Nations Unies

CCPR/C/BGR/CO/4

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

15 novembre 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Observations finales concernant le quatrième rapport périodique de la Bulgarie *

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le quatrième rapport périodique de la Bulgarie (CCPR/C/BGR/4) à ses 3542e et 3543e séances (voir CCPR/C/SR.3542 et 3543), les 16 et 17 octobre 2018. À sa 3559e séance, le 29 octobre 2018, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir accepté la procédure simplifiée de présentation des rapports et d’avoir soumis son quatrième rapport périodique en s’appuyant sur la liste de points établie au préalable dans le cadre de cette procédure (CCPR/C/BGR/QPR/4). Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte de renouer un dialogue constructif avec la délégation de l’État partie au sujet des mesures prises pendant la période considérée pour appliquer les dispositions du Pacte. Il remercie l’État partie des réponses fournies oralement par sa délégation et des informations complémentaires qui lui ont été communiquées par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption par l’État partie des mesures législatives et institutionnelles ci-après :

a)L’adoption en 2012 de la loi portant modification de la loi sur le ministère de l’intérieur, qui a introduit le critère de « l’absolue nécessité » dans l’utilisation des armes à feu, de la force physique et des dispositifs auxiliaires par les membres des forces de l’ordre ;

b)L’adoption en 2015 de la loi visant à modifier et à compléter la Constitution, qui a porté création de chambres distinctes pour les juges et les procureurs au sein du Conseil supérieur de la magistrature ;

c)L’adoption en 2017 de la loi portant modification de la loi sur l’exécution des peines et la détention avant jugement, du Code pénal et du Code de procédure pénale ;

d)Les modifications apportées en 2016 et 2017 à la loi sur les étrangers, qui établissent une procédure de détermination du statut d’apatride, interdisent la détention de courte durée des enfants non accompagnés et introduisent de nouvelles mesures de substitution à la détention pour les migrants en situation irrégulière ;

e)La création en 2013 du mécanisme de coordination nationale pour les questions relatives aux droits de l’homme ;

f)La création en 2015 d’un mécanisme juridique chargé des indemnisations pour donner suite aux constatations des organes conventionnels.

4.Le Comité accueille également avec satisfaction la ratification par l’État partie de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, le 22 mars 2012.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Mise en œuvre du Pacte et du Protocole facultatif s’y rapportant

5.Le Comité note que l’État partie coopère dans le cadre de la procédure de suivi des précédentes observations finales, mais il regrette que certaines recommandations n’aient pas encore été mises en œuvre. Il note également que le Pacte n’a pas été souvent invoqué devant les tribunaux nationaux (art. 2).

6. L’État partie devrait veiller à ce que son mécanisme de coordination nationale pour les questions relatives aux droits de l’homme garantisse la pleine application des observations finales et des constatations adoptées par le Comité ainsi que le droit des victimes de disposer d’un recours utile en cas de violation du Pacte, conformément aux paragraphes 2 et 3 de l’article 2. Il devrait redoubler d’efforts pour faire connaître le Pacte et le Protocole facultatif s’y rapportant au grand public, aux avocats, aux procureurs et aux juges.

Institutions nationales des droits de l’homme

7.Le Comité accueille avec satisfaction les modifications apportées en 2018 à la loi sur le médiateur, mais il regrette de ne pas avoir obtenu de précisions sur les mesures prises pour rendre la Commission pour la protection contre la discrimination conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). En outre, il note avec préoccupation que l’État partie n’a pas encore fait les démarches voulues pour que le Sous‑Comité d’accréditation de l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme octroie le statut « A » à la fois au médiateur et à la Commission (art. 2).

8. L’État partie devrait prendre toutes les mesures voulues pour rendre ses institutions nationales des droits de l’homme conformes aux Principes de Paris, et notamment veiller à ce que les processus de sélection soient indépendants, transparents et participatifs, et à ce que ces institutions soient dotées des ressources suffisantes pour s’acquitter de leurs fonctions efficacement.

Discours de haine et infractions motivées par la haine

9.Le Comité est préoccupé par les informations indiquant une multiplication des discours de haine et des infractions motivées par la haine visant, en particulier, les membres de la communauté rom et des minorités religieuses, les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes, et les migrants et les demandeurs d’asile, et notamment par les propos racistes, xénophobes et intolérants qui sont diffusés à la télévision, dans les médias et sur Internet par des personnes aux plus hauts niveaux de l’État et sont tenus pendant les campagnes électorales. Il prend note des réformes législatives visant à élargir la notion d’infraction motivée par la haine, mais demeure préoccupé de constater que dans le Code pénal et la loi sur la radio et la télévision, l’orientation sexuelle et l’identité de genre ne sont pas inscrites au nombre des motifs de discrimination et des motivations haineuses. De surcroît, il relève avec préoccupation que l’État partie n’a pas fourni d’informations sur les discours de haine et les infractions motivées par la haine, et que ces infractions ne donnent pas dûment lieu à des enquêtes et des poursuites, la motivation haineuse n’étant dans bien des cas pas prise en considération, et que le nombre de condamnations est extrêmement faible (art. 2, 3, 18 à 20, 26 et 27).

