Nations Unies

CED/C/ALB/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

15 janvier 2015Français Original: anglaisAnglais, espagnol et français uniquement

Comité des disparitions forcées

Examen des rapports soumis par les États parties en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention

Rapports des États parties attendus en 2012

Albanie *

[Date de réception: 11 novembre 2015]

Table des matières

Page

I.Introduction3

II.Cadre juridique général de l’interdiction de la disparition forcée4

A.Dispositions constitutionnelles, pénales et administratives relatives à l’interdictionde la disparition forcée4

B.Instruments internationaux relatifs à la disparition forcée8

C.La Convention dans l’ordre juridique interne9

D.Cadre institutionnel (autorités judiciaires, institutions, mécanismes nationaux)de la protection et de la promotion des droits de l’homme9

E.Informations utiles11

III.Informations relatives à l’application des articles de la Convention13

Article 1erInterdiction absolue de la disparition forcée13

Article 2Définition de la disparition forcée14

Article 3Enquête15

Article 4La disparition forcée définie comme une infraction16

Article 5La disparition forcée définie comme un crime contre l’humanité16

Article 6Régime de la responsabilité pénale17

Article 7Répression de la disparition forcée19

Article 8Régime de prescription de la disparition forcée21

Article 9Compétence21

Article 10Mesures de précaution23

Article 11Obligation de poursuivre ou d’extrader28

Article 12Enquête efficace32

Article 13Extradition35

Article 14 Entraide judiciaire37

Article 15Coopération internationale39

Article 16Refoulement39

Article 17Interdiction de la détention secrète40

Article 18Informations sur la personne privée de liberté46

Article 19Données personnelles47

Article 20Restrictions au droit aux informations48

Article 21Remise en liberté49

Article 22Prévention de l’obstruction aux recours, manquement à l’obligation d’enregistrement de toute privation de liberté et refus de fournir des informations sur une privation de liberté 50

Article 23Formation des autorités compétentes50

Article 24Droits de la «victime»51

Article 25Protection des enfants 52

I.Introduction

1.La République d’Albanie a ratifié la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées par la loi no 9802 du 13 septembre 2007. Dans cette loi, la République d’Albanie déclare, conformément au paragraphe 1 de l’article 31 de la Convention, qu’elle reconnaît la compétence du Comité des disparitions forcées pour recevoir et examiner des communications présentées par des particuliers ou pour le compte de particuliers relevant de sa juridiction qui se disent victimes d’une violation, par l’Albanie, d’une dispositions de la Convention. En application de l’article 32 de la Convention, la République d’Albanie déclare reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications par lesquelles un État partie prétend qu’un autre État partie ne s’acquitte pas de ses obligations au titre de la Convention.

2.En application de l’article 29 de la Convention, l’Albanie soumet au Comité des disparitions forcées un rapport sur les mesures qu’elle a prises pour donner effet à ses obligations au titre de la Convention.

3.Les autorités albanaises considèrent le processus d’établissement de rapports, y compris l’élaboration du rapport national, à la fois comme un moyen de garantir le respect des obligations internationales et comme une occasion d’évaluer et de présenter la situation des droits de l’homme aux fins de l’adoption des dispositions légales nécessaires et de la mise en œuvre de la Convention. Le retard accumulé dans la présentation du rapport est dû à l’adoption d’un cadre juridique qui érige la disparition forcée en infraction, d’une part, et à un certain nombre de difficultés rencontrées dans l’application de la Convention d’autre part. L’Albanie tient à présenter ses excuses pour ce retard, et remercie le Comité de sa compréhension.

4.Le présent rapport initial a été élaboré conformément aux Directives du Comité des disparitions forcées relatives à la forme et au fond du rapport; il s’accompagne du document de base commun, établi selon les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Le rapport a été élaboré conformément à la résolution 68/268, intitulée «Renforcement et amélioration du fonctionnement de l’ensemble des organes conventionnels des droits de l’homme», adoptée par l’Assemblée générale le 9 avril 2014.

5.Le rapport a été établi par le Ministère des affaires étrangères en collaboration avec les institutions centrales et des institutions indépendantes. En vertu du décret no 112 du Premier Ministre daté du 5 mars 2014, portant création du groupe de travail interinstitutions chargé de rédiger les rapports en vue de l’application des conventions internationales relatives aux droits de l’homme, le Ministère des affaires étrangères coordonne le processus d’élaboration des rapports nationaux dans le cadre de la mise en œuvre des conventions relatives aux droits de l’homme. Le rapport a été élaboré en collaboration avec le Ministère de la justice et la Direction générale des prisons, le Ministère de l’intérieur et la Direction générale de la police de l’État, le Ministère de la protection sociale et de la jeunesse, le Ministère de la santé et le Bureau du Procureur général. Plusieurs institutions indépendantes y ont également contribué: le Médiateur, le Commissaire à la protection contre la discrimination et le Commissaire au droit à l’information et à la protection des données personnelles.

6.Conscients de l’importance du rôle et de la coopération de la société civile dans le domaine des droits de l’homme, nous avons également informé les organisations non gouvernementales actives dans ce domaine de l’élaboration du rapport et les avons encouragées à apporter leur contribution.

7.Conformément aux procédures juridiques internes régissant la soumission de rapports sur la mise en œuvre des conventions relatives aux droits de l’homme, le présent rapport a été adopté par une décision du Conseil des ministres.

8.Le rapport contient des informations sur le cadre général, institutionnel et juridique de l’interdiction et de la répression de la disparition forcée, ainsi que des informations sur les mesures prises pour appliquer les articles 1 à 25 de la Convention.

II.Cadre juridique général de l’interdiction de la disparition forcée

9.L’Albanie attache la plus grande valeur à l’amélioration constante des normes relatives à la protection et au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Dans ce cadre, et conformément à ses obligations internationales, elle accorde une importance prioritaire au renforcement de sa législation interne. La Constitution de la République d’Albanie, les accords internationaux ratifiés intégrés à l’ordre juridique interne, les lois et les actes normatifs du Conseil des ministres (arrêtés) garantissent la réalisation concrète des droits de l’homme. La législation albanaise, constamment améliorée et enrichie, garantit également la prévention de la disparition forcée, comme le veut la Convention.

A.Dispositions constitutionnelles, pénales et administratives relatives à l’interdiction de la disparition forcée

10.La République d’Albanie s’est dotée d’un système complet de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La Constitution albanaise contient plusieurs dispositions relatives aux droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, ainsi qu’aux libertés fondamentales, et prévoit des institutions de protection des droits de l’homme. Elle dispose que les droits et libertés fondamentaux de la personne humaine sont indivisibles, inaliénables et inviolables, et qu’ils constituent le socle de l’ordre juridique albanais (art. 15). L’article 17 précise que toute restriction aux droits et libertés inscrits dans la Constitution doit être réalisée dans le strict cadre de la loi, dans l’intérêt public ou aux fins de la protection d’autres individus, et ne peut en aucun cas porter atteinte au fondement de ces droits et libertés. La Constitution fait obligation à toutes les institutions et à tous les pouvoirs publics, dans l’exercice de leurs fonctions, de respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales et de concourir à leur réalisation. Elle dispose que les droits de l’homme et les libertés fondamentales ainsi que les obligations qui en découlent s’appliquent indistinctement aux ressortissants albanais, aux étrangers et aux apatrides. Elle dispose également que «nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants» et que «nul ne peut être privé de liberté sauf dans les cas et selon les procédures prévus par la loi», et énonce les garanties qui protègent la liberté.

11.La Constitution garantit le droit à la vie et interdit la peine de mort en toutes circonstances, en temps de paix comme en temps de guerre. La peine capitale n’est plus appliquée en République d’Albanie depuis que le pays a ratifié la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en 1996.

12.Le Code pénal (CP) se fonde sur la Constitution, les principes généraux du droit pénal international et les traités internationaux ratifiés. Il définit les infractions et les sanctions pénales ainsi que toutes les autres mesures devant être prises à l’encontre des auteurs. Les infractions pénales se divisent en deux grandes catégories: les crimes et les délits. Elles sont différenciées selon les dispositions prévues dans les sections respectives du CP. La législation pénale nationale vise à protéger l’indépendance de l’état et l’intégrité de son territoire, la dignité humaine, les droits et libertés, l’ordre constitutionnel, la propriété, l’environnement, la coexistence et la compréhension mutuelle entre les Albanais et les minorités du pays, la coexistence religieuse, ainsi qu’à prévenir et à réprimer les infractions pénales. Le CP est fondé sur les principes constitutionnels de l’état de droit, de l’égalité devant la loi, du respect de la justice dans la déclaration de culpabilité et le prononcé de la peine, de la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant, de l’humanisme, de la non-discrimination et de l’égalité de traitement de tous les citoyens.

13.Compte tenu de l’obligation de transposer dans la législation nationale les dispositions de la Convention, l’infraction de disparition forcée et les sanctions y relatives ont été intégrées au Code pénal, conformément à la définition énoncée à l’article 2 de la Convention et à ses autres articles. Comme le veut l’article 5 de la Convention, la disparition forcée est considérée comme un crime contre l’humanité et punie comme tel.

14.En ce qui concerne l’infraction de disparition forcée, le Code pénal prévoit la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique. En application de l’article 7 de la Convention, en vertu duquel les États parties doivent rendre le crime de disparition forcée passible de peines appropriées qui prennent en compte son extrême gravité, le CP prévoit des sanctions sévères. Comme le demande le paragraphe 2, alinéa b de l’article 7 de la Convention, le CP prévoit également des circonstances aggravantes: en cas de décès de la personne disparue, et pour ceux qui se sont rendus coupables de la disparition forcée d’enfants, de femmes enceintes, ou de personnes qui, pour une raison quelconque, ne peuvent être protégées. Comme prévu par l’article 25 de la Convention, le CP réprime «la soustraction d’enfants soumis à une disparition forcée ou dont le père, la mère ou le représentant légal sont soumis à une disparition forcée, ou d’enfants nés pendant la captivité de leur mère soumise à une disparition forcée». En vertu des modifications apportées au CP, l’application de ces dispositions repose sur le principe de la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant.

15.Dans l’esprit des conventions internationales relatives aux droits de l’homme, et sur la base des principes constitutionnels de l’état de droit, de l’humanisme, de la protection de la dignité, des droits et des libertés fondamentales, la législation pénale albanaise prévoit d’autres dispositions relatives aux atteintes à la liberté qui reprennent certains éléments figurant dans l’article 2 de la Convention.

16.Le CP prévoit l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Aux termes de son article 86, la torture constitue une infraction pénale, comme le prévoit l’article premier de la Convention contre la torture. Aux termes de son article 87, la torture, les traitements dégradants et autres actes inhumains, lorsqu’ils ont des conséquences graves, donnent lieu à une aggravation de la peine. Le CP prévoit également des sanctions pénales pour «l’enlèvement ou la prise d’otage», avec des circonstances aggravantes lorsque la victime est un mineur âgé de moins de 14 ans, et pour la «privation illégale de liberté».

17.L’inclusion dans le Code pénal de l’infraction de disparition forcée et des peines correspondant à ses différents degrés de gravité, ainsi que d’autres dispositions relatives à la privation illégale de liberté, à l’enlèvement, à la prise d’otage, à la torture et aux peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants fournissent le cadre légal nécessaire pour prévenir ces actes et garantir que les autorités ne ferment pas les yeux sur les disparitions forcées et se conforment aux obligations internationales leur incombant au titre de la Convention.

18.Le Code de procédure pénale (CPP) dispose que le rôle des règles qu’il énonce est de garantir des procédures justes, équitables et régulières, de protéger les libertés individuelles, les droits et les intérêts légitimes des citoyens, et de contribuer au renforcement de l’état de droit et à l’application de la Constitution et du droit interne. Il vise à assurer la pleine protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales garanties par la Constitution et les instruments internationaux pendant les procédures pénales, ainsi que l’efficacité de ces dernières. Le CPP dispose que les droits et libertés de la personne ne peuvent être restreints, à titre de mesure de précaution, que dans les cas et selon les modalités prévus par la loi. Il précise que le suspect, l’accusé ou toute autre personne concernée par la procédure ne pourront être soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, et garantit le traitement humain et la réhabilitation morale des détenus.

19.Le Code civil prévoit qu’une personne disparue de son dernier lieu de résidence connu et dont on est sans nouvelles depuis plus de deux ans peut être déclarée officiellement disparue par une décision de justice, et ce à la demande de toute personne concernée.

20.Le Code pénal militaire définit les infractions et les sanctions militaires ainsi que les mesures à prendre à l’encontre des auteurs. Les infractions militaires se divisent en deux catégories: les crimes et les délits. Elles sont différenciées en vertu des dispositions prévues dans les sections respectives du Code.

21.La loi no 8737 du 12 février 2001 relative à l’organisation et au fonctionnement du ministère public définit les modalités d’organisation et de fonctionnement du Parquet. La loi no 8677 du 11 février 2000 relative à l’organisation et au fonctionnement de la police judiciaire définit les modalités de fonctionnement de la police judiciaire ainsi que les actes de procédures que ses membres sont habilités à accomplir.

22.Le Code d’éthique de la police définit les principes et les normes régissant l’exécution des tâches prévues par la loi et exige que celle-ci soit appliquée de manière égale à tous les individus sans aucune distinction fondée sur leurs convictions politiques ou religieuses, leur race, leur statut social, leur nationalité, leur citoyenneté ou leur situation économique. Il interdit les actes de torture et tout autre traitement susceptible de porter atteinte à la dignité et à la personnalité. Aux termes de la loi no 108/2014 sur la police d’État, la mission de cette dernière est de maintenir l’ordre public et la sécurité et de veiller au respect de l’état de droit, conformément à la Constitution et aux instruments internationaux, tout en protégeant les droits de l’homme et les libertés fondamentales.

23.La législation albanaise relative au système pénitentiaire, à l’exécution des décisions de justice et au traitement des détenus fournit le cadre légal et réglementaire nécessaire au respect de leurs droits, afin d’éviter toute forme de torture ou de traitement inhumain ou dégradant. Le rôle de la loi sur l’exécution des décisions pénales est d’assurer l’application effective des décisions de justice et d’autres injonctions légales, et définit les modalités d’accomplissement des peines, à l’exception des peines d’emprisonnement, qui font l’objet d’une loi distincte. L’exécution d’une sentence judiciaire ne pourra restreindre les droits d’un individu que dans les conditions et pour la durée prévues dans la décision, et dans le respect de tous les droits juridiquement reconnus, sauf disposition contraire dans la loi.

24.La loi sur les droits et le traitement des détenus vise à protéger leurs droits, dans le respect des normes internationales. Depuis la modification de cette loi, en 2008, l’isolement des condamnés et des détenus en attente de jugement n’est plus mentionné. Les détenus doivent être traités sans aucune discrimination fondée sur le sexe, la race, l’appartenance ethnique, la langue, la religion, les convictions politiques, religieuses ou philosophiques, l’orientation ou l’identité sexuelle, le statut social et économique, le niveau d’instruction, la filiation, l’âge, la situation familiale ou matrimoniale, l’état de santé, le handicap, la nationalité, l’appartenance à un groupe quelconque, ou tout autre critère. La loi sur la police pénitentiaire dispose que celle-ci assure le maintien de l’ordre et la sécurité dans les établissements d’exécution des peines, conformément à la loi, dans le respect des droits et des libertés des détenus.

25.La loi no 244/2012 sur la santé mentale vise à protéger et à promouvoir la santé mentale, à garantir les droits des personnes atteintes de troubles psychiques et à améliorer leur qualité de vie. Elle dispose que ces personnes doivent être traitées de manière équitable, sans discrimination aucune, dans le respect de leur intégrité physique et de leur dignité, et ne pourront faire l’objet de torture, de peines ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants. L’exercice des droits des personnes atteintes de troubles psychiques ne peut être restreint que dans les cas prévus par la loi. Ces restrictions devront être proportionnelles à l’état de santé de la personne concernée et ne pourront en aucun cas porter atteinte au fondement de ses droits et libertés.

26.La loi no 108/2013 sur les étrangers régit l’entrée, le séjour et l’emploi des étrangers sur le territoire de la République d’Albanie, ainsi que leur sortie dudit territoire. Elle prévoit que tout étranger ayant purgé une peine infligée par une juridiction albanaise pour une infraction intentionnelle, pour laquelle le Code pénal prévoit une peine d’emprisonnement de deux ans minimum, fera l’objet de mesures d’éloignement. La loi no 121/2014 relative au droit d’asile en République d’Albanie définit les conditions et les procédures d’octroi et de retrait de l’asile, de la protection subsidiaire ou de la protection temporaire aux demandeurs d’asile, aux réfugiés et aux personnes bénéficiant de la protection subsidiaire. Elle énonce les principes et les conditions à respecter pour garantir le droit des étrangers et des apatrides à demander une protection internationale. Elle prévoit le principe du non-refoulement, notamment le cas dans lequel l’État a une raison valable de penser que le demandeur d’asile court un risque de disparition forcée.

B.Instruments internationaux relatifs à la disparition forcée

27.La République d’Albanie est partie à plusieurs conventions internationales relatives aux droits de l’homme conclues sous l’égide de l’ONU, ainsi qu’à un certain nombre d’autres instruments internationaux, ce qui témoigne de sa volonté d’honorer ses engagements internationaux dans le domaine des droits de l’homme. Les instruments internationaux auxquels la République d’Albanie est partie et qui contiennent des dispositions concernant directement ou indirectement la prévention des disparitions forcées sont les suivants:

•Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ratifiée par la loi no 8137 du 31 juillet 1996) (en particulier les dispositions qui concernent le droit à la vie, l’interdiction de la torture, le droit à la liberté et à la sûreté); et ses protocoles additionnels (protocoles no 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 11, 12, 13, 14). S’agissant de la peine de mort, l’Albanie a adopté, en date du 9 novembre 2006, la loi no 9639 intitulée «Ratification du Protocole no 13 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances»;

•Pacte international relatif aux droits civils et politiques:

•Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ratifié par la loi no 9725 du 7 mai 2007);

•Deuxième Protocole additionnel se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ratifié par la loi no 9726 du 5 juillet 2007).

•Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ratifiée par la loi no 7727 du 30 juin 1993):

•Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ratifié par la loi no 9094 du 3 juillet 2003), pour l’établissement du mécanisme national de prévention de la torture.

•Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (ratifiée par la loi no 8135 du 31 juillet 1996);

•Statut de Rome de la Cour pénale internationale (ratifié par la loi no 8984 du 23 décembre 2002);

•Convention européenne d’extradition (ratifiée par la loi no 8322 du 4 février 1998) et ses deux protocoles additionnels;

•Convention européenne sur la transmission des procédures répressives (ratifiée par la loi no 8497 du 10 juin 1999);

•Convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale (ratifiée par la loi no 8498 du 6 octobre 1999);

•Convention de Genève de 1949 et ses protocoles additionnels;

•Les autorités albanaises apportent leur entière collaboration au Comité européen pour la prévention de la torture (CPT). Le Comité a mené onze visites de suivi en Albanie.

C.La Convention dans l’ordre juridique interne

28.En Albanie, le droit international bénéficie d’un statut privilégié par rapport au droit interne; à ce titre, la Convention prime la législation nationale. L’obligation de respecter le droit international est inscrite dans la Constitution albanaise, dont l’article 122 dispose que tout accord international ratifié par le Parlement devient partie intégrante du droit interne après avoir été publié au Journal officiel. Ce même article précise que les dispositions du droit international sont directement applicables, sauf lorsque leur exécution nécessite la promulgation d’une loi. Les accords internationaux et les normes publiées par les organisations internationales, lorsqu’ils ont été ratifiés par le Parlement de la République d’Albanie, prévalent en cas de conflit avec les lois nationales.

