NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/HRV/CO/3/Add.19 août 2006

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Commentaires du Gouvernement croate *, ** au sujet des conclusions et recommandations du Comité contre la torture

[12 juillet 2006]

1.Le Ministère des affaires étrangères et de l’intégration européenne de la République de Croatie présente ses compliments au Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et, faisant suite à la question de Mme Felice D. Gaer, Rapporteuse du Comité contre la torture chargée du suivi des observations finales du Comité, en date du 17 février 2006, a l’honneur de communiquer les informations complémentaires suivantes en réponse aux préoccupations formulées par le Comité aux alinéas a, b, f, n et p du paragraphe 9 de ses conclusions et recommandations.

9 a)

2.Dans le cas d’une infraction visée à l’article 176 du Code pénal (Torture et autre traitement cruel, inhumain et dégradant), le ministère public, agissant dans le cadre de ses compétences conformément aux dispositions de la loi sur le ministère public et de la loi sur la procédure pénale, prend des mesures spécifiques aux fins de l’identification des faits, de l’enquête, des poursuites et de la sanction.

3.En l’occurrence, le ministère public engage d’office des poursuites pénales et les supervise. Le procureur général mène lui‑même l’enquête et réunit tous les éléments d’information, ce qui a pour avantage de ne pas retarder la procédure d’instruction en permettant d’éviter les correspondances inutiles avec les autres autorités de l’État chargées de fournir les éléments d’information requis et de procéder à l’instruction préparatoire.

4.Toutefois, lorsque l’enquête ne lui a pas permis de réunir les éléments et preuves nécessaires pour déterminer s’il existe une raison suffisante d’engager immédiatement des poursuites pénales, le procureur général charge les policiers de mener l’enquête et de réunir les éléments d’information sur la base desquels il décidera soit d’abandonner les charges soit d’engager des poursuites.

5.Selon les dispositions de l’article 174, paragraphe 2, de la loi sur la procédure pénale, le ministère public est habilité à exiger des forces de police qu’elles prennent les mesures et actions qui s’imposent et peut en spécifier la nature. Dans ce cas, la police est tenue d’obtempérer et de l’informer, dans les 30 jours, de la suite donnée. Cette procédure permet au procureur général d’exercer un contrôle direct sur les enquêtes de police.

6.Une coopération harmonieuse a été mise en place entre le ministère public et la police, qui garantit l’efficacité de l’action du ministère public et l’impartialité, l’exhaustivité et la rapidité des enquêtes sur toutes les allégations de torture et autre traitement cruel, inhumain ou dégradant. Le rôle de la police dans les enquêtes criminelles est d’une importance capitale et absolue, car c’est sur la base des faits et des preuves établis par elle que le ministère public pourra engager des poursuites.

7.Lorsque l’infraction en question fait l’objet d’une enquête menée en coopération avec les forces de police, qui est associée à la phase de collecte de preuves, les autorités compétentes veillent tout particulièrement à ce qu’aucune personne, victime ou auteur présumé, ne fasse l’objet d’une discrimination fondée sur l’origine ethnique ou d’autres considérations au cours de la procédure pénale et à ce que les victimes reçoivent une protection et une indemnisation proportionnées et adéquates. Vu que l’infraction figure dans le Code pénal croate parmi les actes délictueux sanctionnés au motif qu’ils sont contraires aux principes du droit international, le ministère public veille tout particulièrement à ce que la procédure d’enquête et de jugement soit aussi rapide et efficace que possible.

8.Les parquets ont engagé des poursuites pénales en 2004 et en 2005 mais, dans les deux cas, les charges ont été abandonnées car les preuves ou éléments recueillis par les fonctionnaires de police ne justifiaient pas l’ouverture d’une procédure pénale. Les archives du ministère public ne font état d’aucun procès, d’aucune accusation, d’aucune condamnation, d’aucune relaxe ni d’aucun acquittement en relation avec l’infraction pénale visée à l’article 176 du Code pénal.

9 b)

9.La République de Croatie coopère entièrement et sans réserve avec toutes les instances judiciaires internationales, dont, par conséquent, le Tribunal pénal international pour l’ex‑Yougoslavie. Le service du Ministère de la justice compétent en la matière coopère étroitement avec le bureau de liaison de Zagreb et est en contact étroit avec les prévenus croates et leurs avocats. La Croatie transmet les documents voulus aux parties défenderesses et au procureur, autorise la consultation de ses archives, s’entretient avec les témoins cités à comparaître, délivre des mandats d’arrêt et/ou livre les personnes recherchées à la justice, conformément au Statut et au Règlement de procédure et de preuve du Tribunal.

10.La République de Croatie a autorisé la consultation de toutes ses archives et l’audition de hauts fonctionnaires dans toutes les branches de l’administration gouvernementale.

11.La communauté internationale a reconnu que la Croatie a pleinement et de bonne foi coopéré avec le TPIY, comme l’attestent les progrès enregistrés dans le processus d’adhésion de la Croatie à l’Union européenne.

