Nations Unies

CRPD/C/22/D/32/2015

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

15 octobre 2019

Français

Original : espagnol

Comité des droits des personnes handicapées

Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 du Protocole facultatif, concernant la communication no 32/2015 * , **

Communication présentée par :

Arturo Medina Vela (représenté par des conseils, Eunice Leyva García et María Sirvent Bravo-Ahuja)

Victime(s) présumée(s) :

Arturo Medina Vela

État partie :

Mexique

Date de la communication :

19 août 2015 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application de l’article 70 du Règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 16 septembre 2015 (non publiée sous forme de document)

Date des constatation(s) :

6 septembre 2019

Objet :

Droit d’exercer sa capacité juridique sur la base de l’égalité avec les autres

Question(s) de procédure :

Recevabilité ; épuisement des recours internes

Question(s) de fond :

Accès aux tribunaux ; handicap intellectuel et psychosocial ; exercice de la capacité juridique ; privation de liberté ; discrimination fondée sur le handicap ; restriction des droits

Article(s) de la Convention :

5, 9, 12, 13, 14 et 19, lus conjointement avec l’article 4

Article(s) du Protocole facultatif :

1er et 2

1.L’auteur de la communication est Arturo Medina Vela, de nationalité mexicaine, né le 1er août 1990. Il présente un handicap intellectuel et psychosocial pour lequel aucun traitement médical constant n’est nécessaire. L’auteur a toujours vécu avec sa mère et sa sœur, qui sont ses principaux appuis dans ses prises de décisions. Au moment de la soumission de la présente communication, M. Medina Vela était détenu au Centre de réadaptation psychosociale de Varonil, à Mexico. Il affirme que l’État partie a violé les droits qu’il tient des articles 5, 9, 12, 13, 14 et 19, lus conjointement avec l’article 4, de la Convention. L’auteur est représenté par des conseils. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 3 mai 2008.

A.Résumé des renseignements fournis et des arguments avancés par les parties

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1Le 14 septembre 2011, entre 12 heures et 13 heures, l’auteur a été arrêté par la police, sous l’accusation de vol de véhicule, sur la base d’images enregistrées par des caméras de surveillance installées sur le lieu où était stationné le véhicule concerné. Il affirme que son avocat commis d’office a demandé, en vain, que ces images soient présentées dans le cadre de la procédure pénale engagée contre lui. Le même jour, l’auteur a été déféré au parquet, à la Fiscalía Desconcentrada Venustiano Carranza (service décentralisé du parquet) du Bureau du Procureur général du District fédéral. Vers 22 heures, l’agent du ministère public a informé la famille de l’auteur de l’accusation portée contre lui.

2.2La mère de l’auteur s’est rendue à la Fiscalíaet a déclaré que, en raison de son handicap, son fils ne savait pas conduire et n’était en aucun cas l’auteur des faits. Elle a également présenté les documents attestant le handicap de l’auteur. Ce dernier affirme que la version des faits a été modifiée, pour laisser croire qu’il avait volé la voiture non pas en la conduisant mais en la poussant, et que les déclarations des policiers qui ont procédé à son arrestation sont contradictoires.

2.3Les 15 et 16 septembre 2011, à la demande de l’agent du ministère public, une évaluation psychiatrique de l’auteur a été effectuée et a établi qu’il présentait un trouble de la personnalité et un probable retard mental. Une expertise a également été réalisée par un médecin légiste, qui a constaté que l’auteur présentait un trouble de la personnalité sociale et un possible retard mental superficiel, ce qui le rendait inapte à témoigner. Le 16 septembre, l’agent du ministère public a décidé d’engager des poursuites pénales contre l’auteur et a ordonné son placement en détention au Centre de réadaptation psychosociale de Varonil.

