Comité pour l’élimination de la discriminationà l’égard des femmes

Vingt-cinquième session

Compte rendu analytique de la 518e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 11 juillet 2001, à 10 heures

Présidente :Mme Manalo (Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (suite)

Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques du Viet Nam

M me  Manalo, Vice-Présidente préside la séance.

La séance est ouverte à 10 h 15.

Examen des rapports présentés par les États partiesconformément à l’article 18 de la Conventionsur l’élimination de toutes les formesde discrimination à l’égard des femmes (suite), (CEDAW/C/VNM/2, CEDAW/C/VNM/3 et 4, CEDAW/PSWG/2001/II/CRP.1/Add.5 et CEDAW/PSWG/2001/II/CRP.2/Add.3)

Deuxième, troisième et quatrième rapportspériodiques du Viet Nam (CEDAW/C/VNM/2et CEDAW/C/VNM/3 et 4)

À l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation du Viet Nam prennent place à la table du Comité.

M me  Ha Phi Khiet (Viet Nam) exprime la satisfaction de son gouvernement pour les efforts déployés par le Comité en vue d’améliorer le statut de la femme, et contribuer ainsi à renforcer la prospérité et la paix au Viet Nam et dans le monde. Le Viet Nam a été l’un des tout premiers pays à ratifier la Convention, et son Comité national pour la promotion de la femme, composé des représentants de tous les secteurs de la société, tant publics que privés, s’attache à promouvoir les droits des femmes, par l’organisation de débats, de séminaires et de larges consultations et il participe également à la préparation des rapports périodiques. Elle souligne l’importance que son gouvernement attache à la mise en œuvre intégrale de la Convention, et attend avec intérêt les observations et les recommandations du Comité.

M me  Dinh Thi Minh Huyen (Viet Nam) dit que le deuxième rapport (CEDAW/C/VNM/2) et les troisième et quatrième rapports combinés (CEDAW/C/VNM/3 et 4) couvrent la période allant de 1986 à 2000, marquée par de profonds changements dans la société vietnamienne. Le processus de renouveau « Doi Moi », amorcé en 1986, est centré sur la personne humaine et cherche à mettre en place une économie de marché multisectorielle à orientation socialiste, gérée par l’État et fondée sur la primauté du droit, les échanges et la coopération élargis avec d’autres pays. Une stratégie pour la stabilisation socioéconomique et le développement à l’horizon 2000 a été aussi adoptée en 1991, en vue de doubler le produit intérieur brut (PIB) en 2000 par rapport à son niveau de 1990. C’est ainsi que la crise socioéconomique a été maîtrisée et le PIB a plus que doublé, et le Viet Nam est devenu un grand exportateur de riz. Des progrès ont également été réalisés dans les domaines sociaux tels la création d’emplois, la lutte contre la pauvreté, la santé, la planification familiale et la qualité de la vie. Ces acquis ont créé une dynamique et des conditions favorables pour la poursuite de la mise en œuvre de la Convention, même si la transition économique a engendré d’autres problèmes comme le chômage, l’aggravation du fossé entre les riches et les pauvres, l’utilisation de la drogue et la prostitution, qui ont eu des effets négatifs sur l’égalité entre les sexes.

Le statut de la femme dans la société a changé de fond en comble parce qu’elle participe de manière égale à la vie politique, économique, sociale, culturelle et civile. Le principe de l’égalité et de la non-discrimination est prévu par la Constitution, protégé par le système juridique, et est mis en œuvre par des politiques et des plans d’action concrets. Les femmes ont le droit à la même rémunération, à la même protection sociale, aux mêmes soins de santé et aux mêmes conditions de travail que les hommes, et sont bien représentées dans presque tous les secteurs de l’économie nationale. Elles représentent 50,8 % de la population totale et 50,6 % de la population active, et le nombre d’employées à plein temps a atteint 50 % en 1997. Les femmes représentent 37 % des diplômés de l’enseignement supérieur, et leur proportion varie de 30 % des travailleurs du secteur de la culture et des arts à 65 % des agents de la fonction publique et 73,4 % du personnel de l’éducation et de la formation.

