Nations Unies

CERD/C/IRL/CO/3-4/Add.1

Convention internationale sur l ’ é limination de toutes les formes de  discrimination raciale

Distr. générale

3 juillet 2012

Français

Original: anglais

Comité pour l ’ éliminati on de la discrimination raciale

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 9 de la Convention

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Irlande

Additif

Informations communiquées par le Gouvernement irlandais sur la suite donnée aux observations finales du Comité (CERD/C/IRL/CO/3-4) *

[24 mai 2012]

Réponse aux questions soulevées dans le paragraphe 11 des observations finales du Comité (CERD/C/IRL/CO/3-4)

1.L’Irlande ne considère pas que la récession économique actuelle a entraîné une inversion des résultats qu’elle a obtenus dans la lutte contre la discrimination raciale.

2.S’il est vrai que des coupes importantes ont été opérées au cours des années récentes dans les budgets alloués à l’Autorité pour l’égalité et à la Commission des droits de l’homme, ces crédits ont été largement protégés dans le budget 2012 en dépit des très fortes réductions des dépenses de l’ensemble du secteur public opérées cette année en Irlande. Le Gouvernement a annoncé des propositions tendant à fusionner l’Autorité pour l’égalité et la Commission des droits de l’homme. Ce fusionnement permettra de renforcer l’infrastructure irlandaise de protection de l’égalité et des droits de l’homme, notamment quant à son rôle et à ses fonctions.

Réponse aux questions soulevées dans le paragraphe 12 des observations finales

3.En octobre 2011, au cours de l’examen par un groupe de travail du Conseil des droits de l’homme de deux rapports présentés au Conseil par l’Irlande au titre de la procédure d’Examen périodique universel du Conseil, il a été demandé au Ministre de la justice et de l’égalité, entre autres choses, de donner des précisions sur la situation des gens du voyage irlandais dans la société irlandaise. Une délégation a expressément recommandé à l’Irlande de reconnaître les gens du voyage comme une minorité ethnique tandis que d’autres interventions sont restées plus générales. Le Ministre a répondu que la question de la reconnaissance des gens du voyage était examinée attentivement. Ce processus d’examen se poursuit.

4.Cette question a été également discutée au cours d’un séminaire sur le troisième rapport des États parties sur la mise en œuvre de la Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales, le 11 novembre 2010. Plusieurs personnes appartenant à la communauté des gens du voyage irlandais se sont prononcées pour ou contre la reconnaissance des gens du voyage irlandais comme un groupe ethnique distinct. En dépit de forts désaccords entre les personnes présentes, on s’est accordé à reconnaître qu’il convenait de susciter un dialogue national entre les gens du voyage irlandais en vue de parvenir à une décision définitive sur la question.

5.Cette question a été longuement discutée au cours des réunions du Comité consultatif national pour le suivi des gens du voyage. Les discussions engagées avec les cinq organisations nationales des gens du voyage ont fait apparaître l’existence, au sein de la communauté des gens du voyage irlandais, de divergences sur la question de l’ethnicité.

6.Il importe que ce débat s’instaure au sein de la communauté des gens du voyage irlandais et que les incidences et conséquences d’une telle reconnaissance soient pleinement examinées.

Réponse aux questions soulevées dans le paragraphe 15 des observations finales

1.Projet de loi sur l’immigration et la sécurité de résidence

7.Le Ministre a décidé de publier de nouveau la loi sur l’immigration et la sécurité de résidence. Les dispositions relatives au réexamen juridictionnel, qui y figurent, font partie des dispositions que le Ministre examine actuellement.

8.Il importe de noter qu’il n’existe absolument rien dans l’ordre juridique de l’Irlande qui empêche d’octroyer des permis de résidence séparée aux femmes victimes d’un conjoint violent. Un certain nombre de permis ont déjà été octroyés dans des cas de cette nature. Les demandes sont examinées avec sympathie, au cas par cas, méthode qui sera maintenue. Il n’est donc pas nécessaire de légiférer. Même si une action législative était réellement nécessaire dans ce domaine, elle passerait par l’adoption de règlements (décrets ministériels) plutôt que par la voie de la loi sur l’immigration et la sécurité de résidence. Toutefois, les autorités chargées de l’immigration détermineront s’il faut en faire davantage pour faire connaître les possibilités existantes.

