Nations Unies

CRC/C/YEM/CO/4

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

25 février 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ enfant

Observations finales concernant le quatrième rapport périodique du Yémen *

Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique du Yémen (CRC/C/YEM/4) à ses 1849e et 1850e séances (CRC/C/SR.1849 et 1850), les 14 et 15 janvier 2014. À sa 1875e séance, le 31 janvier 2014, il a adopté les observations finales ci-après.

I.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le quatrième rapport périodique de l’État partie et ses réponses écrites à la liste de points (CRC/C/YEM/Q/4/Add.1), qui lui ont permis de mieux comprendre la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

Le Comité note avec satisfaction la ratification des instruments suivants:

a)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en mars 2007;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant, en mars 2009;

c)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en février 2010.

Le Comité salue l’adoption des mesures de politique générale et des mesures institutionnelles suivantes:

a)La création, par le décret no 278 du Ministère de la justice (2013), du Comité d’expertise médico-légale, qui est chargé d’examiner tous les cas dans lesquels il est difficile d’estimer l’âge de l’auteur d’une infraction au moment des faits;

b)La création du Comité national de lutte contre la traite, par le décret no 6 du Premier Ministre (2013);

c)La mise en place de la stratégie nationale de promotion de l’enregistrement des naissances, adoptée en 2008.

Le Comité salue la coopération entre l’État partie et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, en particulier l’ouverture officielle, le 26 septembre 2012, d’un bureau du Haut-Commissariat dans le pays.

III.Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

Le Comité est conscient des difficultés auxquelles l’État partie est confronté dans la consolidation de la stabilité et de la sécurité de son territoire, en raison du conflit qui sévit depuis quelques années (en particulier en 2011-2012) et des graves difficultés économiques auxquelles le pays et la population continuent de se heurter, situation qui a entravé et entrave toujours la réalisation des droits consacrés par la Convention.

IV.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6) de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

Le Comité salue l’action menée par l’État partie pour donner suite aux observations finales qu’il avait formulées en 2005 (CRC/C/15/Add.267) concernant le troisième rapport périodique de l’État partie, mais constate avec regret que certaines des recommandations qui y figurent n’ont pas été pleinement prises en considération.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de prendre toutes les dispositions nécessaires pour donner effet aux recommandations figurant dans ses observations finales concernant le troisième rapport périodique présenté au titre de la Convention, qui n ’ ont pas été mises en œuvre ou l ’ ont été de manière insuffisante, en particulier celles relatives à la définition de l ’ enfant, aux châtiments corporels, aux pratiques néfastes, à l ’ éducation et à l ’ administration de la justice pour mineurs.

Législation

Le Comité note avec satisfaction que les recommandations des groupes de travail sur la Conférence nationale de dialogue prévoient des dispositions tendant à garantir les droits de l’enfant, lesquelles devraient être incorporées dans le projet de constitution. Il prend également acte de la révision complète de 54 lois, projets de loi et réglementations relatifs à l’enfance, qui a abouti à l’élaboration d’un projet de modifications conformes à la Convention et à ses Protocoles facultatifs. Cela étant, le Comité craint que les divergences de vues entre les membres du Parlement au sujet des droits de l’enfant, en particulier s’agissant de la fixation à 18 ans de l’âge de la majorité et de l’âge minimum pour le mariage, risquent de retarder l’adoption de ces modifications législatives.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ accélérer le processus d ’ adoption des projets de modification de la législation relative aux droits de l ’ enfant en vue d ’ aligner son droit interne avec les droits et les principes consacrés par la Convention et ses Protocoles facultatifs et de garantir le respect des droits de l ’ enfant dans sa nouvelle c onstitution.

Politique et stratégie globales

Le Comité note que l’État partie a adopté plusieurs plans et stratégies, dont la stratégie nationale de promotion de l’enregistrement des naissances (2008), le plan national de lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes (mutilations génitales féminines) (2007) et le plan national de lutte contre le trafic d’enfants (2007). Toutefois, il est préoccupé de voir qu’il ne semble pas y avoir d’indicateurs permettant de surveiller efficacement l’exécution des stratégies et que les dépenses publiques, insuffisantes, ne permettent pas de garantir et d’appuyer leur mise en œuvre.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ élaborer une politique globale de l ’ enfance qui servira de base à l ’ élaboration d ’ une stratégie contenant les éléments nécessaire s à son application. Il recommande à l ’ État partie de faire en sorte d ’ affecter rapidement des ressources humaines, techniques et financières en quantité suffisante aux fins de la mise en œuvre effective des stratégies nationales relatives à l ’ enfance et de promouvoir et faciliter la participation active des enfants et des jeunes, des parents, des organisations non gouvernementales (ONG) et autres parties intéressées et compétentes . Il lui recommande en outre de mettre au point des indicateurs et des critères pour contrôler et évaluer l ’ application des stratégies et plans adoptés.

Coordination

Le Comité constate avec préoccupation que les efforts entrepris par l’État partie pour renforcer et restructurer le Conseil supérieur de la mère et de l’enfant n’ont pas encore abouti à la création d’un organe doté de l’autorité et des capacités suffisantes pour coordonner la mise en œuvre de la Convention à tous les niveaux de pouvoir et dans tous les secteurs.

Le Comité pri e instamment l ’ État partie de doter le Conseil supérieur de la mère et de l ’ enfant d ’ un mandat clair et de l ’ investir d ’ une autorité suffisante pour coordonner l ’ ensemble des activités liées à la mise en œuvre de la Convention entre les différents secteurs, aux plans national, régional et local. L ’ État partie dev r ait aussi faire en sorte que ce c onseil soit doté des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement.

Allocation de ressources

Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie lors du dialogue, concernant un projet tendant à garantir l’allocation de crédits budgétaires à l’enfance. Toutefois, il constate avec préoccupation qu’aucun crédit n’est spécifiquement réservé à l’enfance dans le budget de l’État partie. Le Comité juge également préoccupante la réduction des dépenses sociales, en particulier dans les secteurs de la santé et de l’éducation, au regard de l’évolution du produit intérieur brut et des dépenses publiques de l’État partie depuis l’examen de son précédent rapport par le Comité en 2005, et craint que cela ait des conséquences négatives pour les enfants.

À la lumière des conclusions issues de sa journée de débat général tenue en 2007 sur le thème «Ressources pour les droits de l ’ enfant − r esponsabilités des États» et compte tenu de l ’ importance des articles 2, 3, 4 et 6 de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ exécuter le projet afin de garantir que des crédits budgétaires soient alloués à l ’ enfance;

b) D ’ établir une procédure de budgétisation qui intègre une perspective axée sur les droits de l ’ enfant et fasse apparaître clairement les dépenses destinées aux enfants dans les secteurs et organismes concernés, y compris en mettant en place des indicateurs spécifiques et un système de suivi;

c) D ’ accroître sensiblement les ressources allouées à la santé et à l ’ éducation, notamment en réservant des crédits budgétaires pour l ’ enfance;

d) D ’ instaurer des mécanismes permettant de surveiller et d ’ évaluer l ’ adéquation, l ’ efficacité et l ’ équité de la répartition des ressources consacrées à la mise en œuvre de la Convention.

Collecte de données

Le Comité note que l’État partie a mis en place un système d’information en matière de justice des mineurs. Cela étant, il reste préoccupé par l’absence de mécanisme de collecte de données adéquat, qui permette de recueillir de manière systématique et complète des données ventilées pour tous les domaines couverts par la Convention et pour tous les groupes d’enfants (CRC/C/15/Add.267, par. 24).

