Quarantième session

Compte rendu analytique de la 822e séance

Tenue au Palais des Nations, à Genève, le mercredi 23 janvier 2008, à 10 heures

Présidente :MmeŠimonović

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Cinquième rapport périodique du Luxembourg

La séance est ouverte à 10 h 05.

Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 18 de la Convention (suite)

Cinquième rapport périodique du Luxembourg (CEDAW/C/LUX/5 ; CEDAW/C/LUX/Q/5 et Add.1)

Sur l’ invitation de la Présidente, les membres de la délégation du Luxembourg prennent place à la table du Comité.

M me Jacobs (Luxembourg) dit qu’en février 2006, le Gouvernement a adopté un Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes. Chaque ministère a formulé des mesures avec des objectifs précis à atteindre. L’exécution du Plan d’action national sera suivie par des experts en matière d’égalité des sexes et évaluée à la fin de la période législative sur la base d’indicateurs déterminés pour chaque mesure et pour le processus global mis en place. Le Gouvernement s’est appuyé sur la Déclaration et le Programme d’action de Beijing et a intégré les recommandations du Comité dans les mesures à adopter. La réorientation des politiques de la promotion des femmes vers l’égalité des hommes et des femmes devrait encourager les hommes à prendre plus de responsabilités dans la réalisation de l’égalité des sexes.

L’intervenante est fière d’informer le Comité que le Luxembourg a levé les réserves relatives à l’article 7 et à l’alinéa g) du paragraphe 1 de l’article 16 de la Convention. Toutefois, la révision de la Constitution ne sera achevée qu’en 2008. Le projet d’article portant sur la succession au trône prévoit, au stade actuel, une succession par ordre de primogéniture. La réserve pertinente ayant été retirée, la révision devrait être accélérée. Le texte définitif sera transmis au Comité dès son adoption.

Depuis que le Luxembourg a présenté son dernier rapport, le principe de l’égalité des sexes a été renforcé à différents niveaux. L’intervenante mentionne en particulier l’inscription de ce principe au cœur du paragraphe 2 de l’article 11 de la Constitution, qui permet désormais aux femmes d’ester en justice pour faire valoir leur droit à l’égalité, la loi du 21 décembre 2007 mettant en œuvre l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l’accès aux biens et aux services et la fourniture de biens et de services, qui interdit toute discrimination sexuelle en dehors du marché du travail, et le projet de loi transposant la directive 76/207/CEE relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes dans l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles et dans les conditions de travail, qui interdit toute discrimination sexuelle. La notion de discrimination sexuelle est donc intégrée au cadre juridique.

En décembre 2006, le Gouvernement a créé un centre de l’égalité de traitement, chargé de promouvoir, d’analyser et de surveiller l’égalité de traitement entre toutes les personnes, sans distinction de race, d’origine ethnique, de sexe, de religion ou de conviction, et de surveiller les discriminations dans l’accès aux biens et aux services et la fourniture de biens et de services. La constitution de ce centre s’est avérée difficile car le Luxembourg n’a que très peu de spécialistes des questions de discrimination. Néanmoins, une spécialiste de l’égalité des sexes siège à son conseil d’administration. Les travaux du centre débuteront en février 2008.

Par ailleurs, il a été demandé à chaque ministère de joindre une fiche d’évaluation à tout projet de texte législatif dont il est l’initiateur. Le Gouvernement a organisé à l’intention des fonctionnaires responsables de l’élaboration de projets de loi des cours visant à les former à l’intégration du souci de l’égalité des sexes dans les textes législatifs et à les familiariser avec les engagements de l’État découlant de la Convention. De plus, les fonctionnaires ont reçu une brochure qui explique, notamment, l’intégration du principe de l’égalité des sexes dans la Constitution, les obligations de l’État en vertu de la Convention, les structures de mise en œuvre du Plan d’action et les notions fondamentales qui sous-tendent les politiques relatives à l’égalité des sexes. En outre, l’Institut national d’administration publique (INAP) offre une formation ciblée sur l’exécution du Plan d’action. Comme le nombre de participants laisse à désirer, il est envisagé de rendre la participation obligatoire.

Le Gouvernement a également réédité le manuel scolaire sur la Convention qui s’adresse aux étudiants des classes terminales des lycées. En 10 ans, ce manuel a été tiré à plus de 50 000 exemplaires. En outre, le Gouvernement mène une étude sur la perception des rôles des deux sexes telle qu’elle est véhiculée dans les méthodes et les programmes d’enseignement. Cette étude pourra être utilisée pour améliorer l’orientation scolaire et professionnelle des garçons et des filles.

Après une analyse des conventions collectives, les partenaires sociaux, patronat et syndicats, se sont déclarés opposés à ce qu’il y ait plus de réglementations et d’obligations, faisant valoir qu’une « obligation de résultat » ne favoriserait l’égalité des sexes qu’à condition que ceux qui négocient les conventions collectives connaissent parfaitement les politiques relatives à l’égalité des sexes. Le Gouvernement compte donner une suite favorable à cette demande de formation et organiser une conférence d’une journée sur l’égalité de salaire, afin de faire bien comprendre aux chefs d’entreprise que le droit à un salaire égal est un droit non négociable.

Le Ministère de l’égalité des chances, en collaboration avec le Service central de statistique et des études économiques (STATEC), mène des études de cas dans le cadre de son programme « actions positives » dans les entreprises du secteur privé. Les résultats seront utilisés pour évaluer l’incidence du Plan d’action national. Le programme a été restructuré de façon à améliorer la gestion des actions et la coopération entre l’État et les entreprises privées.

Tout salarié, résident ou frontalier, peut bénéficier d’un congé parental de six mois rémunéré à plein temps ou de 12 mois rémunéré à mi-temps. Le pourcentage d’hommes ayant pris un congé parental est passé de 6% en 1999 à plus de 22% en 2006. Pour les résidents du Luxembourg, les pourcentages sont respectivement de 3% et 15%. De toute évidence, les mentalités sont en train de changer.

