Nations Unies

CRPD/C/MEX/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

27 octobre 2014

Français

Original: espagnol

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initialdu Mexique *

I.Introduction

Le Comité a examiné le rapport initial du Mexique (CRPD/C/MEX/1) à ses 145e et 146e séances, les 16 et 17 septembre 2014, et a adopté les observations finales ci-après à sa 167e séance, le 30 septembre 2013.

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial du Mexique et remercie l’État partie de ses réponses écrites (CRPD/C/MEX/Q/1/Add.1) à la liste des points à traiter (CRPD/C/MEX/Q/1) établie par le Comité.

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation, qui comptait de nombreux représentants, et remercie celle-ci du dialogue constructif qu’elle a eu avec lui au cours de la procédure d’examen.

II.Aspects positifs

Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption, dans l’État partie, de lois, politiques, protocoles et directives visant à promouvoir et à protéger les droits des personnes handicapées. Il prend note en particulier:

a)De la loi générale pour l’intégration des personnes handicapées (2011);

b)De la réforme de la loi fédérale pour la prévention et l’élimination de la discrimination (2014);

c)De la loi fédérale sur les télécommunications et la radiodiffusion (2014);

d)Du Programme national pour les droits de l’homme 2014-2018;

e)Du Programme national pour le développement et l’intégration des personnes handicapées 2014-2018;

f)Du Programme national pour le travail et l’emploi des personnes handicapées (2014-2018);

g)Du Programme national pour l’égalité et la non-discrimination (2014-2018);

h)Du Programme global pour la prévention, la répression et l’éradication de la violence à l’égard des femmes et la prise en charge des victimes (2014-2018);

i)Du Programme de prévention, de réadaptation et d’intégration sociale pour les personnes handicapées;

j)Du Programme spécial sur les migrations (2014-2018);

k)Du Protocole pour l’administration de la justice dans les affaires impliquant des personnes handicapées.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1er à 4)

Le Comité est préoccupé par le fait que la législation civile de certains États fédérés renferme encore des expressions péjoratives pour qualifier les personnes handicapées.

Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts, dans le cadre du processus d’harmonisation de la législation avec la Convention, afin que tous les États fédérés éliminent les termes péjoratifs des dispositions relatives aux droits des personnes handicapées.

Le Comité est préoccupé par le fait que les organisations de personnes handicapées participent peu à la mise en œuvre et au suivi de la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place des mécanismes de consultation régulière des organisations de personnes handicapées, de sorte que les opinions de ces dernières reçoivent l ’ attention voulue.

B.Droits spécifiques (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

Le Comité est préoccupé par la discrimination qui vise les personnes handicapées dans l’État partie, et qui est aggravée par d’autres facteurs d’exclusion sociale tels que l’âge, le genre, l’appartenance ethnique et la ruralité. De même, il est préoccupé par le fait que certains États fédérés tardent à adopter des lois qui interdisent la discrimination au motif du handicap et assimilent le refus d’aménagements raisonnables à une forme de discrimination fondée sur le handicap.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ ouvrir des lignes budgétaires spécifiques pour atteindre ses objectifs en matière d ’ égalité, et de prendre des mesures précises de lutte contre la discrimination multiple fondée sur le handicap, l ’ âge, le genre, l ’ appartenance à un peuple autochtone et la ruralité, entre autres facteurs d ’ exclusion. De même, le Comité encourage l ’ État partie à faire davantage d ’ efforts, notamment par des stratégies de diffusion, de sensibilisation et de dialogue avec les autorités locales, pour que tous les États fédérés adoptent des normes interdisant la discrimination fondée sur le handicap et assimilent le refus d ’ aménagements raisonnables à une forme de discrimination.

Le Comité constate avec préoccupation que les cas de discrimination au motif du handicap ne donnent pas souvent lieu à des plaintes ni à des décisions de justice, qu’il n’y a pas de règlement d’exécution de la loi fédérale pour la prévention et l’élimination de la discrimination, et qu’il existe peu d’informations concernant la diffusion de cette loi sous des formes accessibles, y compris dans les langues autochtones.

