Trente-cinquième session

Compte rendu analytique de la 724e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 17 mai 2006, à 15 heures

Présidente :Mme Manalo (Présidente)

puis :Mme Schöpp-Schilling (Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Premier et deuxième rapports groupés du Turkménistan (suite)

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports soumis par les États partiesconformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Premier et deuxième rapports groupésdu Turkménistan (suite) (CEDAW/C/TKM/1 et 2, CEDAW/C/TKM/Q/2 et CEDAW/C/TKM/Q/5/ Add.1)

Article 10

M me  Tavares da Silva exprime le vœu que le prochain rapport comprendra, non seulement des données statistiques, mais aussi des détails plus substantiels. Il faudrait notamment davantage d’informations sur la fermeture de certaines écoles russes. Un autre point qui nécessiterait des éclaircissements concerne les difficultés que les femmes connaissent pour accéder à l’enseignement supérieur. Mme Tavares da Silva apprécierait des commentaires quelconques sur la mention figurant dans un autre rapport sur la situation des femmes selon laquelle les femmes auraient du mal à finir leurs études parce qu’elles sont mariées et sont surchargées de tâches ménagères à effectuer.

Une référence a été faite, dans un autre rapport, à un décret présidentiel refusant la reconnaissance des diplômes étrangers; cette indication semble contredire une information dans le rapport selon laquelle de nombreux étudiants étudient à l’étranger. On ne comprend pas bien pourquoi les étudiants étudieraient à l’étranger si leurs diplômes ne sont pas reconnus.

M me  Tavares da Silva se dit quelque peu étonnée de la référence faite dans le rapport sur les différences de spécialités étudiées par les hommes et par les femmes. Il faudrait davantage d’informations sur les mesures prises afin d’encourager les filles à s’engager dans des filières traditionnellement masculines et sur la question de savoir s’il existe un quelconque programme de suivi régulier des programmes et des manuels pour veiller à ce que ceux-ci ne véhiculent aucune notion stéréotypée des rôles sexuels. Elle aimerait notamment savoir la manière dont hommes et femmes sont dépeints dans les manuels scolaires.

M me  Khan déclare qu’elle aimerait aussi davantage d’informations sur les raisons pour lesquelles il a été décidé de ramener de 11 à 9 le nombre d’années de scolarité obligatoire. Elle ne voit aucune raison à cette réduction, hormis des contraintes budgétaires. Il serait utile de savoir quel sera l’impact de cette décision sur l’éducation des filles.

Les réponses à la liste de thèmes et de questions (CEDAW/C/TKM/Q/5/Add.1) mentionnent quelques matières abordées dans les lycées professionnels, notamment l’économie et la planification, l’éducation, la santé et la culture et l’art. Elle aimerait des informations plus détaillées, toutefois, sur le niveau d’instruction atteint par les femmes en sciences et en technologie. Elle attire l’attention sur le paragraphe 84 du rapport, en précisant qu’elle ne voit pas bien pourquoi le tissage, la cuisine et la couture sont considérés comme devant faire partie de l’éducation féminine. Il serait utile d’avoir plus d’informations sur le nombre de femmes inscrites dans des domaines comme le génie, le marketing, la gestion et l’informatique.

Elle aimerait en savoir davantage sur la mesure dans laquelle le livre du Président turkmène intitulé Ruhnama a déterminé les programmes scolaires et influencé les jeunes au Turkménistan. On ne voit pas bien si cet ouvrage constitue ou non une base idéologique officiellement reconnue pour la nation turkmène.

Enfin, elle demande s’il existe des quotas applicables aux étudiants issus de minorités et s’il existe des différences dans les résultats scolaires des Turkmènes et des minorités ethniques. Si l’on constate effectivement des différences de résultats scolaires, particulièrement eu égard aux femmes, il serait utile de savoir si un système de quotas a été utilisé.