10. L’État partie devrait :

a) Modifier le Code pénal et la loi sur la radio et la télévision en inscrivant expressément l’orientation sexuelle et l’identité de genre au nombre des motivations haineuses et des motifs de discrimination ;

b) Veiller à ce que tout appel à la haine ethnique ou raciale constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence soit interdit en droit et dans la pratique et à ce que les personnes qui fomentent la haine envers les groupes minoritaires soient amenées à répondre de leurs actes, fussent-elles des agents de l’État ;

c) Faire véritablement appliquer les dispositions pénales punissant les infractions motivées par la haine et les discours de haine en faisant en sorte que les infractions de ce type soient signalées et fassent l’objet d’une enquête, que les auteurs soient poursuivis et dûment punis et que les victimes reçoivent une réparation intégrale ;

d) Renforcer les capacités d’enquête des services de police en ce qui concerne les infractions motivées par la haine et les discours de haine punis par le droit pénal, y compris ceux diffusés sur Internet, et renforcer le mandat du Conseil des médias électroniques et les moyens dont cet organe dispose pour prévenir et punir les propos haineux tenus dans les médias .

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

11.Le Comité note avec préoccupation que dans la loi sur la protection contre la discrimination, l’identité de genre ne figure pas parmi les motifs de discrimination, que les couples homosexuels ne peuvent pas conclure d’union légale ni adopter des enfants et que les personnes mariées à l’étranger et leurs enfants n’ont pas accès aux services d’état civil. Il est également préoccupé par les obstacles juridiques au changement de sexe, notamment les informations selon lesquelles les tribunaux subordonnent ce changement à la prise d’un traitement hormonal. En outre, il prend note avec préoccupation de la persistance des stéréotypes, des préjugés, de l’hostilité et de la discrimination à l’égard des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes, dont témoigne entre autres l’arrêt no 13/2018 rendu par la Cour constitutionnelle le 27 juillet 2018 (art. 2, 3, 16, 17, 19, 20, 23 et 26).

12. L’État partie devrait :

a) Éliminer, dans la législation et dans la pratique, la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, et ce, dans tous les domaines, y compris l’emploi, le mariage et les arrangements familiaux, et garantir l’accès à un recours effectif en cas de discrimination quelle qu’elle soit ;

b) Modifier la loi sur la protection contre la discrimination de sorte que l’identité de genre figure expressément parmi les motifs de discrimination et que les couples homosexuels soient placés sur un pied d’égalité avec les autres ;

c) Établir une procédure administrative simple, facile d’accès et respectueuse des dispositions du Pacte aux fins du changement de sexe sur les actes d’état civil  ;

d) S’employer plus activement à combattre les stéréotypes et les préjugés négatifs à l’égard des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes et à promouvoir la tolérance en menant des activités de formation et de sensibilisation à l’intention des fonctionnaires et du grand public, notamment dans les écoles publiques.

Discrimination à l’égard des Roms

13.Le Comité prend note des mesures prises pour améliorer la situation de la communauté rom, mais il demeure néanmoins préoccupé (CCPR/C/BGR/CO/3, par. 7, 15 et 24) de constater que les Roms continuent d’être marginalisés et victimes de discrimination, en particulier dans les domaines du logement, de l’éducation, de la santé et de l’emploi. Il est particulièrement préoccupé par les informations selon lesquelles les enfants roms sont de plus en plus souvent soumis à une ségrégation de fait à l’école, ainsi que par les nombreuses expulsions forcées exécutées sans préavis et en conséquence desquelles des familles se retrouvent sans abri faute de logements de remplacement satisfaisants à leur disposition. Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas modifié la loi sur les biens de l’État, la loi sur les biens municipaux et la loi sur l’aménagement du territoire de sorte que la démolition des constructions illégales soit soumise au principe de proportionnalité. Compte tenu des informations selon lesquelles les actes de discrimination visant la communauté rom engagent rarement la responsabilité de leurs auteurs, il regrette également l’absence de statistiques indiquant le nombre de plaintes déposées pour ce type d’actes. Le Comité demeure en outre préoccupé par la persistance de la pratique du mariage précoce, en particulier dans la communauté rom, et par l’étroite corrélation entre cette pratique et le décrochage scolaire (art. 2, 23, 24, 26 et 27).

14. L’État partie devrait :

a) Redoubler d’efforts pour lutter contre les stéréotypes, les préjugés, l’intolérance et la discrimination généralisée dont fait l’objet la population rom, et veiller à ce que les plaintes déposées donnent lieu à une enquête, les auteurs soient amenés à répondre de leurs actes et les victimes aient accès à une réparation intégrale ;

b) Surveiller et éradiquer la ségrégation scolaire des enfants roms et renforcer les mesures visant à prévenir le décrochage scolaire ;

c) Modifier la législation de sorte à soumettre la démolition des constructions illégales au principe de proportionnalité, à éviter les expulsions forcées et à garantir que celles qui ne peuvent pas être évitées respectent la procédure régulière et que les personnes expulsées bénéficient d’un logement de remplacement adéquat et aient accès à des voies de recours en justice et à une réparation ;

d) Veiller à ce que la stratégie nationale d’intégration des Roms pour 2012 ‑ 2020 soit dûment appliquée, notamment en allouant des fonds suffisants à son exécution ;

e) Intensifier l’action menée pour prévenir les mariages d’enfants, et notamment mettre en œuvre au niveau local des campagnes de sensibilisation faisant intervenir les familles, les populations et les enfants eux-mêmes.

