Nations Unies

CCPR/C/VNM/CO/3

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

29 août 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits de l ’ homme

Observations finales concernant le troisième rapport périodique du Viet Nam *

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le troisième rapport périodique du Viet Nam (CCPR/C/VNM/3) à ses 3580e et 3581e séances (voir CCPR/C/SR.3580 et 3581), les 11 et 12 mars 2019. À ses 3599e et 3600e séances, le 25 mars 2019, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique du Viet Nam, bien que celui-ci ait été soumis avec plus de 13 ans de retard, et les renseignements qu’il contient. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte de renouer un dialogue constructif avec la délégation de l’État partie au sujet des mesures prises pendant la période considérée pour appliquer les dispositions du Pacte. Il remercie l’État partie des réponses écrites (CCPR/C/VNM/Q/3/Add.1) apportées à la liste de points (CCPR/C/VNM/Q/3), qui ont été complétées oralement par la délégation, ainsi que des renseignements supplémentaires qui lui ont été communiqués par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité salue l’adoption par l’État partie des mesures législatives, institutionnelles et gouvernementales ci-après :

a)L’introduction dans la Constitution révisée de 2013 d’un chapitre sur les droits de l’homme et les droits fondamentaux du citoyen ;

b)Les modifications apportées en 2015 au Code pénal et au Code de procédure pénale, qui, entre autres, prévoient le droit d’accéder à un conseil à tous les stades de la procédure pénale, élargissent les possibilités de bénéficier gratuitement des services d’un conseil et prévoient l’obligation pour les autorités d’enquêtes d’enregistrer les interrogatoires des accusés qui ont lieu dans les locaux officiels ;

c)Les modifications apportées en 2017 à la loi sur l’aide juridictionnelle, qui augmentent la liste des bénéficiaires de ce type d’aide ;

d)Les modifications apportées en 2015 à la loi sur l’application des mesures de garde à vue et de détention provisoire, qui prévoient, entre autres, le droit de recevoir la visite de membres de la famille et le droit à l’assistance d’un conseil, en particulier pendant l’enquête de police ;

e)Les modifications apportées en 2014 à la loi sur la nationalité vietnamienne, qui facilitent l’acquisition de la nationalité par les réfugiés et les apatrides ;

f)La loi de 2011 sur la traite, qui interdit le travail forcé et l’exploitation sexuelle ;

g)La Stratégie nationale pour l’égalité femmes-hommes pour la période 2011‑2020.

4.Le Comité note également avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments internationaux ci-après, ou y a adhéré, le 5 février 2015 :

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées ;

b)La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Application et diffusion du Pacte sur le plan interne

5.Le Comité prend note des efforts que l’État partie fait pour honorer les obligations qui lui incombent au titre du Pacte, notamment de la révision de certains textes législatifs, mais il est néanmoins préoccupé par l’incompatibilité qui subsiste entre le cadre juridique interne et le Pacte. Il note avec préoccupation que la Constitution ne tient pas pleinement compte des droits garantis par le Pacte et que la législation nationale impose des restrictions trop générales aux droits énoncés dans le Pacte, y compris pour des motifs de sécurité nationale. Le Comité regrette que le niveau de connaissance du Pacte dans l’État partie soit faible, malgré l’organisation d’actions de sensibilisation, et qu’aucune décision de justice ne se réfère au Pacte pour l’application ou l’interprétation du droit interne. Il regrette aussi que l’État partie n’ait toujours pas ratifié le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte (art. 2).

6. L ’ État partie devrait :

a) Revoir son cadre juridique interne pour recenser les lacunes ainsi que les conflits avec le Pacte ; faire en sorte que tous les droits énoncés dans le Pacte aient plein effet juridique dans l ’ ordre interne ; et, lorsqu ’ il y a lieu, prévoir des restrictions claires et précises à l ’ exercice des droits énoncés dans le Pacte, qui soient nécessaires et proportionnées ;

b) Redoubler d ’ efforts pour dispenser effectivement des cours de formation spécialisés sur le Pacte aux fonctionnaires, à la police et aux agents de la force publique , aux procureurs et aux juges, afin qu ’ ils l ’ appliquent et l ’ interprètent, et aux membres de l ’ Assemblée nationale pour qu ’ ils adoptent des lois à la lumière du Pacte, et organiser des actions de sensibilisation à l ’ intention du grand public ;

c) Envisager de ratifier le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte, qui établit un mécanisme d ’ examen des plaintes émanant de particuliers (CCPR/CO/75/VNM, par. 6).

Institution nationale des droits de l’homme

7.Tout en prenant note de l’existence d’organes gouvernementaux nationaux dotés de mandats relatifs aux droits de l’homme, le Comité demeure préoccupé par l’absence d’un organe indépendant conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Il regrette qu’aucune action concrète assortie d’un calendrier n’ait été entreprise en vue de la création d’une telle institution (art. 2).

8. Comme cela a déjà été recommandé à l ’ État partie (CCPR/CO/75/VNM, par. 11), le Comité répète qu e celui-ci devrait créer sans tarder une institution nationale pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme qui soit conforme aux Principes de Paris.

État d’urgence

9.Le Comité relève que l’État partie n’a pas déclaré d’état d’urgence depuis 2002. Il observe toutefois avec préoccupation que les lois et réglementations en vigueur qui régissent l’état d’urgence ne définissent pas les dérogations et restrictions aux droits de l’homme permises en cas d’état d’urgence et n’interdisent pas expressément de déroger aux dispositions du Pacte qui ne sont pas susceptibles de dérogation (art. 4).

