Quarantième session

Compte rendu analytique de la 813e séance

Tenue au Palais des Nations, à Genève, le mercredi 16 janvier 2008, à 10 heures

Présidente :Mme Šimonović

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties en vertu de l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques combinés du Burundi

La séance est ouverte à 10 h 5

Examen des rapports présentés par les États partiesen vertu de l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième, troisième et quatrième rapportspériodiques combinés du Burundi (CEDAW/C/BDI/4, CEDAW/C/BDI/4 et Add.1)

À l’invitation de la Présidente la délégation du Burundi prend place à la table du Comité.

Présentant la rapport, M me  Nduwayo (Burundi) déclare que depuis 1993, les mauvaises conditions économiques et sociales résultant de la guerre dans son pays ont compliqué les efforts pour mettre en œuvre la Convention. Le Burundi est engagé dans un processus de construction de la paix qui prévoit l’établissement d’institutions démocratiques, la démobilisation et la réintégration des anciens combattants et les membres des formes armées. Malgré des réformes significatives au sein des forces de sécurité et dans la défense du pays, son gouvernement continue de s’attaquer au défi que constitue l’élimination de la violence, notamment la violence contre les femmes et les jeunes filles et des efforts restent à faire pour annuler les lois discriminatoires.

Concernant la recommandation du Comité dans ses commentaires finals sur le rapport initial et qui estimait que le Burundi devrait examiner à nouveau les dispositions prévoyant différents âges de mariage pour les femmes, elle déclare que ce principe ne pose pas un grand problème de discrimination et aide plutôt à résoudre un problème démographique et qu’il n’y a eu aucune plainte à ce sujet. En ce qui concerne la déclaration dans le Code de la personne et de la famille selon laquelle l’homme est le chef de la famille, elle affirme que ni la loi ni la société ne permettent l’abus de ce pouvoir. Les dispositions discriminatoires du Code pénal en ce qui concerne l’adultère mentionnées dans les commentaires finals sont en train d’être révisées afin qu’elles soient plus égalitaires.

Le Gouvernement organise des campagnes annuelles pour lutter contre la violence contre les femmes et accorde la priorité à l’enseignement des droits de l’homme. Il a mis à la disposition des femmes victimes de violence des conseils post-traumatiques avec l’aide de l’UNICEF et a établi des relations de partenariat avec une organisation non gouvernementale, l’Organisation psychosociale transculturelle (OPT) afin de fournir un appui aux victimes de violence. Le problème des traumatismes a diminué néanmoins après que la crise a culminé. Une commission indépendante des droits de l’homme est en voie de création.

La Convention fait maintenant partie de la Constitution. Depuis la présentation du rapport initial, le Ministère de la solidarité nationale, des droits de l’homme et du genre est l’organe national responsable du contrôle de l’application de la Convention. Le Ministère travaille en coopération étroite avec les institutions des Nations Unies et les organisations non gouvernementales nationales.

En 2003, le Gouvernement a adopté un important programme qui vise à éliminer la discrimination contre les femmes et à promouvoir l’égalité des genres. À cette fin il a mis en œuvre un plan d’action, le Conseil national du genre, le Comité technique sur le genre et le Secrétariat exécutif permanent du Conseil.

Le Gouvernement a également lancé une campagne pour éduquer les jeunes filles afin de combler l’écart d’instruction entre les sexes. Le Ministère de l’éducation a créé une section sur l’éducation des filles et a mis en œuvre un programme qui fait partie de l’Initiative des Nations Unies d’éducation des filles et du Forum des femmes africaines éducatrices (FFAE) dont l’objectif est de développer une stratégie nationale pour l’éducation des femmes dans un avenir proche.

Des ateliers ont été organisés avec des responsables locaux élus et des organes de prise de décisions pour attirer l’attention sur les questions de sexe. Un comité permanent du Parlement a été créé et une étude sur les pratiques juridiques, sociales et culturelles qui nuisent aux femmes a récemment été menée.

Le Gouvernement a élaboré un plan d’action pour lutter contre la violence faite aux femmes et une police de protection des enfants sera formée pour protéger les victimes et pour connaître les arcanes de la législation pertinente à cet égard grâce à un projet financé par le Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes. Des centres de coordination seront établis dans des commissariats de police et un numéro d’urgence sera mis à la disposition des victimes.

