Observations finales concernant le deuxième rapport périodique de la République arabe syrienne *

Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique de la République arabe syrienne (CEDAW/SYR/2) à ses 1223e et 1224e séances le 4 juillet 2014 (voir CEDAW/C/SR.1223et 1224). La liste des questions suscitées par le deuxième rapport périodique est publiée dans le document CEDAW/C/SYR/Q/2 et les réponses de la République arabe syrienne figurent dans le document CEDAW/C/SYR/Q/2/Add.1.

A.Introduction

Le Comité se félicite vivement de la présentation opportune du deuxième rapport périodique de l’État partie, malgré le conflit armé qui sévit dans le pays, ainsi que de ses réponses écrites à la liste des questions soulevées par le groupe de travail présession. Il accueille également avec satisfaction la présence de la délégation de l’État partie et son exposé verbal. Cependant, le Comité regrette que des informations n’aient pas été fournies à certaines des questions qu’il avait posées verbalement lors du dialogue.

Le Comité se félicite de l’envoi par l’État partie d’une délégation de haut niveau, dirigée par Kinda Al-Shammat, Ministre des affaires sociales. La délégation comprenait les chefs de la Commission syrienne pour les affaires familiales et de l’Union générale des femmes ainsi que des représentants du Ministère de la justice, des Femmes syriennes pour l’initiative de paix et de la Mission permanente de la République arabe syrienne auprès de l’Organisation des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité accueille avec satisfaction la ratification des instruments internationaux suivants depuis l’examen en 2007 du rapport initial de l’État partie (CEDAW/C/SYR/1) :

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et son protocole facultatif en 2009;

b)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants et le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, en 2009.

C.Facteurs et difficultés empêchant la mise en œuvre effective de la Convention

Le Comité estime que la poursuite du conflit armé et l’ampleur de la violence contre les femmes entravent la mise en œuvre de la Convention. Mais il juge également que cette mise en œuvre, en particulier en période de conflit, est le moyen le plus efficace de garantir le respect intégral et l’exercice des droits de la femme. Il demande donc instamment à l’État partie d’accorder la plus haute priorité à l’application des recommandations figurant dans les présentes observations finales pour assurer la mobilisation nationale et l’appui international. Il demande à l’État partie de prendre dûment en considération, lors de la mise en œuvre des présentes observations finales, la recommandation générale no 30 sur les femmes dans la prévention des conflits, les conflits et les situations d’après conflit en établissant un mécanisme spécial de coordination avec la participation de toutes les institutions compétentes de l’État à tous les niveaux, de l’Assemblée du peuple, des conseils provinciaux, de l’appareil judiciaire et d’autres parties prenantes, y compris les acteurs internationaux qui fournissent actuellement un appui à l’État partie pour parvenir à une paix durable et globale.

D.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Assemblée du peuple

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif dans la mise en œuvre intégrale de la Convention (voir la déclaration faite par le Comité sur ses relations avec les parlementaires, adoptée à la quarante-cinquième session, en 2010). Il invite l’Assemblée du peuple à prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les présentes observations finales dès à présent et jusqu’à la soumission du prochain rapport au titre de la Convention.

Contexte général

Le Comité est catastrophé par les conséquences dévastatrices de la poursuite du conflit armé dans l’État partie, qui entre dans sa quatrième année, pour la population civile, en particulier les femmes et les filles. Il est préoccupé par des informations concordantes faisant état d’attaques dirigées contre les civils, de bombardements aériens, de barils bourrés d’explosifs, d’attaques au mortier et du refus d’autoriser l’aide humanitaire telle que l’acheminement de vivres et de fournitures médicales aux zones assiégées. Il est également préoccupé par, notamment, la violence sexuelle, les mariages forcés et les mariages d’enfants, la torture, les détentions arbitraires et les enlèvements de femmes et de filles par toutes les parties au conflit. Le Comité regrette que l’État partie ne reconnaisse pas la responsabilité qui lui incombe pour ses actes au regard du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme. Il constate que l’État partie admet que les femmes et les filles sont particulièrement touchées par le conflit, mais il s’inquiète que la discrimination tenace à l’égard des femmes, qui existait déjà avant le conflit, au mépris des obligations découlant de la Convention, et qui n’a pas reculé, contribue fortement à l’exacerbation actuelle de la discrimination et de la violence à l’égard des femmes et des filles dans l’État partie par toutes les parties au conflit.

Le Comité demande instamment à l’État partie de décréter immédiatement un cessez-le-feu et de lever le siège dans toutes les zones. Il rappelle à l’État partie que les obligations qui lui incombent, en vertu de la Convention, d’éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, y compris la violence à l’égard des femmes et des filles, sont impératives et qu’elles continuent de s’appliquer dans les situations de conflit, comme indiqué dans la recommandation générale no 28 du Comité sur les obligations fondamentales découlant, pour les États parties, de l’article 2 de la Convention. Le Comité rappelle également qu’en pareilles situations, les articles de la Convention sont complétées par les dispositions pertinentes du droit international humanitaire, du droit des réfugiés et du droit pénal, comme indiqué dans sa recommandation générale n o  30. Il demande instamment à l’État partie :

a) De se conformer à l’obligation qui lui incombe d’assurer la protection des femmes et des filles en vertu de la Convention, du droit international humanitaire, du droit des réfugiés et du droit pénal, dont les dispositions sont complémentaires les unes des autres;

b) D’autoriser l’accès indépendant des entités de l’Organisation des Nations Unies, notamment du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, à toutes les zones pour leur permettre de suivre les violations des droits de l’homme perpétrées contre la population civile, y compris les femmes et les filles, de rassembler des preuves à leur sujet et d’en déterminer l’ampleur et l’étendue;

c) De prendre des mesures permettant de lutter efficacement contre l’impunité et de s’acquitter de son obligation de prévenir les crimes et violations graves de droits de l’homme perpétrés contre les femmes et les filles par les forces gouvernementales, les milices affiliées et les groupes armés non étatiques, de mener des enquêtes sur ces violations et de poursuivre et punir les auteurs, conformément aux normes internationales.

