Nations Unies

CRC/C/SR.1586

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

24 janvier 2011

Original: français

Comité des droits de l’enfant

Cinquante- sixième session

Compte rendu analytique de la 1586 e séance*

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 18 janvier 2011, à 10 heures

Président e:Mme Lee

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties

Rapport initial de l’Afghanistan sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant

La séance est ouverte à 10 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties

Rapport initial de l’Afghanistan sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/C/AFG/1; CRC/C/AFG/Q/1; CRC/C/AFG/Q/1/Add.1)

1.Sur l’invitation de la Présidente, la délégation afghane prend place à la table du Comité.

2.M. Hashimzai (Afghanistan) dit que, depuis l’instauration du nouveau régime en 2001, les droits de l’homme font l’objet d’une attention particulière dans les politiques et les programmes de développement du pays. Le Code des mineurs adopté en mars 2005 vise notamment à préserver l’intérêt supérieur et les droits de l’enfant dans le système de justice. La loi de 2009 relative aux centres de réadaptation pour mineurs privilégie l’éducation et la réadaptation des jeunes placés en détention, tient compte des normes internationales applicables en matière de traitement des détenus, vise à améliorer la qualité des services fournis et à instituer des mécanismes de surveillance pour les enfants en conflit avec la loi. Toutes les lois adoptées relatives à l’éducation, au travail, à la santé publique et à la lutte contre la traite des personnes tiennent compte des prescriptions de la Convention. L’éducation de base est gratuite et obligatoire et la population a accès gratuitement à des soins de santé. Malgré la modicité de ses ressources financières et humaines, l’État s’emploie sans relâche à accroître le bien-être des enfants.

3.La stratégie quinquennale de l’éducation adoptée par l’État en 2007 vise à contribuer à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) dans ce secteur. Le Ministère de l’éducation va lancer des programmes tendant à améliorer la qualité de l’éducation, à renforcer la sécurité dans les écoles, à promouvoir la scolarisation des filles et à intégrer les droits de l’homme dans le cursus scolaire. L’accès à l’éducation s’est nettement amélioré: fin 2009, 6,7 millions d’élèves (37 % de filles) étaient scolarisés ou suivaient une formation d’enseignant (sept fois plus qu’en 2001). Chaque province dispose d’au moins un centre de formation ou de recyclage des enseignants. En dépit de ces progrès remarquables, 42 % des enfants d’âge scolaire, principalement des filles, ne sont toujours pas scolarisés et près de la moitié des écoles ne disposent pas d’installations sanitaires ni d’approvisionnement en eau. La sécurité pose aussi des problèmes. Le programme éducatif intérimaire 2011-2013, en cours d’élaboration, vise à répondre à ces préoccupations.

4.Dans le cadre de la stratégie de la santé publique adoptée en 2008, le Ministère de la santé publique s’emploie à améliorer les soins de santé et à promouvoir un environnement sain. Le taux de mortalité maternelle est de 1 600 pour 100 000 naissances vivantes, celui de mortalité infantile de 111 pour 1 000 naissances vivantes et celui des moins de 5 ans de 161 pour 1 000 naissances vivantes. Les maladies transmissibles, dont la diarrhée, les infections respiratoires aiguës, le paludisme et la malnutrition touchent durement les moins de 5 ans, alors que d’autres problèmes, comme la maltraitance, les grossesses précoces, la toxicomanie et le VIH/sida touchent les plus grands. L’État a élaboré une stratégie en faveur de la santé et de la nutrition et une politique nationale relative à la santé de l’enfant et de l’adolescent.

