse du 21 décembre 1937 (RS 311.0)

CPMCode pénal militaire du 13 juin 1927 (RS 321.0)

CPCCode de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (RS 272)

CRANCarrefour de Réflexion et d’Action contre le Racisme Anti-Noir

CSAJConseil Suisse des Activités de Jeunesse

CSDHCentre suisse de compétence pour les droits humains

CSISCentre Suisse Islam et Société

Cst.Constitution de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101)

CTAConférence tripartite sur les agglomérations

DDCDirection du développement et de la coopération

DDIPDirection du droit international public

DDPSDépartement fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports

DFAEDépartement fédéral des affaires étrangères

DFIDépartement fédéral de l’intérieur

DFJPDépartement fédéral de justice et police

DoSyRaSystème de documentation du racisme du Réseau de centres de conseil pour les victimes du racisme

ECRICommission européenne contre le racisme et l’intolérance

ELRCEnquête sur la langue, la religion et la culture de l’OFS

Enquête VeSEnquête « Vivre ensemble en Suisse »

FAQFoire aux questions

FOISFédération d’organisations islamiques de Suisse

FSCIFédération suisse des communautés israélites

GRAFondation contre le racisme et l’antisémitisme

IHRAInternational Holocaust Remembrance Alliance

LAMalLoi fédérale du 18 mars 1994 sur l’assurance-maladie (RS 832.10)

LAsiLoi fédérale du 26 juin 1988 sur l’asile (RS 142.31)

LAVILoi fédérale du 23 mars 2007 sur l’aide aux victimes d’infractions (RS 312.5)

LECLoi fédérale du 11 décembre 2009 sur l’encouragement de la culture (RS 442.1)

LEgLoi fédérale du 24 mars 1995 sur l’égalité entre femmes et hommes (loi sur l’égalité, RS 151.1)

LEtrLoi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (RS 142.20)

LHandLoi fédérale sur l’élimination des inégalités frappant les personnes handicapées (loi sur l’égalité pour les handicapés ; RS 151.3)

LMCFALoi fédérale du 30 septembre 2016 sur les mesures de coercition à des fins d’assistance et les placements extrafamiliaux antérieurs à 1981 (RS 211.223.13)

LMSILoi fédérale du 21 mars 1997 instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure (RS 120)

LNLoi fédérale du 29 septembre 1952 sur l’acquisition et la perte de la nationalité suisse (RS 141.0)

LOGALoi du 21 mars 1997 sur l’organisation du gouvernement et de l’administration (RS 172.010)

LOAPLoi fédérale du 19 mars 2010 sur l’organisation des autorités pénales de la Confédération (loi sur l’organisation des autorités pénales ; RS 173.31)

LRTVLoi fédérale du 24 mars 2006 sur la radio et la télévision (RS 784.40)

MAZMedienausbildungszentrum

NCBINational Coalition Building Institute

INDHInstitution nationale des droits de l’homme

OAMalOrdonnance du 27 juin 1995 sur l’assurance-maladie (RS 832.102)

OASAOrdonnance du 24 octobre 2007 relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (RS 142.201)

OFASOffice fédéral des assurances sociales

OFCOffice fédéral de la culture

OFROUOffice fédéral des routes

OFSOffice fédéral de la statistique

OFSPOffice fédéral de la santé publique

OIEOrdonnance du 24 octobre 2007 sur l’intégration des étrangers (RS 142.205) du 24 octobre 2007 (état le 1er juillet 2018)

OITOrganisation internationale du travail

OLOGAOrdonnance du 25 novembre 1998 sur l’organisation du gouvernement et de l’administration (RS 172.010.1)

ONGOrganisation non gouvernementale

ONUOrganisation des Nations Unies

OSCEOrganisation pour la sécurité et la coopération en Europe

Pacte II de l’ONUPacte international relatif aux droits civils et politiques, conclu à New York le 16 décembre 1966

PICProgrammes d’intégration cantonaux

PJLSPlateforme des juifs libéraux de Suisse

PNRProgramme national de recherche

RNSRéseau national de sécurité

RSRecueil systématique du droit fédéral

SEFRISecrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation

SEMSecrétariat d’État aux migrations (jusqu’au 1er janvier 2015 : Office fédéral des migrations, ODM)

SFMForum suisse pour l’étude des migrations et de la population

SG-DFISecrétariat général du Département fédéral de l’intérieur

SLRService de lutte contre le racisme

SPCStatistique policière de la criminalité

SRCService de renseignement de la Confédération

SUSStatistique des condamnations pénales

UEUnion européenne

UNHRCHaut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés

VIOZAssociation des organisations islamiques de Zurich

ZHAWHaute école zurichoise de sciences appliquées

Introduction

1.Dans ses observations finales, le Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale a recommandé à la Suisse de présenter ses dixième, onzième et douzième rapports attendus le 29 décembre 2017 sous la forme d’un seul et même document.

2.Le présent document couvre la période comprise entre février 2014 et septembre2018. Les données statistiques s’arrêtent à la fin décembre 2017. Les données ne présentant pas de changement par rapport à une période antérieure font l’objet d’un renvoi au rapport correspondant.

3.Le présent rapport a été établi par la Direction du droit international public (DDIP) du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) en collaboration avec le Service de lutte contre le racisme (SLR) du Département fédéral de l’intérieur (DFI). Les autres services concernés de l’administration fédérale ont été invités à donner leur avis dans le cadre de la procédure de consultation des offices. La Commission fédérale contre le racisme (CFR) et la Commission fédérale des migrations (CFM) ainsi que les organisations engagées dans la lutte contre la discrimination raciale ont eu la possibilité de prendre position sur le rapport.

4.Le rapport est publié en français, en allemand et en italien. Il peut être consulté sur le site Internet du DFAE et sur celui du SLR.

Première partie : Informations générales

5.La première partie fournit des indications générales sur le développement du droit interne et donne un aperçu de la politique actuellement menée par les autorités suisses pour lutter contre toutes les formes de discrimination raciale.

1.Évolution de la population en Suisse

6.Les informations relatives à ce chapitre se trouvent dans le Document de base commun faisant partie intégrante des rapports de la Suisse (Common Core Document, ch. II, A, 3).

2.Bases constitutionnelles et légales

7.Les principales bases constitutionnelles et légales de la lutte contre le racisme ayant déjà été abordées dans les rapports précédents, le présent chapitre ne mentionnera que succinctement les révisions et les nouveautés intervenues dans l’intervalle. Les développements importants sont détaillés dans la deuxième partie.

2.1Nouveautés importantes au niveau constitutionnel

8.Naturalisation facilitée des étrangers de la troisième génération: Depuis le 15 février2018, les jeunes étrangers vivant en Suisse car leurs grands-parents y avaient émigré bénéficient d’une procédure de naturalisation facilitée. Celle-ci prévoit que la requête est examinée directement par la Confédération (après consultation du canton, avant l’approbation, cf. chap. 5.1.).

9.Modification de l’art. 121, al. 3-6, Cst. : L’initiative populaire fédérale « pour le renvoi des étrangers criminels » (initiative sur le renvoi) a été acceptée par le peuple et les cantons le 28 novembre 2010 (52,3 % de oui). Le Conseil fédéral a mis en vigueur au 1er octobre 2016 les dispositions légales du CP et du CPM élaborées par le Parlement pour appliquer cette modification de la Constitution. En comparaison avec le renvoi et l’expulsion prévus par la LEtr, elles introduisent des règles plus strictes (not. expulsion obligatoire sans peine minimale ou expulsion potentielle à vie) ; une clause de rigueur permet toutefois aux tribunaux de prendre en compte exceptionnellement les situations particulières, par exemple celles d’étrangers de la deuxième ou de la troisième génération. Les dispositions d’exécution sont entrées en vigueur le 1er mars 2017.

10.Nouvel article 121a Cst. : Le 9 février 2014, le peuple suisse et une majorité de cantons ont accepté l’initiative populaire fédérale « contre l’immigration de masse » à 50,3 % de oui. En vertu du texte constitutionnel correspondant (l’art. 121a Cst.), le Conseil fédéral et le Parlement devaient introduire dans les trois ans un nouveau système d’admission, permettant à la Suisse de gérer le nombre d’entrées dans le pays, en préservant ses intérêts économiques et en instaurant une préférence nationale. Depuis le 1er juillet 2018, dans le but de mieux exploiter le potentiel de la main-d’œuvre indigène et ainsi de contrôler indirectement l’immigration, les employeurs sont tenus d’annoncer aux offices régionaux de placement tous les postes à pourvoir dans les professions où le taux de chômage atteint ou dépasse un certain seuil.

11.En mars 2016, un comité a lancé l’initiative populaire « Oui à l’interdiction de se dissimuler le visage ».L’initiative a été déposée en octobre 2017. Elle prévoit l’interdiction de se dissimuler le visage dans l’espace public et dans tous les lieux accessibles au public. En juin 2018, le Conseil fédéral s’est prononcé contre cette initiative, car il appartient aux cantons d’introduire une telle réglementation. Pour répondre aux problèmes que peut poser la dissimulation du visage, il oppose un contre-projet indirect à l’initiative.Celui-ci prévoit qu’une personne est tenue de montrer son visage lorsque l’identification visuelle constitue l’unique moyen pour une autorité fédérale ou cantonale d’accomplir une tâche de droit fédéral sans efforts disproportionnés et précise que le fait de contraindre une personne à se dissimuler le visage est expressément punissable (en complétant la disposition sur la contrainte du code pénal). Au moment de la rédaction du présent rapport, le contre-projet du Conseil fédéral se trouvait encore en phase de consultation.

2.2Nouveautés importantes au niveau légal

12.Extension de la portée de la norme pénale contre le racisme (art. 261bis CP ; RS 311.0) : En réponse à une initiative parlementaire, la Commission des affaires juridiques du Conseil national a lancé en juin 2017 une procédure de consultation concernant un avant-projet de loi prévoyant d’étendre le délit pénal de discrimination raciale (art. 261bis CP) à la discrimination en raison de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre. Les résultatsde la consultation publiés en décembre 2017 montrent que cette proposition est plébiscitée. Le 3 mai 2018, la commission parlementaire compétente a donc décidé de soumettre au Conseil national un projet correspondant à l’avant-projet. Le Conseil fédéral a pris connaissance du projet le 15 août 2018. Dans son avis publié le même jour, il a en particulier relevé que la formulation ouverte de la notion d’identité de genre pourrait poser des problèmes d’application. Il a en conséquence proposé de renoncer à ce critère et de se limiter à celui de l’orientation sexuelle. Les débats parlementaires sont en cours.

13.Loi sur la nationalité suisse (LN ; RS 141.0) : Le 1er janvier 2018, le Conseil fédéral a mis en vigueur la LN révisée, soit la loi qui règle la naturalisation. Avec la révision, la durée de séjour nécessaire pour entamer une procédure de naturalisation ordinaire a été abaissée de 12 à 10 ans (le temps passé en Suisse entre la 8e et la 18e année de vie compte double, mais la durée totale du séjour en Suisse doit être d’au moins six ans). Les exigences en matière d’intégration ont également été précisées (cf. chap. 5.1).

14.Loi sur les étrangers (LEtr ; RS 142.20) : Le 16 décembre 2016, le Parlement a approuvé la modification de la LEtr visant à améliorer l’intégration. Sa mise en œuvre est prévue en deux volets. Le premier volet, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2018, inclut principalement la suppression de la taxe spéciale sur le revenu de l’activité lucrative pour les personnes relevant du domaine de l’asile (qui représentait un frein important à l’exercice d’une activité lucrative). Il a également modifié les règles d’octroi des forfaits d’intégration, qui dépend désormais de la réalisation d’objectifs stratégiques en matière de prestations et d’efficacité, et introduit une obligation de remboursement lorsque ces objectifs ne sont pas atteints. Le deuxième volet entrera en vigueur le 1er janvier 2019. Il comprend des adaptations de l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA) ainsi que la révision totale de l’ordonnance sur l’intégration des étrangers (OIE).

15.Loi sur l’asile (LAsi ; RS 142.31) : Lors du référendum du 5 juin 2016, la population a approuvé le projet de procédure d’asile accélérée à 66,8 % des voix. La révision vise à accélérer nettement le déroulement des procédures d’asile tout en s’assurant qu’elles restent conformes aux principes de l’État de droit. Désormais, quelque 60 % d’entre elles devront aboutir à une décision définitive dans un délai maximal de 140 jours, renvoi direct du requérant débouté compris. Ces procédures seront menées dans des centres fédéraux régionaux pour requérants d’asile. Les requérants d’asile dont la demande nécessite des clarifications continueront à être répartis entre les cantons. Ces procédures dites « étendues » (environ 40 % des procédures d’asile) devront donner lieu à une décision dans un délai d’un an, exécution du renvoi comprise en cas de rejet de la demande. Afin de s’assurer que les garanties procédurales inscrites dans la Constitution demeurent respectées malgré l’accélération, les requérants d’asile ont droit à une protection juridique étendue et gratuite. L’accélération des procédures d’asile permet une intégration plus rapide et favorise ainsi l’accès au marché du travail et la participation à la vie sociale. La loi révisée entrera en vigueur le 1er mars 2019.

16.Code de procédure civile suisse (CPC, RS 272) : Au printemps 2018, le Conseil fédéral a mis en consultation (en réponse à plusieurs demandes du Parlement) un projet d’adaptation du code de procédure civile suisse. Parmi les propositions centrales, on peut citer la réduction des risques liés aux coûts de la procédure (avances de frais divisées par deux) ainsi que l’allégement de la mise en œuvre collective des droits (création d’une procédure de transaction de groupe et renforcement du droit d’action des organisations avec prétention en réparation des dommages collectifs ; cf. ch. 38 et. 120 ss).

