Nations Unies

CRPD/C/LVA/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

10 octobre 2017

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initialde la Lettonie *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport initial de la Lettonie (CRPD/C/LVA/1) à ses 344e et 345e séances (voir CRPD/C/SR.344 et 345), les 21 et 22 août 2017. Il a adopté les présentes observations finales à sa 354e séance, le 28 août 2017.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de la Lettonie, qui a été établi conformément aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports, et remercie l’État partie des réponses écrites (CRPD/C/LVA/Q/1/Add.1) apportées à la liste de points établie par le Comité.

3.Le Comité se félicite du dialogue fructueux qu’il a eu avec la délégation de l’État partie dans le cadre de l’examen du rapport et remercie ce dernier d’avoir dépêché une délégation de haut niveau, notamment composée du Secrétaire d’État et Ministre des affaires sociales et de représentants des autorités chargées de mettre en œuvre la Convention.

II.Aspects positifs

4.Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour faciliter la mise en œuvre des droits des personnes handicapées qui sont énoncés dans la Convention. Le Comité félicite l’État partie d’avoir adopté :

a)Un plan d’action pour la mise en œuvre de la Convention (2015-2017) ;

b)Une loi relative à la construction, le 9 juillet 2013, dont les dispositions garantissent l’accessibilité à l’environnement physique et facilitent la mise en œuvre du principe de conception universelle, qui a permis de rendre des zones historiques et des installations balnéaires accessibles aux personnes handicapées ;

c) Le paragraphe 3 de l’article 3 de la loi relative à la langue officielle, qui prévoit l’utilisation de la langue des signes lettone ;

d)Le document-cadre pour le développement des services sociaux pour la période 2014-2020 et le plan d’action en faveur de la désinstitutionalisation (2015-2020).

5.Le Comité accueille avec satisfaction les projets pilotes visant à mettre en œuvre desmécanismes de prise de décisions respectueux de l’autonomie, de la volonté et des préférences des personnes concernées.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1-4)

6.Le Comité constate avec préoccupation que :

a)L’évaluation du handicap procède selon une approche axée sur les déficiences, qui s’appuie sur le modèle médical et met l’accent sur l’incapacité de travail ;

b)Les enfants ayant un handicap intellectuel ou auditif qui n’est pas jugé suffisamment grave par la Commission médicale chargée du handicap ne peuvent pas bénéficier du statut de personne handicapée et, de ce fait, ne peuvent pas prétendre aux aides de l’État, notamment aux aides financières ;

c)Le Conseil national sur les questions de handicap n’a pas le pouvoir de décision nécessaire pour mettre en œuvre des politiques sur les droits des personnes handicapées et ne parvient pas à assurer la participation effective de ses organisations représentatives ;

d)Les principes d’aménagement raisonnable et de conception universelle ne sont pas expressément ou complétement définis dans la législation et ni intégrés dans des règlements municipaux ou appliqués par le biais de mécanismes de surveillance ;

e)Les organisations qui représentent les personnes handicapées ne disposent pas des moyens suffisants pour appuyer la réalisation des droits des personnes handicapées.

7. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures suivantes :

a) Veiller à ce que la détermination du handicap procède selon une approche fondée sur les droits de l ’ homme, comprenne une évaluation des besoins, de la volonté et des préférences de la personne concernée, une attention particulière devant être accordée aux enfants ayant un handicap intellectuel et auditif, et soit axée sur l ’ élimination des obstacles et la promotion de la participation pleine et effective des personnes handicapées à la société  ;

b) Renforcer la capacité de décision du Conseil national sur les questions de handicap aux fins de l ’ élaboration , de la coordination et de l ’ évaluation des politiques relatives au handicap dans tous les secteurs et à tous les niveaux de l ’ administration publique aux échelons national et local, grâce à une coopération étroite avec les organisations qui représe ntent les personnes handicapées ;

c) Évaluer l ’ efficacité du plan d ’ action pour la mise en œuvre de la Convention (2015-2017) à son expiration et élaborer un nouveau plan d ’ action assorti de repères et d ’ indicateurs clairs, en consultation étroite avec les organisations qui représe ntent les personnes handicapées ;

d) Intégrer pleinement les notions d ’ aménagement raisonnable et de conception universelle dans toutes les lois , les politiques et les règlements nationaux et municipaux pertinents, et en assurer l ’ application effective en instaurant des mesures de surveillance ;

e) Allouer aux activités, projets et programmes qui sont conçus et mis en œuvre par les organisations représentant les personnes handicapées les ressources financières nécessaires pour qu ’ ils puissent favoriser le respect des droits de ces personnes.