5.Depuis 2006, l’État met en œuvre une stratégie qui prévoit des services et programmes de protection de l’enfant contre l’exploitation, la violence et la maltraitance, des mesures devant être prises en faveur des catégories d’enfants vulnérables par le Ministère du travail et des affaires sociales, d’autres organismes publics et des organisations de la société civile. Ces quatre dernières années, 2 578 928 enfants ont ainsi bénéficié d’une protection. La stratégie de protection sociale pour la période 2008-2013 vise à assurer un filet de sécurité aux groupes les plus vulnérables, notamment les enfants, les handicapés, les familles de martyrs, les orphelins, les enfants des rues, les femmes démunies et les pauvres des zones rurales. Mise en œuvre depuis 2008, la stratégie nationale en faveur des enfants handicapés permet de venir en aide à ces enfants dans les secteurs de l’éducation, de la santé et de la formation professionnelle et technique; elle concerne 196 000 enfants (110 000 garçons et 86 000 filles).

6.Le réseau de protection de l’enfance mis en place à partir de 2003 par le Ministère du travail et des affaires sociales, avec le concours de l’UNICEF, entre autres, couvrait 28 provinces en mars 2008. Le réseau a pour mission de prévenir l’exploitation, la maltraitance et la violence à l’encontre des enfants et de protéger tous les enfants. Il permet de recenser les violations des droits de l’enfant et d’élaborer des programmes d’action en conséquence; entre 2007 et 2010 il a été saisi de 4 654 affaires, concernant des sévices sexuels, des enfants en conflit avec la loi, des enfants maltraités et des enfants effectuant un travail dangereux. Le réseau mène en outre une action de sensibilisation à la Convention.

7.La réalisation des droits de l’enfant passe aussi par un partenariat dynamique avec les ONG, les travailleurs sociaux et les organisations de la société civile. La coopération internationale est tout aussi importante et l’Afghanistan tient à remercie l’UNICEF.

8.L’Afghanistan reste cependant confronté à de graves problèmes, en particulier l’insécurité, qui entrave le développement économique et social, et le manque de ressources pour financer les mesures de protection des groupes les plus vulnérables.

9.M. Krappmann (Rapporteur pour l’Afghanistan) note que la question de la survie n’est pas abordée dans le rapport initial de l’Afghanistan, alors que de nombreux enfants ont été tués ces dernières années dans le conflit; des renseignements sur les mesures prises ou envisagées pour fournir une meilleure protection aux enfants et garantir leur survie seraient donc souhaitables. La Police nationale afghane figurant encore sur la liste des organisations qui enrôlent des enfants, la délégation voudra bien expliquer pourquoi les autorités ne parviennent pas à mettre un terme à cette pratique.

10.Il demande comment l’État veille à l’application de la Convention dans l’ensemble du pays et quel organe coordonne l’action des différents intervenants dans le domaine des droits de l’enfant, soulignant que vu la nature transectorielle de ces droits de l’enfant une instance de coordination devrait superviser les activités de tous les ministères compétents. Il faudrait savoir en outre si les nombreux organes en place disposent des ressources humaines et financières requises pour s’acquitter de leur mission.

11.Notant avec satisfaction que de nombreux plans d’action et stratégies ont été adoptés, concernant l’éducation, la santé, la protection sociale et les enfants en danger, M. Krappmann demande quel organe veille à la cohérence et à l’efficacité des mesures prises, si les plans d’action sont axés sur les droits de l’enfant et si l’Afghanistan envisage d’adopter un plan d’action national en faveur de l’enfance, afin de mieux coordonner l’ensemble des actions menées, et un code de l’enfance afin de conforter le respect des droits de l’enfant. Il aimerait savoir si l’État a évalué les plans d’action et stratégies mis en œuvre ces dernières années, dont le Plan national de lutte contre la traite et les disparitions (2004), la Stratégie de justice pour les mineurs (2005) et la Stratégie nationale relative aux enfants en danger (2006). Un complément d’information sur la nature de la protection fournie aux 2 millions d’enfants qui en bénéficient serait souhaitable.

12.On ne peut que se féliciter de la création de la Commission indépendante afghane des droits de l’homme, dotée d’une Unité des droits de l’enfant et d’observateurs sur le terrain, mais il faudrait savoir si la Commission est conforme aux Principes de Paris, si elle est habilitée à mener des enquêtes et comment sont nommés ses membres.