2.3Nouveautés importantes au niveau cantonal

17.Depuis le 1er janvier 2015, le canton de Berne dispose d’une loi sur l’intégration de la population étrangère (LInt). Cette loi prévoit notamment que « l’encouragement de l’intégration est fondé sur le principe que personne ne peut être discriminé, notamment pour une question de race, de couleur de peau, de sexe, d’âge, de langue, d’origine, de mode de vie, d’orientation sexuelle, de convictions politiques ou religieuses ou en raison d’un handicap corporel, mental ou psychique » (art. 4, al. 2, let. d, LInt). Le canton et les communes doivent veiller à prévenir la discrimination envers les personnes étrangères comme envers celles de nationalité suisse et à la combattre, notamment en prenant des mesures de communication et de sensibilisation ciblées et en offrant des prestations de conseil pour les personnes concernées (art. 14, al. 1 et 2, LInt). Si cette base légale ne permet pas de faire valoir de prétentions, elle revêt tout de même un caractère programmatique et souligne explicitement que la protection contre la discrimination fait partie de la politique cantonale d’intégration.

18.Dans le canton de Vaud, l’art. 100 du Règlement d’application de la loi du 7 juin 2011 sur l’enseignement obligatoire (RLEO) est entré en vigueur le 2 juillet 2012 et réaffirme explicitement la volonté de refuser tout acte à caractère raciste.

19.Le 1er juillet 2016, le Tessin a mis en vigueur une disposition légale interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public. Six mois après l’entrée en vigueur, un premier bilan dénombrait six procédures ouvertes pour infraction à la loi et une dizaine d’avertissements. Le 23 septembre 2018, les citoyens du canton de St-Gall se sont également prononcés en faveur d’une interdiction de se dissimuler le visage dans l’espace public. D’autres cantons discutent actuellement d’une interdiction similaire. Après un vaste débat, la Landsgemeinde du canton de Glaris s’est prononcée contre une telle interdiction le 7 mai 2017.

2.4Nouveautés au niveau du droit international

20.Dans la période sous revue, la Suisse a ratifié ou envisage de ratifier les instruments de droit international suivants :

•Convention du 13 décembre 2006 relative aux droits des personnes handicapées : la Suisse a adhéré à la convention le 15 avril 2014 (en vigueur depuis le 15 mai 2014) ;

•Convention internationale du 20 décembre 2006 pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées : la Suisse a ratifié la convention le 2 décembre 2016, un mois après avoir adopté l’ordonnance concernant la loi fédérale relative à la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (entrée en vigueur le 1er janvier 2017) ;

•Convention du Conseil de l’Europe du 16 mai 2005 sur la lutte contre la traite des êtres humains : la Suisse a ratifié la convention le 17 décembre 2012 (en vigueur depuis le 1er avril 2013) ;

•Convention du Conseil de l’Europe du 25 octobre 2007 sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (Convention de Lanzarote) : la Suisse a ratifié la convention le 18 mars 2014 (en vigueur depuis le 1er juillet 2014) ;

•Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications : la Suisse a adhéré à ce protocole facultatif (en vigueur depuis le 24 juillet 2017) ;

•Convention du Conseil de l’Europe du 11 mai 2011 sur la prévention de la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) : le 14 décembre 2017, la Suisse a déposé l’instrument de ratification. La convention est entrée en vigueur pour la Suisse le 1er avril 2018 ;

•Protocole no 15 portant amendement à la Convention de sauvegarde des Droits de l’homme et des Libertés fondamentales : la Suisse a ratifié le protocole le 15 juillet 2016 (il n’entrera en vigueur qu’une fois qu’il aura été ratifié par les 47 États membres du Conseil de l’Europe) ;

•Convention no 189 de l’Organisation internationale du travail sur les travailleuses et travailleurs domestiques : la Suisse a ratifié cette convention le 12 novembre 2014 (en vigueur depuis le 12 novembre 2015).

3.Politique générale de lutte contre la discrimination raciale

21.La politique générale de lutte contre la discrimination raciale en Suisse s’articule autour des axes suivants : ancrage de la protection contre la discrimination raciale aux échelons cantonal et communal dans le cadre des programmes d’intégration cantonaux (PIC) ; protection des populations issues de minorités ou de la migration ; protection légale ; ouverture des institutions et « mainstreaming » ; promotion d’initiatives issues de la population; observation. Le SLR est chargé de la conception et de la coordination des mesures au niveau fédéral ; la mise en œuvre incombe en revanche aux différents services spécialisés compétents. Par ailleurs, les commissions extraparlementaires jouent un rôle important.

3.1Protection légale

22.Alors que le Conseil fédéral, en accord avec les conclusions du Centre suisse de compétence pour les droits humains (CSDH), estime que le cadre légal actuel prévoit globalement une bonne protection, il a constaté, en 2016, que les instruments du droit privé, notamment, ne sont pas encore suffisamment connus et utilisés, et qu’ils pourraient être améliorés par des mesures ciblées. Pour plus d’informations, voir la partie 2 (chap. 2 et 6).

3.2Protection des minorités et des personnes migrantes

23.Certains groupes de population sont particulièrement susceptibles d’être victimes de discrimination raciale ou de comportements racistes. Il est donc important de compléter les instruments généraux de lutte contre la discrimination raciale avec des démarches qui tiennent compte des spécificités relatives à certains groupes particulièrement vulnérables. Les mesures prises par la Suisse sont présentées dans le chapitre 5.3.

3.3Observation

24.Afin de pouvoir piloter les mesures et observer l’évolution de la situation, il faut disposer de données adéquates. La Suisse dispose d’un dispositif de monitorage qui intègre les différentes sources de données existantes (correspondant aux multiples facettes de la discrimination raciale) ; elle a aussi développé des instruments de mesure permettant d’identifier des tendances concernant les attitudes de la population suisse face aux phénomènes du racisme et de la discrimination raciale (pour plus d’informations, cf. chap. 2.2.).

3.4Promotion des initiatives issues de la société

25.Dans tous les domaines de lutte contre la discrimination, la société a un rôle clé à jouer. Le SRL soutient chaque année des projets à hauteur d’environ un million de francs dont un tiers est consacré à des projets scolaires. Les subventions permettent aussi de soutenir des projets traitant des thèmes plus spécifiques comme p. ex. la discrimination multiple de requérants d’asile LGBTI.

3.5Ouverture des institutions et « mainstreaming »

26.La responsabilité de la mise en œuvre des mesures de protection contre la discrimination raciale incombe aux autorités compétentes (p. ex. l’Office fédéral de la santé publique, l’Office fédéral du logement, le Secrétariat d’État aux migrations, l’Office fédéral des assurances sociales, etc.). On peut par exemple citer le projet « Swiss Hospitals for Equity », dans lequel les hôpitaux affiliés ont développé des mesures pour assurer à la population migrante l’accès aux prestations adéquates. Aux niveaux cantonal et communal, les PIC prévoient aussi que les délégués à l’intégration collaborent directement avec les structures ordinaires afin d’y promouvoir la protection contre la discrimination raciale.

3.6Ancrage de la protection contre la discrimination aux échelons cantonal et communal

27.La discrimination raciale se manifeste souvent dans des domaines qui relèvent principalement de la compétence des cantons, des communes et des villes (écoles, système de santé, politique sociale, police, etc.). De ce fait, les mesures doivent être adaptées à leurs réalités respectives, en associant à la démarche les organisations locales. Avec les programmes d’intégration cantonaux, la Suisse dispose, depuis 2014, d’un instrument qui fixe, dans le domaine de la discrimination, des objectifs communs à tous les cantons, mais dont la mise en œuvre est adaptée aux réalités locales. Les mesures qui en découlent doivent explicitement bénéficier à tous les groupes de la population, notamment aux migrants, mais aussi aux ressortissants suisses victimes de discrimination raciale. Ainsi, elles s’inscrivent dans la stratégie de l’agenda 2030 de développement durable, notamment en ce qui concerne l’objectif 10.2 (pour plus d’informations sur les PIC, cf. chap. 7.2).

3.7Apports des commissions extraparlementaires

28.Les deux commissions extraparlementaires compétentes en matière de discrimination raciale, la CFR et la CFM, sont des organes d’observation et de conseil indépendants de l’administration, n’exerçant pas eux-mêmes de tâches étatiques. Ainsi, la CFR a pour mission d’observer de manière critique la situation dans ce domaine, au niveau de l’État et au sein de la société. À l’écoute des besoins et des préoccupations des minorités, la CFR peut exprimer librement son avis sans être tenue de suivre la position des pouvoirs publics ou une ligne politique. Pour sa part, la CFM a pour mission légale de se pencher sur les questions sociales, économiques, culturelles, politiques, démographiques et légales que le séjour des étrangers en Suisse peut soulever. Les deux commissions conseillent le Conseil fédéral et l’administration et publient des rapports, des avis et des recommandations ; elles ont ainsi un rôle important à jouer en ce qui concerne l’élaboration de mesures contre la discrimination raciale.

29.Conformément à son mandat, la CFR définit ainsi les points forts de ses activités : prévention et sensibilisation ; analyse et recherche; information, communication, conseil ; recommandations/avis; monitorage. Les thèmes de la CFR s’inscrivent dans la durée, si bien que les activités correspondantes s’étendent parfois sur plusieurs années. Voici quelques exemples de ses activités pour la période sous revue :

•La campagne « Une Suisse à nos couleurs », réalisée en 2015 à l’occasion du vingtième anniversaire de la CFR, a apporté une contribution importante à la lutte contre le discours de haine et la discrimination raciale sur Internet et les réseaux sociaux ;

•La CFR a organisé, en 2017, un colloque public à l’Université de Fribourg intitulé « Hostilité envers les musulmans : société, médias, politique » qui a réuni experts, praticiens et représentants d’ONG. Grâce à diverses études et observations du terrain, les intervenants ont mis en lumière l’évolution du discours dans le débat public et le regard actuel porté sur les musulmans en Suisse ;

•En 2017 toujours, la CFR a publié une étude juridique de la Haute école spécialisée de Zurich qui examine le phénomène du racisme anti-Noirs en Suisse. Sur la base des résultats de l’étude, la commission a formulé une série de recommandations ;

•Deux fois par an, la CFR publie son bulletin « TANGRAM » avec un dossier thématique qui contribue à la discussion et à la formation de l’opinion. Voici quelques thèmes traités dans la période sous revue : sport et racisme, hostilité envers les musulmans, l’antisémitisme, racisme anti-Noirs, Yéniches, Manouches/Sintés et Roms en Suisse, accès à la justice ou encore racisme à l’école.

30.La CFM traite de thèmes qui s’étendent de la protection des réfugiés à la migration économique en passant par la cohésion sociale et les questions transnationales. La CFM publie deux fois par an la revue terra cognita dédiée à l’intégration et à la migration et organise une conférence annuelle sur un thème d’actualité en lien avec la migration. Sur son site, elle propose par ailleurs des informations détaillées visant à sensibiliser les lecteurs. Enfin, en 2016, elle a lancé l’exposition itinérante FUIR en collaboration avec la DDC, le SEM et le Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU. Projets et recommandations de la CFM pour la période sous revue:

•Naturalisation : propositions et recommandations pour un droit de cité contemporain (2012) ;

•Vieillesse et migration (2012) ;

•Séjours temporaires pour activité lucrative (2013) ;

•Octroi de protection (recommandation pour un nouveau statut de protection) (2014) ;

•Économie et travail en point de mire (2016) ;

•Restructuration du domaine de l’asile (2017) ;

•Intégration – Pas un instrument de mesure mais la tâche de tous ! (2017).

Deuxième partie : Examen de l’application des articles 1 à 7 de la Convention

31.Les commentaires des articles se réfèrent aux recommandations relatives aux septième, huitième et neuvième rapports périodiques de la Suisse formulées dans les observations finales adoptées par le comité le 20 février 2014 lors de sa 2291e séance.

1.Article 1: Définition de la discrimination raciale

1.1Application de la Convention en droit interne

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 6a des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse d’adopter une définition claire et complète de la discrimination raciale, directe comme indirecte, couvrant tous les domaines de la vie privée et publique.

32.Les informations fournies dans les septième, huitième et neuvième rapports de la Suisse restent d’actualité. L’ordre juridique suisse est caractérisé par son attachement à la tradition moniste. Dès la ratification de la Convention, le Tribunal fédéral a d’ailleurs commencé à s’y référer dans sa jurisprudence. La reconnaissance de la procédure de communication individuelle au sens de l’art. 14 CERD a par ailleurs contribué à assurer un respect encore plus rigoureux des dispositions de la Convention.

1.2Données en matière de discrimination raciale en Suisse

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 9 des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse de mettre en place un système efficace de collecte de données reposant sur des indicateurs de diversité ethnique recueillis sur la base de l’anonymat et de l’auto-identification des personnes et des groupes en vue de constituer une base empirique appropriée pour l’établissement des politiques et d’améliorer ainsi l’exercice par tous, dans des conditions d’égalité, des droits consacrés par la Convention.

33.Le racisme et la discrimination raciale recouvrant une grande diversité de phénomènes, les données qui s’y rapportent proviennent de différentes sources. Différents organes publics enregistrent les actes visés par le droit qui sont à l’origine d’une plainte, d’une procédure ou d’une condamnation. Différents médias et organisations indépendantes (p. ex. centres de conseil ou services recueillant des plaintes) répertorient également des incidents dont la justice n’est pas nécessairement saisie. Enfin, des enquêtes représentatives fournissent des renseignements à la fois sur les discriminations dont sont victimes les personnes interrogées et sur les opinions de la population en matière de racisme et de discrimination raciale.

34.Afin d’offrir un aperçu de la situation, le SLR publie, depuis 2012, tous les deux ans un rapport sur la discrimination raciale en Suisse. Ce rapport couvre les différents domaines de vie et tient compte des groupes de population particulièrement vulnérables. Le dernier rapport est sorti en octobre 2017.

35.Depuis 2016, l’OFS réalise, également tous les deux ans, l’enquête « Vivre ensemble en Suisse », qui porte sur les attitudes racistes ou hostiles dans la population suisse ainsi que sur la discrimination vécue par les personnes sondées. Dès la troisième enquête en 2020, les résultats seront suffisamment parlants pour identifier les tendances et adapter les mesures en conséquence.