Le décret sur la démocratie à la base, promulgué en 1998, stipule que chaque citoyen a le droit de participer à la formulation, la mise en œuvre et le suivi des activités menées par les collectivités locales et l’administration centrale, et la résolution No 4 du 12 juillet 1993 met l’accent sur l’importance de l’émancipation des femmes dans le cadre du processus du renouveau et de la promotion de leur participation dans les domaines politique, économique, social et culturel. En 1997, un Plan d’action national pour la promotion de la femme à l’horizon 2000 a été adopté dans le but de faire passer la proportion des femmes à 30 % dans les organes électifs et à 20 % à tous les niveaux de l’administration.

L’égalité entre les sexes a connu dans l’ensemble des progrès, en particulier dans la vie politique du pays, et le Viet Nam est classé neuvième au sein de l’Union interparlementaire et deuxième dans la région Asie-Pacifique, pour ce qui est de la représentation des femmes. Actuellement, les femmes représentent 22,5 % des membres des conseils provinciaux, 20,7 % des membres des conseils de district, 16,3 % des membres des conseils communautaires et 26,22 % des membres de l’Assemblée nationale. Elles occupent aussi des postes de responsabilité à tous les niveaux de l’État et dans les activités régionales et internationales.

Les Vietnamiennes jouissent de l’égalité d’accès à l’éducation et le taux d’alphabétisme pour les femmes et les jeunes filles est de 88 %. L’enseignement primaire pour tous est une réalité depuis 2000, et autant de filles que de garçons sont inscrits aux niveaux primaire et secondaire, avec un nombre croissant de filles dans l’enseignement supérieur. Les garçons et les filles étudient dans les mêmes établissements et dans les mêmes conditions, et le budget global que l’État consacre à l’éducation est en augmentation, atteignant 15 % en 1997.

Les femmes jouissent aussi de l’égalité des droits en matière de santé et de planification familiale, et une plus grande attention est accordée aux soins de la mère et de l’enfant ainsi qu’aux programmes de soins de santé primaires et de santé génésique. Les efforts du Viet Nam dans le domaine de la population et de la planification familiale ont été reconnus par les Nations Unies en 1999, lorsque le pays a reçu le Prix des Nations Unies en matière de population; la croissance démographique a baissé à 1,4 % en 2000, et en 1999, le nombre moyen d’enfants par femme en âge de procréer est tombé à 2,3, le taux de mortalité maternelle à 0,9 %, et l’espérance de vie chez les femmes a atteint 69,7 ans contre 64,5 chez les hommes. En 1997, 95,6 % des enfants étaient vaccinés, 5,6 % du budget était alloué aux soins de santé, et la part du budget allouée à la planification familiale était passé à 0,5 %.

Les femmes jouissent de l’égalité des droits aux termes de la loi. Elles peuvent signer des contrats civils, créer des entreprises, gérer des biens, avoir avec leur mari des biens en copropriété, qui seraient en principe répartis en parts égales en cas de divorce. Elles jouissent aussi de l’égalité des droits pour ce qui est de l’exploitation des terres à des fins de subsistance. La loi sur la nationalité de 1998 leur reconnaît l’égalité des droits en ce qui concerne la naturalisation, le changement de nationalité et le choix de la nationalité de leurs enfants. La loi sur le mariage et la famille stipule que la femme est libre de se marier ou de rester célibataire et définit les droits et les obligations du mari et de la femme. L’amélioration du pouvoir économique des femmes a également rendu la famille moins patriarcale et davantage basée sur le partenariat entre les conjoints.

La stratégie de développement du Viet Nam met l’accent sur la croissance économique associée au progrès social et à la justice, et les investissements dans le domaine social représentent aujourd’hui de 25 à 28 % du budget de l’État; la priorité étant accordée à la lutte contre la pauvreté, la création d’emplois, la sécurité sociale et aux autres services sociaux de base. Un programme national de lutte contre la pauvreté cible les femmes et vise à améliorer leur accès à l’emploi et au crédit, à accroître leurs revenus et à améliorer le niveau de vie de leurs familles. Les efforts déployés par le Gouvernement, avec notamment la création de la Banque du pauvre, les investissements dans les communes pauvres et l’aide accordée à l’Union des femmes vietnamiennes pour concevoir des programmes d’activités génératrices de revenus, ont permis de réduire la pauvreté, en particulier chez les femmes rurales et celles issues des minorités ethniques des zones reculées. Plus de 1,2 million d’emplois nouveaux ont été créés depuis 1991, le chômage en milieu urbain est tombé à 6 % dans l’ensemble et à 5,5 % pour les femmes, et le taux de pauvreté a chuté à 10 %. Plus de 90 % de la population a accès aux soins de santé et 60 % des ménages en zones rurales ont accès à l’eau potable. La vie des personnes défavorisées et vulnérables dont la plupart sont les femmes pauvres s’est considérablement améliorée.