2.Projet de loi sur les mutilations génitales féminines

9.En janvier 2011, le Gouvernement alors au pouvoir a publié le texte d’un projet de loi interdisant expressément les mutilations génitales féminines ainsi que des infractions connexes, dont certaines des dispositions ont une portée extraterritoriale. Ce texte de loi, conçu du point de vue des droits de l’homme, stipule que le droit de chacun de pratiquer ses propres traditions culturelles et ses propres croyances ne saurait justifier la pratique des mutilations génitales féminines qui est considérée sur le plan international comme une forme de violence fondée sur le sexe. Le projet de loi, conçu au Seanad (Sénat) a été de nouveau inscrit à l’ordre du jour de cette assemblée le 1er juin 2011 puis adopté par la Dáil (Chambre des représentants) et le Seanad. Il a été signé par le Président de l’Irlande le 2 avril 2012. Il faut espérer que le décret d’application de la loi sera publié avant que la Dáil n’ajourne ses travaux pour l’été 2012.

3.Loi sur l’interdiction de l’incitation à la haine, de 1989

10.Il semblerait qu’il y ait un malentendu en ce qui concerne la situation de l’examen de la loi sur l’interdiction de l’incitation à la haine, de 1989, à la date indiquée par le Comité (février 2011). S’il est exact que l’examen de projets de loi tels que le projet de loi sur l’immigration et la protection de la résidence de 2010 et le projet de loi sur la justice pénale (mutilations génitales féminines), de 2011, n’est pas allé à son terme en raison du changement de gouvernement, l’examen officiel de la loi de 1989 était par contre achevé à cette date.

11.L’examen de la loi de 1989 a débouché sur la publication de Research into Racism and the Criminal Law,étude effectuée par le Centre de recherche sur la justice pénale de l’Université de Limerick à la demande du Comité consultatif national sur le racisme et l’interculturalisme dans le cadre du Plan d’action national contre le racisme (2005-2008). Les conclusions de cette étude ont été publiées le 18 décembre 2008.

12.Les auteurs ont affirmé que des changements de la loi pénale seraient à eux seuls insuffisants pour combattre le racisme et ont fait observer qu’il était clairement établi aux niveaux national et international, que de meilleurs résultats seraient obtenus en investissant davantage dans les mesures sociales et l’éducation.

13.Les auteurs du rapport n’ont formulé qu’une seule recommandation concernant le droit pénal. Ayant pesé les arguments pour et contre l’aggravation des dispositions pénales, ils ont recommandé une disposition inspirée de l’article 11 4) de la loi sur la justice pénale de 1984, en vertu de laquelle les juges doivent considérer le racisme comme une circonstance aggravante de la peine.

14.La disposition de la loi de 1984 (condamnations consécutives) sur les circonstances aggravantes de la peine a été adoptée pour régler un problème très spécifique: celui des personnes qui commettent des infractions, dans de nombreux cas des infractions multiples, alors qu’elles sont en liberté sous caution. Cependant, l’institution de circonstances aggravantes de la peine encourue pour les infractions à motivation raciste entraînerait une restructuration des peines prévues pour les infractions pénales mineures (l’agression ou les dégradations de biens par exemple) en vue d’accroître les peines, ce qui aurait des incidences importantes sur la loi pénale.