La perception de la violence dans le domaine privé change également. Ce n’est plus un sujet tabou et les gens savent où chercher du secours; de ce fait, de plus en plus de femmes victimes de violences familiales osent en parler. Actuellement, le nombre de personnes violentes interdites de séjour au domicile familial s’élève à 17 par mois, chiffre non négligeable vu la taille de la population. Ce chiffre continue d’augmenter et les soins offerts aux victimes s’améliorent constamment. Depuis 2006, l’accent est mis sur les enfants victimes ou témoins de violences familiales. Une formation spécifique est offerte au personnel des services d’assistance à ces enfants, ayant pour but d’aider les enfants à surmonter leurs traumatismes et de leur enseigner les valeurs d’une culture de non-violence, afin de prévenir un éventuel comportement violent plus tard.

Les attributions du service « Mœurs » de la section de recherche et d’enquête criminelle de la police nationale ont été redéfinies à la suite de la création d’une section spécialisée dans la traite des êtres humains, chargée notamment de prévenir et de réprimer les sévices sexuels et les viols.En 2007,ce service a procédé à 21 arrestations dont 8 pour proxénétisme. Le service « Mœurs »est également chargé d’enquêter sur les plaintes poursévices sexuels et les disparitions. En 2007, il a enquêté sur trois affaires de viol, dont deux ont abouti à unearrestation.

En réponse aux recommandations du Comité, le Gouvernement a élaboré un avant-projet de loi sur les victimes de la traite des êtres humains modifiant le nouveau code de procédure civile, un projet de loi définissant les conditionsd’octroi d’autorisation de séjour aux personnes victimes de la traite en provenance de pays tiers, et un projet de loi portant approbation du Protocole facultatif à laConvention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée,visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier desfemmes et des enfants (Protocole de Palerme),ainsi que de la Convention du Conseil de l’Europe sur la luttecontre la traite des êtres humains, et modifiant le Code pénal etle Code d’instruction criminelle.

La situation relative aux cabarets du Luxembourg n’a pas changé depuis la communication des réponses à la liste des points et questions. Les résultats de la cartographie de la prostitution ont montré que la majorité des prostituées travaillent dans la rue ou dans un appartement pour des raisons économiques. Elles viennent pour la plupart d’États membres de l’Union européenne économiquement pauvres, de régions pauvres comme l’Afrique ou l’Amérique du Sud ou de milieux défavorisés, ou bien sont des toxicomanes. Selon les conclusions d’une enquête récente, 12% des hommes vivant au Luxembourg sont consommateurs de services de prostitution. La campagne de sensibilisation qui sera menée par le Ministère de l’égalité des chances en 2008 visera à montrer aux clients et au public en général que l’achat de services sexuels renforce les inégalités entre les sexes et la traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle.

Le Luxembourg est un pays d’immigration. Quelque 40% de la population sont des étrangers; près de 90% d’entre eux viennent des pays membres de l’Union européenne. Près de 38% des emplois sont détenus par des personnes qui traversent la frontière tous les jours, dont un tiers de femmes. Trente pour cent des enfants scolarisés sont étrangers; dans certaines communes, ce pourcentage atteint 50%. L’étude Programme for International Student Assessment (PISA) pour 2006 a mis en évidence une fois de plus l’écart entre les résultats des élèves luxembourgeois et ceux des élèves étrangers. Soucieux de réduire l’écart, le Gouvernement s’appuie sur ce type d’études pour évaluer les projets en cours. Il ne fait aucun doute que l’investissement dans l’éducation des enfants étrangers contribue à leur intégration sociale et à leur future employabilité.

En ce qui concerne l’intégration des femmes étrangères, on accorde une attention spéciale aux femmes originaires de pays extérieurs à l’Union européenne, qui bénéficient des mêmes services de santé que les Luxembourgeoises. Leurs soins de santé sont pris en charge par le Commissariat aux étrangers. Il faut noter que le projet de loi relatif à l’aide à l’enfance interdit la violence physique et sexuelle, les transgressions intergénérationnelles, les traitements inhumains et dégradants et les mutilations sexuelles. L’intégration des femmes immigrées au marché de l’emploi reste difficile car elles connaissent mal les langues parlées au Luxembourg. Le Centre de languesoffredes cours d’apprentissage du luxembourgeois adaptés aux apprenants. Les immigrants qui parlent allemand ou français peuvent suivre des cours d’apprentissage pour adultes. Dès qu’elles ont un emploi, les femmes étrangères bénéficient du même système de sécuritésociale que les Luxembourgeoises et, notamment, de structures publiques d’accueil des enfants à des prix modérés.

Les femmes divorcées et les femmes vivant seules sont celles qui courent le plus le risque d’avoir une pension de retraite minimale. Un avant-projet de loi, en cours d’examen, prévoit le partage des droits à pension en cas de divorce afin que les femmes divorcées soient moins menacées par la pauvreté. Les femmes âgées bénéficient de diverses aides sociales et ne sont pas en général menacées par la pauvreté.

Selon les conclusions d’une étude récente du Centre d’études de lapopulation, de la pauvreté et despolitiques socioéconomiques (International Network for Studies in Technology, Environment, Alternatives, Development) (CEPS Instead), la plupart des jeunes femmes souhaitent poursuivre leur activité professionnelle après la naissance de leur premier enfant, 15% seulement souhaitent interrompre leur activité et moins de 5% souhaitent arrêtertoute activité professionnelle. La poursuite de son activité professionnelle garantit à une femme l’autonomie financière à l’âge de la retraite. Par ailleurs, il est important que les entreprises accordent le congé parental aux pères comme aux mères et tiennent compte des besoins des jeunes parents. Depuis deux ans, l’État investit dans des structures d’accueil pour les enfants. Il compte fournir 30 000 places pour les enfants de 4 à 12 ans d’ici à 2013.

L’intervenante assure le Comité que ses recommandations seront largementdiffusées et discutées au Parlement ainsi qu’aux réunions de coordination avec les organisations non gouvernementales.

La Présidente félicite le Gouvernement luxembourgeois d’avoir retiré ses réserves à l’article 7 et à l’alinéa g) du paragraphe 1 de l’article 16 de la Convention, d’avoir ratifié le Protocole facultatif à la Convention, d’avoir accepté la modification du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention, et d’avoir révisé le paragraphe 2 de l’article 11 de sa Constitution. Ces mesures représentent des avancées considérables et constituent des applications directes des recommandations du Comité.