À la lumière de son Observation générale n o 5 (2003) sur les mesures d ’ application générales de la Convention relative aux droits de l ’ enfant, le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ améliorer rapidement son système de collecte de données. Les données devraient porter sur tous les domaines relevant de la Convention et être ventilées par âge, sexe, zone géographique, origine ethnique et nationale et milieu socioéconomique, afin de faciliter l ’ analyse de la situation de tous les enfants, en particulier les enfants vulnérables. De plus, le Comité recommande que les données et les indicateurs soient échangés entre les ministères compétents et qu ’ ils soient utilisés pour l ’ élaboration, le suivi et l ’ évaluation de politiques, de programmes et de projets propres à assurer la mise en œuvre efficace de la Convention. À cet égard, il recommande également à l ’ État partie de renforcer ses activités de coopération technique, notamment avec le Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance (UNICEF).

Mécanisme de suivi indépendant

Le Comité prend note de l’adoption par le Cabinet, en septembre 2013, du projet de loi relatif à la création dans l’État partie d’une institution nationale des droits de l’homme indépendante. Il note aussi que ce projet de loi contient un chapitre sur la mise en place d’un observatoire des droits de l’enfant, mais est préoccupé par le retard pris dans l’adoption de ce projet par le Parlement.

Compte tenu de son Observation générale sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l ’ homme dans la protection et la promotion des droits de l ’ enfant, le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi portant création d ’ une institution nationale des droits de l ’ homme indépendante et de donner la priorité à la création de l ’ observatoire des droits de l ’ enfant, comme mécanisme chargé de surveiller la situation en matière de droits de l ’ enfant et habilité à recevoir, instruire et traiter les plaintes émanant d ’ enfants en tenant compte de leur sensibilité et en veillant au respect de la vie privée et à la protection des victimes, et à mener des activités de surveillance, de suivi et de vérification au profit des victimes. Le Comité recommande en outre à l ’ État partie de garantir l ’ indépendance de ce mécanisme, y compris en ce qui concerne son financement, son mandat et ses immunités, afin qu ’ il soit pleinement conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris). À cet effet, le Comité recommande à l ’ État partie de solliciter la coopération technique du Haut ‑Commissariat aux droits de l ’ homme et de l ’ UNICEF, notamment.

Diffusion et sensibilisation

Le Comité prend acte des efforts déployés par l’État partie pour diffuser et faire connaître la Convention. Toutefois, il s’inquiète du fait que le public en général, et notamment les enfants, connaît mal la Convention, en particulier dans les zones rurales reculées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour diffuser la Convention et sensibiliser le public, notamment les enfants, aux droits de l ’ enfant au moyen de programmes de sensibilisation, telles des campagnes de communication fondées sur des contacts directs avec la population des zones rurales reculées, afin que la population dans son ensemble considère que les enfants ont des droits.

Formation

Le Comité prend note des efforts que fait l’État partie pour former les professionnels qui travaillent pour et avec les enfants aux questions relatives aux droits de l’enfant et renforcer leurs capacités dans ce domaine. Toutefois, il constate avec préoccupation que ces efforts n’ont pas débouché sur la mise en place systématique de programmes de formation adaptée qui permettent de mettre un terme aux attitudes paternalistes à l’égard des enfants dont font preuve les professionnels qui travaillent sur ces questions.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts en vue de dispenser systématiquement une formation adaptée sur les droits de l ’ enfant à tous les professionnels qui travaillent pour et avec les enfa nts , en particulier les agents de la force publique, les enseignants, les professionnels des médias , le personnel de santé, les travailleurs sociaux, les personnels travaillant dans toutes les structures de protection de remplacement et les services d ’ immigration. À cet égard, l ’ État partie devrait, entre autres mesures, lancer des campagnes de sensibilisation, élaborer des manuels spécifiques et organiser des ateliers de renforcement des capacités.

Coopération avec la société civile

Le Comité prend acte des efforts que fait l’État partie pour renforcer sa coopération avec la société civile dans le domaine des droits de l’enfant. Il regrette néanmoins le peu d’informations reçues concernant la participation de la société civile et des enfants au processus de présentation de rapports.

Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer d ’ associer la société civile, notamment les organisations non gouvernementales (ONG) et les organisations de protection de l ’ enfance, à la planification, à la mise en œuvre, au suivi et à l ’ évaluation des politiques, plans et programmes relatifs aux droits de l ’ enfant.

B.Définition de l’enfant (art. 1er de la Convention)

Le Comité prend note des informations fournies dans les réponses à la liste de points à traiter concernant les propositions tendant à modifier le droit interne pour y incorporer une définition de l’enfant qui soit conforme à l’article premier de la Convention. Toutefois, il constate avec préoccupation que l’âge de la majorité est fixé à 15 ans et se déclare vivement préoccupé par l’absence de disposition légale fixant un âge minimum pour le mariage et par l’âge très bas de la responsabilité pénale, fixé à 7 ans, dans l’État partie. Il est en outre préoccupé par le retard considérable pris, du fait de divergences de vues au sein du Parlement, dans l’adoption de la modification législative tendant à porter l’âge du mariage à 18 ans, qui avait été proposée en 2007.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ accélérer l ’ adoption des modifications législatives de sorte à incorporer expressément dans le droit interne une définition de l ’ enfant qui soit pleinement conforme à l ’ article premier de la Convention, et de porte r l ’ âge de la majorité à 18 ans. Il lui recommande en outre de prendre les mes ures nécessaires pour que soi t adoptée la modification législative tendant à fixer à 18 ans l ’ âge minimum du mariage pour les filles et les garçons, et de relever l ’ âge minimum de la majorité pénale afin qu ’ il soit conforme aux normes internationales.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non-discrimination

Le Comité est préoccupé par la persistance des attitudes sociales discriminatoires à l’égard de certaines catégories d’enfants marginalisés et défavorisés, notamment les enfants muhamasheen, les enfants nés hors mariage et les enfants handicapés, ces attitudes ayant des conséquences négatives sur la jouissance de leurs droits. Il est profondément préoccupé par la discrimination dont sont l’objet les filles dès leur plus jeune âge et pendant toute leur enfance, du fait des attitudes et normes traditionnelles au nom desquelles les filles continuent d’être considérées comme inférieures aux garçons.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ adopter une stratégie globale portant sur toutes les formes de discrimination, notamment les formes multiples de discrimination à l ’ égard de toutes les catégories d ’ enfants marginalisés et défavorisés, et de la mettre en œuvre en collaboration avec un large éventail de parties prenantes et en associant tous les secteurs de la société afin de faciliter le changement social et culturel;

b) De faire en sorte que les enfants marginalisés et défavorisés, comme les enfants muhamasheen , les enfants nés hors mariage et les enfants handicapés, aient accès à tous les services de base et jouissent des droits consacrés par la Convention;

c) De prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer la discrimination sociale dont les femmes et les filles sont victimes en mettant en place des programmes d ’ éducation de la population, y compris des campagnes menées en coopération avec les personnalités influentes, les familles et les médias.

Intérêt supérieur de l’enfant

Le Comité prend note des modifications qu’il a été proposé d’apporter en 2012 à la loi sur les droits de l’enfant, lesquelles préconisaient l’application du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dans toutes les procédures, politiques et programmes administratifs et judiciaires relatifs aux enfants. Toutefois, il constate avec préoccupation que peu de professionnels qui travaillent auprès d’enfants savent que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être la considération primordiale dans tous les domaines qui les intéressent et il s’inquiète de la persistance des normes et traditions qui empêchent l’application de ce principe.

Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o 14 (2013) sur le droit de l ’ enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale et lui recommande d ’ accélérer l ’ adoption de la modification de la loi sur les droits de l ’ enfant proposée en 2012 et de veiller à ce que ce droit soit dûment intégré et systématiquement appliqué dans toutes les procédures législatives, administratives et judiciaires, ainsi que dans l ’ ensemble des politiques, programmes et projets qui concernent les enfants ou qui ont une incidence sur leur vie. À cet égard, l ’ État partie est encouragé à définir des procédures et des critères propres à aider toutes les personnes en position d ’ autorité à déterminer l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant dans tous les domaines et à donner à ce principe le poids qu ’ il mérite en tant que considération primordiale. Ces procédures et critères devraient être portés à la connaissance de la population, y compris des chefs traditionnels et religieux, des organismes de protection sociale publics et privés, des tribunaux, des autorités administratives et des organes législatifs.

Droit à la vie, à la survie et au développement

Le Comité est vivement préoccupé par les affaires dans lesquelles des enfants ont été condamnés à la peine de mort et exécutés dans l’État partie, notamment par le cas d’une fille qui avait 15 ans au moment des faits et a été exécutée en 2012. Malgré le moratoire sur la peine de mort et la mise en place en 2013 d’un Comité d’expertise médico-légale, le Comité est préoccupé par le fait que 33 enfants ont déjà été condamnés à la peine de mort, trois de ces condamnations ayant été approuvées par l’ancien Président. Il exprime en outre sa vive préoccupation face aux risques élevés auxquels sont exposés les enfants en conflit avec la loi et s’inquiète notamment du sort des 150 enfants et plus qui risquent la peine de mort en raison, entre autres, du faible taux d’enregistrement des naissances, de l’absence de garantie d’un procès équitable et de l’absence de critères techniques clairs pour déterminer l’âge des mineurs en conflit avec la loi.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de prendre des mesures spécifiques pour faire appliquer l ’ article 31 du Code pénal qui interdit l ’ application de la peine de mort à toute personne âgée de moins de 18 ans au moment de la commission de l ’ in fraction. Il le prie en outre :

a) D ’ annuler définitivement la condamnation à mort de toute personne dont il est établi qu ’ elle était âgée de moins de 18 ans au moment de la commission de l ’ infraction et dont le cas a été porté à l ’ attention de la présidence et d ’ annuler toute décision d ’ exécution dans ce type de situation à l ’ avenir;

b ) De v eiller à ce que le Comité d ’ expertise médico-légale procède sans délai au réexamen de tous les cas de personnes qui pourraient avoir été âgées de moins de 18 ans au moment de l ’ infraction pour laquelle elles ont été condamné e s à mort et faire de même pour tous les cas futurs; de veiller en outre à ce que le Comité d ’ expertise médico-légale, dans le cadre du réexamen des cas, effectue des évaluations sociales afin de corroborer les résultats des expertises médico-légales visant à déterminer l ’ âge d ’ une personne;

c) De v eiller à ce que le bénéfice du doute soit accordé à l ’ accusé dans les cas où il est délicat, en raison d ’ éléments non concluants ou divergents, de déterminer avec certitude l ’ âge d ’ une personne au moment de la commission de l ’ infraction qui lui est imputée;

d) D ’ é largir le mandat du Comité d ’ expertise médico-légale de sorte qu ’ il puisse prendre part à l ’ examen et au réexamen de tous les futurs cas pour lesquels la détermination de l ’ âge de l ’ accusé est sujette à caution;

e) De m ettre en place des programmes de formation et de sensibilisation aux droits de l ’ enfant à l ’ intention de tous les membres du corps judiciaire;

f) De c ontinuer de coopérer avec les organisations de la société civile pour surveiller la situation des enfants en conflit avec la loi afin de déceler d ’ éventuels autres cas d ’ enfants à risque;

g) De p oursuivre sa coopération avec le Haut ‑Commissariat aux droits de l ’ homme et l ’ UNICEF dans ce domaine.

Respect de l’opinion de l’enfant

Le Comité constate avec satisfaction que le Parlement des enfants a tenu régulièrement des élections depuis sa création en 2004. Toutefois, il est préoccupé par le peu d’appui financier et technique dont bénéficie le Parlement des enfants pour organiser ses sessions. Le Comité constate également avec préoccupation que les enfants ne sont généralement pas considérés comme des titulaires de droits dans la société yéménite et que leur participation à la vie publique et la possibilité de faire entendre leur voix dans les processus de prise de décisions sont insuffisantes, aussi bien sur le plan de l’élaboration des politiques que dans la famille, à l’école et dans la communauté.

Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o 12 (2009) sur le droit de l ’ enfant d ’ être entendu et lui recommande de prendre des mesures pour renforcer ce droit, conformément à l ’ article 12 de la Convention. À cet effet, il recommande à l ’ État partie de:

a) Veiller à ce que le Parlement des enfants soit doté d ’ un mandat concret ainsi que de ressources humaines, techniques et financières suffisantes, propres à favoriser la participation effective des enfants, aux procédures législatives nationales sur les questions qui les concernent;

b) Mettre en place des programmes et des activités de sensibilisation visant à promouvoir une participation active et effective de tous les enfants à la vie de la famille, de la communauté et de l ’ école, notamment dans le cadre des conseils d ’ élèves, en accordant une attention particulière aux filles et aux enfants vulnérables.

D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17 de la Convention)

Enregistrement des naissances

Le Comité est profondément préoccupé de constater que, bien que l’enregistrement des naissances soit gratuit, le taux d’enregistrement des naissances dans l’État partie demeure très bas. Il est aussi préoccupé par le fait que les familles ne signalent pas les naissances à domicile, qui ne font l’objet d’aucun suivi, en particulier dans les zones rurales, et par la corruption liée à l’enregistrement des naissances, qui fait que les familles doivent s’acquitter de frais d’enregistrement illégaux et que les certificats de naissance sont falsifiés.

Le Comité rappelle ses précédentes recommandations (CRC/C/OPSC/YEM/CO/1, par. 32) et engage instamment l ’ État partie à garantir l ’ enregistrement de toutes les naissances, notamment en sensibilisant à la question les fonctionnaires, les sages-femmes, les médecins et les dirigea nts communautaires et religieux , en établissant des mécanismes civils d ’ enregistrement dans les hôpitaux et un mécanisme d ’ enregistrement et de suivi des naissances qui ont lieu à domicile. Il recommande en outre à l ’ État partie de prendre des mesures appropriées pour lutter contre la corruption, notamment en identifiant et sanctionnant ceux qui perçoivent des frais illégaux pour enregistrer les naissances et falsifient les certificats de naissance.

Nationalité

Le Comité est préoccupé par les dispositions discriminatoires à l’égard des enfants handicapés figurant à l’article 4 b) de la loi no 6 de 1990 relative à la nationalité, selon lesquelles une des conditions préalables à l’obtention, à la majorité, de la nationalité yéménite pour les enfants nés dans l’État partie de parents étrangers est de ne pas présenter de handicap.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ abroger toutes les dispositions discriminatoires à l ’ égard des enfants han dicapés figurant dans la loi nationale n o 6 (1990), en particulier l ’ article 4 b), et de faire en sorte que tous les enfants, sans discrimination aucune, aient le droit d ’ acquérir la nationalité.