Discrimination à l’égard des personnes vivant avec le VIH/sida

15.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les personnes vivant avec le VIH/sida font l’objet de stigmatisation et de discrimination, y compris de la part de médecins qui refusent de leur prodiguer des soins de peur de contracter la maladie (art. 2, 6 et 26).

16. L’État partie devrait redoubler d’efforts pour que les personnes vivant avec le VIH/sida ne soient pas victimes de stigmatisation, de préjugés et de discrimination et aient pleinement accès, dans des conditions d’égalité, à des soins médicaux et à des soins préventifs.

Discrimination à l’égard des personnes handicapées

17.Le Comité est préoccupé de constater que, d’après les informations dont il dispose, le taux de chômage est élevé parmi les personnes handicapées, qui sont victimes de discrimination à l’embauche, les aménagements raisonnables ne sont pas reconnus comme une forme de discrimination et les enfants handicapés sont victimes de ségrégation scolaire. Il relève avec préoccupation que les personnes présentant des déficiences intellectuelles ou psychosociales qui sont privées de la capacité juridique sont automatiquement aussi privées du droit de se marier et de voter, ne peuvent pas saisir directement les tribunaux pour demander le rétablissement de la capacité juridique et restent placées sous la tutelle de l’institution où elles sont internées. Il note que le projet de loi de 2016 sur les personnes physiques et les mesures d’appui à leur apporter prévoit le remplacement du système de tutelle par un système d’aide à la prise de décisions, mais demeure néanmoins préoccupé par le retard pris dans l’adoption de la loi. De surcroît, il constate que l’État partie s’emploie activement à éviter l’internement, mais note avec préoccupation que cette mesure continue de l’emporter sur la prise en charge au niveau local et que, d’après des informations, les personnes présentant des déficiences intellectuelles ou psychosociales internées dans les hôpitaux psychiatriques et les foyers sociaux sont maltraitées, les moyens de contrainte mécaniques et chimiques sont trop fréquemment employés et des cas de mort en internement n’ont pas fait l’objet d’une enquête alors que les victimes présentaient des blessures traumatiques (art. 2, 6, 7, 9, 10, 14, 16, 23, 25 et 26).

18. L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que les personnes handicapées ne soient victimes de discrimination ni en droit ni en pratique, en particulier en ce qui concerne l’accès à l’éducation inclusive, aux aménagements raisonnables, à l’emploi et au mariage, ainsi que pour ce qui est du droit de voter et de se présenter aux élections qui, au regard de l’article 25 du Pacte, ne saurait être restreint pour des motifs disproportionnés ou sans rapport raisonnable et objectif avec la capacité de l’intéressé de voter ou de se présenter aux élections ;

b) Faire en sorte que la capacité juridique ne soit pas soumise à d’autres restrictions que celles qui sont nécessaires, que les éventuelles restrictions soient imposées dans le strict respect des garanties juridiques et procédurales applicables, et que les personnes touchées puissent bénéficier d’une représentation juridique gratuite et effective et rapidement obtenir le contrôle juridictionnel des décisions relatives à leur capacité juridique ;

c) Accélérer la suppression du recours à l’internement des personnes handicapées en faveur d’une prise en charge au niveau local, faire en sorte que les mesures d’internement et de contention des personnes présentant des déficiences intellectuelles ou psychosociales soient toujours strictement nécessaires et proportionnées à l’objectif consistant à protéger la personne concernée contre tout danger grave pour elle-même ou menace pour autrui et ne soient imposées qu’en dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible, et veiller à ce que les personnes internées puissent demander le contrôle juridictionnel des décisions les concernant, ainsi qu’il est prévu aux articles 9 et 14 du Pacte ;

d) Prendre des mesures pour prévenir toutes les formes de mauvais traitements pouvant être infligés aux personnes handicapées dans les établissements psychiatriques et les foyers sociaux, notamment en soumettant ces institutions à un contrôle indépendant et efficace, en prévoyant la possibilité de recourir à des mécanismes de plainte et en faisant en sorte que tout abus donne véritablement lieu à une enquête et à des sanctions et que les responsables soient amenés à répondre de leurs actes au pénal s’il y a lieu.

Égalité des hommes et des femmes

19.Le Comité prend note des mesures législatives et gouvernementales prises pour promouvoir l’égalité des sexes, mais demeure préoccupé par la persistance de l’écart de rémunération entre hommes et femmes et par la répartition inégale des responsabilités entre hommes et femmes pour ce qui est de la prise en charge des membres de la famille dépendants. Le Comité relève avec préoccupation que les femmes, en particulier les femmes roms, sont toujours sous-représentées aux postes de décision dans le secteur public et dans le secteur privé (art. 2, 3, 25 et 26).

20. L’État partie devrait :

a) Poursuivre ses efforts en vue de combler l’écart de rémunération et combattre les idées reçues concernant les rôles et les responsabilités des femmes au sein de la famille et de la société en général, en mettant en place des programmes de sensibilisation, d’éducation et de formation ;

b) Accroître la proportion de femmes occupant des postes de décision dans le secteur public et dans le secteur privé, en prenant notamment, lorsque cela est nécessaire, les mesures temporaires spéciales voulues pour donner effet aux dispositions du Pacte.