Le Comité recommande à l’État partie d’allouer des ressources pour faire traduire la loi fédérale pour la prévention et l’élimination de la discrimination dans toutes les langues autochtones et la diffuser sous des formes accessibles, notamment en braille, en langue des signes, en langage simplifié et sous forme électronique. Il l’encourage aussi à mener des campagnes sur la non-discrimination des personnes handicapées à l’intention des juristes, notamment du personnel judiciaire et des avocats.

Femmes handicapées (art. 6)

Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie n’a lancé aucune action spécifique pour prévenir et combattre la discrimination multiple qui vise les femmes et les filles handicapées, ni diffusé des informations sur cette question.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en œuvre les lois et l ’ ensemble des programmes et mesures prévus pour les femmes et les filles handicapées, y compris des mesures d ’ égalisation et de discrimination positive, afin d ’ éliminer la discrimination dont ces femmes et ces filles sont la cible dans tous les domaines de la vie, dans les zones urbaines comme dans les zones rurales, en veillant à ce qu ’ elles participent effectivement à la conception et à l ’ exécution des initiatives qui leur sont destinées;

b) De recueillir systématiquement des données et des statistiques sur la situation des femmes et des filles handicapées, assorties d ’ indicateurs permettant d ’ évaluer la discrimination multiple.

Enfants handicapés (art. 7)

Le Comité est préoccupé par les taux élevés d’abandons d’enfants et de placements en institution d’enfants handicapés dans l’État partie, par la prédominance d’un modèle de prise en charge de ces enfants fondé sur l’assistance, et par la faible portée, dans les zones rurales et dans les communautés autochtones, des mesures qui leur sont spécifiquement destinées. Il est également préoccupé par le fait que les enfants handicapés ne participent pas systématiquement aux décisions ayant une incidence sur leur vie et n’ont pas la possibilité d’exprimer leur avis sur les questions qui les concernent directement.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D e tenir compte des enfants handicapés dans ses lois, ses politiques et ses mesures en faveur de l ’ enfance, en leur accordant les mêmes conditions qu ’ aux autres enfants et en facilitant leur intégration dans la société, et en prêtant une attention spéciale à ceux qui vivent dans les zones rurales et dans les communautés autochtones;

b) D ’ instaurer des garanties pour donner effet au droit des enfants handicapés d ’ être consultés sur toute question les concernant, en leur apportant une aide en fonction de leur âge et de leur handicap.

Sensibilisation (art. 8)

Le Comité est préoccupé par le fait que la majeure partie des ressources destinées à la réadaptation des personnes handicapées sont gérées par un organisme privé, Teletón. En outre, il relève que la campagne de sensibilisation menée par cet organisme encourage les stéréotypes selon lesquels les personnes handicapées sont destinataires d’actions charitables.

Le Comité prie l ’ État partie de bien faire la distinction entre le caractère privé des campagnes de Teletón et ses propres obligations en matière de réadaptation des personnes handicapées. Il lui recommande aussi de mener des campagnes de sensibilisation axées sur la reconnaissance des personnes handicapées en tant que titulaires de droits.

Accessibilité (art. 9)

Le Comité constate avec préoccupation que le cadre législatif qui est mis en place dans l’État partie pour assurer l’accessibilité aux personnes handicapées ne couvre pas tous les aspects visés à l’article 9 de la Convention. Il est également préoccupé par le fait que l’État partie ne dispose pas de mécanismes spécifiques d’évaluation du respect des règles en matière d’accessibilité dans tous les domaines prévus par la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ accélérer la procédure d ’ adoption des lois relatives à l ’ accessibilité, conformément à l ’ Observation générale n o 2 (2014) du Comité sur l ’ accessibilité ;

b) D ’ instaurer des mécanismes de contrôle et de plainte ainsi que des sanctions effectives pour réprimer le non-respect des règles en matière d ’ accessibilité;

c) De prendre des dispositions pour garantir que les règles en matière d ’ accessibilité soient appliquées non seulement aux nouvelles constructions, mais également aux bâtiments existants;

d) D ’ élaborer et de mettre en œuvre un plan national pour faciliter l ’ accès à l ’ environnement physique, aux transports, à l ’ information et à la communication, y compris aux systèmes et technologies de l ’ information et de la communication, et aux autres équipements et services ouverts ou fournis au public;

e) De veiller à ce que les entités privées tiennent dûment compte de tous les aspects de l ’ accessibilité nécessaire aux personnes handicapées et soient sanctionnées si elles ne le font pas.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

