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Introduction

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Portée de la recommandation générale

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Application de la Convention à la prévention des conflits, ainsi que dans les situations de conflit et d’après conflit

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Application territoriale et extraterritoriale de la Convention

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Application de la Convention aux acteurs étatiques et non étatiques

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Complémentarité de la Convention et du droit international humanitaire, du droit des réfugiés et du droit pénal

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La Convention et le programme de travail du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité

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La Convention et la prévention des conflits et les situations de conflit et d’après conflit

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Les femmes et la prévention des conflits

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Les femmes dans les situations de conflit et d’après conflit

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Conclusion

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Suivi et rapports

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Ratification des traités ou adhésion aux traités

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I.Introduction

À sa quarante-septième session, en 2010, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a décidé, conformément à l’article 21 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, d’adopter une recommandation générale sur les femmes et la prévention des conflits, les conflits et les situations d’après conflit. L’objet et le but de cette recommandation générale consistent essentiellement à fournir aux États parties des avis autorisés sur les mesures législatives, les politiques et les autres mesures appropriées propres à garantir le plein respect de l’obligation que leur fait la Convention de protéger et respecter et faire respecter les droits fondamentaux des femmes. Elle se fonde également sur les principes formulés dans des recommandations générales adoptées précédemment.

La Convention a pour objectifs importants de protéger les droits fondamentaux des femmes en toutes circonstances, de promouvoir une réelle égalité des sexes pendant et après les conflits et de faire en sorte que les expériences diverses des femmes soient pleinement intégrées dans tout les processus d’instauration et de consolidation de la paix, de rétablissement de la paix et de reconstruction. Le Comité rappelle que les États parties restent tenus d’honorer leur obligations en période de conflit ou d’état d’urgence sans faire de discrimination entre les ressortissants et non-ressortissants qui se trouvent sur leur territoire ou sur des territoires placés sous leur juridiction, même si ces territoires ne se trouvent pas à l’intérieur de l’État partie. Le Comité a exprimé à maintes reprises sa préoccupation à propos de l’impact des conflits sur les femmes et de l’exclusion de celles-ci des activités de prévention des conflits et des processus de transition et de reconstruction après conflit, et du fait que les rapports périodiques des États parties ne fournissent pas assez d’informations sur l’application de la Convention en pareilles situations.

La recommandation générale guide précisément les États parties dans l’exercice de leur obligation de diligence raisonnable à l’égard des actes de particuliers ou d’entités privées qui portent atteinte aux droits consacrés dans la Convention et présente des suggestions sur la façon dont les acteurs non étatiques peuvent traiter les droits des femmes dans les zones de conflit.

II.Portée de la recommandation générale

La recommandation générale porte sur l’application de la Convention pour la prévention des conflits, dans les conflits armés internationaux et non internationaux, et dans les situations d’occupation étrangère ainsi qu’aux autres formes d’occupation et dans la phase d’après conflit. Elle couvre également d’autres situations préoccupantes, telles que les troubles internes, les troubles civils prolongés et de faible intensité, l’instabilité politique, la violence ethnique et communautaire, l’état d’urgence et la répression des soulèvements de masse, la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée, qui ne sont pas nécessairement classés comme conflits armés en droit international humanitaire et qui donnent lieu à de graves violations des droits des femmes et sont particulièrement préoccupants pour le Comité. Aux fins de la présente recommandation générale, les phases de conflit et d’après conflit sont parfois traitées séparément car elles présentent des difficultés et des possibilités différentes en ce qui concerne le traitement des droits fondamentaux des femmes et des filles. Toutefois, le Comité note que souvent, la transition de la phase de conflit à la phase d’après conflit ne se fait pas de façon linéaire et peut comporter des cessations du conflit, puis des dérapages qui provoquent un retour au conflit – selon un cycle qui peut durer longtemps.

Ces situations sont étroitement liées aux crises provoquées par les déplacements de personnes dans leur propre pays, à l’apatridie et aux difficultés rencontrées par les populations réfugiées dans le cadre des procédures de rapatriement. À cet égard, le Comité rappelle l’observation qu’il a formulée dans sa recommandation générale no 28 (2010), selon laquelle les États parties sont responsables de tous leurs actes ayant une incidence sur les droits des citoyens et des non-citoyens, y compris les personnes déplacées dans leur propre pays, les réfugiés et les demandeurs d’asile, que les personnes touchées soient ou non présentes sur leur territoire.

Les femmes ne constituent pas un groupe homogène et leurs expériences des conflits et leurs besoins particuliers dans les situations d’après conflit sont divers. Les femmes ne sont pas des témoins passifs ou uniquement des victimes ou des cibles : elles ont toujours joué un rôle, que ce soit comme combattantes, membres de la société civile, militantes des droits de l’homme, membres de mouvements de résistance ou participantes actives aux processus officiels et officieux de consolidation de la paix et de relèvement après un conflit. Les États parties doivent s’acquitter dans leur intégralité des obligations que leur fait la Convention en matière d’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

Comme l’indique la recommandation générale no 28 (2010), la discrimination à l’égard des femmes est encore aggravée par d’autres formes de discrimination. Comme la Convention porte sur toutes les étapes du cycle de vie, il appartient aux États parties de tenir compte des droits et des besoins des filles touchées par les conflits du fait de la discrimination fondée sur le sexe.

III.Application de la Convention à la prévention des conflits, ainsi que dans les situations de conflit et d’après conflit

A.Application territoriale et extraterritoriale de la Convention

Le Comité réaffirme les dispositions de la recommandation générale no 28 selon lesquelles les obligations des États parties s’appliquent de façon extraterritoriale aux personnes placées sous leur juridiction effective, même si elles ne se trouvent pas sur leur territoire, et que les États parties sont responsables de tous leurs actes ayant une incidence sur les droits de l’homme, que les personnes touchées soient ou non présentes sur leur territoire.

Dans les situations de conflit et d’après conflit, les États parties sont tenus d’appliquer la Convention et les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et au droit international humanitaire, soit à titre individuel, par exemple dans le cadre d’une intervention militaire unilatérale, soit en tant que membres d’organisations et de coalitions internationales ou intergouvernementales, par exemple dans le cadre d’une force internationale de maintien de la paix. La Convention s’applique à un large éventail de situations, y compris chaque fois exerce sa juridiction, comme dans les cas d’occupation et d’autres formes d’administration d’un territoire étranger, par exemple l’administration d’un territoire par les Nations Unies; aux contingents nationaux qui font partie d’une opération internationale de maintien ou d’imposition de la paix; aux personnes détenues par des agents de l’État, par exemple des militaires ou des mercenaires, hors de son territoire; aux interventions militaires légales ou illégales menées dans un autre État; à l’assistance bilatérale ou multilatérale apportée par les donateurs aux fins de la prévention ou de l’atténuation des conflits, des secours humanitaires ou de la reconstruction après les conflits; à la participation en tant que tierces parties aux processus de paix ou de négociation; à la conclusion d’accords commerciaux avec des pays touchés par un conflit.

La Convention exige également des États parties qu’ils réglementent les activités des acteurs non étatiques nationaux de leur juridiction exercées hors de leurs frontières. Dans sa recommandation générale no 28, le Comité a réaffirmé l’obligation énoncée au paragraphe e) de l’article 2 de la Convention, à savoir éliminer la discrimination pratiquée par un quelconque acteur public ou privé, ce qui englobe les actes des sociétés nationales qui exercent leurs activités hors des frontières de l’État. Cela inclut les activités de sociétés nationales dans les zones de conflit qui engendrent des violations des droits des femmes et les cas qui nécessitent l’établissement de mécanismes de responsabilisation et de surveillance des entreprises de sécurité privées et autres exerçant leurs activités dans des zones de conflit.

Il peut y avoir des cas où les États parties ont également des obligations extraterritoriales de coopération internationale, comme le prévoit le droit international, comme les dispositions conventionnelles portant sur les femmes handicapées (art. 32 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées), sur les filles et les conflits armés (art. 24, par. 4, de la Convention relative aux droits de l’enfant et les deux premiers protocoles facultatifs y afférents) et sur la jouissance sans discrimination des droits économiques, sociaux et culturels (art. 2, par. 1), art. 11, par. 1, et art. 22 et 23 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels). Dans ces cas, l’application extraterritoriale de la Convention oblige les États à se conformer à la Convention dans la mise en œuvre de ces obligations.

Le Comité recommande aux États parties :

a)D’appliquer la Convention et les autres instruments internationaux des droits de l’homme et de droit humanitaire dans leur intégralité lors de l’exercice de leur juridiction territoriale ou extraterritoriale, qu’ils agissent à titre individuel ou en tant que membres d’organisations et de coalitions internationales ou intergouvernementales;

b)De réglementer les activités de tous les acteurs nationaux non étatiques relevant de leur juridiction et exerçant leurs activités hors du territoire national et de veiller à ce qu’ils respectent pleinement la Convention;

c)De respecter et d’honorer les droits garantis par la Convention qui s’appliquent hors de leur territoire national, lorsqu’ils sont puissance occupante, en situation d’occupation étrangère.

B.Application de la Convention aux acteurs étatiques et non étatiques

Les droits des femmes dans le cadre de la prévention d’un conflit armé et dans les situations de conflit et d’après conflit dépendent de divers facteurs, notamment les États agissant individuellement (par exemple, l’État au sein duquel éclate le conflit, les États voisins ayant un rôle dans les dimensions régionales du conflit ou les États effectuant des manœuvres militaires transfrontalières unilatérales), ainsi que les États agissant en tant que membres d’organisations internationales ou intergouvernementales (par exemple, en contribuant aux forces internationales de maintien de la paix ou apportant des fonds par l’intermédiaire d’institutions financières internationales pour soutenir les processus de paix) et les coalitions et acteurs non étatiques, comme les groupes armés, les groupes paramilitaires, les entreprises, les sous-traitants militaires privés, les groupes criminels organisés et les groupes d’autodéfense. Dans les situations de conflit et d’après conflit, les institutions de l’État sont souvent affaiblies, ou certaines fonctions de l’État peuvent être prises en charge par d’autres gouvernements, des organisations intergouvernementales, voire des groupes non étatiques. Le Comité souligne que, dans de tels cas, des ensembles d’obligations imposées par la Convention peuvent s’appliquer simultanément et de façon complémentaire à certains acteurs.