2.4Le 22 septembre 2011, le juge du Neuvième tribunal pénal du District fédéral a décidé de soumettre à l’auteur la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables. Il a également ordonné au directeur du service de médecine légale du Tribunal supérieur de justice de désigner des experts en psychiatrie qui seraient chargés de déterminer le degré d’irresponsabilité de l’auteur. Présentés le 11 octobre 2011, les résultats de l’expertise ont montré que celui-ci présentait une déficience mentale permanente qui l’empêchait de comprendre le caractère illicite de ses actes et de témoigner devant les autorités judiciaires, et qu’il « avait besoin d’un traitement médico-psychiatrique permanent et strict, ainsi que d’une surveillance adéquate ».

2.5L’auteur affirme ne pas avoir été autorisé à témoigner, informé du déroulement de la procédure, ni averti qu’il était poursuivi dans le cadre de la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables. Le jour de son placement en détention, sa mère a demandé au juge du Neuvième tribunal pénal d’annuler l’assignation de l’avocat commis d’office et lui a communiqué les noms des avocats privés désignés pour défendre l’auteur. Le 23 septembre, le juge a néanmoins décidé de rejeter la désignation des avocats privés, au motif qu’au regard de l’article 462 du Code civil du District fédéral, la mère n’était pas la tutrice légale de l’auteur, qui était majeur et n’avait pas été déclaré pénalement irresponsable.

2.6Le 26 septembre 2011, l’auteur a présenté deux mémoires au Neuvième tribunal pénal. Il désignait, dans le premier, un nouveau conseil et demandait, dans le second, que soit annulée l’assignation de l’avocat commis d’office. L’auteur, par ce second mémoire, faisait appel de la décision du 22 septembre 2011. Le 28 septembre 2011, le juge du Neuvième tribunal pénal a rejeté ce recours, déclarant qu’il appartenait à l’avocat commis d’office de l’introduire et qu’il n’était pas informé de la désignation, par l’auteur, de son propre avocat. Le juge a également rejeté la demande de l’auteur de choisir librement son conseil.

2.7Le 13 octobre 2011, la mère de l’auteur a demandé, par l’intermédiaire de l’avocat commis d’office, au juge du Neuvième tribunal pénal d’ordonner la remise en liberté de l’auteur, arguant qu’elle se chargerait de ses soins, de son traitement et de sa surveillance. Le 17 octobre 2011, le juge a rejeté la demande au motif que le type de traitement qui serait administré à l’auteur n’avait pas été établi, ni la manière dont serait assurée sa surveillance. Il considérait donc que la demande n’était pas conforme aux prescriptions énoncées dans le rapport médical du 11 octobre 2011.

2.8L’audience principale s’est tenue les 20 et 26 octobre 2011, et celle menée dans le cadre de la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsable, le 11 novembre 2011. L’auteur n’a été convoqué ni n’a comparu à aucune de ces audiences.

2.9Le 5 décembre 2011, le juge du Neuvième tribunal pénal a condamné l’auteur pour vol et lui a imposé une mesure de sûreté de quatre ans, correspondant à un internement dans un établissement ou centre de réadaptation psychosociale du système pénal. En outre, le juge a ordonné qu’une fois sa peine exécutée, l’auteur soit confié à la garde de sa famille ou, à défaut, à celle des autorités de santé ou de la protection sociale. Le jugement a été notifié uniquement à l’avocat commis d’office et non à l’auteur, qui n’a pas été informé des recours qui lui étaient ouverts.

2.10Le 13 décembre 2011, le jugement de première instance est devenu exécutoire, aucun appel n’ayant été interjeté. L’auteur n’a pas été informé de l’ordonnance rendant le jugement exécutoire.

2.11Ce n’est qu’en janvier 2012, lors d’un rendez-vous avec l’avocat commis d’office, que la mère de l’auteur a appris que le jugement de première instance avait force exécutoire. À l’époque, elle a demandé à l’avocat d’introduire une requête incidente non spécifiée en vue d’obtenir le placement extérieur de l’auteur, démarche qui a toutefois été rejetée par le juge du Neuvième tribunal pénal.