Comme le prévoit la Constitution, les femmes du Burundi ne souffrent pas de discrimination juridique en ce qui concerne la participation à la vie publique et un grand nombre de femmes occupent des postes élevés auxquels elles ont été élues ou nommées. Durant la période qui est examinée, le Burundi a eu une femme Vice-Présidente chargée des affaires économiques et sociales, une femme Présidente de l’Assemblée nationale et deux femmes Présidentes du Sénat. Ces postes sont actuellement occupés par les hommes. Des femmes sont maintenant à la tête de six ministères, notamment le Ministère des affaires étrangères et de la coopération internationale et le Ministère des finances, de la planification du développement et de la coopération. Les femmes occupent 15 % des sièges à l’Assemblée nationale et 32 % des sièges du Sénat. Des progrès analogues n’ont pas été accomplis au niveau des chefs des missions diplomatiques et la proportion des femmes dans les gouvernements locaux est assez faible, bien qu’elles soient maintenant représentées dans les catégories administratives les moins élevées. Il reste à améliorer le pourcentage des femmes à tous les niveaux du processus de prise de décisions, à éliminer les pratiques culturelles nocives et la dépendance économique.

Les femmes du Burundi ont les mêmes droits que les hommes à acquérir, changer ou garder leur nationalité. Étant donné néanmoins le profond attachement des hommes aux formes patriarcales de l’organisation sociale et les préoccupations démographiques, une Burundaise mariée à un étranger ne peut conférer automatiquement sa nationalité à son enfant ou à son mari. Le Gouvernement reconnaît que cette situation est injuste et qu’elle devrait être rectifiée vu que les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme deviennent de plus en plus connus. En outre, le Code de la personne et de la famille sera bientôt amendé.

La Constitution garantit l’accès égal à l’éducation et à la culture. Lors de sa prestation de serment en août 2005, le Président a annoncé que l’enseignement primaire serait gratuit mais les salles de classe et les instituteurs manquent cruellement. La crise politique et sociale a gravement affecté l’éducation, particulièrement pour les jeunes filles. Elles font face à des problèmes de pauvreté, de stéréotypes sexuels; à l’analphabétisme de leurs parents – qui se traduit par leur maintien au foyer pour s’occuper des travaux manuels et également au sida auquel elles doivent faire face – alors qu’aucune barrière juridique ne constitue un obstacle à leur éducation. Dans le domaine de l’enseignement non formel, des efforts sont déployés dans le secteur de la formation et de la promotion de l’auto-emploi dans les zones rurales sans discrimination. Les garçons et les filles jouissent du même droit de participer aux activités culturelles et sportives.

Depuis le rapport initial, la législation du travail du Burundi n’a pas été harmonisée avec la Convention. Toutefois, les lois existantes garantissent aux hommes et aux femmes les mêmes droits en ce qui concerne l’accès à l’emploi et aux bénéfices qui y sont associés à l’exception du congé de maternité. Les profondes disparités concernant le sexe dans le domaine de l’éducation se reflètent dans le secteur de l’emploi. Toutefois certains progrès ont été accomplis. Les femmes sont représentées de plus en plus dans la police et l’armée qui ont été pendant longtemps des domaines réservés aux hommes. La Police nationale et les forces nationales de défense emploient les femmes mais à des postes de rang inférieur auxquels elles ont accédé depuis peu de temps. Les femmes occupent 19 % des postes de gestion dans le service civil; le pourcentage est beaucoup plus élevé dans les postes de rang inférieur ou qui sont mal payés. Toutefois il faudrait souligner que le secteur privé déploie des efforts pour embaucher des femmes à la suite des campagnes menées pour attirer l’attention sur l’égalité des sexes.

Le taux de mortalité maternelle est très élevé à cause du manque de temps et de ressources nécessaires pour fournir des soins appropriés pendant la grossesse et l’accouchement. Pour résoudre ce problème, des sages-femmes ont été formées sous la supervision du Programme national de santé pour la reproduction et reçoivent régulièrement des équipements de base. Le Gouvernement a également pris des mesures pour fournir des services gratuits d’accouchement et des soins de santé pour les enfants de moins de 5 ans. Il s’est fermement engagé à lutter contre le VIH/sida et a créé un Conseil national antisida qui dispose de sections dans toutes les provinces du pays ainsi que des équipements d’analyses et d’appui dans les hôpitaux et centres hospitaliers.