Violence à l’égard des femmes, y compris la violence familiale

21.Le Comité prend acte des modifications qu’il est prévu d’apporter à la législation pour que soient incriminées toutes les formes de violence familiale, ainsi que des mesures prises pour remédier à l’absence de statistiques officielles sur les cas de violence familiale, mais il relève avec préoccupation que, d’après les informations dont il dispose, les violences à l’égard des femmes sont d’une ampleur et d’une intensité alarmantes en Bulgarie et ces actes sont peu signalés. Il constate également avec préoccupation que les tribunaux ne prennent pas en temps voulu de mesures de protection qui soient proportionnées à l’ampleur de la violence, et n’imposent pas de sanctions pénales appropriées (art. 2, 3, 6, 7, 24 et 26).

22. L ’État partie devrait :

a) Accélérer l’adoption de lois visant à garantir une meilleure protection contre la violence à l’égard des femmes, notamment en incriminant expressément toutes les formes de violence, y compris la violence familiale et le viol conjugal ;

b) Recueillir des données statistiques sur les cas de violence à l’égard des femmes, notamment de violence familiale, et les ventiler par âge et par type d’infraction, et faire en sorte que ces cas soient signalés et donnent lieu à une enquête approfondie, que les auteurs de violences soient poursuivis et, en cas de condamnation, que la sanction imposée soit appropriée, et que les victimes aient accès à une réparation et à des moyens de protection efficaces, moyennant notamment l’application efficace des ordonnances de protection ;

c) Sensibiliser le grand public au problème de la violence à l’égard des femmes, encourager le signalement des cas et veiller à ce que les policiers, les procureurs et les juges reçoivent une formation appropriée qui leur permette de traiter efficacement les affaires de ce type ;

d) Envisager de prendre les mesures voulues pour que soit ratifiée la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul).

Traite des personnes

23.Le Comité note avec préoccupation que la Bulgarie reste l’un des premiers pays d’origine de la traite dans l’Union européenne. En outre, il prend note avec préoccupation des facteurs qui empêchent d’identifier et de protéger les victimes et d’établir la responsabilité des auteurs de manière efficace, ainsi que de la piètre qualité des services fournis aux victimes dans les centres d’écoute et de conseil gérés par l’État (art. 8).

24. L ’État partie devrait :

a) R enforcer encore la formation des membres des forces de l’ordre, des juges et des procureurs sur les questions relatives à la traite, à l’identification des victimes, à la protection des témoins, à l’établissement des responsabilités et à la réparation ;

b) Financer et mettre en place des services appropriés d’aide aux victimes, notamment des services médicaux et sociaux et une aide psychologique et juridique adaptés, ainsi qu’une aide à la scolarisation des enfants vivant dans des foyers d’accueil ;

c) Veiller à ce que les auteurs de la traite soient poursuivis et se voient imposer des peines proportionnées à la gravité des infractions commises, et à ce que les victimes obtiennent la réparation intégrale du préjudice subi.

Interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants

25.Le Comité note à nouveau avec préoccupation (CCPR/C/BGR/CO/3, par. 8 et 13) que la législation nationale n’incrimine pas encore expressément la torture et les traitements inhumains et dégradants, comme l’exigent pourtant les normes internationales. En outre, il est préoccupé par : a) la persistance des allégations selon lesquelles la police inflige fréquemment des mauvais traitements aux personnes arrêtées et détenues et se livre à des actes de violence contre les personnes d’origine rom à l’occasion d’« expéditions punitives » ; b) l’insuffisance des statistiques sur les mauvais traitements et le recours illicite à la force ; et c) l’absence de mécanisme de contrôle indépendant chargé d’enquêter sur les agissements criminels de la police. Le Comité est également préoccupé par les allégations selon lesquelles les garanties juridiques fondamentales ne sont pas respectées dès le début de la privation de liberté, et en particulier par : a) le placement en détention administrative pendant vingt-quatre heures avant la mise en accusation, sans que les garanties juridiques prévues par le droit pénal ne s’appliquent ; b) la notification tardive de la détention à un proche ; c) l’accès tardif à un avocat, généralement autorisé une fois seulement que le détenu a été interrogé ; d) le caractère superficiel des examens médicaux, réalisés en présence de policiers ; e) le fait que les accusés ne sont pas informés de leurs droits dans une langue qu’ils comprennent ; f) le fait que les mineurs sont interrogés en l’absence d’un avocat ou d’une autre personne de confiance (art. 7, 9 et 10).

26. L’État partie devrait :

a) Modifier sa législation de sorte que le droit bulgare incrimine la torture d’une manière qui soit pleinement conforme aux dispositions de l’article 7 du Pacte et aux autres normes internationales pertinentes ;

b) Renforcer les mesures prises pour prévenir les actes de torture et les mauvais traitements infligés aux détenus ainsi que les violences policières dont sont victimes les membres de la communauté rom ;

c) Établir un mécanisme indépendant de contrôle des violences policières, recueillir des données statistiques sur les cas de torture et autres mauvais traitements et de recours excessif à la force attribuables aux forces de l’ordre, veiller à ce que tous ces cas soient signalés et donnent rapidement lieu à une enquête et à des poursuites, et faire en sorte que les auteurs soient dûment punis et que les victimes obtiennent une réparation intégrale ;

d) V eiller à ce que les personnes privées de liberté bénéficient immédiatement, dans la pratique, de toutes les garanties juridiques.