13.La délégation pourrait indiquer si un calendrier a été fixé pour mettre en place un système centralisé de collecte de données afin de mieux connaître la situation des enfants en danger, des enfants pauvres, des enfants de familles monoparentales ou nombreuses, des enfants handicapés, des orphelins et des filles.

14.M. Zermatten aimerait avoir des précisions sur le statut de la Convention dans l’ordre juridique afghan, eu égard notamment à l’article 7 de la Constitution relatif à la prise en considération des instruments internationaux dans le droit interne. Il salue les mesures législatives prises, notamment l’adoption du Code des mineurs, mais aimerait savoir où en est le processus d’élaboration de textes d’application requis pour donner effet à la Convention et connaître l’état d’avancement des travaux de l’Unité des droits de l’homme mise en place au Ministère de la justice avec pour mission de réviser les lois en vigueur pour les mettre en conformité avec la Convention. Il demande si des tribunaux se sont fondés directement sur la Convention dans des affaires dont ils étaient saisis et ce qu’il advient en cas de conflit de normes entre les différents systèmes juridiques (positif, islamique et coutumier) ou avec la Convention. La notion d’intérêt supérieur de l’enfant n’étant pas systématiquement intégrée dans la loi ni appliquée par les tribunaux, il serait utile que la délégation fournisse des informations à ce sujet.

15.M. Guran aimerait avoir des précisions sur les mécanismes de coordination en place et leur organisation et savoir quelle formation est dispensée aux agents du Ministère du travail et des affaires sociales chargés de recevoir les plaintes en cas de violation des droits de l’enfant et quelle suite est donnée à ces affaires. La délégation pourrait aussi fournir des informations sur la formation des personnels travaillant à la Commission nationale des droits de l’homme et sur ses ressources humaines et financières.

16.Il serait utile d’avoir des détails sur les résultats positifs de la coopération que les différents contingents militaires de la Force internationale d’assistance à la sécurité déployés dans le pays ont établi avec la population, notamment en matière d’éducation.

17.M. Koompraphant aimerait connaître les mesures prises contre la discrimination envers les enfants, en particulier les filles, au sein des communautés et des familles, notamment en matière d’éducation et de santé, et savoir si des décisions de justice ont été rendues pour sanctionner les auteurs d’actes de discrimination et protéger leurs victimes.

18.M. Pollar constate avec préoccupation que le droit des enfants d’exprimer leur opinion n’est pas respecté dans le cadre des enquêtes et des procédures pénales, que les juges enjoignent aux enfants de ne pas parler devant le tribunal et ne leur donnent pas la possibilité de témoigner, au mépris du Code des mineurs, et que les enfants sont souvent absents des procédures judiciaires informelles.

19.Les efforts que l’État mène depuis 2007 pour promouvoir l’enregistrement des naissances sont méritoires, mais il faudrait savoir comment il entend remédier aux obstacles que sont la difficulté d’accès aux zones de conflits, la défiance envers les agents de l’État, le faible taux d’accouchement en hôpital et la méconnaissance des avantages liés à l’enregistrement des naissances, et si les enfants nés hors mariage peuvent être enregistrés.

20.M. Citarella demande quelles dispositions s’appliquent dans les affaires de discrimination envers les filles − à l’école, à l’hôpital ou dans la famille − et si, par exemple, les tribunaux ont déjà annulé des mariages précoces.

21.M me Al-Asmar note avec satisfaction que des organisations non gouvernementales (ONG) ont participé à l’élaboration du rapport initial et demande si l’État les associe à toutes les activités réalisées dans le domaine des droits de l’enfant et protège leurs membres quand ils s’aventurent dans des zones sensibles.