Articles 1 à 6

M me Patten demande des précisions concernant le nouvel énoncé du paragraphe 2 de l’article 11 de la Constitution et demande, en particulier, si cette disposition est entrée en vigueur immédiatement après son adoption par le Parlement, en juin 2006. Le nouveau texte parle de l’élimination des obstacles à l’égalité des sexes et non de l’élimination de la discrimination elle-même, et devrait donc être remanié de façon à être aligné sur l’article 1 de la Convention.

La situation relative à l’applicabilité de la Convention demande à être précisée car on a du mal à cerner l’intention des tribunaux. De plus, il est préoccupant de constater qu’il n’y a pas eu de nouvelle jurisprudence concernant l’applicabilité de la Convention depuis 2002. À ce sujet, l’intervenante souligne la nécessité d’une formation systématique des membres des professions judiciaires et des juristes.

La Présidente, parlant en qualité de membre du Comité, dit qu’elle aussi souhaiterait avoir des éclaircissements concernant l’applicabilité de la Convention. Selon le rapport (par. 6), l’article 16.3 de la Convention a été déclaré directement applicable tandis que, pour l’article 11, il a été retenu que seul l’État était lié par cet article qui n’accorderait pas des droits aux personnes privées, et pourtant il y a eu une affaire relevant de l’article 11. Lorsqu’un État ratifie le Protocole facultatif, il lui faut réexaminer la Convention. La formation est également indispensable.

M me Gaspard demande des informations complémentaires sur les mécanismes de contrôle de l’application de la Convention et des documents issus de la Conférence mondiale de Beijing adoptés par le Gouvernement. Elle aimerait aussi avoir des précisions concernant le lien établi entre l’application de la Convention et l’élaboration du Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes. L’application de la Convention constitue-t-elle l’un des objectifs du Plan et, si c’est le cas, comment cet objectif peut-il être atteint?

La délégation devrait expliquer comment la coordination est assurée entre la personne déléguée à l’égalité entre les femmes et les hommes et la cellule de compétences en genre de chaque ministère. D’après le paragraphe 43 du rapport, les personnes déléguées à l’égalité entre les femmes et les hommes auprès des divers ministères se réunissent une fois par an, ce qui semble très peu.

Enfin, on ne sait pas très bien dans quelle mesure les mécanismes gouvernementaux et les ONG féminines ont travaillé ensemble à l’établissement du rapport. Le Comité a été étonné par l’absence d’un rapport parallèle des ONG.

M me Zou Xiaoqiao demande à quelle date le Ministère de la promotion féminine est devenu le Ministère de l’égalité des chances; elle serait également curieuse de connaître la nature des responsabilités de ce Ministère, ainsi que l’importance de ses ressources. En outre, la délégation devrait expliquer comment les personnes déléguées à l’égalité entre les femmes et les hommes sont choisies et quels sont les rapports entre le Ministère de l’égalité des chances et le Comité interministériel de l’égalité des femmes et des hommes.

L’intervenante aimerait en savoir davantage sur le Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes et, en particulier, si des domaines prioritaires ont été définis, qui est chargé de contrôler la mise en œuvre du Plan et quelles mesures ont été prises pour assurer cette mise en œuvre.

Enfin, notant qu’une conférence prévue à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de la Convention et du Protocole facultatif a été annulée faute de personnes intéressées, l’intervenante aimerait savoir comment le Gouvernement se propose de faire connaître la Convention à l’avenir.

M me Chutikul note que le Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes prévoit une évaluation après trois ans; d’après ses calculs, une évaluation doit avoir lieu en 2008 et elle aimerait savoir si cette évaluation est programmée. Elle demande également à la délégation de donner des précisions sur les indicateurs mentionnés dans son exposé.

L’intervenante est curieuse de savoir si les données ventilées par sexe sont établies par le Ministère de l’égalité des chances, par le STATEC ou par les deux. Si c’est par les deux, elle aimerait savoir comment leurs efforts sont coordonnés.

La délégation devrait préciser quelles sont les attributions du Comité interministériel de l’égalité des femmes et des hommes, du Ministère de l’égalité des chances et du Conseil national des femmes du Luxembourg et fournir davantage d’informations sur les cellules de compétences en genre créées en 2005.

Enfin, l’intervenante souhaite savoir quel est l’organe chargé de recevoir les plaintes des femmes.

M me Tavares da Silva dit qu’il faudrait fournir des informations complémentaires sur les femmes immigrantes. Il serait intéressant de savoir comment ce groupe est intégré au Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes.

M me Jacobs (Luxembourg) dit que la tâche la plus difficile du Gouvernement consiste à changer la manière dont les gens, y compris les femmes, conçoivent les rôles des deux sexes. L’article 11 de la Constitution a été mis en vigueur après une seconde lecture et couvre toutes les formes de discrimination. En ce qui concerne les programmes de formation mis en place pour les membres des professions judiciaires concernant la Convention et le Protocole facultatif, il reste encore des efforts à faire pour amener le système judiciaire à jouer un rôle moteur dans la défense des valeurs établies par la Convention. Après le changement de gouvernement, en 2004, le Ministère de l’égalité des chances a été créé et son nom indique qu’il est chargé de promouvoir l’égalité, et pas seulement les droits des femmes. L’intervenante invite le Comité à venir au Luxembourg pour observer le fonctionnement du Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes, qui s’applique à tous les ministères.

Le Gouvernement a pris des mesures pour améliorer le contrôle et l’évaluation. En vertu de la loi sur les violences familiales, les policiers et les membres de l’appareil judiciaire sont tenus de noter l’âge des victimes, d’identifier l’auteur des violences et d’établir la fréquence des violences.

Le Gouvernement n’a pas établi de quotas pour les femmes, bien que certains partis politiques aient stipulé qu’au moins un tiers des candidats devraient être des femmes. Sur le marché du travail, le patronat et les syndicats se sont prononcés contre l’institution de quotas.

L’intégration sociale est très importante pour les femmes migrantes puisque les immigrants représentent approximativement 40% de la population. Pour qu’elle puisse s’intégrer, il est bon que la population immigrante soit répartie dans tout le pays. Le Gouvernement ne ménage aucun effort pour promouvoir l’intégration sociale au niveau communautaire et cible les groupes vulnérables.