Conditions de détention

27.Le Comité salue les mesures législatives et administratives prises pour améliorer les conditions de détention et faire mieux respecter les droits des détenus (voir par. 3 c) ci‑avant), mais prend à nouveau note avec préoccupation de l’insalubrité dénoncée par certaines sources, y compris dans les prisons rénovées récemment, et de la persistance de la violence entre détenus. Il regrette aussi que, dans l’État partie, la libération conditionnelle ne soit pas plus facilement accessible aux détenus, en particulier aux détenus condamnés à la réclusion à perpétuité (art. 7, 9, 10 et 14).

28. L’État partie devrait redoubler d’efforts pour  : a) améliorer les conditions de détention, notamment en débloquant les crédits voulus, pour les rendre conformes à l’ Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela) ; b) prévenir et combattre la violence carcérale, notamment en formant et en sensibilisant le personnel à la prévention de cette violence ; et c) faire en sorte que les détenus, en particulier ceux qui ont été condamnés à la réclusion à perpétuité, puissent bénéficier d’une libération conditionnelle.

Traitement des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile

29.Le Comité note que l’État partie a déclaré n’avoir procédé à aucun refoulement le long de la frontière bulgaro-turque, mais demeure préoccupé par les informations fiables provenant de sources multiples selon lesquelles des personnes qui auraient pu avoir besoin d’une protection internationale se sont vu refuser l’entrée sur le territoire bulgare ou en ont été expulsées, certaines par la force, sans avoir eu la possibilité de demander l’asile ou de bénéficier d’une appréciation individualisée de leur situation. Il note avec préoccupation que l’identification des personnes ayant besoin d’une protection internationale n’est pas toujours rapide, que les interprètes qualifiés font défaut, y compris à la frontière, et que les personnes vulnérables ne sont pas rapidement identifiées. De surcroît, il constate avec préoccupation que, selon les informations qu’il a reçues, les ressortissants de certains pays sont victimes d’un traitement discriminatoire en ce qui concerne l’octroi de l’asile. Malgré l’amélioration des conditions d’accueil, le Comité demeure préoccupé de constater que les centres d’accueil ne satisfont pas toujours les besoins de base et que l’insécurité règne au centre d’accueil de Voenna Rampa. En outre, il prend note avec préoccupation des informations selon lesquelles un trop grand nombre de demandeurs d’asile et de migrants sont placés en détention sans que les autorités aient procédé à un examen individualisé de leur situation ni envisagé de mesures de substitution à la détention, et du fait que les migrants sont systématiquement détenus à des fins d’identification pour une durée pouvant aller jusqu’à trente jours et passent un laps de temps excessif en détention avant d’être expulsés, ce qui est notamment dû à un manque d’interprètes et d’aide juridictionnelle de qualité (art. 2, 6, 7, 9, 13 et 26).

30. L’État partie devrait :

a) Respecter pleinement le principe de non-refoulement en veillant à ce que toutes les personnes cherchant à bénéficier d’une protection internationale aient le droit de demander l’asile, se voient fournir des informations accessibles concernant leurs droits et puissent recourir à une procédure de détermination de leur statut qui soit rapide, équitable et fondée sur une évaluation individualisée, et garantir que nul ne sera expulsé ou renvoyé vers un pays où il y a des motifs sérieux de croire qu’il existe un risque réel de préjudice irréparable, tel que celui prévu aux articles 6 et 7 du Pacte ;

b) S’abstenir d’employer la force contre les migrants et les demandeurs d’asile, hormis lorsqu’elle est strictement nécessaire et proportionnée, et veiller à ce que toutes les allégations de recours à la force contre ces personnes donnent rapidement lieu à une enquête et à des poursuites, les coupables soient dûment punis et les victimes se voient offrir réparation ;

c) Améliorer la formation dispensée aux services de la police des frontières et de l’immigration afin de garantir le plein respect du principe de non-refoulement et des droits des demandeurs d’asile, des réfugiés et des migrants, dans le droit fil du Pacte et des autres normes internationales applicables ;

d) Éviter de placer les demandeurs d’asile en détention, sauf en dernier recours et pour la période la plus courte possible, établir un mécanisme d’identification des demandeurs vulnérables, prévoir de véritables mesures de substitution à la détention et faire en sorte que la détention des migrants soit moins fréquente et moins longue. L’État partie devrait veiller à ce que toute détention soit justifiée, c’est-à-dire raisonnable, nécessaire et proportionnée compte tenu de la situation de l’intéressé, et fasse l’objet d’un contrôle juridictionnel régulier, et devrait aussi garantir que les demandeurs d’asile et les migrants ont accès à une aide juridictionnelle de qualité lorsque les intérêts de la justice l’exigent ;

e) Continuer d’améliorer les conditions de vie des personnes cherchant à bénéficier d’une protection internationale en veillant à ce que les centres d’accueil fournissent les services de base, en protégeant les demandeurs d’asile et les migrants contre les agressions et les mauvais traitements et en garantissant qu’ils ont dûment accès, dans la pratique, aux prestations et services sociaux, psychologiques et médicaux et à des mesures de réhabilitation.