10. L ’ État partie devrait promptement mettre sa législation régissant l ’ état d ’ urgence en conformité avec les dispositions de l ’ article 4 du Pacte, suivant l ’ interprétation donnée par le Comité dans son observation générale n o 29 (2001) concernant les dérogations aux dispositions du Pacte pendant un état d ’ urgence, s ’ agissant en particulier des dispositions du Pacte qui ne sont pas susceptibles de dérogation, et limiter les dérogations à ce qui est strictement exigé par la situation. S ’ il use du droit de dérogation, l ’ État partie doit, par l ’ entremise du Secrétaire général de l ’ ONU, signaler aussitôt aux autres États parties les dispositions auxquelles il a dérogé pendant un état d ’ urgence, ainsi que les motifs de cette dérogation, comme prévu par le paragraphe 3 de l ’ article 4 du Pacte.

Lutte contre le terrorisme

11.Le Comité est préoccupé par l’utilisation d’une terminologie peu claire dans le cadre juridique de la lutte contre le terrorisme, en particulier s’agissant de l’infraction de « terrorisme dirigé contre le Gouvernement populaire » visée à l’article 113 du Code pénal, qui est vague et peut se prêter à une application arbitraire et abusive (art. 2, 9 et 14).

12. L ’ État partie devrait veiller à ce que la législation antiterroriste soit pleinement conforme aux normes internationales et vise uniquement les infractions qui constituent à l ’ évidence des actes de terrorisme , et devrait défini r ces actes de manière précise et stricte.

Cadre relatif à la non-discrimination

13.Le Comité relève avec préoccupation que le cadre juridique actuel n’offre pas une protection complète contre la discrimination fondée sur tous les motifs interdits par le Pacte (art. 2 et 26).

14. L ’ État partie devrait envisager d ’ adopter une loi antidiscrimination générale pour que son cadre juridique offre une protection complète et efficace contre toutes les formes de discrimination dans tous les domaines et contienne une liste complète de tous les motifs de discrimination, dont la race, la couleur, l ’ origine nationale ou sociale, la naissance, le handicap, l ’ âge, l ’ orientation sexuelle et l ’ identité de genre et toute autre situation. Il devrait aussi faire en sorte que les cas de discrimination signalés soient traités de manière efficace et que les victimes obtiennent pleinement réparation.

Orientation sexuelle, identité de genre, intersexualité et personnes touchées par le VIH

15.Le Comité se félicite des efforts que l’État partie a faits pour améliorer la situation des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes, notamment en supprimant l’interdiction du mariage entre personnes de même sexe et en prévoyant la reconnaissance juridique du sexe. Il relève qu’une loi sur les personnes transgenres est en cours de rédaction. Il constate néanmoins avec préoccupation que des personnes continuent de faire l’objet d’une discrimination fondée sur leur orientation sexuelle et leur identité de genre. Il constate aussi avec inquiétude que les couples de même sexe ne sont pas reconnus et protégés par la loi, et que des nourrissons et des enfants de moins de 9 ans présentant des variations du développement sexuel à la naissance subissent parfois des actes médicaux irréversibles visant à leur attribuer un sexe, pratiqués avant que les intéressés ne soient en âge de donner leur consentement libre et éclairé. Le Comité note de plus avec préoccupation que les personnes qui vivent avec le VIH continuent d’être victimes de discrimination et de stigmatisation (art. 2, 3, 7, 9, 17, 24 et 26).

16. L ’ État partie devrait :

a) R edoubler d ’ efforts pour mettre fin à toutes les formes de discrimination et de violence et à la stigmatisation sociale dont sont victimes des personnes en raison de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de leur séropositivité , et donner accès à des recours utiles aux victimes de tels actes ;

b ) M ettre en place une procédure de reconnaissance juridique du genre sans conditions médicales, qui soit compatible avec le Pacte  ;

c ) E nvisager de reconnaître juridiquement les couples de même sexe et faire en sorte qu ’ ils soient protégés par la loi  ;

d) Prendre des mesures pour mettre fin à la pratique d ’ actes médicaux irréversibles sur des enfants intersexes qui ne sont pas encore capables de donner leur consentement librement et en toute connaissance de cause, sauf lorsque de telles procédures sont absolument nécessaires d ’ un point de vue médical .

Personnes handicapées

17.Malgré les efforts faits pour promouvoir les droits des personnes handicapées, le Comité est préoccupé par la discrimination dont ces personnes sont victimes, y compris en ce qui concerne l’accès aux services publics (art. 2 et 26).

18. L ’ État partie devrait redoubler d ’ efforts pour protéger les personnes handicapées contre la discrimination et faire en sorte qu ’ elles aient pleinement accès aux services publics, y compris à l ’ éducation, à l ’ emploi et aux transports publics ; et mener des actions de sensibilisation aux droits des personnes handicapées, notamment auprès des fonctionnaires, des professionnels de la santé et du grand public.