9 f)

12.S’agissant de la recommandation du Comité tendant à l’adoption de toutes les mesures qui s’imposent pour améliorer les conditions matérielles dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile et immigrants, elle a été entièrement approuvée et appliquée.

13.Suite à l’adoption de la loi relative à l’asile, entrée en vigueur le 1er juillet 2004, un règlement sur l’hébergement des demandeurs d’asile et des immigrants bénéficiant d’une protection provisoire a été adopté (Journal officiel, no 108/04), qui est entré en vigueur le 12 août 2004.

14.Un service d’accueil des demandeurs d’asile a été créé au sein du Ministère de l’intérieur, qui gère actuellement deux centres, l’un à Jezevo et l’autre à Sasina Grede, près de Sisak. La République de Croatie ne dispose pas actuellement de site permanent d’hébergement des demandeurs d’asile. Des locaux, propriété du Ministère de l’intérieur, sis à Kutina sont en cours d’aménagement, ce qui devrait permettre d’augmenter sensiblement la capacité d’hébergement des demandeurs d’asile, d’améliorer les conditions de mise en œuvre de plusieurs programmes sociaux et de répondre ainsi aux normes européennes et internationales en matière d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile. Le centre de Kutina devrait être ouvert en juin 2006.

15.L’accueil, l’hébergement et la prise en charge des demandeurs d’asile sont actuellement régis par la procédure d’accueil et d’hébergement provisoires. Les demandeurs d’asile sont hébergés dans le centre d’accueil pour étrangers de Jezevo où sont habituellement conduits les migrants en situation irrégulière qui ne peuvent pas être expulsés, de même que les étrangers dont l’identité n’a pas été établie. Ce centre est une structure fermée dans laquelle la liberté de circuler est limitée. Tous les ressortissants étrangers qui y sont hébergés sont nourris et reçoivent des soins médicaux et une aide sociale à titre gratuit. Il convient de noter qu’une partie des locaux du centre de Jezevo est affectée à l’accueil des demandeurs d’asile, qui sont séparés des migrants en situation irrégulière. Pour l’heure, le centre peut héberger 24 personnes mais sa capacité pourrait être portée à 10 ou 15 places supplémentaires. Les demandeurs d’asile sont hébergés à Jezevo pendant deux jours, au cours desquels sont effectuées toutes les formalités relatives à leur accueil (prise d’empreintes et de photographies, établissement des demandes d’asile, établissement et délivrance de cartes, enregistrement des données relatives à la procédure d’accueil dans les fichiers officiels et premiers examens médicaux).

16.Les demandeurs d’asile sont informés des droits et obligations qui sont les leurs pendant la durée de la procédure et reçoivent toutes les informations utiles sur les organisations non gouvernementales spécialisées dans la prise en charge des demandeurs d’asile ou la fourniture de conseils juridiques. Ces informations sont communiquées directement dans la langue des intéressés et, à défaut, par l’intermédiaire d’un interprète.

17.À son arrivée au centre, chaque demandeur d’asile reçoit une trousse contenant des produits d’hygiène de base et, si nécessaire, des vêtements adaptés. Les demandeurs d’asile originaires de pays à haut risque infectieux sont conduits à la clinique des maladies infectieuses docteur Fran Mihaljevic pour y subir des examens médicaux supplémentaires à la recherche de symptômes du paludisme et du choléra, conformément à la directive du Ministère de la santé et des affaires sociales relative à l’examen du statut sur le plan de l’hygiène et de la santé des demandeurs d’asile, des réfugiés et des étrangers bénéficiant d’une protection provisoire, émise dans le cadre du règlement sur l’hébergement des demandeurs d’asile. La directive est entrée en vigueur le 12 août 2004.

18.À l’issue de la procédure d’accueil, les demandeurs d’asile sont logés dans le centre de Sasina Greda, près de Sisak. La capacité actuelle de ce centre est de 50 personnes, mais il devrait être possible d’y accueillir 10 personnes supplémentaires tout en restant dans les limites des normes obligatoires en matière d’hébergement. Ce centre est constitué de 20 unités résidentielles et pourvu de quatre salles de bains, d’une cuisine, d’un salon de télévision, d’une salle de sport, d’un espace de jeux pour enfants, d’un atelier, d’une petite bibliothèque, d’un bureau pour le personnel du centre et d’une salle réservée aux entretiens et aux activités des organisations non gouvernementales.

19.Lorsque les conditions le permettent, les demandeurs d’asile sont logés avec les membres de leur famille, et les femmes non accompagnées sont séparées des hommes. Les mineurs non accompagnés sont séparés des adultes mais peuvent également être placés auprès de parents plus âgés, d’amis, de proches ou de familles d’accueil. Il convient de souligner que l’article 12 de la loi sur l’asile prévoit que les proches parents d’un demandeur d’asile arrivés en Croatie en même temps que celui‑ci ont le droit de demeurer en République de Croatie jusqu’à la fin de la procédure de demande d’asile. Le principe de réunification familiale a été dûment pris en compte dans tous les cas répertoriés à ce jour de membres d’une même famille ayant demandé l’asile. Une attention particulière est également accordée aux demandeurs d’asile appartenant à des groupes vulnérables tels que les personnes qui sont dans l’incapacité d’occuper un emploi, les mineurs, les mineurs non accompagnés, les personnes âgées et fragiles, les personnes gravement malades, les personnes handicapées, les femmes enceintes, les mères seules et les victimes de viol ou d’autres formes de violence.