Des progrès notables ont été réalisés pour intégrer la Convention dans le droit interne et mettre en place une base juridique solide et des institutions efficaces pour assurer l’égalité entre les sexes et la promotion de la femme. Le processus qui a commencé avec la ratification du texte en 1981, s’est accéléré entre 1986 et 2000 dans le cadre de la politique du renouveau dont l’une des principales composantes est la promotion de la primauté du droit et le perfectionnement du système juridique.

Un nombre sans précédent de lois et d’actes réglementaires ont été promulgués, avec des effets remarquables sur le statut de la femme. Le Gouvernement a pris des mesures spéciales temporaires et opéré des réformes législatives de base. Le Code du travail prévoit un traitement spécial pour les travailleurs de sexe féminin, en particulier en cas de grossesse et de maternité, et la loi révisée sur le mariage et la famille, entrée en vigueur le 1er janvier 2001, protège les droits des femmes dans la famille et le mariage et en cas de divorce. Le Code pénal interdit l’application de la peine de mort aux femmes enceintes et aux femmes ayant des enfants âgés de moins de 36 mois. De nombreuses autres politiques et mesures pratiques ont été conçues pour protéger les personnes vulnérables dans la société dont la plupart sont des femmes, en particulier les femmes et enfants défavorisés des zones rurales et des minorités ethniques.

Le Viet Nam a ratifié plusieurs textes fondamentaux des Nations Unies sur les droits humains et les conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT), y compris les conventions No 100 sur le principe du salaire égal pour un travail d’égale valeur, et No 182 concernant l’interdiction des pires formes du travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination. En 1993, le Comité national pour la promotion de la femme s’est chargé de conseiller le Premier Ministre sur les questions de l’égalité des sexes, de suivre la mise en œuvre de la législation et des politiques, de sensibiliser les populations et de rédiger les rapports périodiques à soumettre au Comité.

La ratification et la mise en œuvre de la Convention ont contribué de manière significative à la promotion de l’égalité entre les sexes et à la promotion de la femme, et elle relève que le Viet Nam occupe un rang relativement honorable aussi bien au niveau de l’indice du développement humain du Programme des Nations Unies pour le développement qu’à celui de l’indicateur sexospécifique de développement humain. Ces réalisations sont d’autant plus importantes que le Viet Nam est un pays en développement, qui fait encore face aux vestiges du régime féodal, aux effets des décennies de guerre et au bas niveau de développement économique.

Toutefois, malgré ces progrès, bon nombre de questions sociales pressantes comme le chômage, le fossé séparant les riches des pauvres, l’utilisation de la drogue, la prostitution, le trafic des femmes et les discriminations traditionnelles fondées sur les sexes continuent à faire obstacle à la promotion de la femme. Beaucoup reste à faire pour accroître le nombre de femmes à des postes de responsabilité, y compris dans le domaine des affaires publiques, et pour sensibiliser davantage les populations sur la question de la violence dans la famille. La retraite anticipée amène les femmes à abandonner le travail et compromet leur chance de promotion, une situation sur laquelle se penche le Gouvernement.

L’expérience des 20 dernières années a montré l’importance d’une coordination entre les autorités et les organismes publics, le Comité national et d’autres organisations, en particulier l’Union des femmes vietnamiennes, ainsi que la nécessité d’une solide volonté politique et du soutien populaire pour la conception de saines politiques de développement socioéconomique tenant compte des intérêts immédiats et à long terme des femmes. Depuis sa création en 1930, le parti communiste vietnamien a fait de l’égalité entre les sexes et de l’émancipation des femmes l’un des 10 points focaux de la révolution vietnamienne. Les femmes vietnamiennes elles-mêmes ont énormément contribué au processus du renouveau « Doi Moi » et le Gouvernement continuera à promouvoir l’égalité entre les sexes dans le cadre du Plan de développement socioéconomique 2001-2005. La préparation des rapports périodiques a permis de mieux sensibiliser les populations sur la Convention, d’évaluer les progrès réalisés et d’identifier les défis et les autres mesures à prendre. Par conséquent, elle attend avec impatience la mise en œuvre de la nouvelle Stratégie nationale pour la période 2001-2010 et du Plan quinquennal 2001-2005 pour la promotion de la femme, que le Gouvernement est actuellement en train d’étudier.