22.Elle demande ce qui est fait pour interdire les châtiments corporels dans d’autres cadres que l’école, si les droits des enfants ont été pris en considération lors de l’élaboration de la nouvelle loi relative aux médias et si des programmes ou émissions sont conçus pour sensibiliser les enfants à leurs droits et à une utilisation en toute sécurité des médias.

23.M me El-Ashmawy demande ce qui est fait pour assurer la répartition équitable des ressources et en garantir l’emploi dans l’intérêt supérieur des enfants, sans discrimination sexiste, sociale ou autre, afin que tous les enfants puissent jouir de leurs droits à l’éducation, aux soins de santé et à un accès à l’eau potable.

24.Elle aimerait en outre savoir si des mesures ont été prises pour combattre, prévenir et réprimer les actes de corruption et assurer ainsi la transparence dans l’emploi des ressources affectées à l’enfance, ainsi que l’affectation de ressources adéquates à la protection des enfants en cas de crise, de catastrophe naturelle ou autre situation d’urgence.

25.La délégation pourrait aussi exposer l’action menée en vue d’accroître la capacité des membres des forces de l’ordre, des travailleurs sociaux, des personnels de santé et des agents des institutions pour enfants à travailler avec les enfants, et indiquer si l’État a mis en place des moyens de diffusion et de vulgarisation de la Convention et envisage d’incorporer un enseignement relatif à la Convention dans les programmes scolaires.

26.M me Varmah demande si l’État partie envisage de réviser les lois concernant expressément les enfants afin d’harmoniser les définitions divergentes de l’enfant y figurant pour les aligner sur la Convention, notamment la loi de 2005 sur l’enfant en conflit avec la loi selon laquelle sont des enfants les garçons de moins de 18 ans et les filles de moins de 17 ans. Cette même loi de 2005 a porté l’âge de la responsabilité pénale de 7 à 12 ans, mais il est parfois difficile de déterminer l’âge des intéressés à cause de l’accès limité aux services d’enregistrement des naissances et de délivrance des cartes d’identité; il faudrait donc savoir comment l’État procède pour déterminer l’âge d’un enfant dans une procédure judiciaire, pour un mariage ou pour le recrutement dans les forces de sécurité.

27.La délégation pourrait aussi indiquer ce qui est fait pour prévenir les mariages précoces, pratique très courante en Afghanistan, où environ 60 % des filles se marient avant 16 ans et où moins de 10 % des enfants ont un certificat de naissance, pour réprimer les parents qui marient leurs enfants avant l’âge nubile légal.

28.Notant avec préoccupation que les châtiments corporels sont autorisés dans la famille, ne sont pas interdits expressément dans les structures de protection de remplacement ou comme mesure disciplinaire dans le système pénal et continuent d’être administrés dans les écoles, alors que la loi sur l’éducation les interdit, Mme Varmah demande si l’État a donné suite à l’engagement pris lors du Forum de l’Asie du Sud contre la violence envers les enfants d’interdire les châtiments corporels dans tous les cadres, y compris la famille.

29.M. Filali demande si les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme priment la législation nationale et quel droit prévaut en cas de conflit entre une norme de droit civil découlant de la Convention et la charia. Des informations sur les discriminations envers les minorités contraintes de fuir le pays, sur les violences infligées aux enfants dans les postes de police et les lieux de détention et sur les conditions de la détention avant jugement seraient bienvenues.

30.La Présidente s’enquiert des mesures prises pour mettre en œuvre pleinement les nombreuses lois adoptées et les nombreux programmes élaborés.

La séance est suspendue à 11 h 15 ; elle est reprise à 11 h 35.

31.M. Hashimzai (Afghanistan) explique qu’en vertu de la Constitution à partir du moment où l’Afghanistan a ratifié un instrument international le Ministère de la justice veille à ce que tout nouveau projet de loi y soit conforme. Les lois en vigueur avant la ratification d’un instrument doivent être révisées, mais ce processus prend du temps; des conférences ont ainsi été organisées en vue de réviser le Code pénal, le Code civil et le Code de procédure pénale pour les mettre en conformité avec les instruments relatifs aux droits de l’homme auxquels l’Afghanistan est partie.