Mineurs non accompagnés

31.Le Comité constate avec préoccupation que les enfants non accompagnés sont hébergés dans des centres d’accueil sans aucune prise en charge spécialisée, avec des adultes, et dans des installations qui ne répondent pas aux normes minimales applicables aux institutions accueillant des enfants. Il constate également avec préoccupation qu’il n’existe pas de procédures adéquates d’évaluation de l’âge, que rien n’est fait pour rechercher rapidement les familles et que les tuteurs désignés ne semblent pas avoir les qualifications et la formation nécessaires. Le Comité note que le droit interne interdit la détention des enfants non accompagnés, mais s’inquiète du fait que cette règle serait contournée dans la pratique par le rattachement des enfants non accompagnés à des adultes qui ne leur sont pas apparentés ou par l’enregistrement de ces enfants en tant qu’adultes (art. 9 et 24).

32. L’État partie devrait prendre des dispositions appropriées en matière de prise en charge et mettre en place des programmes communautaires pour assurer un accueil adéquat des enfants qui demandent une protection internationale, en particulier les enfants non accompagnés, qui devraient, sans délai, se voir désigner un tuteur qualifié et bénéficier d’une représentation légale appropriée, et qui ne devraient pas être hébergés avec des adultes. Il devrait veiller à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale dans toutes les décisions concernant des enfants migrants et des enfants demandeurs d’asile. En cas de doute raisonnable quant à l’âge, des procédures d’évaluation de l’âge devraient être conduites d’une manière multidisciplinaire et adaptée à l’enfant, compte tenu de son développement physique et psychologique.

Lutte contre le terrorisme et activités de surveillance

33.Le Comité est préoccupé par les modifications apportées en 2015 au Code pénal, qui ont introduit une définition du « terrorisme » vague et trop large. Il note également avec préoccupation que la loi antiterroriste de 2016 contient des dispositions susceptibles de porter atteinte aux droits énoncés dans le Pacte et prévoit notamment : a) la possibilité pour le Président, avec l’approbation de l’Assemblée nationale, de décréter l’« état d’urgence » au lendemain d’un acte terroriste et d’imposer une interdiction générale des rassemblements, réunions et manifestations publics, sans aucun contrôle indépendant ; b) l’application de mesures de contrôle préventives, telles que les interdictions de voyage, qui pourraient être ordonnées par le Président de l’Agence bulgare de la sécurité nationale ou par le Secrétaire général du Ministère de l’intérieur contre des personnes soupçonnées de « préparer ou de planifier un acte terroriste », sans qu’une autorisation judiciaire préalable ne soit nécessaire. Le Comité prend également note du manque de protection contre les poursuites visant des adolescents enrôlés de force par des groupes terroristes, ainsi que des poursuites engagées contre des manifestants pacifiques et des opposants politiques. Rappelant ses précédentes observations finales (CCPR/C/BGR/CO/3, par. 22), le Comité demeure préoccupé par les cas signalés d’écoutes illégales d’hommes politiques, de magistrats et de journalistes à des fins d’intimidation, et par le manque d’informations concernant les recours qui leur sont ouverts (art. 14, 17, 21 et 24).

34. L’État partie devrait revoir sa législation afin de la mettre en conformité avec les obligations qui lui incombent en vertu du Pacte. Il devrait notamment :

a) Définir les faits qui constituent des actes de terrorisme de manière précise et stricte, de sorte que les principes de sécurité juridique et de prévisibilité soient respectés et que la définition arrêtée ne puisse pas être utilisée pour poursuivre des manifestants pacifiques ou des opposants politiques ;

b) Veiller à ce que les mesures dérogeant à certains droits ne soient appliquées qu’« en temps de guerre ou autre urgence publique menaçant la vie de la nation » et conformément aux dispositions de l’article 4 du Pacte ;

c) Veiller à ce que les activités de surveillance soient conformes aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 17 du Pacte, notamment aux principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité, à ce qu’elles fassent l’objet d’un contrôle juridictionnel périodique et à ce que les personnes touchées par ces mesures aient accès à des recours utiles ;

d) Éviter d’imposer des mesures de contrôle préventives aux personnes soupçonnées de terrorisme et veiller à ce que le droit à un procès équitable et les garanties juridiques en vigueur dans le système de justice pénale, y compris celles relatives aux enfants en conflit avec la loi, soient respectés à tout moment.

Minorités nationales, ethniques et religieuses

35.Rappelant ses précédentes observations finales (CCPR/C/BGR/CO/3, par. 9 et 25), le Comité demeure préoccupé par les actes de vandalisme dans les lieux de culte et par les actes de discrimination à l’égard des minorités religieuses et d’autres confessions minoritaires, qui ont rarement donné lieu à des poursuites ou à des sanctions, et par l’application de lois locales qui restreignent l’exercice de la liberté de religion, comme le refus de délivrer des autorisations pour la construction de lieux de culte. Il note également avec préoccupation que les tribunaux continuent de refuser l’enregistrement d’autres confessions chrétiennes orthodoxes, ce qui place l’Église orthodoxe bulgare dans une position privilégiée. Le Comité est également préoccupé par le nouveau projet de loi visant les « groupes religieux extrémistes », qui contient une définition très large du terme « extrémiste », et interdit la prédication dans toute autre langue que le bulgare et le financement des groupes religieux par des sources étrangères. En ce qui concerne les minorités ethniques, le Comité prend note avec préoccupation : a) de l’obligation de mener les campagnes électorales et d’afficher le matériel électoral uniquement en bulgare, ce qui empêche les minorités ethniques ne parlant pas bulgare de participer effectivement au processus électoral ; b) du refus d’enregistrer les associations de minorités nationales ayant des « objectifs politiques », bien que les modifications apportées en 2018 à la loi relative au Registre du commerce et au Registre des personnes morales sans but lucratif visent à mettre fin à cette pratique (art. 18, 19, 22 et 25 à 27).