29.En se fondant sur les règles et les principes relatifs à l’application de normes juridiques, on peut conclure que les justiciables ne peuvent requérir l’application des articles de la Convention que lorsque leur mise en œuvre est prévue par la législation en vigueur et ne nécessite pas l’établissement de mécanismes internes. Compte tenu des obligations découlant de la Convention, lorsque l’un de ses articles exige l’adoption de dispositions juridiques internes ou l’établissement de mécanismes nationaux de mise en œuvre, nous garantissons l’application de la qualification d’infraction de la disparition forcée. Conformément à l’article 122 de la Constitution, nous considérons que cette Convention fait partie intégrante de notre ordre juridique interne; toutefois, toutes ses dispositions ne sont pas exécutables telles quelles. Nous insistons dès lors sur la nécessité de recenser les dispositions de la Convention qui nécessitent une transposition en droit interne, et celles qui peuvent être appliquées par la simple adoption de mesures concrètes. Après un survol général de la législation en vigueur, on peut conclure que certaines dispositions de la Convention sont appliquées directement ou indirectement dans la législation nationale.

D.Cadre institutionnel (autorités judiciaires, institutions, mécanismes nationaux) de la protection et de la promotion des droits de l’homme

30.La Constitution albanaise consacre le principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire). Le pouvoir judiciaire est exercé par la Cour suprême, les cours d’appel et les tribunaux de première instance, établis par la loi. La Cour constitutionnelle garantit le respect de la Constitution et en donne l’interprétation finale. Elle joue également un rôle important dans la protection des droits de l’homme, car elle statue en dernier ressort dans les recours formés par des personnes physiques pour violation de leur droit constitutionnel à une procédure régulière lorsque tous les moyens de recours légaux ont été épuisés.

31.S’agissant de la protection des droits de l’homme et de l’application du droit interne, un cadre légal global a été adopté pour le système judiciaire. Les juridictions compétentes sont les suivantes: les tribunaux de district; les cours d’appel; la Cour suprême; la Cour constitutionnelle; le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves; le Tribunal militaire; et le Tribunal administratif. Les autorités judiciaires compétentes pour traiter les questions relatives au contenu de la Convention sont la Cour constitutionnelle, la Cour suprême, les tribunaux de district et le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves. Ce dernier connaît des affaires relevant du droit pénal, y compris les infractions de disparition forcée.

32.Le Code de procédure pénale dispose que les cours et tribunaux sont les organes chargés de rendre la justice. S’agissant du domaine pénal, il précise que les juridictions compétentes sont les tribunaux de première instance, les cours d’appel et la Cour suprême. Le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves est entré en fonction en 2004; son rôle est de lutter contre les crimes graves et le crime organisé, et de les juger avec impartialité et efficacité. Il exerce sa compétence territoriale sur l’ensemble du territoire albanais et est saisi d’un ensemble d’infractions que prévoit le Code pénal, y compris s’agissant de personnes relevant du Tribunal militaire. Le Tribunal militaire est compétente pour juger les soldats, les prisonniers de guerre et toute autre personne s’étant rendue coupable d’une infraction au regard du Code pénal militaire ou d’autres dispositions légales, à l’exception des cas relevant de la compétence du Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves et de la Cour suprême.

33.En vertu de la Constitution, le Parquet exerce les poursuites pénales et représente l’État devant les tribunaux. La loi sur l’organisation et le fonctionnement du ministère public dispose ce qui suit: le Parquet exerce les poursuites pénales et représente l’État devant les tribunaux; il garantit et supervise l’exécution des condamnations pénales et s’acquitte d’autres tâches prévues par la loi. Les magistrats du Parquet exercent leur action en accord avec la Constitution et la loi et dans les limites des pouvoirs qui leur sont conférés, en respectant les principes d’une procédure équitable et régulière et de la protection des droits, des intérêts et des libertés garantis par la loi. Le Parquet est une structure centralisée, dirigée par le Procureur général; il comprend également le Conseil des procureurs et les procureurs de la République.

34.La mission de la police d’État est de maintenir l’ordre et la sécurité publics et de garantir l’état de droit, en application de la Constitution et des traités internationaux, tout en protégeant les droits de l’homme et les libertés fondamentales. L’exécution de cette mission, en particulier à l’égard des personnes privées de liberté et de toute personne retenue dans les locaux de la police, est donc guidée, au quotidien, par la loi et le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Les fonctions de la police d’État sont les suivantes:

a)Protéger la vie des citoyens et assurer leur sécurité ainsi que celle de leurs biens;

b)Maintenir l’ordre et la sécurité publics;

c)Prévenir et détecter les infractions pénales et enquêter sur ces infractions et leurs auteurs, conformément à la législation et aux règles de procédure pénales;

d)Organiser des campagnes d’information et de sensibilisation en vue de prévenir les infractions et renforcer la collaboration avec le public;

e)Exercer ces fonctions dans le respect du droit interne.

35.Le Bureau du Médiateur est un organe constitutionnel indépendant chargé de protéger les droits, libertés et intérêts légitimes des personnes qui peuvent être bafouées par des actes illégaux ou irréguliers d’organes de l’administration publique, ou de tiers agissant pour leur compte, ou le défaut d’agir de ceux-ci. Au titre de la Convention contre la torture et de son Protocole facultatif, il exerce la fonction de Mécanisme national de prévention de la torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (MNPT). La loi sur les droits et le traitement des détenus prévoit que le MNPT surveille l’application de la législation en matière de droits de l’homme et exerce ses activités au sein de la structure du Bureau du Médiateur. Il soumet ses recommandations aux autorités compétentes aux fins de l’amélioration des conditions de vie et du traitement des détenus. Les modifications de la loi sur le Médiateur (loi no 155/2014) prévoient l’établissement du MNPT en tant que section distincte du Bureau du Médiateur. Le MNPT exerce ses fonctions en conformité avec la Constitution, les traités internationaux ratifiés et le droit interne.

36.Le Commissaire à la protection contre les discriminations (CPD) est une instance indépendante créée en vertu de la loi no 10221 du 4 février 2010 relative à la protection contre les discriminations. Cette loi reconnaît à chacun les droits suivants:

a)Égalité devant la loi et égale protection de la loi;

b)Égalité des chances, exercice et jouissance des droits et libertés, participation à la vie publique;

c)Protection efficace contre la discrimination et contre toute conduite encourageant la discrimination.

E.Informations utiles

37.À dater de l’entrée en vigueur de la Convention, aucun cas de disparition forcée n’a fait l’objet d’enquêtes ou de poursuites sur le territoire de la République d’Albanie.

38.Les cas de disparition forcée recensés dans le pays remontent à la période communiste: selon les données officielles, 5 157 personnes condamnées pour des motifs politiques ont été exécutées sans décision de justice entre le 30 novembre 1944 et le 1er octobre 1991. La loi sur l’indemnisation des ex-prisonniers politiques du régime communiste et plusieurs règlements administratifs prévoient l’indemnisation des personnes condamnées pour des motifs politiques appartenant aux catégories suivantes: condamnation à une peine d’emprisonnement; condamnation à mort par décision de justice; exécution extrajudiciaire; isolement dans les locaux de la police; hospitalisation dans une institution médicale; exil. Comme suite à cette loi, le Conseil des ministres a adopté une décision établissant les procédures administratives d’examen des plaintes et d’indemnisation financière des familles des victimes injustement exécutées sans procès, pour de motifs politiques, entre le 30 novembre 1944 et le 1er octobre 1991.

39.Les structures chargées des procédures administratives d’indemnisation de ces personnes dépendent du Ministère de la justice, du Ministère de la jeunesse et des affaires sociales et du Ministère des finances.

40.L’Institut pour l’intégration des victimes de persécutions politiques élabore et met en œuvre des programmes d’intégration à l’intention des personnes qui ont été persécutées par le régime communiste pour des motifs politiques. L’Institut de recherche sur les crimes communistes et leurs effets, une institution indépendante, a pour fonction de mettre au jour les persécutions politiques commises pendant la dictature en Albanie, entre 1944 et 1991. Sa mission est d’informer et de sensibiliser le public au sujet des violations des droits de l’homme perpétrées en Albanie sous le régime communiste. Par des études et des publications, il cherche à faire toute la lumière sur cet épisode de l’histoire dans le cadre de la réhabilitation morale des victimes.

41.Le Gouvernement albanais prendra toutes les mesures nécessaires à la création d’une section des personnes disparues au sein de l’Institut pour l’intégration des victimes de persécutions politiques, afin de tenter de retrouver les personnes disparues pendant la période communiste. Les objectifs de cette Section seront les suivants:

a)Recueillir les témoignages des survivants de la dictature communiste au sujet des exécutions, avec ou sans procès; des personnes décédées en prison; des personnes décédées dans les locaux de la police ou les hôpitaux psychiatriques; des personnes enlevées chez elles de force par la police, et ensuite disparues sans laisser de traces ou tuées sans avertissement; des personnes exécutées aux frontières alors qu’elles tentaient de fuir le pays puis abandonnées dans des fosses communes ou dans des endroits inconnus;

b)Créer une base de données sur les personnes disparues précisant, dans la mesure du possible, leurs nom, prénom, sexe, nationalité, date et lieu de naissance ainsi que l’année supposée et les circonstances de leur disparition;

c)Rassembler les informations nécessaires et organiser les procédures d’exhumation et de retour des personnes disparues, en étroite collaboration avec les institutions centrales et locales.

42.Après la chute du régime communiste, en 1991, il convient de mentionner le cas de Remzi Hoxha, qui est en cours d’examen par le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. Les autorités albanaises transmettent régulièrement au Groupe de travail toutes les informations demandées. Le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves et sa Cour d’appel ont également achevé l’examen du cas Remzi Hoxha en tant que partie lésée; ils ont déclaré l’accusé coupable de «torture avec circonstances aggravantes» ayant conduit à la mort de Remzi Hoxha. Le dossier est actuellement à l’étude à la Haute Cour de justice du pays.

43.Les autorités albanaises soulignent qu’à la suite de l’adoption du Rapport Dick Marty, rapporteur de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, elles ont collaboré sans réserve avec les enquêteurs d’EULEX chargés de faire la lumière sur les crimes qui auraient été commis sur le territoire albanais. Considérant de la plus haute importance que ces crimes présumés fassent l’objet d’une enquête approfondie et transparente, le Parlement albanais a adopté, en 2012, une loi sur les relations juridictionnelles en matière pénale avec la cellule spéciale d’enquête d’EULEX. En vertu de cette loi, les procureurs d’EULEX sont autorisés à enquêter sur le territoire albanais au sujet de la participation présumée de l’Albanie à un trafic d’organes humains organisé sur son territoire, et sont assurés de l’entière coopération des institutions compétentes. S’agissant de l’enquête distincte menée par les autorités albanaises à la demande de l’Assemblée, les responsables ont indiqué qu’à ce jour, leurs investigations n’avaient pas permis de confirmer les conclusions de M. Marty.

III.Informations relatives à l’application des articles de la Convention

Article 1erInterdiction absolue de la disparition forcée

44.La Constitution albanaise ne contient aucune disposition autorisant ou tolérant la disparition forcée. Conformément à l’article premier de la Convention, qui prévoit l’obligation pour les États parties d’inscrire dans leur législation l’interdiction absolue de la disparition forcée, le Code pénal albanais érige la disparition forcée en infraction pénale passible de sanctions proportionnelles à sa gravité. Considérant que la disparition forcée n’est en aucun cas justifiable, le Code prévoit des cas concrets de responsabilité du supérieur hiérarchique en cas de commission d’une telle infraction.

45.Conformément au paragraphe 2 de cet article, la Constitution dispose ce qui suit:

a)Les restrictions des droits et libertés prévus dans la Constitution doivent s’inscrire dans le cadre strict de la loi, et ne peuvent être appliquées que dans l’intérêt général ou pour protéger les droits d’autrui. Elles doivent être proportionnelles à la situation qui les justifie;

b)Ces restrictions ne peuvent en aucun cas porter atteinte aux droits et libertés de l’individu concerné ni dépasser les limites fixées par la Convention européenne des droits de l’homme. La Constitution interdit explicitement la torture et les traitements inhumains ou dégradants, ainsi que le travail forcé, si ce n’est en application d’une décision de justice, pour l’accomplissement du service militaire ou pour fournir un service commandé par la guerre, l’état d’urgence ou une catastrophe naturelle menaçant la vie ou la santé de la population. Des mesures extraordinaires peuvent être imposées en cas de guerre, d’état d’urgence ou de catastrophe naturelle et pour aussi longtemps que les circonstances l’exigent. Les principes de fonctionnement des organismes publics et l’ampleur des restrictions des droits et libertés autorisées dans ces situations appelant des mesures extraordinaires sont fixés par la loi, tout comme les principes touchant à l’indemnisation du préjudice subi par les personnes ayant été soumises à de telles restrictions pendant la période concernée, les domaines dans lesquels ils s’appliquent et les modalités de cette indemnisation. Les mesures extraordinaires prises dans ces situations doivent être proportionnelles au niveau de risque et avoir pour seul objectif de rétablir les conditions normales de fonctionnement de l’État dans les plus brefs délais. De même, la Convention dispose que ni les libertés fondamentales, ni les droits politiques, économiques et sociaux ne peuvent faire l’objet de restrictions en cas de guerre ou d’état d’urgence.

46.Outre qu’il incrimine la disparition forcée et la qualifie de crime contre l’humanité, le Code pénal dispose ce qui suit: «Les actes commis en temps de guerre tels que le meurtre, la maltraitance ou la déportation à des fins de travail servile, ainsi que toute autre forme d’exploitation inhumaine imposée à la population civile ou sur un territoire occupé, l’assassinat de prisonniers de guerre ou les mauvais traitements qui leur sont infligés, l’assassinat d’otages, la destruction de biens privés ou publics, la destruction de villes, de bourgs ou de villages, qui ne répondent pas à une nécessité militaire, sont punis d’une peine de prison d’au moins 15 ans ou de la prison à vie.»

47.Il n’existe en Albanie aucune loi visant à réglementer ou à justifier la violation des droits des personnes arrêtées ou détenues en temps de guerre ou de déstabilisation politique, et qui dès lors pourraient justifier ou autoriser la disparition forcée, l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté, de torture ou de traitement inhumain ou dégradant. Dans ces cas, les dispositions prévues par la législation en vigueur sont applicables. La loi sur la police d’État précise que «même en cas de guerre, d’état d’urgence ou de catastrophe naturelle, le statut de la police d’État ne change pas». La loi prévoit les mesures nécessaires au maintien de l’ordre public et de la sécurité. Elle définit les mesures précises que les officiers de police sont autorisés à prendre en vertu des responsabilités qui leur sont conférées par la loi.

48.S’agissant de la peine de mort, l’Albanie a adopté, en date du 9 novembre 2006, la loi no 9639 intitulée «Ratification du Protocole n° 13 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances». En vertu de la loi no 9722 du 30 avril 2007 portant modification de la loi no 8003 du 28 septembre 1995 relative au Code pénal militaire, la peine de mort, qui était auparavant prévue comme peine applicable aux militaires s’étant rendus coupables de crimes graves en tant de guerre, a été abolie.

Article 2Définition de la disparition forcée

49.Aux termes de l’article 109, alinéa c du Code pénal, on entend par «disparition forcée» l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la privant de l’aide dont elle a besoin et la soustrayant à la protection de la loi.

50.La définition de la disparition forcée figurant dans le Code pénal albanais est conforme à celle qu’en donne l’article 2 de la Convention. Elle suppose donc que les éléments suivants soient réunis:

a)Il y a arrestation, détention, enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté de la victime;

b)L’acte est commis par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État;

c)Il est suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue;

d)Il a pour résultat final ou objectif de soustraire la victime à la protection de la loi. S’agissant de cette dernière composante, il nous semble important de souligner qu’il est clairement considéré dans la définition de la disparition forcée comme résultant des trois premiers éléments tels que définis ci-dessus.

51.Nous insistons donc sur le fait que le refus d’assistance et le fait de soustraire la victime à la protection de la loi sont une conséquence ou un résultat objectifs des trois premiers éléments et non, en soi, un élément constitutif de cette infraction.

52.Nous soulignons également que la disparition forcée constitue, au regard du Code pénal, non seulement un crime contre la personne mais aussi un crime contre l’humanité lorsqu’il est perpétré à l’encontre d’un groupe de la population civile pour certains motifs. L’article 74 du Code est libellé comme suit: «Le meurtre, la disparition forcée, le massacre, la réduction en esclavage, la déportation ou le transfert forcé, ainsi que tout acte de torture et tout traitement inhumain commis en application d’un plan prémédité ou de manière systématique à l’encontre d’un groupe de civils pour des motifs d’ordre politique, idéologique, racial, ethnique ou religieux sont passibles d’une peine pouvant aller de 15 ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité.» Cette disposition est conforme au Statut de Rome de la Cour pénale internationale; la disparition forcée a été incluse dans la catégorie des crimes contre l’humanité peu après la ratification de cette Convention par l’Albanie. La définition de la disparition forcée en tant qu’infraction pénale par le Code pénal albanais et les dispositions y relatives reposent sur les articles 2, 3, 5, 6 et 7 de la Convention.

Article 3Enquête

53.S’agissant de l’article 3 de la Convention («Tout État partie prend les mesures appropriées pour enquêter sur les agissements définis à l’article 2, qui sont l’œuvre de personnes ou de groupes de personnes agissant sans l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, et pour traduire les responsables en justice»), notre législation pénale prévoit plusieurs infractions dont la définition est similaire à celle de la disparition forcée, sans le second élément; on peut par exemple citer l’enlèvement ou la prise d’otage et la privation illégale de liberté. Ces cas sont traités au titre d’autres dispositions du Code pénal.

54.Le Code pénal dispose ce qui suit:

a)Enlever une personne ou la retenir en otage aux fins d’en tirer un avantage financier ou autre, de préparer ou de faciliter un crime, d’aider les auteurs d’un crime et leurs complices à se cacher ou à s’enfuir, ou d’imposer des exigences ou des conditions pour des motifs politiques ou pour tout autre motif est passible d’une peine d’emprisonnement ou d’une amende;

b)Lorsque la victime est un mineur de moins de 14 ans, le crime est passible de sanctions plus lourdes;

c)L’enlèvement ou la prise d’otage d’une personne ou d’un mineur de moins de 14 ans, précédés ou accompagnés de tortures physiques ou psychologiques, lorsque ces actes sont commis à l’encontre de plusieurs personnes ou à plusieurs reprises, sont des crimes passibles d’une peine de 20 ans d’emprisonnement minimum (réclusion à perpétuité lorsque l’acte a entraîné la mort de la victime) et d’une amende allant de 5 à 10 millions de leks.

55.Le Code pénal prévoit également certaines circonstances atténuantes: lorsque la personne enlevée ou retenue en otage est volontairement libérée avant un délai de sept jours, sans que l’objet du crime n’ait été accompli et pour autant que la victime n’ait subi ni torture, ni aucun acte susceptible de porter atteinte à sa santé, la peine est ramenée à trois à cinq ans d’emprisonnement. La privation illégale de liberté constitue une infraction pénale passible d’une amende ou d’une peine de prison d’un an maximum. Lorsque cette infraction s’accompagne de mauvais traitements graves, infligés avec l’aide de complices à plusieurs personnes ou à plusieurs reprises, la peine sera de trois à sept ans de prison.