36.La Suisse ne classe pas la population en groupes ethniques dans la statistique publique. En cela, la pratique suisse est conforme à la pratique au niveau européen dans la mesure où la collecte d’informations statistiques relatives à la « race » ou à l’ethnie et, par conséquent, la différenciation/catégorisation de la population en plusieurs groupes « raciaux » ou ethniques n’est pas une pratique courante, et les concepts de « race » et d’ethnie ne sont pas utilisés en tant que concepts statistiques sociaux ou démographiques (sauf au Royaume-Uni). À noter que la collecte de ce type de données ne fait pas consensus parmi les groupes potentiellement concernés. Alors que certains participants au colloque sur le racisme anti-Noirs organisé en mai 2018 étaient favorables à la collecte de données sur les personnes noires en Suisse, la Fédération suisse des communautés israélites (FSCI) s’est montrée plus réservée dans le cadre de la procédure de consultation du présent rapport, en faisant remarquer que le recensement annuel de la population réalisé par l’OFS depuis 2010 permet déjà de collecter des indicateurs de ce type, et que de nombreuses personnes n’aiment pas donner d’informations sur leur appartenance.

2.Article 2 : Condamnation de la discrimination raciale

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 6b des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse d’adopter une disposition à caractère général dans le droit civil et administratif interdisant la discrimination raciale directe et indirecte dans tous les domaines de la vie privée et publique, et d’offrir des recours utiles aux victimes de cette discrimination.

37.La Suisse ne dispose pas d’une législation globale destinée à lutter contre toutes les formes de discrimination. Ceci s’explique notamment par la spécificité de l’ordre juridique suisse, qui se caractérise par son attachement à la tradition moniste et par le fédéralisme, comme expliqué dans le document de base et les rapports précédents.

38.Dans une étude sur l’accès à la justice en cas de discrimination publiée en 2015, le Centre suisse de compétences pour les droits humains (CSDH) constate qu’il n’est pas recommandé de créer une loi générale contre la discrimination en Suisse. Les problématiques sont très différentes selon les domaines, et il serait délicat de créer une loi propre à toutes les couvrir. En outre, une loi générale contre la discrimination pourrait remettre les acquis en question et affaiblir le monitorage, les conseils et le soutien établis dans chaque domaine. Par ailleurs, le Parlement suisse a systématiquement rejeté toute intervention parlementaire visant à créer une loi contre la discrimination raciale qui engloberait tous les domaines de la vie publique et privée.

39.Cependant, la rareté des actions en justice pourrait indiquer que les victimes méconnaissent les instruments juridiques dont elles disposent ou n’en font pas usage, au vu des obstacles procéduraux. Le Conseil fédéral a examiné et mis en œuvre des mesures pour remédier à cette situation (cf. chap. 6).

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 6c des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse d’inclure dans le code pénal une disposition pour que la commission d’une infraction avec une motivation ou une intention raciste constitue une circonstance aggravante passible d’une peine plus lourde conformément à la Recommandation générale no 31.

40.Le droit suisse ne comprend pas de définition légale spécifique du crime de haine (hate crime). Par ailleurs, il ne prévoit aucun élément constitutif d’une infraction qui qualifierait un délit quelconque commis pour un motif raciste de crime de haine, qui entrerait ainsi dans une catégorie particulière, serait instruit de manière spéciale, puis sanctionné plus sévèrement qu’un autre délit. La motivation raciste est toutefois régulièrement prise en compte dans la quotité de la peine au niveau individuel (p. ex. dans l’évaluation de la culpabilité au sens de l’art. 47, al. 2, CP, et dans le concours d’infractions au sens de l’art. 49 CP), notamment dans le cas d’une infraction contre la vie et l’intégrité corporelle (art. 111 ss CP), d’un délit contre l’honneur (art. 173 ss CP), d’un crime ou d’un délit contre la liberté (art. 180 ss CP), d’une atteinte à la liberté de croyance et des cultes (art. 261 CP) ou d’une discrimination raciale (art. 261 bis CP). Aucune modification légale n’est donc nécessaire pour tenir compte de manière appropriée des motivations racistes dans la fixation de la peine.

41.Depuis 2009, la Statistique policière de la criminalité (SPC) enregistre, selon des principes uniformes de saisie et d’exploitation, les infractions dénoncées dans toute la Suisse ainsi que le taux d’élucidation des cas. La SPC peut signaler, pour toutes les infractions, l’existence d’une motivation raciste qui ne tombe pas sous le coup de l’art. 261 bis CP. À noter cependant que la saisie de cette variable est optionnelle. Concernant particulièrement le recensement statistique des crimes haineux fondés sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre, l’expression de genre ou les caractéristiques sexuelles, le Conseil fédéral dans sa réponse à la motion Quadranti 17.3667 a rappelé qu’il estime important de promouvoir l’égalité et de continuer à éliminer toute discrimination, notamment celle basée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, et d’obtenir des chiffres afin de mettre en œuvre des mesures appropriées. Cependant, une récolte efficace, uniforme et obligatoire de données dans la SPC reste difficile.

2.1Initiatives populaires

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 8 des observations finales

Le Comité encourage la Suisse à intensifier ses efforts pour mettre en place un mécanisme efficace et indépendant chargé d’examiner la compatibilité des initiatives populaires avec les obligations de l’État partie en vertu du droit international des droits de l’homme, notamment de la Convention. Il lui recommande aussi de déployer des efforts accrus à tous les niveaux pour informer largement l’opinion de tout conflit entre un projet d’initiative et les obligations de l’État partie au regard des droits de l’homme ainsi que des conséquences qui pourraient en découler.

42.Le droit des citoyens de modifier la Constitution au moyen d’une initiative est un élément fondamental de la démocratie suisse. Le Parlement a rejeté, en 2016, un paquet de mesures législatives visant à améliorer la compatibilité des initiatives populaires avec le droit international non contraignant. La Suisse continuera d’honorer ses obligations en matière de droits humains et de résoudre les conflits potentiels entre sa Constitution et les droits humains au cas par cas et dans le respect de la volonté populaire.

43.Les initiatives populaires doivent respecter les règles impératives du droit international (art. 139, al. 3, art. 193, al. 4 et art. 194, al. 2, Cst.). Si une initiative populaire ne respecte pas les règles impératives du droit international, elle est déclarée nulle par le Parlement et elle n’est pas soumise au vote du peuple et des cantons.

44.La question de la compatibilité d’une initiative populaire avec les engagements internationaux de la Suisse est d’abord examinée par le Conseil fédéral et le Parlement. Le résultat de cet examen est présenté dans le message du Conseil fédéral à l’attention du Parlement, avec la recommandation d’accepter ou de rejeter l’initiative populaire concernée. Le cas échéant, la question de la compatibilité avec le droit international est également traitée dans les explications du Conseil fédéral qui sont envoyées avant chaque votation à tout citoyen suisse en âge de voter.

2.2Institution nationale des droits de l’homme

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 10 des observations finales

Le Comité rappelle la précédente recommandation qu’il avait faite à la Suisse d’envisager d’établir une institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales (Principes de Paris). Il lui recommande aussi de doter la CFR des ressources financières et humaines appropriées.

45.Dans le cadre d’un projet pilote de cinq ans, la Confédération a acheté au Centre suisse de compétence pour les droits humains des prestations pour un montant d’un million de francs par an. Depuis le début de ses activités en 2011, le centre a mené de nombreux projets, en particulier des études, des journées thématiques, des formations et des publications (cf. p. 54 et 55 CDD). Sur la base d’une évaluation, le Conseil fédéral a décidé, en 2015, de prolonger le projet pilote pour une durée de cinq ans, et il a chargé les départements responsables (DFAE et DFJP) de lui soumettre différentes options pour une réglementation durable. Ces options ont été évaluées par le Conseil fédéral en juin 2016.

46.Les services compétents de l’administration fédérale oeuvrent actuellement à établir les fondements pour la création d’une institution nationale des droits de l’homme.

47.Depuis 2001, la lutte contre le racisme et la discrimination est institutionnalisée au niveau fédéral. Le SLR, rattaché au DFI, est responsable de la conception et de la coordination de la politique nationale de lutte contre le racisme. La définition et la mise en œuvre des mesures dans les différents domaines de la vie quotidienne et aux niveaux cantonal et communal sont du ressort des services étatiques concernés. Les commissions extraparlementaires sont un instrument de contrôle important dans ce système : composées de spécialistes et de personnes directement concernées par les thématiques abordées, elles n’ont pas pour mission de définir la politique étatique en matière de protection contre la discrimination raciale, mais d’observer d’un œil critique l’action de l’État et de lui apporter leur expertise.

48.Pour cette raison, la CFR peut librement enregistre les besoins et les demandes des minorités et prendre position sans devoir suivre une ligne étatique ou politique. Elle suit la vie sociale et politique, et elle rencontre régulièrement les différents groupes spécifiquement concernés par la discrimination et le racisme. Elle observe aussi l’application de la norme pénale contre la discrimination raciale (art. 261 bis CP). Entre 2011 et 2018, le budget annuel de la CFR a oscillé entre 180 000 et 200 000 francs.

49.Dans la décision d’institution de la CFR du 22 mai 2013, le Conseil fédéral a renforcé l’indépendance de la commission. Les communications externes ne doivent plus être soumises à l’approbation du secrétariat général du DFI, mais uniquement portées à la connaissance de ce dernier. Pour tout ce qui touche aux affaires du Parlement et du Conseil fédéral, la CFR est directement impliquée par le biais de la consultation des offices. Elle est habilitée à présenter des prises de position indépendantes devant les organes de l’ONU, du Conseil de l’Europe, de l’OSCE et d’autres organisations. Par ailleurs, la CFR peut dénoncer des cas et entretenir des contacts avec les services officiels cantonaux, les partis et d’autres organisations dans le cadre de son mandat. Elle peut également commander des avis de droit sur des questions de droit de portée générale, faire appel à des experts et réaliser des audits pour ses délibérations.

50.Le Conseil fédéral considère que ce modèle et la répartition des tâches entre la CFR et le SLR dans le domaine de la lutte contre le racisme ont fait leurs preuves jusqu’ici. C’est pour ces raisons que le Conseil fédéral a systématiquement pris position contre toute initiative parlementaire visant à démanteler la CFR ou à l’affaiblir.

2.3Réserve à l’article 2

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 11 des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse d’envisager de retirer ses réserves au paragraphe 1 a) de l’art. 2 de la Convention. Dans le cas où la Suisse déciderait de maintenir ses réserves, il lui demande de préciser pourquoi elle juge ces réserves nécessaires.

51.La Suisse est partie à la plupart des grandes conventions relatives aux droits de l’homme protégeant l’individu contre la discrimination. Le Conseil fédéral examine régulièrement, à la lumière de la situation juridique et politique du moment, s’il serait possible de ratifier d’autres instruments internationaux de protection des droits humains ou de retirer des réserves. La liste des conventions nouvellement ratifiées figure au ch. 20.

52.Les raisons ayant amené la Suisse à formuler une réserve concernant l’accès au marché du travail ont été explicitées en détail dans le rapport initial de la Suisse du 14 mars 1997 (ch. 50 ss) et restent pertinentes à ce jour. La distinction entre ressortissants des pays membres de l’UE/AELE et ressortissants de pays tiers, qui découle du système binaire d’admission des étrangers, repose sur des accords bilatéraux avec les pays concernés ; elle est considérée comme licite par la Cour européenne des droits de l’homme. Soucieuse de conserver une certaine marge de manœuvre pour l’avenir, la Suisse juge préférable de maintenir la réserve.

3.Article 3 : Condamnation de l’apartheid

53.Au niveau national, la Suisse poursuit sa politique de promotion de l’intégration et de lutte contre la ségrégation par le biais de plusieurs programmes et mesures, dont il convient de citer notamment les suivants :

54.Programme« Projets urbains – Intégration sociale dans des zones d’habitation » (2008 à 2015) : Par ce programme, la Confédération a aidé les communes, avec le soutien des cantons, à améliorer la qualité de vie dans des quartiers d’habitation aux prises avec des difficultés particulières et à y promouvoir l’intégration sociale et réduire la ségrégation résidentielle. Se fondant sur le bilan positif de cette initiative, les organismes publics et privés s’emploient désormais à en pérenniser de nombreuses mesures. Le Conseil fédéral a confié à l’Office fédéral du développement territorial (ARE) le soin de concevoir un nouveau programme dans le cadre de la Politique des agglomérations 2016+ de la Confédération. Intitulé « Cohésion dans les quartiers », ce programme a pour but de garantir, en collaboration avec les communes, l’intégration dans la vie sociale des divers groupes de population et de tenir compte des besoins variés d’une société plurielle.

55.Programme « Periurban » : Par ce programme, la CFM soutient la promotion de l’intégration dans des régions qui n’ont jusqu’à présent pas ou peu travaillé pour la cohésion sociale ou dont les mesures n’ont pas bénéficié du soutien de la Confédération. La troisième et dernière phase de ce programme, qui a débuté en 2016, permettra de soutenir jusqu’en 2020 des communes rurales qui souhaitent, par des projets novateurs, renforcer la cohésion sociale et la participation de la population.

56.Programme « Citoyenneté - échanger, créer, décider » :La CFM encourage de nouvelles formes de participation grâce à des projets modèles fondés sur le concept de citoyenneté et qui visent en premier lieu à promouvoir la codécision et la participation de tous, indépendamment de la nationalité. Le programme cible les objectifs suivants : se forger une opinion, exprimer sa volonté, renforcer ses connaissances des principes démocratiques et des droits fondamentaux. Bénéficient d’un soutien les projets qui permettent à un public aussi large que possible de prendre part au débat public et aux processus de décision.

57.Par ailleurs, les mesures prises dans le domaine de l’éducation et décrites dans les chapitres 5.3. et 7.2. contribuent également à la lutte contre les phénomènes de ségrégation et d’exclusion sociale, notamment des minorités ou des populations issues de la migration.