Accès à une information appropriée

Le Comité est préoccupé par l’absence d’information sur les mesures prises par l’État partie pour faire en sorte que les enfants aient accès à une information appropriée et suffisante, y compris ceux qui habitent les régions rurales.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour que les enfants, y compris ceux qui vivent dans les zones rurales, aient accès à une information appropriée et suffisante, y compris par des moyens innovants et adaptés. Il recommande en outre à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations à ce sujet.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39 de la Convention)

Châtiments corporels

Le Comité note que le Ministère de l’éducation a publié le décret no 426 (2012) interdisant les châtiments corporels dans les écoles. Il est toutefois préoccupé par les obstacles à l’application effective de ce décret, à savoir notamment l’absence de mécanismes de surveillance appropriés, les idées préconçues des enseignants selon lesquelles les châtiments corporels peuvent constituer une mesure disciplinaire et l’absence de mécanismes de responsabilisation. Il reste préoccupé par le fait que le recours aux châtiments corporels est très répandu dans les familles et les structures d’accueil et à titre de sanction pénale.

Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) D ’ interdire expressément dans sa législation toute s les forme s de châtiment corporel, notamment en adoptant la série de propositions de modification de la législation relati ve aux droits de l ’ enfant;

b) De mettre en place des programmes publics d ’ éducation, de sensibilisation et de mobilisation associant les enfants, les familles, les communautés, les chefs traditionnels et religieux et portant sur les effets physiques et psychologiques néfastes des châtiments corporels, afin de faire évoluer les mentalités;

c) De v eiller à ce que des poursuites soient systématiquement engagées contre les personnes responsables de mauvais traitements infligés à des enfants;

d) De promouvoir des pratiques pédagogiques et disciplinaires positives, non violentes et participatives ;

e) D ’ établir un mécanisme de dépôt de plainte qui soit adapté aux besoins des enfants.

Maltraitance et négligence

Le Comité juge préoccupant que, dans l’État partie, la violence familiale à l’égard des enfants se fonde, dans une grande mesure, sur l’idée selon laquelle les parents auraient le droit d’infliger des châtiments corporels à leurs enfants à titre de mesure disciplinaire. Il est en outre préoccupé par les renseignements indiquant que la violence familiale conduit dans certains cas au décès d’enfants ou à des handicaps et que des enfants sont victimes de sévices sexuels commis dans la sphère familiale. Le Comité note avec préoccupation qu’il n’existe pas de dispositif législatif relatif à la violence familiale.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ adopter un dispositif législatif relatif à la violence familiale et de modifier la législation pertinente, notamment le Code pénal, pour incriminer la violence familiale. Dans le prolongement de ses observations finales précédentes (CRC/C/15/ Add .267, par. 52), le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De mettre en œuvre des programmes et des campagnes de sensibilisation et d ’ éducation à l ’ intention des parents, des enfants et des membres des communautés afin de prévenir la violence familiale, la maltrait ance et la négligence dont sont victimes les enfants et de lutter contre ces problèmes;

b) De créer une base de données nationale sur tous les cas de violence familiale à l ’ égard des enfants et de procéder à une évaluation complète de l ’ ampleur, des causes et de la nature de ces violences;

c) D ’ établir un mécanisme spécial perm ettant aux enfants de signaler tout sévice , mauvais traitement ou acte de violence familiale;

d) D ’ enquêter sur tous les cas de violence et de maltraitance à l ’ égard des enfants, y compris au sein de la famille, de punir les coupables et de rendre publiques les décisions prises dans de telles affaires, compte dûment tenu du droit de l ’ enfant à la protection de sa vie privée ;

e) De faire en sorte que tous les enfants victimes de maltraitance et de négligence bénéficient d ’ une assistance et aient accès à un hébergement leur offrant une protection et à un accompagnement psychosocial .

Pratiques néfastes

Le Comité note avec une vive préoccupation que malgré les efforts que l’État partie a accomplis pour lutter contre les mutilations génitales féminines, notamment en adoptant en 2007 un plan national de lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes, cette pratique reste répandue dans les gouvernorats côtiers. Il est préoccupé par les indications selon lesquelles les mutilations génitales féminines sont également courantes dans d’autres gouvernorats.

Le Comité exprime sa vive préoccupation devant le grand nombre de mariages d’enfants et l’idée très répandue dans les familles qu’il convient de marier les filles à un jeune âge pour préserver «l’honneur» de la famille. Il est également préoccupé par les renseignements indiquant que des filles sont données en mariage par leur famille dès l’âge de 8 ans, particulièrement dans les zones rurales, et que des filles ont été mariées de force, en 2012, à des membres du groupe armé Ansar al-Charia dans des zones touchées par le conflit. Il regrette le manque d’informations sur les causes et l’ampleur du phénomène des crimes dits «d’honneur».

Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De procéder sans tarder à l ’ adoption des projets de modification de la législation tendant à interdire expressément l es mutilation s génitale s féminines et à incriminer de tels actes, et à fixer à 18 ans l ’ âge minimum du mariage ;

b) De lutter contre l es mutilation s génitale s féminines , les mariages d ’ enfants et les mariages forcés, notamment en menant des programmes et des campagnes de sensibilisation afin de faire évoluer les mentalités, ainsi qu ’ en fournissant des services de consultation et d ’ éducation en matière de procréation pour prévenir les mutilations génitales féminines et les mariages d ’ enfants, qui nuisent à la santé et au bien-être des filles;

c) De donner , dans son prochain rapport périodique , des renseignements détaillés sur l ’ ampleur et les causes du phé nomène des crimes dits «d ’ honneur », ainsi que sur les mesures prises pour y faire face.

Droit de l’enfant d’être à l’abri de toute forme de violence

Rappelant les recommandations figurant dans l ’ étude des Nations Unies sur la violence à l ’ encontre des enfants qui a été réalisée en 2006 (A/61/299), le Comité recommande à l ’ État partie de faire une priorité de l ’ élimination de toutes les formes de violence à l ’ égard des enfants. Il lui recommande également de tenir compte de son Observation générale n o 13 (2011) sur le droit de l ’ enfant d ’ être protégé contre toutes les formes de violence et, en particulier:

a) D ’ élaborer une stratégie nationale globale pour prévenir et réprimer toutes les formes de violence à l ’ égard des enfants;

b) D ’ adopter un dispositif national de coordination pour lutter contre toutes les formes de violence à l ’ égard des enfants;

c) De prêter une attention particulière à la dimension sexiste de la violence;

d) De coopérer avec la Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence à l ’ encontre des enfants et les différents organismes des Nations Unies compétents .

E.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4) de la Convention)

Enfants privés de milieu familial

Le Comité prend note de l’information fournie par l’État partie au sujet de l’élaboration d’un régime juridique des familles de remplacement. Il exprime à nouveau sa préoccupation quant à la qualité de la prise en charge des enfants placés dans des familles d’accueil (kafalah) et à l’absence d’une véritable réglementation et de mécanismes de surveillance en la matière.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ achever l ’ élaboration du régime juridique des familles de remplacement en veillant à sa conformité avec l ’ article 25 de la Convention et de tenir compte des Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants. Il recommande également à l ’ État partie :

a) De prévoir des garanties suffisantes et de définir des critères précis, fondés sur les besoins et sur l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant, permettant de décider si un enfant doit être placé dans une structure de protection de remplacement ;

b) De fournir une assistance et des conseils aux familles les plus vulnérables afin de prévenir le placement d ’ enfants dans des structures de protection de remplacement et de promouvoir le maintien des enfants dans leur famille ;

c) De veiller à ce que les placements en famille d ’ accueil ou en institution fassent l ’ objet d ’ examens périodiques et de surveiller la qualité de la prise en charge des enfants concernés, notamment en instaurant des mécanismes accessibles permettant de signaler et de surveiller les cas de maltraitance et de prendre des mesures pour y remédier;

d) De faire en sorte que les centres de protection de remplacement et les services compétents de protection de l ’ enfance disposent de ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour favoriser, dans toute la mesure possible, la réadaptation et la réinsertion sociale des enfants qu ’ ils accueillent.