56.S’agissant des poursuites judiciaires, le Code pénal prévoit que pour les infractions commises par des citoyens albanais sur le territoire de la République d’Albanie, le droit pénal albanais est applicable. Les enquêtes sur les infractions définies dans le Code pénal sont régies par des dispositions spécifiques du Code de procédure pénale (informations relatives à l’enquête, conditions dans lesquelles les poursuites peuvent être menées, rôles respectifs de la police, de la police judiciaire, du procureur, etc.). Le CPP définit également les organes chargés de mener les enquêtes nécessaires, dans les limites de leurs pouvoirs respectifs, à savoir le Parquet et la police judiciaire. Les enquêtes sont placées sous la direction du procureur, et la police judiciaire travaille sous son autorité. S’agissant des enquêtes préliminaires, selon les cas prévus par la loi, le tribunal statue sur les demandes du procureur, de la partie lésée ou des parties civiles.

Article 4La disparition forcée définie comme une infraction

57.Au regard du droit pénal albanais, la disparition forcée, telle que définie à l’article 2 de la Convention, constitue une infraction à part entière, distincte d’autres infractions qui présentent certaines caractéristiques communes mais diffèrent de par leur nature (par exemple l’enlèvement d’un adulte ou d’un enfant, l’arrestation arbitraire, la privation illégale de liberté, les crimes contre la vie, etc., également prévus dans le Code pénal). L’article 109, alinéa c du Code pénal définit la disparition forcée et ses éléments constitutifs, conformément aux articles 2 et 4 de la Convention.

Article 5La disparition forcée définie comme un crime contre l’humanité

58.Conformément à l’article 5 de la Convention, selon lequel «la pratique généralisée ou systématique de la disparition forcée constitue un crime contre l’humanité, tel qu’il est défini dans le droit international applicable, et entraîne les conséquences prévues par ce droit», le Code pénal applique à la disparition forcée la qualification de crime contre l’humanité. L’article 74 du Code pénal albanais («Crimes contre l’humanité»), modifié par la loi no 144/2013, dispose que la disparition forcée commise en application d’un plan prémédité ou de manière systématique à l’encontre d’un groupe de civils est considérée comme un crime contre l’humanité, et non simplement comme une pratique systématique ou généralisée de disparition forcée. L’article est libellé comme suit: «Le meurtre, la disparition forcée, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation ou le transfert forcé, ainsi que tout acte de torture et tout traitement inhumain commis en application d’un plan prémédité ou de manière systématique à l’encontre d’un groupe de civils pour des motifs d’ordre politique, idéologique, racial, ethnique ou religieux sont passibles d’une peine pouvant aller de 15 ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité.» En vertu de l’article 75 du Code, «les actes commis par différentes personnes en temps de guerre, par exemple le meurtre, la maltraitance ou la déportation à des fins de travail servile, ainsi que toute autre exploitation inhumaine imposée à la population civile ou sur un territoire occupé, l’assassinat de prisonniers de guerre ou les mauvais traitements qui leur sont infligés, l’assassinat d’otages, la destruction de biens privés ou publics, la destruction de ville, de bourgs ou de villages, qui n’est pas imposée par les nécessités des opérations militaires, sont passibles d’une peine de prison qui ne peut être inférieure à 15 ans ou de la réclusion à perpétuité.»

59.Les infractions prévues aux articles 74 et 75 du Code pénal s’inscrivent dans la lignée de l’article 9 de la Constitution albanaise, aux termes duquel «nul ne peut être accusé ou reconnu coupable d’une infraction non reconnue par la loi au moment de sa commission, sauf dans le cas des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité reconnus comme tels par le droit international au moment des faits». Le Code pénal définit la pratique systématique et répandue de disparition forcée comme un crime contre l’humanité, érigeant ainsi la disparition forcée en crime contre l’humanité conformément au droit international applicable.

Article 6Régime de la responsabilité pénale

60.S’agissant de la responsabilité pénale de la disparition forcée, et en particulier la responsabilité du supérieur hiérarchique, le Code pénal dispose qu’est tenu pour pénalement responsable le supérieur qui:

a)Savait que des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle commettaient ou allaient commettre un crime de disparition forcée, ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement;

b)Exerçait sa responsabilité et son contrôle sur les activités auxquelles le crime de disparition forcée était lié; ou

c)N’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou réprimer la commission d’une disparition forcée ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites. Sur cette base, la législation albanaise définit les principes de la responsabilité pénale conformément au droit international applicable.

61.Le Code pénal contient également des dispositions relatives aux crimes et délits commis par l’État (ainsi que les sanctions correspondantes), à savoir «pour un représentant de l’État ou des services publics, commettre des actes ou donner des ordres arbitraires, dans le cadre de ses fonctions, de nature à porter atteinte à la liberté des citoyens, ou refuser de prendre des mesures visant à mettre un terme à une situation illicite». L’article 248 («Abus de pouvoir/Faute») précise quant à lui que «toute action ou omission intentionnelle, en violation de la loi, qui constitue un manquement aux obligations d’un représentant de l’État ou du service public, lorsque cette action ou omission a entraîné des conséquences graves pour les intérêts légitimes des citoyens ou de l’État, sont passibles d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à sept ans.» L’article 253 («Violation du principe d’égalité des citoyens») dispose que: «Tout acte de discrimination commis par un représentant de l’État ou du service public pour des motifs liés à l’origine, au sexe, à l’état de santé, aux opinions politiques ou philosophiques, à une activité syndicale, ou encore à l’appartenance à un groupe ethnique, à une nation, à une race ou à une religion, consistant à octroyer des privilèges indus ou à refuser un droit ou un avantage prévu par la loi, est passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans.»

62.L’article 50 du Code pénal définit des circonstances aggravantes, notamment lorsque l’acte constitue un abus de pouvoir. S’agissant de la co-culpabilité, le Code consacre un chapitre à la «complicité en vue de la commission d’une infraction», qu’il définit comme «un accord conclu entre deux ou plusieurs personnes en vue de commettre une infraction», ces personnes pouvant être les organisateurs, les exécutants, les instigateurs et les aides. Les «organisateurs» sont ceux qui organisent et gèrent les activités entrant dans le cadre de l’infraction; les «exécutants» sont ceux qui commettent directement ces actes; les «instigateurs» sont les personnes qui ont incité les autres à commettre l’infraction; et les «aides» sont celles qui ont aidé à commettre l’infraction en fournissant conseils ou matériel, en supprimant des obstacles, ou en promettant d’effacer la trace des auteurs ou de cacher des objets liés à l’infraction. Le texte définit la responsabilité des complices, organisateurs, instigateurs et aides, qui sont responsables de l’infraction commise au même titre que les exécutants. Il appartient au tribunal, afin de déterminer leur peine, d’évaluer le degré de participation de chacun et le rôle qu’ils ont joué dans l’infraction. Le Code de procédure pénale prévoit que la personne faisant l’objet d’une enquête ou accusée d’un crime grave commis avec des complices est tenue de coopérer avec les autorités judiciaires et de fournir sans réserve et sans conditions toutes les informations relatives aux faits, aux événements et aux circonstances qui constituent des éléments essentiels à l’enquête et au procès et sont indispensables pour détecter, réprimer et prévenir des crimes graves et réparer les dommages dont ils sont la cause. Les termes de cette coopération sont définis dans l’accord relatif à la protection, qui définit les dispositions légales régissant la protection des témoins et des collaborateurs de justice.

63.La loi sur la police d’État dispose qu’un officier de police sera tenu responsable, à titre individuel, de tout acte ou omission violant la loi commis dans l’exercice de ses fonctions. S’agissant de l’obligation d’obéir aux ordres, la loi prévoit ce qui suit:

a)Un fonctionnaire de police est tenu d’exécuter les ordres conformes à la loi qui lui sont donnés par une personne occupant une fonction ou un rang supérieurs;

b)Lorsque le fonctionnaire de police a des raisons sérieuses de penser que l’ordre qui lui a été donné n’est pas conforme à la loi, il doit sans délai en informer le supérieur et demander à ce que l’ordre lui soit transmis par écrit;

c)Si la non-exécution de cet ordre, en attendant l’ordre écrit, est susceptible de mettre en danger la vie d’une tierce personne, l’ordre devra être exécuté;

d)Lorsque, même après avoir appliqué la procédure définie dans le présent article, le fonctionnaire de police continue de penser que l’ordre qui lui a été donné n’est pas conforme à la loi, il doit:

i)Contester l’ordre en question, sauf dans le cas prévu au paragraphe 3 du présent article;

ii)En informer immédiatement l’officier de police dont dépend directement le supérieur qui a donné l’ordre, en précisant les mesures prises en application du présent article.

e)Les procédures relatives à la communication, à la transmission et au traitement de l’ordre sont définies dans le Règlement de la police.

64.La loi sur l’organisation et le fonctionnement du ministère public en République d’Albanie dispose que les ordres et les instructions du Parquet général sont transmis par écrit aux procureurs près les tribunaux de première instance. On peut ainsi éviter que des ordres verbaux arbitraires soient donnés par des représentants de l’État ou du service public. La loi sur la police pénitentiaire précise que les agents de la police pénitentiaire sont tenus d’exécuter les ordres de leurs supérieurs, chacun selon ses fonctions et son rang hiérarchique. Les ordres doivent être donnés en fonction du poste occupé et dans le respect de la loi et de la dignité de l’individu auquel ils s’adressent. L’agent de la police pénitentiaire est tenu d’exécuter tout ordre donné par un supérieur, sauf s’il estime, sur la base d’éléments probants, que cet ordre est contraire à la loi. Si l’agent a des raisons de penser que l’ordre qui lui a été donné est contraire à la loi, il doit immédiatement en avertir le supérieur et demander à ce que l’ordre lui soit transmis par écrit. En cas de manquement à la loi, seront tenus pour responsables l’agent qui a donné l’ordre et l’agent qui a exécuté l’ordre, si ce dernier n’a pas respecté les dispositions du présent article. Une procédure disciplinaire sera alors engagée à leur encontre.

Article 7Répression de la disparition forcée

65.L’article 109, alinéa c du Code pénal dispose que la disparition forcée constitue une infraction pénale à part entière et définit les peines applicables: «L’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la privant de l’aide dont elle a besoin et la soustrayant à la protection de la loi, constituent une infraction criminelle et sont passibles de peines d’emprisonnement allant de sept à quinze ans.» La peine maximale prévue pour l’infraction de disparition forcée est de quinze ans de prison.

66.Le Code pénal prévoit des sanctions à l’encontre du superviseur qui était au courant de la commission de l’infraction, et plus précisément le supérieur qui:

a)Savait que des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle commettaient ou allaient commettre un crime de disparition forcée, ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement;

b)Exerçait sa responsabilité et son contrôle sur les activités auxquelles le crime de disparition forcée était lié; ou

c)N’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher ou réprimer la commission d’une disparition forcée ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites. L’infraction de disparition forcée est généralement punie d’une peine d’emprisonnement de trois à sept ans. Lorsqu’elle a entraîné la mort de la victime, la peine est de trente années d’emprisonnement au minimum.

67.Conformément au paragraphe 2, alinéa b de l’article 7 de la Convention, l’article 109, alinéa c du Code pénal définit plusieurs circonstances aggravantes (infraction commise par le supérieur, mort de la victime, disparition d’une femme enceinte, soustraction d’enfants soumis à une disparition forcée, etc.): «Lorsque l’infraction de disparition forcée est commise à l’encontre de mineurs, de femmes enceintes ou de personnes qui, pour une raison quelconque, ne peuvent être protégées, ou lorsqu’elle s’accompagne de souffrances physiques graves, infligées avec l’aide de complices à plusieurs personnes ou à plusieurs reprises, elle est passible d’une peine allant de dix à vingt ans d’emprisonnement. La soustraction d’enfants soumis à une disparition forcée ou dont le père, la mère ou le représentant légal sont soumis à une disparition forcée, ou d’enfants nés pendant la captivité de leur mère soumise à une disparition forcée, constitue une infraction passible d’une peine allant de cinq à dix ans d’emprisonnement.»

68.En vertu de l’article 74 du Code pénal, la disparition forcée est considérée comme un crime contre l’humanité lorsqu’elle est commise en application d’un plan prémédité, ou de manière systématique à l’encontre d’un groupe de civils pour des motifs d’ordre politique, idéologique, racial, ethnique ou religieux; elle est alors passible d’une peine pouvant aller de quinze ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité.

69.L’article 50 du Code pénal définit les circonstances aggravant les peines infligées pour différents types d’infraction:

a)Lorsque l’infraction est commise pour des motifs gratuits;

b)Lorsque l’infraction est commise en vue de faire accuser ou de dissimuler la responsabilité pénale d’une tierce personne, d’éviter une condamnation pour une autre infraction, ou d’en tirer un avantage financier ou autre, pour soi-même ou pour autrui;

c)Lorsque l’infraction s’accompagne de cruauté;

d)Lorsque l’auteur de l’infraction a déjà été condamné;

e)Lorsque des actes aggravant les conséquences de l’infraction sont commis;

f)Lorsque l’infraction constitue un abus de pouvoir ou d’autorité religieuse;

g)Lorsque l’infraction est commise à l’encontre de mineurs, de femmes enceintes ou de personnes qui, pour une raison quelconque, ne peuvent se protéger;

h)Lorsque l’infraction est commise après la délivrance par un juge d’une ordonnance de protection pour violences conjugales;

i)Lorsque l’infraction est commise à l’encontre de représentants d’autres États;

j)Lorsque l’infraction constitue un abus en raison de liens familiaux, d’amitié ou d’hospitalité;

k)Lorsque l’auteur de l’infraction a bénéficié de complicités;

l)Lorsque l’infraction constitue une récidive;

m)Lorsque l’infraction a été commise à l’aide d’armes ou de munitions militaires, ou de substances explosives, caustiques, toxiques ou radioactives;

n)Lorsque l’infraction a été motivée par des raisons liées au sexe, à la race, à la couleur de peau, à la langue, à l’identité ou à l’orientation sexuelle, à des convictions politiques, religieuses ou philosophiques, à la situation économique ou sociale, au niveau d’instruction, à la filiation, à la responsabilité parentale, à la situation familiale ou matrimoniale, à l’état civil, à la résidence, à l’état de santé, à des prédispositions génétiques, au handicap ou encore à l’affiliation à un groupe.

70.Le Code pénal prévoit également des circonstances atténuantes, notamment lorsque l’infraction est commise sous l’influence ou sur instruction d’un supérieur, ou encore:

a)Lorsque l’infraction est motivée par des valeurs morales ou sociales positives;

b)Lorsque l’infraction est commise dans un état de détresse psychique causé par une provocation ou par un comportement injuste de la victime ou d’une autre personne;

c)Lorsque l’infraction est commise sous l’influence ou sur instruction d’un supérieur;

d)Lorsque l’auteur de l’infraction manifeste un profond repentir;

e)Lorsque l’auteur de l’infraction a réparé les dommages causés ou a activement contribué à en atténuer les conséquences;

f)Lorsque l’auteur de l’infraction se rend aux autorités compétentes après avoir commis l’infraction;

g)Lorsque les relations entre l’auteur et la victime de l’infraction se sont améliorées et sont revenues à la normale. Cette liste n’est pas exhaustive, et le tribunal peut estimer que d’autres circonstances justifient un allègement de la peine.

Article 8Régime de prescription de la disparition forcée

71.L’article 66 du Code pénal définit le régime de prescription de l’action pénale. Aucune poursuite pénale ne sera engagée si, depuis que l’infraction a été commise, se sont écoulés:

a)Vingt ans pour les crimes passibles de peines d’emprisonnement de dix ans au minimum;

b)Dix ans pour les infractions passibles de peines d’emprisonnement allant de cinq à dix ans;

c)Cinq ans pour les infractions passibles de peines d’emprisonnement de cinq ans maximum ou d’amendes;

d)Trois ans pour les contraventions pénales passibles de peines de prison de deux ans maximum;

e)Deux ans pour les contraventions pénales passibles d’amendes.

72.Sur la base des articles 66 et 109, alinéa c, du Code pénal, on peut donc conclure que le délai de prescription de la disparition forcée, telle que définie à l’article 109, alinéa c, se situe entre dix et vingt ans.

73.En vertu de l’article 67 du Code pénal, «aucun délai de prescription ne s’applique pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité.» Ainsi, lorsque la disparition forcée est considérée comme un crime contre l’humanité (selon les conditions définies à l’article 74 du Code pénal), aucun régime de prescription n’est applicable.

Article 9Compétence

74.Aux termes de l’article 5 du Code pénal, la législation pénale est applicable sur l’ensemble du territoire de la République d’Albanie, lequel est défini comme suit: au regard du droit pénal, le territoire de la République d’Albanie comprend l’espace terrestre situé entre les frontières du pays; les eaux intérieures et la mer territoriale; l’espace aérien s’étendant au-dessus de l’espace terrestre, des eaux intérieures et de la mer territoriale; tous les espaces placés sous la souveraineté de l’État albanais, tels que les lieux d’implantation des missions diplomatiques et consulaires albanaises, les bateaux battant pavillon albanais, les navires appartenant à la marine albanaise, ainsi que les avions civils et militaires où qu’ils se situent dans le monde. L’article 6 du Code pénal définit la législation applicable aux infractions commises par des citoyens albanais; la législation pénale de la République d’Albanie s’applique à toute infraction commise par un citoyen albanais sur le territoire de la République d’Albanie. Elle s’applique également à toute infraction commise par un citoyen albanais sur le territoire d’un autre pays, lorsque cette infraction est punissable dans les deux pays, à moins qu’un verdict définitif ait déjà été rendu par un tribunal étranger. Cette règle ne s’applique pas sur le territoire d’un autre état en cas d’infraction de corruption dans les secteurs public ou privé, ou de trafic d’influence. Aux fins de cet article, sont également considérées comme citoyens albanais les personnes possédant une seconde nationalité. La disparition forcée étant définie comme une infraction pénale, le Code pénal détermine les juridictions compétentes pour juger les personnes qui en sont accusées, quels que soient le territoire sur lequel l’infraction a été commise et la nationalité de l’auteur de l’infraction. L’article 9 de la Convention est dès lors pleinement applicable, puisque la disparition forcée est définie comme une infraction pénale.

75.La législation pénale albanaise s’applique également aux citoyens étrangers qui commettent une infraction sur le territoire de la République d’Albanie ou qui, en dehors de ce territoire, se rendent coupable de l’un des crimes suivants à l’encontre des intérêts de l’État albanais ou d’un citoyen albanais:

a)Crime contre l’humanité;

b)Crime contre l’indépendance et l’ordre constitutionnel de l’Albanie;

c)Crime à visée terroriste;

d)Prostitution organisée, traite des êtres humains, des enfants et des femmes, fabrication illicite et trafic d’armes, de drogues et d’autres substances narcotiques ou psychotropes, de substances nucléaires et de matériel pornographique, et trafic d’œuvres d’art et d’objets dotés d’une valeur historique, culturelle ou archéologique;

e)Crime contre la vie ou la santé de ressortissants albanais passible d’une peine égale ou supérieure à cinq ans d’emprisonnement;

f)Blanchiment des produits d’une infraction ou d’une activité criminelle;

g)Corruption dans le secteur public ou le secteur privé, et opérations d’initiés;

h)Infractions pénales dans le domaine des technologies de l’information.

76.En vertu du paragraphe a de l’article 7 («Compétence universelle»), la législation pénale de la République d’Albanie est également applicable aux citoyens étrangers qui se trouvent sur le territoire albanais et ne font pas l’objet d’une procédure d’extradition, et ont commis l’un des crimes suivants:

a)Crime contre l’humanité;

b)Crime de guerre;

c)Génocide;

d)Crime à visée terroriste; financement du terrorisme;

e)Torture.

77.La législation pénale albanaise s’applique en outre aux citoyens étrangers qui se rendent coupables, en dehors du territoire de la République d’Albanie, de l’une des infractions pour lesquelles les accords internationaux auxquels l’Albanie est partie prévoient l’applicabilité de la législation albanaise. Dans ce contexte, un citoyen étranger qui aurait commis une infraction de disparition forcée en dehors de l’Albanie devra être extradé ou jugé en Albanie. Cette disposition relative à l’applicabilité de la législation pénale permet que le jugement soit rendu en Albanie. L’article 8 du Code pénal définit la législation applicable pour les infractions commises par les apatrides: si un apatride commet une infraction pénale sur le territoire albanais ou un crime en dehors du territoire albanais, les dispositions des articles 7 et 7a s’appliquent.