M me Mulheims (Luxembourg) dit que la promotion de l’égalité des sexes passe par l’intégration du souci de l’égalité des sexes à toutes les politiques et la mise en œuvre d’« actions positives ». Le Comité interministériel de l’égalité des femmes et des hommes comprend des représentants de tous les ministères et se réunit au moins une fois par an. Il entretient des relations étroites avec le Ministère de l’égalité des chances, où se trouve son secrétariat. Le Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes (2006-2008) assigne les objectifs communs de chaque ministère. En outre, les ministères établissent leurs propres objectifs partiels et seront évalués en fonction des deux séries d’objectifs en décembre 2008, à la fin d’un cycle de trois ans. Pour les besoins de cette évaluation, une série d’indicateurs a été élaboré en décembre 2006 et ajustés en décembre 2007; la délégation communiquera les indicateurs au Comité par écrit. Le but des indicateurs est d’assurer que les mécanismes gouvernementaux soient conformes aux 12 domaines définis par le Programme d’action de Beijing, la Stratégie de Lisbonne pour un renouveau économique, sociale et environnemental et les objectifs du Millénaire pour le développement.

M me Jacobs (Luxembourg) dit que le Gouvernement a tenu des consultations avec les ONG durant la préparation du cinquième rapport périodique et qu’on ne sait pas très bien pourquoi ces organisations n’ont pas établi de rapport parallèle.

La Présidente dit que le Comité souhaiterait recevoir des rapports parallèles à l’avenir afin d’avoir un autre point de vue sur l’application de la Convention.

M me Schöpp-Schilling demande si des cours obligatoires de droit international et de droit relatif aux droits de l’homme sont prévus dans les programmes d’études supérieures de droit. Alors que le Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes est axé sur l’égalité des chances des deux sexes, il est important de rappeler que la Convention est centrée sur la discrimination à l’égard des femmes et que le Gouvernement est donc censé se pencher sur les facteurs structurels qui sous-tendent cette discrimination. Il serait intéressant d’en savoir davantage sur les résultats des mesures de discrimination positive prises dans le secteur privé, combien d’entreprises ont pris des mesures de discrimination positive et si une cellule a été créée au sein du Ministère du Travail pour surveiller les progrès.

M me Gabr, rappelant les difficultés rencontrées lorsqu’on veut changer les stéréotypes, dit que le pourcentage de femmes occupant des postes clefs n’a pas progressé et qu’elle souhaiterait beaucoup connaître le nombre de femmes juges. Il faudrait préciser si des plans ont été adoptés pour résoudre le problème des stéréotypes sexuels, qui est un facteur contribuant à la violence familiale. Étant donné le pourcentage élevé d’immigrants au Luxembourg, il serait également utile d’en savoir davantage sur les mesures prises pour promouvoir l’intégration sociale.

M me Shin dit qu’il est important d’envisager la question des stéréotypes sexuels sous l’angle de la cellule familiale. Il serait intéressant de savoir si des enquêtes ont été menées sur le temps consacré par le mari et par la femme aux soins à donner aux enfants et aux travaux domestiques. Au sujet de la violence familiale, l’intervenante demande si un traitement ou des conseils sont dispensés aux maris interdits de séjour au domicile familial en vertu de la loi du 8 septembre 2003 sur la violence familiale, et si le Gouvernement a mené une enquête pour déterminer le pourcentage de cas non signalés. Il faudrait fournir des informations complémentaires sur les procédures de plainte pour viol.

M me Dairiam dit que la délégation devrait fournir des précisions sur les mesures prises pour résoudre le problème de la pornographie qui exploite des enfants et des femmes sur Internet. Il serait intéressant de savoir si le Gouvernement a ordonné une étude en vue de définir le profil socioéconomique des enfants et des femmes victimes de cette exploitation ainsi que le nombre de filles par rapport au nombre de garçons, et si des mesures sont prises pour repérer les individus qui en sont les auteurs et pour leur fournir des services d’aide psychologique. L’intervenante demande s’il y a eu des poursuites engagées en vertu de l’article 374 du Code pénal sur les produits à caractère pornographique.

M me Ara Begum demande qu’on précise si la sentence maximale de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 1000 euros prévue par la loi sur la violence familiale s’applique dans les cas d’homicide volontaire, d’homicide involontaire et de viol. Il faudrait des informations complémentaires sur la protection offerte par la loi sur la violence familiale aux femmes migrantes et aux auxiliaires familiaux migrants. Il serait utile de savoir si les auxiliaires familiaux migrants peuvent bénéficier d’une protection gratuite. L’intervenante souhaiterait également en savoir davantage sur les plans du Gouvernement en ce qui concerne la lutte contre la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle.

M me Chutikul demande quelles dispositions ont été prises par le Gouvernement pour diffuser des informations relatives aux projets de loi sur la traite des êtres humains et le Protocole de Palerme. En outre, des précisions devraient être données en ce qui concerne les services d’interprétation fournis aux femmes immigrantes pour les aider à comprendre ces informations. L’intervenante demande si le Gouvernement a mené une enquête sur la traite axée sur le problème dans les pays d’origine. Il faudrait des informations complémentaires concernant la législation visant à lutter contre le tourisme sexuel des nationaux luxembourgeois.

MmeChutikul demande davantage d’informations sur le suivi systématique de l’égalité des sexes et la promotion des hommes et des femmes qui est assuré par le Gouvernement, afin que le Comité puisse suggérer que d’autres États prennent modèle sur le Luxembourg.

L’intervenante se demande ce que le Gouvernement pourrait faire pour diffuser auprès des groupes à haut risque, notamment des femmes, des informations sur le Protocole de Palerme et le projet de loi sur la lutte contre la traite des êtres humains. Il serait également utile de savoir si le Gouvernement travaille avec les pays d’origine des travailleurs migrants afin de réduire le risque de traite et s’il se propose de mener une étude similaire à l’étude sur la prostitution mentionnée dans les réponses à la liste des points et questions. Enfin, l’intervenante se demande comment la loi traite les citoyens du Luxembourg qui font du tourisme sexuel à l’étranger.