20.Les demandeurs d’asile accueillis à Sasina Greda peuvent circuler librement, à moins qu’ils ne soient visés par une mesure contraire. Le personnel du Centre d’accueil explique aux demandeurs d’asile les conditions élémentaires requises en matière d’asile. Les demandeurs d’asile ont le droit de demeurer en République de Croatie, de même que le droit à un niveau de vie et à un logement suffisants, à une éducation de base et aux soins de santé. Ils sont libres de pratiquer la religion de leur choix et bénéficient d’une aide juridique, humanitaire et financière jusqu’à la fin de la procédure (et, en cas d’introduction d’un recours, jusqu’à la fin de la procédure de recours).

21.Le Ministère de l’intérieur a conclu un accord de coopération avec la Croix‑Rouge croate qui permet au personnel de celle‑ci de travailler dans le centre d’accueil aux côtés des fonctionnaires du Ministère de l’intérieur, et de mettre en œuvre des programmes sociaux et de distribuer des vivres. Les soins médicaux sont prodigués au dispensaire le plus proche et, au besoin, les demandeurs d’asile peuvent consulter des spécialistes dans les hôpitaux de Sisak et Zagreb.

22.Les fonctionnaires chargés de l’accueil, de l’hébergement et de la prise en charge des demandeurs d’asile ont suivi une formation adaptée (dispensée au titre du Projet 2001 sur la réforme de l’asile dans le cadre du Programme CARDS‑2001, et du Projet régional module concernant l’asile dans le cadre du Programme CARDS).

23.Il convient de souligner que les normes nationales relatives à l’accueil des demandeurs d’asile sont pour l’essentiel conformes à la Directive du Conseil de l’Europe 2003/9/CE, en date du 27 janvier 2003, établissant les normes minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile. La Croatie procède actuellement à la révision de la loi sur l’asile pour aligner les dispositions relatives à l’accueil et à l’hébergement des demandeurs d’asile sur les normes juridiques européennes, et, au besoin, les améliorer.

9 n)

24.En 2003, le Ministère de l’intérieur et l’École de police ont publié un manuel qui a été transmis à tous les commissariats de police. Ce manuel explique de façon simple la conduite à suivre par les agents de police dans l’exercice des fonctions qui leur sont conférées en vertu de la loi sur la police et des règlements de police.

25.En 2004, le Ministère de l’intérieur et l’École de police ont élaboré et publié, en coopération avec l’International Criminal Investigations Technical Assistance Programme (ICITAP), un manuel énonçant les principes et procédures qui fondent le professionnalisme, la légalité et l’éthique de la police. Ce manuel est un recueil d’instructions générales exposant les règles de procédure et de conduite à suivre dans des situations spécifiques, ainsi que les principes et procédures que les agents de police doivent observer dans la conduite des enquêtes criminelles. Il a été distribué à tous les policiers.

26.En outre, la Direction générale de la police a transmis une circulaire à tous les commissariats de police concernant le traitement des personnes arrêtées et mises en détention. En 2005, elle a publié une circulaire sur les conditions de détention des personnes soupçonnées d’avoir commis un crime ou un délit.

9 p)

27.De 2003 à 2005, quatre infractions visées à l’article 126 du Code pénal (extorsion de déclarations sous la contrainte) mettant en cause trois policiers et un responsable commercial ont été identifiées et signalées (1 acte délictueux en 2003, 2 en 2004, et 1 en 2005). Les trois policiers ont fait l’objet d’une procédure disciplinaire et l’un d’entre eux a été limogé.

28.En ce qui concerne l’infraction visée à l’article 127 du Code pénal (mauvais traitements dans l’exercice de fonctions ou de mandats publics), 30 actes délictueux de cette nature ont été identifiés et signalés au cours de la période considérée (16 en 2003, 7 en 2004 et 2005). Dans 14 cas, les auteurs étaient des policiers. Dans les autres, des enseignants du secondaire et primaire, des instituteurs de maternelle et un écolier ayant commis des violences à l’encontre d’un autre écolier. Ayant été établi que les policiers avaient commis une infraction pénale dans l’exercice de leurs attributions, des procédures disciplinaires ont été engagées contre 19 d’entre eux. En ce qui concerne les autres cas, cinq concernaient des instituteurs de maternelle qui avaient enfermé, à plusieurs reprises, des enfants dans les toilettes de l’établissement pour les punir, et deux un enseignant du primaire qui avait usé de violence contre des personnes employées par l’établissement scolaire qu’il était chargé de diriger.

29.Au cours de la période considérée, aucune infraction pénale visée à l’article 176 du Code pénal (torture et autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant) n’a été identifiée ni signalée.

-----