78.Les dispositions du Code pénal sont également applicables aux infractions commises à l’encontre de personnes jouissant d’une protection internationale. Sauf exception prévue par les traités internationaux auxquels l’Albanie est partie, l’expression «personne jouissant d’une protection internationale» s’entend:

a)De tout chef d’État, y compris chaque membre d’un organe collégial remplissant en vertu de la Constitution de l’État considéré les fonctions de chef d’État; de tout chef de gouvernement ou de tout ministre des affaires étrangères, lorsqu’une telle personne se trouve dans un État étranger, ainsi que des membres de sa famille qui l’accompagnent;

b)De tout représentant, fonctionnaire ou personnalité officielle d’un État et de tout fonctionnaire, personnalité officielle ou autre agent d’une organisation intergouvernementale, qui, à la date et au lieu où une infraction est commise contre sa personne, ses locaux officiels, son domicile privé ou ses moyens de transport, a droit conformément au droit international à une protection spéciale contre toute atteinte à sa personne, sa liberté ou sa dignité, ainsi que des membres de sa famille qui font partie de son ménage. Néanmoins, les personnes précitées ne bénéficieront pas de l’immunité si elles se rendent coupables d’une infraction de disparition forcée.

Article 10Mesures de précaution

79.En vertu de l’article 27 de la Constitution, la liberté d’une personne ne peut être restreinte que selon les modalités et dans les cas prévus par la loi, à savoir lorsqu’il y a des raisons sérieuses de penser que cette personne a commis une infraction pénale, pour l’empêcher de commettre une telle infraction ou pour éviter qu’elle ne prenne la fuite après l’avoir commise. La législation albanaise prévoit alors, entre autres, des mesures de privation ou de restriction de liberté. Toute personne privée de liberté a le droit d’être avisée sans délai, dans une langue qu’elle comprend, des motifs qui sous-tendent cette mesure, ainsi que de son droit de garder le silence, de prendre contact avec un avocat et d’exercer ses droits. Toute personne privée de liberté en vertu de l’article 27 a droit à un traitement humain et au respect de sa dignité. La personne privée de liberté «lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser que cette personne a commis une infraction pénale, pour l’empêcher de commettre une telle infraction ou pour éviter qu’elle ne prenne la fuite après l’avoir commise», doit être présentée au juge dans les 48 heures, à charge pour celui-ci de décider, dans les 48 heures qui suivent le moment où il a reçu le dossier, si elle doit être maintenue en détention ou libérée. Si elle est maintenue en détention, elle a le droit de faire appel de la décision et d’être jugée dans un délai raisonnable, ou d’être libérée conformément à la loi. La personne privée de liberté extrajudiciairement a le droit de saisir le juge à tout moment afin qu’il statue dans les 48 heures sur la légalité de cette mesure. Toute personne qui a été privée de liberté en vertu de l’article 27 de la Constitution a droit à un traitement humain et au respect de sa dignité (art. 28). Aux termes de l’article 28, toute personne privée de liberté a le droit d’être avisée sans délai, dans une langue qu’elle comprend, des motifs qui sous-tendent cette mesure. Elle doit également être informée de son droit de garder le silence, de prendre contact immédiatement avec un avocat, et d’exercer ses droits.

80.En vertu de la législation relative aux procédures pénales, qui définit les modalités de détention et de traitement de tous les détenus et personnes privées de liberté, ces procédures sont également applicables aux personnes accusées d’avoir commis une infraction de disparition forcée durant la période qui précède l’ouverture de leur procès ou leur extradition. En vertu du Code de procédure pénale, lorsqu’une personne est arrêtée ou placée en détention, le Parquet du pays dans lequel l’arrestation ou le placement en détention ont eu lieu en est immédiatement avisé. La personne en question doit être informée de son droit de garder le silence; dès le moment de son arrestation ou de son placement en détention, elle a le droit d’être informée des motifs de cette mesure, des faits qui lui sont reprochés, de son droit de prendre contact avec un avocat ou de bénéficier d’un avocat commis d’office au cas où elle n’aurait pas les moyens d’assumer les frais de sa défense, et de son droit d’informer sa famille.

81.Afin de garantir un traitement équitable de tous pendant le procès, le Code de procédure pénale précise que «toute personne ne parlant pas l’albanais sera interrogé dans sa langue maternelle, et le procès-verbal d’audition sera traduit dans cette langue, ainsi les actes de procédure si elle en fait la demande. Tout manquement à cette règle aura pour effet d’invalider les documents». Le Code de procédure pénale dispose également que si une personne qui n’a pas encore été inculpée (suspect) fait une déposition susceptible de l’incriminer (auto-incrimination), l’autorité judiciaire interrompt l’interrogatoire, avertit le suspect du fait qu’au terme de sa déclaration, une enquête pourra être ouverte à son encontre et lui propose de choisir un avocat. Les déclarations faites par le suspect avant cet avertissement ne pourront être utilisées contre lui.

82.Le paragraphe 1 de l’article 38 du CPP dispose ce qui suit:

a)Le suspect, même placé en détention préventive ou privé de liberté pour une quelconque raison, sera interrogé sans entrave physique, sauf s’il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite;

b)Aucune méthode ni technique visant à influencer le libre arbitre ou à modifier les capacités mémorielles ou le jugement du suspect ne peut être utilisée sans son consentement exprès;

c)Avant le début de l’interrogatoire, le suspect est informé de son droit de garder le silence, et du fait que s’il garde le silence la procédure se poursuivra néanmoins.

83.L’article 39 dispose ce qui suit:

a)La personne qui mène l’interrogatoire informe le suspect, de manière claire et précise, des faits qui lui sont reprochés, des preuves qui existent contre lui et, à moins que cela nuise à l’enquête, de ses sources;

b)Elle lui demande de fournir toutes les explications utiles à sa défense et lui pose des questions directes;

c)Si le suspect refuse de répondre aux questions, son refus est consigné dans le procès-verbal de l’interrogatoire; le cas échéant, les caractéristiques physiques et signes distinctifs du suspect y sont également renseignés.

84.Le Code de procédure pénale contient des dispositions relatives aux critères et conditions d’imposition de mesures de sécurité (restriction ou privation de liberté). Nul ne peut faire l’objet de mesures de sécurité s’il n’existe pas à son encontre de soupçon raisonnable, fondé sur des indices probants. En cas de restriction de liberté, les mesures de sécurité ne peuvent être prises que dans les cas et selon les modalités prévus par la loi, notamment lorsque:

a)La collecte ou la véracité des preuves est menacée;

b)Le suspect s’est échappé ou risque de le faire;

c)Du fait de sa personnalité ou en raison de certaines circonstances, le suspect risque de commettre un crime grave ou une infraction du même type que celle dont il est soupçonné.

85.Lorsqu’il statue sur les mesures de sécurité à prendre, le tribunal devra en évaluer la pertinence en fonction du degré de précaution nécessaire dans chaque cas concret. Toute mesure doit être proportionnelle à la gravité des faits et à la peine prévue pour l’infraction en question. Le suspect ne peut être placé en détention préventive que si toutes les autres mesures sont insuffisantes au vu du danger que représentent l’infraction ou le suspect. Les mesures de restriction de liberté peuvent être les suivantes:

a)Interdiction de quitter le pays;

b)Obligation de se présenter à la police judiciaire;

c)Interdiction ou obligation de résidence dans un lieu donné;

d)Caution;

e)Assignation à résidence;

f)Détention préventive;

g)Internement temporaire dans un établissement psychiatrique.

86.Ces mesures de précaution sont prises à la demande du procureur, qui expose au tribunal compétent les motifs de sa requête. Au cas où le tribunal se déclarerait incompétent, si les conditions et l’urgence le justifient, il pourra néanmoins ordonner l’application des mesures demandées avant de renvoyer le dossier au tribunal compétent. Le tribunal ne peut imposer une mesure de sécurité plus sévère que celle requise par le procureur. L’officier de police chargé de l’exécution du mandat d’arrêt est responsable de l’application des mesures de sécurité imposées par le tribunal; en cas de doute quant à la fiabilité de la décision ou à l’identité de la personne visée par la mesure, l’agent ou officier de la police judiciaire responsable s’abstient de la faire appliquer. Les décisions concernant les autres mesures de précaution sont signifiées au suspect par le tribunal. La personne placée en détention ou assignée à résidence sera interrogée au plus tard trois jours après exécution de la décision.

87.Le Code de procédure pénale contient également des dispositions relatives au flagrant délit. Il est interdit d’arrêter une personne ou de la placer en détention lorsqu’il apparaît que l’acte commis l’a été en vue de l’accomplissement d’un devoir ou dans l’exercice d’un droit légitimes, ou lorsqu’il existe des raisons de la disculper. Le procureur interroge la personne arrêtée ou détenue en présence d’un avocat choisi par elle ou commis d’office. Il l’informe des faits qui lui sont reprochés et des raisons de son interrogatoire. Lorsqu’il est clairement établi que l’arrestation ou la détention résultent d’une erreur ou d’une irrégularité, la personne est immédiatement remise en liberté. Lorsque l’ordre d’arrestation ou de mise en détention devient caduc en raison du non-respect du délai dans lequel la demande d’évaluation de cet ordre devait être introduite, le procureur ordonne, par décision motivée, la libération immédiate de l’intéressé. Dans ce cas, la libération est également ordonnée par l’officier de police judiciaire compétent, qui informe sans délai le procureur du lieu où cette personne a été arrêtée ou est détenue. L’ordre d’arrestation ou de détention doit être évalué par le procureur dans les 48 heures qui suivent l’arrestation ou la mise en détention; en cas de dépassement de ce délai, l’ordre d’arrestation ou de mise en détention devient nul et non avenu. Les mesures coercitives ou restrictives sont immédiatement levées lorsqu’il est prouvé qu’elles ont été appliquées pour des motifs et selon des critères insuffisants. Le Code définit également les conditions dans lesquelles les mesures de précaution doivent être levées. Lorsque l’ordre de détention est annulé, le tribunal ordonne la remise en liberté immédiate de l’intéressé. Le Code fixe la durée de la détention, les possibilités de prolongement, la suspension des délais et la durée maximale des autres mesures de sécurité (art. 263 à 267).

88.Le Code de procédure pénale dispose que lorsqu’un ordre de détention est délivré, la police judiciaire assure le transfèrement de l’intéressé vers l’établissement pénitentiaire, où il restera à la disposition de la justice. Le Code définit la durée de la détention; celle-ci est annulée si les délais fixés par le Code ont été dépassés sans que des preuves soient soumises à la juridiction compétente.

89.La loi sur la police d’État dispose qu’une personne peut faire l’objet d’une garde à vue:

a)Lorsqu’elle a été condamnée à une peine d’emprisonnement par un tribunal compétent;

b)Lorsqu’elle n’a pas respecté une mesure imposée par le tribunal ou une obligation imposée par la loi;

c)Lorsqu’il existe un motif valable de penser qu’elle s’est rendue coupable d’une infraction;

d)Pour empêcher la commission d’une infraction;

d)Lorsqu’elle s’est échappée après avoir commis une infraction;

e)En vue de son identification dans le cadre d’une enquête, dans les conditions fixées par le Code de procédure pénale;

f)En cas de franchissement illégal d’une frontière, d’expulsion ou d’extradition.

90.La personne gardée à vue n’est pas traitée de la même manière que la personne arrêtée ou détenue; elle ne reste dans les locaux de la police que jusqu’à ce que l’affaire soit élucidée, et dans tous les cas pas plus de dix heures. Les autres dispositions relatives aux gardes à vue pour franchissement illégal des frontières, à l’éloignement, aux procédures d’extradition et aux délais sont définies dans le droit interne. La personne gardée à vue jouit des droits reconnus par la Constitution et la législation nationale.

91.Elle a dès lors le droit d’être informée, dans une langue qu’elle comprend, des raisons de sa garde à vue, de son droit à garder le silence et de son droit à prendre contact avec un avocat ou avec une autre personne. L’arrestation et la détention sont effectuées par un officier de police, conformément aux dispositions du Code de procédure pénale (art. 109 et 111).

92.Afin de respecter et de garantir les droits des personnes arrêtées ou détenues lorsqu’elles se trouvent dans les locaux de la police, les instruments suivants ont été adoptés:

a)Les «Directives générales concernant l’arrestation et la détention, le contrôle physique et le traitement des personnes arrêtées ou détenues»;

b)Un manuel intitulé «Règles relatives au traitement et à la sécurité des détenus et des personnes arrêtées lorsqu’elles se trouvent dans les locaux de la police», qui définit les règles et procédures applicables pour le traitement de ces personnes, leurs droits (notamment en matière de santé), ainsi que les obligations des fonctionnaires de police en matière de droits de l’homme et les normes relatives aux infrastructures.

c)Une Déclaration relative à l’obligation d’informer de leurs droits les personnes arrêtées ou détenues dans les locaux de la police;

d)Des Directives relatives à l’ordre et à la sécurité publics et des «Directives relatives au traitement des personnes arrêtées ou détenues, à la confiscation et à la saisie de leurs biens»;

e)Un Registre destiné à l’enregistrement et au traitement des plaintes et des requêtes des personnes arrêtées ou détenues dans les locaux de la police;

f)Un Code de procédure pour l’enregistrement et le traitement des plaintes et des requêtes des personnes arrêtées ou détenues dans les locaux de la police;

g)Une base de données pour l’enregistrement et la gestion des données relatives aux personnes arrêtées ou détenues;

h)Des «Directives pour un exercice des fonctions et des responsabilités conforme à la législation nationale dans le cadre de la garde à vue», et des «Directives générales pour le respect des droits des personnes privées de liberté».

93.Le Code de procédure pénale contient des dispositions relatives aux relations juridictionnelles avec les pays étrangers, qui traitent de l’extradition (demandes d’extradition adressées au Ministre de la justice, conditions d’extradition, rejet d’une demande). Lorsqu’une demande d’extradition est adressée au Ministre de la justice, si celui-ci ne la rejette pas, il la transmet, accompagnée des pièces justificatives, au procureur compétent. Lorsqu’il reçoit la demande, le procureur convoque la personne concernée en vue de l’identifier et de recueillir son consentement, et l’informe qu’elle a le droit d’être assistée par un avocat. Dans les trois mois qui suivent la date à laquelle la demande d’extradition a été introduite, le procureur soumet la demande au tribunal pour examen.

94.Sur requête du Ministre de la justice, transmise par le procureur, des mesures de coercition peuvent être prises à l’encontre de la personne pour laquelle l’extradition a été demandée. Ces mesures sont définies en vertu des dispositions du Code et visent à empêcher la personne en question de s’enfuir. Elles ne sont pas imposées lorsqu’il y a des raisons de penser que rien ne justifie l’extradition. Elles sont levées lorsque, dans les trois mois à dater de leur prise d’effet, les procédures devant le tribunal ne sont pas achevées. S’il est nécessaire de procéder à des vérifications particulièrement complexes, ce délai peut être prolongé à la demande du procureur, mais d’un mois maximum. Le tribunal est chargé d’imposer les mesures de sécurité. Il peut imposer des mesures temporaires de coercition avant la demande d’extradition, dans les conditions suivantes:

a)L’état étranger a déclaré que la personne concernée a fait l’objet de mesures restreignant sa liberté ou d’une peine de prison et qu’une demande d’extradition va être introduite;

b)L’État étranger a fourni des informations relatives à l’infraction et suffisamment d’éléments pour identifier la personne concernée;

c)La personne concernée risque de prendre la fuite. En vertu du Code, le procureur, la personne concernée et son avocat peuvent faire appel de la décision de lui appliquer des mesures de coercition devant la Cour d’appel.

95.En cas d’urgence, la police judiciaire peut arrêter la personne pour laquelle la détention provisoire a été demandée. Le Code de procédure pénale définit les règles et procédures qui doivent être suivies par les autorités compétentes (police judiciaire, procureurs, tribunaux, Ministre de la justice) dans ce cas. Dans un délai de 48 heures, le procureur présente l’intéressé devant la juridiction du territoire sur lequel l’arrestation s’est produite et fournit les documents requis. Après examen des documents, le juge statue sur la mise en détention ou la libération.

96.S’agissant de l’exécution des mesures restrictives, dès que possible et au plus tard cinq jours après l’exécution de la mesure ou son évaluation, le tribunal vérifie l’identité de l’intéressé et recueille son éventuel consentement pour l’extradition. Il l’avise de son droit de contacter un avocat ou de bénéficier des services d’un avocat commis d’office. L’avocat devra être informé 24 heures à l’avance des mesures précitées, et a le droit de participer à la procédure. Le tribunal examine la demande d’extradition en présence du procureur, de la personne intéressée, de l’avocat et des éventuels représentants de l’État requérant.

97.La procédure de notification des États tiers est régie par la législation relative aux procédures pénales et par la loi sur les relations juridictionnelles avec les autorités étrangères en matière pénale. Celles-ci précisent qu’une personne faisant l’objet d’une enquête, accusée ou inculpée sera remise à un État étranger selon les règles prévues par la législation albanaise et les accords internationaux auxquels l’Albanie est partie.

Article 11Obligation de poursuivre ou d’extrader

98.La législation et le Code de procédure pénale albanais définissent les compétences et les pouvoirs en matière de poursuite des infractions pénales, y compris la disparition forcée. La compétence pénale s’exerce selon les règles définies par ce Code (art. 69). Le Tribunal pénal examine tous les éléments nécessaires à sa décision, et statue selon les règles prévues par la loi. L’incompétence d’une juridiction peut être soulevée au principal, et à toutes les étapes de la procédure. Dans ce cas, le tribunal statue sur sa compétence et, le cas échéant, renvoie les parties devant la juridiction compétente. Lorsque l’incompétence est soulevée pendant l’enquête préliminaire, le procureur transmet les pièces de l’enquête à la juridiction compétente. Le Code de procédure pénale dispose que les tribunaux de districts connaissent des infractions criminelles autres que celles qui relèvent de la compétence du Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves, du Tribunal militaire et de la Cour suprême (art. 74). Le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves connaît d’une série de crimes définis dans ce Code, notamment les crimes contre l’humanité, l’enlèvement, la prise d’otage et la privation illégale de liberté. Le Tribunal militaire est compétent pour juger les militaires, les prisonniers de guerre et toute autre personne s’étant rendue coupable d’une infraction prévue par le Code pénal militaire ou d’autres dispositions légales, à l’exception des cas relevant de la compétence du Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves et de la Cour suprême.

99.La Constitution et la législation albanaises garantissent l’égalité devant la loi, la présomption d’innocence, le droit à être défendu par un avocat, une procédure équitable à tous les stades de la procédure, à savoir l’enquête, la collecte des éléments de preuve, l’engagement de la procédure et le procès, ainsi que le respect des droits et des libertés fondamentales de l’accusé. En vertu de la Constitution, «Toute personne a droit, pour protéger ses droits, libertés et intérêts juridiques et constitutionnels ou en cas d’accusation dirigée contre elle, à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi».