La responsabilité imposée à l’État par la Convention est aussi engagée si les actes ou omissions d’un acteur non étatique peuvent être attribués à l’État en droit international. Lorsqu’un État partie agit en tant que membre d’une organisation internationale dans des activités de prévention des conflits ou de gestion de situations de conflit ou d’après conflit, il reste tenu de respecter ses obligations conventionnelles sur son territoire et hors de celui-ci et doit également adopter des mesures pour faire en sorte que les politiques et les décisions de l’organisation concernée soient conformes à ces obligations.

Le Comité a également souligné à plusieurs reprises que la Convention impose aux États parties de réglementer les activités des acteurs non étatiques en raison de l’obligation de protéger, de sorte qu’ils doivent prendre toute mesure nécessaire pour prévenir les actes de particuliers ou d’entités privées portant atteinte aux droits consacrés dans la Convention, mener des enquêtes sur ces actes, les sanctionner et donner une réparation aux victimes. Dans ses recommandations générales no 19 et no 28, le Comité a énoncé les obligations de diligence en matière de protection des femmes contre la violence et la discrimination, en soulignant que, parallèlement aux mesures constitutionnelles et législatives, les États parties doivent également fournir un appui administratif et financier adéquat aux fins de la mise en œuvre de la Convention.

En plus d’exiger des États parties qu’ils réglementent les activités des acteurs non étatiques, le droit humanitaire international contient des obligations qui lient les acteurs non étatiques qui sont parties à un conflit armé (par exemple, les insurgés et les groupes rebelles), notamment l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 et le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949, relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux. En droit international relatif aux droits de l’homme, bien que les acteurs non étatiques ne puissent pas devenir parties à la convention, le Comité note que dans certaines circonstances, en particulier lorsqu’un groupe armé doté d’une structure politique identifiable exerce un contrôle important sur le territoire et la population, les acteurs non étatiques sont tenus de respecter le droit international relatif aux droits de l’homme. Le Comité souligne que les violations flagrantes des droits de l’homme et les violations graves du droit humanitaire pourraient engager la responsabilité pénale individuelle, y compris des membres et des dirigeants de groupes armés non étatiques et de sociétés militaires privées.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Assurent une réparation aux victimes d’actes commis par des particuliers ou des entités privées, eu égard à l’obligation qui leur incombe d’exercer la diligence voulue;

b)Rejettent toutes les formes de retour en arrière en matière de protection des droits des femmes qui auraient pour objectif d’amadouer les acteurs non étatiques, tels que terroristes, particuliers ou groupes armés;

c)Établissent des liens avec les acteurs non étatiques afin de prévenir les violations des droits de l’homme liées à leurs activités dans les zones de conflit, en particulier les actes de violence sexuelle et sexiste; dispensent l’aide voulue aux entreprises nationales pour leur permettre d’évaluer les risques accrus de violation des droits des femmes et d’y remédier; et mettent en place un mécanisme efficace de responsabilisation;

d)Adoptent des pratiques tenant compte de la problématique hommes-femmes (par exemple, en faisant appel à des agents de police de sexe féminin) pour enquêter sur les violations commises pendant et après le conflit, afin de faire en sorte que les violations commises par des acteurs étatiques et non étatiques soient établies et traitées comme il convient.

Le Comité exhorte également les acteurs non étatiques, tels que les groupes armés :

a)À respecter les droits des femmes dans les situations de conflit et d’après conflit, conformément à la Convention;

b)À s’engager à respecter les codes de conduite concernant les droits de l’homme et l’interdiction de toutes formes de violence sexuelle et sexiste.

C.Complémentarité de la Convention et du droit international humanitaire, du droit des réfugiés et du droit pénal

Dans toutes les situations de crise, qu’il s’agisse d’un conflit armé non international ou international, d’un état d’urgence, d’une occupation étrangère et de toute autre situation préoccupante, telle que de troubles politiques, les droits des femmes sont garantis par un régime de droit international qui prévoit des protections complémentaires en vertu de la Convention, du droit international humanitaire, du droit des réfugiés et du droit pénal.

Dans les situations qui répondent à la définition du conflit armé non international ou international, la Convention et le droit international humanitaire s’appliquent tous les deux et les différentes protections qu’ils offrent sont complémentaires et ne s’excluent pas mutuellement. En vertu du droit international humanitaire, les femmes touchées par des conflits armés ont droit à des protections générales qui s’appliquent à la fois aux femmes et aux hommes, ainsi qu’à certaines protections spécifiques, dont essentiellement la protection contre le viol, la prostitution forcée et tout attentat à la pudeur; l’octroi de la priorité, lors de la distribution des secours, aux femmes enceintes, aux femmes en couches et aux femmes allaitantes prises dans un conflit armé international; la détention dans des locaux séparés de ceux des hommes et sous la surveillance immédiate de femmes; la protection contre la peine de mort des femmes enceintes ou des mères ayant des enfants à charge ou de jeunes enfants.

Le droit international humanitaire impose aussi des obligations aux puissances occupantes, qui s’appliquent concurremment avec la Convention et les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Le droit international humanitaire interdit également aux États de transférer une partie de leur population civile sur le territoire qu’ils occupent. En vertu du droit international humanitaire, les femmes vivant sous occupation ont droit à des protections générales et aux protections spécifiques suivantes : protection contre le viol, la prostitution forcée ou toute forme d’attentat à la pudeur; libre passage des envois de vêtements essentiels destinés aux femmes enceintes et aux femmes venant d’accoucher; droit à la sécurité et à des zones neutralisées qui peuvent être établies pour protéger la population civile, notamment les femmes enceintes et les mères d’enfants de moins de 7 ans; et à la détention dans des locaux séparés de ceux des hommes et sous la surveillance immédiate de femmes. Les internées civiles doivent avoir accès à des installations sanitaires et être fouillées par des femmes.

Les dispositions de la Convention qui interdisent la discrimination à l’égard des femmes renforcent et complètent le régime international de protection légale applicable dans de nombreux contextes aux femmes et aux filles réfugiées, déplacées et apatrides, d’autant que les accords internationaux pertinents, notamment la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967, ne prévoient pas de dispositions établissant explicitement l’égalité des sexes.

Aux termes de la Convention, les obligations qui incombent aux États parties de prévenir la traite et la violence sexuelle et sexiste, d’enquêter sur ces pratiques et de les sanctionner, sont renforcées par le droit pénal international, notamment la jurisprudence des tribunaux pénaux internationaux et mixtes et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, selon lesquels la réduction à l’esclavage liée à la traite de femmes et de filles, le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle d’une gravité comparable peuvent être constitutifs d’un crime de guerre, d’un crime contre l’humanité, d’un acte de torture ou d’un acte de génocide. Le droit pénal international, en particulier les définitions de la violence sexuelle et sexiste, doit également être interprété en conformité avec la Convention et les droits de l’homme internationalement reconnus, sans discrimination fondée sur le sexe.

Le Comité recommande que les États parties tiennent compte des protections complémentaires accordées aux femmes et aux filles en vertu du droit international humanitaire, du droit des réfugiés et du droit pénal lorsqu’ils honorent les obligations que leur confère la Convention.

D.La Convention et le programme de travail du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité

Le Comité reconnaît que les diverses résolutions du Conseil de sécurité sur le sujet, en particulier les résolutions 1325 (2000), 1820 (2008), 1888 (2009), 1889(2009), 1960 (2010), 2106 (2013) et 2122 (2013), en plus des résolutions comme la résolution 1983 (2011), qui fournit des indications précises sur l’incidence du VIH et du sida sur les femmes dans les situations de conflit et d’après conflit, constituent des cadres politiques essentiels pour mobiliser l’opinion sur la question des femmes, de la paix et de la sécurité.

Dans la mesure où tous les sujets de préoccupation abordés dans ces résolutions se retrouvent dans les dispositions de fond de la Convention, la mise en œuvre de celles-ci doit donc être fondée sur un modèle d’égalité réelle et couvrir tous les droits énoncés dans la Convention. Le Comité réaffirme la nécessité d’une approche concertée et intégrée inscrivant la mise en œuvre du programme de travail du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité dans le cadre plus large de la mise en œuvre de la Convention et de son Protocole facultatif.

L’article 18 de la Convention dispose que les États parties sont tenus de faire rapport sur les mesures qu’ils ont adoptées pour donner effet aux dispositions de la Convention, notamment dans le cadre de la prévention des conflits, ainsi que dans les situations de conflit et d’après conflit. Ces rapports peuvent servir à communiquer des informations sur la suite donnée aux résolutions du Conseil de sécurité et consolider ainsi la Convention et le programme de travail du Conseil, et élargir, renforcer et concrétiser l’égalité des sexes.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Veillent à ce que les stratégies et plans d’action nationaux destinés à mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) et les résolutions ultérieures du Conseil de sécurité soient compatibles avec la Convention et que des ressources suffisantes soient affectées à leur application;

b)S’assurent que la mise en œuvre des engagements contenus dans les résolutions du Conseil de sécurité s’appuie sur un modèle d’égalité réelle et tienne compte de l’incidence des situations de conflit et d’après conflit sur tous les droits consacrés dans la Convention, ainsi que des violations comportant des actes de violence sexiste, y compris de violence sexuelle, liés au conflit;

c)Coopèrent avec tous les réseaux, départements, organismes, fonds et programmes des Nations Unies participant à l’ensemble des activités liées aux conflits, notamment la prévention, la gestion et le règlement des conflits ainsi qu’à la reconstruction au lendemain des conflits, pour donner effet aux dispositions de la Convention;

d)Renforcent leur collaboration avec la société civile et les organisations non gouvernementales œuvrant à la mise en œuvre du programme de travail du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité.