En 2003, 983 cas de violence sexuelle ont été enregistrés et 1 675 en 2004. Beaucoup de cas de viols ne sont pas rapportés ou sont réglés entre familles, notamment dans les milieux ruraux à cause des contraintes culturelles. Des services de conseil et autres sont fournis aux victimes de viols. Le Gouvernement a lancé des campagnes pour lutter contre les viols; des tribunaux spéciaux sont régulièrement organisés pour juger les accusés et des peines allant jusqu’à 20 ans de prison sont prononcées.

Les lois n’ont pas de caractère discriminatoire à l’encontre des femmes dans les questions économiques. Les Burundaises comme les Burundais ont des difficultés à répondre aux exigences des institutions financières concernant les prêts. Depuis le rapport précédent, le nombre des prêts consentis aux femmes a augmenté et les femmes reçoivent maintenant des prêts commerciaux immobiliers.

Parmi les initiatives lancées pour améliorer la vie des femmes rurales, il faut compter un projet d’appui à la promotion de la santé dans le domaine de la reproduction, la réhabilitation rurale, le programme de développement et autres mentionnés dans le rapport.

Le Burundi s’engage fermement à mettre en œuvre la Convention, à amender les lois discriminatoires et à combattre la violence contre les femmes notamment en apportant un appui total aux victimes. Il fait face néanmoins à de nombreux obstacles comme la guerre qui se poursuit. Un comité national a été récemment créé pour garantir l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité afin d’appuyer les efforts des femmes en faveur de la construction de la paix.

Articles 1er à 6

M me  Patten souhaite savoir si un calendrier pour le processus de réforme législative a été établi. Il est nécessaire qu’il y ait des changements supplémentaires dans les lois relatives à la succession et au mariage et que ces lois soient spécifiques. Dans sa réponse aux questions sur le rapport initial (CEDAW/C/BDI/4 et Add.1), le Gouvernement note qu’il existe des vues différentes sur cette question au sein de la population. Elle demande si ces différences vont retarder les réformes juridiques nécessaires pour éliminer la discrimination.

Des informations supplémentaires sur le Code de la nationalité sont indispensables. Étant donné que le droit de la mère de transmettre son nom à ses enfants est extrêmement important, elle demande à la délégation de mettre le Code en harmonie avec la Convention. Des informations supplémentaires sur le statut de la réforme du Code de la personne et de la famille sont également nécessaires. Il serait enfin nécessaire de savoir dans quelle mesure le Parlement sera impliqué dans le processus de mise en œuvre de la Convention.

M me  Gaspard déclare que les réponses à la liste des questions sont incomplètes ou non pertinentes et qu’il existe une contradiction entre ce qui y est affirmé et les remarques liminaires de la délégation en ce qui concerne le Code de nationalité. Le rapport reconnaît honnêtement les écarts dans l’application de la Convention. Très peu de réformes juridiques visant à promouvoir l’égalité des sexes ont été mises en œuvre depuis la signature de paix et de réconciliation d’Arusha pour le Burundi. Le rapport mentionne plusieurs projets mais cite peu de résultats. Très peu des recommandations qui étaient faites par le Comité lors de la discussion du rapport initial ont été appliquées. Elle souhaite savoir si la rédaction du rapport actuel a permis aux organes nationaux de prendre en compte la Convention et les précédentes recommandations du Comité. La société civile a-t-elle été consultée à propos de ce rapport? Quel est l’organe international qui est chargé du suivi de la mise en œuvre de la Convention, des recommandations du Comité et de la coordination des politiques relatives au sexe?

Bien que le Burundi ait accédé a la Convention il y a maintenant une quinzaine d’années, note M me  Dariam (Rapporteur), un certain nombre de dispositions juridiques discriminatoires existent toujours en violation de l’article 2 de la Convention. Le rapport affirme que l’article 122 du Code de la personne et de la famille qui fait du mari le chef de famille ne pose pas de problème car ce statut peut être révoqué si des cas d’abus sont rapportés. Toutefois les abus sont nombreux et le rapport semble indiquer que les femmes sont fautives pour ne pas les avoir mentionnés. Elle souhaite savoir si des études sur les conséquences négatives de l’article 122 ont été menées et s’il est possible de citer des cas où le statut de l’homme a été révoqué ou l’article précité ait été la cause d’abus. Elle demande instamment au Gouvernement d’annuler les discriminations qui existent dans la législation et d’indiquer comment il a l’intention de mettre en œuvre les commentaires finals du Comité sur le rapport initial.