100.Aux termes de la Constitution, «nul ne peut être privé de liberté sauf dans les cas et selon les procédures prévus par la loi». La liberté d’une personne ne peut donc être restreinte, sauf dans les cas suivants:

a)Lorsqu’elle a été condamnée à une peine d’emprisonnement par un tribunal compétent;

b)Lorsqu’elle n’a pas obéi à une injonction du tribunal ou ne s’est pas acquittée d’une obligation prévue par la loi;

c)Lorsqu’il existe un motif valable de penser qu’elle s’est rendue coupable d’une infraction, pour l’empêcher de commettre une infraction ou pour éviter qu’elle ne prenne la fuite après avoir commis l’infraction;

d)Pour la supervision d’un mineur à des fins d’éducation, ou pour le confier à un organisme compétent;

e)Lorsque la personne est porteuse d’une maladie contagieuse, mentalement inapte ou qu’elle représente un danger pour la société;

f)En cas de franchissement illégal d’une frontière, d’expulsion ou d’extradition. Nul ne peut être privé de liberté au simple motif qu’il n’est pas en mesure de s’acquitter d’une obligation contractuelle.

101.Aux termes de la Constitution albanaise, «nul ne peut être accusé ou reconnu coupable d’une infraction non prévue par la loi au moment de sa commission, sauf dans le cas des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité reconnus comme tels par le droit international au moment des faits». Toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie par une décision de justice définitive. Au cours d’un procès, toute personne a le droit:

a)D’être informée des chefs d’accusation portés contre elle, de ses droits et de la possibilité de prévenir sa famille ou ses proches;

b)De disposer du temps et des moyens nécessaires à la préparation de sa défense;

c)De bénéficier gratuitement des services d’un interprète s’il ne parle ou ne comprend pas l’albanais;

d)De se défendre, seul ou avec l’aide d’un avocat de son choix;

e)De communiquer avec son avocat librement et en privé, et de bénéficier des services d’un avocat commis d’office s’il n’a pas les moyens d’assumer les frais de sa défense;

f)De poser des questions aux témoins présents et de demander la présence de témoins, d’experts ou de toute autre personne susceptible d’éclairer les faits. La Constitution dispose que «nul ne peut être contraint à témoigner contre lui-même ou contre sa famille, ni à avouer sa culpabilité. Nul ne peut être déclaré coupable sur la base de preuves obtenues de manière illicite» (art. 29 à 32).

102.La législation pénale albanaise vise à garantir des procédures équitables et conformes à la loi afin de protéger les libertés, les droits et les intérêts légitimes des citoyens. Des dispositions de procédure régissent la conduite des poursuites, des enquêtes et des procès en cas d’infraction pénale, ainsi que l’exécution des décisions de justice. Ces règles sont contraignantes pour tout ce qui touche aux procédures pénales, aux organes de l’État, aux entités juridiques et aux citoyens.

103.Les articles 4 et 5 du Code de procédure pénale disposent que toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie par une décision de justice. Le doute profite à l’accusé. La liberté d’une personne ne peut être restreinte par un ordre de mise en détention provisoire que dans les cas prévus par la loi. Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitement dégradants. Les personnes condamnées à une peine d’emprisonnement doivent bénéficier d’un traitement humain et d’une réhabilitation morale.

104.Le Code de procédure pénale prévoit que l’accusé a le droit de se défendre, seul ou avec l’aide d’un avocat de son choix. Le procureur informe l’accusé, si celui-ci n’a pas d’avocat, qu’il a le droit de bénéficier des services d’un avocat commis d’office. L’avocat choisi ou désigné est avisé 24 heures au moins avant l’interrogatoire, l’inspection ou le procès; dans les cas où ce délai pourrait porter préjudice à la procédure, il peut être levé. L’avocat aide l’accusé à protéger ses droits et ses intérêts légaux. Il peut être membre de sa famille. L’accusé qui n’a pas choisi d’avocat ou se retrouve sans avocat pourra, s’il le souhaite, être assisté par un avocat désigné par l’autorité ayant engagé la procédure. Lorsque le tribunal, le procureur et la police judiciaire doivent mener une action pour laquelle l’aide d’un avocat est requise, et que l’accusé n’en a pas, ils avisent l’avocat commis d’office. Lorsque la présence de l’avocat est exigée et que l’avocat commis d’office ne se présente pas ou s’est désisté, le tribunal ou le procureur désignent un remplaçant. Lorsque l’accusé n’a pas les moyens financiers d’assurer sa défense, les frais sont pris en charge par l’État. L’avocat peut exercer tous les droits reconnus à l’accusé à l’exception de ceux qui sont l’apanage exclusif de celui-ci. L’avocat a le droit de communiquer librement avec la personne détenue, arrêtée ou condamnée et d’être informé à l’avance des actes d’enquête menés en présence de l’accusé, d’y participer, de poser des questions à l’accusé, aux témoins et aux experts, d’avoir accès à toutes les pièces du dossier ainsi qu’aux conclusions de l’enquête. L’accusé peut contester la validité d’une déclaration ou d’un acte de son avocat jusqu’au prononcé du verdict. Une personne arrêtée en flagrant délit ou mise en détention a le droit de contacter aussitôt son avocat. La personne placée en détention préventive a le droit de contacter son avocat dès la prise d’effet de la mesure de sécurité prise à son encontre.

105.La langue albanaise est utilisée à tous les stades de la procédure pénale. Les personnes qui ne connaissent pas cette langue peuvent bénéficier des services d’un interprète. En vertu de la loi sur la police d’État, la personne placée en garde à vue a le droit d’être informée dans une langue qu’elle comprend des motifs de cette mesure, de son droit à garder le silence et de son droit à prendre contact avec une personne de son choix ainsi qu’avec un avocat.

106.La loi sur l’aide juridictionnelle fixe les critères en vertu desquels les personnes qui ne sont pas en mesure d’assumer les frais de leur défense et qui le souhaitent peuvent bénéficier d’une aide. Les personnes suivantes peuvent prétendre à l’aide juridictionnelle:

a)Citoyens albanais résidant sur le territoire de la République d’Albanie;

b)Citoyens étrangers pouvant en bénéficier en vertu du principe de réciprocité;

c)Apatrides en possession d’une carte de résident délivrée conformément à la législation applicable;

d)Citoyens étrangers ou apatrides en attente de carte de résident, qui ont introduit une demande d’asile ou une procédure d’appel contre une décision administrative ou judiciaire de refus d’octroi d’une carte de résident ou de l’asile.

107.Le Code de procédure pénale contient également des dispositions relatives à l’obtention de preuves pendant l’enquête et le procès, qui s’appliquent de manière égale aux citoyens albanais et aux citoyens étrangers, y compris dans les cas de disparition forcée. On entend par «preuve» toute information relative aux faits et aux circonstances de l’infraction, obtenues de sources prévues par la loi et conformément aux règles fixées par elle, qui permettent d’établir avec certitude la commission ou la non-commission de l’infraction pénale et les conséquences qui en découlent, la culpabilité ou l’innocence de l’accusé, ainsi que sa responsabilité. Peuvent constituer une preuve les faits intéressant les charges, la culpabilité de l’accusé, l’imposition de mesures de sécurité, la peine et la responsabilité civile, ainsi que les faits dont dépend l’application des règles de procédure. Au cours de l’enquête préliminaire, les preuves sont obtenues par l’autorité ayant engagé la procédure, conformément aux règles définies par le Code. Pendant le procès, les preuves sont obtenues à la demande des parties. Le tribunal statue par ordonnance, excluant les preuves non autorisées par la loi et celles qui sont manifestement inutiles. Les dispositions relatives à l’obtention de preuves peuvent être révoquées à n’importe quel stade du procès. Aux termes de l’article 152 du Code de procédure pénale, l’évaluation de la preuve consiste à établir son authenticité et sa valeur probatoire. Toute preuve est soumise à examen et n’a pas de valeur prédéterminée. Le juge apprécie librement les preuves, en forgeant sa conviction avec prudence sur chacun des éléments. Un fait ne peut être établi sur la base de simples indications, sauf si ces indications constituent des preuves solides, précises et concordantes. Les déclarations faites par un co-accusé dans le cadre de la même affaire ou par un accusé dans le cadre d’une affaire liée sont confrontées à d’autres preuves en vue de confirmer leur exactitude.

108.Selon le Code de procédure pénale, les auditions menées en vue de l’obtention de preuves doivent se dérouler avec la participation indispensable du procureur et de l’avocat de l’accusé. Les représentants de la partie lésée peuvent également y participer lorsqu’un témoin ou une tierce personne doit être entendue; dans les autres cas, leur participation est soumise à autorisation du tribunal. L’obtention de preuves concernant des personnes qui ne sont pas représentées par un avocat lors de l’audition est interdite. Tous les documents recueillis pour étayer la preuve sont remis au procureur. L’avocat de la défense a le droit de les consulter et d’en faire une copie. S’agissant de l’utilisation des preuves, le Code de procédure pénale dispose que les preuves obtenues conformément aux dispositions qu’il définit ne peuvent être utilisées contre l’accusé que lorsque l’avocat de ce dernier a eu connaissance de tous les éléments. Toute décision prise sur la base de preuves obtenues conformément aux dispositions de ce Code, mais dont la partie lésée n’a pas eu connaissance, est sans effet. Le Code indique que le tribunal statue sur la base de preuves examinées et vérifiées lors d’une audience.

109.Les autorités compétentes pour enquêter sur les infractions pénales et leurs auteurs présumés sont la police d’État, le Parquet et la police judiciaire. En vertu du Code de procédure pénale, les autorités chargées des poursuites pénales sont le procureur et la police judiciaire qui mènent, dans les limites de leurs compétences, toutes les enquêtes nécessaires. Dans ce cadre, elles sont donc les autorités compétentes pour instruire les affaires de disparition forcée. La police judiciaire mène l’enquête sous les ordres du procureur. Le Parquet prend toutes les mesures nécessaires pour exercer les poursuites pénales, conformément aux dispositions du Code de procédure pénale et à la loi sur l’organisation et le fonctionnement du ministère public en République d’Albanie. Les procureurs exercent leurs fonctions:

a)Aux stades de l’enquête préliminaire et dans les procès de première instance;

b)Dans les procès en appel et à la Cour suprême.

110.Aux termes de ce Code, la police judiciaire exécute les devoirs d’enquête prescrits ou délégués par le procureur. La justice pénale est rendue par:

a)Les tribunaux de première instance;

b)Les cours d’appel;

c)La Cour suprême.

111.Le Code de procédure pénale prévoit que pendant l’enquête préliminaire et dans les cas prévus par la loi, le tribunal statue sur les demandes du procureur, de l’accusé, des parties civiles et des parties lésées.

Article 12Enquête efficace

112.Le Code de procédure pénale contient des dispositions relatives au signalement de faits et d’infractions par les autorités compétentes et par les personnes qui ont connaissance d’infractions prévues par le Code pénal, y compris les personnes lésées, ainsi qu’aux compétences en matière d’enquête et de poursuites pénales. Ces dispositions s’appliquent également aux personnes qui ont été victimes de disparition forcée. Le Code détermine également quelles sont les autorités compétentes en matière de procédure pénale.

113.Le Code de procédure pénale précise que le procureur et la police judiciaire sont informés d’une infraction pénale soit de leur propre initiative, soit par l’intermédiaire d’une autre personne. La police judiciaire doit être avisée des infractions et agir, même de sa propre initiative, pour en prévenir d’éventuelles conséquences ultérieures, en rechercher les auteurs, mener les enquêtes et rassembler tous les éléments susceptibles de contribuer à l’application de la législation pénale. Elle est chargée de mener les devoirs d’enquête ordonnés par le procureur. Elle entend les personnes susceptibles de détenir des informations utiles à l’enquête. Le Code de procédure pénale définit les activités qui peuvent être prises à l’initiative de la police judiciaire et prévoit des dispositions relatives au signalement des infractions au procureur. La police judiciaire constitue un dossier consignant toutes les actions entreprises dans le cadre de l’enquête. En vertu de la loi sur l’organisation et le fonctionnement de la police judiciaire, celle-ci mène à bien les activités procédurales soit de sa propre initiative, soit sur ordre ou délégation de l’autorité compétente, en vertu des règles de procédure et de la législation applicables. Le rôle principal de la police judiciaire est d’obtenir toutes les informations relatives aux infractions, d’empêcher que ces dernières ne produisent de nouveaux effets, de mener des enquêtes rigoureuses et approfondies, de leur propre initiative ou sur instruction du procureur, de trouver les auteurs, d’obtenir des preuves quant à leurs activités criminelles, ainsi que d’accomplir d’autres devoirs prévus par le Code de procédure pénale et d’autres dispositions légales dans le cadre de l’application de la loi pénale.

114.Le Code de procédure pénale et la loi sur l’organisation et le fonctionnement du ministère public disposent que le procureur dirige l’enquête et ordonne tout devoir qu’il juge nécessaire. Il peut demander à la police judiciaire d’exécuter ces devoirs, y compris les interrogatoires et les confrontations, auxquels participent l’accusé et son avocat. Dans ce cas, la police judiciaire respecte les dispositions relatives à la désignation des avocats et à leur participation à l’enquête.

115.Le Code de procédure pénale traite également de la dénonciation des infractions par les citoyens. Toute personne ayant connaissance d’une infraction pénale exposant d’office son auteur à des poursuites est tenue de la signaler aux autorités compétentes; cette dénonciation est obligatoire dans certains cas prévus par la loi. Elle s’effectue oralement ou par écrit auprès du procureur ou d’un officier de la police judiciaire, en personne ou par l’intermédiaire d’un représentant. Les agents des services publics qui, dans l’exercice de leurs fonctions ou grâce à celles-ci, ont connaissance d’une infraction pénale exposant d’office son auteur à des poursuites, sont tenus de la signaler même si l’auteur de l’infraction n’a pas été identifié. Cette dénonciation s’effectue auprès du procureur ou d’un officier de la police judiciaire.

116.Le code de procédure pénale traite de manière détaillée des points suivants: dispositions relatives à la procédure; origine des preuves; données concernant les personnes faisant l’objet d’une enquête; présence de l’avocat de la défense pendant les contrôles et vérifications; dépositions des victimes et des personnes possédant des informations utiles à l’enquête; droit du procureur et du prévenu de demander la présentation de preuves; droit de la personne qui a été informée qu’elle faisait l’objet d’une enquête de comparaître devant le procureur pour défendre sa cause; enquête préliminaire; contrôle judiciaire; dépositions et interrogatoires des témoins et des tiers; décisions; et droit d’appel.

117.En ce qui concerne le délai dans lequel l’enquête préliminaire doit être effectuée, les articles 323 à 325 du Code pénal disposent que dans les trois mois à compter de la date à laquelle le nom de la personne à laquelle l’infraction est reprochée a été inscrit au registre des infractions pénales, le procureur doit décider soit de renvoyer le dossier pour jugement devant le tribunal compétent, soit de le classer sans suite, soit de le suspendre. En cas de demande de prolongation de ce délai, celui-ci cesse de courir à partir du jour de la requête jusqu’à ce que l’autorisation soit accordée. Le procureur peut prolonger la durée de l’enquête préliminaire de trois mois au maximum (art. 324). Des prolongations supplémentaires de trois mois chacune au maximum peuvent être accordées dans le cas d’enquêtes complexes ou lorsqu’il est objectivement impossible d’y mettre fin dans les temps impartis. La durée de l’enquête préliminaire ne pourra excéder deux ans. La décision de prolonger l’enquête doit être notifiée à l’inculpé et à la victime. Les investigations menées après expiration du délai ne peuvent être utilisées. L’inculpé et la victime ont le droit, dans les dix jours après avoir été avisés de la décision de prolonger l’enquête, de faire appel de cette décision devant le tribunal de district. Après avoir entendu l’inculpé, l’avocat de la défense, la victime et le procureur, le tribunal statue sur l’appel dans les dix jours. En cas d’acceptation de la demande, l’enquête ne peut se prolonger que pendant la période fixée par le tribunal. Il peut être fait appel de la décision, mais cela ne suspend pas son exécution. Au terme de son enquête, la police judiciaire en remet les procès-verbaux au procureur, lequel décide alors de porter l’affaire devant les tribunaux ou de la classer sans suite. En vertu du CPP, les charges peuvent être abandonnées, sur décision du procureur, à tous les stades de la procédure.

118.Les Instructions du Procureur général en matière de poursuites pénales stipulent que l’énoncé des charges et l’interrogatoire de l’inculpé sont du ressort du procureur, et qu’il doit les mener en personne. À titre exceptionnel, ils pourront être délégués à la police judiciaire. L’inculpé doit être entendu par le procureur, afin que celui-ci puisse se forger un avis sur ses déclarations et décider des mesures dont il doit faire l’objet. Le procureur ne procèdera à l’énoncé des charges et à l’interrogatoire que lorsqu’il existe des charges suffisantes pour inculper la personne incriminée. Dans le cas contraire, elle conservera le statut de suspect tant que des éléments suffisants n’auront pas été réunis. L’enquête préliminaire doit être achevée dans les trois mois à compter de la date à laquelle le nom de la personne à laquelle l’infraction est attribuée a été inscrit au registre des infractions pénales; le procureur doit s’assurer de la clôture de l’enquête dans les délais légaux. Les Instructions du procureur général relatives au respect des droits de l’homme pendant les procédures pénales stipulent que les procureurs doivent veiller à la légalité des actions menées dans le cadre des enquêtes et au respect des droits de l’homme par la police judiciaire.

119.S’agissant de la protection du plaignant, des témoins et des personnes participant à l’enquête, la loi no 10173 du 22 octobre 2009 sur la protection des témoins et des collaborateurs de justice prévoit des mesures spécifiques, temporaires et exceptionnelles, les procédures à suivre pour la protection des témoins et des collaborateurs de justice, ainsi que le fonctionnement, les compétences et les relations entre les organes responsables de la proposition, de l’évaluation, de l’approbation et de la mise en œuvre des programmes de protection. Aux termes de cette loi, on entend par «témoins et collaborateurs de justice» toute personne qui, en tant que témoin ou que victime, a fait des déclarations ou a témoigné de faits ou de circonstances constituant des preuves aux fins d’une procédure pénale et qui, en raison de ces déclarations, est susceptible de courir un danger. La loi définit les organes responsables de la protection des témoins et des collaborateurs de justice, leurs devoirs et pouvoirs, les programmes de protection et les mesures de protection concrètes dont ils peuvent faire l’objet (mesures spéciales, temporaires et d’urgence). Un programme de protection n’est mis en œuvre que si le témoin ou le collaborateur de justice court un véritable risque, entre dans les conditions pour bénéficier dudit programme et accepte, de son plein gré, d’y apporter son entière collaboration. La police d’État, les centres de détention ou les établissements pénitentiaires peuvent ordonner et appliquer des mesures de protection extraordinaires, en fonction du niveau de risque auquel sont exposés les témoins ou les collaborateurs de justice et les personnes qui leurs sont liées, conformément à cette loi ou à d’autres lois pertinentes dans ce domaine. Le CPP contient des dispositions relatives aux collaborateurs de justice, à savoir les personnes qui, étant soupçonnées ou accusées d’un crime grave avec complicité, acceptent de coopérer avec les autorités judiciaires.

120.La loi sur la police d’État précise que la mission de cette dernière est d’enquêter sur les infractions pénales et leurs auteurs, conformément à la législation et aux procédures pénales. Toute personne gardée à vue, arrêtée ou détenue dans les locaux de la police, ainsi que tout citoyen dont les droits seraient violés par un fonctionnaire de police dans le cadre d’une arrestation ou d’une détention a le droit de déposer une plainte, oralement ou par écrit, auprès de la direction des services de police ou d’une autre institution d’État, qui ont l’obligation d’y donner suite. En vertu de la loi, tout fonctionnaire de police a l’obligation:

a)De signaler à son supérieur compétent ou, en son absence, au supérieur de cette personne, toute plainte relative à des agissements répréhensibles de l’un de ses collègues lorsqu’il a des raisons objectives de penser que ces agissements ont effectivement été commis, qu’il en ait eu connaissance pendant qu’il était en service ou dans d’autres circonstances;

b)De signaler à son supérieur compétent ou, en son absence, au supérieur de cette personne, tout agissement de l’un de ses collègues qui, en toute objectivité, lui semble répréhensible, qu’il en ait eu connaissance pendant qu’il était en service ou dans d’autres circonstances.