IV.La Convention et la prévention des conflits et les situations de conflit et d’après conflit

A.Les femmes et la prévention des conflits

La Convention impose aux États parties de tout mettre en œuvre pour prévenir les conflits et toutes les formes de violence. Pour éviter les conflits, les États peuvent, par exemple, mettre en place des systèmes d’alerte rapide efficaces pour recueillir et analyser les informations de sources ouvertes, pratiquer la diplomatie préventive et la médiation, et prendre des mesures de prévention qui s’attaquent aux causes profondes du conflit. Ils devront également réglementer vigoureusement et efficacement le commerce des armes et contrôler dûment la circulation des armes conventionnelles existantes et souvent illégales, y compris les armes de petit calibre, afin d’éviter qu’elles ne soient employées pour commettre ou faciliter des actes graves de violence sexiste. Il existe une corrélation entre l’augmentation des violences et de la discrimination sexistes et l’ouverture d’un conflit. Ainsi, une flambée des actes de violence sexuelle peut indiquer l’ouverture proche d’un conflit. Les efforts visant à éliminer les violations sexistes contribuent donc aussi à long terme à prévenir les conflits, leur aggravation et la réapparition de la violence dans la phase d’après conflit.

Malgré l’importance de la prévention des conflits pour les droits des femmes, les programmes de prévention ne tiennent bien souvent pas compte des expériences des femmes au motif qu’elles ne seraient pas utiles pour prévoir les conflits, et les femmes ne participent guère à la prévention des conflits. Le Comité a déjà constaté la faible participation des femmes aux institutions se consacrant à la diplomatie préventive et à l’étude de questions mondiales, comme les dépenses militaires et le désarmement nucléaire. Outre qu’elles ne satisfont pas aux prescriptions de la Convention, les mesures de prévention des conflits ignorant la problématique hommes-femmes ne peuvent ni prévoir ni prévenir les conflits. C’est seulement en faisant participer des femmes et en analysant les conflits en tenant compte de la problématique hommes-femmes que les États parties peuvent concevoir des plans d’action appropriés.

Ainsi, la Convention dispose que les politiques de prévention doivent être non discriminatoires et que les efforts faits pour prévenir ou atténuer les conflits ne doivent ni porter préjudice aux femmes, délibérément ou non, ni entraîner ou renforcer l’inégalité entre les sexes. Les interventions de gouvernements centralisés ou d’États tiers dans les processus de paix locaux devraient respecter, et non compromettre, les rôles de chef de file des femmes dans les processus de maintien de la paix au niveau local.

Le Comité a déjà fait remarquer que la prolifération des armes conventionnelles, en particulier des armes de petit calibre, notamment celles détournées du commerce licite, peut avoir un effet direct ou indirect sur les femmes en tant que victimes de violences sexistes liées au conflit et en tant qu’opposantes ou actrices dans les mouvements de résistance.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Renforcent et soutiennent les programmes formels et informels de prévention des conflits menés par des femmes;

b)Veillent à ce que les femmes participent sur un pied d’égalité avec les hommes aux organisations nationales, régionales et internationales, ainsi qu’aux mécanismes informels, locaux ou communautaires exerçant des activités de diplomatie préventive;

c)Mettent en place des systèmes d’alerte précoce et adoptent des mesures de sécurité tenant compte de la problématique hommes-femmes afin de prévenir l’escalade de la violence sexiste et des autres formes de violation des droits des femmes;

d)Prévoient des indicateurs sexospécifiques et des repères dans le cadre de gestion des résultats du système d’alerte précoce;

e)Répondent à l’impact sur les hommes et les femmes des transferts internationaux d’armes par la ratification et la mise en œuvre du Traité sur le commerce des armes (2013).

B.Les femmes dans les situations de conflit et d’après conflit

1.La violence sexiste [art. 1 à 3 et 5 a)]

La violence contre les femmes et les filles est une forme de discrimination contre les femmes interdite par la Convention et une violation des droits fondamentaux. Les conflits accentuent les inégalités existantes entre les sexes, exposant davantage les femmes à différentes formes de violence sexuelle et sexiste commise par des acteurs étatiques et non étatiques. La violence liée à un conflit se produit partout, notamment dans les foyers, les centres de détention et les camps de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays et de réfugiés; elle se produit à n’importe quel moment, par exemple lors de l’exercice des activités quotidiennes, telles que la collecte d’eau et de bois de feu, ou sur le chemin de l’école ou du lieu de travail. Elle est le fait de multiples auteurs d’actes de violence fondée sur le sexe liée au conflit : membres des forces armées gouvernementales, groupes paramilitaires, groupes armés non étatiques, agents du maintien de la paix et civils. Quelle que soit la nature du conflit armé, sa durée ou les acteurs en cause, les femmes et les filles sont de plus en plus délibérément prises pour cible et soumises à diverses formes de violence et de sévices : exécution arbitraire, torture et mutilation, violence sexuelle et sexiste, prostitution forcée et fécondation forcée, avortement et stérilisation forcés.

Si tous les civils subissent les effets préjudiciables des conflits armés, il est incontestable que les femmes et les filles sont particulièrement victimes de la violence sexuelle et sexiste utilisée « notamment comme arme de guerre pour humilier, dominer, intimider, disperser ou réinstaller de force les membres civils d’une communauté ou d’un groupe ethnique » et que cette forme de violence sexuelle subsiste même à la fin des hostilités [voir la résolution 1820 (2008)]. Pour la plupart des femmes dans des situations d’après conflit, la violence ne s’arrête pas après le cessez-le feu officiel ou la signature de l’accord de paix; elle augmente même souvent après le conflit. Le Comité prend acte des nombreux rapports indiquant que si les formes de violence et les lieux où elles sont commises changent, ce qui veut dire que la violence n’est peut-être plus orchestrée par l’État, la violence sexuelle et sexiste contre les femmes connaît une recrudescence dans la phase d’après le conflit. Le fait de ne pas prévenir les actes de violence sexuelle et sexiste, de ne pas enquêter sur ces actes et de ne pas les punir, conjugué à d’autres facteurs, comme l’inefficacité des opérations de désarmement, de démobilisation et de réintégration, peut aussi conduire à l’intensification des violences sexistes au lendemain des conflits.

Pendant et après un conflit, certains groupes de femmes et de filles sont particulièrement exposés au risque de violence, notamment de violence sexuelle : tel est le cas des femmes déplacées et des réfugiées; des militantes des droits fondamentaux des femmes; des femmes appartenant à certaines castes ou à certains groupes ethniques, nationaux, religieux ou autres minorités ou revendiquant une autre identité, qui sont souvent attaquées en tant que représentantes de leur communauté; des veuves et des femmes handicapées. Les femmes combattantes ou enrôlées dans l’armée sont également exposées aux risques d’agression et de harcèlement sexuel de la part de groupes armés de l’État ou autres et des mouvements de résistance.

La violence sexiste donne également lieu à bien d’autres violations des droits fondamentaux, comme les attaques menées par des acteurs étatiques et non étatiques contre les défenseurs des droits des femmes, qui empêchent les femmes de participer utilement et sur un pied d’égalité avec les hommes à la vie politique et publique. Les États parties sont également tenus de faire face au vaste éventail de conséquences physiques et psychologiques que peuvent avoir les violences dont sont victimes les femmes durant un conflit, comme les blessures, le handicap et le risque accru de contamination par le VIH, ainsi que le risque de grossesse non désirée résultant de la violence sexuelle. Il existe un lien étroit entre la violence sexuelle et le VIH, notamment la transmission délibérée du VIH par le viol, utilisé comme arme de guerre.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Interdisent expressément les actes de violence sexiste par des acteurs étatiques et non étatiques en adoptant toutes les lois, politiques et dispositions pénales pertinentes;

b)Préviennent les actes de violence sexiste, enquêtent sur ces actes et les sanctionnent, en particulier les actes de violence sexuelle perpétrés par des acteurs étatiques et non étatiques, et appliquent une politique de tolérance zéro;

c)Garantissent aux femmes et aux filles l’accès à la justice; adoptent des procédures d’enquête tenant compte de la problématique hommes-femmes pour combattre la violence sexiste, en particulier la violence sexuelle; dispensent une formation tenant compte des disparités entres les sexes et adoptent des codes de conduite et des protocoles pour la police, les forces armées, y compris les forces de maintient de la paix; renforcent la capacité du pouvoir judiciaire, notamment dans le contexte des mécanismes judiciaires de transition, afin d’assurer leur indépendance, leur impartialité et leur intégrité;

d)Normalisent les méthodes de collecte de données sur l’incidence et la prévalence de la violence sexiste, en particulier de la violence sexuelle dans différents contextes et sur différentes catégories de femmes;

e)Allouent suffisamment de ressources et prennent des mesures efficaces pour que les victimes de violence sexiste, notamment de violence sexuelle, puissent bénéficier d’un traitement médical complet, de soins de santé mentale et d’une aide psychosociale;

f)Établissent et diffusent des procédures de fonctionnement et d’orientation normalisées pour assurer la liaison entre les responsables de la sécurité et les prestataires de services pour tout ce qui touche la violence fondée sur le sexe, y compris des guichets uniques proposant des services médicaux, juridiques et psychosociaux pour les rescapées de violences sexuelles; des centres communautaires polyvalents offrant à la fois une aide immédiate et une aide à l’autonomisation économique et sociale et à la réinsertion; et des dispensaires itinérants;

g)Investissent dans l’expertise technique et allouent les ressources nécessaires pour répondre aux besoins particuliers des femmes et des filles victimes de violence, notamment les incidences de la violence sexuelle sur leur santé en matière de procréation;

h)Fassent en sorte que les réponses nationales comprennent des interventions spécifiques liant et harmonisant la prévention et la réponse à la violence fondée sur le sexe et au VIH.