32.Quand un juge est saisi d’une affaire, il se fonde d’abord sur la Constitution, tout en tenant compte des instruments internationaux ratifiés pertinents; si aucune disposition de la Constitution n’est applicable en l’espèce, il se fonde sur les dispositions pertinentes des diverses lois, qui couvrent pratiquement toutes les situations. Ce n’est qu’en dernier ressort, si aucune de ces autres dispositions n’est applicable qu’il applique la charia.

33.La Constitution et tous les systèmes de droit en vigueur dans le pays interdisent aux policiers de brutaliser un enfant pour lui extorquer des aveux. Si le juge a connaissance de tels faits, il annule l’enquête. Ce sont en général les agents de la Commission des droits de l’homme qui signalent ces faits et ils peuvent alerter les médias si le juge ne respecte pas les droits fondamentaux. Tout enfant a droit à un avocat et à une aide juridictionnelle. Les ONG sont actives et fournissent une aide juridictionnelle aux enfants des régions reculées.

34.Les avocats, les juges et les procureurs sont formés au Centre national de formation juridique et y étudient notamment les instruments internationaux ratifiés par l’Afghanistan.

35.M. Krappmann (Rapporteur pour l’Afghanistan) aimerait que la délégation commente une décision rendue par la Cour suprême par laquelle elle a estimé qu’une femme quittant son foyer pour fuir un époux violent pouvait tout de même être condamnée pour abandon du domicile conjugal, ce qui revient à condamner la victime.

36.M. Hashimzai (Afghanistan) répond qu’il ne connaît ni les faits ni le raisonnement suivi par la Cour suprême en l’espèce.

37.M. Muhmand (Afghanistan) dit que le Secrétariat à la protection de l’enfance, mis en place voilà deux ans au sein du Ministère du travail et des affaires sociales et doté d’une enveloppe budgétaire spécifique, est chargé de renforcer ainsi que d’évaluer et de superviser les politiques et programmes en faveur de l’enfance, de rédiger de nouveaux textes de loi et de resserrer la coopération internationale et les relations avec les divers intervenant dans ce domaine, dont les ONG.

38.M. Guran demande combien le Secrétariat emploie de personnes.

39.M. Hashimzai (Afghanistan) répond que le Secrétariat à la protection de l’enfance compte 12 personnes, mais que ses effectifs devraient être portés à 30 sous peu. L’Unité des droits de l’homme dont vient de se doter le Ministère de la justice est financée en partie par l’aide internationale, notamment le PNUD. Elle est chargée d’évaluer les résultats de l’application des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme; elle a publié une brochure sur la Convention et les autres normes relatives à la protection des droits de l’enfant et dispense dans différentes provinces une formation à la coordination et à l’évaluation.

40.M. Guran demande si un mécanisme de suivi indépendant a été mis en place.

41.M me Jamal (Afghanistan) dit que la Commission des droits de l’homme, organe indépendant, représente la société civile. Aux niveaux de la province et du village les conseils de développement communautaire font rapport au Gouvernement et plusieurs ministères se sont dotés d’un département des droits de l’homme, mais force est de constater que la coordination des actions laisse à désirer.

42.M. Muhmand (Afghanistan) ajoute que le réseau de protection de l’enfance en place dans 28 provinces et 54 districts œuvre à la mise en œuvre de la Convention et de la Stratégie nationale relative aux enfants en danger, signale toutes les affaires de violation au Ministère concerné et évalue la suite qui leur est donnée.

43.M. Arian (Afghanistan) dit qu’avec l’appui de l’UNICEF et d’ONG, le Ministère de l’éducation continue à fournir des services éducatifs dans les zones non sécurisées et dans les situations d’urgence. Les contingents militaires de la Force internationale apportent leur concours en bâtissant des écoles, sous la supervision du Ministère de l’éducation.