Le Comité est préoccupé par l’absence de plans spécifiques de prévention, de protection et de prise en charge des personnes handicapées dans les situations de risque et d’urgence humanitaire.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ adopter un plan national d ’ assistance dans les situations de risque et d ’ urgence humanitaire, qui inclue de manière transversale les personnes handicapées et les institutions qui leur viennent en aide;

b) De concevoir et de diffuser, sous des formes accessibles et dans toutes les langues officielles de l ’ État partie, y compris celles utilisées par les communautés autochtones, des documents d ’ information sur les mécanismes d ’ alerte en cas de situation de risque et d ’ urgence humanitaire, sur les systèmes de protection, et sur les réseaux institutionnels et communautaires de réaction face aux situations de crise, qui contiennent également une liste des foyers et refuges adaptés et accessibles aux personnes handicapées, dans les zones urbaines et rurales;

c) De former tout le personnel de la protection civile à la manière d ’ assurer la sécurité et la protection des personnes handicapées en tenant compte de leur sexe et de leur âge, dans les situations de risque, y compris les situations de violence armée, d ’ urgence humanitaire et de catastrophe naturelle.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

Le Comité constate avec préoccupation qu’aucune mesure n’est prise pour supprimer, dans le système juridique de l’État partie, la possibilité qui existe actuellement de priver une personne de sa capacité juridique, ou de limiter celle-ci, au motif d’un handicap. Il est également préoccupé par le manque de conscience sociale à cet égard et par la réticence de certains personnels judiciaires à appliquer les recommandations formulées par le Comité dans son Observation générale no 1 (2014) sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité.

Le Comité prie l ’ État partie de suspendre toute réforme législative qui aurait pour effet de proroger le système de substitution de la volonté, et d ’ adopter des lois et des politiques visant à remplacer le régime de prise de décisions substitutive par un régime de prise de décisions assistée qui respecte l ’ autonomie et la volonté de la personne quel que soit le degré de son handicap. De même, il demande instamment à l ’ État partie de réviser l ’ intégralité de sa législation, tant au niveau fédéral qu ’ au niveau des États fédérés, en vue d ’ éliminer toute restriction des droits découlant de la privation de capacité ou motivée par le handicap. Il lui recommande de former et de sensibiliser les autorités et la société au droit des personnes handicapées de jouir de la capacité juridique, en s ’ inspirant des recommandations formulées dans son Observation générale n o 1 (2014).

Accès à la justice (art. 13)

Le Comité est préoccupé par l’accès limité à la justice qu’ont les personnes handicapées issues de communautés autochtones, les femmes et les filles handicapées victimes de violences et de maltraitance, les personnes handicapées placées en institution et les enfants handicapés.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De prendre à titre prioritaire des mesures d ’ égalisation, de façon à garantir que les groupes de personnes handicapées les plus visés par la discrimination aient eux aussi accès à la justice;

b) D ’ assurer un service d ’ aide judiciaire gratuite aux personnes handicapées qui vivent dans la pauvreté ou en institution;

c) De garantir que tous les enfants handicapés puissent avoir accès à la justice et exprimer leurs opinions, dans le respect du principe de leur intérêt supérieur, en aménageant les procédures de sorte qu ’ elles soient adaptées à leur âge et aux besoins particuliers découlant de leur handicap.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

Le Comité constate avec préoccupation que les personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial sont souvent déclarées pénalement irresponsables, en l’absence de toute garantie procédurale. Il est également préoccupé par le fait que la réforme du Code de procédure pénale n’a pas supprimé de l’ordre juridique interne «l’irresponsabilité au motif de handicap».

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ adopter les mesures voulues pour garantir les droits de la défense aux personnes handicapées qui sont parties à une procédure pénale, que ce soit en qualité d ’ inculpé, de victime ou de témoin, et de définir des critères spécifiques pour leur permettre de bénéficier dans ce contexte d ’ aménagements raisonnables;

b ) D ’ encourager la création de mécanismes pour assurer une formation au personnel judiciaire et pénitentiaire, qui soit conforme au cadre juridique de la Convention.