La Présidente, parlant en qualité de membre du Comité, dit qu’il faudrait au Comité davantage de statistiques sur la violence à l’égard des femmes, notamment la violence familiale; elle serait particulièrement intéressée par des données sur les relations entre les victimes et les auteurs et sur le nombre de femmes assassinées par leurs partenaires ou anciens partenaires. Le Gouvernement pourrait ensuite analyser ces statistiques afin de déterminer comment les autorités ont failli dans la prévention des actes de violence et comment la coordination entre les organismes en cause peut être améliorée. Elle aimerait également savoir dans quelle mesure la coopération entre le Ministère de l’intérieur et le Ministère de la justice d’une part et le Ministère public d’autre part est satisfaisante.

Depuis l’adoption du Protocole facultatif à la Convention, le Comité a examiné trois affaires de violence à l’égard des femmes. Les décisions qu’il a prises dans les trois affaires peuvent servir de référence pour indiquer aux États Membres comment le Comité a traité les plaintes et pour faire comprendre que la violence à l’égard des femmes est une violation des droits humains et que des mesures de prévention plus efficaces sont nécessaires.

M me Jacobs (Luxembourg) dit qu’elle estime également qu’une meilleure formation des juristes s’impose.

Des entreprises grandes et petites s’impliquent dans les mesures de discrimination positive introduites par le secteur privé; il suffit à une entreprise de prendre une seule de ces mesures pour être participante au programme. Ensuite, des efforts seront déployés pour expliquer aux entreprises qu’elles doivent en faire davantage : organiser des réunions avec le personnel et donner des formations aux femmes afin de faciliter leur promotion et leur recrutement à des postes élevés. Il ne suffit pas qu’une entreprise ouvre une garderie d’enfants; elle doit mettre en place un programme visant spécifiquement à aider les femmes qu’elle emploie à équilibrer leur vie de famille et leur vie professionnelle. Le Ministère du Travail est chargé de surveiller l’incidence des mesures prises.

Les filles font plus souvent des études supérieures, mais principalement dans des domaines tels que les soins aux enfants, les soins infirmiers et l’éducation, où les salaires sont faibles. Le Gouvernement a lancé avec des ONG un programme qui prévoit des visites d’entreprises pour familiariser les filles et les garçons à des branches d’activité où en général les représentants du sexe opposé sont majoritaires. Toutefois, à la fin du processus, la plupart des jeunes disent qu’ils ont trouvé l’expérience intéressante mais qu’ils ne choisiraient pas une branche d’activité non traditionnelle, peut-être parce qu’au cours des visites, ils n’ont vu personne de leur propre sexe pouvant leur servir de modèle.

Le Gouvernement s’emploie à changer les stéréotypes concernant les rôles des mères et des pères. Pendant le sixième mois de la grossesse, les deux parents sont informés des changements entraînés dans la vie d’un couple par la naissance d’un enfant et les droits de leur futur enfant leur sont expliqués. Dans le cadre d’un nouveau programme qui sera lancé en février 2008 en coopération avec une ONG, des immigrantes visiteront d’autres immigrantes à domicile pour promouvoir l’allaitement maternel; l’objectif est de faciliter le changement tout en respectant les cultures des groupes d’immigrants plutôt que de leur imposer les valeurs luxembourgeoises. Il est important pour les enfants des familles immigrantes de rencontrer des jeunes de leur propre culture qui ont mené leurs études à terme et trouvé de bons emplois; ce programme a donné des résultats extrêmement satisfaisants dans la nombreuse communauté cap-verdienne au Luxembourg.

S’agissant de l’exploitation sexuelle d’enfants sur Internet, il ne faut pas oublier que le Luxembourg est un tout petit pays et que sa population a accès aux télévisions françaises, allemandes et belges et aux sites Internet; concernant cette question, le Gouvernement se conformera aux directives européennes. Des condamnations ont été prononcées dans des affaires de pornographie sur Internet impliquant des enfants. Aucun cas de mineur engagé dans la prostitution n’a été signalé à la police, mais l’intervenante est convaincue que le problème existe en raison de la toxicomanie chez les jeunes.

Les femmes immigrantes et non immigrantes ont les mêmes droits en ce qui concerne la protection contre la violence, les soins de santé aux victimes et l’accès aux centres d’accueil. Des campagnes de lutte contre la traite ont été menées en coopération avec les pays limitrophes. Comme le pays est très petit, les femmes qui sont disposées à témoigner contre leurs agresseurs doivent pouvoir bénéficier, à l’étranger, de programmes de protection des témoins, afin d’échapper aux représailles. Le problème est rendu encore plus ardu du fait que les trafiquants d’êtres humains confisquent souvent les passeports de leurs victimes; néanmoins, dans ce type de crime, les gouvernements des autres pays sont prêts à coopérer. En outre, le Gouvernement, en collaboration avec les gouvernements voisins et des ONG, s’emploie avec des pays d’Afrique et de l’ancienne Union soviétique à informer les femmes des risques de traite afin qu’elles ne soient pas induites en erreur par des promesses d’emploi lucratif au Luxembourg. Dans les zones à forte concentration d’étrangers, il y a des interprètes dans les commissariats de police pour informer les femmes de la législation sur la violence à l’égard des femmes.

M me Klein (Luxembourg) dit qu’elle vient de recevoir de nouvelles statistiques de la police luxembourgeoise; en 2007, il y a eu 27 viols, 12 cas d’attentat à la pudeur et 6 cas d’exhibitionnisme.

Cinq ans après l’adoption de la Loi sur la violence domestique, ses effets commencent à être ressentis par la population dans son ensemble. En vertu de cette loi, un auteur de violences familiales peut être interdit de séjour au domicile familial pendant une période de 12 jours, renouvelable jusqu’à une période maximale de 3 mois. La Loi prend en compte les circonstances aggravantes et prévoit des sanctions plus graves en cas de meurtre, par exemple. En 2007, il y a eu 431 interventions policières et 4 cas de violence familiale avec meurtre; des poursuites ont été engagées contre les auteurs. Après une intervention, la police fait un rapport au Ministère public, qui peut décider d’expulser l’auteur du domicile familial; les expulsions sont plus efficaces que les décisions de protection, qui exigent une longue procédure et sont donc rarement demandées.