M me  Gaspard déclare qu’il serait intéressant de connaître l’incidence du raccourcissement de la scolarité obligatoire sur les femmes rurales. Elle aimerait savoir si les Turkmènes, en particulier les femmes, ont accès à Internet et peuvent échanger des informations avec des institutions traitant de questions féminines, surtout les Nations Unies.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare que le prochain rapport contiendra davantage de données ventilées par sexe concernant la santé et l’éducation. La raison de la réduction dans la durée de l’enseignement obligatoire tient au fait que des matières devenues inutiles comme le communisme scientifique ont été supprimées. L’enseignement obligatoire se termine à 16 ans, après quoi les étudiants peuvent intégrer des établissements d’enseignement supérieur et des établissements secondaires spécialisés. Il existe des quotas régionaux applicables aux établissements d’enseignement supérieur, et les étudiants sont sélectionnés sur concours.

Le Gouvernement a fixé l’âge de consentement pour le mariage à 16 ans afin de promouvoir la croissance démographique. La population a en fait augmenté de 6,1 % entre 2002 et 2004. Cette décision a par ailleurs permis de lutter contre le phénomène des enfants naturels.

Au Turkménistan, garçons et filles suivent le même programme scolaire, enseigné par les mêmes enseignants, de même qu’ils reçoivent les mêmes qualifications. Concernant le recyclage et le choix des spécialisations, les lycéens peuvent bénéficier d’orientation professionnelle au niveau de l’école secondaire, ce qui leur permet de s’orienter vers la carrière professionnelle à laquelle ils sont le plus adaptés.

Eu égard à la question relative aux métiers respectivement exercés par les hommes et par les femmes, Mme Ataeva déclare que certaines professions ont tendance à attirer davantage d’hommes alors que d’autres, comme la santé, l’éducation, les services sociaux, la culture et la science, ont tendance à attirer plus de femmes. Moins de femmes travaillent dans les branches industrielles, puisque le travail y est plus physique. Toutefois, les femmes poursuivent actuellement des carrières comme chauffeurs de camion, et le nombre de femmes travaillant dans les secteurs du pétrole et du transport est en augmentation.

Concernant la fermeture des écoles russes, elle déclare que la population russe a fortement baissé depuis l’indépendance du Turkménistan, du fait uniquement que la présence russe était essentiellement constituée de contingents militaires. Après le retrait de ces derniers, de nombreuses écoles sont devenues inutiles. Toutefois, on a continué d’enseigner le russe dans tous les établissements d’enseignement, et l’on dénombre quelque 1 700 écoles où l’enseignement se déroule à la fois en russe et en turkmène. Il existe par ailleurs des écoles russes où l’enseignement est exclusivement dispensé en russe. Le nombre de ces écoles est fonction des besoins. Le Gouvernement n’a pas eu connaissance d’observations quant au nombre de ces écoles.

Eu égard au décret relatif aux diplômes étrangers, le texte ne dit pas que les diplômes étrangers ne doivent pas être reconnus. L’objectif consistait plutôt à faire en sorte que les diplômes décernés à l’étranger répondent aux normes internationales en vigueur.

Les manuels scolaires ne mettent pas particulièrement l’accent sur les spécialités ou trajectoires professionnelles « masculines » ou « féminines », et il n’existe aucun quota s’agissant des inscriptions dans les établissements d’enseignement supérieur. Les conditions d’entrée sont les mêmes pour tous les citoyens turkmènes, quelle que soit leur origine ethnique.

Les femmes sont représentées au Turkménistan, pas seulement dans l’économie du pays, mais aussi dans la culture, l’art, la science et la technologie. Il n’existe aucune limite quant aux choix des spécialités. Hommes et femmes peuvent choisir librement leur trajectoire professionnelle. Les femmes sont donc présentes dans tous les secteurs. Elles ne sont pas cantonnées au tissage de tapis et à la cuisine, par exemple. Hommes et femmes peuvent étudier dans les mêmes conditions le marketing, l’informatique et autres sujets analogues s’ils le souhaitent.

Concernant le Ruhnama, il ne constitue pas le fondement idéologique de la nation. Il est enseigné en raison des valeurs morales qu’il véhicule. D’abord et avant tout, il promeut le respect de la femme et condamne la discrimination à son égard. Par conséquent, il convient de l’aborder de manière positive.

Concernant la formation des responsables à la lutte contre la discrimination, l’Union des femmes et le Parlement du Turkménistan ont organisé cours et ateliers sous les auspices de l’UNICEF et du FNUAP afin de sensibiliser aux droits des femmes.