Égalité des droits entre hommes et femmes

19.Si le Comité salue les efforts faits pour mettre fin à la discrimination fondée sur le genre, il note avec préoccupation que certains textes législatifs contiennent encore des dispositions discriminatoires, qui sont incompatibles avec le Pacte. Il s’inquiète en outre de la participation limitée des femmes à la vie politique et des préjugés, des stéréotypes et de la discrimination fondés sur le genre dont elles continuent d’être victimes, en particulier dans les zones rurales (art. 2, 3, 17, 25 et 26).

20. L ’ État partie devrait modifier sa législation, notamment le Code du travail, pour la mettre en conformité avec le Pacte. Il devrait renforcer les mesures visant à accroître la participation des femmes dans toutes les sphères, en particulier les postes de décision de haut niveau et la vie politique, si nécessaire au moyen de mesures spéciales temporaires. Il devrait aussi intensifier les efforts visant à éliminer les préjugés et les stéréotypes fondés sur le genre.

Violence à l’égard des femmes

21.Malgré les mesures prises pour lutter contre la violence fondée sur le genre, le Comité s’inquiète de ce que la violence familiale à l’égard des femmes persiste. Il note avec préoccupation que si le viol est érigé en infraction dans le Code pénal, le viol conjugal n’est pas expressément réprimé. Il est aussi préoccupé par les informations faisant état du recours fréquent à la conciliation et à la médiation dans les affaires de violence familiale, ce qui peut favoriser les hommes et entraver l’accès des femmes à la justice et à des recours utiles (art. 2, 3, 6, 7 et 26).

22. L ’ État partie devrait  :

a) Redoubler d’efforts pour prévenir et combattre toutes les formes de violence fondée sur le genre ;

b) Ériger expressément en infraction le viol conjugal et les violences sexuelles au sein du couple ;

c) Renforcer les mesures de sensibilisation à la violence familiale et à ses effets préjudiciables sur la vie des victimes ;

d) Lutter contre les facteurs qui contribuent à dissuader les victimes de signaler les faits de violence ;

e) Veiller à ce que des enquêtes approfondies soient menées sur les cas de violence, que les auteurs de tels actes soient poursuivis et soient punis s’ils sont reconnus coupables, et à ce que les victimes soient indemnisées ;

f) Ne pas faire pression sur les victimes pour qu’elles acceptent des modes non judiciaires de règlement des conflits.

Peine de mort

23.Le Comité note avec préoccupation que la peine de mort peut toujours être prononcée pour certains crimes, dont des crimes liés aux stupéfiants, des crimes économiques et autres crimes qui ne relèvent pas des crimes les plus graves au sens du paragraphe 2 de l’article 6 du Pacte. Le Comité observe que le Président a le pouvoir de commuer les peines capitales, mais il est préoccupé par les informations faisant état d’un nombre élevé de condamnations à la peine capitale et d’exécutions. Il est également préoccupé par le fait que certains des procès ayant abouti à de telles condamnations peuvent ne pas avoir été équitables et pourraient avoir été entachés d’irrégularités de procédure, comme dans les affaires concernant Ho Duy Hai et Van Manh. Le Comité est enfin préoccupé par le manque de données officielles mises à la disposition du public sur le nombre de personnes condamnées à mort, qui ont été exécutées ou qui sont en attente d’exécution (art. 6 et 14).

24. Le Comité réaffirme (CCPR/CO/75/VNM, par. 7) que l ’ État partie devrait :

a) Envisager d ’ instaurer un moratoire sur l ’ application de la peine de mort et de ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, visant à abolir la peine de mort, ou d ’ y adhérer  ;

b) En attendant le moratoire , modifier le Code pénal de sorte à réduire encore le nombre de crimes passibles de la peine de mort et faire en sorte que cette peine soit maintenue uniquement pour les crimes les plus graves, à savoir les crimes d ’ une gravité extrême comprenant la commission d ’ un homicide volontaire ;

c) Faire en sorte que la peine de mort ne soit obligatoire pour aucun crime et, que si elle est prononcée, elle ne le soit jamais en violation des dispositions du Pacte, notamment celles qui concernent les garanties d ’ un procès équitable ; et informer suffisamment tôt les condamnés à mort et leur famille de la date et de l ’ heure prévues pour l ’ exécution ;

  d) Faire en sorte que la grâce ou une commutation de la peine de mort puissent dans tous les cas être effectivement accordées, indépendamment du crime commis ;

e) Publier des chiffres officiels concernant les condamnations à mort et les exécutions, ventilés par sexe, âge, origine ethnique, religion et crime commis .

Droit à la liberté et à la sécurité de sa personne

25.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles des personnes, en particulier des défenseurs des droits de l’homme, des militants et des responsables religieux, peuvent faire l’objet d’arrestations et de détentions arbitraires et de détentions au secret, sans inculpation. Il s’inquiète du recours excessif à la détention provisoire en l’absence de garanties juridiques telles que la comparution devant un juge, l’accès à un avocat dès le moment de l’arrestation et le droit d’informer des membres de la famille. Le Comité relève avec préoccupation qu’après leur remise en liberté, certaines personnes sont de fait assignées à résidence. Il observe avec inquiétude qu’en vertu de la législation nationale :

a)Toute personne arrêtée ou détenue dans le cadre d’une affaire relative à une infraction concernant la sécurité nationale peut se voir refuser l’accès à un avocat pendant toute la durée de l’enquête ;

b)Toute personne arrêtée ou détenue du chef d’une infraction pénale peut être placée en garde à vue avec l’autorisation d’un procureur, lequel peut également décider de toute prolongation de cette mesure, qui peut être d’une durée indéfinie dans les affaires relatives à des infractions concernant la sécurité nationale ;

c)C’est un procureur et non un juge qui décide de la légalité de la détention des personnes privées de liberté (art. 2 et 9).