La Présidente félicite le Viet Nam pour ses réalisations et l’esprit de franchise de sa délégation, en particulier pour ce qui est des faiblesses relevées dans la mise en œuvre de la Convention. Cette délégation de haut niveau atteste du sérieux avec lequel l’État partie traite de la Convention.

M me  Ferrer Gómez loue la profondeur et la richesse du rapport de l’État partie, la franchise et la transparence des informations fournies, la reconnaissance explicite des principales difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de la Convention et la volonté politique du Gouvernement d’atteindre les objectifs de celle-ci. Lors des visites effectuées au Viet Nam, elle a pu observer par elle-même comment des réformes en faveur des femmes étaient en train d’être effectuées et comment beaucoup a été fait pendant une courte période de 25 ans, depuis le génocide qui a été imposé au pays par les États-Unis. Elle loue les activités de sensibilisation aux différences entre les sexes organisées par l’État partie à l’intention des dirigeants et des populations en général, dans le but de mettre fin aux stéréotypes d’ordre culturel. Il serait souhaitable d’avoir d’autres informations sur le fonctionnement du Comité national pour la promotion de la femme, ses membres et son pouvoir, son impact, ses activités de coordination pour ce qui est de l’intégration des sexospécificités au niveau des ministères et autres institutions.

L’État partie doit définir les principaux aspects de son projet de stratégie nationale de promotion de la femme pour la période 2001-2010 et 2001-2005, et fournir des informations complémentaires sur le Conseil des affaires féminines de la Confédération du travail, et sur le rôle de l’Union des femmes vietnamiennes dans la promotion de la participation des femmes dans tous les domaines et à tous les niveaux, y compris dans les initiatives de réduction de la pauvreté. Elle souhaiterait avoir plus d’informations sur le programme destiné à aider les femmes chefs de famille à créer des microentreprises et à bénéficier d’autres opportunités d’emploi et de formation. Enfin, il serait utile d’avoir plus d’informations sur les efforts visant à éliminer les préjugés ancestraux dans les zones montagneuses reculées et économiquement défavorisées.

M me  Goonesekere loue l’excellent rapport de l’État partie, la manière phénoménale avec laquelle il s’est remis des traumatismes de la guerre et son engagement à respecter les normes internationales en matière des droits humains. Relevant que le Viet Nam a été le premier pays d’Asie à ratifier la Convention sur les droits de l’enfant et ses protocoles facultatifs, elle espère qu’il ratifiera bientôt le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Elle souhaite savoir si l’État partie punit le licenciement des travailleurs de sexe féminin pour des raisons de santé dans le secteur privé, compte tenu en particulier du fait que celui-ci a indiqué, en réponse à la liste des questions, que le Code du travail s’applique au secteur privé. Elle aimerait aussi savoir si les mesures en faveur des personnes défavorisées, prises dans le secteur public étaient étendues au secteur privé. L’État partie doit réfléchir pour déterminer s’il suffit tout simplement d’« encourager » le secteur informel à adhérer aux meilleures normes de travail, compte tenu du nombre croissant de femmes qui grossissent ses rangs durant la transition d’une économie réglementée à une économie de marché.

Elle aimerait également savoir si l’État partie a pris des mesures pour évaluer l’impact des programmes de discrimination positive, qui visent à réduire les disparités entre les minorités ethniques. Les efforts en vue d’encourager les filles à rester à l’école semblent être essentiellement une initiative des organisations non gouvernementales telles que l’Union des jeunes et l’Union des femmes; elle souhaite obtenir des informations sur les politiques publiques visant le même but.

Elle se demande quelles peines sont appliquées aux auteurs de violences familiales et d’autres formes de violence à l’égard des femmes, compte tenu du fait que le système actuel d’avertissement et les mesures de réhabilitation non privatives de liberté pourraient ne pas être suffisamment dissuasifs. Elle aimerait aussi savoir si les agents de maintien de l’ordre sont formés en matière de violence dans la famille. Il serait utile de savoir si l’État partie envisage de changer ses lois sur le mariage et la famille, qui ne classent pas la cruauté et la violence parmi les causes de divorce et ne reconnaissent pas le viol conjugal. Enfin, elle se demande si le mariage des enfants, le mariage forcé et celui contracté à la suite d’un enlèvement dans certaines communautés ethniques sont juridiquement reconnus par les lois vietnamiennes et si l’État partie punit les adultes qui facilitent de tels mariages.