B.Droits particuliers (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

8.Le Comité constate avec préoccupation que la loi sur le handicap a une portée et un objet limités, n’interdit pas expressément la discrimination fondée sur le handicap, quel qu’il soit, et ne considère pas le refus d’opérer des aménagements raisonnables comme une forme de discrimination. Il regrette l’absence de mécanismes efficaces d’examen des plaintes pour discrimination fondée sur le handicap et l’absence de données ventilées sur les cas de discrimination fondée sur le handicap et leur règlement.

9. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures suivantes :

a) Revoir sa législation pour y incorporer une définition de la discrimination fondée sur le handicap qui couvre expressément toutes les formes de discrimination fondée sur le handicap, y compris le handicap intellectuel ou psychosocial, dans tous les secteurs et dans tous les domaines de la vie, et qui reconnaisse le refus d ’ aménagement raisonnable et les formes de discrimination multiples et croisées ;

b) Mettre en place un mécanisme efficace chargé de surveiller tous les aspects du respect de la législation contre la discrimination, notamment en proposant aux personnes handicapées des méthodes accessibles leur permettant d ’ obtenir réparation et en veillant à ce que les auteurs de discrimination soient sanctionnés ;

c) Accroître l ’ offre d ’ activités de formation élaborées en consultation avec les organisations de personnes handicapées et avec leur participation, concernant la non-discrimination à l ’ égard des personnes handicapées et l ’ obligation d ’ apporter des aménagements raisonnables à l ’ intention des acteurs publics et privés et, en particulier, des juristes, des magistrats, des agents de la force publique, des fonctionnaires, des employeurs, de l ’ inspection du travail, des enseignants, des professionnels de la santé, ainsi que des personnes handicapées elles-mêmes ;

d) Recueillir et analyser des données ventilées sur les affaires de discrimination fondée sur le handicap et publier des informations sur leur règlement, en donnant des précisions sur les sanctions infligées aux auteurs et les voies de recours dont disposent les victimes ;

e) S ’ inspirer de l ’ article 5 de la Convention pour réaliser les cibles 10.2 et 10.3 des objectifs de développement durable.

Femmes handicapées (art. 6)

10Le Comité est préoccupé par :

a)La faible participation des femmes handicapées à la vie politique et publique et l’absence de dispositions concernant ces femmes dans les lois, les programmes et les politiques relatifs à la promotion de la femme ;

b)L’absence de données et de travaux de recherche sur les femmes et les filles handicapées, notamment la reconnaissance insuffisante de la discrimination multiple et croisée que subissent les femmes et les filles handicapées dans l’État partie.

11. À la lumière de son observation générale n o  3 (2016) sur les femmes et les filles handicapées et compte tenu des cibles 5.1, 5.2 et 5.5 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ intégrer les questions ayant trait aux femmes et aux filles handicapées dans les dispositions législatives et les politiques antidiscrimination relatives aux femmes et aux filles, notamment celles visant à combattre la violence sexuelle et sexiste  ;

b) De promouvoir la représentation des femmes handicapées et leur participation à la vie politique et publique ;

c) De collecter systématiquement des données sur les femmes et les filles handicapées et de définir des indicateurs qui permettent d ’ évaluer les effets des mesures adoptées pour lutter contre la discrimination et promouvoir leur participation et leur insertion dans la société ;

d) De ratifier la Convention du Conseil de l ’ Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l ’ égard des femmes et la violence domestique.

Enfants handicapés (art. 7)

12.Le Comité est préoccupé par :

a)La poursuite du placement en institution d’enfants handicapés en vue d’une prise en charge à long terme en raison du caractère limité des services familiaux et communautaires offerts aux enfants, quels que soient leur âge et leur handicap, et à leur famille ;

b)Les difficultés d’accès à un enseignement ordinaire, inclusif et de qualité ;

c)Le niveau élevé de la violence familiale qui serait exercée contre les enfants handicapés ;

d)La vision caritative et « médicale » des enfants handicapés qui est perpétuée par les campagnes télévisées de collecte de fonds.

13. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures suivantes :

a) Renforcer la prestation de services de soutien aux enfants handicapés et à leur famille dans les communautés locales, favoriser la désinstitutionnalisation, empêcher tout nouveau placement en institution et promouvoir l ’ insertion sociale et l ’ accès à un enseignement ordinaire, inclusif et de qualité ;

b) Enquêter sur les allégations de violences familiales dont les victimes sont des enfants handicapés et veiller à ce que les auteurs soient poursuivis au pénal ;

c) Prévenir et réprimer toute campagne publique qui fav orise une vision caritative et «  médical e » des enfants handicapés.

Sensibilisation (art. 8)

14.Le Comité est préoccupé par les préjugés négatifs à l’égard des personnes handicapées, en particulier ceux qui visent les personnes ayant un handicap intellectuel ou psychosocial.

15. Le Comité recommande à l ’ État partie, en étroite collaboration avec les organisations qui représentent les personnes handicapées, et en assurant la participation et la promotion des personnes ayant des déficiences intellectuelles ou psychosociales, d ’ adopter une vaste campagne de sensibilisation sur la Convention, l ’ objectif étant de construire une culture de la diversité fondée sur la participation de toutes les personnes handicapées, y compris celles ayant un handicap intellectuel et psychosocial, à la vie de la communauté.

Accessibilité (art. 9)

16.Le Comité constate avec préoccupation l’absence de cadre national législatif, politique et stratégique global, assorti des mécanismes de suivi nécessaires, pour garantir le respect, dans l’État partie, de normes d’accessibilité fondées sur le principe de conception universelle permettant de garantir l’accès des personnes handicapées, dans des conditions d’égalité avec les autres, à l’ensemble des équipements et services ouverts ou fournis au public sur tout le territoire de l’État partie, notamment en ce qui concerne l’information, les moyens de communication et les transports.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter, en étroite consultation avec les organisations représentant les personnes handicapées, un vaste plan d ’ action national concernant l ’ accessibilité, assorti d ’ un calendrier, d ’ indicateurs, de repères de suivi et d ’ évaluation, pour mettre efficacement en œuvre les normes de conception universelle en matière d ’ accès à l ’ environnement physique, aux transports, à l ’ information et aux moyens de communication, tout en imposant des sanctions en cas de non-respect ;

b) De prêter attention à son observation générale n o 2 (2014) sur l ’ accessibilité et au lien existant entre l ’ article 9 de la Convention et les cibles 11.2 et 11.7 des objectifs de développement durable.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

18.Le Comité note avec préoccupation que l’État Partie n’a pas élaboré de plans spécifiques de prévention, de protection et d’assistance à l’intention des personnes handicapées dans les situations de risque et d’urgence humanitaire conformément au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030).

19. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter un plan d ’ atténuation des risques et de gestion des catastrophes qui garantisse le respect des principes d ’ accessibilité et d ’ inclusion de toutes les personnes handicapées et qui prévoit un point de contact unique en cas d ’ urgence et de catastrophe, conformément au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

20.Le Comité constate avec préoccupation que les modifications apportées au droit civil en 2013 concernant la capacité juridique ont maintenu des dispositions discriminatoires, dont la tutelle temporaire et la capacité juridique partielle. Il note également avec préoccupation que, dans la pratique, les tribunaux appliquent généralement la prise de décisions au nom d’autrui parce qu’ils ne connaissent pas les solutions juridiques qui permettent d’éviter la restriction de la capacité juridique.

21. Rappelant le paragraphe 2 de l ’ article 12 de la Convention, qui dispose que les personnes handicapées jouissent de la capacité juridique dans tous les domaines, sur la base de l ’ égalité avec les autres, et son observation générale n o 1 (2014) sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d ’ égalité, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abroger les dispositions du droit civil relatives à la prise de décisions au nom d ’ autrui et de rétablir la pleine capacité juridique de toutes les personnes handicapées en instituant un régime de prise de décisions assistée respectueux de l ’ autonomie, de la volonté et des préférences des personnes handicapées.