Le Ministère de la Justice, la police, le Ministère public et les ONG coopèrent de manière efficace dans l’effort de lutte contre la violence familiale; des plaintes contre la police ont été enregistrées dans moins de 2% des cas. Des formations dans ce domaine mises en place par le Gouvernement à l’intention des policiers existent depuis longtemps et donnent de bons résultats; il est plus difficile de former des juges et des médecins mais des mesures récentes ont été prises dans ce sens. Les autorités compétentes reçoivent actuellement une formation au traitement du syndrome de stress post-traumatique. La police donne aux victimes les numéros de téléphone de services d’assistance, notamment ceux qui s’adressent aux enfants des auteurs de viol et aux femmes victimes de traite, qui plus tard contactent directement les victimes.

Le Gouvernement a passé des contrats avec des ONG pour les services d’aide aux victimes, notamment les centres d’accueil. Ce sont souvent des femmes âgées qui, après de nombreuses années de mauvais traitements, décident de quitter leurs maris pour se rendre dans des centres d’accueil; en général, les femmes plus jeunes ne vont dans les centres d’accueil que lors d’une situation de crise; habituellement, ce sont les voisins, plutôt que la victime elle-même, qui appellent la police. Le prochain rapport présentera des statistiques sur le nombre de victimes qui sont retournées vers leurs agresseurs.

Par ailleurs, le Gouvernement a passé un contrat avec une ONG pour un programme de traitement des hommes violents; les policiers distribuent des brochures d’information lors des interventions. Les hommes reconnus coupables d’un acte de violence à l’égard d’une femme doivent participer à 36 réunions de groupes de personnes coupables de violences, sur une période de 12 mois.

M me Schöpp-Schilling demande si le Gouvernement dispose de statistiques sur l’incidence de son programme d’« actions positives » et quel est l’organe chargé du suivi de son efficacité.

M me Patten note que, d’après la délégation, les membres des professions judiciaires n’accordent guère d’intérêt à la Convention; elle se demande quelles sont les mesures prises pour leur donner une formation sur la législation pertinente.

M me Belmihoub-Zerdani dit que le rapport du Luxembourg pourrait servir de modèle à d’autres États parties à la Convention. Toutefois, elle partage la préoccupation de l’intervenante précédente et suggère qu’un enseignement des questions relatives à la violence à l’égard des femmes soit inclus dans les programmes des facultés de droit à l’intention des juges et des juristes.

M me Shin fait remarquer qu’elle n’a pas reçu de réponse à sa question concernant la répartition des responsabilités familiales entre le mari et la femme.

Selon les réponses à la Liste des points et questions, aucune enquête de population concernant la violence à l’égard des femmes n’a été menée. L’intervenante recommande que le Gouvernement mène une enquête de ce type afin de déterminer s’il existe des cas non signalés de violence à l’égard des femmes.

M me Jacobs (Luxembourg) dit qu’elle transmettra aux autorités compétentes la suggestion selon laquelle une formation relative à la Convention et aux droits des femmes devrait être incluse dans les programmes d’études des membres des professions judiciaires.

On ne dispose d’aucune statistique sur le nombre de cas de violence familiale non signalés; de toute évidence, il y a encore des efforts à faire.

Le Ministère de l’égalité des chances serait heureux de faire part de l’expérience du Luxembourg à d’autres États parties ou à des membres du Comité.

M me Mulheims dit que, dans le passé, le Ministère de l’égalité des chances a soutenu les mesures visant à concilier la vie de famille et la vie professionnelle et à donner une formation de cadre aux femmes salariées. Bien que les personnes qui ont participé à ces programmes en aient tiré profit, ce sont des initiatives restées sans grand effet sur la mentalité générale des entreprises concernées et sans grand impact statistique.

Dans le cadre du programme d’« actions positives » lancé par le Ministère pour le serveur privé, chaque entreprise participante doit s’efforcer d’assurer l’égalité de rémunération et de traitement des employés hommes et femmes, aider les femmes à accéder à des postes de décision et instaurer des conditions qui permettent aux employés d’équilibrer leurs responsabilités familiales et professionnelles. Les entreprises ont intérêt à participer à ce programme facultatif car il améliore leur image; si elles remplissent les critères susmentionnés, le Ministère leur délivre un certificat d’entreprise modèle, dont la validité est de deux ans. À la fin de cette période, elles sont réévaluées pour déterminer s’il y a eu d’autres progrès et, si oui, comment ces progrès ont été réalisés, afin que les meilleures pratiques puissent être communiquées à d’autres entreprises.

D’après l’Administration de l’emploi, peu d’entreprises profitent des contrats de stage incitatifs qui permettent de recruter des personnes du sexe sous-représenté dans la branche ou domaine de celui qui parraine; il faudrait redoubler d’efforts pour informer les employeurs des remboursements auxquels ils peuvent prétendre au titre du Fonds pour l’emploi.

Article 7 à 9

M me Tavares da Silva se déclare préoccupée par le fait que, malgré les initiatives louables du Gouvernement, il y a encore trop peu de femmes élues ou nommées à des postes élevés aux niveaux national et municipal. La délégation luxembourgeoise a déclaré que l’on n’envisageait pas de quotas; l’intervenante demande des informations complémentaires sur ce problème et sur toute autre mesure prévue.

Elle se demande également quels sont les facteurs à l’origine de la diminution du nombre de femmes diplomates, qui semble contredire l’affirmation (au paragraphe 116 du rapport) selon laquelle le Gouvernement veut une meilleure représentation des femmes dans les organes de prise de décisions du Ministère des affaires étrangères.

M me Gaspard dit qu’elle partage ces préoccupations et demande à la délégation de donner des détails, soit dans l’immédiat, soit dans le prochain rapport, concernant les femmes occupant des postes administratifs élevés, ainsi que les raisons pour lesquelles les femmes sont sous-représentées dans la diplomatie. Personnellement, elle n’aime pas beaucoup le terme « quota » et préfère parler d’« égalité » ou de « parité ». Puisque le Gouvernement est si clairement résolu à s’attaquer à ce problème, elle se demande pourquoi il y a une telle résistance à l’utilisation de mesures temporaires spéciales pour accroître le nombre de femmes aux postes de décision politique, notamment au niveau local où la pression exercée par les femmes peut réellement changer le cours des choses.

M me Belmihoub-Zerdani dit que, dans l’ensemble, le rapport est excellent mais qu’il ne donne pas suffisamment d’informations sur le nombre et le pourcentage de femmes dans les différentes branches de l’appareil judiciaire, ni sur les raisons de leur sous-représentation, le cas échéant.