Tous les citoyens ont accès à Internet à un prix abordable. Même si le réseau n’est pas encore pleinement développé, le Gouvernement s’efforce de diffuser le réseau aussi largement que possible parce qu’il a compris l’intérêt de l’information disponible sur Internet.

Si la santé génésique n’est pas une matière obligatoire à l’école, discussions et conférences sur la question sont organisées séparément pour garçons et filles.

La Présidente, s’exprimant à titre personnel, déclare que le prochain rapport devra préciser la relation entre l’indice de développement et des inégalités entre les sexes et l’indice de développement du potentiel humain mentionné dans la déclaration introductive de la délégation. Sans ces précisions, elle ne saurait accepter la déclaration selon laquelle la relation entre les deux indicateurs démontre qu’il n’existe dans le pays que des écarts minimes entre hommes et femmes au chapitre du développement humain.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare que ces informations figureront dans le prochain rapport comme demandé.

Article 11

M me  Patten déclare que, selon des rapports indépendants, de nombreux postes d’enseignant auraient été supprimés après le raccourcissement de la durée de la scolarité obligatoire. Des sources indépendantes ont aussi indiqué que 15 000 emplois dans le secteur des soins de santé ont été supprimés en 2004; ces deux réductions ont directement touché les femmes. Elle demande des chiffres sur le nombre de femmes et d’hommes frappés par ces coupures et des renseignements sur les mesures prises pour offrir aux femmes concernées d’autres débouchés d’emploi.

Certains rapports indépendants font état de taux de chômage allant jusqu’à 70 %. Par ailleurs, le rapport du Gouvernement mentionne que le Président a autorisé les ressortissants étrangers à travailler dans le pays pourvu que le nombre d’étrangers employés dans une entreprise donnée n’excède jamais 30 % de l’effectif total de l’entreprise. Elle apprécierait des chiffres sur le nombre de ces travailleurs étrangers et des informations actualisées sur le nombre de sans-emploi au Turkménistan.

Il faudrait par ailleurs davantage d’informations sur la ségrégation professionnelle dans le secteur formel et sur les efforts engagés par le Gouvernement en vue d’inciter les femmes à exercer des métiers traditionnellement exercés par des hommes. Il serait également utile d’avoir des données sur la participation des femmes dans le secteur informel et sur les mesures adoptées en vue de protéger les femmes dans ce secteur.

Enfin, on voit mal comment, dans la pratique, les dispositions du Code du travail mentionnées dans le rapport sont mises en œuvre, surtout eu égard à la discrimination contre les femmes sur la base de leur statut conjugal, de leurs responsabilités familiales et de la grossesse. Elle aimerait savoir dans quelle mesure les femmes sont conscientes de leurs droits sur le marché du travail, si elles sont syndiquées et si oui, si elles détiennent des postes élevés au sein des syndicats. Elle relève avec inquiétude que le Code du travail ne contient aucune disposition sur le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et aimerait savoir si le Gouvernement envisage d’introduire de telles dispositions.

M me  Saiga, faisant allusion au paragraphe 101 du rapport (CEDAW/C/TKM/1 et 2), relève que seules les mères y sont mentionnées en tant qu’allocataires d’aides de l’État pour l’éducation de leurs enfants. Elle aimerait savoir s’il est envisagé de modifier la loi afin que les pères puissent, eux aussi, bénéficier d’une telle assistance. Notant que le coût du congé de maternité est couvert par les employeurs, elle se demande si cette disposition retentit sur leur volonté d’employer des femmes et s’il est prévu de modifier ce dispositif afin que l’aide soit plutôt financée par la sécurité sociale. Elle aimerait par ailleurs savoir si les femmes sont habilitées à continuer de travailler après l’âge de la retraite et pourquoi l’âge de la retraite pour les femmes est inférieur à celui des hommes, alors qu’elles ont une espérance de vie plus longue.