44.Les conseils scolaires institués dans plus de 10 000 établissements permettent de consulter les élèves et les parents d’élèves sur de nombreux points, dont la révision des programmes. Tout enfant dépourvu de pièce d’identité peut être inscrit dans une école sur simple présentation des titres d’identité de ses parents ou sur recommandation d’un ancien de son village.

45.Loin d’être victimes de discrimination à l’école et à l’université, les filles bénéficient de mesures de discrimination positive. Des mesures incitatives sont déjà en place pour attirer davantage de filles dans les centres de formation des enseignants et les autorités réfléchissent à une politique d’incitation financière visant à relever le taux de scolarisation des filles et à encourager les filles qui ont abandonné leurs études à les reprendre.

46.Les droits de l’homme et les droits de l’enfant, l’égalité entre hommes et femmes, l’instruction civique et la sensibilisation aux dangers des drogues et à la préservation de l’environnement font partie intégrante des programmes scolaires. La loi sur l’éducation interdit expressément les châtiments corporels et le Ministère de l’éducation a publié des directives spéciales pour faire respecter cette interdiction.

47.Avec le soutien de l’UNESCO et de l’UNICEF, des politiques et des sessions de formation des enseignants sont mises en œuvre en vue de rendre plus accueillantes les écoles et de relever les taux de scolarisation. Le budget total de l’éducation a augmenté de plus de 200 % entre 2006 et 2010 et il représente de 12 à 14 % du budget de fonctionnement de l’État − les dépenses prévues à ce titre étant effectivement réalisées à 100 % − à quoi s’ajoute le budget de développement, dont le taux d’exécution est moindre car il dépend des capacités financières de l’État et sert à financer des programmes pluriannuels.

48.M me Mostafavi (Afghanistan) dit que le Ministère des affaires féminines a aussi pour mission de combattre certaines traditions préjudiciables à la condition féminine. Le projet de loi sur la famille, en cours de rédaction, insiste sur la participation des hommes aux tâches domestiques et à l’éducation des enfants. Les policiers sont formés à l’accueil des femmes et des enfants. Une commission contre la violence envers les femmes et les enfants est envisagée et la loi sur l’élimination de la violence envers les femmes et les filles, adoptée en 2009, incrimine les mariages précoces ou forcés, ainsi que les échanges de filles ou de femmes à titre de réparation, de même que le fait de contraindre une femme ou une fille à se prostituer ou à se marier.

49.M. Citarella constate que dans les faits les mariages forcés et précoces demeurent très répandus et demande s’ils sont enregistrés, bien qu’ils soient interdits.

50.M me Maurás Pérezaimerait avoir des exemples concrets d’affaires dans lesquelles les instances judiciaires ont appliqué ces normes de protection, en précisant les peines prononcées.

51.M me El-Ashmawy demande quel est l’âge à partir duquel un mariage peut être légalement enregistré.

52.M me Mostafavi (Afghanistan) indique que le Parlement a récemment porté de 16 à 17 ans l’âge minimum légal du mariage pour les filles, mais que les mariages précoces restent possibles parce que l’enregistrement des mariages n’est pas obligatoire.

53.M. Hashimzai (Afghanistan) dit que l’application de la législation nationale diffère en ville et à la campagne. La justice informelle rend des décisions qui vont parfois à l’encontre des lois nationales et même de la loi islamique. Le Ministère de la justice est en train de rédiger un projet de loi qui précise les liens entre la justice informelle et les tribunaux, dont les décisions sont conformes à la législation nationale et aux dispositions de la Convention. Les pratiques ainsi que les lois et leur application évoluent, et les auteurs d’infractions commises en milieu rural sont condamnés si l’affaire est portée devant les tribunaux. La population est à présent sensibilisée aux droits que consacre la Convention.