M. Flinterman souhaite savoir comment la Convention a été intégrée à la Constitution. Les articles de la Constitution sur l’égalité et la discrimination semblent être limités dans leur portée; ils devraient être examinés à nouveau dans le cadre de l’article premier de la Convention qui couvre les questions d’égalité formelle et aussi des questions de fond ainsi que la discrimination directe et indirecte dans les sphères publiques et privées.

En ce qui concerne l’article 2 de la Convention, il souhaite avoir des informations sur les recours juridiques auxquels ont droit les femmes qui demandent l’application de leurs droits et sur le rôle de la nouvelle commission indépendante nationale des droits de l’homme. Il espère que le Gouvernement ratifiera bientôt le Protocole optionnel à la Convention et s’inquiète de savoir comment le pouvoir judiciaire peut être sensibilisé aux questions relatives au sexe afin de pouvoir améliorer l’accès à la justice des femmes rurales.

M me  Shin demande au Gouvernement d’accorder une attention spéciale aux lois discriminatoires. Concernant le mari en tant que chef de la famille, elle ajoute que, selon la loi en vigueur, la femme occupe une position secondaire. Tant que la femme sera regardée comme un être inférieur dans la famille, elle sera également considérée comme inférieure dans la société.

L’argument selon lequel les différences dans l’âge minimum du mariage entre les hommes et les femmes ont pour objectif de limiter la procréation n’est pas convaincant puisque ce sont les femmes qui accouchent. Le rapport affirme qu’il n’y a pas eu de plainte à ce sujet, néanmoins certaines ONG ont demandé que l’âge du mariage soit le même pour l’homme et la femme. Elle demande si la société civile a été appelée à donner son avis sur cette question.

Elle demande des informations sur le calendrier prévu pour examiner les nombreuses lois que le rapport et la présentation ont reconnues comme discriminatoires. La délégation devrait également dire si les femmes sont également représentées au nouveau Conseil des droits de l’homme et si la question de l’égalité des femmes est examinée par celle-ci.

M me  Schöpp-Schilling déclare qu’elle reconnaît les difficultés de la période d’après guerre mais que l’intégration de la Convention dans la Constitution oblige le Gouvernement à mettre fin à la discrimination. Elle demande des détails supplémentaires concernant le calendrier d’adoption d’un projet de loi sur l’héritage, les régimes matrimoniaux et les dons. Elle demande si les hommes et les femmes ont un accès égal aux institutions traditionnelles de justice. Ces institutions manifestent-elles une discrimination contre les femmes et leurs membres reçoivent-elles une formation dans le domaine de la Convention? Concernant la question de la démobilisation des combattants, elle souhaite savoir si la situation des femmes soldats a été prise en considération.

Prenant la parole en tant que membre du Comité, la Présidente note qu’en dépit de la situation d’après guerre, il est encore possible d’assurer le respect de la règle du droit et des droits de l’homme. Le rapport indique de façon explicite que la Convention a été incorporée à l’article 19 de la Constitution. Toutefois, un mécanisme national permettant au Gouvernement d’aligner sa législation sur les dispositions de la Convention, conformément à l’article 2 de la Convention, est également nécessaire.

Elle demande des informations supplémentaires sur des procédures qui permettraient de remettre en question les lois discriminatoires et de les aligner sur la Constitution et la Convention. Une telle approche peut-elle être adoptée par le Parlement? Elle demande en outre des clarifications sur le rôle du Ministère de la solidarité nationale, des droits de l’homme et des genres et souhaite savoir s’il existe des décisions de justice dans lesquelles la Convention a été évoquée de manière directe. Ces décisions pourraient-elles être citées?

M me  Nduwayo (Burundi) déclare que l’incorporation de la Convention dans la Constitution fait partie d’un processus. La Convention constitue maintenant un point de référence.

M me  Ntirampeba (Burundi) déclare que les réformes qui ont été mises en œuvre sont en deçà de celles qui avaient été envisagées dans l’Accord d’Arusha. Les nouvelles institutions n’existent que depuis 2007 et la plupart des projets mentionnés commencent à peine à être mis en œuvre alors que l’Accord a été signé en 2000.

Le Ministère de l’action sociale et de l’avancement des femmes est l’organe responsable de la rédaction du rapport et collabore avec d’autres organes nationaux pertinents, la société civile, le Gouvernement, le Parlement et le Comité des genres, des chances égales et de la protection de l’enfant.