4.Article 4 : Mesures visant à punir certains actes de discrimination raciale

4.1Réserve à l’article 4

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 11 des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse d’envisager de retirer ses réserves à l’art. 4 de la Convention. Dans le cas où la Suisse déciderait de maintenir ses réserves, il demande de préciser pourquoi il juge ces réserves nécessaires.

58.En Suisse, il n’y a pas de contrôle préalable des organisations en voie de formation. Rendre punissable la création ou la direction d’un groupement qui promeut le racisme, le soutien à ce groupement ou la participation à ses activités, présupposerait que le destinataire d’une telle disposition pénale reconnaisse lui-même par avance le caractère illicite de l’organisation (qui n’est pas toujours évident) et renonce de ce fait à en devenir membre, faute de quoi il s’expose à une poursuite pénale. Cela ne serait guère compatible avec le droit fondamental de la liberté d’association (art. 23 Cst.). En 2003, la proposition d’introduire une telle interdiction a été rejetée par la plupart des participants à la procédure de consultation, et il n’y a pas d’éléments nouveaux permettant de penser que la situation ait changé.

59.Cependant, le code civil offre la possibilité au juge, à la demande de l’autorité compétente ou de toute personne intéressée, de dissoudre une association dont le but est illicite ou contraire aux mœurs (art. 78 CC), par exemple les organisations ayant pour but de promouvoir une idéologie raciste.

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 12c des observations finales

Le Comité recommande également de sensibiliser le personnel de la justice, notamment les membres de l’appareil judiciaire, aux normes internationales visant à garantir la protection de la liberté d’opinion et d’expression et à lutter contre les discours de haine raciale.

60.En Suisse, les droits humains et la législation en matière de discrimination raciale constituent une matière obligatoire dans les facultés de droit du pays, et les procureurs et les juges permanents doivent être titulaires d’un diplôme d’études en jurisprudence pour exercer leur métier. Diverses universités proposent des cours et séminaires spécifiques sur ces thèmes ou envisagent de le faire (p. ex. : Universités de Genève ou de Bâle).

61.Il n’existe pas en Suisse de filière de formation obligatoire pour les juges. L’organisation des autorités judiciaires cantonales et la formation des magistrats qui les composent relèvent des cantons. S’agissant des procureurs et des magistrats de la Confédération, la législation n’impose aucune formation particulière (cf. art. 42 de la loi fédérale sur l’organisation des autorités pénales de la Confédération).

62.En matière de sensibilisation aux normes internationales, les fonctionnaires de la justice ont accès à des formations continues. À ce titre, le Centre de formation aux droits humains (Zentrum für Menschenrechtsbildung ZMRB) de la Haute école pédagogique de Lucerne dispose d’une large expertise en matière d’enseignement des droits humains. D’autres institutions, telles que la Fondation pour la formation continue des juges suisses, proposent également des cours de perfectionnement aux juges, greffiers, procureurs et juges d’instruction. Par ailleurs, le CSDH organise régulièrement des colloques, notamment à l’intention du personnel judiciaire.

63.Pour des informations complémentaires, nous renvoyons aux « Informations complémentaires de la Suisse sur trois observations finales du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale concernant ses septième, huitième et neuvième rapports présentés au Comité, conformément au paragraphe 23 des recommandations finales CERD/C/CHE/CO/7 – 9 », ad. ch. 12c.

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 12d des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse de prendre sans tarder des mesures, en complément des poursuites judiciaires, en cas de propos ou d’actes racistes, par exemple le rejet catégorique des discours de haine par de hauts responsables et la condamnation des idées haineuses exprimées.

64.L’incitation publique à la haine ou à la discrimination, basée sur l’appartenance raciale, ethnique ou religieuse d’une personne ou d’un groupe de personnes, est punissable d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire (art. 261 bis CP). Avec la mise en œuvre de l’initiative parlementaire Reynard, cette disposition inclurait également la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre (cf. ch. 12). Au niveau du droit civil, l’art. 28 CC permet de sanctionner les atteintes à la personnalité induites par un discours de haine, lorsque la personne est directement agressée. Le dispositif de conseil mis en place dans les cantons dans le cadre des programmes cantonaux d’intégration (PIC) a pour but de rendre ces instruments plus efficaces.

65.D’une manière générale, le nombre et le type de cas de racisme portés devant les tribunaux pour violation de l’art. 261 bis CP restent plutôt stables dans le temps (41 décisions en 2016, 57 en 2015, 22 en 2014 et 47 en 2013). Seule une minorité d’affaires portées devant un tribunal implique les médias (selon le recueil de décisions 261 bis CP de la CFR : 2 en 2016, 8 en 2015) ou des acteurs politiques (0 en 2016, 1 en 2015). En revanche, une part importante des cas relevés concerne des propos racistes dans la communication électronique (12 % des cas relevés entre 1995 et 2016).

66.Devant ce phénomène, les mesures de sensibilisation et de prévention doivent impérativement compléter les mesures de répression. Par ailleurs, il est important que les autorités pratiquent et propagent un contre-discours résolument axé sur le vivre ensemble (counter speech). Les conseillers fédéraux interviennent régulièrement pour rappeler la nécessité de préserver le vivre ensemble et de ne pas succomber aux appels à l’intolérance. Le conseiller fédéral Alain Berset, chef du Département fédéral de l’intérieur et président de la Confédération en 2018, a tenu de nombreux discoursappelant à la cohésion et au vivre ensemble.

67.Pour des informations complémentaires, nous renvoyons aux « Informations complémentaires de la Suisse sur trois observations finales du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale concernant ses septième, huitième et neuvième rapports présentés au Comité, conformément au paragraphe 23 des recommandations finales CERD/C/CHE/CO/7 – 9 », ad. ch. 12d.

5.Article 5 : Élimination de la discrimination raciale touchant à certains droits de l’homme

5.1Naturalisation

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 13 des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse de faire en sorte que toute révision de la loi sur la citoyenneté suisse n’ait pas de conséquences disproportionnées et discriminatoires pour certains groupes. Il rappelle en outre sa précédente recommandation à la Suisse d’adopter des normes en matière d’intégration aux fins du processus de naturalisation, conformément à la Convention, et de prendre toutes les mesures efficaces et pertinentes nécessaires pour veiller à ce que, dans l’ensemble du territoire de la Suisse, les demandes de naturalisation ne soient pas rejetées pour des motifs discriminatoires, notamment en instaurant une procédure de recours indépendante et uniforme dans tous les cantons.

68.En complément aux « Informations complémentaires de la Suisse sur trois observations finales du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale concernant ses septième, huitième et neuvième rapports présentés au Comité, conformément au paragraphe 23 des recommandations finales CERD/C/CHE/CO/7 – 9 » (ad. ch. 13), les développements suivants ont eu lieu.

69.La révision de la loi sur la nationalité suisse (LN), entrée en vigueur le 1er janvier 2018, a permis d’harmoniser les critères de naturalisation au niveau national, ce qui garantit une procédure uniforme sur l’ensemble du territoire. La LN révisée prévoit que le titulaire d’une autorisation d’établissement peut être naturalisé s’il vit depuis au moins dix ans en Suisse et qu’il y est bien intégré. L’intégration est considérée comme réussie dès lors que la personne est apte à communiquer dans une langue nationale, qu’elle respecte l’ordre et la sécurité publics, ainsi que les principes fondamentaux de la Constitution, qu’elle participe à la vie économique ou qu’elle acquiert une formation et qu’elle œuvre à l’intégration de sa famille. Les candidats à la naturalisation doivent en outre s’être familiarisés avec les conditions de vie en Suisse et ne doivent pas mettre en danger la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse. L’ordonnance d’exécution détaille les critères d’intégration déterminants pour une naturalisation, et précise la pratique en cas de condamnations antérieures et de dépendance à l’aide sociale. La loi prévoit désormais explicitement que les autorités compétentes prennent en compte la situation personnelle des candidats à la nationalité lors de l’appréciation des compétences linguistiques et de l’autonomie financière. Un handicap, une maladie ou une autre raison personnelle majeure empêchant de remplir ces critères ne représentent pas des motifs suffisants pour rejeter d’entrée la demande de naturalisation (art. 12, al. 2, LN).

70.La naturalisation facilitée des jeunes étrangers de la troisième génération a été acceptée en votation populaire le 12 février 2017, à 60,4 %. Ainsi, les jeunes étrangers de la troisième génération qui ont vécu toute leur vie en Suisse et ont généralement un lien plus fort avec la Suisse qu’avec le pays d’origine de leurs grands-parents peuvent bénéficier d’une procédure de naturalisation nettement moins longue et moins coûteuse que la procédure ordinaire.

71.En vue de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions, les autorités fédérales responsables de la naturalisation ont publié de nombreuses informations sur leur site Internet. Elles ont notamment élaboré un guide sur le droit de cité détaillant les différentes procédures de naturalisation et les conditions applicables. Avant même l’entrée en vigueur du nouveau droit, la division Nationalité du SEM a organisé de nombreuses conférences et réunions d’information avec les cantons et les milieux concernés. Les autorités cantonales ont ainsi été en mesure d’informer à leur tour de manière appropriée les services communaux responsables des naturalisations.

72.Malgré ce travail d’information, il est inévitable que l’introduction du nouveau droit suscite des questions à tous les niveaux. Les autorités fédérales les ont recensées dans une FAQ disponible en ligne. Les personnes souhaitant acquérir la nationalité suisse et les autorités compétentes peuvent également s’informer par le biais des fiches sur les différentes procédures que la Confédération a élaborées et largement diffusées.

73.Les modifications légales touchent aussi les cantons et les communes, le but étant de mettre en place des critères de nationalisation uniformes afin que les communes puissent remplir leurs tâches (notamment vérification des critères d’intégration et des autres conditions de naturalisation) de manière transparente, conforme à l’État de droit, correcte et équitable. Les nouveaux instruments doivent permettre d’évaluer le niveau d’intégration des candidats de manière équitable et non discriminatoire (p. ex. tests de langue uniformisés).

74.La CFM a elle aussi élaboré une documentation accessible mentionnant la procédure de naturalisation facilitée et ses différentes étapes, ainsi que les personnes qui peuvent en bénéficier. À cet effet, elle a aussi réalisé un clip d’animation de 2 mn et un guide « étape par étape » disponible en ligne .

5.2Profilage racial

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 14 des observations finales

Le Comité demande à la Suisse de prendre des mesures efficaces pour faire en sorte que nul ne fasse l’objet de contrôle d’identité ou de fouilles ou toute autre opération policière en raison de sa race ou de son appartenance ethnique et de prendre des mesures judiciaires appropriées contre tout membre des forces de l’ordre qui aurait enfreint la loi pour des motifs de discrimination raciale. Il recommande aussi à la Suisse de créer dans tous les cantons un mécanisme indépendant chargé de recevoir et d’instruire des plaintes concernant des fautes commises par des policiers et de faire en sorte qu’une formation aux droits de l’homme soit dispensée aux policiers dans tous les cantons.

75.L’instruction des plaintes pénales contre la police est réglementée par le Code de procédure pénale suisse (CPP), unifié en 2011. Celui-ci garantit le traitement de ces plaintes par une autorité pénale indépendante (cf. art. 4 CPP), à savoir le ministère public. Celui-ci est obligé, de par la loi, d’ouvrir et de conduire sans délai une procédure lorsqu’il a connaissance d’infractions ou d’indices laissant présumer l’existence d’infractions (art. 7 CPP). Plus généralement, les autorités pénales sont tenues de dénoncer aux autorités compétentes les infractions qu’elles constatent dans l’exercice de leurs fonctions (art. 302 CPP).

76.Toute personne peut adresser sa plainte directement au ministère public (art. 301 CPP) et n’est ainsi pas tenue de passer par la police. En outre, chaque partie à la procédure peut demander la récusation d’une personne exerçant une fonction au sein d’une autorité pénale (y compris la police) si certains motifs sont de nature à la rendre suspecte de prévention (art. 56 ss CPP). Les parties peuvent, par ailleurs, faire recours contre les décisions et actes de procédure de la police et du ministère public (art. 393 CPP).

77.Les mesures qui dépassent ces garanties de procédure pénale établies par le droit fédéral sont, en raison du fédéralisme suisse, en premier lieu du ressort des cantons. Dans certains cantons, par exemple, les auditions relatives aux plaintes contre la police sont faites exclusivement par le ministère public ou un officier d’un autre corps de police ; d’autres cantons ont créé une unité spécialement affectée à ce type d’affaires. Il existe parfois aussi des services d’ombudsmann ou des bureaux de médiation. Enfin, il est toujours possible de s’adresser à l’autorité de surveillance, dans le cadre d’une procédure administrative, pour se plaindre du comportement d’un policier ou de la police en général, au-delà des actes pénalement répréhensibles. Les mécanismes de plainte ont fait l’objet d’une étude que le CSDH a publiée en 2014.

78.La Suisse ne collecte pas de données statistiques officielles au niveau fédéral sur le profilage racial et sa fréquence. Cela s’explique par le fait que cette forme de discrimination est associée aux contrôles de routine et de suspects, un domaine qui relève de la souveraineté des cantons. Cependant, l’OFS peut identifier les affaires au sein de la SPC où les infractions correspondant aux art. 312 CP (abus d’autorité) et 261 bis CP (discrimination raciale) qui sont simultanément saisis. Entre 2009 et 2017, 7 cas de ce type ont été enregistrés (cela correspond à environ 1 - 2 cas par année, à l’exception des années 2009, 2014, 2016 et 2017, pour lesquelles aucun cas n’a été recensé). Au niveau de la consultation, les centres de conseil pour les victimes du racisme ont enregistré 25 incidents racistes en lien avec la police en 2017 (contre 19 en 2016, 23 en 2015, 19 en 2014, 17 en 2013, 13 en 2012). Cela correspond à environ 10 % des cas recensés chaque année. Ces chiffres ont valeur d’indication et ne couvrent pas la totalité des cas, étant donné que toutes les personnes concernées ne s’adressent pas à un service de consultation.