36. L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que tous les cas de discours de haine, d’infractions motivées par la haine et de discrimination visant des groupes religieux fassent rapidement l’objet d’enquêtes approfondies et soient punis ;

b) Garantir l’exercice effectif du droit à la liberté de religion et de conviction et s’abstenir de tout acte susceptible de le restreindre au ‑delà de ce que permet l’article 18 du Pacte interprété au sens strict ;

c) Réviser le projet de loi visant les « groupes religieux extrémistes » afin de le mettre en conformité avec les obligations qui incombent à l’État partie en vertu du Pacte, notamment en définissant les termes clefs avec plus de précision, en supprimant les restrictions visant la prédication dans une langue autre que le bulgare et en veillant à ce que les restrictions légales, dont celles relatives à l’accès aux financements étrangers, ne soient pas utilisées pour limiter la liberté d’expression au-delà des restrictions bien précises prévues au paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte ;

d) Supprimer les barrières linguistiques qui portent atteinte à la liberté d’expression des minorités nationales ne parlant pas bulgare durant le processus électoral ;

e) Surveiller étroitement le processus d’enregistrement des associations et s’abstenir de tout acte visant à imposer des restrictions allant au-delà de ce que permet l’article 22 du Pacte interprété au sens strict.

Liberté d’expression

37.Le Comité est préoccupé par les nombreuses informations dénonçant des agressions, des menaces et le harcèlement de journalistes, qui restent impunis, ainsi que des pressions politiques exercées sur les journalistes et les médias, notamment au moyen des financements publicitaires et de menaces de diffamation visant à obtenir une couverture médiatique favorable et à réprimer les critiques, notamment celles relatives à la corruption. Le Comité est préoccupé par les informations indiquant que les médias se voient imposer des amendes excessives pour leurs reportages sur les secteurs bancaire et financier, ainsi que par le manque de transparence concernant la propriété et le financement des médias, qui se traduit par une forte concentration des médias. Il note également avec préoccupation que la diffamation demeure une infraction pénale passible d’amendes pénales et de censure publique (art. 2, 6, 7 et 19).

38. L’État partie devrait :

a) Poursuivre la formation des policiers, des juges et des procureurs aux normes relatives aux droits de l’homme concernant la liberté d’expression et de réunion et l’usage légitime de la force ;

b) Protéger les journalistes contre toute forme de harcèlement, d’agression ou d’usage excessif de la force et enquêter rapidement sur ces actes et traduire les responsables en justice, y compris en ce qui concerne le meurtre récent de la journaliste Victoria Marinova  ;

c) Renforcer le pluralisme des médias et accroître la diversité des opinions et des informations accessibles au public, en tenant compte de l’observation générale n o  34 (2011) du Comité sur la liberté d’opinion et la liberté d’expression ;

d) Veiller à ce que toute forme de financement public des médias et des journalistes se fasse de manière transparente et non discriminatoire sur la base de critères objectifs et à ce qu’aucune amende ou autre mesure réglementaire ne soit imposée aux médias autrement que dans le strict respect du paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte, afin que les journalistes et les médias indépendants puissent mener leurs activités sans ingérence indue ;

e) Envisager d’abroger toutes les dispositions pénales qui répriment la diffamation et veiller à ce qu’elles ne servent pas à étouffer la liberté d’expression.

Protection des enfants placés en institution

39.Tout en se félicitant qu’un nouveau projet de loi sur la justice pour mineurs soit en cours d’élaboration, le Comité regrette que des enfants âgés d’à peine 8 ans continuent d’être privés de liberté dans des établissements correctionnels et éducatifs, sans possibilité de contrôle juridictionnel initial et périodique de la légalité de la détention, et exposés à la violence et à des mesures d’isolement disciplinaire. Il note que le nombre d’enfants placés dans des institutions de protection sociale a sensiblement diminué, mais demeure préoccupé par le fait que des enfants, y compris des enfants de moins de 3 ans, continuent d’être séparés de leur famille et placés en institution ou dans des « centres de placement de type familial » plus petits. Il est également préoccupé par la persistance des informations selon lesquelles les enfants placés en institution sont victimes de violences et, en particulier, par les 292 décès d’enfants âgés de 0 à 7 ans au cours de la période 2010-2014, qui n’auraient fait l’objet d’aucune enquête (art. 24).

40. L’État partie devrait intensifier ses efforts pour :

a) Réformer rapidement sa législation et sa pratique en matière de justice pour mineurs et veiller à ce que les enfants en conflit avec la loi soient traités d’une manière qui favorise leur insertion dans la société ;

b) Accélérer le processus de désinstitutionnalisation des enfants, promouvoir la prise en charge parentale pour éviter le placement des enfants en institution en premier lieu et donner la priorité au placement des enfants en milieu familial plutôt qu’en institution, s’agissant en particulier de ceux âgés de moins de 3 ans ;

c) Veiller à ce que le placement des enfants dans des institutions de protection de l’enfance ou dans des établissements correctionnels et éducatifs soit une mesure de dernier ressort de la durée la plus courte possible, et prévoir des garanties pour l’examen régulier de ces mesures ;

d) Surveiller régulièrement les conditions de vie et le traitement des enfants placés en institution, faciliter l’accès aux mécanismes de plainte et veiller à ce que des enquêtes complètes et efficaces soient menées sur les allégations de mauvais traitements ou sur les décès d’enfants et à ce que les responsables soient traduits en justice.