2.Traite (art. 6)

La traite des femmes et des filles, qui est une forme de discrimination sexiste, s’amplifie pendant un conflit en raison de l’effondrement des structures politiques, économiques et sociales, de la recrudescence des violences contre les femmes et d’un militarisme exacerbé. Les situations de conflit et d’après conflit engendrent des formes particulières de demande d’exploitation sexuelle, économique et militaire liées à la guerre. Les régions touchées par un conflit peuvent être des régions d’origine, de transit et de destination pour la traite des femmes et des filles, et les formes de traite varient selon la région, la situation économique et politique et les acteurs étatiques et non étatiques impliqués. Les femmes et les filles vivant dans des camps de personnes déplacées ou de réfugiés ou qui en reviennent, et qui sont à la recherche de moyens de subsistance risquent tout particulièrement d’être victimes de la traite.

La traite peut également être favorisée dans les cas où des pays tiers cherchent à limiter l’afflux de migrants venant de zones touchées par un conflit en prenant des mesures telles que l’interdiction d’entrée sur leur territoire, l’expulsion ou la détention. Les femmes et les filles fuyant les zones de conflit peuvent être davantage exposées à la traite et à l’exploitation si les pays adoptent des politiques d’immigration restrictives, discriminatoires ou différentes selon le sexe.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Préviennent la traite et les violations des droits de l’homme qui y sont associées relevant de leur compétence, qu’elles soient le fait des pouvoirs publics ou d’acteurs privés, engagent des poursuites contre leurs auteurs et les sanctionnent, et adoptent des mesures de protection des femmes et des filles, y compris de celles qui sont déplacées à l’intérieur du pays ou réfugiées;

b)Établissent une politique de tolérance zéro fondée sur les normes internationales relatives aux droits de l’homme concernant la traite, l’exploitation sexuelle et les sévices sexuels auxquels pourraient se livrer notamment les troupes nationales, les forces de maintien de la paix, les membres de la police des frontières, les fonctionnaires des services d’immigration et les acteurs humanitaires, et dispensent à ceux-ci une formation tenant compte des disparités entre les sexes afin de leur permettre d’identifier et de protéger les femmes et les filles vulnérables;

c)Adoptent une politique migratoire globale tenant compte de la problématique hommes-femmes et des droits de chacun, qui garantisse que les femmes et les filles venant de zones touchées par un conflit ne soient pas soumises à la traite;

d)Adoptent des accords bilatéraux ou régionaux et mettent en œuvre d’autres formes de coopération pour protéger les droits des femmes et des filles victimes de la traite et pour faciliter les poursuites contre les auteurs.

3.Participation (art. 7 et 8)

Les femmes jouent souvent un rôle de chef de file en période de conflit, en tant que chefs de famille, artisans de la paix, dirigeants politiques et combattantes. Or, le Comité s’est à maintes reprises inquiété de ce que leurs voix ne soient pas entendues et que les femmes soient marginalisées dans les périodes d’après conflit, de transition et de relèvement. Le Comité réaffirme que faire participer suffisamment de femmes aux négociations internationales, aux activités de maintien de la paix, à tous les niveaux de la diplomatie préventive, aux activités de médiation, d’aide humanitaire et de réconciliation sociale, aux pourparlers de paix aux niveaux national, régional et international ainsi qu’au fonctionnement du système de justice pénale peut changer les choses. À l’échelon national, il est impératif que les femmes participent de façon significative et efficace et sur un pied d’égalité avec les hommes aux différentes sphères du pouvoir, qu’elles soient nommées à des postes de direction dans le secteur public et qu’elles soient en mesure de participer activement à la société civile afin de créer une société caractérisée par une démocratie durable, la paix et l’égalité des sexes.

La fin d’un conflit offre une occasion unique aux États parties d’adopter des mesures législatives et de grandes orientations afin d’éliminer la discrimination à l’égard des femmes dans la vie politique et publique du pays et de faire en sorte que les femmes aient les mêmes possibilités que les hommes de participer aux nouvelles structures de gouvernance mises en place après le conflit. Toutefois, bien souvent, à la cessation officielle des hostilités, la promotion de l’égalité des sexes et de la participation des femmes aux processus décisionnels n’est pas considérée comme une priorité et peut même être reléguée à l’arrière-plan, au motif qu’elle serait incompatible avec les objectifs de stabilisation. La pleine participation des femmes et leur association au processus formel de rétablissement de la paix et de reconstruction après le conflit sont souvent oubliées, de même que la violence sexiste et les autres formes de discrimination à l’égard des femmes, du fait de stéréotypes profondément ancrés qui tendent traditionnellement à placer des hommes à la tête des instances étatiques et non étatiques et à exclure les femmes de tous les aspects du processus de décision.

Par respect des obligations qu’ils ont d’assurer aux femmes dans des conditions d’égalité avec les hommes, une place dans la vie politique et publique (art. 7) et une représentation à l’échelon international (art. 8), les États parties doivent adopter des mesures, y compris les mesures temporaires spéciales prévues à l’article 4 1), pour faire face en général à la discrimination et aux inégalités sexistes existant dans les zones touchées par un conflit et aussi pour surmonter les obstacles concrets et multiples à la participation des femmes sur un pied d’égalité avec les hommes, qui s’expliquent par les contraintes supplémentaires pesant en période de conflit sur la mobilité, la sécurité, la collecte de fonds, l’organisation de campagnes et les compétences techniques.

La mise en œuvre de ces obligations s’impose en particulier aux États parties sur le territoire desquels les hostilités ont eu lieu, en plus des autres États parties participant aux activités de rétablissement de la paix nécessaires pour garantir que les femmes sont représentées dans les institutions de leur pays et pour favoriser la participation des femmes à l’échelle locale aux processus de paix. Le respect de ces obligations et des dispositions de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité garantit une participation utile des femmes aux activités de prévention, de gestion et de règlement des conflits.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Veillent à ce que les instruments législatifs, exécutifs et administratifs et autres instruments réglementaires ne limitent pas la participation des femmes aux activités de prévention, de gestion et de règlement des conflits;

b)Garantissent la représentation des femmes sur un pied d’égalité avec les hommes à tous les niveaux décisionnels dans les institutions et instances nationales, y compris dans les forces armées, la police et les institutions judiciaires et au sein des instances judiciaires et non judiciaires provisoires qui traitent des crimes commis pendant le conflit;

c)Fassent en sorte que les femmes et les organisations de la société civile se penchent sur les questions concernant les femmes et que des représentantes de la société civile soient présentes sur un pied d’égalité avec les hommes lors de tous les pourparlers de paix et de toutes les activités de redressement et de reconstruction après le conflit;

d)Dispensent aux femmes une formation à l’encadrement afin de leur permettre de participer efficacement aux activités politiques après conflit.

Le Comité recommande aux États tiers participant aux processus de règlement des conflits, soit individuellement, soit en tant que membres d’organisations ou de coalitions internationales ou intergouvernementales :

a)De faire participer des femmes aux activités de négociation et de médiation en tant que déléguées, y compris aux niveaux les plus élevés;

b)De fournir aux pays sortant d’un conflit une assistance technique sur les processus de règlement des conflits, afin de promouvoir la participation effective des femmes.

4.L’accès à l’éducation, à l’emploi et aux soins de santé, et les femmes rurales (art. 10 à 12 et 14)

L’effondrement total de l’infrastructure et des services publics est l’une des conséquences majeures et directes des conflits armés, qui empêche la population de bénéficier des services essentiels. Les femmes et les filles sont les premières à souffrir de cette situation et à en supporter les conséquences socioéconomiques. Dans les zones touchées par un conflit, les écoles sont fermées à cause de l’insécurité, occupées par les forces armées ou des groupes armés non étatiques, ou détruites, empêchant les filles d’aller à l’école. Parmi les autres facteurs empêchant les filles de recevoir une éducation, on peut citer les attaques ciblées et les menaces dont elles et leurs enseignants font l’objet de la part d’acteurs non étatiques, ainsi que le fait qu’elles soient obligées de s’occuper de leur famille et de travaux domestiques.

Par ailleurs, les femmes sont obligées de chercher d’autres moyens de subsistance, la survie de leur famille venant à dépendre d’elles en grande part. Bien qu’en temps de conflit, les femmes prennent la place qu’occupaient les hommes dans le secteur de l’emploi structuré, il n’est pas rare qu’elles perdent ces emplois à la fin du conflit et retournent s’occuper des tâches domestiques ou travailler dans le secteur non structuré. Bien qu’après un conflit, la création d’emplois soit l’une des grandes priorités pour bâtir une économie durable, les initiatives de relance de l’emploi dans le secteur structuré tendent à laisser les femmes de côté et à se concentrer sur l’ouverture de débouchés économiques pour les hommes démobilisés. Il est impératif que les programmes de reconstruction après un conflit reconnaissent et favorisent les contributions des femmes dans les secteurs informels et productifs de l’économie, où l’activité économique est la plus concentrée.