54.M me Al-Asmar demande ce qui est fait pour dissiper la crainte qui dissuade les enfants chrétiens, hindous ou sikhs d’aller à l’école du fait de leur appartenance religieuse et quelles mesures sont prises, au-delà d’une simple augmentation du budget, pour que les femmes retournent travailler dans les écoles. Elle aimerait en outre savoir combien de personnes ont été condamnées pour harcèlement, abus ou crime sur enfant.

55.M me Mostafavi (Afghanistan) indique que 1 960 cas de violences ont été enregistrés en 2009, surtout des mariages précoces et forcés. Même si une législation adéquate existe, en la matière des difficultés de mise en œuvre subsistent.

56.L’Unité spéciale des droits de l’homme du Ministère de la justice donne les informations nécessaires en matière d’âge et le Ministère de l’intérieur va commencer d’ici six mois à délivrer des cartes d’identité.

57.M me Burhani (Afghanistan) dit que le projet en faveur de l’enregistrement des naissances lancé en 2007 avec l’appui de l’UNICEF doit être étendu à quatre nouvelles provinces. Quelque 20 % des femmes accouchent dans un centre de santé. Pour remédier aux difficultés liées à l’enregistrement des enfants réfugiés ou déplacés, le Ministère de la santé publique a formé plus de 19 000 personnes, dont des notables locaux et des chefs religieux, et a distribué des formulaires d’acte de naissance. L’UNICEF fournit un solide appui en matière de soins de santé aux enfants et de santé procréative.

58.M. Hashimzai (Afghanistan) indique que le Ministère de la justice est favorable à l’adoption d’un texte incorporant l’intégralité des dispositions de la Convention. Des centaines de cas de condamnation d’auteurs de violations des droits de l’enfant ont été enregistrés, dont la condamnation à seize années de prison de l’auteur d’un viol sur mineur.

59.M. Krappmann (Rapporteur pour l’Afghanistan) aimerait savoir si des mesures spécifiques, réalistes et à échéance définie sont prévues en vue de scolariser les enfants qui ne le sont pas encore, près de la moitié, pourquoi un nombre si élevé de filles n’est toujours pas scolarisé, comment les autorités entendent faire évoluer les comportements traditionnels et résorber les disparités régionales en la matière et quels facteurs déterminent le taux d’abandon scolaire − la corruption, qui assure de meilleurs résultats aux enfants issus de milieux aisés, semblant en être un. Le chômage des jeunes étant élevé, des informations sur la formation professionnelle seraient bienvenues.

60.La délégation pourrait indiquer s’il existe un système efficace d’inspection scolaire, si les droits de l’homme et de l’enfant sont à la base du système scolaire, si les enfants ont le droit d’exprimer leurs opinions à l’école et, le cas échéant, dans quel cadre, ce qui est fait pour remédier à la pénurie de ressources nécessaires entravant la mise en œuvre de programmes scolaires adaptés aux enfants.

61.M me Ortiz,s’alarmant du nombre élevé d’enfants qui grandissent en institution loin de leur famille, demande ce qui est fait pour maintenir les enfants dans leur famille biologique, retrouver cette famille ou les faire bénéficier d’une protection de remplacement de type familial. Elle aimerait aussi savoir qui décide si l’enfant doit quitter sa famille et être pris en charge par une institution, la kafalah ou une famille d’accueil, qui procède à l’examen périodique de la situation et s’il existe des normes minimales de soins aux enfants dans les structures de protection de remplacement.

62.M. Zermatten demande comment s’articulent le Code des mineurs (2005), la loi relative aux enquêtes concernant les violations de la loi commises par des enfants et la loi relative aux centres de rééducation pour mineurs (2000). Alors que l’âge de la responsabilité pénale est fixé à 12 ans, selon certaines sources des enfants de moins de 12 ans se trouveraient en centre de rééducation. La délégation voudra bien indiquer le nombre exact de tribunaux spécialisés et de bureaux du Procureur spécial car il y a contradiction entre les chiffres du rapport et ceux des réponses écrites.