121.Les règles et les normes régissant les devoirs et responsabilités des fonctionnaires de police en matière de respect de droits et libertés et de prévention des violations des droits de l’homme sont fixées par des directives ou circulaires, qui définissent également les procédures à suivre pour le traitement des plaintes et des demandes formulées par les personnes privées de liberté lorsqu’elles se trouvent dans les locaux de la police.

122.Le Bureau du Procureur général abrite la Direction des enquêtes et la Direction du contrôle des procédures pénales, qui coordonnent et contrôlent le travail des procureurs et leur fournissent assistance dans l’exercice de leurs fonctions. Au stade de l’enquête préliminaire, le Parquet contrôle la légalité des interventions des agents et des officiers de police judiciaire et veille au respect des principes, normes et critères en vigueur; il fait également en sorte de prévenir tout acte ou conduite illicites. Il vérifie les sources des preuves et d’autres éléments utiles à l’application de la législation pénale, et se charge de toutes les opérations nécessaires à l’exécution des ordres de l’autorité requérante.

123.S’agissant de l’accès des autorités aux lieux de détention, la législation albanaise dispose que les structures institutionnelles compétentes (police, procureur, etc.), les institutions indépendantes (Médiateur) et d’autres institutions ou organisations ont le droit de procéder à des inspections et à des contrôles au sein des locaux dans lesquels les personnes privées de liberté sont maintenues et dans les établissements pénitentiaires. Le mécanisme de traitement des plaintes et demandes s’applique également dans les locaux dans lesquels les personnes privées de liberté sont maintenues, la confidentialité étant assurée dans tous les cas.

Article 13Extradition

124.En vertu de la Constitution albanaise, l’extradition ne peut être accordée que dans les cas où elle est expressément prévue par les accords internationaux auxquels l’Albanie est partie, et uniquement par une décision de justice. L’Albanie a ratifié la Convention européenne d’extradition et ses protocoles additionnels dès 1998, et a signé des accords bilatéraux avec d’autres États. En outre, conformément l’article 122 de la Constitution, qui dispose que les traités internationaux priment le droit interne et que tout accord international ratifié par le Parlement est intégré à la législation nationale, la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées constitue la base légale pour les extraditions en cas d’infraction de disparition forcée et peut être appliquée directement en vertu des relations juridictionnelles avec les autorités de l’État étranger.

125.L’article 11 du Code pénal dispose que l’extradition ne peut être accordée que dans les cas où elle est expressément prévue dans les accords internationaux auxquels la République d’Albanie est partie. Donnent lieu à extradition les faits punis à la fois par les lois de l’Albanie et par celles de l’État étranger. La disparition forcée étant considérée comme une infraction pénale par la législation albanaise, toute demande d’extradition introduite pour ce motif est donc recevable. La République d’Albanie n’a reçu ni introduit aucune demande d’extradition depuis l’entrée en vigueur de la Convention.

126.Aux termes du Code pénal, l’extradition est refusée dans les cas suivants:

a)Si l’individu réclamé est un citoyen albanais, sauf disposition contraire prévue dans le traité;

b)Si le fait à raison duquel l’extradition est demandée est de nature politique ou militaire;

c)S’il existe des raisons des raisons sérieuses de croire que la demande d’extradition a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir un individu pour des raisons politiques, raciales, ethniques, religieuses ou pour des considérations de nationalité;

d)Si l’individu réclamé a été jugé par un tribunal albanais compétent pour les mêmes faits à raison desquels l’extradition est demandée.

127.Le Code de procédure pénale définit la procédure à suivre lorsqu’une demande d’extradition est reçue et les autorités compétentes en la matière, à savoir: le Ministre de la justice, les procureurs et les tribunaux des districts judiciaires compétents territorialement pour examiner la demande d’extradition. Toute demande d’extradition doit obligatoirement être adressée au Ministre de la justice, accompagnée des documents suivants:

a)Une copie du jugement condamnant l’individu réclamé à une peine d’emprisonnement ou des actes de procédure;

b)Un exposé des faits pour lesquels l’extradition est demandée, le moment et le lieu de leur perpétration et leur qualification légale;

c)Une copie des dispositions légales applicables, précisant si la loi de la Partie requérante prévoit la peine de mort pour l’infraction commise par l’individu dont l’extradition est demandée;

d)Le signalement aussi précis que possible de l’individu réclamé et tous autres renseignements de nature à déterminer son identité et sa nationalité.

128.Le Ministre de la justice peut ajouter à cette liste tout autre élément qu’il estime approprié.

129.S’agissant des conditions d’extradition, il est prévu ce qui suit:

a)L’extradition ne sera autorisée qu’à la condition expresse que l’individu réclamé ne sera ni poursuivi, ni jugé, ni remis à un pays tiers pour des faits antérieurs à la remise, autres que celui ayant motivé l’extradition;

b)La condition précitée est levée dans les cas suivants:

i)Lorsque la Partie qui l’a livré y consent expressément;

ii)Lorsqu’ayant eu la possibilité de le faire, l’individu extradé n’a pas quitté dans les 45 jours qui suivent sa libération, le territoire de la Partie à laquelle il a été livré ou s’il y est retourné après l’avoir quitté;

iii)Le Ministre de la justice peut ajouter à cette liste tout autre élément qu’il estime approprié.

130.La demande d’extradition peut être refusée:

a)Si l’infraction pour laquelle elle est demandée est considérée comme une infraction politique ou comme un fait connexe à une telle infraction;

b)S’il existe des raisons sérieuses de penser que l’individu réclamé fera l’objet de persécutions ou de discrimination pour les faits à raison desquels l’extradition est demandée;

c)Si l’individu réclamé s’est rendu coupable d’une infraction pénale en Albanie;

d)S’il a été jugé ou que son procès a commencé en Albanie, même si l’infraction a été commise à l’étranger;

e)Si l’État albanais a accordé l’amnistie pour l’infraction concernée;

f)Si l’individu réclamé est un citoyen albanais, sauf disposition contraire prévue dans le traité;

g)Lorsque la loi de la Partie requérante ne prévoit pas de poursuites pour les faits à raison desquels l’extradition est demandée.

131.Conformément aux termes de la Convention, le crime de disparition forcée n’est pas considéré comme une infraction politique au regard de la loi albanaise.

132.Lorsqu’une demande d’extradition est rejetée parce qu’elle concerne un ressortissant albanais, elle est néanmoins considérée comme le signalement d’une infraction commise par un citoyen albanais à l’étranger; dans ce cas, en vertu du Code pénal albanais, les autorités compétentes sont tenues d’enregistrer la commission de ladite infraction et de prendre toutes les mesures nécessaires, conformément au droit interne et aux accords internationaux auxquels la République d’Albanie est partie, afin d’assurer la présence de l’intéressé. Les règles régissant les procédures pénales en République d’Albanie sont contraignantes et il n’appartient pas au procureur de décider s’il convient d’entamer des poursuites en fonction de la gravité de l’infraction.

133.Le Code de procédure pénale régit les relations juridictionnelles avec les États étrangers. Il définit également les procédures d’extradition de et vers l’étranger, notamment l’exigence de double incrimination, conformément aux traités internationaux. Aux termes du CPP, un individu ne peut être remis à un État étranger aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sécurité que dans le cadre d’une procédure d’extradition.

134.La République d’Albanie est partie à la Convention européenne d’extradition et à ses quatre protocoles, et a conclu une série d’accords bilatéraux. Conformément à cette Convention, ainsi qu’à d’autres accords bilatéraux auxquels la République d’Albanie est partie, ne donnent lieu à extradition que les faits punis par les lois de l’État requérant et de l’État requis. Dans ce contexte, un individu est extradable dès le moment où l’infraction dont il s’est rendu coupable constitue une infraction dans la législation des deux pays concernés.

135.Les relations avec les autorités étrangères en matière pénale sont régies par les accords internationaux ratifiés par l’État albanais, les principes et les normes universellement reconnus du droit international et la législation relative à la procédure pénale. La loi no 10193 du 3 décembre 2009 sur les relations juridictionnelles avec les autorités étrangères en matière pénale dispose que la remise à un État étranger d’un individu faisant l’objet d’une enquête, accusé ou condamné s’effectue selon les règles de la législation albanaise et les accords internationaux auxquels la République d’Albanie est partie. Cette loi régit l’extradition depuis la République d’Albanie: conditions, autorités compétentes (Ministre de la justice, procureurs, tribunaux), modalités d’examen de la demande, décision du tribunal, garanties concernant l’individu extradé, etc.

Article 14Entraide judiciaire

136.En ce qui concerne la question de l’entraide judiciaire en matière pénale, l’Albanie a ratifié plusieurs accords internationaux: la Convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale et ses protocoles additionnels; la Convention européenne sur la transmission des procédures répressives; et le Protocole additionnel à l’Accord européen sur la transmission des demandes d’entraide judiciaire en matière pénale. L’Albanie a également signé des accords bilatéraux sur l’entraide judiciaire en matière pénale avec d’autres pays.

137.Le Code de procédure pénale dispose que les relations avec les autorités étrangères en matière pénale sont régies par les accords internationaux auxquels l’Albanie est partie, les principes et les normes du droit international et ses propres dispositions. Il contient des dispositions relatives aux relations juridictionnelles avec les États étrangers, à la coopération internationale dans le domaine de l’aide judiciaire et aux commissions rogatoires internationales. Aux termes du CPP, l’autorité compétente en ce qui concerne les commissions rogatoires internationales est le Ministre de la justice. Celui-ci fait exécuter les commissions rogatoires qui lui ont été adressées par les autorités judiciaires de l’État étranger concernant la communication d’informations ou de pièces à conviction, sauf s’il estime que l’objet de la demande est susceptible de porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou aux intérêts de l’État. L’exécution d’une commission rogatoire pourra être refusée s’il apparaît clairement que les mesures demandées sont contraires à la loi, violent les principes fondamentaux de l’état de droit, ou pour toute raison motivée susceptible de nuire au bon déroulement de la procédure.

138.Le Code définit la procédure à suivre pour l’exécution des commissions rogatoires adressées par un État étranger. Le procureur, sur instruction du Ministre de la justice, soumet la demande à la juridiction compétente. L’exécution de la commission rogatoire sera refusée:

a)Lorsque le Ministre de la justice ne donne pas son autorisation;

b)Lorsque les faits pour lesquels elle a été adressée ne constituent pas une infraction pénale au regard de la loi albanaise.

139.S’agissant d’adresser des commissions rogatoires à un État étranger, le CPP dispose que toute commission rogatoire demandée par les procureurs ou les tribunaux concernant la communication d’informations ou de pièces à conviction doit recevoir l’aval du Ministre de la justice avant d’être transmise à l’État étranger. Si le Ministre de la justice estime que la sécurité ou d’autres intérêts importants de l’État sont menacés, il peut décider, dans les 30 jours, de ne pas la transmettre. Dans les situations d’urgence, l’autorité ayant engagé la procédure peut transmettre la commission rogatoire directement à l’État étranger; il en informe alors le Ministre de la justice. Lorsque l’État étranger a imposé des conditions à l’utilisation des actes demandés, les autorités albanaises sont tenues de les respecter, à moins qu’elles ne soient contraires à la législation albanaise.

140.Le CPP contient des dispositions relatives à l’exécution des jugements répressifs. Lorsqu’une décision de justice concernant un citoyen albanais, un étranger ou un apatride résidant en Albanie, ou encore une personne poursuivie pénalement par l’Albanie, est rendue à l’étranger, le Ministre de la justice en informe le procureur du tribunal compétent. S’il considère que cette décision doit être exécutée en application d’une convention internationale, il en demande la reconnaissance; le procureur soumet la demande au tribunal compétent, et peut demander aux autorités étrangères toute information complémentaire qu’il juge nécessaire. La République d’Albanie n’a reçu ni soumis aucune demande d’entraide judiciaire au titre de cette Convention.

141.La loi no 10193 du 3 décembre 2009 sur les relations juridictionnelles avec les autorités étrangères en matière pénale définit les autres procédures applicables dans le domaine des relations avec les autorités étrangères en matière pénale. Cette loi s’applique, sauf lorsqu’il existe des règles spécifiques dans les accords internationaux auxquels l’Albanie est partie, dans les circonstances suivantes:

a)Procédures liées à des infractions pénales qui, au moment de la demande, relèvent de la compétence des autorités judiciaires de l’État requérant ou de l’Albanie;

b)Procédures relevant de la compétence de la Cour européenne des droits de l’homme ou d’autres tribunaux internationaux dont la compétence est reconnue par l’Albanie.

142.La loi définit notamment les autorités judiciaires étrangères compétentes; les autorités judiciaires albanaises compétentes (Ministre de la justice, procureurs, tribunaux); le type de demande (commission rogatoire, requête) établissant les relations juridictionnelles internationales; les règles générales de présentation des demandes aux autorités compétentes; et les procédures. Elle contient des dispositions quant à la reconnaissance et à l’exécution des jugements répressifs rendus à l’étranger et aux autorités compétentes (Ministre de la justice, procureurs, tribunaux). Elle régit également la transmission des procédures répressives à un État étranger, si la personne est soupçonnée d’avoir commis une infraction punissable au regard de la législation pénale albanaise: conditions de la transmission, procédures relative à la demande et à la transmission, autorités compétentes, transmission des procédures répressives depuis un État étranger.

Article 15Coopération internationale

143.Les institutions albanaises, en collaboration avec des partenaires nationaux et étrangers, travaillent à la création d’une Section des personnes disparues au sein de l’Institut pour l’intégration des victimes de persécutions politiques. La Commission internationale des personnes disparues constitue un partenaire de premier plan dans cette entreprise, et des mesures seront prises en vue de la signature d’un accord bilatéral.

Article 16Refoulement

144.La Constitution interdit l’expulsion collective d’étrangers et dispose que l’expulsion d’une personne n’est permise que dans les cas prévus par la loi; les droits fondamentaux, libertés et obligations des citoyens albanais sont applicables aux étrangers et aux apatrides, à moins que leur exercice soit spécifiquement lié à la citoyenneté albanaise.

145.Aux termes de la loi no 108/2013 sur les étrangers, on entend par «refoulement» l’obligation de renvoyer un étranger faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion, en tant que mesure administrative d’éloignement forcé du territoire albanais prise par l’autorité compétente en matière de contrôles aux frontières et de migration, dans les cas suivants:

a)Entrée illégale sur le territoire albanais;

b)Réadmission dans un autre pays, conformément aux accords de réadmission;

c)Individu déclaré persona non grata en vertu de la loi;

d)Individu présentant un danger pour l’ordre et la sécurité publics;

e)Individu condamné pour une infraction pour laquelle la législation albanaise prévoit une peine de trois ans d’emprisonnement au minimum.

146.Si l’étranger est sous le coup d’un arrêté d’expulsion, il est placé dans un centre de détention jusqu’à l’exécution de cette mesure. Un «centre fermé» est un établissement administratif ayant un certain niveau de sécurité et de restriction des libertés, dans lequel ne peuvent être placés que les étrangers faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion. Les «mesures temporaires» sont des mesures de substitution prises par l’autorité responsable de l’exécution de l’arrêté d’expulsion. La loi définit les conditions d’expulsion et les catégories de personnes qui ne peuvent être expulsées; un étranger peut être expulsé à titre exceptionnel si, par son comportement, il compromet l’ordre et la sécurité publics et constitue une menace pour la sécurité nationale.

147.La loi sur le droit d’asile définit le non-refoulement comme l’interdiction d’expulser un étranger ou un apatride lorsque sa vie ou sa liberté sont menacées en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. En vertu de ce principe, l’Albanie reconnaît et respecte l’obligation incombant aux autorités de ne pas renvoyer, refouler ou extrader des personnes ayant demandé et obtenu l’asile ou d’autres formes de protection. La loi prévoit expressément l’application de ce principe dans les cas où il existe des raisons sérieuses de penser que le demandeur d’asile pourrait être victime d’une disparition forcée.

Article 17Interdiction de la détention secrète

148.La législation albanaise ne contient aucune disposition relative à la détention secrète ou non officielle. Il convient toutefois de noter qu’aucun cas de détention secrète n’a été recensé dans le pays depuis l’entrée en vigueur de la Convention. La Constitution albanaise dispose que «nul ne peut être privé de liberté sauf dans les cas et selon les modalités prévus par la loi». La liberté d’une personne ne peut donc être restreinte, sauf:

a)Lorsqu’elle a été condamnée à une peine d’emprisonnement par un tribunal compétent;

b)Lorsqu’elle n’a pas obéi à une injonction du tribunal ou ne s’est pas acquittée d’une obligation prévue par la loi;

c)Lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’elle s’est rendue coupable d’une infraction, pour l’empêcher de commettre une infraction ou pour éviter qu’elle ne prenne la fuite après avoir commis une infraction;

d)Pour la supervision d’un mineur à des fins d’éducation, ou pour le confier à un organisme compétent;

e)Lorsque la personne est porteuse d’une maladie contagieuse, mentalement inapte ou qu’elle représente un danger pour la société;

f)En cas de franchissement illégal d’une frontière, d’expulsion ou d’extradition.

149.Des dispositions similaires sont présentes dans le Code de procédure pénale, qui précise que la liberté d’une personne ne peut être restreinte que par mesure de sécurité dans les cas et selon les modalités prévus par la loi. Il définit les règles à suivre pour garantir des procédures équitables et conformes à la loi, et protéger les libertés individuelles et les droits et intérêts légitimes des citoyens.

150.En vertu de la loi sur la police d’État, les personnes arrêtées ou détenues sont maintenues dans les locaux de la police jusqu’à ce que le tribunal statue sur les mesures de sécurité à prendre, dans le respect des droits prévus par la loi. Le Code de procédure pénale dispose que lorsqu’une personne est arrêtée ou détenue, le procureur doit immédiatement être informé du lieu de l’arrestation ou de la détention. Entre autres tâches, le procureur prend toutes les mesures nécessaires à l’exécution des décisions prises par les autorités judiciaires, conformément aux règles énoncées dans ce Code. Les autorités compétentes pour juger les infractions et décider d’une privation de liberté sont les tribunaux de district, le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves et la Cour suprême. Le Code de procédure pénale prévoit des dispositions relatives au contrôle judiciaire, aux décisions du tribunal et aux modalités de prise de décisions. La police judiciaire met en œuvre toutes les procédures nécessaires à l’exécution des condamnations pénales. La Direction générale des prisons est l’institution responsable d’organiser, de diriger et de contrôler l’exécution des peines d’emprisonnement et des décisions de mise en détention préventive, dans le respect de la loi relative aux droits des prisonniers et des détenus et du Règlement général des prisons.

151.La loi sur les droits et le traitement des détenus dispose que toute peine d’emprisonnement, qu’elle ait été prononcée par une juridiction albanaise ou étrangère, doit être purgée dans les établissements prévus à cette fin par la loi, conformément aux accords internationaux. Les «établissements d’exécution des condamnations pénales» sont les institutions chargées de l’accueil, de la prise en charge et de la réhabilitation sociale des détenus; ils dépendent de la Direction générale des prisons. Ces établissements sont de plusieurs types: prisons de haute, moyenne ou faible sécurité; institutions spécialisées; centres de détention. Les centres de détention accueillent les personnes placées en détention préventive.