F.Handicap, santé et bien-être de base (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33 de la Convention)

Enfants handicapés

Le Comité prend acte des efforts que l’État partie a accomplis pour garantir les droits des enfants handicapés grâce à des services assurés par le Fonds pour la protection et la réadaptation des personnes handicapées et le Fonds social pour le développement. Il demeure cependant préoccupé par l’absence de données statistiques ventilées et fiables sur les enfants handicapés. Il est également préoccupé par le manque d’informations sur l’ampleur et la qualité des services fournis aux enfants handicapés, l’accès effectif de ces derniers aux soins de santé, les services d’insertion et de réadaptation, l’éducation et les mesures prises pour garantir l’accessibilité des bâtiments publics et des transports publics.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter le projet de stratégie nationale au profit des handicapés en prenant soin d ’ y définir une approche fondée sur les droits de l ’ enfant, compte tenu de l ’ article 23 de la Convention et de son Observation générale n o 9  (2006) sur les droits des enfants handicapés. Dans le prolongement de ses observations finales précédentes (CRC/C/15/ Add .267, par. 54), le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ évaluer la situation d ’ ensemble des enfants handicapés et l ’ ampleur et la qualité des services qui leur sont fournis par le Fonds pour la protection et la réadaptation des personnes handicapées et le Fonds social pour le développement;

b) De prévoir les ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour apporter un appui aux familles des enfants handicapés et garantir à ces derniers l ’ exercice de leurs droits;

c) De prendre les mesures nécessaires pour garantir l ’ accès des enfants handicapés aux bâtiments et transports publics .

Santé et services de santé

Le Comité note avec satisfaction que de 2003 à 2012, la mortalité des enfants de moins de 5 ans a été ramené de 102 à 77 morts pour 1 000 naissances. Le Comité prend acte des efforts que l’État partie a accomplis, notamment pour augmenter le nombre d’établissements sanitaires et développer les programmes de vaccination, mais constate avec préoccupation que l’accès des enfants aux soins et aux services de santé demeure limité et insuffisant. Il se félicite que le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel ait été transposé en droit interne (décret no 18/2002 du Conseil des ministres). Il s’inquiète toutefois de l’absence d’informations sur toute mesure visant à garantir l’application effective du Code. Le Comité exprime sa vive préoccupation devant:

a)Les taux élevés de retard de croissance (malnutrition chronique) et d’émaciation (malnutrition aiguë) chez les enfants, en particulier ceux de moins de 5 ans, ces taux occupant le deuxième rang au classement mondial, et l’absence de mécanisme efficace permettant d’évaluer les résultats des campagnes de sensibilisation aux risques associés à la malnutrition et des mesures prises pour promouvoir les bonnes pratiques en matière d’alimentation des nourrissons et des enfants en bas âge;

b)La prévalence chez les enfants de maladies transmissibles, notamment les cas de diarrhée résultant d’un accès insuffisant à l’eau et à l’assainissement, et le fait que la diarrhée est la deuxième cause de décès chez les enfants de moins de 5 ans;

c)La méconnaissance des avantages que présente l’allaitement maternel exclusif et la très faible proportion d’enfants allaités exclusivement au sein pendant au moins six mois (12 %);

d)L’absence d’hôpitaux adaptés aux besoins des enfants.

Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o  15  (2013) sur le droit de l ’ enfant de jouir du meilleur état de santé possible et recommande à l ’ État partie:

a) De veiller à ce que des ressources suffisantes soient allouées au secteur de la santé, en portant une attention particulière aux soins de santé maternelle et infantile, et d ’ élaborer et de mettre en œuvre des politiques et programmes complets pour améliorer l ’ état de santé des enfants en tenant compte tout particulièrement des taux élevés de malnutrition et de diarrhée infectieuse;

b) De faire aboutir rapidement la procédure suivie pour devenir membre à part entière de l ’ initiative «Renforcement de la nutrition », et de prendre des mesures efficaces pour s ’ attaquer au problème grave et répandu qu ’ est la sous-alimentation des enfants;

c) De garantir l ’ accès à l ’ eau potable et à des services d ’ assainissement en milieu rural et dans les zones les plus pauvres, et d ’ investir pour augmenter le volume des ressources en eau potable;

d) D ’ intensifier l ’ action visant à promouvoir l ’ allaitement maternel exclusif en appliquant et en faisant respecter le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel et de mettre en place un système de surveillance et de notification permettant de recenser les violations du Code. Cela suppose la création d ’ hôpitaux adaptés aux besoins des nourrissons, dans lesquels l ’ allaitement maternel sera promu dès la naissance de l ’ enfant;

e) De solliciter une assistance financière et technique, notamment auprès de l ’ UNICEF et de l ’ Organisation mondiale de la Santé (OMS).

Le Comité se déclare gravement préoccupé par l’incidence négative que le conflit de 2011-2012 a eue sur l’accès des enfants aux services et aux soins de santé, étant donné qu’il a contribué, notamment, à la destruction et à l’occupation d’établissements sanitaires par les parties au conflit, à la fermeture de ces établissements, à la suspension des programmes de vaccination et, par conséquent, à la baisse des taux de vaccination, et à des épidémies de maladies transmissibles telles que le choléra.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour renforcer les services de proximité, notamment en mettant en place à titre provisoire , dans les zones touchées par le conflit, un réseau de structures sanitaires mobiles destiné, en particulier, aux enfants et aux femmes enceintes, et de faire en sorte que les établissements sanitaires soient remis en état et qu ’ ils ne soient occupés à des fins militaires ni par les Forces armées, ni par des groupes armés non étatiques.

Santé des adolescents

Le Comité prend note des renseignements fournis lors du dialogue au sujet de l’adoption en 2009 d’un programme relatif à la santé des adolescents et des obstacles à sa pleine mise en œuvre. Il juge inquiétant que les adolescents n’aient qu’un accès limité aux services et aux soins de santé, notamment en matière de santé procréative (voir aussi les observations finales précédentes du Comité (CRC/C/15/Add.267, par. 57)). Il est préoccupé par l’absence de renseignements sur les mesures prises pour garantir l’accès des adolescents à l’éducation sexuelle et procréative, ainsi qu’à des informations et à des services confidentiels en matière de santé procréative.

Dans le prolongement de son Observatio n générale n o 4 (2003) sur la santé et le développement de l ’ adolescent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l ’ enfant adolescent, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour garantir l ’ accès universel des filles et des garçons à des informations et à des services confidentiels en matière de santé procréative. Il lui recommande en outre de solliciter une assistance technique, notamment auprès de l ’ OMS et de l ’ UNICEF.

Santé mentale

Le Comité s’inquiète de ce que la santé mentale et le bien-être des enfants sont mis en péril par la violence extrême à laquelle ils sont exposés dans les zones touchées par le conflit. Il s’inquiète également de l’insuffisance des renseignements communiqués par l’État partie au sujet de la manière dont les enfants vulnérables sont identifiés et de l’appui et de l’assistance qui leur sont apportés.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ adopter des mesures efficaces pour protéger la santé mentale des enfants des zones touchées par le conflit qui souffrent d ’ un traumatisme ou d ’ autres troubles psychiques. Ces mesures devraient notamment comprendre l ’ organisation d ’ initiatives locales visant à identifier ces enfants et la prestation de services accessibles à l ’ échelon local.

VIH/sida

Le Comité prend note du Programme national de prévention et de lutte contre le sida, dans le cadre duquel 14 centres de conseil et de dépistage volontaire ont été mis en place dans sept gouvernorats. Il constate cependant avec inquiétude que peu de renseignements ont été communiqués au sujet de la mise en œuvre du programme et de la fourniture limitée de traitements prophylactiques antirétroviraux en vue de prévenir la transmission du virus de la mère à l’enfant et d’apporter des soins aux enfants nés d’une mère séropositive. Il s’inquiète en outre du nombre élevé de cas qui ne sont pas déclarés en raison de la stigmatisation associée au VIH/sida dans la société en général.