79.La gestion de la diversité et les questions en lien avec la protection contre la discrimination font partie intégrante de la formation de la police. Dans la formation de base, les futurs policiers apprennent à exercer leur profession dans le respect de la dignité et des droits de chaque personne tels qu’ils sont inscrits dans la Constitution, dans la Convention européenne des droits humains ainsi que dans les lois ou encore dans le Code de conduite de l’ONU pour les responsables de l’application des lois. Ils sont notamment sensibilisés à l’approche des cultures différentes et des minorités ethniques ainsi qu’aux aspects liés à la migration et aux droits humains. La psychologie, l’éthique policière et les droits humains font en outre partie intégrante de l’examen professionnel de policier/policière et constituent plus d’un tiers des heures prévues. L’Institut suisse de police (ISP) publie depuis 2012 une édition révisée de son cours sur les droits humains et l’éthique professionnelle, dont l’élaboration a été accompagnée notamment par le CSDH. Par la suite, ces thèmes continuent à être traités dans le cadre de la formation continue (organisés p. ex. par l’École de police de Suisse orientale, l’Académie de police de Savatan ou l’Institut suisse de police à Neuchâtel). Depuis plusieurs années, le SLR offre aux écoles et aux corps de police cantonaux une aide à la conception et à la réalisation d’actions de formation continue.

80.En décembre 2016, une journée organisée par le CSDH a permis aux représentants de la police, de l’État et des ONG de confronter leurs différentes positions sur ce thème et de débattre de solutions nouvelles. Le CSDH a également réalisé, sur mandat du Département de la sécurité de la Ville de Zurich, une étude sur les critères juridiques régissant les contrôles de personne et les mesures susceptibles de prévenir le profilage racial ou ethnique. Parmi les mesures pouvant contribuer à l’efficacité et à la constitutionnalité des contrôles de police, le CSDH met en avant des instructions de service rédigées de façon concrète, la formation du personnel de police et la délivrance de récépissés.

81.Les cantons et les villes examinent régulièrement leurs pratiques et prennent des mesures pour améliorer l’efficacité et la qualité des contrôles (notamment ZH, BE, GE et Lausanne) ; des exemples de mesures sont présentés dans l’annexe 2.

82.À la suite de la mise en œuvre des programmes d’intégration cantonaux en 2014, tous les cantons sauf un (AI) disposent d’une offre de conseil pour les victimes de discrimination et de profilage racial. Par ailleurs, 5 cantons (BL, BS, VD, ZG, ZH) et 5 villes (Berne, Rapperswil-Jona, Saint-Gall, Winterthour et Zurich) disposent d’un service de médiation.

83.En 2016, des personnes issues du monde scientifique, culturel et juridique se sont réunies pour former l’« Alliance contre le Racial Profiling ». Parallèlement, le mouvement « À qui le tour ? La vie des Noirs compte » a été fondé en Suisse romande. Ces mouvements rassemblent des informations, formulent des revendications face aux autorités et sensibilisent le grand public, par exemple en accompagnant des procès légaux par des mesures médiatiques. Ils contribuent à promouvoir le débat sociétal ; en témoigne le fait que, depuis 2016, plusieurs interventions parlementaires ont été déposées pour thématiser le problème de la discrimination lors des contrôles policiers ou dans le cadre des activités du Corps des gardes-frontière. Dans le cadre de la procédure de consultation du présent rapport, la Fédération d’organisations islamiques de Suisse (FOIS) et la FSCI ont estimé que le profilage racial doit être combattu principalement via des mesures préventives visant à promouvoir le dialogue et via la formation continue et le perfectionnement des policiers.

5.3Minorités nationales

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 15 des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse de redoubler d’efforts pour promouvoir et protéger les droits des minorités nationales, en particulier leur droit à l’éducation et à la préservation de leur langue et de leur mode de vie. Il lui demande de s’assurer que les lois et les politiques apparemment neutres n’ont pas d’effet discriminatoire sur les droits des membres de minorités nationales. Il encourage aussi la Suisse à sensibiliser davantage la population à l’histoire et aux caractéristiques des différentes minorités nationales et à adopter des mesures efficaces pour inciter les médias à éviter les clichés et les stéréotypes.

84.Lorsqu’elle a ratifié en 1998 la Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales (ci-après « la Convention-cadre »), la Suisse a reconnu comme minorités nationales les minorités linguistiques nationales, les membres de la communauté juive et les « gens du voyage ». À l’occasion du 4e rapport périodique sur la mise en œuvre de la Convention-cadre du 15 février 2017, le Conseil fédéral a clarifié qui sont les « gens du voyage » reconnus comme minorité nationale : ce sont l’ensemble des Yéniches, des Sintés/Manouches suisses. En accordant aux Yéniches et aux Manouches/Sintés le statut de minorité nationale, la Suisse s’est engagée à leur permettre de conserver et de développer leur culture. De 2012 à 2015, l’OFC a alloué des contributions de soutien au sens de l’art. 17 LEC à la « Radgenossenschaft der Landstrasse » et à la fondation « Assurer l’avenir des gens du voyage suisses » pour un montant total de quelque 400 000 francs. Le message concernant l’encouragement de la culture pour la période 2016-2020 (« Message culture 2016-2020 ») indique que ce crédit sera augmenté de 300 000 francs par an pendant cette période, ce qui permettra à la fondation « Assurer l’avenir des gens du voyage » de prendre une part active à la création d’aires de séjour et de transit.

85.Au niveau cantonal, les travaux en vue de créer des aires de séjour et de transit se poursuivent. À titre d’exemple, le canton de Fribourg a ouvert en juin 2017 la nouvelle aire de transit de la Joux-des-Ponts sur l’autoroute A12, qui peut également être utilisée comme aire de repos par les poids lourds. Cette aire est le résultat de la collaboration entre l’Office fédéral des routes (OFROU), responsable de la construction, et le canton de Fribourg, qui a soutenu financièrement le projet et qui exploite le site à la satisfaction des utilisatrices et utilisateurs. Le canton de Neuchâtel a mis en place une instance cantonale de pilotage interdépartemental (dans lequel le service en charge de la prévention du racisme est représenté) pour assurer une meilleure coordination dans ce domaine.

86.Le 1er juin 2018, le Conseil fédéral a examiné la demande déposée par deux organisations concernant la reconnaissance des Roms suisses comme minorité nationale au titre de la Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales. Cette demande de reconnaissance est la première depuis la ratification de la Convention-cadre par la Suisse en 1998. Le Conseil fédéral a constaté que les critères cumulatifs formulés dans la déclaration interprétative faite par la Suisse au moment de la ratification de la Convention-cadre ne sont pas tous remplis. Il tient toutefois à relever qu’indépendamment de la question de la reconnaissance comme minorité nationale, les Roms font partie intégrante de la société suisse, et sont reconnus comme tels. Les Roms suisses jouissent des mêmes droits que les autres citoyens du pays, notamment le droit de vivre leur culture et de parler leur langue. Le Conseil fédéral réaffirme son engagement dans ce sens ainsi que l’obligation des autorités suisses de lutter contre le racisme et les stéréotypes négatifs dont les Roms sont victimes et de les protéger contre la discrimination.

87.En 2014, les Yéniches et les Manouches/Sintés ont attiré l’attention du public sur le manque d’aires de transit et de séjour et leurs revendications se sont traduites par trois interventions parlementaires au niveau fédéral qui ont débouché sur la création d’un groupe de travail « Améliorer les conditions de vie nomade et promouvoir la culture des Yéniches, des Manouches/Sintés et des Roms », placé sous l’égide de l’Office fédéral de la culture (OFC). Outre les Yéniches et les Manouches/Sintés, des représentants des Roms ont été invités à siéger au sein du groupe de travail puisqu’en pratique, ils sont souvent associés aux Yéniches et aux Manouches/Sintés, et que les Roms eux-mêmes demandent que leur culture soit protégée. Le groupe de travail, auquel participaient également des représentants des autorités fédérales, cantonales et communales, a adressé à la Confédération une série de propositions pour aborder les différentes problématiques de manière constructive. Le rapport intermédiaire du groupe de travail définit cinq domaines d’action : aires d’accueil, formation, culture et identité, questions sociales et repositionnement de la fondation « Assurer l’avenir des gens du voyage suisses ».

88.Les nomades tels que les Yéniches et les Manouches/Sintés ont été victimes des mesures de coercition à des fins d’assistance jusque dans les années 1980. La Confédération leur a officiellement présenté ses excuses en 1986. La loi fédérale sur les mesures de coercition à des fins d’assistance et les placements extrafamiliaux antérieurs à 1981 (LMCFA, RS 211.223.13), entrée en vigueur le 1er avril 2017, entend contribuer à faire reconnaître et à réparer cette injustice. Par ailleurs, un programme national de recherche (PNR 76) a été lancé en 2017, avec pour objectif d’analyser les caractéristiques, les mécanismes et les effets de la politique et des pratiques suisses en matière d’aide sociale dans leurs différents contextes, d’identifier les causes possibles des mesures sociales portant atteinte à l’intégrité des personnes visées ou permettant de la protéger et d’analyser l’impact qu’elles ont eu sur ces dernières. De plus, le Conseil fédéral examine la possibilité de soutenir une initiative visant à créer un mémorial dédié aux victimes de l’Œuvre des enfants de la grand-route. Il estime notamment qu’avoir à l’esprit les erreurs passées permet aussi de combattre la stigmatisation structurelle et culturelle des Yéniches.

89.Le SLR soutient régulièrement, depuis dix ans, des projets développés par ou pour les Yéniches et Manouches/Sintés, mais aussi pour la diffusion de la culture rom au-delà des clichés habituels. Par exemple, il a soutenu, à hauteur de 24 000 CHF, un projet de la Haute école pédagogique FHNW (Zentrum Politische Bildung und Geschichtsdidaktik) qui visait à développer des conditions-cadre pour l’enseignement de l’histoire et à élaborer du matériel pédagogique en lien les modes de vie itinérants. Dans le cadre de sesenquêtes Omnibus, l’OFS, en collaboration avec le SLR, l’OFC, la DDIP et les associations des communautés yéniche et sinté, prévoit de réaliser, en 2019, un module sur la thématique du racisme en rapport avec le mode de vie itinérant. L’OFC soutient un projet de documentation sur la langue et la culture yéniches. Pour préserver leur langue, les Yéniches en Suisse (resp. la Radgenossenschaft der Landstrasse) organisent des après-midis linguistiques destinés aux enfants et basés sur un outil pédagogique développé à cet effet.

90.La reconnaissance de la communauté juive en tant que minorité nationale accorde à celle-ci des droits, notamment celui de préserver son identité, et engage la Suisse à respecter certaines obligations, comme la protection contre l’intolérance et la discrimination. Depuis 2004, à la suite d’une décision de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP), la « Journée de la mémoire de l’Holocauste » est célébrée chaque année le 27 janvier. À cette occasion, le Conseil fédéral délivre un message pour rendre hommage aux victimes de l’Holocauste.

91.En 2016, le SLR a documenté pour la première fois les mesures de lutte contre l’antisémitisme prises par la Confédération. Son rapport donne une vue d’ensemble des mesures de sensibilisation et de prévention, de la législation et de la protection des personnes et des institutions juives en Suisse. Il souligne que le Conseil fédéral considère comme un devoir permanent l’engagement constant et systématique contre toute forme de racisme et d’antisémitisme. Les nombreuses activités des divers offices fédéraux, mais aussi des cantons et des communes, contribuent à la mise en œuvre d’une politique systématique de sensibilisation et de prévention. En outre, le rapport constate que la Confédération et les cantons sont tenus d’agir s’il existe des indices sérieux laissant à penser que la communauté, des personnes ou des institutions juives pourraient être la cible de violences. La publication de ce rapport a donné lieu à une discussion approfondie sur l’antisémitisme et la protection des minorités religieuses et idéologiques. Sur la base de cette discussion, le Conseil fédéral a chargé le délégué du réseau national de sécurité (RNS) d’élaborer un concept pour améliorer, en étroite collaboration avec la Confédération et les cantons et en coopération avec les milieux concernés, la coordination des mesures de protection des minorités menacées.

92.Dans ce contexte, le Conseil fédéral a décidé, en juillet 2018, d’élaborer une ordonnance pour concrétiser le soutien par la Confédération de mesures préventives au sens de l’art. 386 CP et de la mettre en consultation avant fin 2018. Dès 2019, des mesures d’information, de sensibilisation et de formation doivent pouvoir être soutenues sur la base de cette ordonnance. Dans un deuxième temps, il s’agira d’examiner s’il est nécessaire d’élaborer une base légale permettant à la Confédération de soutenir des mesures de protection des institutions ou des personnes des minorités particulièrement menacées.

93.En mars 2017, la Suisse a pris pour un an la présidence de l’International Holocaust Remembrance Alliance (IHRA), ce qui lui permet de renforcer la lutte contre toutes les formes d’antisémitisme. À l’occasion de cette présidence, la Gamaraal Foundation, soutenue par le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et le SLR, a mis sur pied une exposition intitulée The Last Swiss Holocaust Survivors. Des photographies et des documents sonores représentant 150 des derniers survivants de l’Holocauste résidant en Suisse personnalisent cette tragédie. Par ailleurs, le quinzième et dernier volume des Mémoires de survivants de l’Holocauste est paru en 2015. Cette série de livres, soutenue par le DFAE, contient les témoignages de survivants de l’Holocauste résidant en Suisse. En 2017, elle a été traduite en français, en partie par des écoles, en partie par le Secrétariat général du Département fédéral de l’intérieur (SG-DFI) ; la publication de la version française est financée par le DFAE.