À la suite des autres membres du Comité, M me  González loue les réalisations de l’État partie et la volonté politique de son gouvernement de promouvoir les droits des femmes. Allant dans le sens des questions posées par Mme Ferrer Gómez, elle demande si l’accent est mis sur l’éducation en matière de santé génésique, en vue d’éliminer les stéréotypes au sein de la famille, en particulier dans les régions montagneuses de l’arrière-pays. Les communautés où les femmes sont stigmatisées pour avoir donné naissance à des filles doivent être sensibilisées sur le fait qu’il est médicalement prouvé qu’au plan biologique c’est l’homme et non la femme qui détermine le sexe de l’enfant. Elle souligne la nécessité d’établir une distinction juridique entre la violence dans la famille et les autres formes de violence.

M me  Abaka s’inquiète de la discrimination indirecte pratiquée par l’État partie dans le domaine de l’emploi, avec la fixation de l’âge du départ à la retraite à 60 ans pour les hommes et à 55 ans seulement pour les femmes. Ce fait par lui-même, associé à la loi foncière de 1993 qui fonde l’attribution des terres sur la durée de l’emploi, pourrait avoir de graves effets sur les pensionnés de sexe féminin, en particulier en milieu rural où les femmes continuent de cultiver les terres pour nourrir leurs familles. Elle souhaiterait obtenir des informations sur le sort des femmes retraitées dans cette situation.

L’État partie doit expliquer pourquoi le taux d’avortement augmente chez les femmes célibataires, compte tenu en particulier de ses réalisations en matière de planification familiale et du fait qu’il a obtenu en 1999 le Prix des Nations Unies en matière de population. Il serait souhaitable d’avoir des informations sur les obstacles culturels à l’utilisation des contraceptifs en particulier chez les femmes célibataires, et des réponses à la question de savoir si les femmes mariées et les femmes célibataires ont un égal accès aux informations sur les contraceptifs.

Elle souhaiterait aussi avoir des informations sur le dépistage et le traitement du cancer, en particulier, le cancer du sein et celui de l’utérus. Elle demande si les femmes rurales ont un égal accès au dépistage et au traitement du cancer et aux informations sur cette maladie.

Constatant la forte incidence du virus d’immunodéficience humaine/syndrome immunodéficitaire acquis (VIH/sida) chez les filles âgées de 15 à 24 ans, elle se demande si les hommes reconnaissent leur responsabilité dans la protection de la santé sexuelle des femmes et si l’utilisation du préservatif fait partie des moyens contraceptifs utilisés au Viet Nam. Les statistiques sur le nombre d’hommes utilisant le préservatif sont nécessaires, compte tenu en particulier du taux d’infection extrêmement élevé chez les travailleuses du sexe dans le pays. Enfin, elle demande si le Comité national de prévention du sida qui, et cela est à son actif, a été mis en place dès 1990, a conçu des programmes spéciaux pour les femmes.

Répondant à Mme Ferrer Gómez, M me  Ha Phi Khiet (Viet Nam) fait une distinction entre l’Union des femmes vietnamiennes, une organisation de masse comptant 11 millions de membres, qui travaille en étroite collaboration avec le Gouvernement tout en gardant son indépendance, et le Comité national pour la promotion de la femme qui est un organisme public consultatif, créé par le Premier Ministre pour assurer la prise en compte des questions d’égalité des sexes dans les diverses institutions publiques. Le Premier Ministre a prié – et non pas nommé – la Présidente de l’Union des femmes du Viet Nam de devenir présidente du Comité national. Jusqu’en juin, le Comité comprenait 19 membres dont une présidente, deux vice-présidentes et 12 membres représentant les ministères et les représentants des organisations de masse. Le 21 juin, le nombre de ses membres a été réduit à 15. Le Comité national fournit des données pour la prise des décisions et la formulation des politiques, conseille le Gouvernement sur la coordination de la prise en compte des questions d’égalité des sexes et mène des recherches sur les questions féminines, qui sont largement accessibles. Il a des représentations au niveau local et même du village.