Des lois discriminatoires existent. Le Code de la personne et de la famille a été analysé et en 2006, le Ministère a décidé de revoir ses dispositions sur les femmes avec un budget spécifique et en coopération avec la société civile, notamment l’Association des femmes juristes du Burundi (AFJB).

Le Ministère de l’action sociale et de l’avancement des femmes est en train de revoir la loi sur les successions avec toutes les parties concernées ainsi que la société civile comme l’indique le rapport. Il ne souhaite pas néanmoins agir avec précipitation car le sujet est particulièrement sensible. L’examen est au stade final et pourrait être terminé rapidement.

Le Gouvernement actuel est d’accord pour que la Convention soit incorporée à la Constitution. La prise en compte du genre dans toutes les lois a été l’un des thèmes de sa campagne électorale. En ce qui concerne l’article 2 de la Convention, son pays reconnaît que la prééminence du mari en tant que chef de la famille a pu donner lieu à des abus et que cette loi devrait être modifiée dès que l’examen du Code la personne et de la famille sera terminé.

M me  Nduwayo (Burundi) déclare que le projet de législation sur l’héritage, les régimes matrimoniaux et les dons a été examiné par le Gouvernement qui en a discuté avec le Parlement. Il devrait entrer en vigueur à la fin de février 2008. Cette loi garantira la représentation équitable des femmes et des hommes au sein de la Commission indépendante des droits de l’homme.

M me  Ntirampeba (Burundi) note que des projets de réintégration sociale bénéficiant de financement ont été proposés à des femmes combattantes comme « prime de retour » pour leur démobilisation. Le Ministère d’action sociale et d’avancement des femmes a cherché à répondre par ce moyen à leur demande.

Le Ministère a la responsabilité d’attirer l’attention sur la Convention et de la mettre en œuvre. Cet instrument a été traduit dans la langue nationale par l’intermédiaire du Centre de la promotion des droits de l’homme et de la prévention du génocide. Une étude a été menée afin d’évaluer la connaissance par le public de la Convention à la suite de sa traduction.

Grâce à des réunions avec la société civile et avec d’autres partenaires, le Gouvernement a pris conscience que la différence entre les hommes et les femmes concernant l’âge minimum du mariage est discriminatoire. Le Code de la personne et de la famille sera examiné à nouveau avec l’aide de la société civile et en tenant compte des changements sociaux au Burundi.

Articles 3 et 4

M me  Tavares da Silva note que le rapport fournit des informations insuffisantes sur la mise en œuvre de l’article 3 de la Convention. Il indique que des réformes juridiques sont nécessaires mais souligne qu’il n’a pas été possible au Gouvernement de les examiner et qu’elles ne constituent pas une priorité. Elle se demande si l’objectif de l’égalité des sexes n’a pas perdu son élan depuis la signature de l’Accord d’Arusha et pourquoi le Comité chargé du contrôle de la mise en œuvre de cet accord qui comprenait six femmes n’en compte plus qu’une. Il est donc contradictoire d’affirmer que le Burundi a renforcé l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité.

M me  Chutikul demande une description plus détaillée de la structure du Ministère de la solidarité nationale, des droits de l’homme et du genre et souhaite savoir si ce ministère dispose de ressources financières et humaines suffisantes. Il serait intéressant d’apprendre davantage sur les liens entre le Ministère et les centres de développement de la famille ainsi que sur leurs mandats et leur personnel. Elle demande également davantage d’informations sur le Conseil national du genre. Le Conseil est-il efficace? Sinon, quelles sont les mesures qui sont prises pour évaluer et améliorer ses opérations.

Il serait utile de savoir si, dans le cadre de leurs efforts pour faire connaître la Convention, les autorités indiquent de manière régulière comment les femmes dont les droits ont été violés peuvent présenter leurs plaintes. Elle exhorte enfin le Burundi à citer trois ou cinq mesures prioritaires pour éliminer la discrimination contre les femmes et qui pourraient être mises en œuvre dans un délai de cinq ans.

M me  Shin déclare que le rapport ne contient pas d’informations suffisantes sur le Conseil national du genre, son secrétariat exécutif permanent ou sur le Comité technique du genre. Il serait utile de savoir comment fonctionnent ces organes et notamment la fréquence de leurs réunions. Puisque le Gouvernement a élaboré un certain nombre de plans et de programmes dans différents secteurs, déclare-t-elle, il serait bon que nous soyons renseignés sur l’importance relative de la Politique nationale concernant le genre.