94.Entre décembre 2011 et décembre 2017, le SLR a soutenu 17 projets de prévention de l’antisémitisme pour un total de 241 700 francs. En 2015 p. ex., la Fédération suisse des communautés israélites (FSCI) a étendu son projet Likrat – rencontre avec le judaïsme à la Suisse romande. Des adolescents juifs vont à la rencontre d’élèves dans les écoles pour leur présenter le judaïsme et susciter une discussion sur l’antisémitisme, le racisme et la discrimination. Ce type de rencontres favorise l’ouverture et la volonté de se confronter à des thèmes actuels et controversés. Au niveau cantonal, les projets de lutte contre l’antisémitisme sont principalement organisés par les écoles, p. ex. à l’occasion de la Journée de commémoration des victimes de l’Holocauste (27 janvier). Les hautes écoles pédagogiques traitent du thème de l’antisémitisme dans le cadre d’ateliers et de journées spéciales. Celle de Lucerne a organisé en 2016 une conférence et un atelier pédagogique sur le thème de l’Holocauste et du national-socialisme. Le projet de recherche de l’IHRA sur l’éducation à l’Holocauste s’est conclu par l’International Research Conference on Education about the Holocaust, cofinancée par la Suisse. Cette manifestation était destinée en premier lieu aux organisations juives et laïques.

95.Dans le domaine éducatif, l’accès à un enseignement de base suffisant et gratuit est garanti à tous les enfants sans discrimination (art. 8, al. 2, Cst.). La ville de Bernemène actuellement un projet-pilote pour les écoliers de parents ayant un mode de vie itinérant à l’aire de séjour de Buech. Concrètement, des ateliers pédagogiques proposés durant les mois d’hiver parallèlement à l’enseignement en classe offrent un accompagnement aux enfants afin qu’ils comblent les lacunes pouvant résulter de leur absence entre les vacances de Pâques et les vacances d’automne. De nouveaux outils pédagogiques et des méthodes d’enseignement en ligne sont développés à cet effet.

96.La quasi-totalité des projets soutenus par le SLR ont un volet qui vise à combattre les clichés et les stéréotypes au sein des médias. La Déclaration des devoirs et des droits des journalistes du Conseil suisse de la presse stipule que les journalistes doivent respecter la dignité humaine et éviter toute allusion discriminatoire. Ces directives mettent par ailleurs engarde contre la désignation de l’appartenance ethnique ou nationale, de l’origine, de la religion ou de la couleur de peau, notamment, qui peut avoir un effet discriminatoire. Des informations complémentaires concernant les médias se trouvent au chapitre 7.1. (ch. 123 ss).

97.Pour plus d’informations, nous renvoyons ici au quatrième rapport de la Suisse de février 2017 sur l’application dela Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales(RS 0.441.1), ainsi qu’au sixième rapport de la Suisse de décembre 2015 sur l’application de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (RS 0.441.2).

98.En raison de la diversité de la population suisse, d’autres groupes de population sont particulièrement susceptibles d’être victimes de discriminations raciales. Selon l’enquête de l’Office fédéral de la statistique Vivre ensemble en Suisse (VeS), 6 % des personnes interrogées en 2016 déclarent être dérangées dans leur quotidien par la présence d’une personne dont la couleur de peau est différente, et 10 % se disent dérangées par les personnes d’une autre religion. Les autorités suisses reconnaissent que des mesures spécifiques sont nécessaires pour prévenir la discrimination raciale à l’égard de ces groupes de population.

99.En 2016 et 2017, le SLR et la CFR ont mis un accent particulier sur le racisme anti-Noirs. Ils ont lancé des travaux pour faire le point sur le vécu des personnes sujettes au racisme anti-Noirs en Suisse et les attitudes de la population à leur égard d’une part (SLR, en collaboration avec l’OFS), et sur les aspects institutionnels et juridiques de cette forme de racisme, d’autre part (CFR). En décembre 2017, la CFR a formulé une série de recommandations qui s’adressent en particulier à l’administration publique, aux autorités chargées de la sécurité et de la justice, au monde politique, aux professionnels des médias et aux centres d’accueil et de conseil des victimes de discrimination. Le 7 décembre 2017, une rencontre de la Commission avec les délégués à l’intégration des cantons a permis aux acteurs de discuter de ces recommandations. Les différents rapports, études et recommandations seront également discutés avec les milieux intéressés lors d’un colloque de travail organisé par le SLR au printemps 2018. Par ailleurs, le SLR et la CFR ont soutenu la journée d’inauguration de la décennie internationale du peuple de descendance africaine en Suisse, qui a eu lieu au mois de septembre 2017.

100.Le dialogue entre les services administratifs compétents et les représentants d’organisations musulmanes en Suisse (mai 2010 à avril 2011) a permis d’établir que les solutions concrètes aux différentes questions qui se posent doivent être trouvées en premier lieu sur place, c’est-à-dire aux échelons cantonal et communal. Cela étant, la Confédération soutient financièrement différents projets du Centre suisse Islam et Société, rattaché à l’Université de Fribourg, sur certains thèmes importants pour la participation des musulmans à la société suisse. Par ailleurs, le SLR soutient régulièrement des projets visant à sensibiliser à l’hostilité vis-à-vis des personnes musulmanes (entre 2012 et 2018, il a financé 22 projets à hauteur de 258 000 CHF).

5.4Personnes ayant obtenu le statut d’admission provisoire (« permis F »)

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 16 des observations finales

Le Comité engage la Suisse à éliminer toute discrimination indirecte et tout obstacle injustifié à l’exercice par les personnes admises sur son territoire à titre provisoire de leurs droits fondamentaux. Par ailleurs, le Comité recommande de lever les restrictions disproportionnées des droits des personnes admises sur son territoire à titre provisoire, et en particulier des résidents de longue date, en les autorisant à se déplacer librement dans la Suisse et en facilitant le regroupement de leur famille et leur accès à l’emploi, à des possibilités d’éducation et à des soins de santé.

101.Les informations suivantes complètent celles fournies dans les informations complémentaires de la Suisse sur trois observations finales du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale concernant ses septième, huitième et neuvième rapports présentés au Comité, conformément au paragraphe 23 des recommandations finales CERD/C/CHE/CO/7 – 9 », ad. ch. 16.

102.L’admission provisoire permet de séjourner en Suisse aux personnes qui sont généralement exclues de la Convention relative au statut des réfugiés et dont le renvoi n’est pas possible, pas licite ou ne peut être raisonnablement exigé. Elle constitue un instrument de protection essentiel pour les personnes qui, si elles étaient renvoyées dans leur patrie ou dans leur pays d’origine, seraient exposées à des situations comme une guerre, une guerre civile, une situation de violence générale ou d’urgence sanitaire. L’admission provisoire permet également de protéger les personnes particulièrement vulnérables et les mineurs non accompagnés. L’entrée en vigueur de la loi sur les étrangers révisée est prévue au 1er janvier 2019 (Integration ; 13.030) ; elle permet de supprimer les obstacles qui existaient au niveau de l’accès au marché de l’emploi, puisque l’exercice d’une activité lucrative ne fait plus l’objet d’une autorisation mais doit simplement être annoncé. Cette annonce vise à contrôler le respect des conditions de travail et de rémunération et donc à protéger les personnes admises provisoirement. La modification légale consistant à supprimer la taxe spéciale de 10 % sur le revenu de l’activité lucrative est quant à elle entrée en vigueur le 1er janvier 2018.

103.Depuis le 1er juillet 2018, les personnes admises provisoirement qui cherchent un emploi ou sont en mesure de travailler et qui bénéficient de l’aide sociale seront annoncées aux bureaux de placement. Il s’agit de leur offrir de meilleures chances de s’intégrer de manière ciblée et durable sur le marché suisse de l’emploi. Pour faciliter l’insertion professionnelle des réfugiés et des personnes admises à titre provisoire, les cantons ont également pris de nombreuses mesures dans le cadre des PIC (p. ex. GR, SG, etc.).

104.À l’heure actuelle, la liberté de mouvement des personnes admises provisoirement est limitée dans le sens où elles ne peuvent que difficilement changer de canton de domicile. Dans le cadre de la mise en œuvre actuelle de la motion 18.3002 de la CIP-E « Adaptations ponctuelles du statut des étrangers admis à titre provisoire », qui a été adoptée par le Parlement, il est notamment prévu de procéder à des allègements en cas de changement de canton de personnes admises à titre provisoire exerçant une activité lucrative.

105.Comme toutes les personnes domiciliées en Suisse, les personnes admises provisoirement doivent obligatoirement contracter une assurance-maladie (art. 86, al. 2, LEtr. en lien avec l’art. 3, al. 1, de la loi fédérale sur l’assurance-maladie, LAMal). L’assurance déploie ses effets dès le dépôt de la demande d’asile, de la décision d’admission provisoire ou de l’octroi de la protection provisoire (art. 7, al. 5, de l’ordonnance sur l’assurance-maladie, OAMal). Toutes les personnes admises provisoirement ont donc droit à l’ensemble des prestations de l’assurance-maladie de base.

106.La Constitution fédérale garantit le droit à un enseignement de base suffisant et gratuit, indépendamment du statut (droit des étrangers) de la personne en âge scolaire (art. 19 Cst.). Ce droit fondamental garantit aussi aux enfants des personnes admises provisoirement le droit d’être scolarisés. À noter que l’instruction publique est du ressort des cantons (art. 62 Cst.), qui doivent pourvoir à un enseignement de base obligatoire suffisant.

107.À titre de contribution globale au débat politique, la CFM a proposé, dans le cadre de ses recommandations, un nouveau statut de protection qui remplacerait l’admission provisoire.

5.5Non-ressortissants

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 17 des observations finales 

Le Comité engage la Suisse à adopter des mesures efficaces pour éliminer la discrimination à l’égard des non-ressortissants, en particulier des migrants, des sans‑papiers, des demandeurs d’asile et des réfugiés, et à s’assurer que toute restriction imposée à leurs droits repose sur un but légitime et soit proportionnelle à la réalisation de ce but. Il l’engage aussi à s’intéresser aux risques et à la vulnérabilité auxquels sont exposées les femmes appartenant à ces groupes et à veiller à ce que celles qui sont victimes de violence conjugale puissent demeurer sur le territoire sans avoir à surmonter des obstacles de procédure excessifs.

108.Personnes migrantes : Lorsqu’une personne migrante est victime de discrimination raciale en Suisse, elle bénéficie de mesures de protection et de conseil au même titre que toute personne résidant en Suisse. De nombreux cantons ont pris des mesures de sensibilisation à l’intention du grand public mais aussi de certains groupes cibles spécifiques, comme les employeurs. Le Canton de Fribourg a par exemple élaboré un guide de bonnes pratiques et une check-list pour encourager les employeurs à contribuer à l’insertion professionnelle des personnes migrantes. Tous les deux ans, il décerne également un prix à un employeur qui s’est particulièrement distingué dans ce domaine.

109.« Sans-papiers » : L’art. 30, al. 1, let. b, de la loi sur les étrangers (LEtr) permet de délivrer une autorisation de séjour aux personnes qui séjournent illégalement en Suisse (migrants sans-papiers) lorsqu’il s’agit de cas individuels d’une extrême gravité. L’octroi des autorisations de séjour relève de la compétence des autorités cantonales sous réserve de l’approbation du SEM. Il n’y a pas de droit à l’obtention d’une autorisation de séjour en tant que cas individuel d’extrême gravité. Les autorités cantonales de même que le SEM disposent d’une marge d’appréciation. Le Conseil fédéral et le Parlement suisse se sont opposés à une régularisation collective (amnistie) des migrants sans-papiers, l’examen individuel et spécifique des cas d’extrême gravité ayant fait ses preuves. Le tableau suivant montre l’évolution de la pratique d’approbation des demandes entre 2009 et 2017 :

Personnes sans autorisation de séjour (art. 30, al. 1, let. b, LEtr)

Année

Demandes approuvées

Demandes rejetées

2017

607

10

2016

410

4

2015

316

16

2014

294

11

2013

280

31

2012

270

47

2011

163

26

2010

129

21

2009

88

93

110.En février 2017, le canton de Genève a lancé l’opération Papyrus, un projet pilote cantonal qui s’achèvera fin 2018. Le projet prévoit la régularisation du séjour d’un certain nombre de migrants sans-papiers bien intégrés ainsi que la mise en œuvre de différentes mesures d’accompagnement destinées notamment à assainir le secteur de l’économie domestique et à prévenir un éventuel effet d’appel d’air. En tant qu’autorité d’approbation, le SEM procède à un examen individuel des cas qui lui sont soumis dans le cadre du projet Papyrus, en tenant compte des critères légaux relatifs à la régularisation des cas individuels d’une extrême gravité (art. 30, al. 1, let. b, LEtr). Le projet Papyrus ne constitue ni une régularisation collective ni une amnistie. Le SEM de même que le canton de Genève appliquent strictement les dispositions légales existantes en utilisant la marge de manœuvre qui leur est donnée par la loi. Le projet est l’objet d’un suivi scientifique.

111.Le 12 juin 2018, le Conseil national a adopté le postulat 18.3381 de sa Commission des institutions politiques « Pour un examen global de la problématique des sans-papiers ». Cette intervention charge le Conseil fédéral d’établir un rapport sur des questions telles que les droits des sans-papiers de s’affilier aux assurances sociales et de bénéficier des prestations en découlant, les conséquences d’un éventuel retrait de ces droits, la pratique actuelle en matière d’échange d’informations entre les différentes autorités et la pratique usuelle en matière de régularisation du séjour des sans-papiers et d’autorisation d’exercer une activité lucrative en fonction des critères servant à définir les cas de rigueur. Le rapport, qui doit être remis au plus tard au printemps 2020, doit également présenter des solutions envisageables pour les personnes sans permis de séjour.

112.Le droit à un enseignement de base gratuit est garanti à tous les enfants vivant en Suisse par l’art. 19 Cst., l’art. 28 CDE et l’art. 13 du Pacte II de l’ONU. La Constitution oblige les cantons à pourvoir à un enseignement de base suffisant, ouvert à tous les enfants sans discrimination (art. 62, al. 2, Cst.). La Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP) soulignait déjà dans ses recommandations du 24 octobre 1991 concernant la scolarisation des enfants de langue étrangère qu’« il importe d’intégrer tous les enfants de langue étrangère vivant en Suisse dans les écoles publiques », quel que soit leur statut de séjour. La loi fédérale sur les étrangers contient en outre des dispositions permettant à de jeunes migrants sans-papiers qui ont suivi une partie de leur scolarité en Suisse d’obtenir une autorisation de séjour en vue de suivre une formation professionnelle initiale (art. 30a OASA).