En vue de promouvoir la participation des femmes dans tous les domaines de la vie, le Viet Nam a mis au point une stratégie comportant 10 objectifs, pour répondre à celle adoptée lors de la Conférence internationale sur les femmes qui s’est tenue à Beijing en 1995, ainsi qu’un plan d’action s’étendant jusqu’en l’an 2000. Suite à une revue de cette stratégie, le Gouvernement a franchi une nouvelle étape dans la promotion des femmes vietnamiennes, avec un plan d’action à deux volets pour la période 2001-2010. Le premier volet (2001-2005) a fixé seulement six objectifs qu’elle a décidé de confier au Comité après son approbation formelle par le Premier Ministre.

L’accès des femmes rurales au crédit est assuré par un certain nombre de mécanismes d’institutions bancaires et de crédit, y compris un géré par l’Union des femmes vietnamiennes qui a réussi à atteindre 51 % des femmes pauvres du pays.

Pour ce qui est de la prise en compte des questions d’égalité entre les sexes, elle dit que depuis la Constitution de 1946 sous le régime de Ho Chi Minh, le Gouvernement et le parti ont, par des lois et des mesures spéciales, encouragé de manière continue l’égalité entre les sexes en termes de responsabilité. Les objectifs liés à cette égalité sont intégrés chaque année dans les plans pour la main-d’œuvre, l’éducation et les autres secteurs. Leur mise en œuvre au niveau des divers organismes publics, institutions, provinces et localités est supervisée par les conseils des femmes. Avec l’inspection du tiers des localités chaque année, le Premier Ministre et le Comité national pour la promotion de la femme disposent tous les trois ans d’un tableau complet grâce auquel ils mènent des actions correctives à travers le pays.

Répondant à la question sur les mesures visant à prévenir et à punir les violations des normes de travail, elle souligne le fait que la protection et la promotion des femmes travaillant dans les secteurs public et privé constituent l’un des objectifs du Code du travail vietnamien qui met l’accent sur l’égalité entre les sexes et consacre un chapitre spécial aux femmes. Pour encourager leur participation, des privilèges spéciaux sont accordés aux entreprises employant plus de femmes.

Les syndicats, dans lesquels les organisations féminines sont représentées, peuvent introduire des requêtes auprès de la direction ou la rencontrer afin de lui transmettre les plaintes sur une éventuelle violation des normes de travail, et dans certains cas, ils organisent des grèves. Si les recommandations des structures de réconciliation ne sont pas acceptées, la partie lésée peut saisir un tribunal administratif supérieur, ou en dernier recours un tribunal de travail civil où les juges et procureurs de sexe féminin et les représentantes des organisations féminines veillent à ce que la discrimination soit découragée et que ceux qui en sont responsables soient punis. Les sanctions pour violation des normes de sécurité et d’autres lois protégeant les femmes et les enfants comprennent les peines de prison pouvant atteindre 10 ans et des amendes pouvant s’élever jusqu’à 10 millions de dongs.

Malgré le fait que le Viet Nam s’oriente depuis 15 ans vers une économie de marché, il continue à connaître des difficultés. Les droits légitimes des femmes ne sont pas toujours protégés et les règlements ne sont pas appliqués de manière uniforme. Tel est le principal sujet d’inquiétude et le pays s’engage à faire davantage de progrès.

Répondant à la question sur les minorités, elle dit que le Viet Nam est composé de 54 groupes ethniques dont 53 représentent moins de 20 % de la population. Pour assurer la prospérité, il est indispensable de réduire le fossé entre les minorités et le reste de la population, et le Gouvernement en a fait une priorité dès le début. À titre de mesure corrective, les minorités bénéficient de la gratuité de l’enseignement, des primes spéciales et des préférences au niveau du recrutement et de la promotion, toutes choses étant égales par ailleurs.

Des disparités existent aussi entre les minorités dont la plupart vivent dans les villages reculés ou isolés. Elles sont déjà en train d’être réduites et des progrès sont réalisés. Le Premier Ministre envisage de dépenser 400 à 500 millions de dongs au cours des cinq prochaines années pour construire des écoles et des routes, installer l’électricité et améliorer les infrastructures sanitaires dans chacun des plus de 2 000 villages de ce type.