Femmes déplacées à l’intérieur du pays et autres personnes ayant besoin d’une aide humanitaire

Le Comité est particulièrement préoccupé par :

a)L’inapplication de la résolution 2139 (2014) du Conseil de sécurité, dans laquelle ce dernier exige un accès humanitaire rapide, sûr et sans entrave aux plus de 10 millions de personnes qui ont besoin d’une assistance en raison du conflit dans l’État partie (6,4 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays, 241 000 personnes bloquées dans les zones assiégées et de nombreux réfugiés dans des pays voisins);

b)Le fait que les femmes et les filles représentent l’immense majorité de la population ayant besoin d’une aide humanitaire;

c)Les informations concordantes selon lesquelles les femmes et les filles syriennes déplacées à l’intérieur de leur pays ou en dehors de celui-ci sont particulièrement vulnérables à la violence et à l’exploitation sexuelles ainsi qu’aux mariages forcés et aux mariages d’enfants ou qu’elles ont été victimes de telles exactions.

Le Comité rappelle que la Convention s’applique à tous les stades du cycle de déplacement, comme indiqué dans sa recommandation générale n o 30. Il demande instamment à l’État partie :

a) D e collaborer pleinement avec l’Organisation des Nations Unies pour assurer l’accès rapide, sûr et sans entrave des organismes humanitaires partout en République arabe syrienne, notamment en décrétant immédiatement un cessez-le-feu, conformément aux résolutions 2139 (2014) e t 216 5 (2014) du Conseil de sécurité ainsi qu’aux résolutions et accords ultérieurs;

b) D e prendre en compte les risques spécifiques et les besoins particuliers des divers groupes de femmes et de filles déplacées à l’intérieur du pays, qui sont victimes de formes multiples de discrimination, notamment les veuves, les femmes handicapées et les femmes âgées;

c) D e prendre des mesures concrètes pour prévenir toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, notamment la violence et l’exploitation sexuelles, ainsi que les pratiques préjudiciables, telles que les mariages forcés et les mariages d’enfants, et pour assurer la protection de ces personnes;

d) D e veiller à ce que des mécanismes de responsabilisation soient mis en place dans toutes les situations liées au déplacement et de fournir aux victimes un accès immédiat à des services médicaux.

Le Comité demande aux groupes armés non étatiques , qui ont signé la Déclaration d’engagement sur le respect du droit international humanitaire et la facilitation de l’aide humanitaire , de respecter celle-ci afin de permettre aux civils, en particulier aux femmes et aux enfants, d’avoir accès à l’assistance humanitaire.

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des ressources financières obtenues à l’issue des appels humanitaires de l’Organisation des Nations Unies en faveur de la République arabe syrienne et il demande à la communauté internationale de s’assurer que toutes les annonces de contributions sont intégralement acquittées et d’apporter des contributions supplémentaires pour répondre aux besoins urgents des personnes touchées, en particulier des femmes et des filles.

Les femmes et la paix et la sécurité

Le Comité note que le Ministère des affaires sociales a organisé, conformément à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, un atelier pour examiner le rôle des femmes dans les initiatives de reconstruction et de consolidation de la paix en novembre 2013, puis une conférence en janvier 2014. Toutefois, il constate avec préoccupation :

a)Que le processus n’était pas ouvert à tous et a exclu des femmes syriennes qui étaient des personnalités éminentes de la société civile;

b)Que la pluralité des voix des femmes a été marginalisée lorsqu’il s’agissait d’une participation active et véritable aux efforts de négociation de la paix, tels que la Conférence de Genève sur la Syrie;

c)Qu’en l’absence de participation véritable des femmes à toutes les étapes des initiatives de paix et de reconstruction, ainsi qu’aux mécanismes de justice transitionnelle et de réconciliation nationale, les priorités des femmes touchées par le conflit ne seront pas pleinement prises en compte, contrairement à ce qu’exigent la Convention et la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, ce qui pourrait entraîner l’échec de ces processus.

Le Comité rappelle sa recommandation générale n o 25 sur les mesures temporaires spéciales et sa recommandation générale n o 30 et demande instamment à l’État partie :

a) D e relancer les négociations de paix et de garantir la participation véritable et sans exclusive des femmes de différentes opinions politiques à toutes les étapes du processus de paix et à toutes les initiatives de reconstruction ainsi qu’aux processus de justice transitionnelle, en particulier au niveau de la prise de décision s et dans les instances nationales et locales et, à cette fin, d’adopter des mesures temporaires spéciales telles que des quotas, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention;

b) D ’élaborer des programmes de renforcement des capacités à l’intention des femmes qui souhaitent participer aux processus de paix, de reconstruction et de justice transitionnelle;

c) D ’offrir aux femmes et aux organisations de la société civile la possibilité de contribuer au processus de paix en tant qu’acteurs indépendants, par exemple en mettant en place un moyen de communication efficace entre elles et l’équipe de médiation afin d’assurer la coordination et des initiatives conjointes pour la prise en compte des priorités des femmes;

d) D e réaffirmer le caractère non négociable de tous les droits consacrés par la Convention et d’adopter une stratégie visant à prévenir tout recul en ce qui concerne les droits des femmes dans le cadre des négociations de paix;

e) D ’instaurer ou de relancer un processus politique visant à établir une paix globale et durable qui permet de jeter les bases d’une véritable démocratie fondée sur l’état de droit;

f) D ’assurer la participation sans exclusive des femmes à l’élaboration et à la mise en œuvre du plan national d’action concernant l’application de la résolution 1325 (2 0 00) du Conseil de sécurité et des résolutions ultérieures et, ce faisant, d’incorporer, conformément aux obligations qui lui incombent en vertu de la Convention et des présentes observations finales, un modèle d’égalité réelle portant sur tous les droits consacrés dans la Convention afin de s’assurer que les besoins et les priorités des femmes sont dûment pris en compte; et

g) D ’établir une feuille de route, assortie d’un calendrier précis, de normes et d’un budget tenant compte des sexospécificités, pour mettre en œuvre le plan d’action national, de définir les indicateurs permettant d’assurer le suivi régulier de sa mise en œuvre et de prévoir des mécanismes de responsabilisation.