M me  Schöpp-Schilling, faisant allusion au chômage touchant les femmes dans les secteurs de l’éducation et de la santé, demande quelles mesures de recyclage ont été prévues à leur intention pour leur ouvrir de nouveaux emplois. Elle s’inquiète de l’écart salarial entre hommes et femmes dans différents secteurs du Gouvernement. Dans le domaine de l’éducation et de la santé, où la majorité des employés sont des femmes, le salaire moyen ne représente que 84 % du salaire moyen dans l’administration du Gouvernement, dominée par des hommes. Elle aimerait savoir si cet écart salarial tient au fait que les femmes ne peuvent arriver aux postes de décision, même dans les secteurs où elles sont majoritaires. Est-ce plutôt que ces postes de « soignants » sont moins rémunérés parce qu’ils sont réputés constituer un prolongement du travail non rémunéré que la femme fait à la maison? Enfin, elle souhaiterait plus d’informations sur les prestations de maternité destinées aux travailleuses indépendantes.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare que les seuls domaines où l’emploi des femmes est interdit concernent certains travaux caractérisés par des conditions de travail particulièrement difficiles. Le salaire dépend non pas du sexe, mais de la nature de l’emploi et des qualifications requises pour l’exercer. Les niveaux de rémunération sont fixés par l’employeur en coopération avec les syndicats, en tenant compte des facteurs mentionnés. Un certain nombre d’études ont été menées en collaboration avec les organisations internationales sur l’emploi, le revenu et le niveau de vie, qui ont toutes constaté qu’il n’y a écart salarial entre hommes et femmes que dans les cas où les hommes ont tendance à être employés dans des secteurs comme l’industrie, où les conditions de travail sont plus difficiles et, par conséquent, le salaire plus élevé que dans des secteurs traditionnellement dominés par des femmes.

La réduction du nombre d’enseignants et de travailleurs de la santé résultant de la réorganisation des systèmes d’éducation et de santé n’a été que temporaire, puisque les institutions nouvellement créées ont fourni des emplois nouveaux aux femmes concernées. Des cours de formation appropriés ont également été proposés.

Le refus de recruter une femme pour cause de grossesse est interdit par la loi et le statut marital ne doit pas non plus entrer en ligne de compte au moment du recrutement. Les employés sont recrutés uniquement sur la base de leurs qualifications pour l’emploi en question, et ils sont pleinement conscients de leurs droits en matière d’emploi grâce aux campagnes de publicité conduites par les syndicats du pays.

Les allocations familiales ne sont pas versées uniquement aux mères, mais aux familles en général. Toutes les femmes ont droit à un congé de 112 jours à salaire plein pour grossesse et naissance, ave un congé supplémentaire en cas de naissance difficile, et les employeurs sont tenus de couvrir le coût de ce congé. Ce dispositif n’a pas pour effet d’amener les employeurs à refuser un emploi aux femmes. Toutefois, la situation fera l’objet d’un suivi et le système sera revu au besoin.

L’âge de la retraite, pour les hommes comme pour les femmes, a été relevé ces dernières années du fait de l’allongement de l’espérance de vie. Les retraités sont autorisés à continuer à travailler au-delà de l’âge de la retraite et à toucher un salaire en sus de leur pension de retraite.

Le chiffre cité concernant le chômage n’est pas exact; le vrai chiffre est de 2 % et reflète le niveau de migration interne de la population active. Les postes vacants font l’objet d’annonces dans les agences pour l’emploi de tout le pays, dans la presse et lors de foires spéciales à l’emploi ouvertes à tous, mais particulièrement ciblées sur les femmes.

Article 12

M me  Dairiam indique regretter de n’avoir pas vu d’indicateur concernant la santé et le bien-être des femmes ou la manière dont elles accèdent aux services de santé. Elle aimerait avoir davantage d’informations sur les critères d’admissibilité à l’assurance médicale et la mesure dans laquelle les femmes ont accès à une telle assurance. Elle demande aussi des renseignements sur la distance moyenne entre le domicile et le centre de santé le plus proche, le nombre moyen de personnes desservies dans chaque centre et les rapports entre le nombre de patients par médecin.