2.12En juin 2012, la mère de l’auteur a de nouveau demandé le placement extérieur de l’auteur, mais a été déboutée. Afin de rechercher d’autres solutions, elle a également demandé à l’avocat commis d’office des copies du dossier, mais il ne lui en a pas remis.

2.13En 2014, la mère de l’auteur a demandé de l’aide à l’organisation Documenta, Análisis y Acción para la Justicia Social. En octobre de la même année, les avocats de cette organisation ont formé un recours en amparo direct pour contester le jugement du 5 décembre 2011.

2.14Dans son recours en amparo, l’auteur affirme que les garanties d’une procédure régulière n’ont pas été respectées, puisqu’il n’a pas été entendu lors du procès. Il soutient qu’il n’a pas été autorisé à désigner le défenseur de son choix, ni à produire des éléments de preuve à décharge, et que la présomption d’innocence n’a pas été respectée étant donné, notamment, qu’il avait été soumis à la procédure réservée aux personnes pénalement irresponsables. L’auteur a demandé au Tribunal de déroger au principe selon lequel les décisions judiciaires sont définitives, au motif que la négation de sa capacité juridique avait donné lieu à de graves violations des droits de la défense, puisqu’il n’avait pas eu la possibilité de contester le jugement rendu en première instance. Il dénonce l’inconstitutionnalité des textes de loi faisant référence à l’irresponsabilité pénale et à la procédure spéciale prévue par le Code pénal et le Code de procédure pénale du District fédéral pour les personnes déclarées pénalement irresponsables.

2.15Le recours en amparo a été formé devant le Septième tribunal collégial pénal du District fédéral. Le 24 novembre 2014, le Tribunal s’est déclaré incompétent, au motif que la décision attaquée ne revêtait pas de caractère définitif, le recours en amparo ne pouvant s’exercer qu’à l’égard de jugements définitifs. Soucieux de « ne pas laisser l’auteur sans moyens de défense », le Tribunal a décidé de renvoyer sa requête à un tribunal de district, pour qu’elle soit tranchée dans le cadre d’une procédure d’amparo indirect.

2.16Le 1er décembre 2014, l’auteur a contesté la décision du Tribunal collégial, estimant qu’une procédure d’amparo indirect ne pourrait réparer tous les griefs et toutes les violations relevés dans le cadre de la procédure. Dans son recours, l’auteur faisait valoir que le jugement qu’il contestait était définitif, puisqu’il avait force exécutoire et n’était pas susceptible des voies de recours ordinaires. Par ailleurs, l’auteur n’avait pas non plus eu la possibilité de faire appel de ce jugement au motif qu’il avait été exclu de la procédure pénale, dont il n’avait pas été tenu informé. Le Tribunal collégial avait toutefois déjà renvoyé l’affaire au Treizième tribunal pénal compétent pour les recours en amparo. Le 26 novembre 2014, ce dernier s’est déclaré compétent mais a rejeté la requête pour manquement au principe selon lequel les décisions judiciaires sont définitives. Le 9 décembre 2014, l’auteur a introduit un recours en annulation contre la décision susmentionnée devant le Tribunal collégial, arguant que le fait de ne pas être autorisé à former le moindre recours le privait de moyens de défense.

2.17Le 22 janvier 2015, le Tribunal collégial s’est prononcé sur le recours formé contre sa déclaration d’incompétence, confirmant sa décision au motif que le jugement contesté n’était pas « définitif » et que le juge de district saisi dans le cadre de la procédure d’amparo s’était déclaré compétent pour statuer.