152.La loi sur l’exécution des décisions pénales définit les procédures de mise en œuvre des jugements répressifs et d’autres injonctions légales, les modalités d’exécution des peines (sauf dans les cas relavant d’une loi spécifique) et les dispositions relatives aux mesures de sécurité, sauf disposition contraire dans le Code de procédure pénale. Par «exécution des décisions pénales», on entend l’application de toutes les décisions prises en matière pénale, y compris celles qui visent à la réhabilitation des personnes injustement poursuivies et à la restauration de leurs droits, ainsi que des droits des justiciables qui ont été lésés par l’infraction. En vertu de cette loi, le Procureur peut effectuer des contrôles (recherche d’informations et vérification de documents directement sur le lieu de détention, en présence d’un responsable).

153.La législation albanaise prévoit le droit pour les personnes détenues ou arrêtées de communiquer avec leur avocat. Une personne détenue ou arrêtée en flagrant délit a le droit de contacter son avocat immédiatement après son arrestation ou sa mise en détention. Elle peut s’entretenir avec lui dès la prise d’effet de la mesure de sécurité prise à son encontre. Chaque établissement pénitentiaire dispose d’une commission d’accueil chargée d’informer les détenus, dans une langue qu’ils comprennent, de la règlementation en vigueur dans l’établissement, de leurs droits et obligations, de leur droit à bénéficier de l’assistance d’un avocat ainsi que des procédures à suivre pour introduire une demande ou une plainte; ces informations sont transmises par écrit. Les détenus ont droit aux visites régulières de leur famille ou d’autres personnes. En ce qui concerne ceux qui, pour une raison quelconque, n’ont plus de contact avec les membres de leur famille, les institutions s’efforcent, par l’intermédiaire des travailleurs sociaux, de recréer des liens. Les détenus peuvent entretenir une correspondance confidentielle avec les membres de leur famille, leurs proches et leurs amis et de leur téléphoner sous la surveillance visuelle d’un gardien mais sans que celui-ci puisse écouter la conversation. Ils ont également le droit de tenir des réunions confidentielles avec les membres du comité de surveillance, l’avocat qu’ils ont choisi ou qui a été désigné, les représentants d’organisations internationales ou d’ONG actives dans le domaine des droits de l’homme, conformément aux accords de coopération conclus entre la Direction générale et la société civile. Les détenus ont le droit d’être informés de leurs droits et des obligations qui leur incombent au titre de la loi, du Règlement général des prisons et du règlement intérieur de l’établissement dans lequel ils sont incarcérés.

154.Les détenus de nationalité étrangère doivent disposer des moyens nécessaires pour communiquer avec les représentants diplomatiques ou consulaires de leur pays. Les détenus dont le pays ne dispose pas de représentation diplomatique en République d’Albanie, les réfugiés et les apatrides doivent disposer des mêmes facilités de communication avec les représentants diplomatiques de l’État, ainsi que les autorités nationales et internationales, afin de protéger leurs intérêts.

155.Aux termes de la loi sur l’exécution des décisions pénales, l’avocat, à la demande de son client ou lorsqu’il l’estime nécessaire, a le droit de s’entretenir avec lui, dans le respect des règles en vigueur, de demander des éclaircissements, d’obtenir toute information utile, de demander aux autorités chargées de l’exécution du jugement de prendre des mesures dans leur juridiction, de demander l’intervention du procureur en cas de difficulté, et de soumettre des demandes au tribunal dans son domaine de compétence.

156.La Direction des normes professionnelles, mécanisme interne de la police d’État, veille au traitement humain et au respect des droits des détenus. En cas de violation de ces droits, des mesures sont prises pour lancer une procédure disciplinaire à l’encontre des agents responsables. Le Service des affaires internes et des plaintes, structure indépendante de la police d’État, procède aux inspections et au contrôle de toutes les structures centrales et locales de la police. En cas d’agissements contraires à la loi ou aux règlements constituant une infraction, des poursuites pénales sont engagées. Des contrôles et inspections peuvent également être menés par le Médiateur, sans préavis. Un accord de coopération a également été conclu avec le Commissaire chargé de la protection contre les discriminations et la société civile, qui peuvent procéder à des visites de surveillance.

157.Des institutions et structures spécialisées, internes ou extérieures à l’administration pénitentiaire, se chargent de garantir aux autorités compétentes l’accès aux lieux de détention et de veiller au respect des droits des détenus. Les personnes suivantes peuvent avoir accès aux établissements d’exécution des peines sans autorisation: le Président de la République; le Président et le Vice-Président du Parlement; le Premier Ministre et le Vice-Premier Ministre; le Président de la Cour constitutionnelle; le Ministre et le Vice-Ministre de la justice; le Président de la Cour suprême; le Procureur général; les députés; le Médiateur, ses commissaires et commissaires assistants; le Directeur de l’inspection des prisons; les membres de la Commission de supervision de l’exécution des jugements répressifs; les juges; les procureurs; les avocats des détenus.

158.La loi sur les détenus dispose que le Médiateur, qui agit en tant que Mécanisme national de prévention de la torture, veille à l’application de cette loi en vue d’assurer le respect et la protection des droits des détenus. Dans ce cadre, il:

a)Assure une surveillance régulière du traitement des personnes privées de liberté sur leur lieu de détention, aux fins du renforcement, le cas échéant, de leur protection contre la torture et les peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants;

b)Formule des recommandations à l’intention des autorités compétentes en vue de l’amélioration du traitement et des conditions de vie des personnes privées de liberté et de la prévention des peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants.

159.Aux fins de l’exercice de ces fonctions, le Médiateur:

a)Dispose d’informations sur le nombre de personnes privées de liberté dans les différents lieux de détention, le nombre d’établissements et leur localisation;

b)Dispose d’informations sur le traitement réservé à ces personnes et leurs conditions de détention;

c)Peut accéder librement à tous les endroits dans lesquels la liberté des individus est restreinte;

d)A le droit d’examiner tout document, installation, équipement ou environnement;

e)A le droit de s’entretenir en privé avec les individus privés de liberté, soit en personne soit avec l’aide d’un interprète, et avec toute personne susceptible de lui fournir les informations dont il a besoin;

f)A le libre choix des lieux qu’il souhaite visiter et des personnes avec lesquelles il souhaite s’entretenir.

160.Le Médiateur peut intervenir lorsqu’il reçoit des informations, plaintes ou demandes écrites ou téléphoniques émanant de détenus, de visiteurs, d’avocats, d’autorités étatiques ou d’organisations non gouvernementales qui ont inspecté l’établissement conformément à la loi.

161.Les lieux de détention sont en outre inspectés régulièrement par le Comité européen pour la prévention de la torture. La Direction générale des prisons a également conclu des accords de coopération avec des organisation non gouvernementales actives dans le domaine des droits de l’homme, qui ont à tout moment le droit d’inspecter les lieux de détention, les établissements carcéraux et les documents pertinents, et de s’entretenir avec les détenus sans la présence d’agents pénitentiaires.

162.La Constitution albanaise consacre le principe de la présomption d’innocence (un individu ne peut être considéré comme coupable avant d’avoir été reconnu comme tel par une décision de justice définitive) et le droit de chacun à faire appel d’une décision de justice, sauf disposition contraire de la Constitution. La Constitution et la législation albanaises garantissent à toute personne privée de liberté et à ses représentants ou avocats le droit de faire appel de la décision de privation de liberté s’ils en contestent la légitimité.

163.La loi sur la police d’État dispose que toute personne gardée à vue, détenue ou arrêtée a le droit de s’adresser à la juridiction compétente à n’importe quel moment. Cette loi ainsi que tous les règlements administratifs régissant la structure de la police garantissent que les fonctionnaires de police s’acquittent de leurs devoirs et de leurs responsabilités dans le respect des droits des personnes privées de liberté. Des procédures sont prévues pour:

a)La garde à vue, le traitement des personnes ayant fait l’objet d’une telle mesure ou ayant reçu l’ordre de se présenter à la police, l’utilisation d’armes à feu et l’utilisation de la force par les fonctionnaires de police;

b)Le traitement et la protection des personnes arrêtées ou détenues lorsqu’elles se trouvent dans les locaux de la police.

c)L’application de la Déclaration sur les droits des personnes arrêtées ou détenues lorsqu’elles se trouvent dans les locaux de la police et l’utilisation du Registre destiné à l’enregistrement et au traitement des plaintes et des requêtes des personnes privées de liberté lorsqu’elles se trouvent dans les locaux de la police.

164.Aux termes du Code de procédure pénale, «nul ne peut être déclaré coupable et puni pour la commission d’une infraction sans un jugement du tribunal». En vertu de ce Code, l’accusé ou son avocat peuvent faire appel des mesures de sécurité dont il fait l’objet. La Cour d’appel évalue alors la légitimité de la mesure en question; si elle l’estime illégale, l’accusé est immédiatement libéré; la Cour prononce un non-lieu lorsque la procédure n’aurait pas dû être lancée ou doit s’arrêter, et lorsque les faits sont prescrits. Elle prononce l’acquittement dans les cas suivants:

a)Les faits n’existent pas, ou leur existence n’est pas prouvée;

b)Les faits ne constituent pas une infraction pénale;

c)Les faits ne sont pas mentionnés comme infraction pénale dans la loi;

d)L’infraction a été commise par une personne qui ne peut être jugée/condamnée;

e)Il n’est pas prouvé que l’intéressé a commis les faits qu’on lui reproche;

f)Les faits ont été commis pour un motif légitime; il existe un motif d’impunité ou un doute.

165.Dans ces cas, le tribunal ordonne la libération de l’intéressé et lève les mesures de sécurité prises à son encontre. Si l’intéressé est déclaré coupable des faits qui lui sont reprochés, le tribunal fixe le type et la durée de la peine.

166.Les cas et les procédures d’appel sont détaillés dans le Code de procédure pénale. Les tribunaux de district sont compétents pour toutes les affaires pénales sauf celles qui relèvent du Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves. La Cour suprême examine, en dernière instance, les recours introduits pour violation du droit et les demandes de révision des décisions de justice. Les différentes voies de recours sont l’appel, le recours à la Cour suprême et la demande de révision. Le droit d’appel est applicable dans les cas prévus par la loi, et l’accusé peut faire appel d’une décision personnellement ou par l’intermédiaire de son avocat. La décision de justice est exécutée dès que le jugement final est rendu; l’acquittement et le non-lieu prennent effet dès qu’ils ont été prononcés. Dans les cas prévus par la loi, les jugements peuvent être révisés à tout moment, même si la peine a été exécutée ou est éteinte. Les décisions d’acquittement peuvent être revues à la demande du procureur dans les cinq ans qui suivent leur prononcé. Pour l’exécution d’une peine d’emprisonnement, le procureur émet un ordre d’exécution; le tribunal qui a pris la décision est compétent pour examiner les demandes et plaintes liées à cette décision. Il agit sur demande du procureur, de la personne concernée ou de son avocat. Il prend une décision qui est communiquée aux différentes parties concernées. Il peut être fait appel de cette décision, mais cela ne suspend pas son exécution, sauf si le tribunal en décide autrement. Ce dernier est également compétent en ce qui concerne la clôture d’une affaire, l’extinction de la peine, les sanctions supplémentaires, la confiscation ou la restitution des biens personnels, ainsi que dans tous les autres cas prévus par la loi.

167.La loi sur les droits et le traitement des détenus dispose que le tribunal du district dans lequel l’établissement pénitentiaire est situé examine les affaires concernant les droits des détenus qui n’ont pas pu être réglées par l’établissement à la demande du détenu ou de son avocat, sauf celles pour lesquelles le Code de procédure pénale a défini des compétences spécifiques. En vertu de la loi sur le contrôle interne du système carcéral, les services de contrôle interne des établissements pénitentiaires se chargent de traiter les cas de violation des droits des détenus. Le Règlement général des prisons stipule que le respect des droits des détenus est garanti par le procureur et par le tribunal. En cas de violation, le procureur veille à ce que le coupable réponde de ses actes.

168.La loi sur l’exécution des décisions pénales garantit la possibilité de faire appel d’une décision et d’être défendu par un avocat. Les organes et les agents qui font exécuter les décisions en vertu de cette loi sont tenus d’exercer leurs fonctions avec correction, dans le respect des droits, de l’honneur et de la dignité de la personne. Les agents chargés de l’exécution des décisions pénales sont responsables, tant du point de vue disciplinaire que du point de vue pénal, au cas où une exécution ou un retard d’exécution enfreindrait la loi et les droits de la personne. La loi définit les conditions d’exécution des condamnations pénales, de déroulement des procédures préliminaires et d’émission des ordres exécutoires par le procureur près le tribunal qui a rendu la décision. Le tribunal compétent a le droit de demander des informations au procureur et à l’institution dans laquelle la décision est exécutée, et s’assure de la régularité de l’exécution. La loi prévoit à cet égard une supervision et des contrôles internes, avec la création de commissions de supervision de l’exécution des décisions pénales, qui agissent comme organes consultatifs pour l’application des lois relatives à la mise en application des peines d’emprisonnement et à la protection des droits des détenus.

169.Le Règlement général des prisons fixe les procédures d’admission et d’enregistrement des détenus dans les établissements d’exécution des peines et détermine les informations que doivent contenir les dossiers personnels et le registre des détenus. Chaque établissement pénitentiaire doit tenir un tel registre, dans lequel sont consignées les informations suivantes:

a)Identité complète du détenu (nom, prénom, paternité, date et lieu de naissance, lieu de résidence, membres de la famille avec laquelle il entretient des contacts, etc.);

b)Infraction commise, tribunal qui a rendu la décision, numéro et date de la décision, lieu et date de l’arrestation, date de l’ordre d’exécution rendu par le procureur, décisions du tribunal modifiant une décision précédente ou influant sur son exécution, amnistie, grâce;

c)Date et lieu d’admission et de libération. En cas de décès du détenu, la date, le lieu et l’heure du décès, une copie de l’acte de décès et les coordonnées de la personne ou de l’autorité à qui la dépouille a été remise sont également consignés dans le registre.

170.Les détenus ne seront admis dans l’établissement pénitentiaire que sur présentation des documents suivants:

a)Décision d’incarcération rendue par le tribunal;

b)Procès-verbal de l’arrestation en flagrant délit ou de la mise en détention;

c)Relevé de la fouille;

d)Formulaire d’identification avec deux photos d’identité et empreintes digitales;

e)Document d’identité;

f)Fiche médicale;

g)Certificat personnel;

h)Pour les femmes, une échographie.

171.L’admission des détenus se fait sur ordre du Directeur général des prisons, après réception de l’ordre d’exécution de la sentence pénale:

a)Copie du jugement du tribunal qui a prononcé la peine d’emprisonnement;

b)Ordre d’exécution du procureur;

c)Mandat d’arrêt;

d)Historique de détention;

e)Rapport de fouille;

f)Formulaire d’identification avec deux photos d’identité et empreintes digitales;

g)Informations personnelles;

h)Dossier médical;

i)Dossier psychosocial (pour le transfèrement d’un établissement à un autre).

172.Les dossiers suivants sont également ouverts: dossier personnel du détenu; dossier psychosocial; dossier médical; registre des demandes/plaintes; registre des mesures disciplinaires; registre des permissions; registre des incidents graves; registre des réductions de peine; registre des visites médicales; registre des activités; registre d’emploi; registre de la Commission d’admission; registre des cas de violence; registre du contrôle alimentaire; registre alphabétique.

Article 18Informations sur la personne privée de liberté

173.La Constitution garantit à toute personne, même lorsqu’elle est privée de liberté, le droit à l’information, le droit de contacter sa famille, le droit de communiquer avec son avocat, etc. Conformément à la loi, chacun peut obtenir des informations sur les activités des institutions et les personnes chargées des différentes fonctions.

174.La loi no 119/2014 sur le droit à l’information consacre le droit d’obtenir des informations émises ou détenues par les autorités publiques; elle vise à faire en sorte que le public comprenne ces informations, notamment celles qui ont trait à l’exercice des droits et libertés individuels. Par «autorités publiques», on entend toute entité administrative prévue dans la législation relative aux procédures administratives, les organes législatifs et judiciaires à tous les niveaux, les organismes publics locaux à tous les niveaux, et toute entité publique inscrite dans la loi ou la Constitution.

175.Conformément à la législation relative aux droits des détenus, dès l’admission de ces derniers, le personnel de l’établissement pénitentiaire doit veiller à ce qu’ils puissent exercer leur droit d’informer de leur incarcération leur famille, leur avocat, les représentants consulaires et les organisations compétentes dans le domaine de la protection des droits de l’homme.

176.Le Règlement général des prisons dispose ce qui suit:

a)Les données personnelles des détenus doivent être traitées conformément aux exigences légales. Peuvent en prendre connaissance le Ministre de la justice, le Directeur général des prisons, le Directeur de la police, le Directeur de l’établissement pénitentiaire, le Chef de la surveillance pénitentiaire et toute autre autorité prévue par la loi;

b)Les personnes qui, dans l’exercice de leurs fonctions, ont accès à des données à caractère personnel concernant les détenus ne peuvent en aucun cas les divulguer en dehors du cadre de leur fonction. Ces données ne peuvent être communiquées à autrui que dans les cas prévus par la loi;

c)Les données personnelles de chaque détenu sont consignées dans des registres officiels;

d)Les détenus, ainsi que toute personne à qui ils en donnent l’autorisation, ont le droit d’avoir accès à leurs données personnelles; ils doivent en faire la demande au Directeur de l’établissement pénitentiaire, en précisant les motifs de leur demande et le type d’informations auxquelles ils souhaitent avoir accès. Le Directeur veillera à ce que les informations ainsi communiquées ne concernent pas un autre détenu.

e)Si l’accès est demandé par une tierce personne, cette dernière doit avoir le consentement écrit du détenu, sauf disposition contraire dans la loi.

177.Le Règlement des prisons contient également des dispositions relatives au décès et aux maladies des détenus. En cas de maladie ou de blessure grave, le Directeur de l’établissement en informe immédiatement les membres de la famille ou les proches, ou toute autre personne préalablement désignée par le détenu. De même, le détenu doit être informé sans délai du décès ou de la maladie d’un membre de sa famille ou d’un proche. En cas de décès du détenu, l’établissement prend toutes les mesures nécessaires à la mise en œuvre des procédures prévues par la loi pour faire toute la lumière sur les causes et les circonstances de la mort. Le Directeur général des prisons, le procureur, la famille et, en cas d’absence de famille, les autorités de l’état civil sont informés du décès.

178.La loi no 4572015 sur le droit à l’accès aux documents du Ministère de la sécurité d’État de l’ancienne République populaire socialiste d’Albanie définit les règles et procédures en vertu desquelles toute personne concernée peut avoir accès aux informations du Ministère de la sécurité d’État de l’ancien régime, via un processus transparent et démocratique, dans une volonté de réconciliation et d’unité nationale. Cette loi dispose, entre autres, que toute personne a le droit de demander des informations sur ces documents, d’être informé au cas où ils contiendraient des informations qui la concernent, et de recevoir lesdites informations, le cas échéant, conformément à la loi. Aux termes de cette loi, la publication de ces documents est permise aux fins pour lesquelles elle a été demandée.

Article 19Données personnelles

179.En vertu de la Constitution, la collecte et l’utilisation de données à caractère personnel ne sont possibles qu’avec le consentement de la personne concernée, sauf dans les cas prévus par la loi. Toute personne a le droit d’avoir connaissance des données qui la concernent, sauf dans les cas prévus par la loi. La loi sur la protection des données personnelles définit les règles qui régissent la protection et le traitement des données personnelles, garantissant le respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et du droit à la vie privée. Elle définit les «données personnelles» comme toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable, directement ou indirectement, notamment par référence à un numéro d’identification ou à un ou plusieurs éléments spécifiques, propres à son identité physique, physiologique, psychique, économique, culturelle ou sociale. Elle précise aussi que le traitement des données personnelles aux fins de la prévention ou de la répression d’infractions portant atteinte à l’ordre public et à la sécurité nationale, ainsi que de toute autre infraction pénale, ne peut être effectué que par les autorités désignées par la loi.