En fait, les femmes issues des minorités sont désavantagées par rapport aux hommes des mêmes groupes. Cette situation est attribuable aux décennies de guerre et à la pauvreté ainsi qu’à la persistance des stéréotypes féodaux et sociaux. Toutefois, l’on observe des progrès même dans les familles, où beaucoup d’hommes sont maintenant conscients de la nécessité de partager les responsabilités domestiques et d’envoyer les filles à l’école. Il est réconfortant de relever que les membres de la famille des deux sexes se mettent ensemble pour apprendre, par exemple, à des cours du soir.

Appartenant elle-même à une minorité, elle se sent personnellement concernée par le problème des femmes issues des minorités. Élevée dans une région montagneuse qu’elle a dû quitter pour aller à l’école, elle est retournée au pays pour devenir aujourd’hui ministre et participe à la prise des décisions. Elle n’est pas seule dans cette situation, il y a plusieurs dirigeants aux niveaux national et local issues des minorités, qui travaillent dans tous les secteurs de la société.

S’agissant du mariage, elle dit que les mariages précoces ou forcés, qui étaient très courants il y a 30 ans, sont aujourd’hui devenus rares, mais continuent à être pratiqués au sein des minorités ethniques et dans les régions moins développées du pays. Ces mariages ne sont pas contractés de manière formelle, la jeune fille est tout simplement emmenée chez son mari. Il arrive que les agents publics ou l’Union des femmes vietnamiennes repèrent et attaquent ce type d’union libre, mais, étant déjà un fait accompli, il est difficile d’y porter remède. Le Code pénal punit le mariage des enfants d’un emprisonnement pouvant atteindre deux ans et le mariage forcé d’un emprisonnement pouvant atteindre trois ans.

La loi sur le mariage et la famille et le Code pénal sanctionnent les violences à l’égard des femmes. Les violences hors du cercle familial sont devenues rares, mais pour des raisons sociales, les violences dans la famille se poursuivent, en particulier dans la région du delta. Elles ne constituent pas un problème majeur au sein des minorités ethniques. Pour aider à prévenir la violence dans la famille, des groupes de réconciliation ont été créés au niveau local, auxquels participent les représentantes de l’Union des femmes vietnamiennes. Le groupe de réconciliation s’emploie à intervenir le plus rapidement possible.

À propos de la politique de son gouvernement en matière de violence dans la famille, elle dit qu’au Viet Nam les préjugés liés aux sexes résultent des vieilles idéologies féodales qui ont toujours cours dans certaines régions, en particulier au sein des 54 groupes ethniques minoritaires du pays. Chacun de ces groupes a ses propres us et coutumes dont quelques-unes ont un impact négatif sur le droit des femmes. Des efforts considérables sont faits avec un certain degré de réussite au niveau communautaire pour éduquer et informer les populations, en particulier dans les zones montagneuses, sur les modes de vie modernes qui prédominent actuellement dans le pays et sur le caractère préjudiciable de certaines pratiques traditionnelles. Un cadre propice a été créé au niveau local pour encourager le maintien ou l’adoption des éléments positifs de la tradition. Des « maisons de la culture » ont été créées dans des milliers de villages pour servir de lieu de réunion et des activités culturelles pour les personnes de tous âges. Elles constituent aussi un cadre approprié pour les activités éducatives susceptibles d’influencer les coutumes et les modes de vie.

Les lois et règlements du pays contiennent des dispositions qui protègent les droits de tous les membres de la famille. Par exemple, une disposition du Code civil prévoit que si les parents d’un enfant appartiennent à des groupes ethniques différents, ce dernier peut décider d’utiliser le nom de n’importe lequel des deux parents, et n’est pas obligé de faire un choix définitif avant l’âge de 18 ans. Des cours de formation sur les questions d’égalité entre les sexes sont organisés à l’intention des agents publics de sexe masculin pour les encourager à intégrer ces questions dans les objectifs de développement du Gouvernement et dans les lois et règlements. Toutefois, certains agents se sont sentis mal à l’aise pour avoir été invités à ces cours, estimant qu’ils respectent déjà l’égalité entre les sexes. Néanmoins, ces cours s’avèrent très nécessaires pour identifier ceux qui ne comprennent pas bien les principes mis en jeu.