Réserves

Le Comité se félicite de l’engagement renouvelé de l’État partie de retirer ses réserves aux articles 2 et 15 (par. 4) de la Convention. Il constate toutefois avec préoccupation que l’État partie n’a pas encore envisagé jusqu’ici de retirer ses réserves aux articles 9 (par. 2), 16 (par. 1 c), d), f) et g) et 2) et 29 (par. 1).

Le Comité engage l’État partie à achever d’urgence la procédure interne en vue du retrait de ses rése rves aux articles 2 et 15 (par.  4) de la Convention. Il lui demande également de réexaminer ses autres réserves à la Convention, compte tenu de la déclaration du Comité sur les réserves (adoptée à la dix-neuvième session en 1998), en vue de les retirer toutes.

Cadre constitutionnel et législation discriminatoire

Le Comité note que l’article 33 de la Constitution de 2012 consacre le principe formel de l’égalité des citoyens syriens sans discrimination. Il est toutefois préoccupé par :

a)L’absence de définition de la discrimination à l’égard des femmes, conformément à l’article 1 de la Convention;

b)Le renforcement à l’article 3 de la Constitution des règles des communautés religieuses, situation qui compliquera et retardera les efforts visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes, au détriment des droits des femmes;

c)Les dispositions discriminatoires à l’égard des femmes dans plusieurs articles du Code pénal (par exemple, les articles 473 à 475, 508 et 548), la loi relative au statut de la personne (par exemple, les articles 12, 37, 70, 85 et 163) et l’article 3 de la loi relative à la nationalité;

d)L’absence d’informations détaillées sur l’examen continu de toutes les lois, conformément à l’article 154 de la Constitution, notamment en ce qui concerne la modification ou l’abrogation de toute disposition légale discriminatoire à l’égard des femmes.

Le Comité recommande que, dans le cadre de l’examen continu de sa législation, l’ État partie  :

a) I ncorpore dans la Constitution ou son droit interne des dispositions sur l’égalité des hommes et des femmes et sur l’interdiction de la discrimination, directe ou indirecte, à l’égard des femmes dans les sphères publique et privée, et qu’il prévoie des sanctions à cet égard, conformément aux articles 1 et 2 de la Convention;

b) R évise l’article 3 de la Constitution afin de le mettre en conformité avec la Convention;

c) A broge toutes les dispositions discriminatoires du Code pénal, de la loi sur le statut de la personne et des autres lois, directives et règlements pertinents.

Mécanisme national pour la promotion de la femme

Le Comité constate avec préoccupation que le mécanisme national pour la promotion de la femme, à savoir la Commission syrienne pour les affaires familiales, a été déclassé et qu’il relève désormais du Ministère des affaires sociales. Il prend note des précisions apportées par l’État partie durant le dialogue, selon lesquelles la Commission défend les droits de la femme, et il se félicite des efforts déployés par celle-ci pour remédier aux conséquences néfastes du conflit sur les femmes. Il est cependant préoccupé par l’absence de stratégie complète et inclusive à cet égard.

Le Comité rappelle que le fait de privilégier le rôle traditionnel de mère des femmes au détriment de leur rôle en tant qu’individus titulaires de droits est contraire à l’objectif de la Convention, qui est de promouvoir la condition de la femme. Conformément à sa recommandation générale n o 6 sur un mécanisme national efficace et la publicité, le Comité recommande à l’État partie :

a) D e renforcer les capacités de la Commission syrienne pour les affaires familiales pour lui permettre de jouer un rôle majeur dans la promotion de la femme durant les processus de consolidation de la paix et de reconstruction, en la dotant de ressources humaines, techniques et financières suffisantes, en veillant à ce qu’elle soit effectivement consultée lors de la formulation, la conception et la mise en œuvre des politiques publiques et en renforçant son rôle de coordination à tous les niveaux de gouvernement, en particulier au niveau ministériel;

b) D ’adopter un plan national visant à évaluer et pallier les conséquences néfastes du conflit sur la vie des femmes et des filles, conformément à la Convention et à la résolution 132 5 (2000) du Conseil de sécurité, en assurant la mise en œuvre effective de ce plan grâce à des budgets tenant compte des sexospécificités, une évaluation et un suivi réguliers de son application fondée sur des indicateurs, et des mécanismes de responsabilisation.

Stéréotypes et pratiques néfastes

Le Comité constate avec préoccupation la persistance d’attitudes patriarcales et de stéréotypes tenaces concernant les rôles et responsabilités des femmes, qui sont tous discriminatoires à leur égard, qui perpétuent leur subordination dans la famille et la société et qui, en dernière analyse, limitent leurs droits consacrés dans la Convention. Le Comité est notamment préoccupé par :

a)La relation étroite qui existe entre le cadre juridique de l’État partie, certaines tendances culturelles négatives et la perpétuation de pratiques néfastes telles que les mariages d’enfants et les mariages forcés, les crimes commis soi-disant pour l’« honneur » ainsi que d’autres formes de violence à l’égard des femmes;

b)L’exacerbation des conséquences des stéréotypes sexistes négatifs sur la vie des femmes et des filles pendant le conflit, en raison de la peur d’enlèvements, de viols ou de stigmatisation en cas d’arrestation de femmes ou de filles d’une famille;

c)Le rôle des groupes armés non étatiques dans la perpétuation et l’exacerbation de la subordination sociale des femmes par l’imposition à ces dernières de codes de conduite stricts dans les régions qu’ils contrôlent, ainsi que le rôle des responsables religieux qui ont émis des fatwas, contribuant ainsi à faire des femmes des objets et des marchandises.