26. Comme cela lui a déjà été recommandé (CCPR/CO/75/VNM, par. 8), l ’ État partie devrait mettre sa législation et sa pratique relatives à la détention en conformité avec l ’ article 9 du Pacte, notamment en faisant en sorte que :

a) T oute personne arrêtée ou détenue du chef d ’ une inculpation pénale ait accès à un conseil dès le début de sa privation de liberté et soit rapidement présentée à un juge ou à une autre autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires, normalement dans les quarante-huit heures, afin que la détention fasse l ’ objet d ’ un contrôle judiciaire ;

b) L e contrôle judiciaire de la détention de toute personne privée de liberté satisfasse aux normes prévues par le paragraphe 4 de l ’ article 9 du Pacte et comporte un examen des faits sur lesquels repose la détention. Le Comité appelle l ’ attention sur son observation générale n o 35 (2014) sur la liberté et la sécurité de la personne, en particulier sur les paragraphes 32, 33 et 39, dans lesquels il est notamment précisé qu ’ un procureur ne peut pas être considéré comme une autorité habilitée à exercer des fonctions judiciaires au sens du paragraphe 3 de l ’ article 9 du Pacte.

Torture et mauvais traitements

27.Le Comité s’inquiète de ce que la législation pénale, en particulier le Code pénal, n’érige pas expressément la torture en infraction. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles l’usage de la torture et des mauvais traitements est généralisé, en particulier pendant la détention provisoire, et aboutit parfois à des décès en détention, notamment de membres de minorités ethniques ou religieuses. Il relève avec préoccupation que les familles qui cherchent à connaître les causes du décès de leur proche en détention subissent des représailles (art. 2, 6, 7 et 10).

28. L ’ État partie devrait prendre des mesures énergiques pour mettre fin à la torture et aux mauvais traitements et, plus précisément pour :

a) Modifier le Code pénal et les autres textes législatifs pour réprimer expressément la torture et en donner une définition conforme à l ’ article 7 du Pacte et aux autres normes internationales, de préférence en en faisant une infraction autonome imprescriptible emportant des peines proportionnées à la gravité du crime commis ;

b) Faire en sorte que toutes les allégations de torture et de mauvais traitements et tous les cas de décès en détention fassent promptement l ’ objet d ’ enquêtes approfondies par un organisme indépendant et impartial, que les auteurs de tels actes soient poursuivis et, s ’ ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines proportionnées à la gravité du crime commis, et que les victimes et, le cas échéant, leur famille, obtiennent pleine réparation, y compris des moyens de réadaptation et une indemnisation adéquate.

Conditions de détention

29.Le Comité est préoccupé par les informations concordantes concernant les mauvaises conditions de détention, y compris le surpeuplement, l’utilisation du placement à l’isolement prolongé, la pratique consistant à enchaîner les détenus, les violences exercées par des détenus à l’instigation d’agents pénitentiaires, la non-séparation des détenus en bonne santé des détenus atteints de maladies contagieuses, l’exposition volontaire de détenus à l’infection à VIH, le refus de soins médicaux et les transfèrements punitifs de détenus. Il est préoccupé par les informations selon lesquelles les prisonniers d’opinion recevraient un traitement discriminatoire par rapport aux autres détenus et ce, en application de la Circulaire 37 du Ministère de la sécurité publique (2011), qui prévoit pour les prisonniers d’opinion une détention séparée qui, en pratique, est assimilable à une mise à l’isolement qui peut être prolongée indéfiniment. Il regrette l’absence d’un mécanisme national chargé de surveiller et d’inspecter régulièrement et en toute indépendance les centres de détention et les prisons, et le manque d’informations sur la population carcérale totale comparée à la capacité d’accueil des prisons, ventilées par établissement pénitentiaire (CCPR/CO/75/VNM, par. 12) (art. 7, 9 et 10).

30. L ’ État partie devrait :

a) Améliorer les conditions de détention pour les rendre conformes au Pacte et à l ’ Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela) ;

b) Remédier au surpeuplement dans les lieux de détention, notamment en recourant à des mesures non privatives de liberté conformément au Pacte et à d ’ autres normes internationales telles que les Règles minima des Nations Unies pour l ’ élaboration de mesures non privatives de liberté (Règles de Tokyo) ;

c) S ’ abstenir de placer des détenus à l ’ isolement, sauf dans des circonstances tout à fait exceptionnelles et pour des périodes strictement limitées lorsque cette mesure est objectivement justifiable et proportionnée , et éviter de recourir à des transfèrements punitifs pour éloigner les détenus de leur famille ;

d) Faire en sorte que les agents pénitentiaires et les détenus agissant sous leurs ordres soient tenus responsables des tortures et des mauvais traitements infligés ;

e) Garantir que les personnes privées de liberté reçoivent des soins médicaux adéquats et que les détenus en bonne santé soient séparés de ceux atteints de maladies hautement contagieuses ;

f) Mettre en place un mécanisme indépendant et efficace chargé de surveiller régulièrement les conditions de détention dans les lieux de privation de liberté ;

g) Envisager d ’ adhérer au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture.