Renvoyant à son Observation générale n o 3 (2003) sur le VIH/sida et les droits de l ’ enfant, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élargir la portée du Programme national de prévention et de lutte contre le sida afin de garantir l ’ accès universel aux services de dépistage et à des antirétroviraux gratuits. Ce faisant, l ’ État partie devrait prêter une attention particulière aux adolescentes enceintes vivant en zone rurale, aux femmes enceintes séropositives et aux enfants nés d ’ une mère séropositive. L ’ État partie devrait solliciter une assistance technique, notamment auprès du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) , du Fonds des Nations Unies pour la population et de l ’ UNICEF.

Consommation de drogues et de substances psychotropes

Le Comité demeure préoccupé par le grand nombre de personnes, dont une proportion significative d’enfants, qui mâchent du qat (voir CRC/C/15/Add.267, par. 69). Il s’inquiète des effets nocifs que la consommation de qat a sur la santé et l’alimentation des enfants, sachant qu’elle entraîne une diminution de l’appétit, ainsi que sur le développement de la personnalité et le bien-être psychique de l’enfant, étant donné qu’elle peut créer une dépendance.

Le Comité recommande de nouveau à l ’ État partie de considérer le qat comme une substance dangereuse (voir CRC/C/15/ Add .267, par. 70) et l ’ invite à prendre toutes les mesures nécessaires pour sensibiliser les responsables locaux, les parents, les enseignants et d ’ autres professionnels travaillant avec ou pour les enfants aux risques que présente sa consommation et pour en interdire l ’ accès aux enfants .

Pesticides

Le Comité est préoccupé par les indications selon lesquelles l’usage sans discernement de pesticides chimiques aurait des effets nocifs sur la santé des enfants dans l’État partie. Il est également préoccupé par le manque d’informations au sujet de ce problème et des mesures prises pour dispenser un traitement adéquat aux enfants touchés ainsi que pour éviter que des enfants ne soient exposés à ces substances.

Le Comité recommande à l ’ État partie de procéder à une évaluation tendant à déterminer dans quelle mesure des enfants ont été exposés à des pesticides chimiques et quelles conséquences cela a pu avoir sur leur santé et leur bien-être. Il recommande en outre à l ’ État partie de prendre les mesures voulues pour garantir que les enfants touchés aient accès à des soins et à des services de santé, et d ’ élaborer des campagnes de sensibilisation pour éviter que des enfants ne soient exposés à ces substances.

G.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29, 30 et 31 de la Convention)

Éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles

Le Comité prend acte des efforts déployés par l’État partie dans le domaine de l’éducation pendant la période à l’examen. Il demeure toutefois préoccupé par:

a)La qualité médiocre de l’enseignement;

b)L’insuffisance des infrastructures scolaires, notamment l’absence d’installations sanitaires dans la plupart des écoles;

c)Les indications selon lesquelles des frais de scolarité sont exigés par certaines écoles publiques, malgré les dispositions législatives établissant la gratuité de l’enseignement primaire;

d)La variation considérable du taux d’inscription des filles à l’école primaire d’un gouvernorat à l’autre et les écarts entre les taux d’inscription des filles et ceux des garçons;

e)La persistance des attitudes et des croyances traditionnelles selon lesquelles les filles ne devraient pas recevoir d’instruction, particulièrement dans les zones rurales, ainsi que des mariages d’enfants, et le fait que le nombre d’enseignantes demeure bas, autant de facteurs qui contribuent aux taux d’abandon scolaire élevés constatés chez les filles;

f)L’écart grandissant entre, d’une part, le taux d’inscription des enfants handicapés et des enfants dits «Muhamasheen» et, d’autre part, les taux globaux enregistrés à l’échelle nationale;

g)Le nombre restreint d’écoles dispensant un enseignement professionnel et technique.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ allouer davantage de ressources au secteur de l ’ éducation afin de construir e des établissements scolaires adaptés sur l ’ ensemble du territoire national et d ’ agrandir ou reconstruire les établissements existants, ainsi que de mettre en place un système éducatif ouvert à tous, y compris aux enfants handicapés et aux enfants marginalisés ou défavorisés;

b) D ’ accroître le financement de l ’ éducation des enfants vivant dans les zones les plus pauvres, les plus touchées par le conflit et les plus isolées, de façon à garantir un accès égal à l ’ éducation à tous les enfants, y compris les plus vulnérables et les plus défavorisés ;

c) De prendre les mesures nécessaires pour faire appliquer la législation nationale et garantir aux enfants une éducation de base gratuit e ;

d) De s ’ employer activement à promouvoir le droit des filles à l ’ éducation en menant des campagnes de mobilisation visant à faire évoluer les mentalités dans ce domaine, d ’ augmenter le nombre d ’ enseignantes dûment qualifiées et d ’ assurer leur sécurité;

e) De promouvoir la qualité de l ’ éducation en révisant les programmes scolaires, en utilisant des méthodes d ’ apprentissage interactives , en employant des enseignants qualifiés et en mettant en place des programmes d ’ enseignement professionnel et technique ;

f) De tenir compte de son Observation générale n o  1 (2001) sur les buts de l ’ éducation .

Le Comité se déclare vivement préoccupé par les attaques perpétrées contre des écoles et l’occupation de celles-ci par les Forces armées et des groupes armés non étatiques participant au conflit, qui ont eu pour effets la destruction de tout ou partie de certains établissements scolaires et leur fermeture depuis 2011. Il juge inquiétant que les autorités de l’État partie aient utilisé des écoles pour fournir un abri à des personnes déplacées, empêchant ainsi les enfants inscrits dans ces établissements de poursuivre leurs études.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ employer tous les moyens voulus pour protéger les écoles, les enseignants et les enfants contre les attaques, et de faire participer la population locale, en particulier les parents et les enfants, à l ’ élaboration de mesures visant à mieux protéger les écoles.

Repos, loisirs et activités récréatives, culturelles et artistiques

Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas dûment tenu compte du droit au repos et aux loisirs et de se livrer au jeu et à des activités récréatives propres à son âge que la Convention reconnaît à l’enfant. Il est préoccupé par les renseignements fournis par l’État partie selon lesquels le pays manquerait de terrains de jeu et de sport accessibles aux enfants.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour garantir aux enfants l ’ accès aux loisirs et à des activités culturelles, éducatives et récréatives en veillant à ce qu ’ ils aient du temps libre après l ’ école et pendant les vacances, conformément à l ’ article 31 de la Convention et à son Observation générale n o  17  (2013) sur le droit de l ’ enfant au repos et aux loisirs, de se livrer au jeu et à des activités récréatives et de participer à la vie culturelle et artistique. Il recommande en outre à l ’ État partie de prendre des mesures pour réserver des espaces publics aux loisirs et aux sports dans l ’ ensemble de son territoire.