180.Le droit d’accès aux données personnelles s’exerce conformément aux principes constitutionnels de liberté d’expression et d’information, de liberté de la presse et du secret professionnel; il peut être restreint s’il compromet la sécurité nationale, la politique étrangère, les intérêts économiques et financiers de l’État, ou aux fins de la prévention ou de la répression d’infractions pénales. Si l’accès aux données est refusé pour les raisons précitées, la personne concernée par les données peut demander au Commissaire de vérifier si une exception peut être faite. Le Commissaire informe la personne en question des mesures adoptées.

181.Aux fins de loi sur la protection de la vie privée, on entend par «données judiciaires» toute donnée relative à des décisions prises dans le cadre de procédures pénales, civiles ou administratives ou de documents contenus dans des dossiers à caractère pénal, civil ou administratif. Par «informations sensibles», on entend toute information relative à l’origine ethnique, aux opinions politiques, à l’engagement syndical, à la foi, aux convictions religieuses ou philosophiques, à la santé ou à la vie sexuelle d’un individu ainsi qu’aux poursuites pénales dont il a fait l’objet. Par «traitement des données personnelles», on entend toute opération telle que la collecte, l’enregistrement, l’organisation, la conservation, l’adaptation, la modification, l’extraction, la consultation, l’utilisation, la transmission, la diffusion, le rapprochement ou l’interconnexion, la photographie, la reproduction, la sélection, le verrouillage, l’effacement ou la destruction de données à caractère personnel, même si elles ne sont pas enregistrées dans une base de données. Par «responsable du traitement», on entend la personne physique ou morale, l’autorité publique ou toute autre institution qui détermine les finalités et les moyens du traitement de données à caractère personnel, conformément à la réglementation en vigueur. Par «personne concernée», on entend toute personne physique dont les données personnelles sont traitées. Par «sous-traitant», on entend la personne physique ou morale, l’autorité publique ou toute autre institution qui traite des données à caractère personnel pour le compte du responsable du traitement.

182.La loi garantit la protection des données sensibles, ce qui signifie que le traitement des données qui concernent l’origine ethnique ou raciale, les opinions politiques, l’appartenance à un syndicat, les convictions religieuses ou philosophiques, les condamnations et la santé est interdit. La loi définit des critères précis pour le traitement des données sensibles. La transmission de données sensibles à des fins de recherche scientifique est autorisée si l’intérêt public est avéré. Les personnes qui traitent les données personnelles sont tenues à un devoir de confidentialité. Les données personnelles ne peuvent être collectées qu’à des fins spécifiques, légitimes et clairement définies et doivent être traitées de manière loyale et licite.

183.La loi sur la protection des données personnelles dispose que le responsable du traitement doit fournir à la personne concernée des informations sur les finalités du traitement, les méthodes de traitement, les mesures prises pour protéger ses données, etc. Cette obligation n’est pas de mise lorsque les données n’ont pas été communiquées par la personne concernée, lorsqu’elles sont traitées exclusivement à des fins historiques, statistiques ou de recherche scientifique, lorsque les informations en question sont impossibles à communiquer, et lorsque la personne concernée en est déjà informée.

184.La loi sur la police d’État dispose que la police ne peut collecter et traiter que les données personnelles nécessaires pour mettre un terme à une menace pesant sur l’ordre et la sécurité publics ou aux fins de prévention et de détection des infractions pénales, et d’enquêtes et de poursuites en la matière. Les données personnelles collectées par la police sont conservées dans les dossiers ad hoc, distincts des dossiers administratifs; ces dossiers sont soumis aux dispositions légales en matière de protection des données personnelles et ne peuvent être utilisés que dans ce cadre. Toute personne a le droit de demander des informations sur les données personnelles traitées par la police. Différents règlements administratifs ont également été adoptés, qui régissent notamment l’enregistrement et la gestion électroniques par la banque centrale des données relatives aux personnes arrêtées ou détenues, ou encore la durée de conservation des données dans les systèmes d’enregistrement électronique utilisés par les services de police aux fins de prévention et de détection des infractions pénales, et d’enquêtes et de poursuites en la matière (Règlement no 17 du 11 mai 2012).

Article 20Restrictions au droit aux informations

185.En application de l’article 18 de la Convention et en vertu de la législation albanaise relative à la procédure pénale, aux droits des détenus et à la police d’État, toute personne qui en a reçu l’autorisation par la personne privée de liberté peut obtenir sur elle des informations après avoir communiqué les raisons de sa demande et le type d’informations demandées. Si la demande est introduite par un tiers, celle-ci aura obtenu au préalable le consentement écrit de la personne privée de liberté, sauf dans les cas prévus par la loi. Puisque le droit aux informations est inscrit dans le droit interne, l’avocat ou le proche de la personne privée de liberté a le droit d’introduire un recours judiciaire pour obtenir des informations conformément à la législation applicable.

186.Aux termes de la loi sur l’exécution des condamnations pénales, l’avocat, à la demande de son client ou lorsqu’il l’estime nécessaire, a le droit de s’entretenir avec lui, dans le respect des règles en vigueur, de demander des explications, d’obtenir toute information utile, de demander aux autorités compétentes l’adoption de mesures, de demander l’intervention du procureur lorsque des obstacles se présentent, et de soumettre des requêtes au tribunal pour des questions relevant de sa compétence.

187.La loi sur le droit à l’information précise que ce droit peut être restreint si nécessaire, de manière mesurée et uniquement si le fait de fournir des informations entrave clairement la prévention et la détection des infractions pénales, ou les enquêtes et poursuites en la matière.

Article 21Remise en liberté

188.La loi sur l’exécution des décisions pénales prévoit l’exécution immédiate des dispositions relatives à la réhabilitation des personnes privées de liberté ainsi qu’à la restitution des droits des personnes injustement poursuivies et des droits des entités juridiques lésées par l’infraction. Dans ce cadre, elle traite de la remise en liberté des détenus. La peine d’emprisonnement est considérée comme éteinte, et le détenu est libéré:

a)Lorsqu’il a purgé la totalité de sa peine;

b)Lorsqu’il bénéficie d’une grâce;

c)Lorsqu’il bénéficie d’une amnistie;

d)Lorsqu’il bénéficie de l’abrogation ou de la modification d’une loi en vertu de laquelle il a été condamné;

e)Lorsque la remise en liberté est prononcée par le tribunal. La remise en liberté d’une personne s’effectue conformément aux dispositions de la loi sur l’exécution des condamnations pénales.

189.La loi sur les droits et le traitement des détenus prévoit que la remise en liberté des détenus s’effectue à l’extinction de la peine ou de la décision. L’ordre de libération écrit est remis au directeur de l’établissement dans lequel se trouve le détenu. Si la personne remise en liberté ne possède ni vêtements, ni ressources, le directeur de l’établissement lui accorde une aide financière selon les critères applicables. S’il apparaît qu’elle pourrait éprouver des difficultés à reprendre une vie libre, le directeur de l’établissement en informe les autorités locales de son lieu de résidence. Les parents ou le tuteur légal d’un délinquant juvénile doivent être informés au préalable de sa remise en liberté. Toute remise en liberté doit être notifiée immédiatement (ou, dans certains cas exceptionnels, à l’avance) au tribunal qui a prononcé la peine, aux autorités de police locales et au Ministre de l’intérieur. Dans le cas d’un citoyen étranger, le Ministre des affaires étrangères doit également être informé par l’intermédiaire du Ministre de la justice. La personne remise en liberté se verra remettre un Certificat de libération qui spécifie la durée de sa détention, les réductions de peine ou avantages dont il a bénéficié, et la nature et la durée du travail qu’il a effectué pendant sa détention. À sa demande, il pourra également recevoir une attestation précisant le type de formation professionnelle acquise ainsi qu’un certificat de bonne conduite.

Article 22Prévention de l’obstruction aux recours, manquement à l’obligation d’enregistrement de toute privation de liberté et refus de fournir des informations sur une privation de liberté

190.En vertu de la loi sur l’exécution des décisions pénales, le procureur est tenu de prendre toutes les mesures nécessaires à l’exécution des décisions des tribunaux, d’en contrôler la régularité, d’intervenir auprès des autorités compétentes ou d’adresser une requête au tribunal pour rétablir la loi et les droits auxquels il a été porté atteinte et punir les responsables, conformément à la loi. Lorsqu’il a connaissance de nouveaux faits ou circonstances, et après avoir effectué toutes les vérifications nécessaires, le procureur intervient au titre de cette loi et adresse une requête au tribunal compétent. Lorsque ces faits ou circonstances portent atteinte au bien-fondé ou à la légalité de la décision, les dispositions du Code de procédure pénale s’appliquent.

191.La législation albanaise garantit à toute personne privée de liberté et à toute personne ayant un intérêt légitime le droit d’introduire un recours ou de faire appel de la décision de privation de liberté s’ils estiment que celle-ci est illégale. Ce même droit d’appel ou de recours est garanti à toute personne souhaitant obtenir des informations sur une privation de liberté.

192.Comme on le voit ci-dessus, la loi prévoit une série de dispositions relatives à l’exécution des décisions judiciaires en matière répressive et à l’enregistrement des privations de liberté dans les registres ad hoc. Elle prévoit également des sanctions en cas de manquement à l’obligation d’enregistrement de toute privation de liberté, ainsi que l’enregistrement de toute information pertinente conformément à la loi.

Article 23Formation des autorités compétentes

193.Les agents de la force publique (fonctionnaires de police, agents du système pénitentiaire, procureurs, juges) bénéficient de formations aux conventions internationales des droits de l’homme ainsi qu’à la législation nationale en matière de droits fondamentaux des personnes privées de liberté; la Direction générale de la police fournit également des formations continues sur les droits des détenus, conformément à la loi sur la police d’État. La législation relative aux droits des détenus met l’accent sur l’importance du renforcement de la formation professionnelle des employés de prisons et des services pénitentiaires; un Centre de formation a été créé au sein de la Direction générale des prisons en vue de former le personnel des prisons à la sécurité et au respect des droits des détenus ainsi qu’à leur réinsertion dans la société. De même, les procureurs et les juges bénéficient d’une formation professionnelle continue portant notamment sur les conventions internationales des droits de l’homme et la législation nationale dans le domaine des droits des personnes privées de liberté.

Article 24Droits de la «victime»

194.La Constitution garantit à tous le droit à la réparation et/ou à l’indemnisation, conformément à la loi, en cas de préjudice résultant d’un acte, d’une action ou d’une omission illicites de la part des organes de l’État. Aux termes de la loi, toute personne lésée par un acte ou une omission ayant entraîné la violation de leur intégrité peut être qualifiée de victime. Le Code pénal ne fournit pas de définition générale de ce terme, mais différentes qualifications de la «victime» sont envisagées, au cas par cas, sur la base de la jurisprudence.

195.Le Code de procédure pénale dispose que toute personne ayant subi un préjudice du fait de la commission d’une infraction, ou ses descendants, ont de droit de demander l’ouverture de poursuites à l’encontre de l’auteur de l’infraction et réparation pour les dommages subis. Une personne qui n’a pas de capacité juridique peut faire valoir ses droits par l’intermédiaire de son représentant légal. Toute personne lésée a le droit de déposer une plainte auprès des autorités compétentes et de faire une demande d’obtention de preuves; si cette demande est refusée, elle peut faire appel de ce refus. Toute personne lésée du fait de la commission d’une infraction prévue par le Code pénal a le droit de se constituer partie civile et d’assister au procès afin de témoigner et de demander réparation. Le Code définit également les procédures d’indemnisation à suivre en cas de détention arbitraire, ainsi que pour les dommages causés du fait d’un acte illicite ou d’une faute.

196.La loi no 9381 du 28 avril 2005 sur la réparation en cas de détention arbitraire définit les cas dans lesquels une personne peut obtenir réparation si elle a été arbitrairement privée de liberté, y compris lorsque la durée et les modalités de cette privation sont injustifiées, ainsi que les procédures de réclamation et d’indemnisation. Toute personne ayant été acquittée ou ayant bénéficié d’un non-lieu en application d’une décision du tribunal, et toute personne ayant été maintenue en détention au-delà des délais fixés par la peine peut faire valoir ce droit à la réparation.

197.La loi sur les droits des détenus dispose que tout détenu a droit à être réinséré dans la vie familiale, sociale et économique. Ce travail de réinsertion commence dès l’incarcération, et se poursuit pendant toute la durée de la détention et après la remise en liberté. Les établissements d’exécution des peines se chargent de l’élaboration des programmes de réinsertion, en coopération avec les services de probation, les services sociaux, les autorités locales et les ONG. Les détenus font l’objet d’un traitement personnalisé, compte tenu des critères définis par l’État et des caractéristiques qui leur sont propres. Un plan de réinsertion est élaboré pour chacun d’entre eux; et un programme de traitement spécifique est prévu pour certaines catégories de détenus présentant des besoins particuliers.

198.La Constitution dispose que toute personne a le droit de s’organiser en collectivité à des fins licites; dans ce contexte, elle garantit le droit de former des organisations et des associations ayant pour objet de contribuer à l’établissement des circonstances de disparitions forcées et de participer librement à de telles organisations ou associations, comme le demande l’article 24 de la Convention.

199.La loi sur l’indemnisation des ex-prisonniers politiques du régime communiste détermine les critères de sélection des bénéficiaires, les montants à attribuer et les procédures d’attribution des indemnités dues aux ex-condamnés politiques directement persécutés par le régime communiste, qui ont purgé des peines de prison ou ont été soumis à des traitements médicaux imposés en vertu d’une ou plusieurs décisions définitives prises par des tribunaux, des tribunaux spéciaux ou sur ordre des organes chargés des poursuites entre le 30 novembre 1944 et le 1er octobre 1991.

200.Cette loi prévoit l’indemnisation des familles des victimes injustement exécutées ou assassinées pour des motifs politiques, par décision d’un tribunal, d’un tribunal spécial ou sur ordre des organes chargés des poursuites (entre le 30 novembre 1944 et le 1er octobre 1991), ainsi que des personnes injustement internées ou déportées. Par cette loi, le Gouvernement albanais entend dédommager les ex-prisonniers politiques du régime communiste qui sont toujours en vie, les familles des personnes exécutées ou déportées dans des camps, traduisant ainsi la volonté d’un État démocratique de condamner les crimes perpétrés par un régime communiste totalitaire et de garantir aux victimes et à leur famille une vie meilleure. Outre l’indemnisation financière, des mesures légales ou administratives peuvent également être prises, à n’importe quel moment, afin de rétablir la justice, de rendre aux victimes leur dignité sociale et des créer les conditions nécessaires à leur réhabilitation. La loi précise que les ex-prisonniers politiques survivants seront les premiers à être indemnisés, le fonds d’indemnisation étant réparti comme suit: 70 pour cent pour les ex-prisonniers politiques survivants et 30 pour cent pour les familles de prisonniers décédés.

Article 25Protection des enfants

201.La Constitution et la législation albanaises garantissent aux enfants, aux femmes enceintes et aux mères de nouveau-nés la protection de l’État contre toute forme de violence, d’abus ou d’exploitation. La loi no 10347 du 4 novembre 2010 sur la protection des droits de l’enfant a pour objectif de protéger les droits de l’enfant, et repose sur le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. En vertu de cette loi, tout enfant doit jouir des droits suivants: droit à la vie; droit au développement; droit à un nom, à une nationalité et à une identité; droit de connaître ses parents et de vivre avec eux; droit au regroupement familial; droit de retour; droit d’expression; droit à l’éducation, aux soins de santé et à un niveau de vie décent; droit à la protection sociale; droit à la protection contre toute forme de violence et d’abus, contre l’exploitation économique, contre la traite, contre toute forme d’exploitation sexuelle, contre la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants; protection de l’enfant privé de liberté; droit aux soins parentaux; et droits aux soins de substitution (adoption, placement en famille d’accueil ou dans un établissement de protection sociale).

202.S’agissant de la prévention et de la répression de la soustraction d’enfants soumis à une disparition forcée ou dont le père, la mère ou le représentant légal sont soumis à une disparition forcée, ou d’enfants nés pendant la captivité de leur mère soumise à une disparition forcée, le Code pénal énonce ce qui suit: «la soustraction d’enfants soumis à une disparition forcée ou dont le père, la mère ou le représentant légal sont soumis à une disparition forcée, ou d’enfants nés pendant la captivité de leur mère soumise à une disparition forcée, constitue une infraction passible d’une peine allant de cinq à dix ans d’emprisonnement.»

203.L’enlèvement constitue une infraction au regard du Code pénal: «L’enlèvement et le recel d’enfant, ou la substitution d’un enfant par un autre, sont passibles d’une peine allant de vingt ans de prison à la réclusion à vie ou à la peine de mort». Aux termes de ce code, on entend par «soustraction d’enfant» le fait de soustraire un enfant à la personne qui exerce sur lui l’autorité parentale ou à son tuteur légal.

204.En vertu du Code de la famille, le consentement des deux parents est requis pour l’adoption de mineurs. Si l’un des parents est décédé, n’est pas en mesure d’exprimer sa volonté ou a été déchu de ses droits parentaux, le consentement de l’autre parent suffit. Lorsque les deux parents sont décédés, ne sont pas en mesure d’exprimer leur volonté ou sont inconnus, le tribunal statue sur la possibilité d’adopter l’enfant. Les parents biologiques font part de leur consentement à l’adoption devant le tribunal compétent. Ils ont le droit de se rétracter dans les trois mois. Ce délai peut être prolongé, jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue par le tribunal, s’ils constatent que la relation entre l’enfant et les parents adoptifs ne fonctionne pas. Si un membre de la famille de l’enfant, en se basant sur les dispositions du Code de la famille, a des raisons légitimes de souhaiter l’annulation ou la révocation de la procédure d’adoption, il peut en faire la demande au tribunal, qui examinera le cas et en informera simultanément le Comité d’adoption.

205.En cas de déclaration d’abandon d’enfant, le tribunal compétent demande à la personne qui souhaite déclarer l’abandon si toutes les mesures ont été prises pour retrouver les parents biologiques de l’enfant et le leur restituer. Toute personne défendant l’intérêt légitime de l’enfant, ainsi que le procureur, peuvent intervenir dans le processus d’adoption et ont le droit de faire appel de la décision du tribunal. S’il apparaît, au cours de la procédure d’adoption, qu’une demande de reconnaissance de paternité a été introduite, la procédure est suspendue jusqu’à ce qu’un tribunal ait statué sur la filiation. Le Code de la famille contient des dispositions relatives à la déclaration d’abandon d’un mineur placé en institution, à la demande du directeur de cette institution, lorsque les parents biologiques ne manifestent aucun intérêt pour l’enfant.

206.La loi relative aux procédures d’adoption et au Comité chargé de la question des adoptions définit les critères et procédures d’adoption à l’intérieur et à l’extérieur du pays, en se fondant toujours sur le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. Dans le cas d’une adoption internationale, le Comité albanais chargé de la question des adoptions, conformément à cette loi et aux dispositions du Code de la famille, soumet au tribunal les informations suivantes:

a)La confirmation que l’enfant n’a pu être adopté en Albanie au cours des six derniers mois;

b)La preuve que dans le pays des candidats adoptants, l’enfant bénéficiera des mêmes droits qu’en Albanie, et que l’adoption est irrévocable.

207.Le Code pénal prévoit un certain nombre d’infractions touchant les enfants et les peines applicables dans chaque cas: abandon d’enfant, non-déclaration d’un changement de domicile, enlèvement, recel et substitution d’enfants, violence domestique, ou encore traite (recrutement, recel, achat et vente d’enfants), maltraitance sur mineurs (recrutement, vente, transport, transfert ou utilisation d’enfants à des fins de prostitution ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, travail forcé et autres services, esclavage et pratiques assimilées, trafic et transplantation d’organes, et toute autre forme d’exploitation).