Le Comité note avec préoccupation que la législation mexicaine permet que les personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial soient privées de liberté au motif de cet handicap et, notamment, qu’elles soient internées dans un hôpital psychiatrique à des fins de traitement médical ou psychiatrique.

Le Comité exhorte l ’ État partie:

a) À supprimer les mesures de sécurité qui comprennent notamment l ’ administration forcée de traitements médicaux ou psychiatriques aux personnes internées, et à promouvoir d ’ autres solutions, respectueuses des articles  14 et 19 de la Convention;

b) À abroger les dispositions qui permettent de placer une personne en détention au motif de son handicap et à garantir que tous les soins de santé mentale soient dispensés avec le consentement libre et éclairé du patient.

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 15)

Le Comité juge alarmant que des personnes handicapées internées dans les hôpitaux psychiatriques soient victimes de violations des droits de l’homme en faisant l’objet, notamment, de mesures de contrainte physique ou de placement à l’isolement, qui peuvent s’apparenter à des actes de torture ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il s’inquiète également de ce que les mécanismes censés prévenir de telles situations n’offrent pas de recours efficace.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de conduire des enquêtes administratives et pénales afin de réprimer toute pratique attentatoire aux droits des personnes handicapées qui sont internées. Il lui recommande d ’ interdire les mesures de contrainte physique et de placement à l ’ isolement dans les institutions accueillant des personnes handicapées. Il lui demande aussi de renforcer son mécanisme national de prévention de la torture, en le dotant d ’ un budget suffisant et de personnel qualifié et en mettant en place les garanties nécessaires pour qu ’ il puisse s ’ acquitter de ses fonctions en toute indépendance.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

Le Comité note que les filles et les femmes handicapées, en particulier les autochtones, sont souvent victimes de violence et de maltraitance et ne bénéficient pas de mesures efficaces de protection ou de réparation.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de mettre en application les mesures qui sont prévues dans sa législation et dans ses politiques pour prévenir la violence contre les filles et les femmes handicapées, ainsi que pour protéger celles-ci et réparer les préjudices qu ’ elles subissent. Il l ’ invite également à collecter régulièrement des données et des statistiques sur la situation des filles et des femmes handicapées face à la violence, à l ’ exploitation et à la maltraitance, y compris les féminicides.

Le Comité est préoccupé par l’absence de protection des enfants handicapés face à la violence et à la maltraitance. Il constate également avec préoccupation qu’il n’existe pas de protocoles pour consigner, vérifier et surveiller les conditions de fonctionnement des foyers, refuges et autres centres d’accueil pour enfants handicapés.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de :

a) Prendre des mesures pour prévenir et éliminer toute forme de violence contre les enfants handicapés, aussi bien dans l ’ environnement familial que dans les institutions;

b) Conduire les enquêtes requises sur les cas de violence et de maltraitance visant des enfants handicapés, de façon à empêcher que les auteurs de ces actes restent impunis;

c) Mettre en place un mécanisme indépendant de suivi, conformément au paragraphe  3 de l ’ article  16 de la Convention, qui soit chargé de consigner, vérifier et surveiller les conditions de fonctionnement des foyers, refuges et autres centres d ’ accueil pour enfants handicapés.

Protection de l’intégrité de la personne (art. 17)

Le Comité est préoccupé à l’idée que des opérations de stérilisation soient pratiquées sur des personnes handicapées sans que celles-ci aient donné leur consentement libre et éclairé, notamment dans des institutions telles que Casa Hogar Esperanza, où, selon les informations dont dispose le Comité, il arrive que des fillettes, des adolescentes ou des femmes handicapées se voient recommander une stérilisation, ou que de telles opérations soient autorisées, voire pratiquées de force ou sous la contrainte.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ ouvrir des enquêtes administratives et pénales au sujet des autorités judiciaires et sanitaires et des institutions qui recommandent, autorisent ou pratiquent de force des stérilisations sur la personne de fillettes, adolescentes ou femmes handicapées, et de garantir que les victimes de tels actes aient accès à la justice et à une réparation.

Droit de circuler librement et nationalité (art. 18)

Le Comité est préoccupé par le fait que des migrants ayant un handicap intellectuel ou psychosocial sont privés de liberté et maltraités dans les centres de rétention, que les personnes handicapées doivent satisfaire à des critères plus stricts pour être autorisées à entrer dans le pays, et qu’une assistance limitée soit dispensée aux personnes qui se blessent en tombant du train connu sous le nom de La Bestiala Bête»).

Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De doter les centres de rétention d ’ espaces adaptés et accessibles aux personnes handicapées, ainsi que de personnel qualifié pour s ’ occuper de cette catégorie de migrants;

b) De revoir et d ’ adapter les directives pratiques relatives à l ’ application de la loi sur les migrations, de façon que les personnes handicapées bénéficient de l ’ égalité de traitement dans la délivrance des visas et autorisations d ’ entrée sur le territoire;

c) De revoir et d ’ adapter les protocoles de prise en charge des migrants mutilés pendant leur traversée du territoire mexicain, de façon que ces personnes bénéficient non seulement de soins d ’ urgence, mais aussi d ’ un traitement propre à leur assurer un rétablissement adéquat et une réadaptation de base.

Le Comité relève que, malgré les mesures adoptées par l’État partie pour promouvoir l’inscription des enfants à l’état civil, les enfants handicapés ne sont pas encore tous enregistrés.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de faire en sorte que tous les enfants handicapés soient immédiatement enregistrés à la naissance et pourvus de documents d ’ identité.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a pas de stratégie pour assurer l’autonomie de vie des personnes handicapées et leur inclusion dans la société. Il est également préoccupé par l’absence de stratégie spécifique et efficace en faveur de la désinstitutionalisation des personnes handicapées.

Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) D ’ adopter les mesures législatives, financières et autres qui sont nécessaires pour assurer l ’ autonomie de vie des personnes handicapées dans la communauté. Ces mesures doivent comprendre la fourniture de services d ’ aide personnelle, être adaptées à la culture des bénéficiaires, permettre aux personnes handicapées de choisir leurs mode et lieu de vie, et permettre également d ’ identifier leurs préférences et leurs besoins en fonction de leur sexe et de leur âge;

b) D ’ adopter d ’ urgence une stratégie pour la désinstitutionalisation des personnes handicapées, assortie d ’ un calendrier précis, et assurer un suivi des résultats obtenus.

Respect du domicile et de la famille (art. 23)

Le Comité note que le Code civil de l’État partie restreint les droits de certaines personnes handicapées en matière de mariage, de garde des enfants et d’autorité parentale. Il relève également que les enfants handicapés qui vivent dans la pauvreté risquent davantage d’être abandonnés ou placés en institution.

Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De revoir et harmoniser son Code civil de façon à garantir à toutes les personnes handicapées le droit de se marier, d ’ exercer l ’ autorité parentale et d ’ avoir la garde de leurs enfants;

b) D ’ instaurer des programmes de soutien aux mères ayant un handicap psychosocial, afin de les aider dans l ’ exercice de leurs responsabilités parentales;

c) D ’ établir des mécanismes de soutien aux familles, conformément à la recommandation faite par le Comité des droits de l ’ enfant lors de son examen du troisième rapport périodique de l ’ État partie ( CRC/C/MEX/CO/3 , par.  55);

d) De p lacer tous les enfants handicapés qui sont abandonnés dans un environnement familial, au lieu de les placer en institution, en s ’ assurant que les familles d ’ accueil reçoivent l ’ aide nécessaire pour prendre soin d ’ eux.

Éducation (art. 24)

Le Comité est particulièrement préoccupé par:

a)Le maintien d’un modèle d’éducation spéciale dans l’État partie;

b)Le fait que les enfants handicapés ne soient pas tous scolarisés;

c)Le manque d’accessibilité des centres éducatifs et du matériel pédagogique, notamment l’absence de manuels scolaires en braille et d’interprètes en langue des signes.

Le Comité appelle l ’ État partie :

a) À consacrer dans sa législation et dans ses politiques la mise en place d ’ un système d ’ éducation inclusive à tous les degrés de l ’ enseignement −  primaire, secondaire et supérieur  − ainsi que le développement des aménagements raisonnables, en prévoyant des ressources budgétaires suffisantes et en dispensant la formation voulue aux enseignants;

b) À prendre des mesures pour que tous les enfants handicapés soient scolarisés, y compris ceux qui ont un handicap intellectuel ou psychosocial, les sourds ‑ muets et les enfants autochtones;

c) À mettre en œuvre, de manière urgente, des mesures pour garantir l ’ accessibilité des centres éducatifs et de tout le matériel pédagogique, notamment en introduisant le braille et la langue des signes à l ’ école, et à faire en sorte que cette accessibilité soit effective dès le début de l ’ année scolaire.