2.18Le 29 janvier 2015, le Tribunal collégial s’est prononcé sur le recours en annulation, estimant que le juge de district avait compétence pour statuer sur la procédure d’amparo, mais pas sur la totalité du jugement. Il a donc ordonné au juge de se prononcer sur l’absence de notification du jugement de première instance et d’établir si l’auteur avait été empêché d’interjeter appel. À la demande de la défense, le Tribunal collégial a fait droit à la requête d’aménagement raisonnable visant à faire établir une version simplifiée de la décision. Il a en revanche rejeté la requête visant à ce qu’il en soit de même pour les autres décisions rendues dans le cadre de la procédure.

2.19L’auteur a demandé à étendre le recours en amparo indirect de sorte à contester la constitutionnalité des lois relatives à l’irresponsabilité pénale et des mesures de sûreté imposées au titre de la procédure réservée aux personnes pénalement irresponsables. Il a également demandé que tous les documents de la procédure soient établis dans une version simplifiée pour en faciliter la compréhension.

2.20Le 12 février 2015, le juge de district saisi du recours en amparo a rejeté la demande d’extension au motif que l’action en inconstitutionnalité engagée était sans lien avec l’affaire en l’espèce. Il a en outre rejeté la demande d’aménagement raisonnable au motif que lors du procès, l’auteur avait dûment été assisté par deux personnes pour exercer sa capacité juridique. Le 25 février 2015, l’auteur a de nouveau formé un recours en annulation contre la décision susmentionnée, affirmant que son droit à un recours effectif avait été violé puisqu’il n’avait pas eu la possibilité de contester les lois qui étaient contraires à la Convention et portaient atteinte à son droit d’accès à la justice. Le recours en annulation a été renvoyé au Septième tribunal colégial compétent pour les procédures d’amparo du District fédéral et la procédure d’amparo indirect a été suspendue, le temps que ledit Tribunal se prononce.

2.21Le 5 juin 2015, le Septième tribunal collégial compétent pour les procédures d’amparo s’est prononcé sur le recours en annulation, le déclarant partiellement fondé et ordonnant au juge pénal de statuer sur le défaut de notification du jugement et de son ordonnance d’exécution. En outre, selon la décision du tribunal, les actes initialement invoqués par l’auteur étaient sans lien avec les articles du Code pénal et du Code de procédure pénale dont il demandait qu’ils soient déclarés inconstitutionnels. Quant au grief tiré par l’auteur du refus du juge de district d’autoriser, comme pour le jugement, qu’une version simplifiée de toutes les décisions rendues dans le cadre de la procédure soit établie, le tribunal collégial a estimé qu’il était partiellement fondé, mais uniquement en ce qui concernait le jugement de condamnation.

2.22Se fondant sur la décision susmentionnée, le 29 juin 2015, le Tribunal pénal compétent pour les recours en amparo a statué sur le recours en amparo indirect. Il a estimé qu’en n’informant pas le représentant légal de l’auteur du jugement prononcé contre lui, le juge du Neuvième tribunal pénal du District fédéral avait violé le droit que l’auteur tenait de l’article 20 de la Constitution. Il lui a en outre ordonné de déclarer la nullité de la disposition donnant force exécutoire au jugement définitif et a également ordonné que ce dernier soit notifié au représentant légal de l’auteur.

2.23Afin d’obtenir une libération anticipée, l’auteur a sollicité auprès du Tribunal de l’application des peines du District fédéral un aménagement de peine sous la forme d’une remise partielle, en mettant en avant le travail de réadaptation psychosociale qu’il avait accompli au Centre de Varonil. La juge a demandé des précisions à l’auteur, estimant que sa requête ne remplissait pas les conditions définies par la loi. L’auteur a donc considéré que sa demande de remise partielle de peine pouvait être rejetée et que tout litige relatif à son droit d’obtenir ladite remise ne serait tranché qu’une fois la totalité de sa peine exécutée. Il a alors décidé de solliciter la mesure de placement extérieur prévue pour les personnes présentant une déficience psychosociale et régie par l’article 55 de la loi sur l’exécution des peines. Néanmoins, s’appuyant sur les rapports médicaux du conseil technique du Centre, la juge a débouté l’auteur de sa demande, les perspectives de réadaptation n’étant pas suffisamment établies.