Centres de désintoxication obligatoire

31.Le Comité est préoccupé par la situation des toxicomanes enfermés dans des centres de désintoxication, qui seraient soumis à un traitement obligatoire et au travail forcé. Il s’inquiète des informations faisant état de l’insuffisance des soins médicaux et de la pénibilité des conditions de travail, ainsi que du grand nombre de personnes enfermées dans ces centres (art. 8 à 10 et 24).

32. L ’ État partie devrait :

a) P rocéder à une révision générale des lois, politiques et pratiques concernant les toxicomanes, en particulier ceux qui sont privés de liberté dans des centres de désintoxication obligatoire, en vue de les rendre pleinement conformes au Pacte, notamment en mettant fin au travail forcé dans ces centres ;

b) V eiller à ce que toutes les personnes détenues pour des problèmes de toxicomanie soient traitées avec humanité et le respect de la dignité inhérente à la personne humaine ;

c) M ettre en place un mécanisme eff icace officiellement habilité à statuer sur les plaintes des personnes privées de liberté dans un centre de désintoxication obligatoire .

Indépendance du pouvoir judiciaire et procès équitable

33.Le Comité s’inquiète de l’influence que le parti au pouvoir exerce sur le parquet et la magistrature, dont l’indépendance est de ce fait compromise, ainsi que du manque de confiance de la population dans la justice. Il demeure également préoccupé par l’amovibilité des juges.

34. Le Comité réitère sa recommandation (CCPR/CO/75/VNM, par. 9) tendant à ce que l ’ État partie prenne immédiatement des mesures pour garantir à la magistrature et au parquet indépendance et impartialité, la liberté d ’ agir sans ingérence et un processus de nomination transparent et impartial.

35.Le Comité est inquiet des allégations de violation des garanties relatives à un procès équitable dont sont victimes les détenus, en particulier les défenseurs des droits de l’homme, les militants politiques et les personnes accusées d’atteintes à la sécurité nationale. Ces violations consistent notamment à priver les intéressés du droit de bénéficier de l’assistance d’un défenseur, de choisir leur avocat, d’être jugés dans un délai raisonnable, de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de leur défense et de s’entretenir avec leur avocat en toute confidentialité conformément à l’article 19 du Code pénal. Le Comité est préoccupé par les informations indiquant que les avocats qui représentent les défenseurs des droits de l’homme, les militants politiques et les personnes accusées d’atteintes à la sécurité nationale risquent de faire l’objet de représailles, d’être radiés du barreau, harcelés, menacés, arbitrairement arrêtés et détenus et physiquement agressés, ce qui porte atteinte au droit à un procès équitable. Le Comité est particulièrement inquiet du sort de l’avocat Nguyen Van Dai(art. 2, 9, 14 et 22).

36. L ’ État partie devrait garantir :

a) Que chacun ait le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et sans retard excessif, conformément à l ’ article 14 du Pacte et à l ’ observation générale n o 32 (2007) du Comité sur le droit à l ’ égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable ;

b) Que les détenus aient la possibilité de s ’ entretenir rapidement, sans entrave et dans de bonnes conditions avec l ’ avocat de leur choix ou de bénéficier d ’ une assistance juridictionnelle gratuite dès leur placement en détention, que toutes les communications entre le conseil et l ’ accusé demeurent confidentielles et que la présomption d ’ innocence soit strictement respectée ;

c) Que les avocats soient à même de conseiller et de représenter les personnes accusées d ’ une infraction pénale conformément à la déontologie établie, sans être l ’ objet de restrictions, d ’ influences, de pressions ou d ’ interventions injustifiées de la part de qui que ce soit, conformément aux Principes de base relatifs au rôle du barreau ; et que les menaces et atteintes dirigées contre des avocats donnent lieu à des enquêtes et à des poursuites ainsi qu ’ à l ’ octroi de réparations effectives.

Justice pour mineurs

37.Tout en saluant les efforts faits pour renforcer l’administration de la justice pour mineurs, le Comité note avec préoccupation qu’il n’existe des tribunaux des affaires familiales et pour enfants que dans deux provinces. Il s’inquiète en outre de la définition de l’enfant, considéré comme une personne de moins de 16 ans, d’où les lacunes dans la protection des mineurs âgés de 16 et 17 ans, surtout de ceux qui sont privés de liberté. Le Comité note avec préoccupation qu’en dépit de l’adoption de mesures de substitution à la privation de liberté pour les enfants, le placement en détention d’enfants en conflit avec la loi resterait fréquent (art. 9, 14 et 24).

38. L ’ État partie devrait  :

a) E nvisager de modifier sa législation de façon à définir l ’ enfant comme étant une personne âgée de moins de 18 ans, conformément à la norme internationale ;

b) C ontinuer de renforcer le système de justice pour mineurs en créant de nouveaux tribunaux spécialisés et en les dotant de moyens suffisants, y compris en nommant des juges spécialisés qualifiés ;

c) G arantir que la détention et l ’ incarcération ne soient utilisées qu ’ en dernier ressort et pour la durée la plus brève possible, et que les enfants en détention soient séparés des adultes.