H.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 b), c) et d), 38, 39 et 40 de la Convention)

Enfants demandeurs d’asile et enfants réfugiés

Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour remédier à la situation des réfugiés et des demandeurs d’asile, en particulier celle des Somaliens et des Éthiopiens. Il est néanmoins préoccupé par le fait que le statut juridique des réfugiés et des demandeurs d’asile est régi par des décrets et des dispositions de lois appliqués de manière incohérente et non systématique. Le Comité est en outre préoccupé par:

a)Le nombre élevé d’enfants non accompagnés et/ou d’enfants séparés de leur famille arrivés dans l’État partie dans le contexte de flux de migration mixtes et par l’absence de mécanisme permettant de prendre des mesures de protection spéciales, notamment la désignation de tuteurs;

b)Le placement en détention d’enfants réfugiés et d’enfants demandeurs d’asile, notamment des enfants non accompagnés, dans des lieux de détention pour adultes, au motif qu’ils sont entrés illégalement sur le territoire de l’État partie − situation qui expose les intéressés à un risque élevé d’être agressés sexuellement;

c)Les cas d’actes de violence sexuelle commis contre des enfants réfugiés, des enfants demandeurs d’asile et des enfants déplacés à l’intérieur du pays;

d)Les difficultés auxquelles se heurtent les enfants réfugiés et les enfants demandeurs d’asile nés hors mariage ou «sans père» en raison du décès de ce dernier ou de la séparation de leurs parents, lorsqu’ils cherchent à obtenir un certificat de naissance.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter un cadre juridique complet conforme aux normes internationales relatives aux réfugiés et aux demandeurs d ’ asile et de mettre sur pied un mécanisme de coopération efficace et solide avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, de façon à recenser les enfants ayant besoin d ’ une protection, en particulier les enfants réfugiés et les enfants demandeurs d ’ asile non accompagnés, et à leur fournir une aide. Le Comité exhorte également l ’ État partie à :

a) Mettre sur pied un mécanisme permettant de prendre des mesures de protection en faveur des enfants non accompagnés, y compris la désignation de tuteurs, afin , notamment , d ’ aider ces enfants à s ’ acquitter des démarches et procédures requises ;

b) Faire en sorte que les mineurs non accompagnés , les enfants réfugiés et les enfants demandeurs d ’ asile ne soient pas d étenus en raison de leur entrée ou de leur séjour illégal et jouissent effectivement du droit de demander l ’ asile et de demeurer dans l ’ État partie jusqu ’ à ce qu ’ il ait été définitivement statué sur leur demande ;

c) Faire en sorte que des soins médicaux ainsi qu ’ une prise en charge psychologique et psychosociale adaptés soient fournis aux enfants réfugiés, aux enfants demandeurs d ’ asile et aux enfants déplacés à l ’ intérieur du pays ayant subi des actes de violence sexuelle;

d) Faire en sorte que tous les enfants nés sur son territoire soient dûment enregistrés à la naissance, sans discrimination et quelle que soit la situation de leurs parents, et à ce qu ’ ils jouissent pleinement de leurs droits économiques, sociaux et culturels ;

e) Ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

Enfants déplacés à l’intérieur du pays

Le Comité est préoccupé par la situation des enfants des gouvernorats du sud et du nord de l’État partie qui ont été déplacés à l’intérieur du pays en raison des divers affrontements armés survenus ces dernières années. Le Comité prend note de l’adoption, en juin 2013, de la Politique nationale relative aux personnes déplacées à l’intérieur du pays, mais est préoccupé par l’absence de renseignements sur sa mise en œuvre et, en particulier, sur les mesures prises pour répondre aux besoins des enfants déplacés à l’intérieur du pays. Le Comité est particulièrement préoccupé par les informations faisant état des mauvaises conditions de vie de ces enfants.

Le Comité exhorte l ’ État partie à garantir l ’ application effective de la Politique nationale relative aux personnes déplacées à l ’ intérieur du pays (2013) et à faire en sorte que dans le cadre de cette politique, les droits et le bien-être des enfants déplacés à l ’ intérieur du pays soient garantis. Il lui recommande d ’ inclure des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Exploitation économique des enfants, notamment par le travail

Le Comité prend note de l’adoption du décret ministériel no 11 (2013) qui met à jour la liste des emplois dangereux pour les enfants. Il est toutefois gravement préoccupé par l’information communiquée par l’État partie selon laquelle, dans le pays, 11 % des enfants qui travaillent sont âgés de 5 à 11 ans et 28,5 % de 12 à 14 ans. Le Comité est également préoccupé par les incohérences de la législation de l’État partie et par les incohérences entre celle-ci et les normes internationales relatives à l’âge minimum d’admission à l’emploi, en particulier par le fait que l’âge minimum d’admission à l’emploi retenu dans la loi de 2002 relative aux droits de l’enfant (14 ans) est inférieur à l’âge auquel cesse l’enseignement de base, soit 15 ans en vertu de la loi de 1992 sur l’enseignement public. Le Comité est également préoccupé par le fait que la plupart des enfants travaillent dans les secteurs de l’agriculture et de la pêche ou comme travailleurs domestiques, et par le fait qu’ils sont contraints d’effectuer des tâches dangereuses. Il est en outre préoccupé par l’absence de mesures de protection des enfants qui travaillent contre les abus, notamment sexuels.

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ établir dans la loi que l ’ âge minimum d ’ admission à l ’ emploi est de 15 ans, conformément à la Convention et à la Convention n o 138 (1973) de l ’ Organisation internationale du Travail (OIT) concernant l ’ âge minimum d ’ admission à l ’ emploi;

b) De modifier la législation pertinente pour faire en sorte que les enfants de moins de 18 ans n ’ occupent pas d ’ emplois dangereux ou nocifs, conformément à la Convention n o 182 (2000) de l ’ OIT concernant l ’ interdiction des pires formes de travail des enfants et l ’ action immédiate en vue de leur élimination ;

c) De prendre des mesures efficaces pour lutter contre le travail des enfants et de prendre des mesures urgentes pour soustraire les enfants aux travaux dangereux dans les secteurs de l ’ agriculture et de la pêche et au travail domestique , et de solliciter l ’ appui technique du Programme international pour l ’ abolition du travail des enfants du Bureau international du Travail ;

d) D ’ étudier la possibilité de ratifier la Convention n o 189 (2011) de l ’ OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques.

Vente, traite et enlèvement

Le Comité accueille avec satisfaction la création, début 2013, de la Commission nationale de lutte contre la traite des êtres humains, chargée d’élaborer un texte de loi sur la traite. Il est néanmoins vivement préoccupé par le fait que l’État partie est un pays d’origine de la traite des enfants vers les pays voisins, en particulier l’Arabie saoudite. Il est également préoccupé par les cas de vente d’enfants à des fins de transfert d’organes à titre onéreux et par la traite de filles à des fins d’exploitation sexuelle, sous couvert de «mariages touristiques» ou de «mariages temporaires», et à des fins de prostitution dans les hôtels et clubs de l’État partie. Le Comité est préoccupé par l’absence de mesures adéquates visant à faire face à la traite et à l’exploitation sexuelle des enfants, et à les prévenir.

Le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) Accélérer le processus d ’ élaboration et d ’ adoption de la loi sur la traite des êtres humains;

b) Modifier la législation pertinente pour interdire et incriminer l ’ exploit ation sexuelle, notamment les « mariages touris tiques» ou «mariages temporaires », ainsi que l ’ offre d ’ enfants à des fins de transfert d ’ organes et la traite d ’ enfants ; à diligenter des enquêtes efficaces contre les responsables et à les poursuivre et les punir;

c) Adopter des mesures spécifiques pour protéger les enfants victimes et à leur offrir des services de réinsertion sociale et de rétablissement physique et psychologique complets;

d) Organiser des activités de sensibilisation visant à informer tant les parents que les enfants des dangers de la traite − nationale comme internationale ;

e) Créer une permanence téléphonique gratuite à trois chiffres accessible à tous les enfants à l ’ échelon national et à faire le nécessaire pour que les enfants sachent comment y avoir accès, de façon à prévenir la traite d ’ enfants, la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et à réagir efficacement lorsque de tels cas sont signalés ;

f) Renforcer sa coopération avec les pays voisins tels que l ’ Arabie saoudite ainsi que ses efforts de coopération avec les pays de la Corne de l ’ Afrique pour lutter contre la traite des enfants;

g) Ratifier le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants .

Suite donnée aux précédentes observations finales et recommandations du Comité sur le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

Le Comité regrette l’absence d’informations sur l’état de la mise en œuvre de ses observations finales de 2009 concernant le rapport initial de l’État partie au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/YEM/CO/1); il regrette en particulier que les infractions prévues par le Protocole, telles que l’adoption illégale, le travail forcé, l’exploitation sexuelle et la pornographie mettant en scène des enfants, ne soient pas entièrement ou expressément reprises dans la législation nationale.

Le Comité exhorte l ’ État partie à mettre en œuvre les recommandations qui figurent dans ses observations finales concernant le rapport initial de l ’ État partie au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, et à faire figurer des informations complètes à cet égard dans son prochain rapport périodique.

Administration de la justice pour mineurs

Le Comité prend note des efforts consentis par l’État partie pour renforcer le système de justice pour mineurs avec, notamment, la mise en place d’un système d’information sur la justice pour mineurs dans neuf gouvernorats et l’inclusion d’une formation sur les droits de l’enfant dans les programmes de l’École de police et de l’Institut supérieur de la magistrature. Le Comité réaffirme sa vive préoccupation, déjà exprimée dans ses précédentes observations finales (CRC/C/15/CO/Add.267, par. 75), quant à l’âge minimum de la responsabilité pénale qui est fixé à 7 ans par la loi de 1992 de l’État partie sur la protection des mineurs. Il est également préoccupé par:

a)La situation des enfants de 15 à 18 ans en conflit avec la loi, qui sont traités comme des adultes par le système de justice et détenus dans des prisons pour adultes en application de la loi yéménite sur la protection des mineurs qui dispose que seuls les enfants âgés de 15 ans et moins relèvent du système de justice pour mineurs;

b)Le fait que des enfants en conflit avec la loi qui ont pourtant purgé leur peine sont détenus arbitrairement en raison de l’incapacité de leurs parents ou de leurs représentants légaux de payer les amendes et/ou de verser les dommages et intérêts requis;

c)Les conditions difficiles dans lesquelles les enfants sont détenus dans les postes de police ou les prisons, l’absence de solutions de substitution adéquates à la détention provisoire et aux autres formes de détention, ainsi que le non-respect des garanties d’un procès équitable;

d)Le caractère insuffisant des ressources humaines et financières dont dispose le système de justice pour mineurs.

Le Comité exhorte l ’ État partie à rendre son système de justice pour mineurs pleinement conforme à la Convention, en particulier ses articles 37, 39 et 40, ainsi qu ’ à l ’ Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l ’ administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), aux Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), aux Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (Règles de La Havane), aux Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale et à l ’ Observation générale n o 10 (2007) du Comité sur les droits de l ’ enfant dans le système de justice pour mineurs. Le Comité exhorte en particulier l ’ État partie à :

a) Relever l ’ âge minimum de la responsabilité pénale pour le porter à un seuil acceptable sur le plan international;

b) Modifier la législation pertinente, y compris la loi sur la protection des mineurs, pour faire en sorte que les enfants en conflit avec la loi âgés de 15 à 18 ans soient traités comme des enfants et relèvent du système de justice pour mineurs;

c) Accroître le nombre de tribunaux pour mineurs afin de couvrir les 21 gouvernorats et leur allouer les ressources humaines, techniques et financières voulues ; nomme r des juges pour mineurs et faire en sorte que ces juges spécialisés reçoivent un enseignement et une formation adaptés;

d) Faire en sorte qu ’ une aide juridictionnelle soit fournie , par des juristes qualifié s et indépendant s, aux enfants en conflit avec la loi dès le début de la procédure et tout au long de celle-ci, et assurer le plein respect des garanties d ’ un procès équitable;

e) Faire en sorte que tous les enfants (garçons et filles) âgés de 15 à 18 ans soient immédiatement retirés des prisons pour adultes et transférés dans des centres de protection pour mineurs;

f) Élaborer et appliquer des dispositions légales et des procédures strictes pour faire en sorte que les enfants de 15 à 18 ans ne soient pas condamnés à mort et que les affaires les concernant soient traitées par le système de justice pour mineurs;

g) Prendre les mesures appropriées pour faire en sorte que les enfants en conflit avec la loi ne soient pas arbitrairement détenus à cause de leur incapacité de payer les amendes ou les dommages et intérêts liés à l ’ infraction qu ’ ils ont commise;

h) Promouvoir l ’ utilisation de mesures de substitution à la détention, comme la déjudiciarisation, le sursis probatoire, des services de conseil ou des services comm unautaires, le cas échéant, et faire en sorte que la détention soit une mesure de dernier recours imposée pour la période la plus courte possible et réexaminée à intervalles réguliers en vue d ’ être levée;

i) Faire en sorte, lorsque le placement en détention est inévitable, que les enfants ne soient pas détenus avec des adultes et que leurs conditions de détention soient conformes aux normes internationales, notamment en ce qui concerne l ’ accès aux services d ’ éducation et de santé.

À cette fin, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ utiliser, s ’ il y a lieu, les outils d ’ assistance technique mis au point par le Groupe interinstitutions sur la justice pour mineurs et ses membres, notamment l ’ Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, l ’ UNICEF , le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme et l es organisations non gouvernementales, et de solliciter l ’ assistance technique des membres du Groupe dans le domaine de la justice pour mineurs .

I.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

Le Comité recommande à l ’ État partie, de façon à renforcer encore la protection des droits de l ’ enfant, de ratifier les principaux instruments relatifs aux droits de l ’ homme auxquels il n ’ est pas encore partie, à savoir le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant établissant une procédure de présentation de communications, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées .

J.Suivi et diffusion

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour donner pleinement effet aux présentes recommandations, notamment en les communiquant au C hef de l ’ État, au Premier Ministre, aux ministères compétents, au Parlement, à la Cour suprême et aux autorités locales et tribales pour examen et suite à donner .

Le Comité recommande également que les deuxième et troisième rapports périodiques soumis en un seul document et les réponses écrites de l ’ État partie ainsi que les présentes observations finales du Comité soient largement diffusés dans les langues du pays, notamment (mais pas exclusivement) par Internet, auprès du public en général, des organisations de la société civile, des médias, des mouvements de jeunesse, des associations professionnelles et des enfants, afin de susciter un débat et de faire connaître la Convention et ses Protocoles facultatifs, ainsi que leur mise en œuvre et leur suivi .

K.Prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre ses cinquième et sixième rapports périodiques en un seul document pour le 30 mai 20 1 8 et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Il appelle son attention sur les directives harmonisées pour l ’ établissement des rapports sur l ’ application de chaque instrument (CRC/C/58/ Rev .2 et Corr.1) adoptées le 1 er  octobre  2010 et lui rappelle que ses prochains rapports devront s ’ y conformer et ne pas dépasser 60 pages. Il prie instamment l ’ État partie de soumettre son rapport en tenant compte de ces directives. Si l ’ État partie soumet un rapport dont le nombre de pages excède la limite fixée, il sera invité à le remanier et à le soumettre à nouveau conformément aux directives susmentionnées. Le Comité rappelle à l ’ État partie que s ’ il n ’ est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d ’ examen par le Comité ne pourra pas être garantie .

Le Comité invite en outre l ’ État partie à soumettre un document de base actualisé conforme aux prescriptions applicables au document de base figurant dans les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports, qui ont été approuvées en juin 2006 par la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme (HRI/GEN/2/ Rev .6, chap. I).