Selon des sources indépendantes, en dépit d’améliorations dans la fourniture des soins prénataux, les taux de mortalité maternelle et infantile demeurent une source d’inquiétude grave. En 2004, une étude internationale a révélé de sérieuses défaillances dans les services de santé maternelle. Des sources indépendantes ont également mis en lumière des problèmes liés aux définitions de la mortalité et de la morbidité maternelles et infantiles. Elle recommande que le Gouvernement obtienne une assistance technique dans tous ces domaines, en particulier de la part des agences spécialisées concernées du système des Nations Unies.

Aucune information n’a été fournie sur l’utilisation de la contraception. Selon des sources indépendantes, l’accès à la contraception pose problème en régions rurales. Elle apprécierait davantage d’informations sur ce point.

M me  Arocha Domínguez déclare qu’elle aussi est préoccupée par l’absence d’indicateurs spécifiques concernant la santé des femmes. Il est curieux que, bien que l’État partie ait décrit la méthode utilisée pour le calcul des taux de mortalité maternelle et infantile, aucun taux effectif n’est fourni. De plus, le Comité aurait besoin d’informations plus poussées sur la mortalité et la morbidité féminines en général, et pas uniquement s’agissant de la reproduction. Elle aimerait savoir s’il existe des programmes spécifiques pour la prévention et le traitement du cancer de l’utérus et du col de l’utérus, qui pose un problème de santé important dans la plupart des pays.

Notant que le taux de natalité a fortement progressé ces dernières années, elle demande si cette progression est due à des incitations d’un type quelconque, à une décision délibérée de la part des femmes ou simplement à un manque d’accès aux services de planification familiale. Elle apprécierait des indicateurs séparés de santé des femmes en régions rurales et urbaines, vu que près de 54 % le la population vit en régions rurales.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare qu’aucun effort ne sera ménagé pour inclure des indicateurs ventilés par sexe, par âge et par maladie dans le prochain rapport, ainsi que des données sur la mortalité maternelle et infantile. L’Organisation mondiale de la santé apporte actuellement une assistance technique à cet égard.

Dans le cadre du Programme de santé de l’État adopté en 1995, le système de santé national a été réorganisé, et des améliorations ont été apportées à la gestion des soins de santé et l’assurance médicale. La santé en régions rurales reste gratuite, et l’accès a été amélioré, tandis que les hôpitaux généralistes et les hôpitaux mères-enfants fournissent des soins spécialisés. Les petits hôpitaux ont été convertis en « maisons de santé », et plus de 4 000 centres familiaux ont été ouverts, où les soins de santé sont prodigués par des médecins de famille et des infirmières. L’assurance médicale fournit une couverture pour les services médicaux et un rabais important sur le coût des médicaments. La souscription d’une assurance est volontaire, mais plus de 93 % de la population dispose maintenant d’une couverture d’assurance.

Un projet est en cours en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) pour assurer la disponibilité de moyens de contraception et fournir une formation aux infirmières et au grand public concernant l’utilisation des moyens de contraception. De ce fait, les naissances s’espacent. Enfin, elle indique que des programmes spéciaux ont été mis sur pied pour la prévention du cancer et autres maladies. Aucun indicateur n’existe pour démontrer l’efficacité de ces programmes, mais des chiffres seront fournis dans le prochain rapport.

M me  Schöpp-Schilling (Vice-Présidente) reprend la présidence.

Article 13

La Présidente, s’exprimant à titre personnel, déclare qu’il serait utile de savoir quelles sont les conditions d’obtention d’un crédit ou d’un prêt – par exemple, si un emprunteur doit détenir des biens en garantie et, si oui, si les femmes possèdent assez de biens pour pouvoir demander un crédit – et si un emprunteur potentiel doit avoir le consentement de son conjoint. Concernant les droits de succession, elle se demande si en réalité, les filles héritent autant de leurs parents que les garçons.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare qu’un emprunteur potentiel doit posséder des biens afin d’obtenir un crédit, mais il n’a pas besoin du consentement de son conjoint. Toute femme qui estime s’être vu refuser injustement un crédit peut porter plainte en appliquant la procédure établie à cette fin. Les femmes ont le même droit d’hériter que tous les autres membres de la famille.