Dans les zones touchées par un conflit, l’accès aux services essentiels tels que les soins de santé, y compris les services de santé en matière de sexualité et de procréation, est perturbé en raison de l’insuffisance des infrastructures, du manque de personnel médical et de l’absence de médicaments et de fournitures médicales. De ce fait, les femmes et les jeunes filles sont davantage exposées au risque de grossesse non désirée, de blessures graves des organes sexuels et reproducteurs et de contamination par des maladies sexuellement transmissibles, dont le VIH et le sida, par suite des violences sexuelles liées au conflit. La détérioration ou la destruction des services de santé, associée aux contraintes pesant sur la mobilité des femmes et leur liberté de mouvement, sape encore davantage l’égalité d’accès des femmes aux soins de santé, telle que garantie par l’article 12 1). Les déséquilibres des pouvoirs et des normes préjudiciables à leur sexe rendent les filles et les femmes beaucoup plus vulnérables à l’infection par le VIH, et ces facteurs s’accentuent en situation de conflit et d’après conflit. Les stigmates liés au VIH et la discrimination abondent et ont de profondes répercussions pour la prévention du VIH, le traitement, les soins et l’appui aux victimes, surtout quand ils viennent s’ajouter aux stigmates qu’engendre la violence sexiste.

Les femmes des régions rurales sont souvent touchées bien plus violemment encore par la disparition de services sociaux et de services de santé dont elles ont besoin, ainsi que par l’inégalité d’accès aux ressources foncières et naturelles. De même, en période de conflit, leur situation est rendue particulièrement difficile en matière d’emploi et de réinsertion car elle est souvent aggravée par l’interruption des services, qui engendre l’insécurité alimentaire, les prive d’un logement décent, donne lieu à la confiscation de biens et compromet l’accès à l’eau. Les veuves, les femmes handicapées, les femmes âgées, les femmes célibataires sans soutien familial et les femmes chefs de famille sont particulièrement exposées à des difficultés économiques accrues du fait de leur situation défavorisée, se trouvant souvent sans emploi ni moyens ou perspectives qui leur permettraient se maintenir à flot.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Élaborent des programmes pour les filles touchées par un conflit qui quittent l’école prématurément afin qu’elles puissent retourner à l’école ou à l’université le plus rapidement possible; lancent sans tarder des travaux de réparation et de reconstruction des écoles; prennent des mesures pour prévenir les attaques et les menaces contre les filles et leurs enseignants; veillent à ce que les auteurs de ces actes de violence fassent rapidement l’objet d’une enquête, soient poursuivis et condamnés;

b)Veillent à ce que les stratégies de redressement économique favorisent l’égalité des sexes, condition préalable nécessaire à la création d’une économie durable après un conflit, et ciblent les femmes travaillant aussi bien dans le secteur structuré que non structuré; conçoivent des campagnes destinées à tirer parti des possibilités d’émancipation économique des femmes, en particulier des femmes rurales et des autres groupes de femmes défavorisées; fassent en sorte que les femmes participent à l’élaboration de ces stratégies et programmes et à leur suivi; et éliminent les obstacles à une participation équitables des femmes à ces programmes;

c)Veillent à ce que les soins de santé en matière de sexualité et de procréation comprennent l’accès à des informations sur ce sujet et sur les droits y associés; un soutien psychosocial; des services de planification familiale, y compris la contraception d’urgence; des services de santé maternelle, y compris des soins prénatals, des services d’accouchement offerts par un personnel qualifié, des services de prévention de la transmission verticale et des soins obstétriques d’urgence; des services d’avortement sans risques; des soins après avortement; des services de prévention et de traitement du VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles, y compris des traitement post-exposition; des soins pour traiter les blessures, comme les fistules provoquées par la violence sexuelle, les complications à l’accouchement ou d’autres complications liées à la grossesse, entre autres;

d)Veillent à ce que les femmes et les filles, y compris celles qui sont particulièrement vulnérables au VIH, aient accès à des services de santé de base et à l’information dans ce domaine, y compris sur la prévention, le traitement, les soins et l’appui concernant le VIH;

e)Coordonnent toutes les activités avec les intervenants des agences d’aide humanitaire et de développement, afin d’assurer une approche globale qui évite que des activités identiques soient menées de plusieurs sources dans les domaines de l’éducation, de l’emploi et de la santé, et qui permette d’aider les populations défavorisées, y compris celles qui vivent dans les régions rurales et reculées.

5.Personnes déplacées, réfugiés et demandeurs d’asile (art. 1 À 3 et 15)

Le Comité a noté précédemment que la Convention s’appliquait à chaque phase du cycle de déplacement et que, souvent, les situations de déplacement forcé et d’apatridie ne touchent pas les femmes de la même façon que les hommes, en raison des actes de violence sexuelle et sexiste et de la discrimination dont les femmes font l’objet. Les déplacements internes et transfrontaliers ont certaines incidences touchant uniquement les femmes, qui interviennent à tous les stades du cycle de déplacement, à savoir la fuite, l’installation et le retour dans les zones touchées par un conflit, les femmes et les filles étant particulièrement exposées aux dangers des déplacements forcés. En outre, elles sont souvent victimes de graves violations de leurs droits fondamentaux pendant la fuite et au cours de la phase de déplacement, ainsi qu’à l’intérieur et à l’extérieur des camps, et risquent notamment d’être victimes de violences sexuelles et de la traite et, s’agissant des filles, d’être enrôlées dans les forces armées et les groupes rebelles.

Les femmes déplacées vivent dans des conditions précaires dans les contextes de conflit et d’après conflit, n’ayant pas le même accès que les hommes à l’éducation, à la création de revenu et aux activités de formation professionnelle, souffrant de la mauvaise qualité des soins de santé sexuelle et génésique et se trouvant exclues des processus de décision, situation qui est encore accentuée par des structures d’encadrement dominées par les hommes et par un mauvais aménagement des camps et des infrastructures, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des camps. Cette situation d’extrême pauvreté et d’inégalité peut les amener à échanger des faveurs sexuelles contre de l’argent, un abri, de la nourriture ou d’autres biens, et les rend vulnérables à l’exploitation et à la violence ainsi qu’à la contamination par le VIH et à d’autres types de maladies sexuellement transmissibles.

Les femmes réfugiées ont plus de besoins et des besoins différents de ceux des hommes de par leur situation de réfugiées. Elles ont les mêmes besoins d’assistance et de protection que les femmes déplacées à l’intérieur de leur pays et pourraient donc bénéficier du même genre d’interventions tenant compte des disparités entre les sexes. Le Comité est conscient de la diversité qui existe au sein de ces groupes, des difficultés particulières auxquelles ils peuvent se trouver confrontés et des répercussions juridiques, sociales et autres propres aux caractéristiques particulières de leur état de personnes déplacées (déplacement interne ou transfrontalier), des différences de niveau de l’aide internationale qui leur est accordée et de la nécessité de formuler des réponses adaptées à leurs besoins.

La recherche de solutions durables au problème du déplacement lié à un conflit exclut souvent la situation des femmes déplacées, soit parce que celles-ci comptent sur la décision d’un membre de leur famille ou sur leur communauté au sein de laquelle leur voix est marginalisée, ou parce que les solutions durables sont définies dans le cadre de processus d’après conflit dont les femmes sont exclues. En outre, les demandeuses d’asile fuyant des zones de conflit peuvent se heurter à des obstacles liés à leur sexe, dans la mesure où leur expérience ne correspond pas nécessairement aux formes habituelles de persécution, qui ont été surtout décrits du point de vue des hommes.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Prennent les mesures préventives nécessaires pour protéger les femmes et les filles contre les déplacements forcés et pour protéger les droits fondamentaux des femmes et des filles déplacées, y compris l’accès aux services de base, pendant la fuite et le déplacement et dans le contexte de solutions durables;

b)Prennent en compte les risques et les besoins particuliers des différents groupes femmes de déplacées à l’intérieur de leur pays et des femmes réfugiées, qui sont soumises à des formes multiples et convergentes de discrimination, comme les femmes handicapées, les femmes âgées, les filles, les veuves, les femmes chefs de famille, les femmes enceintes, les femmes vivant avec le VIH/sida, les femmes rurales, les femmes autochtones, les femmes appartenant à des minorités ethniques, nationales, sexuelles ou religieuses et les militantes des droits fondamentaux;

c)Encouragent l’association et la participation utiles des femmes déplacées et des femmes réfugiées à tous les processus décisionnels, notamment à tous les aspects de la planification et de l’exécution de programmes d’aide et d’administration des camps, aux décisions concernant les solutions durables à adopter et aux activités à mettre en œuvre après un conflit;

d)Assurent une protection et une assistance aux femmes et aux filles déplacées dans leur propre pays et réfugiées, notamment en les protégeant contre la violence sexiste, y compris le mariage forcé et le mariage d’enfants; en veillant à ce qu’elles puissent, sur un pied d’égalité avec les hommes, bénéficier de certains services et soins de santé et participer pleinement à la distribution de fournitures et à l’élaboration de programmes d’aide tenant compte de leurs besoins particuliers; évitent que des femmes autochtones ou rurales ou des femmes appartenant à des minorités dépendant particulièrement de leur terre soient déplacées; et veillent à ce que des programmes d’éducation, de création de revenus et de formation professionnelle leur soient proposés;

e)Adoptent des mesures pratiques de protection et de prévention en matière de violences sexistes, ainsi que des mécanismes de responsabilisation, dans toutes les situations de déplacement (que ce soit dans les camps, les zones d’installation ou à l’extérieur des camps);

f)Enquêtent sur tous les cas de discrimination et de violence sexuelles et sexistes qui se produisent à tous les stades du cycle d’un déplacement lié à un conflit, et en poursuivent les auteurs;

g)Assurent aux femmes et aux filles déplacées à l’intérieur du pays ou réfugiées victimes de violences sexistes, y compris de violences sexuelles, un accès gratuit et immédiat à des services médicaux, à une assistance juridique et à un environnement sûr; leur assurent l’accès à des prestataires et des services de soins de santé et à des services de conseil spécialisés; et fassent en sorte que les autorités militaires et civiles présentes dans les situations de déplacement aient reçu une formation appropriée sur les problèmes de protection, les droits fondamentaux et les besoins des femmes déplacées;

h)Veillent à ce que la satisfaction des besoins d’assistance humanitaire immédiate et de protection des femmes déplacées à l’intérieur de leur pays et réfugiées s’accompagnent de stratégies à long terme de promotion de leurs droits socioéconomiques et leur offrent des possibilités de subsistance, de meilleurs moyens de décider de leur avenir, de se prendre en charge et de choisir la solution durable répondant le mieux à leur besoins;

i)Veillent à ce que toutes les situations d’afflux massif de réfugiés et de personnes déplacées, y compris de femmes et de filles, soient traitées comme il convient et à ce qu’il ne soit pas fait obstacle aux actions visant à répondre aux besoins de protection et d’assistance de ces personnes par suite du manque de clarté des mandats des institutions internationales ou de l’insuffisance de ressources.