15.En Irlande, le législateur adopte les lois pénales qui généralement fixent les peines maximales encourues sous forme d’amende ou d’emprisonnement, ou les deux à la fois. En règle générale, il n’existe pas de directives pour la fixation des peines. Dans l’ordre juridique de l’Irlande, le juge a une grande latitude pour fixer la peine dans chaque cas dont il est saisi, en prenant en considération la jurisprudence pertinente, y compris les recours. Les tribunaux peuvent ainsi prendre en considération l’ensemble des circonstances de l’infraction, notamment toutes les circonstances aggravantes ou atténuantes pertinentes. La gravité de l’infraction, les circonstances dans lesquelles elle a été commise, les antécédents judiciaires du prévenu et les préjudices subis par la victime comptent parmi les facteurs essentiels qui sont pris en considération avant de rendre une décision. Le juge doit prendre en compte les circonstances de l’infraction et la personnalité de son auteur. En outre, le Directeur des poursuites publiques peut faire appel de la condamnation s’il l’estime trop clémente (loi sur la justice pénale, 1993).

16.En outre, il serait très difficile de justifier une disposition législative qui aggraverait la peine encourue en cas de motivations racistes sans adopter des dispositions analogues à l’égard des crimes (qui peuvent être encore plus nombreux et tout aussi répréhensibles) commis contre d’autres groupes vulnérables, par exemple les enfants et les personnes âgées.

17.En tout état de cause, il n’est pas envisagé à l’heure actuelle d’adopter des directives fixant les peines encourues pour les infractions aggravées par des motivations racistes.

18.Les auteurs du rapport ont en outre estimé qu’il ne serait pas bon d’introduire dans le droit irlandais la notion de circonstances aggravantes en cas de motivations racistes. Pour parvenir à cette conclusion, ils ont examiné le fonctionnement de la règle des circonstances aggravantes pour motivations racistes dans des pays voisins. Ils ont noté la difficulté de prouver qu’une infraction a obéi à des motivations racistes et le faible nombre de condamnations prononcées dans ces pays. Ils ont en outre estimé, eu égard à la portée de la législation relative à l’égalité dans le droit irlandais, que les circonstances aggravantes devraient s’étendre au-delà des infractions racistes.

Réponse aux questions soulevées dans le paragraphe 16 des observations finales

19.L’Irlande a un système dualiste, en vertu duquel les instruments internationaux auxquels le pays devient partie ne sont intégrés dans l’ordre juridique interne que lorsque l’Oireachtas (le Parlement) en a ainsi décidé en adoptant une loi. Selon le dispositif constitutionnel concernant les accords internationaux, le Gouvernement, dans l’exercice du pouvoir exécutif, peut contracter des accords internationaux, étant entendu que lesdits accords doivent être soumis à la Dáil Eireann (Chambre des représentants) et, si l’accord entraînera des dépenses publiques, que l’État ne peut être lié par ces dispositions que si elles ont été approuvées par la Chambre (Crotty v. An Taoiseach (1987) IR p. 792). Selon le droit interne, l’État n’est pas tenu de ratifier une convention quelle qu’elle soit simplement parce qu’elle a été signée. L’Irlande ne peut devenir partie à un accord et un accord ne peut être considéré comme tel tant qu’il n’a pas été ratifié. Une fois qu’il a été ratifié, tout accord international a force obligatoire à l’égard de l’État en vertu du droit international.

20.Tant que le Parlement n’a pas décidé que la Convention fait partie du droit interne de l’État, les tribunaux irlandais ne peuvent l’appliquer lorsqu’elle est contraire au droit national, reconnaît des droits ou impose des obligations en sus de ceux qui sont reconnus ou imposés par le droit interne (voir Re Ó Laighléis (1960) IR 93, p. 124 et 125).

21.Il convient de souligner que, au lieu d’intégrer une convention internationale dans le droit interne en application de l’article 29.6 de la Constitution, le Parlement procède régulièrement d’une autre manière qui consiste à promulguer une loi ou des lois donnant effet aux obligations énoncées dans l’accord. Il a procédé de cette manière dans le cas de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Étant donné que le fait d’adhérer à une convention n’entraîne pas généralement l’obligation de l’incorporer dans le droit interne, l’Irlande a fait le choix de s’acquitter, en légiférant sur le plan national, des obligations internationales qui s’imposent à elle lorsqu’elle adhère à des conventions. Une fois que les dispositions nécessaires ont été prises pour que toutes les obligations établies dans la convention considérée soient reconnues, il n’existe aucune raison particulière de l’incorporer dans le droit national.