Traite des êtres humains

39.Le Comité note avec préoccupation que les établissements d’aide aux victimes et les centres de protection sociale pour les groupes vulnérables, y compris les victimes de la traite, manquent apparemment de moyens et qu’il n’existe pas d’abris réservés aux hommes et aux enfants. Il s’inquiète de ce que les victimes de la traite des êtres humains ont un accès limité aux services sociaux, faute notamment de livret d’enregistrement des ménages, et de ce que l’attitude de stigmatisation et les représailles des communautés locales dissuadent parfois les victimes de solliciter ces services (art. 2, 3, 8 et 24).

40. L ’ État partie devrait  :

a) Intensifier ses efforts pour prévenir, éliminer et réprimer la traite des personnes ;

b) Accorder aux victimes une protection, une assistance et des recours effectifs ;

c) Garantir aux victimes, hommes et enfants compris, un accès aux services sociaux et des abris en nombre suffisant et dotés des ressources nécessaires ;

d) Poursuivre ses efforts de sensibilisation en vue de mettre fin à la stigmatisation des victimes de la traite.

Droit de quitter son pays et d’y entrer

41.Le Comité note avec préoccupation que le Code pénal incrimine « la fuite à l’étranger ou la défection dans le but de s’opposer à l’administration du peuple » (art. 121). Il s’inquiète des informations indiquant que des personnes appartenant aux minorités ethniques et aux peuples autochtones sont empêchées de quitter le territoire de l’État partie pour chercher asile ailleurs. Il s’inquiète aussi de ce que les personnes qui fuient peuvent être renvoyées de force, avec la collaboration de pays voisins, et faire l’objet de poursuites pénales, y compris en application de la disposition susmentionnée. Le Comité est préoccupé par d’autres restrictions arbitraires, en particulier contre les défenseurs des droits de l’homme, comme l’interdiction de se rendre à l’étranger, la confiscation ou le refus de délivrance du passeport ou l’obligation de s’exiler (art. 2, 9 et 12).

42. L ’ État partie devrait s ’ abstenir de contraindre des citoyens à l ’ exil et respecter leur droit d ’ être protégés contre toute action les empêchant d ’ entrer ou de séjourner sur le territoire conformément au paragraphe 4 de l ’ article 12 du Pacte et à l ’ observation générale n o 27 (1999) du Comité sur la liberté de circulation. L ’ État partie devrait garantir le strict respect de la liberté de quitter son pays, notamment en abrogeant l ’ article 91 du Code pénal , s ’ abstenir d ’ imposer arbitrairement des interdictions de déplacement , garantir que toute interdiction de déplacement est justifiée au regard du paragraphe 3 de l ’ article 12 du Pacte , et lever les interdictions contraires à cet article.

Liberté de religion

43.Le Comité s’inquiète de ce que la loi de 2016 sur la religion et la conviction restreigne indûment la liberté de religion et de conviction, avec par exemple le système d’enregistrement et de reconnaissance imposé aux organisations religieuses et les restrictions sur les activités religieuses reposant sur une interprétation vague et large des dispositions législatives relatives à la sécurité nationale et à l’unité sociale.Il note aussi avec préoccupation que des membres et responsables de communautés religieuses, essentiellement de groupes religieux non enregistrés ou non reconnus, et des membres de minorités ethniques ou de peuples autochtones font l’objet de diverses formes de surveillance, harcèlement, intimidation, confiscation ou destruction de biens, et sont contraints de renoncer à leur foi, poussés à rejoindre une communauté religieuse concurrente et physiquement agressés, parfois mortellement. Il est inquiet des informations indiquant que des acteurs non étatiques, comme les « associations du drapeau rouge », agressent des communautés catholiques et participent à des activités de propagande qui incitent à la discrimination religieuse, à la violence et aux discours de haine, ou qui les encouragent (art. 2, 18 à 20 et 26).

44. L ’ État partie devrait rendre sa législation conforme à l ’ article 18 du Pacte et s ’ abstenir de toute action susceptible de limiter la liberté de religion ou de conviction au-delà des restrictions autorisées par cet article, et prendre en considération les recommandations du Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction ( voir A/HRC/28/66/Add.2). Il devrait adopter des mesures visant à prévenir et à combattre promptement et efficacement toutes les atteintes injustifiées à la liberté de religion et tous les cas de discours de haine, d ’ incitation à la discrimination, à la violence ou à des crimes de haine présumés , et veiller à ce que les responsables soient traduits en justice .

Liberté d’expression

45.Le Comité regrette les restrictions contraignantes imposées dans l’État partie à la liberté d’opinion et d’expression, notamment à travers des lois et des pratiques qui ne sont apparemment pas conformes aux principes de sécurité juridique, de nécessité et de proportionnalité, comme par exemple :

a)Les dispositions vagues et générales définissant les infractions visées aux articles 109, 116, 117 et 331 du Code pénal et leur invocation pour limiter la liberté d’opinion et d’expression ; et la définition de certaines infractions touchant à la sécurité nationale, qui englobe des activités légitimes telles que l’exercice du droit à la liberté d’expression ;

b)Le contrôle de l’État sur les médias, notamment les restrictions visant à assurer une adhésion et un soutien sans faille à l’action gouvernementale en particulier dans le cadre de la loi de 2016 sur la presse qui interdit toute critique à l’endroit du gouvernement ;

c)La loi de 2018 sur la cybersécurité et d’autres réglementations qui réduisent la liberté d’expression dans le cyberespace en interdisant la fourniture et l’utilisation de services Internet pour la diffusion d’informations hostiles ou critiques à l’égard de l’État, et la création de la cyberunité Force 47 pour contrôler Internet ;

d)Les arrestations et détentions arbitraires, les procès inéquitables et les condamnations pénales visant notamment des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des blogueurs et des avocats accusés d’avoir critiqué les autorités de l’État ou les politiques publiques, y compris en ligne, comme c’est le cas du défenseur des droits de l’homme et de l’environnement et blogueur Nguyen Ngoc Nhu Quynh (art. 9, 14, 19 et 21).