6.Nationalité et apatridie (art. 1 à 3 et 9)

En plus d’accroître les risques auxquels sont exposées les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays, les réfugiés et les demandeurs d’asile, un conflit peut aussi être à la fois la cause et la conséquence de l’apatridie, qui rend les femmes et les filles particulièrement vulnérables à diverses formes de maltraitance dans les sphères publique et privée. Il peut y avoir apatridie lorsqu’en période de conflit, une femme est en plus victime de discrimination concernant le droit à la nationalité, notamment de lois lui imposant de changer de nationalité lorsqu’elle se marie ou que son mariage est dissous et de celles lui interdisant de transmettre sa nationalité.

Les femmes peuvent se retrouver apatrides si elles ne peuvent pas prouver leur nationalité parce que les documents nécessaires, tels que les papiers d’identité ou les certificats d’état civil, ne sont pas délivrés ou ont été perdus ou détruits durant le conflit et ne sont pas redélivrés à leur nom. L’apatridie peut également résulter de situations dans lesquelles des mères se voient refuser la possibilité de transmettre leur nationalité à leurs enfants à cause de lois discriminatoires en matière de nationalité.

Les femmes et les filles apatrides risquent davantage de subir des sévices pendant un conflit, car elles ne bénéficient pas des protections découlant de la citoyenneté, notamment l’assistance consulaire, mais également parce que nombre d’entre elles sont sans papiers ou appartiennent à des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques. L’apatridie peut aussi conduire au déni généralisé des libertés et droits fondamentaux en période d’après conflit. Ainsi, les femmes peuvent se voir refuser l’accès aux soins de santé, à l’emploi et à d’autres droits socioéconomiques et culturels, les pouvoirs publics ne fournissant de services qu’aux seuls ressortissants en cas de pénurie de ressources. Les femmes privées de nationalité sont souvent exclues de la vie politique et ne peuvent pas participer au nouveau gouvernement et aux instances de gouvernance de leur pays, en violation des articles 7 et 8 de la Convention.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Veillent à ce que les mesures destinées à prévenir l’apatridie s’appliquent à toutes les femmes et les filles, ainsi qu’aux populations qui risquent particulièrement de devenir apatrides du fait d’un conflit, comme les femmes déplacées dans leur propre pays, les réfugiées, les demandeuses d’asile et les victimes de la traite;

b)S’assurent que les mesures de protection des femmes et des filles apatrides continuent d’être appliquées avant, pendant et après un conflit;

c)Garantissent aux femmes et aux filles touchées par un conflit la possibilité d’obtenir, sur un pied d’égalité avec les hommes, les documents nécessaires pour exercer leurs droits, notamment le droit de se faire délivrer ces documents à leur nom, et prennent les dispositions voulues pour que ces documents soient délivrés ou remplacés rapidement, sans imposer des conditions déraisonnables, comme exiger des femmes et des filles qu’elles retournent là où elles vivaient avant d’être déplacées pour les obtenir;

d)Fassent en sorte, y compris en cas de flux migratoires intervenant après un conflit, que les femmes déplacées dans leur propre pays, les réfugiées et les demandeuses d’asile, ainsi que les filles séparées et non accompagnées, disposent de documents individuels, et enregistrent en temps voulu et dans des conditions d’égalité toutes les naissances, mariages et divorces.

7.Mariage et relations familiales (art. 15 et 16)

Les inégalités au sein du mariage et dans les relations familiales influent sur l’expérience qu’ont les femmes des situations de conflit et d’après conflit. Dans ce genre de situations, les femmes et les filles risquent d’être contraintes de se marier pour apaiser les groupes armés ou parce que la pauvreté dont elles sont victimes après un conflit les oblige à se marier pour des raisons de sécurité financière, ce qui va à l’encontre de leurs droits garantis par les paragraphes 1 a) et 1 b) de l’article 16 de la Convention, de choisir leur époux et de se marier de leur propre volonté. Dans certains conflits, les adolescentes sont particulièrement exposées au risque de mariage forcé, de plus en plus utilisé par les groupes armés. Les familles peuvent également forcer les filles à se marier pour se prémunir contre la pauvreté et contre l’idée erronée que le mariage peut les protéger du viol.

L’égalité d’accès à la propriété, garantie par le paragraphe 1 h) de l’article 16, est particulièrement critique dans les situations d’après conflit, car le logement et la terre jouent un rôle déterminant dans les efforts de redressement, en particulier pour les femmes chefs de famille, dont le nombre tend à augmenter en temps de crise en raison de la séparation des familles et du veuvage. L’accès limité et inégal des femmes à la propriété devient particulièrement dommageable dans les situations d’après conflit, en particulier lorsque les femmes déplacées qui ont perdu leur mari ou de proches parents de sexe masculin rentrent chez elles pour constater qu’elles n’ont pas de titre de propriété de leur terre et, par conséquent, qu’elles ne disposent d’aucun moyen de gagner leur vie.

Les grossesses forcées, les avortements ou la stérilisation des femmes dans les zones de conflit violent un grand nombre de leurs droits fondamentaux, notamment le droit mentionné au paragraphe 1 e) de l’article 16 de décider librement et de façon responsable du nombre de leurs enfants et de l’espacement de leurs naissances.

Le Comité rappelle ses recommandations générales no 21 (1994) et no 29 (2013) et recommande en outre que les États parties :

a)Préviennent les violations sexistes telles que les mariages et les grossesses forcés, les avortements ou la stérilisation des femmes et des filles dans les zones de conflit, enquêtent sur ces violations et les sanctionnent;

b)Adoptent une législation et des politiques tenant compte des disparités entre les sexes et reconnaissant les difficultés particulières que rencontrent les femmes qui revendiquent leur droit à l’héritage, ainsi qu’à leur terre après un conflit, y compris du fait de la perte ou de la destruction des titres fonciers et autres documents.

8.Réforme du secteur de la sécurité et désarmement, démobilisation et réintégration (art. 1 à 3, 5 a) et 7)

Le désarmement, la démobilisation et la réintégration, qui font partie de la réforme générale du secteur de la sécurité, sont au nombre des premières initiatives de sécurité prises dans les périodes d’après conflit et de transition. Néanmoins, les programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration ne sont que rarement élaborés ou mis en œuvre en coordination avec les initiatives de réforme du secteur de la sécurité. Ce manque de coordination porte souvent atteinte aux droits des femmes, par exemple lorsque des anciens combattants ayant commis des violations sexistes sont amnistiés afin de faciliter leur réinsertion dans le secteur de la sécurité. Les femmes sont également exclues des postes créés dans les nouvelles institutions de sécurité à cause du manque de planification et de coordination des opérations de réforme du secteur de la sécurité et des initiatives de désarmement, démobilisation et réintégration. Les processus inadéquats de sélection entravent également toute réforme du secteur de la sécurité soucieuse de l’égalité des sexes, essentielle à la mise en place d’institutions de sécurité non discriminatoires, tenant compte des disparités entre les sexes et susceptible de répondre aux besoins de sécurité des femmes et des filles, y compris celles des groupes défavorisés.

À l’issue d’un conflit, les femmes et les filles sont confrontées à des problèmes particuliers lorsqu’elles ont été combattantes ou associées à des groupes armés comme messagères, cuisinières, infirmières, soignantes et travailleuses ou épouses forcées. Souvent, compte tenu de la structure traditionnellement dominée par les hommes des groupes armés, les programmes de désarmement, démobilisation et réintégration ne répondent pas aux besoins spécifiques des femmes et des filles, ne prévoient pas la consultation de ces dernières et les excluent. Il n’est pas rare que les ex-combattantes soient exclues des listes des personnes à désarmer, à démobiliser et à réintégrer. Les programmes de désarmement, démobilisation et réintégration ne reconnaissent pas non plus le statut des filles associées à des groupes armés et les identifient comme personnes à charge et non comme des victimes d’un enlèvement ou excluent les filles qui n’ont pas joué un rôle de combattant visible. Beaucoup de combattantes ont été victimes de violences sexuelles et sexistes, certaines d’entre elles ayant donné naissance à des enfants à la suite d’un viol, beaucoup d’autres souffrant de maladies sexuellement transmissibles et certaines étant rejetées ou stigmatisées par leur famille, entre autres traumatismes. Les programmes de désarmement, démobilisation et réintégration ne tiennent souvent compte ni de leur expérience ni des traumatismes psychologiques qu’elles ont subis. Par conséquent, ces femmes ne peuvent pas reprendre de façon satisfaisante leur vie familiale et communautaire.