113.Les « sans-papiers » peuvent, en cas de survenance d’un risque social et à certaines conditions, bénéficier des prestations de la sécurité sociale. En effet, la couverture par les assurances sociales ne dépend, en principe, pas du statut de la personne au regard du droit des étrangers, mais résulte de l’obligation légale d’être affilié à l’assurance concernée.

114.Restriction de mouvement des requérants d’asile : La nouvelle loi sur l’asile, qui entrera en vigueur le 1er mars 2019, prévoit que les requérants qui menacent sensiblement la sécurité et l’ordre publics, et qui sont hébergés dans un centre spécifique, se verront notifier automatiquement une interdiction de périmètre (art. 24a, al. 1, nouvelle LAsi, art. 74, al. 1 biset 2, nouvelle LEtr). Une telle mesure doit toutefois être examinée de manière individuelle, en particulier au regard du principe de proportionnalité. L’interdiction de périmètre peut faire l’objet d’un recours auprès du juge (art. 74, al. 3, LEtr). L’assignation à un centre spécifique présuppose également un examen individuel (menace sensible à la sécurité et à l’ordre publics, ou atteinte sensible au fonctionnement et à la sécurité des centres fédéraux).

115.Exclusion du régime de l’aide sociale des requérants déboutés : En vertu de l’art. 82 de la loi sur l’asile (LAsi), les personnes frappées d’une décision de renvoi entrée en force auxquelles un délai de départ a été imparti sont exclues du régime de l’aide sociale. Sur demande, elles reçoivent une aide d’urgence au sens de l’art. 12 de la Constitution fédérale (droit d’obtenir de l’aide dans des situations de détresse). Grâce à l’aide d’urgence, comprise comme aide à la survie, ces personnes obtiennent les moyens indispensables (subsistance, vêtements, gîte, soins médicaux de base, etc.) à une existence conforme à la dignité humaine, ce qui leur évite de devoir s’adonner à la mendicité. L’autorité cantonale ou communale compétente accorde une aide d’urgence en tenant compte des besoins concrets de la personne concernée et, notamment, d’une éventuelle fragilité particulière (minorité, par ex.). Les bénéficiaires de l’aide d’urgence restant soumis à l’obligation de conclure une assurance-maladie, ils ont accès à toutes les prestations obligatoires au titre de la loi fédérale sur l’assurance-maladie. Inscrite dans la loi (art. 92d de l’ordonnance sur l’assurance-maladie en relation avec l’art. 82a LAsi), cette obligation a été confirmée par la jurisprudence du Tribunal fédéral. Selon ce dernier, il appartient aux bénéficiaires de l’aide d’urgence de se conformer par eux-mêmes à cette obligation en adhérant à une caisse-maladie. Le canton ou la commune qui a compétence pour verser l’aide d’urgence est toutefois libre de conclure une telle assurance en faveur de l’intéressé. L’abaissement du niveau de soutien résultant du passage de l’aide sociale à l’aide d’urgence vise à réduire les incitations matérielles à demeurer en Suisse, afin d’encourager les personnes concernées à obtempérer de leur plein gré à l’injonction de quitter le pays.

116.Femmes étrangères victimes de violence conjugale : L’intervention parlementaire du 5 mai 2015 « Droit de séjour des victimes de violences conjugales » (Po. Feri, 15.3408) demande au CF de présenter un rapport concernant l’application des dispositions régissant le droit de séjour des migrantes victimes de violence conjugale. Le Conseil fédéral a adopté le rapport en avril 2018. Fort des constats de l’étude publiée conjointement au rapport, le Conseil fédéral note que l’introduction de l’art. 50, al. 1, let. b, LEtr constitue, sur le fond, une mesure efficace pour protéger les victimes étrangères de violences conjugales et qu’il n’y a pas matière à légiférer davantage. En revanche, le Conseil fédéral s’engage à promouvoir des mesures d’optimisation supplémentaires en matière de sensibilisation et de formation des acteurs devant faire face à des cas de rigueur, de l’information des personnes concernées, de l’échange, de la collaboration avec les autorités et les services concernés, et de la qualité des preuves à apporter.

6.Article 6 : Garantie de voies de recours effectives

Mise en œuvre des recommandations formulées aux ch. 7 et 9 des observations finales

Le Comité engage la Suisse à prendre des mesures efficaces, conformément à l’art. 6 de la Convention, pour garantir à quiconque relevant de sa juridiction une protection et des voies de recours efficaces par l’intermédiaire des tribunaux nationaux compétents et autres institutions de l’État contre tout acte de discrimination raciale qui porte atteinte à ses droits, de même que le droit de demander aux tribunaux compétents satisfaction ou réparation juste et adéquate pour tout préjudice subi à la suite d’une telle discrimination, y compris la restitution. Le Comité demande à la Suisse de sensibiliser le personnel de la justice, y compris les membres de l’appareil judiciaire, aux normes internationales interdisant la discrimination raciale.

Le Comité demande à la Suisse de veiller à ce que toutes les personnes placées sous la juridiction de la Suisse aient droit à une protection efficace et à des recours utiles contre la discrimination dans tous les domaines de la vie publique et privée, y compris en ce qui concerne l’accès au marché du logement et du travail, et l’égalité de traitement dans le milieu du travail et dans le cadre de l’école, et qu’elles puissent obtenir satisfaction ou réparation pour tout préjudice dont elles pourraient être victimes du fait de cette discrimination, en application de l’art. 6 de la Convention.

117.Pour une présentation détaillée des dispositions juridiques afférentes, se reporter aux chiffres 215 et suivants des deuxième et troisième rapports, aux chiffres 192 et suivants des quatrième, cinquième et sixième rapports et aux chiffres 228 et suivants des septième, huitième et neuvième rapports de la Suisse.

118.Toute infraction à l’art. 261 bis CP est punissable d’une peine privative de liberté de trois ans au plus, ou d’une peine pécuniaire. Le montant de la peine pécuniaire payé par le condamné peut être alloué au lésé si les conditions sont remplies (art. 73 CP). L’art. 171c CPM prévoit les mêmes sanctions, mais une sanction disciplinaire en cas d’infraction de peu de gravité (par. 2). Concernant spécifiquement le statut des lésés et des victimes, les art. 115 ss CPP prévoient que les personnes directement touchées par une infraction peuvent devenir parties à la procédure et faire valoir tous les droits qui en découlent, notamment le droit d’être entendu, le droit de se faire assister d’un avocat, le droit de se prononcer au sujet de la cause et de la procédure, y compris le droit de déposer des propositions relatives aux moyens de preuves. Enfin, une voie de recours leur est également ouverte.

119.Un acte de discrimination raciale peut également constituer une atteinte illicite à la personnalité au sens de l’art. 28 CC lorsque l’atteinte présente une certaine intensité. La personne lésée doit en apporter la preuve (art. 8 CC). Elle peut agir en justice pour faire interdire une atteinte illicite à titre préventif, la faire cesser ou faire constater son caractère illicite (art. 28a CC). En outre, la personne lésée peut, lors d’atteintes graves, demander la réparation du dommage causé et du tort moral (art. 28a, al. 3, CC en relation avec l’art. 41, al. 1, et 49 ou 47 CO). Elle peut faire valoir des conclusions civiles par adhésion à la procédure pénale (art. 122 ss CPP).

120.L’État (le canton) doit indemniser la victime d’une discrimination raciale en vertu de la loi sur l’aide aux victimes (LAVI ; RS 312.5), lorsque ladite victime a subi une atteinte directe à son intégrité corporelle, psychique ou sexuelle. Dans ce cas, l’atteinte doit présenter une certaine intensité. Cette indemnisation est subsidiaire et plafonnée. En cas d’atteinte grave, la loi prévoit une réparation morale (également plafonnée). Quant à la question de savoir si et dans quelle mesure une personne frappée de discrimination raciale au sens de l’art. 261 bis CP peut être considérée comme une victime au sens de la LAVI, le Tribunal fédéral a précisé (ATF 128 I 218) que la qualité de victime au sens de l’art. 2, al. 1, LAVI (depuis 2009 : art. 1 LAVI) peut être reconnue selon les circonstances en cas de violation de l’art. 261 bis, al. 4, CP, si la discrimination raciale était assortie d’une agression. Si ce n’est pas le cas et qu’il n’y a pas d’autres infractions pénales comme des lésions corporelles ou un incendie intentionnel, la qualité de victime n’est reconnue que dans des cas particulièrement graves (consid. 1.5. ss). L’arrêt précise que c’est le degré de l’atteinte de la personne et non la gravité de l’infraction qui est déterminant pour reconnaître la qualité de victime au sens de l’art. 2, al. 1, LAVI (consid. 1.2).

121.En mai 2016, le Conseil fédéral a présenté son rapport sur le droit à la protection contre la discrimination en réponse au postulat Naef (cf. aussi ch. 12). Sur la base d’une étude réalisée par le CSDH, le Conseil fédéral reconnaissait que le droit privé demeure lacunaire dans ce domaine et que certaines des recommandations émises par le CSDH méritent d’être approfondies. Parmi celles-ci, citons notamment l’introduction de normes supplémentaires contre la discrimination dans certains domaines réglés par le droit privé (p. ex. travail, droit du bail, droit des contrats en général), l’extension de la portée du droit d’action des organisations, la réduction des frais des procédures civiles (cf. chap. 1.3.6.) et la sensibilisation à la discrimination multiple. Par ailleurs, le Conseil fédéral s’était dit prêt à améliorer la collecte des données sur les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre et que, dans ce contexte, on pourrait examiner comment relever également des données sur les discriminations multiples.

122.L’étude du CSDH montre que les spécialistes sont encore trop mal informés et trop peu sensibilisés. Plusieurs ONG consultées partagent cet avis (cf. prises de position de la FOIS et de la FSCI dans le cadre de la procédure de consultation). C’est pourquoi le SLR a organisé en 2017, en collaboration avec le Centre suisse de compétence pour les droits humains (CSDH), un colloque dédié à l’accès à la justice en cas de discrimination raciale. Destiné aux spécialistes juridiques et aux collaborateurs des centres de conseil, ce colloque a dressé une vue d’ensemble de la situation juridique actuelle en Suisse et mis en avant les enjeux, obstacles et stratégies possibles au niveau du droit civil et pénal. Pour des informations complémentaires sur la formation et le perfectionnement du personnel judiciaire, nous renvoyons au chapitre 4.1 (ch. 59 ss).

123.Dans le même but d’information, le SLR a mis à jour son guide juridique en étroite collaboration avec le secrétariat de la CFR, et l’a publié sous la forme d’une application web en juillet 2017. Conçu pour les spécialistes du conseil, les praticiens dans le domaine juridique, les victimes et les personnes en formation, ce guide juridique en ligne permet d’accéder rapidement aux informations utiles. Il fournit un aperçu des principales définitions, du cadre juridique et des prestations de conseil disponibles, et il présente les règles applicables dans différents domaines (travail, logement, loisirs, etc.). En plus d’exposer les voies de droit envisageables, chaque module propose des moyens d’action extrajudiciaires éprouvés.

7.Article 7 : Mesures dans les domaines de l’enseignement, de l’éducation, de la culture et de l’information

7.1Information et sensibilisation pour combattre la discrimination raciale

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 12a des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse de mener de vastes campagnes de sensibilisation à tous les niveaux dans les sphères publiques et politiques pour combattre la stigmatisation, les clichés, les stéréotypes et les préjugés dont font l’objet les non-ressortissants, en insistant clairement sur l’ignominie que constitue la discrimination raciale, qui dégrade l’image de personnes et de groupes dans la société.

124.Les actions de sensibilisation et de lutte contre la discrimination raciale les plus efficaces sont celles qui sont proches du quotidien des gens et portées par des acteurs connus par eux. De ce fait, le SLR encourage et soutient ce type de projets portés par les acteurs locaux ainsi que les cantons et communes.

125.Afin de contrer le racisme sur Internet, la Suisse a participé en 2014 et 2015 à la campagne du Conseil de l’Europe « No Hate Speech Movement ». Sur mandat de l’OFAS, le Conseil Suisse des Activités de Jeunesse (CSAJ) a réalisé diverses activités dans ce cadre, comme le développement d’un site Internet qui met à disposition des informations sur le discours de haine en ligne et propose des idées d’actions. En 2015, la CFR a lancé la campagne « Une Suisse à nos couleurs » qui avait pour objectif de sensibiliser l’opinion publique au thème du racisme et de la protection contre la discrimination sur Internet et cible principalement les jeunes. Enfin, le SLR soutient lui aussi des projets en lien avec le racisme dans les médias numériques, et il met à disposition des informations sur son site Internet.

126.Depuis 2014, l’accent est mis sur le développement d’activités de sensibilisation et d’information dans le cadre des PIC. À ce titre, le canton de BS a mené une grande campagne contre la discrimination raciale en 2014 (« Basel zeigt Haltung », prolongée sous l’appellation « Chance » en portant une attention particulière à l’acceptation des réfugiés). Sur le plan national, la Conférence suisse des délégués à l’intégration permet aux cantons de partager leurs bonnes pratiques dans ce domaine. Pour plus d’informations, nous renvoyons au chap. 7.2 et aux informations complémentaires de la Suisse sur trois observations finales du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale concernant ses septième, huitième et neuvième rapports présentés au Comité, conformément au paragraphe 23 des recommandations finales CERD/C/CHE/CO/7 – 9, ad. ch. 12a.

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 12b des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse de prendre les mesures nécessaires pour que les représentations des groupes ethniques dans les médias soient fondées sur des principes de respect et d’équité et sur le souci d’éviter les stéréotypes et que les médias évitent les références inutiles à la race, à l’appartenance ethnique, à la religion et à d’autres caractéristiques d’un groupe susceptibles de favoriser l’intolérance.