Le Comité demande instamment à l’ État partie  :

a) D ’adopter, conformément aux articles 2 et 5 de la Convention, une stratégie globale visant à éliminer toutes les pratiques néfastes et les stéréotypes négatifs perpétuant la subordination des femmes dans la société, qui doit comprendre des actions de sensibilisation en direction du grand public, des médias et des responsables religieux et communautaires, en collaboration avec la société civile et les organisations de femmes;

b) D ’évaluer l’impact de l’exacerbation des stéréotypes négatifs et des attitudes patriarcales et traditionnelles tenaces sur les femmes durant le conflit afin de disposer d’informations qui permettront d’élaborer des mesures législatives et autres visant à mettre un terme à la discrimination à l’égard des femmes dans toutes les sphères de la vie et à instaurer une égalité véritable entre les sexes après le conflit.

Conformément à sa recommandation générale n o 30, le Comité demande aux groupes armés non étatiques de respecter les droits fondame ntaux des femmes consacrés dans la Convention.

Crimes commis soi-disant pour l’« honneur »

Le Comité est préoccupé par les dispositions discriminatoires du Code pénal qui permettent aux auteurs de crimes commis soi-disant pour l’« honneur » d’invoquer la défense de l’honneur comme circonstance atténuante (art. 192 et 242). Il note également avec préoccupation la modification partielle apportée à l’article 548 du Code pénal par le décret no 1/2011 qui n’a pas complètement aboli les circonstances atténuantes pour les auteurs de tels crimes. Le Comité est en outre préoccupé par la fréquence de cette pratique néfaste dans l’État partie et par le fait que la plupart de ces crimes ne sont pas dénoncés.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D ’abroger les articles 192, 242 et 548 du Code pénal afin de garantir que les auteurs de crimes commis soi-disant pour l’ « honneur  » ne puissent invoquer la défense de l’honneur comme circonstance atténuante;

b) D ’éliminer l’impunité dans le cas des crimes commis soi-disant pour l’ « honneur  », notamment en renforçant l’identification et les enquêtes au sujet de ces crimes ainsi que les poursuites et les sanctions pénales contre les auteurs;

c) D ’assurer la protection des personnes dénonçant ces crimes ainsi que des femmes et des filles qui risquent d’être victimes de tels crimes.

Violence à l’égard des femmes en période de conflit

Le Comité note que l’État partie envisage d’incorporer une disposition sur la violence sexuelle, en particulier le viol considéré comme crime de guerre, dans le Code pénal. Le Comité est profondément préoccupé par l’exacerbation de la violence à l’égard des femmes depuis l’éclatement du conflit en 2011. Il est préoccupé par :

a)Les informations, fournies par l’État partie selon lesquelles les femmes risquent d’être victimes de violences commises par les groupes armés non étatiques plutôt que par les forces gouvernementales, informations qui contredisent les observations concordantes sur diverses formes de violence à l’égard des femmes, notamment des sévices physiques et des viols perpétrés par les forces gouvernementales et les milices affiliées lors de perquisitions et aux postes de contrôle, ainsi que dans les centres de détention;

b)Les allégations prouvées de violences sexuelles à l’égard des femmes, en particulier les viols commis par les groupes armés non étatiques;

c)L’augmentation des cas prouvés de prise d’otages, de rapts, d’enlèvements, de disparitions forcées et d’arrestations arbitraires de femmes et de filles, par toutes les parties au conflit, en vue d’obtenir une rançon ou de procéder à un échange de prisonniers;

d)Les informations insuffisantes sur les efforts déployés par l’État partie pour constituer des dossiers concernant les cas de violences sexuelles qui se sont produits pendant le conflit ainsi que l’impunité généralisée, faute d’enquêtes, de poursuites et de sanctions, dont bénéficient les auteurs de toutes les formes de violence à l’égard des femmes dans le cadre du conflit, en particulier la violence sexuelle, et l’inaccessibilité de la justice et d’indemnisations pour les victimes;

e)L’inexistence de soins de santé et de services psychologiques appropriés pour les victimes de violence, en particulier de violences sexuelles.

Conformément à la Convention et à sa recommandation générale n o 30, le Comité demande instamment à l’État partie :

a) D ’interdire et de combattre toutes les formes de violence à l’égard des femmes, en particulier la violence sexuelle, exercées par les forces gouvernementales, les milices affiliées et les groupes armés non étatiques;

b) D ’amender le Code pénal pour incorporer des dispositions relatives à la violence sexuelle, en particulier le viol comme crime de guerre, conformément aux normes internationales;

c) D e mener des enquêtes, d’engager des poursuites et de prendre des sanctions dans tous les cas de violence à l’égard des femmes, notamment les cas de violence sexuelle perpétrée par les forces gouvernementales, les milices affiliées et les groupes armés non étatiques;

d) D e donner immédiatement aux forces gouvernementales des ordres leur interdisant de se livrer à la violence sexuelle, de leur rappeler qu’elles sont passibles de sanctions conformément à la résolution 2106 (2013) du Conseil de sécurité et d’abolir les dispositions législatives, notamment les décrets n o 14/1969 et 69 / 200 8, qui accordent aux responsables gouvernementaux l’immunité de poursuites, conformément aux recommandations formulées lors de l’examen périodique universel du rapport de l’État partie ( A/H R C/19/11 , par.  104.7);

e) D e garantir aux femmes et aux filles l’accès à la justice, d’appliquer des procédures sexospécifiques lors des enquêtes sur les violences sexuelles, de dispenser une formation et d’adopter des codes de cond uite et protocoles non sexistes à l’intention des forces de police et des militaires, et de renforcer les capacités de l’appareil judiciaire pour en assurer l’indépendance, l’impartialité et l’intégrité;