2.24L’auteur affirme qu’il a été exclu de la procédure pénale engagée contre lui. À cet égard, il rappelle qu’il n’a été informé ni des décisions ni du jugement définitif prononcé et que par conséquent, il n’a pas pu contester le jugement de première instance rendu contre lui, ni former un recours en amparo direct, cette dernière démarche ne pouvant être engagée que si le demandeur a, au préalable, contesté le jugement. L’auteur a demandé qu’il soit dérogé à l’application de cette règle, compte tenu que cette législation pénale et les pratiques judiciaires, en niant sa capacité juridique, l’avaient privé de moyens de défense.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme que l’État partie a violé les droits qu’il tient des articles 5, 9, 12, 13, 14 et 19 de la Convention, lus conjointement avec l’article 4.

3.2L’auteur fait valoir que n’ayant pas été jugé sur la base de l’égalité avec les autres, puisqu’il avait été déclaré pénalement irresponsable et, à ce titre, avait fait l’objet d’une procédure spéciale, il a été victime de discrimination en raison de son handicap. Il affirme avoir été exclu de la procédure pénale, ne pas avoir eu la possibilité d’être jugé par un tribunal compétent et impartial, d’être présent à son procès, de présenter des preuves à décharge, de choisir librement son conseil, ni de bénéficier des voies de recours ordinaires prévues par le droit pénal, en particulier le recours en appel. Il soutient également que la « mesure de sûreté » qui lui a été imposée était discriminatoire, en ce qu’elle consistait non seulement en une sanction pénale mais également en un traitement médico-psychiatrique auquel il a été soumis contre son gré, du fait du « danger » qu’il représentait pour la société. En tant que personne handicapée, il n’a pu prétendre au bénéfice de la liberté anticipée, bien qu’il remplisse les conditions requises par la loi. Il affirme également que l’État partie a manqué à son obligation de procéder aux aménagements raisonnables dont il avait fait la demande, ainsi qu’à son obligation de modifier et abroger les éléments de sa législation susceptibles d’entraîner une discrimination à l’égard des personnes handicapées, en violation de l’article 5 de la Convention, lu seul et conjointement avec l’article 4.

3.3En ce qui concerne la violation de l’article 9 de la Convention, lu seul et conjointement avec l’article 4, l’auteur soutient que l’État partie a manqué à son obligation de lui garantir l’accès à l’information au cours de la procédure judiciaire. Actuellement, les personnes handicapées n’ont accès à aucune information sur le déroulement d’une procédure pénale et le contenu des lois pénales. L’auteur fait observer que l’État partie n’a pas pris de mesures législatives, administratives et autres pour assurer l’accès aux informations relatives aux procédures visant les personnes handicapées, ainsi que la communication entre les accusés et le système judiciaire, étant donné que, comme en l’espèce, elles sont privées du droit d’être présentes à leurs procès.

3.4L’auteur affirme qu’en niant sa capacité juridique, l’État partie a violé l’article 12 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4. Il soutient que son droit à une procédure équitable a été violé car il a été déclaré pénalement irresponsable et inapte à témoigner. Il conclut que la législation pénale et les pratiques en vigueur permettent d’exclure des procédures judiciaires les personnes présentant un handicap, au motif qu’elles sont jugées inaptes à se défendre.

3.5L’auteur affirme que son exclusion de la procédure a entraîné une violation de l’article 13 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4. Il indique également que le centre d’exécution des sanctions pénales, où il est enfermé, ne dispose d’aucun espace permettant au détenu et à son avocat de s’entretenir de manière privée. Il soutient qu’on ne lui a jamais lu les pièces de la procédure judiciaire le concernant, ni donné accès à une version simplifiée qui lui aurait facilité la compréhension de ces documents. De même, aucune mesure d’aménagement nécessaire n’a été prise pour lui permettre de s’exprimer.