Accès à la justice (art. 13)

22.Le Comité est préoccupé par :

a)La fourniture non systématique d’aménagements raisonnables dans les procédures judiciaires aux personnes présentant des handicaps mentaux ou psychosociaux, notamment l’absence d’accès garanti à l’aide juridictionnelle dans toutes les procédures judiciaires ;

b)Les informations selon lesquelles les personnes ayant des handicaps mentaux ou psychosociaux seraient exposées à des préjugés au sein de l’appareil judiciaire, notamment de la part des avocats ;

c)Le manque de protection juridique des personnes handicapées placées en institution.

23. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De garantir à toutes les personnes handicapées l ’ apport d ’ aménagements procéduraux dans les procédures judiciaires, notamment au moyen du recours au format Easy Read, à des services professionnels d ’ interprétation en langue des signes et au braille, et de mettre en place les garanties correspondantes pour permettre aux personnes handicapées de participer à toutes les procédures judiciaires dans des conditions d ’ égalité avec les autres personnes ;

b) De renforcer la formation à la Convention à l ’ intention des membres de l ’ appareil judiciaire, des avocats et des membres des forces de l ’ ordre ;

c) De garantir l ’ accès des personnes handicapées qui vivent en institution à l ’ aide juridictionnelle gratuite ;

d) De s ’ inspirer de l ’ article 13 de la Convention pour réaliser la cible 16.3 des objectifs de développement durable.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

24.Le Comité note avec préoccupation que :

a)La loi sur les services sociaux et l’assistance sociale autorise le placement de personnes ayant un handicap intellectuel ou psychosocial dans des établissements psychiatriques lorsque les services psychiatriques nécessaires ne sont pas disponibles localement ;

b)L’examen de la conformité des décisions de placement involontaire en institution est resté sans effet ;

c)L’exercice par les personnes placées en institutions du droit de circuler librement à l’extérieur de ces établissements peut être restreint de façon injustifiée ;

d)Les personnes ayant un handicap intellectuel ou psychosocial qui sont privées de liberté peuvent se heurter à des restrictions en matière d’accès à leurs dossiers médicaux et à des médicaments.

25. Conformément à ses directives concernant l ’ article 14 de la Convention relatif au droit à la liberté et à la sécurité des personnes handicapées (2015), le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’abroger toutes les dispositions législatives qui s’imposent pour prévenir le placement en institution des personnes ayant des déficiences intellectuelle s ou psychosociales et d ’ améliorer l ’ offre de services de santé mentale à assise communautaire ;

b) D ’ abroger toutes les dispositions permettant qu ’ une personne handicapée soit placée dans un établissement de santé mentale contre son gré et, en attendant, de veiller à ce que les personnes handicapées puissent contester leur placement devant les tribunaux ;

c) De garantir la liberté de circulation des personnes qui vivent en institution ;

d) De faire en sorte que les personnes ayant des déficiences intellectuelles ou psychosociales qui sont privées de liberté aient accès à leurs dossiers médicaux et à des médicaments.

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 15)

26.Le Comité constate avec préoccupation que l’administration de traitement sans consentement est permis par la loi relative aux traitements médicaux et le règlement no 453 du Conseil des ministres.

27. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abroger les dispositions législatives qui permettent le traitement forcé et de faire en sorte que les décisions touchant l ’ intégrité physique ou mentale d ’ une personne ne puissent être prises qu ’ avec le consentement préalable, libre et éclairé de cette personne.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

28.Le Comité est préoccupé par :

a)Le nombre élevé de décès d’adultes ayant des déficiences intellectuelles ou psychosociales dans les centres d’accueil, le manque d’informations concernant les enquêtes menées pour déterminer la cause de ces décès et l’absence de poursuites en cas d’acte criminel ;

b)Les allégations de violence et de maltraitance, y compris de violence sexuelle, à l’égard des personnes handicapées vivant en institution ;

c)L’usage excessif de neuroleptiques, les mauvaises conditions de vie, notamment l’alimentation insuffisante, et le nombre limité d’activités présentant une réelle utilité dans les institutions.

29. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ enquêter rapidement sur tous les décès de personnes ayant des déficiences intellectuelles ou psychosociales dans les centres d ’ accueil et sur toutes les allégations de violence et de maltraitance, en veillant à ce que les responsables d ’ actes criminels soient poursuivis et sanctionnés ;

b) De dispenser régulièrement au personnel des institutions une formation obligatoire sur la prévention de la violence et la maltraitance à l ’ égard des personnes handicapées ;

c) De veiller à ce que tous les centres d ’ accueil fassent l ’ objet d ’ un contrôle indépendant fondé sur les droits de l ’ homme et exercé en étroite collaboration avec les organisations représentant les personnes handicapées, conformément au paragraphe 3 de l ’ article 16 de la Convention.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

30.Le Comité est préoccupé par :

a)La lenteur avec laquelle la pratique consistant à placer les personnes handicapées en milieu fermé est abandonnée et les allégations selon lesquelles des résidents soi-disant retirés d’un centre d’accueil comme suite à l’abandon de cette pratique seraient en fait transférés vers un autre centre ;

b)L’absence d’une stratégie garantissant la poursuite de la désinstitutionnalisation lorsque le pays ne recevra plus un appui des Fonds structurels de l’Union européenne ;

c)Le manque de volonté affiché par les autorités municipales concernant la désinstitutionnalisation qui s’explique, entre autre, par la connaissance limitée de la notion d’autonomie de vie ;

d)Les formalités administratives excessives et l’offre limitée en matière d’aide personnelle pour les personnes handicapées.

31. Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De faire le nécessaire pour que toutes les personnes handicapées placées dans des centres fermés en soient retirées rapidement, en respectant les délais fixés et en veillant à ce que ces personnes ne soient pas transféré e s vers d ’ autres établissements, l ’ objectif étant de fermer tous les centres restants, qu ’ ils relèvent de l ’ État ou des municipalités ;

b) De renforcer la contribution des autorités municipales à la mise en œuvre de la stratégie de désinstitutionnalisation, notamment en faisant mieux connaître la notion d ’ autonomie de vie des personnes handicapées au sein de la communauté, et de faire en sorte que des services de promotion de l ’ autonomie de vie continuent d ’ être fournis lorsqu ’ il ne recevra plus un appui des Fonds structurels de l ’ Union européenne ;

c) De veiller à ce que les personnes handicapées reçoivent une aide personnelle de qualité qui réponde à leurs besoins individuels et garantisse leur insertion sociale et leur participation à la société.

Mobilité personnelle (art. 20)

32.Le Comité est préoccupé par le manque d’appareils, d’accessoires et de dispositifs d’aide à la mobilité de qualité qui répondent aux besoins individuels des personnes handicapées, en particulier des femmes et des enfants, et par le fait que les personnes handicapées ne reçoivent aucun appui pour acquérir de tels appareils, accessoires et dispositifs en temps voulu.

33. Le Comité recommande à l ’ État partie de faciliter l ’ accès de toutes les personnes handicapées, y compris des femmes et des enfants, à des appareils, des équipements, des accessoires et des technologies d ’ aide à la mobilité de qualité qui répondent à leurs besoins.

Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21)

34.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie ne dispose pas d’un cadre légal complet visant à garantir que les organismes publics et privés qui mettent des services à la disposition du public et les médias qui communiquent des informations, y compris par Internet, le fassent sous des formes et dans des formats accessibles à toutes les personnes handicapées, notamment en employant le format Easy Read sur leurs sites Web et en offrant des services de sous-titrage et d’interprétation en langue des signes à la télévision.

35. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter un cadre légal complet pour que tous les produits d ’ information et de communication mis à la disposition du public soient accessibles à toutes les personnes handicapées, notamment au moyen d ’ Internet, d ’ Easy Read, d ’ un service de sous-titrage, d ’ un affichage en braille et d ’ un service d ’ interprétation en langue des signes.

Respect de la vie privée (art. 22)

36.Le Comité est préoccupé par :

a)Le nombre insuffisant de garanties mises en place pour protéger le droit à la vie privée des personnes ayant des déficiences intellectuelles ou psychosociales qui sont répertoriées comme souffrant de certaines maladies et les incidences négatives que le fait d’être répertoriées comme telles a sur l’accès de ces personnes à des services particuliers et à un emploi ;

b)L’inefficacité prétendue des procédures permettant de s’opposer à ce qu’un tiers ait accès aux données personnelles des personnes ayant des déficiences intellectuelles ou psychosociales recueillies par les hôpitaux sans le consentement des personnes concernées ;

c)La pratique des agents publics consistant à exiger un certificat médical comme preuve du handicap et leur refus conséquent de tenir compte des attestations de handicap délivrées par l’État.

37. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer les mesures de protection de la vie privée, y compris concernant les données personnelles, notamment dans les hôpitaux et les établissements psychiatriques ;

b) De sensibiliser davantage les agents publics à la prise en compte du handicap selon une approche fondée sur les droits de l ’ homme et de réprimer la pratique signalée consistant à exiger un certificat médical comme preuve du handicap.

Respect du domicile et de la famille (art. 23)

38.Le Comité constate avec préoccupation que :

a)Des personnes handicapées mariées qui vivent en institution sont séparées l’une de l’autre, que ce soit dans le même établissement ou dans des établissements distincts en cas de transfert d’un des conjoints ;

b)Les tribunaux utilisent le handicap d’un parent comme justification pour suspendre ses droits de garde ou les lui retirer ;

c)Les parents ayant des déficiences intellectuelles, y compris les mères, ne bénéficient pas de suffisamment de services d’appui et, par conséquent, se retrouvent privés de leurs droits parentaux.

39. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir le droit de toutes les personnes handicapées, y compris les personnes ayant des déficiences intellectuelles, de se marier et d ’ avoir une famille et des enfants, en veillant à ce que ces personnes bénéficient de services d ’ appui inclusifs et d ’ un niveau de vie suffisant.

Éducation (art. 24)

40.Le Comité note avec préoccupation que la majorité des enfants handicapés sont inscrits dans des écoles spéciales ou sont encouragés à suivre leur scolarité à domicile, cette forme d’enseignement étant considérée comme une solution permanente au manque d’aménagement raisonnable et d’accessibilité, en particulier physique, de la plupart des écoles ordinaires et des établissements d’enseignement supérieur et de formation permanente.

41. Le Comité, rappe lant son observation générale n o 4 (2016) sur le droit à l ’ éducation inclusive et l ’ objectif de développement durable n o 4, en particulier les cibles 4.5 et 4 a), prie instamment l ’ État partie de veiller à ce qu ’ aucun enfant ne se voie refuser l ’ inscription dans une école ordinaire au motif du handicap et de continuer de dégager les ressources nécessaires à la mise en place d ’ aménagements raisonnables pour faciliter l ’ accès de tous les élèves handicapés à un enseignement inclusif et de qualité, y compris aux niveaux préscolaire et tertiaire et dans les établissements de formation permanente.

Santé (art. 25)

42.Le Comité note avec inquiétude que les services de santé générale font cruellement défaut et sont extrêmement inadaptés et inaccessibles aux personnes handicapées partout dans le pays.

43. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que des services et des établissements de santé générale soient disponibles et à ce qu ’ ils soient adaptés et accessibles à l ’ ensemble des personnes handicapées partout dans le pays.

Adaptation et réadaptation (art. 26)

44.Le Comité se préoccupe de ce que les personnes handicapées, en particulier celles ayant de graves déficiences, doivent attendre longtemps avant de pouvoir bénéficier de services de réadaptation, et ce partout dans le pays.

45. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que les services de réadaptation soient disponibles plus facilement et plus rapidement pour l ’ ensemble des personnes handicapées partout dans le pays.

Travail et emploi (art. 27)

46.Le Comité est préoccupé par :

a)L’absence d’amélioration concernant l’emploi des personnes handicapées sur le marché du travail ouvert, en particulier les personnes ayant des déficiences intellectuelles ;

b)La question du maintien des subventions à l’emploi une fois que le pays ne recevra plus un appui des Fonds structurels de l’Union européenne.

47. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ aider les personnes handicapées à décrocher un emploi sur le marché du travail ouvert, dans des milieux inclusifs et sur la base de l ’ égalité avec les autres ;

b) De prêter attention au lien qui existe entre l ’ article 27 de la Convention et la cible 8.5 des objectifs de développement durable.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

48.Le Comité se préoccupe du niveau modeste des prestations sociales et des pensions accordées aux personnes handicapées et du manque de données ventilées sur les personnes handicapées qui vivent dans la pauvreté.

49. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De faire en sorte que les personnes handicapées et leurs proches jouissent d ’ un niveau de vie suffisant en veillant notamment à ce que les programmes de protection sociale et de réduction de la pauvreté prennent en compte les frais supplémentaires liés au handicap ;

b) De prêter attention au lien qui existe entre l ’ article 28 de la Convention et la cible 1.3 des objectifs de développement durable.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

50.Le Comité constate avec préoccupation que les procédures, les installations et le matériel de vote ne sont pas suffisamment accessibles aux personnes ayant des déficiences intellectuelles ou physiques, aux aveugles et aux sourds.

51. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir le droit de voter de manière autonome en veillant à ce que les procédures, les installations et le matériel de vote soient adaptés et accessibles à l ’ ensemble des personnes handicapées et faciles à prendre en main.

C.Obligations particulières (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

52.Le Comité est préoccupé par le manque de données ventilées sur les personnes handicapées, la diffusion de ces données dans l’État partie et la participation insuffisante des organisations représentant les personnes handicapées à cet égard.

53. À la lumière de la cible 17.18 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer, par l ’ intermédiaire du système d ’ information sur le handicap de la Commission médicale d ’ État et des organisations représentant les personnes handicapées, des procédures systématiques pour la collecte de données et l ’ établissement de rapports qui soient conformes à la Convention, en tenant compte à cet effet du bref questionnaire sur le handicap mis au point par le Groupe de Washington sur les statistiques des incapacités, et de recueillir, d ’ analyser et de diffuser des données sur les personnes handicapées ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique, handicap, situation socioéconomique, emploi et lieu de résidence, entre autres, ainsi que des informations sur les obstacles rencontrés par les personnes handicapées dans la société.

Application et suivi au niveau national (art. 33)

54.Le Comité prend note avec préoccupation des capacités limitées des mécanismes chargés de la coordination et du suivi de l’application de la Convention, à savoir le Ministère des affaires sociales et le Bureau du Médiateur, respectivement, et du fait que les organisations représentant les personnes handicapées ne participent pas systématiquement aux travaux de ces mécanismes.

55. Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer sensiblement le rôle et les capacités du Ministère des affaires sociales et du Bureau du Médiateur en leur qualité de mécanismes de coordination et de suivi de l ’ application de la Convention, respectivement, tout en veillant à dégager des ressources financières suffisantes et en garantissant la pleine participation des organisations représentant les personnes handicapées aux travaux de coordination et de suivi.

IV.Suivi

Diffusion d’information

56. Le Comité demande à l ’ État partie de lui faire parvenir, dans un délai de douze mois, des renseignements sur l ’ adoption des présentes observations finales et, conformément au paragraphe 2 de l ’ article 35 de la Convention, sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations figurant aux paragraphes 31 (autonomie de vie et inclusion dans la société) et 41 (éducation).

57. Le Comité demande à l ’ État partie de mettre en œuvre ses recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre les présentes observations finales, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et du Parlement, aux responsables des différents ministères, aux autorités locales et aux membres des professions concernées, tels les professionnels de l ’ éducation, de la santé et du droit, ainsi qu ’ aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale modernes.

58. Le Comité encourage vivement l ’ État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l ’ élaboration de ses rapports périodiques.

59. Le Comité prie l ’ État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations de personnes handicapées, ainsi qu ’ auprès des personnes handicapées elles-mêmes et de leurs proches, dans les langues nationales et minoritaires, notamment en langue des signes, et sous des formes accessibles, y compris Easy Read. Il lui demande aussi de les diffuser sur le site Web public consacré aux droits de l ’ homme.

Prochain rapport périodique

60. Le Comité prie l ’ État partie de lui soumettre son prochain rapport valant deuxième et troisième rapports périodiques le 1 er avril 2020 au plus tard et d ’ y faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre des pré sentes observations finales. Il  invite également l ’ État partie à envisager de soumettre ce rapport selon la procédure simplifiée de présentation des rapports, dans le cadre de laquelle le Comité établit une liste de points au moins un an avant la date prévue pour la soumission du rapport. Les réponses de l ’ État partie à cette liste de points constituent son rapport périodique.