f) D e permettre aux femmes victimes de violences sexuelles d’avoir accès à des soins médicaux complets et de santé mentale, à des examens médico-légaux et à une assistance psychosociale fournie par des professionnels de la santé qui ont été formés à dépister les signes de violence sexuelle et à en soigner les séquelles, et de demander l’assistance des organismes et organes compétents des Nations Unies dans ce domaine;

g) D ’accorder aux victimes des mesures d’indemnisation régénératrices qui répondent aux besoins spécifiques des femmes et qui remédient aux inégalités structurelles sous-tendant la violence à l’égard des femmes, en particulier la violence sexuelle, et d’éviter que celle-ci ne se reproduise;

h) D e veiller à ce que les questions de violences sexuelles soient toujours abordées dès le début du processus de paix et qu’elles soient dûment prises en compte dans un accord de paix, et de continuer à rejeter l’amnistie pour les crimes sexistes, en particulier la violence sexuelle.

Conformément à sa recommandation générale n o 30, le Comité recommande que les groupes armés non étatiques s’engagent à respecter les codes de conduite sur la protection des droits de la femme et l’interdiction de toutes les formes de violence sexiste, en particulier la violence sexuelle.

Militantes

Le Comité se déclare profondément préoccupé par les risques auxquels sont exposées, depuis le début du conflit, les femmes qui défendent les droits de l’homme et celles qui font partie du personnel humanitaire. Il est particulièrement préoccupé par :

a)Des informations concordantes indiquant que des militantes ont fait l’objet de détentions arbitraires, de sévices physiques et de violences sexuelles perpétrées par les forces gouvernementales et les milices affiliées en raison de leur militantisme pacifique, de leur offre de soins médicaux à des membres de groupes armés non étatiques ou, dans certains cas, d’activités soi-disant antigouvernementales menées par des hommes membres de leur famille;

b)Des informations concordantes indiquant que la plupart des militantes détenues étaient accusées de terrorisme, en vertu de la loi relative à la lutte contre le terrorisme (loi no 19/2012) et, à cet égard, les définitions très générales d’actes de terrorisme, de groupes terroristes et du financement du terrorisme, qui figurent dans la loi no 19/2012, et notamment les conséquences sur les femmes de définitions aussi générales, qui exposent les militantes à des sévices et au harcèlement sexiste;

c)L’absence d’informations sur le nombre de militantes détenues pour terrorisme dans l’État partie ainsi que le nombre de femmes poursuivies et condamnées par le tribunal jugeant les cas de terrorisme;

d)L’interdiction de voyager imposée par le Gouvernement aux militantes, notamment celles qui ont quitté l’État partie parce qu’elles craignaient pour leur vie et leur sécurité, ainsi que les informations selon lesquelles les représentants consulaires de l’État partie ont refusé de renouveler les passeports de militantes qui se trouvaient à l’étranger.

Le Comité demande instamment à l’État partie :

a) D e mettre un terme à la détention de toutes les femmes qui ont participé à des activités pacifiques et humanitaires, d e libérer toutes les militantes détenues arbitrairement et de s’assurer que les femmes qui ont été libérées en vertu d’une loi sur l’amnistie ne risquent pas d’être détenues à nouveau ou d’être placées sous surveillance;

b) De garantir aux militantes leurs droits fondamentaux, notamment la liberté de mouvement, d’expression, de réunion et d’association, la nationalité, la liberté et l’intégrité de la personne, ainsi que l’accès à la justice;

c) D e prévenir les attaques et d’autres formes de sévices perpétrés contre les militantes, de mener des enquêtes sur de tels actes, de poursuivre et de sanctionner leurs auteurs et de prendre des mesures efficaces pour mettre un terme à l’impunité de tels actes;

d) D ’amender la loi relative à la lutte contre le terrorisme (loi n o 19/2012), notamment les définitions d’actes terroristes, de groupes terroristes et de financement du terrorisme, pour veiller à ce qu’elle soit conforme à la Convention et aux autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tels que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et que sa portée ne soit pas élargie dans la pratique pour viser des activités qui ne relèvent pas du terrorisme;

e) D e permettre à des observateurs internationaux indépendants et impartiaux d’avoir un accès régulier et inopiné à tous les établissements de détention; et

f) D e faire connaître le nombre de femmes détenues pour terrorisme et de garantir le droit à un procès équitable à celles qui comparaissent devant le tribunal jugeant les cas de terrorisme.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité est préoccupé par la fréquence élevée des violences à l’égard des femmes, en particulier la violence familiale et par :

a)L’absence de législation d’ensemble sur la violence familiale;

b)L’absence de dispositions explicites dans le Code pénal criminalisant le viol conjugal, et le fait que l’article 508 du Code pénal continue de permettre aux violeurs de ne pas être sanctionnés s’ils épousent leur victime, en dépit de la modification apportée par le décret no 1/2011;

c)Les retards dans la mise en place du service de la protection de la famille et le faible nombre de centres d’accueil pour les femmes victimes de violences.

Le Comité rappelle sa recommandation générale n o 19 sur la violence à l’égard des femmes et recommande à l’État partie :

a) D ’adopter une législation complète visant à prévenir et criminaliser la violence familiale, qui prévoit la protection des victimes et la fourniture d’une assistance et d’un soutien à celles-ci;

b) D ’abroger l’article 508 du Code pénal et de réviser le Code afin de criminaliser le viol dans toutes les circonstances et de criminaliser expressément la violence conjugale;

c) D ’accélérer la mise en place du service de la protection de la famille, de créer un nombre suffisant de centres d’accueil pour les femmes victimes de violences partout dans l’État partie, de renforcer les soins médicaux et les services de soutien psychologique destinés aux victimes, notamment les services de prise en charge psychologique et de réadaptation, et de veiller à ce que ces services disposent de ressources suffisantes et que leur qualité fasse l’objets de contrôles réguliers.