46. L ’ État partie devrait prendre d ’ urgence toutes les mesures nécessaires, y compris en revoyant sa législation, pour mettre un terme aux violations du droit à la liberté d ’ expression en ligne et hors ligne, et veiller à ce que les restrictions n ’ aillent pas au-delà des limites strictement définies stipulées à l ’ article 19 du Pacte, compte tenu de l ’ observation générale n o 34 (2011) du Comité sur la liberté d ’ opinion et la liberté d ’ expression. Il devrait aussi promouvoir des médias pluralistes qui puissent mener leur activité à l ’ abri de toute ingérence injustifiée de l ’ État.

Liberté de réunion pacifique

47.Le Comité demeure préoccupé (CCPR/CO/75/VNM, par. 21) par les restrictions excessives imposées à la liberté de réunion pacifique et aux rassemblements publics, notamment autour des droits de l’homme. Il s’inquiète des allégations faisant état d’un usage disproportionné de la force et d’arrestations arbitraires par les forces de l’ordre pour perturber des manifestations, notamment des manifestations défendant les droits du travail ou dénonçant la confiscation de terres ou la catastrophe écologique de l’aciérie Formosa (art. 21).

48. L ’ État partie devrait  :

a) Garantir et protéger effectivement la liberté de réunion pacifique et se garder d ’ imposer des restrictions incompatibles avec l ’ article 21 du Pacte ;

b) Veiller à ce que tous les cas d ’ usage excessif de la force fassent rapidement l ’ objet d ’ enquêtes impartiales et efficaces et à ce que les responsables soient traduits en justice ;

c) Prendre des mesures pour prévenir et éliminer efficacement toutes les formes d ’ usage excessif de la force par les forces de l ’ ordre, notamment en dispensant une formation concernant le recours à la force et les Principes de base sur le recours à la force et l ’ utilisation des armes à feu par les responsables de l ’ application des lois.

Liberté d’association

49.Le Comité prend note du projet d’adoption d’une loi sur la liberté d’association, mais continue de s’inquiéter (CCPR/CO/75/VNM, par. 20) des restrictions injustifiées imposées à la création, à l’administration et au fonctionnement des associations publiques, notamment au droit de constituer des syndicats indépendants. Il est particulièrement préoccupé par les réglementations restrictives concernant les financements venant de l’étranger, lesquelles peuvent être utilisées pour resserrer le contrôle sur les associations et limiter leur capacité à recevoir de tels financements (art. 2, 6, 19, 22 et 26).

50. L ’ État partie devrait donner pleinement effet au droit à la liberté d ’ association garanti par la Constitution, procéder rapidement à l ’ adoption de la loi sur la liberté d ’ association et veiller à ce que ses dispositions, ainsi que les règles et pratiques en la matière, soient conformes à l ’ article 22 du Pacte . L ’ État partie devrait  également  :

a) Respecter le droit des individus de constituer un syndicat ou une association ou d ’ adhérer à l ’ association de leur choix, notamment dans le domaine des droits de l ’ homme ;

b) Faire en sorte que les règles régissant les financements étrangers des associations ne se traduisent pas par un contrôle indu de ces associations ou une ingérence injustifiée qui nuirait à leur capacité de fonctionner effectivement .

Défenseurs des droits de l’homme

51.Le Comité est préoccupé par les informations indiquant que les défenseurs des droits de l’homme et les acteurs de la société civile font l’objet d’une répression accrue de la part des forces de sécurité, qui recourent à des menaces, des actes d’intimidation et des agressions physiques pour les dissuader de mener leurs activités légitimes. Il est également préoccupé par les mesures de représailles subies par des défenseurs des droits de l’homme, notamment à cause de leur coopération avec l’ONU. Pareilles pratiques, qui s’ajoutent aux actes déjà dénoncés (voir par. 45 et 47 ci-dessus), empêchent la création d’un espace civique où les individus peuvent véritablement exercer et promouvoir les droits de l’homme en toute sécurité (art. 2, 9, 19, 21 et 22).

52. L ’ État partie devrait garantir que les défenseurs des droits de l ’ homme et autres acteurs de la société civile soient protégés contre les menaces, les intimidations et les atteintes physiques, et enquêter sur de tels actes et poursuivre et condamner leurs auteurs. Il devrait leur laisser la latitude de mener leurs activités, notamment de coopérer avec l ’ ONU, sans crainte de faire l ’ objet de restrictions ou de représailles.

Participation à la conduite des affaires publiques

53.Le Comité demeure préoccupé (CCPR/CO/75/VNM, par. 20) par le fait qu’il est interdit de créer d’autres partis politiques que le Parti communiste du Viet Nam et que les principes et procédures régissant les élections ne garantissent pas le droit des citoyens de participer à la conduite des affaires publiques et de voter et d’être élus comme le prévoit l’article 25 du Pacte. Il est également préoccupé par :

a)L’obligation faite aux candidats indépendants de se prêter à toute une série de négociations avec le Front de la Patrie, qui est dirigé par le Parti communiste, pour pouvoir présenter leur candidature ;

b)Les irrégularités qui ont entaché les précédentes élections, notamment à cause des votes par procuration ;

c)L’absence d’un organisme indépendant de surveillance des élections ;

d)La déchéance du droit de vote dont font globalement l’objet les détenus qui purgent leur peine (art. 2, 10 et 25).