63.Au sujet du délit d’état, il relève qu’en Afghanistan le comportement anormal des enfants est une affaire relevant du tribunal pour mineurs alors qu’il s’agit là d’un concept très large et peu juridique et renvoie à l’Observation générale no 10 du Comité sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs. Il demande en quoi les centres de rééducation diffèrent des centres de correction, car les définitions données dans les documents de l’État partie semblent identiques, et si le projet de règlement des centres de correction a été accepté. Il serait utile d’avoir des précisions sur les conditions de la détention préventive et sur le nombre de jeunes placés sous ce régime, ainsi que de savoir ce qui est fait pour en finir avec la prédominance de démarche punitive dans le pays. La délégation pourrait en outre donner des renseignements sur l’aide médicale et psychosociale fournie aux enfants, aux filles principalement, détenus avec les adultes, faute de centre pour mineurs, ainsi que sur la formation des procureurs, des policiers et des juges et la place du travailleur social, le cas échéant, dans la justice pour mineurs.

64.M. Puras,notant que les indicateurs relatifs à la santé demeurent alarmants malgré l’adoption de bonnes stratégies, souligne que l’efficacité de ces stratégies suppose l’appropriation des réformes par les autorités locales et nationales, la transparence dans l’affectation et l’emploi des ressources, et la motivation des personnels. À ce sujet il faudrait savoir ce qui est fait pour recruter des femmes dans le secteur de la santé, notamment des sages-femmes, améliorer l’accès aux services de santé dans tout le pays, en particulier pour les familles les plus pauvres, et promouvoir la transparence et l’appropriation des politiques de santé aux niveaux des provinces et des districts.

65.Il demande ce qui est fait pour garantir le droit à la réadaptation sociale et psychologique des enfants et adolescents victimes de traumatismes et de violences et s’il existe des services intégrés en la matière. La délégation pourrait aussi présenter les mesures mises en place en matière de prévention et de traitement de la toxicomanie chez les enfants et expliquer ce qu’il faut entendre par «rééducation» dans le rapport à l’examen.

66.Saluant la ratification par l’Afghanistan, en 2010, de la Convention no 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants, M. Puras s’enquiert des mesures prises pour mettre en œuvre cet instrument et la législation nationale connexe, rappelant que le phénomène des enfants des rues doit être traité comme un problème social et non pénal.

67.Il s’interroge sur la qualité de l’exécution de la Stratégie nationale pour les enfants handicapés et de son suivi, car 90 % de ces enfants n’ont pas accès à l’éducation, sur la collecte des données dans ce domaine, et sur les mesures visant à éviter le placement en institution et la stigmatisation des enfants handicapés.

68.M me El-Ashmawy aimerait avoir desprécisions sur l’application de la loi de 2008 contre l’enlèvement et la traite des êtres humains et sur la prévention de l’impunité, sur les mesures prises pour éviter que les enfants victimes de traite ne soient considérés comme des délinquants et condamnés, par exemple pour prostitution, sur la protection des témoins d’infractions, sur la stratégie de lutte contre les groupes mafieux et sur les sanctions encourues par les familles qui vendent leurs enfants à des fins de prostitution forcée. La délégation pourrait en outre exposer le rôle du Gouvernement et de la société civile en matière de protection des enfants, notamment des garçons, contre la traite à des fins d’exploitation, ainsi que le rôle des médias en matière de sensibilisation contre la traite. Saluant l’Organisation internationale pour les migrations pour l’appui qu’elle apporte à l’Afghanistan en vue de l’aider à combattre la traite et à renforcer ses capacités dans ce domaine, Mme El-Ashmawy demande s’il existe des services en faveur des victimes de la traite, notamment un mécanisme national d’orientation des victimes, et si l’Afghanistan entend ratifier le Protocole de Palerme visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

La séance est levée à 13 h eures .