M me  Schöpp-Schilling déclare que l’incorporation de la Convention dans la nouvelle Constitution offre une occasion unique au Gouvernement d’introduire des mesures spéciales temporaires pour accélérer de facto l’égalité entre les hommes et les femmes. Afin d’accroître le taux d’inscription des filles dans les écoles, il peut être judicieux d’offrir des primes financières à cet effet aux familles. En vertu du paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, il est également possible de consentir un financement supplémentaire sur une base temporaire aux programmes qui visent à éliminer l’analphabétisme parmi les femmes plus âgées.

M me  Ntirampeba (Burundi) déclare que le Gouvernement a décidé de créer un Conseil national du genre en septembre 2003. Toutefois en 2004, les efforts en vue de promouvoir l’égalité des sexes a consisté à préparer les femmes à prendre part aux élections. En conséquence, le Conseil, son secrétariat permanent et le comité technique relatif au genre n’ont pas pu être créés. Des mesures sont actuellement prises pour corriger cette situation. L’objectif de la Politique nationale du genre , dont une copie a été communiquée au Comité, est d’éliminer les plus graves discriminations contre les femmes dans 12 domaines prioritaires. Des politiques transversales sont mises en œuvres par plusieurs départements du Gouvernement; chaque département ayant la responsabilité de conduire le suivi approprié et de contrôler les activités.

Des Centres de développement familial ont été établis dans 14 des 17 provinces du Burundi et le Ministère cherche des partenaires pour appuyer ses efforts en vue d’établir des centres similaires dans les provinces restantes. Les centres qui fonctionnent sur une base décentralisée fournissent des formations en alphabétisation des adultes, des séminaires d’information sur la Convention et sur d’autres instruments pertinents relatifs aux droits de l’homme. Ils coordonnent également les efforts pour combattre la violence contre les femmes au niveau provincial. Chaque Centre dispose d’au moins un fonctionnaire du niveau universitaire ainsi que d’un personnel d’appui. Bien que leur budget soit réduit, les centres poursuivent leurs activités en partenariat avec d’autres entités.

Elle explique enfin que le Comité chargé de la mise en œuvre de l’Accord d’Arusha ne comportait pas de femmes parmi ses membres en 2005 parce qu’il avait terminé ses travaux et n’existait plus.

M me  Nduwayo (Burundi) déclare que les ressources budgétaires prévues pour des activités visant à promouvoir l’égalité des genres demeurent insuffisantes. Un appui beaucoup plus substantiel est nécessaire pour garantir que les dispositions de la Convention sont appliquées de manière efficace et rapide.

M me  Ntirampeba (Burundi) déclare que les mécanismes de la justice de transition établis dans le contexte du processus de la construction de la paix sont relativement nouveaux. Toutefois, 50 % des membres du Comité mis sur pied pour piloter le processus de consultation nationale du Comité de la vérité et de la réconciliation sont des femmes.

M. Mahwera (Burundi) déclare qu’en dépit des grandes difficultés auxquelles il est confronté, le Gouvernement fait tous ses efforts pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention afin d’éliminer les discriminations contre les femmes. Malheureusement, ses efforts sont sévèrement ralentis par un manque cruel de ressources financières alors qu’un appui durable de la communauté internationale est crucial. Il est impatient d’entendre les conseils et les recommandations du Comité.

M me  Nduwayo (Burundi) donne au Comité l’assurance que les plaintes soumises aux tribunaux par les femmes seront traitées de la même façon que celles présentées par les hommes.

La Présidente reconnaît les sérieuses difficultés auxquelles fait face le Burundi dans le processus de construction de la paix mais souligne que plusieurs autres pays font l’expérience ou ont fait l’expérience des mêmes problèmes. Le dialogue constructif entre l’État partie et le Comité a pour objectif de permettre un franc échange de vues.

M me  Pimentel note qu’en vertu du Code pénal, les femmes coupables d’adultère sont sujettes à des peines beaucoup plus sévères que les hommes. Elle souhaite savoir si le Gouvernement a l’intention d’amender cette disposition et si des dispositions sont prises pour modifier les croyances culturelles qui provoquent des discriminations contre les femmes.