Traite des femmes et exploitation de la prostitution

Le Comité note que l’État partie a adopté la loi relative à la prévention de la traite d’êtres humains (loi no 3/2010) qui criminalise la traite des personnes. Il constate néanmoins avec préoccupation que la traite des femmes et des filles a augmenté pendant le conflit. Le Comité craint tout particulièrement qu’à tous les stades du cycle de déplacement, les femmes et les filles ne courent un risque élevé de traite, sous couvert de mariage, aux fins d’exploitation sexuelle.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D ’accélérer l’adoption d’un plan natio nal de lutte contre la traite d’ êtres humains et de poursuivre ses efforts visant à assurer la protection des victimes de traite et à leur fournir une assistance et des programmes de réinsertion, en coopération avec l’Organisation des Nations Unies;

b) D e veiller à ce que la loi n o 3/2010 soit efficacement mise en œuvre grâce à la publication de règlements qui en permettront l’application;

c) D e prévenir les violations de droits de l’homme, de poursuivre et sanctionner les trafiquants et les auteurs de telles violations qui sont commises dans les zones relevant de sa juridiction, qu’elles soient perpétrées par les pouvoirs publics ou des acteurs privés, et d’adopter des mesures de protection spécifiques en faveur des femmes et des filles, en particulier celles qui sont déplacées à l’intérieur de leur propre pays ou réfugiées;

d) D ’établir des rapports avec les pays voisins en vue de conclure des accords bilatéraux ou régionaux et de parvenir à d’autres formes de coopération pour éviter que les femmes et les filles ne fassent l’objet de traite dans les situations de déplacement, de protéger les droits des femmes et des filles victimes de traite et de faciliter les poursuites des auteurs.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie en ce qui concerne la représentation des femmes dans les diverses instances gouvernementales (par exemple, 20 % dans l’appareil judiciaire et 35 % dans le corps diplomatique). Toutefois le Comité constate avec préoccupation :

a)La stagnation à 12 % du niveau de la représentation des femmes à l’Assemblée du peuple depuis plus d’une décennie, et le recul du pourcentage des femmes occupant des postes gouvernementaux de 10 % à 8 %;

b)Le faible niveau de la participation en général des femmes à la vie politique et publique, notamment aux postes de responsabilité à tous les niveaux, en raison d’attitudes traditionnelles et patriarcales persistantes concernant le rôle des femmes dans la société, qui limitent leur participation;

c)L’absence de quotas pour les femmes dans la loi électorale (décret no 101/2011) et dans la loi relative aux partis politiques (décret no 100/2011); et

d)Les restrictions imposées à la création d’associations féminines et d’organisations de la société civile en raison notamment de retards considérables dans l’adoption du projet de loi relatif aux associations.

Le Comité recommande à l’État part ie  :

a) D e mener des politiques soutenues visant à favoriser la participation à part entière et à égalité des femmes à la prise de décision s , en vue de promouvoir la démocratie dans tous les domaines de la vie publique et politique aux niveaux national, régional et local, par l’adoption notamment de mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o 25 du Comité;

b) D ’amender la loi électorale (décret n o 101/2011) et la loi relative aux partis politiques (décret n o 100/2011) pour incorporer des quotas d’ au moins 30  % de femmes siégeant à l’Assemblée du peuple et dans les conseils provinciaux;

c) D ’adopter le projet de loi relatif aux associations et de veiller à ce qu’il n’y ait pas de restrictions à la création d’associations féminines et d’organisations de la société civile, qui soient contraires aux normes internationales concernant les droits de l’homme, et de s’assurer que les femmes puissent participer librement à la vie politique et publique sans ingérence du gouvernement, dans un environnement favorable qui respecte pleinement leur liberté d’expression, d’association et de réunion;

d) D e mener des activités de sensibilisation à l’importance, pour la société dans son ensemble, de la participation des femmes à la prise de décision s , notamment en tant que candidates et électrices, en vue d’éliminer les attitudes patriarcales qui découragent la participation des femmes.

Nationalité

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour amender l’article 3 de la loi relative à la nationalité (décret no 276/1969) ainsi que de l’application du décret no 49/2011 qui accorde la nationalité aux Kurdes syriens. Toutefois le Comité note avec préoccupation :

a)Les retards considérables dans l’adoption de l’amendement à l’article 3 de la loi relative à la nationalité (décret no 276/1969), qui vise à éviter que les femmes syriennes et leurs enfants ne deviennent apatrides et, étant donné la situation de conflit, les conséquences négatives de l’apatridie sur les femmes et les filles et sur leurs enfants, notamment les enfants nés de viols, des mariages au nom du jihad (jihad al- nikah), des mariages d’enfants et des mariages forcés, ces femmes et ces filles étant exclues des services réservés uniquement aux ressortissants, ainsi que le risque accru de sévices à l’encontre des femmes et des filles déplacées;

b)La lenteur de l’application du décret no 49/2011 qui accorde la nationalité aux Kurdes syriens, et le fait que de nombreuses femmes qui devraient bénéficier du décret sont apatrides.

Le Comité rappelle sa recommandation générale n o 21 sur l’égalité dans le mariage et les relations familiales et sa recommandation générale n o 30 et demande instamment à l’État partie :

a) D ’amender immédiatement la loi relative à la nationalité (décret n o 276/1969), en particulier l’article 3, pour que les femmes et les hommes bénéficient de l’égalité du droit d’acquérir, de transférer, de conserver et de changer leur nationalité, conformément à l’article 9 de la Convention, et d’en assurer la mise en œuvre;

b) D e mettre en œuvre le décret n o 49/2011 dans son intégralité pour qu’il s’applique à tous les Kurdes syriens qui sont encore apatrides, en particulier les femmes et les filles ainsi que leurs enfants; et

c) De garantir le droit des femmes et des filles touchées par le conflit d’obtenir tous les documents personnels nécessaires à l’exercice de leurs droits, notamment leur droit d’avoir ces documents délivrés à leur nom, et d’assurer la délivrance ou le remplacement sans délai de tels documents sans imposer de conditions déraisonnables, telles que l’obligation pour les femmes et les filles déplacées de revenir à leur lieu de résidence d’origine pour obtenir ces documents.