Article 14

M me  Simms, notant que le rapport semble indiquer que les femmes rurales sont extrêmement heureuses, déclare qu’elle souhaite savoir quel est l’âge minimum auquel une fille peut se marier en régions rurales. Elle souhaiterait également voir davantage d’informations statistiques indiquant la proportion des terres distribuées susceptibles d’appartenir à des femmes en régions rurales; si les divorcées peuvent aussi être propriétaires foncières et si, oui, si elles ont le même accès et les mêmes droits à la propriété que leurs anciens époux; et à qui appartient la terre dans un ménage comptant plusieurs générations? Les femmes rurales sont-elles considérées comme une forme de nantissement et dépendent-elles de leurs enfants dans leur grand âge?

M me  Tan déclare qu’il serait intéressant de connaître la proportion de crédits et de prêts agricoles consentis à des femmes, les sommes octroyées, la durée de remboursement et le nombre de femmes en défaut de paiement par rapport aux hommes. Elle souhaiterait davantage d’informations sur les progrès du programme New Village, mentionné au paragraphe 138 du rapport et la mesure dans laquelle les services de base – comme un logement adéquat, les écoles et l’eau courante – existent en régions rurales. Il serait par ailleurs utile de savoir quel pourcentage de femmes ont réussi à devenir propriétaires foncières suite au décret dont il est fait état au paragraphe 129 du rapport.

Elle demande si les femmes rurales travaillant dans des entreprises agricoles familiales sont rémunérées pour leur travail, et si l’État accorde la sécurité sociale et les prestations et l’assurance médicale nationale à ces femmes. Enfin, au sujet du paragraphe 130 du rapport, elle demande des détails sur les prestations versées aux femmes rurales travaillant depuis leur domicile.

M me  Zou Xiaoqiao déclare que le paragraphe 129 du rapport ne mentionne ni les conditions à remplir par un particulier pour devenir propriétaire ou locataire foncier ni si femmes et hommes ont les mêmes droits en tant que preneurs. L’État partie devrait préciser quel a été l’impact sur les femmes du fait que l’État ait transmis au secteur privé la propriété de terres agricoles. Vu l’importance des services de santé génésique, il serait utile de savoir quelles mesures l’État prend pour veiller à ce que les femmes rurales aient accès à l’information dans ce domaine. Elle a entendu dire que le taux de mortalité maternelle était de 6 pour 1 000 naissances vivantes. Il serait intéressant d’entendre les commentaires de la délégation sur ce point.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare que l’État offre certaines concessions et avantages aux propriétaires et preneurs de terres ayant des activités d’exploitation agricole – notamment en leur fournissant matériel de récolte et autres équipements agricoles, des prix de faveur pour l’achat d’engrais et de semences et de l’eau d’irrigation gratuite – et ce, quel que soit le sexe de la personne concernée. Les femmes dans l’agriculture jouissent des mêmes concessions et occasions d’obtenir du crédit que les hommes.

Même si Mme Ataeva ne dispose pas des chiffres indiquant la proportion de crédits agricoles consentis aux femmes, les montants accordés, les périodes de remboursement et la répartition du nombre de défauts de paiement entre hommes et femmes respectivement, elle est en mesure d’indiquer que, dans le cadre du programme New Village, hommes et femmes ont le même droit de demander un crédit. Les progrès d’ensemble du programme n’ont pas encore été évalués.

Il est faux de penser que les femmes rurales se marient plus tôt que les autres. Les femmes rurales ont l’occasion, notamment, de devenir preneurs de terres, travailleuses agricoles, médecins, soignantes et enseignantes, et toutes ont le droit de détenir des biens et d’utiliser leur terre à leur guise. La population rurale bénéficie des même prestations et concessions sociales que les populations urbaines et a accès à la contraception, aux services de planification familiale et aux services de santé génésique. L’ouverture de « maisons de la santé » en régions rurales a permis d’améliorer l’accès aux installations médicales et a un impact positif sur la santé de la population rurale.