Corruption

41.Le Comité se félicite de l’adoption en 2018 de la loi sur la lutte contre la corruption et la confiscation des avoirs, qui a porté création d’une commission anticorruption unique. Il note toutefois avec préoccupation que, jusqu’à présent, très peu de condamnations pour corruption de haut niveau ont été confirmées par des décisions de justice définitives, en raison, semble-t-il, de l’insuffisance des capacités en matière de poursuites nécessaires au traitement efficace des affaires complexes, de l’accès limité aux compétences extérieures et du manque de coopération effective entre le ministère public et les services d’enquête. Le Comité est également préoccupé par le faible pourcentage d’institutions publiques qui se sont conformées à l’obligation de publier les déclarations de conflit d’intérêts de leurs employés (art. 2, 9, 14 et 25).

42. L’État partie devrait redoubler d’efforts pour lutter contre la corruption, principalement en remédiant aux insuffisances des enquêtes et des poursuites concernant la corruption de haut niveau, tout en veillant à ce que les procédures légales offrent les protections prévues aux articles 9 et 14 du Pacte, en faisant mieux respecter la législation relative aux conflits d’intérêts et en veillant à ce que les lanceurs d’alerte bénéficient d’une protection suffisante contre les poursuites auxquelles ils pourraient s’exposer pour avoir signalé des actes de corruption et d’autres irrégularités.

Indépendance du pouvoir judiciaire et administration de la justice

43.Tout en prenant note des amendements constitutionnels adoptés en 2015 qui renforcent l’indépendance du Conseil supérieur de la magistrature (voir par. 3 b) ci-avant), le Comité demeure préoccupé par la faible proportion de juges élus par leurs pairs et par la forte proportion de membres élus par l’Assemblée nationale au sein du Conseil, ce qui peut conduire à une politisation de ses décisions. Le Comité note également avec préoccupation que l’élection par l’Assemblée nationale des membres de l’Inspection du Conseil supérieur de la magistrature, qui exerce des fonctions disciplinaires, crée un risque d’influence politique sur cet organe. Il prend note des modifications apportées en 2017 à la loi sur le système judiciaire, mais demeure préoccupé de constater que le Procureur général a peu d’obligations de rendre des comptes, du fait a) qu’il est absolument à l’abri des poursuites pénales et ne peut pas être destitué dans le cadre d’une mise en accusation pour faute professionnelle, b) qu’il peut demander au Conseil la suspension automatique de juges qui sont soupçonnés d’avoir commis une infraction intentionnelle passible de poursuites pénales, sans obligation d’examiner le fond des accusations ou d’entendre la personne concernée et c) qu’il a des pouvoirs administratifs coercitifs hors du domaine pénal. Le Comité est également préoccupé par l’inégalité de la charge de travail des différents tribunaux et par le manque de confiance du public dans l’appareil judiciaire (art. 14).

44. L’État partie devrait poursuivre la révision de son cadre législatif et prendre des mesures propres à garantir et à protéger la pleine indépendance et la pleine impartialité de l’appareil judiciaire, notamment en veillant à ce que les juges puissent s’acquitter de leurs fonctions sans pression et sans ingérence du pouvoir exécutif et en sensibilisant à l’importance de l’indépendance de la magistrature. À cet égard, l’État partie devrait : a) accroître la proportion de juges élus par leurs pairs au sein du Conseil supérieur de la magistrature ; b) faire en sorte que l’Inspection soit davantage séparée du pouvoir politique et renforcer le rôle du Conseil supérieur de la magistrature dans les procédures disciplinaires ; c) renforcer le cadre de responsabilité du Procureur général en cas de faute professionnelle et limiter les pouvoirs du ministère public hors du domaine pénal ; et d) mettre des ressources suffisantes à la disposition du système judiciaire et, en particulier, des tribunaux surchargés.

D.Diffusion et suivi

45. L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte et des deux Protocoles facultatifs s’y rapportant , de son quatrième rapport périodique et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public, y compris aux membres des communautés minoritaires, afin de les sensibiliser aux droits consacrés par le Pacte . L’État partie devrait faire en sorte que le rapport et les présentes observations finales soient traduits dans sa langue officielle .

46. Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie est invité à faire parvenir , d’ici au 2 novembre 2020, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 10 (d iscours de haine et infractions motivées par la haine ), 36 (minorités n ationales, ethniques et religieuses) et 38 (liberté d’e xpression) .

47. Le Comité demande à l’État partie de lui soumettre son prochain rapport périodique le 2 novembre 2023 au plus tard . L’État partie ayant accepté d’utiliser la procédure simplifiée de présentation des rapports, le Comité lui communiquera en temps voulu une liste de points établie avant la soumission du rapport . Les réponses de l’État partie à cette liste constitueront son cinquième rapport périodique. Conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le rapport ne devra pas dépasser 21 200 mots .