Même lorsque les femmes et les filles sont prises en compte dans les programmes de désarmement, démobilisation et réintégration, le soutien qu’elles reçoivent est inadéquat, s’appuie sur des stéréotypes sexistes et limite leur autonomisation économique en ne prévoyant de formation professionnelle que dans des domaines traditionnellement féminins. En outre, les programmes de désarmement, démobilisation et réintégration n’apportent pas de réponse adaptée aux traumatismes psychosociaux dont les femmes et les filles ont souffert dans les situations de conflit et d’après conflit. Cela peut entraîner d’autres violations des droits fondamentaux, car la stigmatisation sociale, l’isolement et le manque relatif d’autonomie économique peuvent obliger certaines d’entre elles à rester dans des situations d’exploitation (par exemple, avec leurs ravisseurs) ou à replonger dans des situations du même type si elles doivent se tourner vers des activités illicites pour satisfaire leurs besoins et ceux des personnes à leur charge.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Élaborent et mettent en œuvre des programmes de désarmement, démobilisation et réintégration dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité et de concert avec cette réforme;

b)Entreprennent une réforme du secteur de la sécurité qui tienne compte des disparités entre les sexes et débouche sur des institutions représentatives qui prennent en considération les expériences des femmes et leurs priorités et fassent la liaison avec les femmes et les organisations féminines;

c)Fassent en sorte que la réforme du secteur de la sécurité soit soumise à des mécanismes inclusifs de surveillance et de responsabilisation prévoyant des sanctions, notamment des enquêtes sur les ex-combattants; établissent des protocoles et des entités spécialisés pour enquêter sur les violations sexistes; et renforcent les connaissances spécialisées sur la problématique hommes-femmes et le rôle des femmes dans la surveillance du secteur de la sécurité;

d)Garantissent l’égalité de participation des femmes à toutes les étapes du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration, depuis la négociation des accords de paix et la création d’institutions nationales jusqu’à la conception et la mise en œuvre des programmes;

e)S’assurent que les programmes de désarmement, démobilisation et réintégration des combattants ciblent expressément les combattantes et les femmes et les filles associées à des groupes armés et qu’il est remédié aux obstacles à leur participation équitable; et veillent à ce que des services psychosociaux et autres services de soutien soient offerts aux ex-combattantes et aux femmes et aux filles associées à des groupes armés;

f)Veillent à ce que les processus de désarmement, démobilisation et réintégration prennent expressément en compte les besoins distincts des femmes afin de leur assurer dans ces domaines le soutien dont elles ont besoin en fonction de leur âge, notamment en répondant aux préoccupations particulières des jeunes mères et de leurs enfants sans les cibler de manière excessive et les exposer ainsi à une plus grande stigmatisation.

9.La réforme constitutionnelle et électorale (art. 1 à 5 a), 7 et 15)

Le processus de réforme électorale et de renforcement de la constitution qui suit un conflit constitue une occasion qu’il convient de saisir pour jeter les bases de l’instauration de l’égalité des sexes durant la période de transition et au-delà. Tant l’élaboration et la mise en place que la teneur de ces réformes peuvent créer un précédent pour la participation des femmes à la vie sociale, économique et politique dans la période d’après conflit. Elles fournissent en outre la base juridique permettant aux défenseurs des droits des femmes d’exiger que d’autres types de réformes soucieuses des sexospécificités soient menés au cours de la phase de transition. L’importance de la prise en compte d’une perspective sexospécifique dans la réforme électorale et constitutionnelle d’après conflit a également été reconnue par le Conseil de sécurité dans sa résolution 1325 (2000).

Pendant le processus d’élaboration de la constitution, la participation égale et représentative des femmes est essentielle à l’incorporation de garanties constitutionnelles de leurs droits fondamentaux. Les États parties doivent veiller à ce que la nouvelle constitution consacre le principe de l’égalité entre femmes et hommes et le principe de la non-discrimination conformément à la Convention. Lors de la rédaction de la constitution, la participation effective des femmes sur un pied d’égalité avec les hommes est essentielle pour que leurs droits bénéficient des garanties constitutionnelles. Pour que les femmes jouissent de leurs droits et des libertés fondamentales à égalité avec les hommes, il importe qu’elles bénéficient de l’égalité des chances au départ, grâce à l’adoption de mesures spéciales temporaires visant à accélérer l’égalité de fait entre les sexes.

Lors des processus de réforme électorale et de rédaction de la constitution dans les périodes d’après conflit, il est particulièrement difficile d’assurer la participation des femmes et de promouvoir l’égalité entre les sexes car les systèmes électoraux ne sont pas toujours conçus pour traiter indifféremment hommes et femmes. Les règles et procédures électorales qui déterminent quels groupes d’intérêts sont représentés dans les instances constituantes et autres organes électoraux en période post-conflit contribuent de façon déterminante à garantir que les femmes aient leur place dans la vie publique et politique. Les décisions concernant le choix des systèmes électoraux sont importantes pour surmonter le préjugé sexiste qui nuit à la participation des femmes. Par ailleurs, des progrès importants vers une participation à égalité des femmes tant en qualité de candidates que d’électrices ainsi que la tenue d’élections libres et régulières ne seront possibles que si un certain nombre de mesures appropriées sont prises, notamment la mise sur pied d’un système électoral respectueux des différences entre les sexes et l’adoption de mesures spéciales temporaires visant à renforcer la participation des femmes en tant que candidates, à mettre en place un mécanisme efficace d’inscription sur les listes électorales et à faire en sorte que les électrices et les femmes qui se présentent à des élections politiques ne fassent l’objet de violences ni de la part des autorités ni de celle d’acteurs privés.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Garantissent la participation des femmes sur un pied d’égalité au processus de rédaction de la constitution et mettent en place des mécanismes respectueux des spécificités hommes-femmes pour assurer la participation du public et sa contribution à ce processus;

b)Veillent à ce que la réforme constitutionnelle et les autres réformes législatives prennent en compte les droits fondamentaux des femmes consacrés par la Convention et la nécessité d’interdire la discrimination à l’égard des femmes, tant directe qu’indirecte, dans les sphères aussi bien publique que privée, conformément à l’article premier de la Convention, et prévoient des dispositions interdisant toutes formes de discrimination à l’égard des femmes;

c)Veillent à ce que la nouvelle constitution prévoit des mesures spéciales temporaires, applicables aux citoyens et aux non-citoyens, et garantisse que les droits des femmes ne fassent pas l’objet de dérogation dans les situations d’urgence;

d)Veillent à ce que les réformes électorales respectent le principe de l’égalité des sexes et garantissent l’égalité de représentation des femmes en adoptant des mesures spéciales temporaires telles que quotas, y compris pour les groupes de femmes défavorisées; adoptent un système électoral de représentation proportionnelle; et veillent à ce que les organes de gestion des élections garantissent le respect de ces dispositions, au besoin à l’aide de sanctions;

e)Veillent à ce que les femmes puissent s’inscrire sur les listes électorales et participer aux scrutins, par exemple en autorisant le vote par correspondance, le cas échéant, et en supprimant tous les obstacles, notamment en donnant accès à un nombre adéquat de bureaux de vote;

f)Adoptent une politique de tolérance zéro à l’égard de toutes les formes de violence qui entravent la participation des femmes, notamment la violence ciblée de la part de groupes étatiques et non étatiques contre les femmes qui font campagne pour exercer des fonctions publiques ou celles qui exercent leur droit de vote.

10.Accès à la justice (art. 1 à 3, 5 a) et 15)

Lorsqu’il est mis fin à un conflit, la société a la lourde tâche de « faire face au passé », et cela implique qu’il lui faut tenir les auteurs des violations des droits de l’homme responsables de leurs actes, mettre fin à l’impunité, restaurer l’état de droit, pourvoir aux besoins des survivants en leur offrant la justice et des réparations. Les difficultés d’accès à la justice sont encore aggravées dans les situations de conflit et d’après conflit par le fait que les mécanismes officiels de justice peuvent ne plus exister ou risque de fonctionner à un faible niveau d’efficacité et d’efficience. L’appareil judiciaire en place a souvent plus tendance à violer les droits des femmes qu’à les protéger, ce qui peut décourager les victimes de recourir à la justice. Tous les obstacles – juridiques, procéduraux, institutionnels, sociaux et pratiques – auxquels se heurtaient les femmes qui cherchaient à demander justice en s’adressant aux tribunaux nationaux avant le conflit, et la discrimination profondément ancrée dont elles étaient victimes sont encore accentués pendant le conflit, persistent après le conflit et se combinent à la dégradation des structures de police et de justice pour leur refuser ou leur rendre difficile l’accès à la justice.

Au lendemain d’un conflit, des mécanismes de justice transitoire sont mis en place pour réparer les conséquences des violations des droits de l’homme, s’attaquer aux causes profondes du conflit, faciliter la transition du conflit à une gouvernance démocratique, institutionnaliser l’appareil de l’État en vue de protéger et de promouvoir les droits et libertés fondamentales, rendre la justice et s’assurer de la sanction de toutes les violations des droits de l’homme et du droit humanitaire et garantir que ces violations ne se reproduisent plus. Pour atteindre ces multiples objectifs, des mécanismes judiciaires et/ou non judiciaires temporaires, parmi lesquels des commissions de la vérité et des tribunaux hybrides sont souvent créés pour remplacer un appareil judiciaire national dysfonctionnel ou y suppléer.