Articles 15 et 16

M. Flinterman déclare que l’État partie devrait fournir davantage de données statistiques pour faciliter une évaluation plus exacte de la situation au Turkménistan; par exemple, il devrait indiquer à quel âge le mariage est contracté et quel est le taux de divorce. Des sources indépendantes rapportent que la coutume des dots payées par le fiancé reste profondément ancrée. À cet égard et compte tenu de l’impact de telles pratiques sur le libre choix de l’époux, il faudrait des informations complémentaires. Faisant allusion au paragraphe 145, il déclare qu’il serait intéressant de savoir si quiconque a été poursuivi pour enlèvement de femme aux fins de mariage et dans quelle mesure la pratique est répandue.

Enfin, il relève que, dans ses réponses, le Gouvernement n’a pas vraiment répondu aux questions 30 et 31 sur la liste de thèmes et de questions (CEDAW/C/TKM/Q/2).

M me  Tan demande si le Gouvernement envisage de relever l’âge minimum du mariage à 18 ans, afin d’aligner la loi sur la Convention des droits de l’enfant et sur la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

M me  Khan, notant qu’hommes et femmes jouissent du même droit de contracter mariage, demande s’ils jouissent des mêmes droits durant le mariage et après sa dissolution. Elle apprécierait par ailleurs des informations complémentaires concernant la pénalité applicable pour polygamie et si la polygamie constitue un motif de divorce. Enfin, il serait intéressant de savoir si hommes et femmes ont les mêmes droits de succession s’agissant des biens du père.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare qu’il n’est pas envisagé actuellement de modifier l’âge minimum pour le mariage. Même si les filles sont autorisées à se marier à 16 ans, la plupart ne le font pas avant 18 ans. En fait, les organismes sanitaires publics et les centres de santé génésique déconseillent aux jeunes adolescents de se marier jeunes. Les dots payées par le fiancé et l’enlèvement aux fins de mariage sont également punis par la loi. Des enquêtes ont montré que les jeunes filles se mariant jeunes continuaient en fait leurs études.

L’homme et la femme sont légalement responsables de l’éducation de leurs enfants, y compris après la dissolution de leur mariage, et les deux ont le droit de demander le divorce et la garde des enfants. Même si la polygamie est condamnée par le Code pénal, les mariages polygames sont juridiquement valables.

M me  Tavares da Silva déclare qu’il est difficile d’accepter l’explication de la délégation selon laquelle les salaires des femmes sont plus bas parce que leur travail est plus facile. Les postes d’infirmier et d’enseignant sont traditionnellement détenus par des femmes; pourtant, il ne s’agit aucunement de professions faciles. Il existe des critères qui pourraient être appliqués pour mesurer la valeur d’un emploi et son degré de pénibilité.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare que le Gouvernement a appliqué de tels critères et que les salaires dans chaque secteur sont revus chaque année. Elle convient que les salaires des infirmières et des enseignants mériteraient d’être revus, en fonction du niveau de responsabilité visé.

M me  Shin déclare qu’elle aimerait des informations complémentaires concernant les centres de réception des femmes dont les droits ont été bafoués. Elle aimerait savoir combien il y en a, qui s’en occupe et s’ils sont aisément accessibles aux femmes.

M me  Šimonović demande si le viol conjugal a été puni par la loi et si le Gouvernement recherche une assistance technique auprès de différentes agences des Nations Unies, telles que l’Organisation mondiale de la santé.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare que les centres d’accueil sont gérés par les autorités locales et qu’ils sont aisément accessibles aux femmes. Les centres sont tenus de répondre aux plaintes dans un certain délai et s’ils ne sont pas en mesure de résoudre le problème, ils doivent en référer aux organes appropriés. En réponse à la question sur le viol conjugal, elle déclare que tous les types de viol sont passibles de sanctions.

La Présidente déclare qu’il semble y avoir un manque de compréhension de la notion de discrimination indirecte, à savoir des lois ou des politiques qui semblent neutres mais qui ont pour effet de constituer une discrimination à l’égard des femmes. Il est impossible d’évaluer l’effet de telles lois sans données suffisantes. Le Comité recommande vivement que la délégation inclut davantage de statistiques dan son prochain rapport.

M me  Ataeva (Turkménistan) déclare que les recommandations du Comité seront prises en compte et qu’une attention particulière sera accordée, dans le prochain rapport, à la fourniture de statistiques.

La séance est levée à 17 heures.