127.Compte tenu de la liberté et de l’indépendance des médias garanties par la Constitution (art. 17 Cst.), il appartient aux médias de veiller au respect notamment de l’art. 8 de la Déclaration des devoirs du/de la journaliste, qui stipule le respect de la dignité humaine et l’interdiction de la discrimination fondée sur l’appartenance ethnique ou nationale. Les mécanismes d’autorégulation des médias classiques sont en place ; le Conseil suisse de la presse et l’Autorité indépendante d’examen des plaintes en matière de radio-télévision ont pour tâche d’évaluer le travail des médias sur ce point (art. 4, al. 1, LRTV). Il est également important de souligner que les médias remplissent un rôle d’observateurs qui attirent l’attention sur des faits ou évolutions problématiques, parvenant ainsi à susciter un débat public.

128.Les mécanismes d’autorégulation des réseaux sociaux sont moins institutionnalisés, même si plusieurs médias en ligne ont instauré des mesures pour endiguer les commentaires haineux et racistes (cf. annexe 1). Dans ce domaine, la Suisse privilégie la sensibilisation par des campagnes et la mise en place de la plateforme « Jeunes et médias », qui vise à promouvoir les compétences médiatiques des enfants et des jeunes, y compris par rapport au discours de haine ou sur le thème de l’extrémisme. Pour la période 2017-2019, la plateforme met l’accent sur la prévention de la radicalisation extrémiste en ligne.

129.La collaboration étroite et directe des autorités de police et des autorités judiciaires avec les réseaux sociaux reste toutefois essentielle. Dans un arrêt du 23 juin 2017 (6B_43/2017), le TF confirme le caractère public des propos racistes publiés sur un blog. Il est toutefois ardu d’identifier les auteurs d’infractions et les autorités judiciaires n’ont souvent pas d’autre choix que de recourir aux adresses IP. Par ailleurs, il est souvent difficile de faire appliquer la loi au niveau international, c’est-à-dire de demander des comptes à l’auteur d’une infraction lorsqu’il est à l’étranger.

130.Pour les ONG consultées, le traitement médiatique des groupes et minorités ethniques, culturels et religieux reste une thématique importante, sur laquelle il faut avancer via la formation et la sensibilisation des professionnels (FSCI, cfd) et en encourageant une offre médiatique plurielle (FOIS, cfd). La CFR est en contact avec le Medienausbildungszentrum (MAZ) et le Centre de Formation au Journalisme et aux Médias (CFJM). Le MAZ propose aux journalistes de langue allemande un cours de trois jours sur le thème de l’éthique et du « fairness » dans le journalisme ; dans ce cadre, la discrimination raciale est thématisée. Aux journalistes de langue française, le CFJM offre un cours d’une journée sur le cadre légal du journalisme qui traite, entre autres, de la signification de l’art. 261 bis CP pour le travail journalistique.

131.Le SLR soutient les projets qui ont pour but de proposer aux journalistes et rédactions des informations, outils d’analyse et plateformes d’échanges qui leur permettent d’évaluer leur propre pratique, sans pour autant s’immiscer dans leur travail. Bon nombre de cantons et de villes soutiennent également des projets ou développent des mesures pour lutter contre les stigmatisations basées sur l’origine. Par exemple, la police municipale de la ville de Zurich renonce, depuis novembre 2017, à indiquer d’emblée la nationalité des auteurs présumés d’un délit dans les communiqués de presse ; elle fournit cette information uniquement sur demande.

132.Pour plus informations, nous renvoyons aux « Informations complémentaires de la Suisse sur trois observations finales du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale concernant ses septième, huitième et neuvième rapports présentés au Comité, conformément au paragraphe 23 des recommandations finales CERD/C/CHE/CO/7-9 », ad. ch. 12a.

7.2Éducation et formation à la lutte contre la discrimination raciale

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 18 des observations finales

Le Comité rappelle à la Suisse que l’intégration est un processus à deux sens impliquant tant la communauté majoritaire que les communautés minoritaires et recommande à la Suisse de prendre de nouvelles mesures ciblant la communauté majoritaire pour lutter contre la discrimination raciale. À cet égard, il rappelle la recommandation qu’il avait faite à la Suisse d’adopter un plan national de lutte contre la discrimination raciale et de mener des campagnes d’information pour sensibiliser la population aux manifestations et aux actes de discrimination raciale et à leurs conséquences pour les victimes. Il encourage aussi la Suisse à faire en sorte que les programmes, les manuels scolaires et les supports pédagogiques traitent des questions relatives aux droits de l’homme en s’efforçant de promouvoir le respect et la tolérance mutuels entre les nations et les groupes raciaux et ethniques.

133.Plan d’action national : Avec les programmes d’intégration cantonaux, la Suisse dispose depuis 2014 d’un instrument qui fixe, dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale, des objectifs communs à tous les cantons, mais dont la mise en œuvre est adaptée aux réalités locales. De ce fait, les PIC équivalent à un plan d’action national de lutte contre la discrimination tel qu’il est recommandé par les institutions internationales (ONU, ECRI, etc.).

134.Dans les PIC, la Confédération et les cantons ont établi les objectifs suivants de lutte contre la discrimination : garantir une offre de conseil à toute victime de discrimination ; ouvrir les institutions à une population diversifiée ; sensibiliser un public plus large par des actions et campagnes publiques. Les mesures qui en découlent bénéficient à tous les groupes de population potentiellement touchés par la discrimination raciale, notamment aux personnes issues de la migration et aux ressortissants suisses victimes de discrimination raciale en raison de leur appartenance à un groupe minoritaire.

135.Offre de conseil pour victimes de discrimination raciale : Entre 2014 et 2017, une nouvelle offre de conseil a été créée dans 17 cantons et 9 cantons ont aménagé l’offre déjà existante (p. ex. ajout d’une nouvelle antenne juridique spécialisée dans le canton de Berne). Après cette phase de création et de consolidation de l’offre, il s’agit maintenant d’en assurer le développement qualitatif. En 2016, le SLR a publié, en collaboration avec le Réseau de centres de conseil, un guide sur la « Qualité des prestations de conseil dans le domaine de la protection contre la discrimination ». En 2017 et 2018, plusieurs ateliers ont été organisés afin de promouvoir la qualité des interventions des acteurs du domaine, et un colloque organisé en octobre 2017 traitait des aspects juridiques de la consultation. Par ailleurs, le SLR, en collaboration avec l’association professionnelle AvenirSocial a développé des mesures qui visent à sensibiliser les travailleurs sociaux aux risques de discrimination raciale dans leur pratique professionnelle, et à leur permettre d’identifier et aiguiller les personnes victimes de discrimination raciale vers une offre de conseil spécialisé. Au niveau cantonal, le la qualité de l’offre de conseil est promue par diverses mesures, par exemple par le biais de l’application d’une méthode d’analyse de cas dans les cantons de Suisse centrale ou alors l’organisation de formations, séances d’échanges ou tables rondes dans les cantons de Berne ou Bâle-Ville.

136.Mesures de formation : Pendant la période sous revue et à une exception près, tous les cantons ont proposé des cours de formation de base et de formation continue destinés au personnel interne ou externe à l’administration. Près de la moitié ont mis explicitement l’accent sur des questions liées à la discrimination, tandis que les autres ont abordé la discrimination dans le cadre d’une formation à l’interculturalité.

137.Sensibilisation du grand public  : Près d’un tiers des cantons et plusieurs villes ont saisi l’occasion offerte par la Semaine contre le racisme, qui a lieu tous les ans au mois de mars, pour mettre sur pied des tables rondes, des activités culturelles et d’autres manifestations afin de sensibiliser la population (AG, FR, GE, JU, NE, SG, TI, VD, VS ainsi que les villes de Berne, Lausanne, Lucerne et d’autres communes). Les cantons latins promeuvent leur programme sur un site Internet et sur Facebook. La Semaine contre le racisme permet de renforcer les liens entre les différents acteurs de la société et des milieux culturels, politiques et scientifiques. Des exemples de mesures au niveau cantonal et communal se trouvent à l’annexe 3.

138.Mesures de promotion de la tolérance religieuse : Bon nombre de cantons ont pris des mesures pour promouvoir le dialogue interreligieux et la tolérance religieuse, par exemple par l’organisation de tables rondes des religions ou de mesures d’information ou de formation. Des exemples de mesures au niveau cantonal et communal se trouvent également à l’annexe 3.

139.Mesures dans le cadre scolaire : il convient de rappeler que les thématiques autour des questions de discriminations raciales sont présentes dans les plans d’études régionaux pour la scolarité obligatoire. Dans le Plan d’études romand, ces éléments sont notamment présents dans le domaine « Sciences humaines et sociales », dans le Lehrplan 21 dans le domaine « Ethik, Religion und Gemeinschaft ». Par ailleurs, le Lehrplan  21 contient aussi un volet sur la politique, la démocratie et les droits humains, qui fait partie des sept thématiques transversales sur le développement durable. Dans le contexte de la Journée de la mémoire de l’Holocauste, le Centre IDES de la CDIP rassemble le matériel pédagogique traitant de ce sujet et aussi des questions liées à la xénophobie, la tolérance, le racisme, les droits humains, ainsi que le dialogue interculturel et interreligieux. Concernant les mesures au niveau postobligatoire, de nombreux éléments avaient déjà été signalés dans le précédent rapport. Sur cette base, bon nombre de cantons mettent en place des programmes ou des mesures pour les enfants et les jeunes ; un aperçu d’exemples est présenté dans l’annexe 4.

140.La fondation éducation21 est le Centre national de compétences et de prestations pour l’éducation en vue d’un développement durable en Suisse. À ce titre, elle développe et rassemble notamment du matériel sur les thématiques « racisme, droits humains, citoyenneté » que l’on peut trouver via son catalogue. Pendant la période sous revue, le SLR, en collaboration avec la fondation éducation21, a soutenu 99 projets dans le domaine de la prévention du racisme, pour un montant total de 1,4 million de francs. Les hautes écoles pédagogiques traitent la thématique du racisme dans la formation initiale et continue des enseignants ainsi que dans le cadre de la recherche et des services.

141.Du point de vue institutionnel, il convient de souligner, au niveau des cantons, le rôle de la Commission Éducation et migration (CEM) de la CDIP ainsi que du réseau des délégués cantonaux à l’éducation interculturelle. L’édition 2015 de son colloque CONVEGNO était consacrée à la discrimination et à l’égalité des chances au sein du système éducatif ; un des teliers était consacré très concrètement à la discrimination dans le quotidien scolaire.

142.Au niveau des ONG, la Fondation contre le racisme et l’antisémitisme (GRA) propose depuis 2016 un outil de formation en ligne à l’intention des élèves et enseignants qui souhaitent étudier des sujets en lien avec les droits humains et les discriminations. D’autres associations, parmi lesquelles on retrouve la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (CICAD), organisent pour les écoles diverses activités de sensibilisation sur ces thèmes.

8.Autres recommandations

8.1Ratification d’autres instruments

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 19 des observations finales

Le Comité encourage la Suisse à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels elle n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions se rapportent directement à la discrimination raciale.

143.Nous renvoyons au chapitre 2 de la première partie de ce rapport.

8.2Consultations des organisations actives dans la lutte contre la discrimination raciale

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 20 des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse de poursuivre et d’élargir son dialogue avec les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier de la lutte contre la discrimination raciale, lors de l’élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

144.Dans le cadre de la préparation du présent rapport, le SLR a invité les organisations nationales de lutte contre la discrimination raciale à prendre position par écrit sur les recommandations du CERD et sur leur mise en œuvre. Le but était d’utiliser ces prises de position soit directement dans le rapport à titre d’information complémentaire, soit en les ajoutant en annexe en tant que commentaires critiques. Sur les 32 organisations consultées, trois ont répondu, à savoir la Christliche Friedensdienst (cfd), la Fédération d’organisations islamiques de Suisse (FOIS) et la Fédération suisse des communautés israélites (FSCI). Toutes les organisations seront à nouveau consultées dans le cadre de la rédaction du rapport alternatif.

145.Nous avons intégré les retours des ONG qui ont participé à la consultation directement dans les chapitres pertinents du présent rapport. De manière générale, les avis exprimés soulignent la nécessité de renforcer le dispositif légal suisse en matière de discrimination raciale. Il conviendrait d’inscrire, notamment au niveau du droit civil et administratif, des dispositions visant à interdire la discrimination raciale et à protéger les victimes (FSCI, cfd). Par ailleurs, la norme pénale antiraciste serait de fait aisément contournable (la FOIS estime p. ex. que les musulmans sont de plus en plus souvent dénigrés sciemment en privé et non en public). La cfd estime par ailleurs qu’il serait important d’inscrire dans la réglementation légale les moyens financiers permettant aux services compétents de remplir effectivement leurs tâches. Elle trouve aussi que les cantons accordent relativement peu d’importance à la protection contre la discrimination dans le cadre des PIC. Les ONG considèrent qu’il faut poursuivre et renforcer les mesures d’information et de sensibilisation ; elles préconisent la création d’une institution nationale des droits humains (INDH) et le maintien du soutien à la CFR. Enfin, toutes les ONG insistent sur le rôle clé du monde politique et des médias dans la lutte contre la discrimination raciale et la stigmatisation des minorités.

146.Les documents relatifs à la consultation ainsi qu’un tableau récapitulatif des prises de position sont disponibles à l’annexe 5.

8.3Diffusion

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 21 des observations finales

Le Comité recommande à la Suisse de faire en sorte que ses rapports périodiques soient rendus publics et soient accessibles au moment de leur soumission, et de diffuser de la même manière les observations finales du Comité qui s’y rapportent dans les langues officielles et les autres langues couramment utilisées.

147.Nous renvoyons au septième, huitième et neuvième rapports périodiques de la Suisse (ch. 380 ss).

8.4Document de base commun

Mise en œuvre de la recommandation formulée au ch. 22 des observations finales 

Relevant que la Suisse a soumis son document de base en 2001, le Comité l’encourage à présenter un document de base mis à jour, conformément aux directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant le document de base commun.

148.Le document de base est en cours d’actualisation et sera en principe transmis au HCDH avant la fin de l’année 2018.