Dans le domaine de l’éducation, il est prévu d’instituer des cours sur l’égalité entre les sexes dans les universités du pays, dans les instituts de formation en science administrative et en science politique et dans d’autres écoles de formation. Elle souhaite que le Comité lui prodigue des conseils sur la manière de surmonter les difficultés rencontrées pour convaincre les gens à assister à ces cours. Des cours similaires sont aussi programmés dans l’enseignement primaire et secondaire, en commençant par ce dernier niveau, parce que la sensibilisation est nécessaire dans toutes les couches de la société. Son gouvernement sait bien que les résultats sont jusqu’ici limités et que les stéréotypes liés aux sexes sont encore répandus.

Pour ce qui est de la violence dans la famille, elle dit que des programmes de plaidoyer et d’éducation ont été conçus pour sensibiliser les gens sur les lois, en particulier sur les dispositions concernant les droits des femmes, et des bibliothèques juridiques ont été créées dans des villages avec des fonds provenant des services du Premier Ministre. En cas de litige familial, l’on insiste davantage sur la réconciliation, et l’Union des femmes, l’Union des agriculteurs et plusieurs organisations non gouvernementales intervenant au niveau local s’activent à résoudre les problèmes des ménages, et de violents incidents ont souvent été prévenus grâce aux efforts des groupes locaux de réconciliation bien connus du public. Les maisons de la culture jouent aussi un rôle essentiel en assurant l’harmonie sociale et en encourageant les efforts de réconciliation au sein des ménages. Lorsqu’un cas de violation des droits de la personne doit être porté devant les tribunaux, les organisations non gouvernementales s’activent aussi pour faire en sorte que les autorités, y compris la police et les autorités judiciaires, s’acquittent de leurs obligations rapidement et que les droits individuels soient effectivement respectés, sinon les structures qui en sont chargées seraient tenues responsables.

Le Gouvernement a retenu la date du 28 juin comme étant la Journée de la famille, en soulignant l’importance de celle-ci au Viet Nam et l’idée selon laquelle la famille et la société sont inséparables et en harmonie. Dans le cadre de cette journée, les organisations féminines et les autres organisations non gouvernementales organisent des activités auxquelles prennent part les personnes des deux sexes, y compris les personnes âgées et les enfants.

Répondant à une question sur les poursuites pour violence dans la famille, elle dit que de très lourdes peines soient prévues : sur une période de 18 mois, du début de 1999 au milieu de 2000, la Cour suprême a été saisie de 132 affaires liées à la violence à l’égard des femmes ou des enfants. Les données provenant des tribunaux de 18 provinces et villes sont disponibles, et pour chaque province, il y a une moyenne de 80 affaires liées à la violence dans la famille. Des dispositions contre toutes les formes de violence sont maintenant incluses dans le Code pénal. La peine encourue pour avoir forcé quelqu’un à se suicider peut aller jusqu’à l’emprisonnement à vie, et pour avoir humilié une personne, elle peut varier de 5 à 12 ans. De toute évidence, il y a encore trop de cas de mauvais traitement des femmes et d’enfants, et dans certains cas, des hommes par les femmes.

L’Union des femmes et le Gouvernement ont plusieurs politiques de planification familiale. Le départ à la retraite à 55 ans pour les femmes et à 60 ans pour les hommes avait été fixé à l’époque de l’économie dirigée lorsque les conditions de vie étaient particulièrement difficiles. Le Gouvernement rencontre des difficultés à changer ces seuils malgré le fait qu’il s’agit d’un cas évident d’inégalité. Elle-même, en tant que députée à l’Assemblée nationale, et bon nombre d’autres femmes ont recommandé l’amendement de cette loi sur l’âge du départ à la retraite, mais le processus sera long et difficile. Les organisations féminines ont mené des études et des enquêtes dont les résultats montrent que les femmes préfèreraient que l’on maintienne l’âge de la retraite à 55 ans, et certaines ont même demandé qu’il soit réduit, en particulier pour celles qui exercent un métier physiquement épuisant dans les secteurs tels que le textile, l’industrie forestière, le transport et la construction des routes. Les femmes doivent aussi cotiser pendant 30 ans à la sécurité sociale avant de bénéficier des prestations. Le Gouvernement déploie tous les efforts possibles pour améliorer la situation et est en train de préparer des amendements aux codes du travail et de la sécurité sociale. L’on encourage déjà les femmes qui occupent des postes de direction, d’enseignantes, de scientifiques et autres postes de travailleurs intellectuels à continuer de travailler jusqu’à l’âge de 60 ans.

La séance est levée à 13 heures.