Éducation et santé

Le Comité se déclare préoccupé par l’importance des perturbations dans la fourniture de services, en particulier d’éducation et de soins de santé, notamment les soins de santé en matière de sexualité et de procréation, ainsi que l’ampleur de la destruction des infrastructures médicales et éducatives pendant le conflit. Le Comité est préoccupé par les informations concordantes indiquant que les écoles et les enseignants ainsi que les établissements de santé et le personnel médical ont été délibérément pris pour cibles par toutes les parties au conflit. Le Comité félicite l’État partie des efforts qu’il a déployés pour continuer à fournir ces services malgré les difficultés de la situation. Toutefois il est préoccupé par :

a)La progression des taux déjà élevés d’abandon scolaire parmi les filles, parallèlement à l’exacerbation des attitudes et stéréotypes patriarcaux préexistants et l’augmentation des mariages d’enfants et des mariages forcés;

b)Les problèmes qui se posent aux élèves, notamment aux jeunes femmes dans les zones assiégées ou celles qui ne sont pas sous contrôle du Gouvernement, pour accéder à des programmes leur permettant de poursuivre leurs études;

c)Les difficultés que soulève l’application du programme scolaire de base pour tous les Syriens dans les établissements scolaires mis en place pour les personnes déplacées ainsi que dans les écoles se trouvant dans les zones qui ne sont pas contrôlées par le Gouvernement;

d)La détérioration de l’état général de la santé des femmes et des filles parallèlement à l’exacerbation des attitudes discriminatoires qui limitent l’autonomie des femmes dans les choix et décisions concernant la sexualité et la santé en matière de procréation, et les conséquences négatives de cette situation sur les tendances positives enregistrées avant l’éclatement du conflit, telles que la réduction des taux de mortalité;

e)Les informations indiquant que les femmes enceintes résidant dans les zones qui ne sont pas contrôlées par le Gouvernement n’ont pu avoir accès à des soins médicaux, ainsi que les restrictions imposées par l’État partie à l’acheminement des fournitures médicales et chirurgicales et de l’assistance aux zones assiégées, tous ces facteurs ayant obligé les femmes à accoucher dans des conditions dangereuses;

f)L’inaccessibilité des soins de santé et des services de soutien psychologique pour les femmes et les filles victimes de viols, notamment de contraceptifs d’urgence et de services d’interruption de grossesse sans danger. À cet égard, le Comité constate également avec préoccupation que l’avortement n’est légal que si la vie de la mère est en danger;

g)Les contraintes financières et les problèmes de coordination qui limitent la capacité de l’État partie d’apporter efficacement assistance et appui à la population dans le besoin.

Le Comité recommande à l’ État partie  :

a) D e veiller à ce que les infrastructures éducatives et médicales soient remis es en état et reconstruit e s sans délai, de mettre un terme aux attaques contre ces établissements et de cesser de prendre pour cibles le personnel enseignant et médical, et de veiller à ce que les auteurs de tels actes, y compris les membres des forces gouvernementales et les milices affiliées, fassent sans délai l’objet d’enquêtes, de poursuites et de sanctions;

b) D ’élaborer des programmes destinés aux filles touchées par le conflit, qui ont abandonné leurs études, pour leur permettre de réintégrer l’école ou l’université une fois le conflit terminé;

c) D e coordonner ses efforts avec les parties prenantes intéressées pour s’assurer que le programme scolaire syrien soit appliqué dans toutes les écoles où sont inscrits des enfants syriens, en particulier les filles, notamment dans les pays voisins;

d) D e renforcer le secteur de la santé afin de ne pas comprimer encore davantage des services de santé déjà limités, notamment des services et informations en matière de sexualité et de procréation pour les femmes, et d’éviter que leur état de santé ne se détériore, compte dûment tenu de la recommandation générale n o 24 du Comité sur les femmes et la santé;

e) D ’accorder la priorité aux femmes enceintes d’avoir accès, indépendamment de leur lieu de résidence, à des soins de santé maternelle, notamment en matière d’accouchement, qui sont dispensés par du personnel soignant qualifié;

f) D e libéraliser les motifs juridiquement admissibles d’interruption de grossesse pour inclure notamment les cas de viol, et d’élaborer des directives sur les soins consécutifs à l’interruption de grossesse pour veiller à ce que les femmes qui deviennent enceintes par suite de viols aient un accès gratuit à des services d’interruption de grossesse sans danger;

g) D e coordonner toutes les activités avec les parties prenantes de la communauté humanitaire et des organismes de développement afin de recueillir les ressources financières nécessaires et d’adopter une approche globale qui évite les doubles emplois dans les domaines de l’éducation et de la santé et qui dessert toutes les populations défavorisées, notamment dans les zones assiégées et celles qui ne sont pas contrôlées par le Gouvernement.

Emploi et débouchés économiques pour les femmes touchées par le conflit

Le Comité demeure préoccupé par la discrimination à l’égard des femmes dans le domaine de l’emploi, qui existait déjà avant le conflit (elles ne représentent, par exemple, que 12 % de la population active). Il est particulièrement inquiet, étant donné le conflit qui sévit dans l’État partie, devant la situation des femmes qui sont devenues chefs de ménage et principal soutien de leurs familles. Il note que l’État partie garantit l’emploi et le salaire des femmes employées dans les institutions gouvernementales et qu’il met en œuvre des projets générateurs de revenus et des programmes de formation professionnelle destinés aux femmes chefs de ménage qui sont touchées par le conflit.