L’intervenante note avec plaisir que le Luxembourg est l’un des rares États parties à la Convention à avoir honoré l’engagement de la communauté internationale de consacrer 0,7% du produit intérieur brut (PIB) à l’aide publique au développement. En outre, elle est impressionnée par la contribution du Gouvernement aux programmes en faveur de l’égalité des sexes du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) dans le tiers-monde. Elle contactera le Ministère pour pouvoir bénéficier de son expérience.

M me Neuber fait observer qu’au taux où le nombre de femmes titulaires de postes élus croît actuellement, il faudrait 35 ans pour parvenir à la parité hommes-femmes dans les fonctions publiques locales et plus longtemps encore en ce qui concerne le Parlement; ni le Gouvernement, ni le Comité ne sont satisfaits du rythme actuel des progrès, qui n’est pas conforme aux engagements pris par le Luxembourg au titre de la Convention. Le paragraphe 55 du Document de base de l’État partie (HRI/CORE/1/Add.10/Rev.1) indique que chaque district administratif a un commissaire de district, nommé par le Grand-Duc et placé sous l’autorité directe du Ministre de l’intérieur, ayant pour mission de servir d’intermédiaire hiérarchique entre le pouvoir central et les administrations communales; l’intervenante se demande combien de commissaires de district sont des femmes.

L’intervenante a relevé dans les bases de données de l’Union européenne qu’au cours des dernières années, le pourcentage de femmes à la Cour suprême est tombé de plus de 40% à 20%. Elle demande quel est l’organisme chargé de surveiller le nombre de femmes dans toutes les institutions politiques et publiques, notamment dans les facultés, et elle souligne que des données ventilées par sexe sont nécessaires pour toutes les questions relatives aux articles 7 et 8 de la Convention et à la Recommandation générale n° 23 sur les femmes dans la vie politique et publique.

M me Jacobs (Luxembourg) dit que l’on continue de chercher comment améliorer la représentation des femmes au Gouvernement. Les partis politiques sont contre les quotas mais s’emploient réellement à trouver des femmes disposées à être candidates, et il y a des fonds pour financer leur formation – ce qui constitue un grand progrès par rapport à il y a 15 ans, où le simple fait d’avoir une femme sur la liste était une performance. Il reste difficile, surtout au niveau local, de trouver des candidates. De nombreuses femmes ayant un emploi et une famille estiment qu’elles n’ont pas de temps à consacrer aux activités politiques. Il en va de même dans les entreprises : les hommes sont plus disposés à faire des heures supplémentaires et des formations et obtiennent plus facilement des promotions.

Lors des deux dernières élections, on a constaté une augmentation de 10 points de pourcentage du nombre de femmes élues. Le Conseil national des femmes du Luxembourg poursuivra ses efforts en vue d’encourager les femmes à participer. Il est évident que, même dans les pays nordiques, où les réalisations dans ce domaine sont admirables, tout relâchement des efforts se traduit immédiatement par une baisse de la représentation des femmes.

Certains membres se sont déclarés préoccupés par la représentation des femmes dans la fonction publique. Les hommes et les femmes sont recrutés sur les mêmes critères par voie d’examen et il y a aussi des femmes dans la diplomatie. Comme de nombreuses jeunes femmes ont débuté leur carrière diplomatique lors de la dernière présidence du Luxembourg à l’Union européenne, elles occupent encore des postes de niveau inférieur, mais cela changera dans les années à venir. En fait, le Secrétariat général du Ministère des affaires étrangères est tenu par une femme. Dans la diplomatie, une fois de plus, il est difficile pour les femmes de concilier carrière et famille.

On ne dispose pas de chiffres sur la représentation des femmes dans l’appareil judiciaire, mais plus de 50% des juges sont des femmes. Les commissaires de district n’ont pas un rôle très important et on envisage d’abolir leurs postes.

M me Mulheims (Luxembourg) dit qu’il y a une erreur dans les statistiques citées concernant la Cour suprême. Les femmes représentaient 43% des juges de la Cour suprême au 1er janvier 2008.

Articles 10 à 14

M me Simms note que les valeurs patriarcales persistent, comme en témoigne le fait que les garçons sont beaucoup plus nombreux que les filles à choisir d’étudier des matières scientifiques, ce qui aboutit à des choix de carrière différents et, partant, à des déséquilibres économiques. Le Luxembourg devrait revoir ses politiques en faveur des parents et trouver des moyens novateurs pour aider aussi bien les hommes que les femmes, en particulier les mères, à changer leur comportement. Comme 40% des enfants vivant au Luxembourg sont originaires d’autres pays, il est particulièrement important de prendre les immigrants en considération.

M me Zou demande si l’éducation spéciale est dispensée dans des écoles spéciales ou dans le cadre de programmes spéciaux dans des écoles normales. Elle souhaite également savoir comment le Gouvernement s’assure que les enfants immigrants et non immigrants ont des chances égales d’accéder à une éducation de même qualité.

Il serait intéressant de recevoir des chiffres comparatifs sur les taux d’échec scolaire et d’abandon scolaire des filles immigrantes et des filles luxembourgeoises, ainsi que des informations complémentaires sur le soutien aux enfants qui ont des difficultés. L’intervenante demande également davantage d’informations ou de statistiques sur l’éducation à différents niveaux, y compris la formation professionnelle.

M. Flinterman s’étonne du pourcentage élevé de filles étrangères dans les classes d’éducation spéciale et de leur taux d’inscription relativement faible dans des établissements d’enseignement secondaire général. Il demande quelles sont les mesures prises pour encourager les filles étrangères et leurs parents à s’intéresser à l’enseignement secondaire général.

L’intervenant se demande si le manuel scolaire sur la Convention est utilisé aussi dans les établissements d’enseignement secondaire technique. Il souhaite également savoir s’il existe des programmes spécialement conçus pour les jeunes, en particulier les filles, qui leur donnent accès à des informations sur la santé et le bien-être de la famille, y compris des informations et des conseils sur la planification familiale, conformément à l’alinéa h) de l’article 10 de la Convention.

M me Pimentel accueille avec satisfaction les informations sur la lutte contre les stéréotypes menée auprès des jeunes enfants. Elle demande si les mêmes méthodologies sont utilisées en ce qui concerne la diversité ethnique, raciale, sexuelle et religieuse, afin de lutter contre le racisme, la xénophobie et l’homophobie qui sont à l’origine de la discrimination, de l’intolérance et de la violence.