54. L ’ État partie devrait adopter un système électoral garantissant que tous les citoyens jouissent de leurs droits sur un pied d ’ égalité, conformément au Pacte, en particulier à l ’ article 25, en assurant notamment de véritables élections , totalement transparentes , et un régime politique pluraliste , en s ’ absten ant de recourir à des dispositions de droit pénal pour exclure de fait des candidats de l ’ opposition du processus électoral , et en revo yant la législation privant du droit de vote les détenus qui ont été condamnés.

Droits des personnes appartenant à des minorités

55.Le Comité s’inquiète du fait que l’État partie ne reconnaît pas les peuples autochtones dans le pays. Il constate que des politiques concernant les minorités ethniques ont été adoptées, mais il est préoccupé par les lacunes qui subsistent dans la promotion et la protection des droits des personnes appartenant aux minorités ethniques ou religieuses et aux peuples autochtones. Il constate de plus avec inquiétude que ces communautés subissent des discriminations, notamment dans l’éducation, l’emploi et d’autres services publics. Il demeure préoccupé par le fait que ces communautés ne sont pas suffisamment consultées dans le cadre des processus décisionnels portant sur des questions ayant des incidences sur leurs droits, comme la confiscation de terres et leur affectation à des projets de développement, notamment des terres traditionnelles et ancestrales, et qu’elles ne bénéficient pas d’une réparation appropriée. Il est aussi inquiet des effets négatifs que ces projets de développement ont sur la culture, le mode de vie, l’utilisation de la terre et des ressources de ces communautés et leurs moyens de subsistance, qui entraînent une exacerbation des inégalités économiques (art. 2, 26 et 27).

56. L ’ État partie devrait :

a) Adopter des lois et des mesures afin de promouvoir et protéger pleinement les droits des personnes qui appartiennent aux minorités et aux peuples autochtones, notamment leur droit de jouir de leur propre culture, de professer et de pratiquer leur propre religion et d ’ utiliser leur propre langue ;

b) Mettre en œuvre, dans les régions peuplées par des personnes appartenant aux minorités ethniques et aux peuples autochtones, des programmes de croissance économique qui ne leur soient pas préjudiciables , prendre toutes les mesures voulues pour garantir de véritables consultations avec c es communautés au sujet d es projets de développement qui ont un e incidence sur leurs moyens de subsistance, leur mode de vie et leur culture , et mener des consultations avec les peuples autochtones en vue d ’ obtenir leur consentement libre, préalable et éclairé ;

c) Veiller à ce que les communautés participent à tout processus concernant leur réinstallation, et à ce que cette réinstallation se déroule conformément aux normes internationales pertinentes −  comme le principe de non ‑ discrimination, le droit d ’ être informé et consulté, le droit à un recours utile , le droit de se voir offrir des lieux de réinstallation adéquats qui tiennent dûment compte de leur mode de vie traditionnelle, et, le cas échéant, le droit à des terres ancestrales  − , et leur octroyer une indemnisation adéquate lorsque la réinstallation n ’ est pas possible ;

d) Prendre des mesures pour garantir aux personnes appartenant à des minorités ethniques ou religieuses et aux peuples autochtones un accès effectif et sans discrimination aux services publics, notamment à la délivrance du livret d ’ enregistrement des ménages ( Hộ khẩu ).

D.Diffusion et suivi

57. L ’ État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, de son troisième rapport périodique, des réponses écrites à la liste des points établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays ainsi qu ’ auprès du grand public pour faire mieux connaître les droits consacrés par le Pacte. L ’ État partie devrait faire en sorte que le rapport et les présentes observations finales soient traduits dans sa langue officielle.

58. Conformément au paragraphe 1 de l ’ article 75 du règlement intérieur du Comité, l ’ État partie est invité à faire parvenir, le 29 mars 2021 au plus tard, des renseignements sur la suite qu ’ il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 24 (peine de mort), 46 (liberté d ’ expression) et 52 (défenseurs des droits de l ’ homme ) ci-dessus .

59. Le Comité demande à l ’ État partie de lui soumettre son prochain rapport périodique le 29 mars 2023 au plus tard et d ’ y faire figurer des renseignements précis et à jour sur la suite qu ’ il aura donnée aux autres recommandations formulées dans les présentes observations finales et sur l ’ application du Pacte dans son ensemble . Il demande également à l ’ État partie, lorsqu ’ il élaborera ce rapport, de tenir de vastes consultations avec la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays . Conformément à la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale, le rapport ne devra pas dépasser 21 200 mots. Le Comité encourage tous les États à suivre la procédure simplifiée de présentation des rapports. Si l ’ État partie décide d ’ établir son prochain rapport en suivant la procédure simplifiée, il devra en informer le Comité dans un délai d’un an après la réception des présentes observations finales. Les réponses de l’État partie à la liste de points établie par le Comité dans le cadre de la procédure simplifiée constitueront son prochain rapport périodique soumis en application de l ’ article 40 du Pacte.