Les victimes de violence domestique peuvent saisir les tribunaux en invoquant la législation sur les agressions; il est néanmoins intéressant de savoir si l’État partie a l’intention d’élaborer et de promulguer un projet de loi sur la violence domestique. Le paragraphe 128 du rapport déclare que le phénomène du viol se développe à un rythme inquiétant. Elle demande si des mesures spécifiques ont été prises pour faire face à ce problème, notamment dans les milieux ruraux. À cet égard, la délégation devrait indiquer si des responsables chargés de l’application de la loi et les membres du pouvoir judiciaire ont reçu une formation dans le domaine des droits des femmes. Selon le rapport, le phénomène de la violence sexuelle est associé à la crise qui a provoqué un certain nombre de comportements désordonnés parmi les hommes. Elle souhaite avoir des renseignements supplémentaires sur les services disponibles en matière de santé mentale.

M me  Ara Begum exprime sa préoccupation à propos de la sévérité de la violence infligée aux Burundaises et qui pourrait être comparée à une sérieuse violation de leurs droits humains. Elles sont particulièrement vulnérables dans les centres de détention où les femmes et les hommes ne sont pas emprisonnées séparément. Ceux qui sont coupables de viols et d’autres formes de violence sexuelle jouissent souvent de l’impunité car les plaintes à cet égard ont tendance à être réglées de façon privée. Elle demande davantage d’informations sur le statut actuel du plan national d’action pour lutter contre la violence contre les femmes ainsi que sur le contenu et le budget qui lui est alloué. Elle demande si le Gouvernement a promulgué une loi spéciale sur la violence domestique et a lancé un programme ou une campagne contre l’attitude discriminatoire des mâles. Existe-t-il des services d’appui aux femmes déplacées pendant les conflits?

M me  Chutikul déclare que les femmes pauvres qui ont un accès limité aux services d’éducation sont particulièrement vulnérables au trafic humain. Étant donné que le rapport n’aborde pas ce sujet, l’État partie devrait indiquer s’il a conçu un plan pour lutter contre le trafic des femmes et des filles et s’il a signé et ratifié le Protocole pour prévenir, éliminer et punir le trafic des personnes , notamment des femmes et des enfants qui renforce la Convention des Nations Unies sur le crime organisé transnational; le Protocole optionnel à la Convention sur les droits des enfants, la vente des enfants, la prostitution des enfants et la pornographie infantile et la Convention 182 de l’Organisation internationale du Travail sur les pires formes du travail des enfants. Les rapports des ONG laissent penser que des Burundaises ont fait l’objet de trafic au Liban. Elle demande si l’État partie veut faire un commentaire à cet égard et de façon beaucoup plus générale, elle souhaiterait avoir des informations supplémentaires sur les relations du Gouvernement avec les pays de destination.

Intervenant en tant que membre du Comité, la Présidente demande la mise à jour des progrès accomplis dans l’application des recommandations du Comité contre la torture concernant l’inclusion dans le Code pénal d’une disposition qui pénalise la violence sexuelle domestique (CAT/C/BDI/CO1, p. 4) et attire l’attention sur la Recommandation générale no 129 du Comité sur la violence contre les femmes. En 2006, le Secrétaire général des Nations Unies a publié une étude en profondeur sur la violence contre les femmes qui contient des recommandations pour des plans d’action nationale et des lois qui peuvent intéresser le Gouvernement.

M me  Nduwayo (Burundi) déclare que son gouvernement et le Ministère concerné attachent une énorme importance à la violence contre les femmes. Tout le pays est impliqué dans la campagne « 16 jours d’action pour mettre fin à la violence contre les femmes », une initiative globale du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) dont l’objectif est d’attirer l’attention sur ce problème dans tout le pays. Lors d’une récente campagne sur ce thème, des victimes de viol ont parlé de leur expérience afin d’encourager d’autres victimes à s’exprimer également. Les centres de développement familial dans les communautés locales apportent des soins médicaux et un appui matériel et moral aux victimes car plusieurs de ces femmes sont rejetées par leur famille qui considère qu’elles leur apporte le déshonneur. Malheureusement, le nombre de victimes de viol continue d’augmenter; ce phénomène étant une des blessures infligées à la société burundaise par le conflit armé.

Sur le point de savoir si les femmes informent la police de la violence domestique qu’elles subissent aux mains de leurs maris, elle déclare que les organisations de femmes leur apprennent à s’exprimer contre cette violence mais le changement de comportement fait partie d’un long processus.