Le Comité réitère ses recommandations précédentes en ce qui concerne l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes en matière d’emploi ( CEDAW/C/SY R /CO/1 , par.  32). Il recommande également, conformément à sa recommandation générale n o 30, à l’État partie :

a) D e renforcer ses efforts pour fournir aux femmes affectées par le conflit, notamment aux femmes handicapées, aux veuves et aux femmes chefs de ménage, des possibilités économiques durables, et de lever effectivement tous les obstacles qui s’opposent à la participation à égalité des femmes sur le marché du travail;

b) D ’élaborer des stratégies de redressement économique qui promeuvent l’égalité des sexes comme condition préalable nécessaire à une économie durable après le conflit.

Femmes rurales

Le Comité est préoccupé par la situation précaire des femmes rurales qui souvent supportent une part disproportionnée du fardeau imposé par les situations de conflit car leurs droits à la productivité, aux moyens d’existence et à l’accès à la terre sont constamment violés. Le Comité constate également avec préoccupation l’absence d’informations sur les initiatives visant à aider et à soutenir les femmes rurales touchées par le conflit dans l’État partie.

Le Comité demande instamment à l’État partie :

a) D ’accorder l’attention voulue aux conséquences négatives du conflit sur les femmes rurales et de veiller à ce que leurs besoins spécifiques soient satisfaits et qu’elles aient accès à égalité aux services de base;

b) D ’élaborer des interventions spécifiques pour donner un effet multiplicateur aux possibilités d’autonomisation économique des femmes rurales et de veiller à ce qu’elles participent à l’élaboration de stratégies et programmes ainsi qu’à leur suivi.

Mariage et relations familiales

Le Comité constate avec préoccupation que la mise en œuvre de lois discriminatoires relatives au statut de la personne pendant le conflit exacerbe le rôle de subordination des femmes et des filles dans la société. Dans ce contexte, il est particulièrement préoccupé par :

a)L’augmentation des mariages d’enfants et des mariages forcés, sous prétexte d’une meilleure protection des filles et de la réduction du fardeau financier des familles, qui aboutissent souvent au viol;

b)Les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes mariées, dont les époux sont portées disparus, lorsqu’elles cherchent à fuir les zones touchées par le conflit avec leurs enfants car les restrictions concernant la garde des enfants ne leur permettent pas de se déplacer avec leurs enfants sans le consentement du père ou du tuteur.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D ’abroger toutes les dispositions discriminatoires de la loi relative au statut de la personne, notamment celles qui concernent les droits inégaux des femmes et des hommes en matière de mariage, de divorce, de garde des enfants, de succession, de polygamie, ainsi que les mariages d’enfants et les mariages forcés;

b) D e prendre des mesures d’urgence pour assurer la mise en œuvre efficace des directives du Ministère de l’intérieur, qui visent à faciliter les déplacements des femmes avec leurs enfants sans l’autorisation du père ou du tuteur et à leur éviter des obstacles bureaucratiques dans ce domaine.

Protocole facultatif et amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

Le Comité encourage l’État partie à ratifier le Protocole facultatif à la Convention et à accepter dès que possible l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention concernant les réunions du Comité.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité demande à l’État partie de se fonder sur la Déclaration et le Programme d’action de Beijing dans les efforts qu’il déploie pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Objectifs du Millénaire pour le développement et cadre de développement pour l’après-2015

Le Comité demande à l’État partie d’adopter, conformément aux dispositions de la Convention, une démarche soucieuse d’égalité entre les sexes dans toutes les activités qu’il mène concernant les objectifs du Millénaire pour le développement et le cadre de développement pour l’après-2015.

Diffusion

Le Comité rappelle l’obligation pour l’État partie d’appliquer systématiquement et continûment les dispositions de la Convention. Il prie instamment celui-ci d’accorder une attention prioritaire à la mise en œuvre des présentes observations finales et recommandations avant la présentation du prochain rapport périodique. Le Comité demande donc que les présentes observations finales soient diffusées sans délai, dans les langues officielles de l’État partie, aux institutions gouvernementales compétentes à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au sein du Gouvernement et des ministères, à l’Assemblée du peuple, aux conseils provinciaux et à l’appareil judiciaire, en vue d’assurer leur mise en œuvre intégrale. Le Comité encourage l’État partie à collaborer avec toutes les parties prenantes intéressées, telles que les associations d’employeurs, les syndicats, les organisations de défense des droits de l’homme et les associations féminines, les universités, les instituts de recherche et les médias. Il recommande que les présentes observations finales soient diffusées sous une forme appropriée au niveau des communautés locales pour en assurer l’application. Par ailleurs, le Comité demande que l’État partie continue de faire connaître la Convention, son Protocole facultatif et la jurisprudence pertinente, ainsi que les recommandations générales du Comité, à toutes les parties prenantes.

Assistance technique

Le Comité recommande à l’État partie de demander une assistance internationale et de recourir à l’assistance technique dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme détaillé visant à appliquer les recommandations susmentionnées et la Convention dans son ensemble. Il invite également l’État partie à poursuivre sa coopération avec les institutions spécialisées et les programmes des Nations Unies.

Ratification d’autres instruments

Le Comité note que le respect par l’État partie des neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme renforcera l’exercice par les femmes de leurs libertés et droits fondamentaux dans tous les aspects de leur vie. Il encourage donc l’État partie à envisager de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, à laquelle il n’est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an, des informations écrites sur les mesures prises pour appliquer les recommandations figurant aux paragraphes 14 a) et b), 16, 27 c) et d) et 30 c) plus haut.

Élaboration du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à présenter son troisième rapport périodique en juillet 2018.

Le Comité demande à l’État partie d’appliquer les directives harmonisées sur la présentation de rapports en application des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, y compris les directives harmonisées pour l’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument ( HRI/ M C /2 0 06/3 et Co r r.1 ).