M me Jacobs (Luxembourg) dit que la différence entre les résultats scolaires des filles et des garçons ont conduit à se demander s’il ne faudrait pas prendre des mesures supplémentaires d’aide aux garçons afin d’équilibrer la situation. Parmi les enfants immigrants vivant au Luxembourg, ceux qui ont des difficultés sont en général ceux qui sont arrivés à 10 ans ou plus. Les enfants plus jeunes apprennent de la même manière que les enfants luxembourgeois, mais les plus âgés ont déjà une culture, une langue et une éducation différentes. Des initiatives ont été prises pour améliorer la situation, notamment la création de structures d’accueil en dehors des heures de classe pour les enfants de 3 à 12 ans. Différents niveaux de financement sont prévus en fonction des revenus des parents. Cette modalité est importante dans la mesure où elle exige la participation des parents tout en éliminant la contrainte angoissante de dépendre des bons résultats obtenus en classe. C’est plus rassurant pour les parents qui ont un faible niveau d’instruction.

Il existe des maisons des jeunes, qui offrent des programmes très intéressants. De nombreux enfants immigrants y participent, car ils ne s’engagent pas souvent dans certaines autres organisations de jeunes traditionnelles du Luxembourg. Ils produisent des films et organisent des campagnes contre la violence et la drogue, et les filles et les garçons participent sur un pied d’égalité. Il est important de mettre en valeur les succès de certains jeunes immigrants à titre d’exemple pour les autres. Les problèmes des jeunes immigrants qui se posent dans d’autres pays européens concernent en général les deuxième et troisième générations, plutôt que la première.

D’après les statistiques, plus de 85% des nouveaux-nés sont nourris au sein, et le pourcentage actuel est probablement proche de 90%.

Un nouveau système visant à donner une expérience professionnelle aux quelque 300 élèves qui quittent l’école chaque année sans se présenter à l’examen de fin d’études permet à ces jeunes de travailler dans une institution publique ou privée pendant trois à six mois sous la direction d’un tuteur. Dans certains cas, l’expérience les encourage à reprendre leurs études et dans d’autres, elle les aide à trouver un emploi.

Les questions d’intégration sont très importantes en raison de la situation démographique en Europe et doivent être résolues afin de faciliter la cohésion sociale et d’assurer un avenir de prospérité et de paix au peuple du Luxembourg.

M me Mulheims dit que le manuel scolaire sur la Convention est également distribué et utilisé dans les écoles secondaires techniques. Les enfants étrangers peuvent accéder à l’éducation dans la même mesure que les enfants luxembourgeois, suivant leurs capacités.

Plusieurs projets pilotes intéressants ont été lancés. Par exemple, une nouvelle école secondaire a été créée pour des enfants immigrants et non immigrants venant d’écoles secondaires aussi bien générales que techniques, et également des enfants handicapés. Leur éducation fera l’objet d’un suivi dans le cadre d’une étude scientifique de l’intégration. Un projet similaire au niveau primaire débutera en décembre : il accueillera 70% d’élèves étrangers et 10% d’élèves handicapés. Ces projets seront suivis de travaux de recherche. Une nouvelle loi sur l’éducation de base est en préparation; elle intègrera le principe du respect pour l’égalité des garçons et des filles à tous les niveaux de l’éducation, dans le cadre du Plan d’action national de l’égalité des femmes et des hommes. Cette nouvelle loi aura également des implications pour la formation des enseignants.

M me Patten demande davantage d’informations sur les principales conclusions de l’étude menée par le STATEC sur la discrimination sur le marché du travail et sur toute mesure envisagée par le Gouvernement pour lutter contre la discrimination.

Une autre étude a permis de constater que les conventions collectives ne contribuent guère à assurer l’égalité du salaire. L’intervenante demande quelles mesures le Gouvernement a décidé de prendre pour réduire l’écart salarial, et s’il est prévu d’examiner les secteurs où les femmes sont majoritaires ou de remanier les structures des salaires dans ces secteurs.

L’intervenante demande si le pourcentage plus élevé des femmes qui travaillent à mi-temps s’explique par un choix volontaire des femmes, car le fait de travailler à mi-temps a une incidence sur leur salaire et leurs perspectives de carrière. Elle demande également quelles sont les mesures prises pour promouvoir les emplois à long terme et de haute qualité pour les femmes et si les employés à mi-temps ont officiellement le droit d’augmenter leurs heures de travail avant que la direction décide de recruter du personnel supplémentaire.

Il serait intéressant de savoir l’une ou l’autre des études récentes a porté sur des groupes de femmes qui se heurtent à des formes multiples de discrimination, notamment des femmes handicapées, des femmes âgées et des femmes de nationalité étrangère. L’intervenante se demande également si le Gouvernement s’est penché sur la question des stéréotypes sexuels dans le cadre du marché du travail.

M me Schöpp-Schilling note que la question de l’égalité de salaire est inscrite à l’ordre du jour de l’Union européenne depuis plusieurs années, et elle se demande si la loi de juin 2004 comporte des dispositions relatives à l’égalité de salaire pour un travail égal. Si c’est le cas, elle serait curieuse de savoir si le Luxembourg a mis à profit les cadres analytiques qui existent aux États-Unis et dans les pays scandinaves. Le travail des femmes est souvent sous-estimé en raison de stéréotypes qui ont la vie dure et l’analyse est un premier pas vers la résolution de ce problème.

L’intervenante demande si les accords issus des négociations collectives tiennent compte du principe de l’égalité de salaire pour un travail égal. L’alinéa e) de l’article 2 et l’alinéa d) du paragraphe 1 de l’article 11 établissent clairement les obligations du Gouvernement luxembourgeois à l’égard des partenaires sociaux.

Au sujet du paragraphe 216 du rapport, l’intervenante demande des précisions sur la différence entre une « obligation de moyen » et une « obligation de résultat » en ce qui concerne l’obligation du Gouvernement de réduire l’écart salarial. Elle demande ce que le Gouvernement compte faire pour l’« obligation de résultat », et quand le passage à l’« obligation de moyen » aura lieu.

La séance est levée à 13 heures.