M me  Ntirampeba (Burundi) déclare que l’élaboration d’une loi sur la violence domestique est à l’ordre du jour du Ministère depuis 2008. Le règlement extrajudiciaire des cas de viol est une réalité au Burundi et est utilisé comme moyen de compensation pour la victime et sa famille qui ne qualifient pas ouvertement l’infraction de viol. Les radios locales répètent à l’envi que de telles méthodes ne devraient pas être utilisées pour régler des crimes violents mais la pratique persiste. Des efforts persistants dans ce sens devraient finir par produire des résultats.

Des soins de santé mentale tant pour les victimes que pour les délinquants sont fournis avec l’aide d’organisations non gouvernementales afin d’empêcher les violeurs de récidiver après avoir accompli leur peine. Le viol commis par une personne infectée par le sida est puni beaucoup plus sévèrement en vertu du Code pénal.

Le Ministère vient de signer avec la Police nationale un accord qui vise à former les officiers qui sont aux prises avec des cas de violence domestique et sexuelle, à établir une cellule relative au genre dans les commissariats pour s’occuper des victimes et à établir un numéro d’appel d’urgence. La section des femmes du Programme de transition de reconstruction postconflit était un projet à court terme dans quatre provinces occidentales qui ont fait l’expérience de longues périodes de conflits.

Abordant la question du trafic des femmes et des jeunes filles, elle reconnaît que le problème n’est pas encore pleinement abordé. Toutefois la Convention no 192 de l’OIT fait partie d’un programme national de genre et des mesures sont prises pour l’appliquer. Un plan d’action sur le trafic a été élaboré en 2004; il a été suivi par un plan d’urgence en 2005. Un projet sur l’égalité des genres et la violence contre les femmes a été financé en 2006 par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) mais il a pris fin avant que ses activités aient porté fruit. Durant l’observation des 16 jours d’action en 2007, un programme global d’action a été élaboré avec des stratégies et des programmes spécifiques. Une coordination régulière entre tous les acteurs pertinents est en cours depuis 2003. Chaque plan annuel porte sur les domaines de la mobilisation, de la formation et de l’appui médical, juridique et psychosocial aux victimes des trafics ainsi que sur la coordination. L’amélioration de la coordination sera au centre des efforts en 2008.

Articles 7 à 9

M me  Arocha Dominguez déclare que le rapport ne dit pas si des progrès ont été accomplis afin que 30 % des sièges à l’Assemblée nationale soient alloués aux femmes comme l’exige la Constitution. Elle souhaite également savoir s’il y a eu des progrès aux niveaux régional et local et si des mesures spéciales temporaires ont été prises. Des informations sur les efforts en vue d’atteindre le quota de 30 % de femmes dans les agences du Gouvernement sont également nécessaires ainsi qu’une mise à jour des progrès accomplis pour inscrire les femmes et les jeunes filles dans le registre civil et leur permettre ainsi de participer aux élections et à la vie publique comme le Comité l’avait demandé lors de l’examen du rapport initial en 2000.

M me  Halperin-Kaddari demande à la délégation de commenter le tableau qui figure au paragraphe 70 du rapport qui indique un déclin important dans le nombre des femmes représentées au Bureau du Procureur. La tendance est alarmante car le Bureau est responsable de la poursuite des cas de violence contre les femmes.

M me  Gaspard rappelle que le quota de 30 % de la participation des femmes devrait être considéré comme un minimum plutôt qu’un plafond. Elle demande s’il existe des mesures temporaires qui visent à accroître le nombre des femmes dans les postes élevés du Gouvernement et de la diplomatie.

En ce qui concerne l’article 9, l’information qui figure au rapport, les réponses à la liste des questions et la déclaration liminaire sont contradictoires. La position du Burundi n’est pas conforme à la Convention parce qu’il n’est pas juridiquement possible à une femme de donner son nom à ses enfants. Des progrès sont nécessaires dans ce domaine.

M me  Nduwayo (Burundi) déclare que les femmes constituent actuellement 32 % de l’Assemblée nationale et du Sénat et détiennent approximativement 30 % des postes dans d’autres domaines du Gouvernement. Au niveau de la colline, la représentation des femmes est de 14 % mais le seul fait qu’elles aient été élues chefs des collines représente un progrès.

M me Ntirampeba (Burundi) déclare que l’objectif de 30 % des sièges à l’Assemblée nationale et au Sénat a pu être atteint grâce à un travail sans relâche et une grande détermination. Si l’on se rappelle qu’avant 2004, aucune femme n’avait été élue à la tête d’une colline , on peut mesurer le progrès parcouru.

La séance est levée à 13 heures.