Les violations les plus graves et les plus répandues observées en période de conflit restent souvent impunies par les mécanismes de justice de transition et deviennent « la norme » dans le contexte d’après conflit. Malgré les efforts en vue de renforcer et/ou de compléter l’appareil judiciaire national, les mécanismes de justice de transition se sont montrés et continuent de se montrer incapables d’administrer adéquatement la justice et d’accorder des réparations pour tous les préjudices subis, renforçant ainsi l’impunité dont jouissent les auteurs de violations des droits fondamentaux des femmes. Les mécanismes de justice transitionnels n’ont pas réussi à répondre pleinement à l’impact du conflit sur les femmes et à tenir compte de l’interdépendance et des liens entre toutes les violations des droits fondamentaux qui se produisent en période de conflit. Pour la plupart des femmes, les priorités en matière de justice après conflit ne doivent pas se limiter à mettre fin aux violations des droits civils et politiques mais doivent inclure les violations de tous les droits économiques, sociaux et culturels.

Aux termes de la Convention, les États parties sont tenus de traiter toutes les violations des droits des femmes ainsi que la discrimination sexuelle et sexiste sous-jacente dont ces violations sont l’expression. Outre le devoir de leur offrir réparation pour les violations sexistes dont elles ont été victimes en période de conflit, les mécanismes de justice de transition peuvent apporter aux femmes un changement profond dans leur vie. Du fait du rôle important qu’ils jouent dans l’établissement des bases d’une nouvelle société, ces mécanismes offrent une occasion unique aux États parties de préparer le terrain pour l’instauration d’une véritable égalité des sexes en combattant la discrimination préexistante et profondément ancrée qui empêchent les femmes de jouir des droits que leur reconnaît la Convention.

Bien que les tribunaux internationaux aient contribué à identifier et réprimer les crimes sexistes, il reste un certain nombre de difficultés pour assurer l’accès des femmes à la justice et de nombreux obstacles procéduraux, institutionnels et sociaux qui continuent de les empêcher de se prévaloir des procédures de justice internationale. L’acceptation passive de la violence passée renforce l’habitude de silence et la stigmatisation. Les processus de réconciliation, tels que les commissions de vérité et de réconciliation offrent souvent aux survivantes la possibilité de faire face à leur passé dans un cadre sûr et de constituer des dossiers officiels; toutefois, ces recours ne doivent en aucun cas servir de subterfuge à des enquêtes et des poursuites des auteurs de violations des droits fondamentaux commises contre des femmes et des filles.

Le Comité rappelle aux États parties que leurs obligations exigent également qu’ils assurent aux femmes le droit de recours, c’est-à-dire le droit à des réparations effectives et adéquates pour violation des droits que leur reconnaît la Convention. Il est essentiel d’évaluer la dimension hommes-femmes du préjudice subi pour garantir aux femmes des réparations promptes, effectives et adéquates en cas de violations infligées en temps de conflit, que les voies de recours soient ordonnées par un tribunal national ou international ou aux termes de programmes administratifs. Loin de rétablir la situation qui existait avant les violations des droits des femmes, les réparations doivent chercher à mettre fin aux inégalités structurelles qui ont conduit à ces violations, répondre aux besoins spécifiques des femmes et prévenir la répétition des actes dont elles ont été victimes.

Dans beaucoup de pays sortant d’un conflit, les mécanismes judiciaires officieux sont la seule forme de justice offerte aux femmes, et ces mécanismes peuvent se révéler un outil précieux au lendemain d’un conflit. Toutefois, comme les méthodes et décisions de ces mécanismes peuvent se révéler discriminatoires à l’égard des femmes, il est essentiel d’examiner soigneusement la façon dont ils facilitent l’accès des femmes à la justice, notamment la définition du type de violations dont ils se saisissent et la possibilité de contester leurs décisions devant l’appareil judiciaire officiel.

Le Comité recommande que les États parties :

a)Adoptent une approche globale des mécanismes de justice transitionnelle prévoyant à la fois des mécanismes judiciaires et non judiciaires, y compris des commissions de vérité et de réparations tenant compte des disparités entre les sexes et favorisant le respect des droits des femmes;

b)S’assurent que certains éléments concrets des mécanismes de justice transitionnelle garantissent aux femmes l’accès à la justice, en habilitant certains organismes à traiter toutes les violations sexistes, en rejetant l’amnistie pour ces violations et en veillant à l’application des recommandations et/ou des décisions formulées par ces mécanismes;

c)S’assurent que l’appui aux processus de réconciliation ne se traduit pas par des amnisties généralisées de toutes les violations des droits de l’homme, surtout des violences sexuelles contre les femmes et les filles, et que ces processus renforcent leur lutte contre l’impunité dont bénéficient ces crimes;

d)S’assurent que toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes sont interdites lorsqu’ils rétablissent l’état de droit, lors de la réforme juridique et de l’imposition, s’il y a lieu, de sanctions pénales, civiles et disciplinaires; et prévoient des mesures spécifiques visant à protéger les femmes contre tout acte de discrimination;

e)S’assurent que les femmes participent à la conception, au fonctionnement et au suivi des mécanismes de justice transitionnelle à tous les niveaux, afin de garantir que leur expérience du conflit est prise en compte, que leurs besoins et leurs priorités sont respectés et qu’il est remédié à toutes les violations qu’elles ont subies; et garantissent leur participation à la conception de tous les programmes de réparations;

f) Mettent en place des mécanismes appropriés pour faciliter et favoriser la pleine collaboration et participation des femmes aux mécanismes de justice transitionnelle, notamment en veillant à ce que leur identité soit protégée pendant les audiences publiques et que leurs témoignages soient reçus par un personnel professionnel féminin;

g)Offrent des recours efficaces et opportuns qui répondent à différents types de violations subies par les femmes et leur assurent l’offre de réparations complètes et adéquates; traitent toutes les violations sexistes, y compris les violations de leurs droits sexuels et de procréation, l’asservissement domestique et sexuel, le mariage et le déplacement forcé, en plus de la violence sexuelle, ainsi que les violations de leurs droits économiques, sociaux et culturels;

h)Adoptent des procédures respectueuses des disparités entre les sexes afin d’éviter une nouvelle forme de victimisation et de stigmatisation; créent des unités spéciales de protection et des bureaux de réception des plaintes des femmes dans les commissariats de police; ouvrent des enquêtes à titre confidentiel et avec ménagement; et veillent à ce que, lors des enquêtes et des procès, le même poids soit accordé aux témoignages des femmes et des filles qu’à ceux des hommes;

i)Combattent l’impunité des violations des droits des femmes et s’assurent que toutes les violations de ces droits font l’objet d’enquêtes, de poursuites et de sanctions envers leurs auteurs;

j)Renforcent la responsabilisation pénale, notamment en assurant l’indépendance, l’impartialité et l’intégrité du système judiciaire; en renforçant l’aptitude du personnel médical, judiciaire et de sécurité à recueillir et à conserver des preuves médicolégales de la violence sexuelle en temps de conflit et après conflit; et renforcent la collaboration avec d’autres instances judiciaires, y compris le Tribunal pénal international;

k)Renforcent l’accès des femmes à la justice, notamment en leur accordant une assistance juridique et en créant des tribunaux spécialisés, notamment en violence domestique et en conflits familiaux, des tribunaux itinérants pour les camps et implantations et pour les régions reculées, et en prenant des mesures adéquates de protection des victimes et des témoins, y compris en ne révélant pas leur identité et en ouvrant des foyers pour les recueillir;

l)Travaillent directement avec les mécanismes judiciaires officieux et encouragent les réformes appropriées, le cas échéant, afin de favoriser le respect des droits de l’homme et des règles d’égalité, et de veiller à ce que les femmes ne soient pas victimes de discrimination.

V.Conclusion

Outre celles qui précèdent, le Comité fait les recommandations suivantes aux États parties.

A.Suivi et rapports

Les États parties devraient rendre compte du cadre juridique, des politiques et des programmes qu’ils ont mis en place pour garantir les droits fondamentaux des femmes dans les situations de prévention des conflits, de conflit et d’après conflit. Ils devraient collecter, analyser et mettre à disposition des statistiques ventilées par sexe, qui viendraient s’ajouter aux tendances à long terme concernant les femmes, la paix et la sécurité. Les rapports qu’ils présentent devraient porter non seulement sur les initiatives prises à l’intérieur et à l’extérieur du territoire relevant de leur juridiction, mais également sur les mesures qu’ils ont adoptées individuellement et en tant que membres d’organisations internationales ou intergouvernementales dans la mesure où elles ont trait aux femmes et à la prévention des conflits, aux conflits et à l’après-conflit.

Les États parties doivent fournir des informations sur la mise en œuvre du programme du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, en particulier des résolutions 1325 (2000), 1820 (2008), 1888 (2009), 1889 (2009), 1960 (2010), 2106 (2013) et 2122 (2013), notamment en rendant compte précisément du respect de tous les indicateurs et critères convenus, définis par les Nations Unies dans le cadre de ce programme.

Le Comité se félicite également des rapports présentés par les missions des Nations Unies participant à l’administration de territoires étrangers sur la situation des droits des femmes dans ces territoires, dans la mesure où ils concernent la prévention des conflits, les conflits et l’après-conflit.

Conformément à l’article 22 de la Convention, le Comité invite les institutions spécialisées à soumettre des rapports sur la mise en œuvre de la Convention dans les situations de prévention des conflits, de conflit et d’après conflit.

B.Ratification des traités ou adhésion aux traités

Les États parties sont encouragés à ratifier tous les instruments internationaux relatifs à la protection des droits des femmes dans les situations de prévention des conflits, de conflit et d’après conflit, y compris :

a)Le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1999);

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (2000);

c)Le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (1977); et le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (1977);

d)La Convention relative au statut des réfugiés (1951) et son Protocole (1967);

e)La Convention relative au statut des apatrides (1954) et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie (1961);

f)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (2000) visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants;

g)Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (1998);

h)Le Traité sur le commerce des armes (2013).