Santé (art. 25)

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des services communautaires de santé mentale. Il s’inquiète également de ce que les femmes handicapées voient restreint leur droit d’avoir accès en toute sécurité aux services de santé sexuelle et procréative et soient incitées à avorter lorsqu’elles sont enceintes.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D e veiller à ce qu ’ aucun traitement médical ne soit administré à une personne handicapée sans que celle-ci ait préalablement donné son consentement éclairé −  y compris sous la forme d ’ une déclaration de volonté anticipée  − , de mettre à la disposition des personnes handicapées un nombre suffisant de services communautaires de santé, qui soient fournis dans le respect de leur droit au consentement libre et éclairé, et de faire en sorte que tout traitement pharmaceutique nécessaire en raison d ’ un handicap soit dispensé gratuitement ou à moindre coût au titre du système d ’ assistance;

b) D e garantir que les femmes handicapées puissent exercer leur droit d ’ avoir accès facilement et en toute sécurité aux services de santé sexuelle et procréative, aussi bien dans les zones urbaines que dans les zones rurales, et de faire en sorte que le personnel médical n ’ incite pas les femmes handicapées enceintes à avorter, en prévoyant de mettre en examen et de sanctionner ceux qui exerceraient des pressions à cette fin.

Travail et emploi (art. 27)

Le Comité est préoccupé par:

a)Le faible taux d’emploi des personnes handicapées, notamment celles dont le handicap est intellectuel ou psychosocial, et la faible couverture des stratégies et programmes visant à favoriser l’emploi de ces personnes;

b)L’absence d’informations sur les conditions de travail des personnes handicapées qui ont un emploi;

c)Le fait que les femmes handicapées et les personnes handicapées autochtones affrontent une plus grande discrimination dans l’accès au marché du travail;

d)L’absence de mécanismes permettant de faire respecter le quota de 3 % d’employés handicapés dans le secteur public;

e)Le manque de réglementation sur les aménagements raisonnables auxquels ont droit les personnes handicapées au travail, tant dans le secteur public que dans le secteur privé.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D e renforcer, en les dotant des ressources nécessaires, les programmes en faveur de l ’ emploi des personnes handicapées, en particulier celles dont le handicap est intellectuel ou psychosocial, et d ’ encourager notamment, par des mesures incitatives, leur embauche dans le secteur privé;

b) D ’établir des mécanismes pour protéger les personnes handicapées contre toute forme de travail forcé, d’exploitation et de harcèlement sur le lieu de travail;

c) D e mettre en œuvre des mesures d ’ égalisation pour favoriser l ’ embauche des femmes handicapées et des personnes handicapées autochtones ;

d) D ’ instaurer un mécanisme de contrôle pour faire respecter le quota de 3 % d ’ employés handicapés dans le secteur public et de prendre des mesures analogues de discrimination positive dans le secteur privé;

e) D ’ établir des critères pour les aménagements raisonnables en faveur des travailleurs handicapés, en allouant un budget adéquat à ces mesures, tant dans le secteur public que dans le secteur privé.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

Le Comité est profondément préoccupé par la situation d’exclusion et de pauvreté des personnes handicapées autochtones, qui vivent dans des conditions générales de précarité, sans accès à l’eau potable ni aux systèmes d’assainissement, et sans disposer d’un logement décent, ainsi que par le manque d’information à ce sujet. Il s’inquiète également de ce que la Commission nationale pour le développement des peuples autochtones n’ait pas de programme de travail consacré aux personnes handicapées, et que ses locaux et services ne leur soient même pas accessibles.

Le Comité prie instamment l ’ État partie:

a) D e redoubler d ’ efforts pour inclure les personnes handicapées autochtones dans les bénéficiaires des politiques de développement au-delà de 2015, en privilégiant la dimension communautaire et rurale, en veillant à tenir compte des opinions exprimées par ces personnes, de sorte que leurs besoins et attentes soient pris en considération dans lesdites politiques;

b) D ’ instaurer un système de suivi périodique des actions en faveur des peuples autochtones qui sont prévues dans le Programme national pour le développement et l ’ intégration des personnes handicapées ;

c) D e mettre en œuvre des mesures spéciales pour remédier au fait que les personnes handicapées sont notablement désavantagées lorsqu ’ elles sont des femmes, des enfants ou des personnes âgées autochtones en situation d ’ abandon et d ’ extrême pauvreté.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

Le Comité est préoccupé par le fait que les personnes ayant un handicap intellectuel ou psychosocial soient privées du droit de vote et que les procédures, les installations et le matériel de vote ne soient pas accessibles.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de modifier les dispositions pertinentes du Code fédéral des institutions et procédures électorales de façon à garantir le droit de vote de toutes les personnes handicapées. Il lui recommande de veiller à ce que les procédures, les installations et le matériel de vote soient accessibles, aussi bien dans les zones urbaines que dans les zones rurales.

Participation à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports (art. 30)

Le Comité note que l’État partie n’a pas encore ratifié le traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées.

Le Comité encourage l ’ État partie à prendre toutes les mesures voulues pour ratifier et mettre en application le traité de Marrakech dès que possible.

IV.Obligations spécifiques (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

Le Comité relève que l’État partie a mis en place le Comité technique spécial d’information sur le handicap, mais note avec préoccupation qu’il n’a pas de statistiques nationales actualisées sur la situation des personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que les organisations de personnes handicapées participent de manière effective aux travaux du Comité technique spécial d ’ information sur le handicap. Il le prie instamment d ’ instaurer d ’ urgence une procédure systématique de collecte, d ’ analyse et de diffusion des données statistiques sur les personnes handicapées, ventilées par zones urbaines et rurales, et par États et communautés, en tenant compte à cet égard de la situation de tous les groupes marginalisés ainsi que des recommandations et des préoccupations formulées par le Comité dans les présentes observations finales, aux paragraphes  14 et 34, et 43 et 47, respectivement.

Application et suivi au niveau national (art. 33)

Le Comité note qu’un mécanisme indépendant a été désigné pour assurer le suivi de la Convention dans l’État partie, mais que ce mécanisme n’a pas encore défini sa structure et ses fonctions, ni décidé quelles seraient ses activités pour promouvoir, protéger et superviser l’application de la Convention au niveau fédéral et à celui des États fédérés.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de veiller à ce que la Commission nationale des droits de l ’ homme et les 32 organismes chargés des droits de l ’ homme au niveau des États fédérés, en leur qualité de mécanisme indépendant responsable du suivi de la Convention, définissent leur structure, leurs objectifs, les indicateurs à utiliser et les ressources nécessaires à leur travail, et de renforcer la Commission de sorte qu ’ elle puisse s ’ acquitter de son mandat de manière efficace et indépendante.

Coopération et assistance technique

Conformément à l’article 37 de la Convention, le Comité offre des conseils techniques à l’État partie, en réponse aux consultations adressées aux membres, par l’intermédiaire du secrétariat. L’État partie peut également solliciter une assistance technique auprès des institutions spécialisées des Nations Unies présentes sur son territoire ou dans la région.

Suivi des observations finales et diffusion

Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre les recommandations formulées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre ces dernières, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et du Parlement, aux responsables des ministères concernés, aux autorités judiciaires et aux membres des professions concernées, tels que les professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice, ainsi qu’aux autorités locales, aux responsables du secteur privé et aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale disponibles.

Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, sous des formes accessibles, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations qui représentent les personnes handicapées, ainsi qu’auprès de ces personnes et de leurs proches.

Le Comité encourage l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de ses prochains rapports périodiques.

Prochain rapport

Le Comité demande à l’État partie de soumettre ses deuxième et troisième rapports périodiques en un seul document au plus tard le 17 janvier 2018. À cet égard, il l’invite à étudier la possibilité de soumettre ces deux rapports selon la procédure simplifiée. Dans le cadre de cette procédure, le Comité établit une liste de points à traiter, au moins un an avant la date prévue pour la soumission du ou des rapports attendus. Les réponses de l’État partie à cette liste constituent son rapport.