3.6L’auteur affirme que la mesure de sûreté d’internement, prise à titre provisoire pour lui administrer un traitement médical à partir de son arrestation, et celle qui lui a été imposée après qu’il a été reconnu coupable du délit de vol constituent une violation de l’article 14 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4. Il estime avoir été jugé sans que son droit à une procédure régulière ait été respecté. Il renvoie également aux observations finales formulées par le Comité en septembre 2014, dans lesquelles celui-ci se déclarait préoccupé par le fait que les personnes handicapées étaient soumises à l’irresponsabilité pénale et par l’absence de garantie procédurale lorsqu’elles étaient jugées, et demandait à l’État partie de supprimer les mesures de sûreté qui prévoyaient l’administration forcée de traitements médicaux (CRPD/C/MEX/CO/1, par. 27 et 30 a)).

3.7L’auteur affirme que la législation pénale en vigueur viole l’article 19, lu conjointement avec l’article 4, puisqu’elle prévoit que les personnes déclarées pénalement irresponsables doivent être « remises » à leurs responsables légaux. Ainsi, au moment de l’exécution de sa peine par l’auteur, sa mère devait se présenter dans les locaux du Centre de réadaptation psychosociale de Varonil pour qu’il soit remis en liberté. Si cette condition n’était pas remplie, l’auteur ne pouvait être remis en liberté. Or, ce dernier affirme qu’en lui refusant le bénéfice d’une libération anticipée, l’État partie l’a privé de l’accès aux services sociaux propices à son développement et à son intégration, ce qui est contraire aux dispositions de l’article 19 de la Convention. En outre, les personnes handicapées qui purgent leur peine en prison sont doublement stigmatisées : elles sont considérées comme des « délinquants », mais également comme « dangereuses » et « inaptes ».

3.8L’auteur demande au Comité de constater une violation des articles susmentionnés et : a) qu’il soit reconnu publiquement, par la voie des médias, que l’État partie a violé ses droits ; b) que le Président du Tribunal supérieur de justice et le juge du Neuvième tribunal pénal du District fédéral, ainsi que le Secrétaire-greffier chargé de son affaire, lui présentent des excuses publiques, pour l’avoir considéré comme une personne « inapte » et l’avoir condamné sans qu’il puisse jouir des garanties minimales d’une procédure régulière, et pour la discrimination systématique dont il a fait l’objet pendant la procédure ; c) à être indemnisé pour la période pendant laquelle il a été injustement privé de liberté ; d) que soit établi à son intention un projet de vie qui, conformément aux principes de la Convention, lui permette d’avoir accès à une éducation et à des activités récréatives inclusives, ainsi qu’à une formation à l’emploi, et qu’on lui garantisse un emploi dignement rémunéré et conforme à ses souhaits ; e) que des garanties de non-répétition soient adoptées, notamment, aux fins d’harmonisation avec la Convention, la modification de la législation en vigueur en ce qui concerne l’irresponsabilité et la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables, l’interdiction de la négation de la capacité juridique des personnes handicapées visées par une procédure pénale, tant que le Code national de procédure pénale ne sera pas entré en vigueur, la mise en œuvre de campagnes de formation et de sensibilisation aux droits des personnes handicapées auprès des autorités et des membres de l’appareil judiciaire, des défenseurs publics et des agents du ministère public.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1Le 16 novembre 2015, l’État partie a remis ses observations sur la recevabilité de la communication et demandé que l’examen de la recevabilité soit effectué séparément de l’examen au fond, comme le prévoit le paragraphe 5 de l’article 70 du Règlement intérieur du Comité.

4.2Selon l’État partie, la communication doit être déclarée irrecevable étant donné que l’auteur n’a pas épuisé les recours internes bien que ceux-ci lui aient été pleinement accessibles. En outre, les examens auxquels les tribunaux se sont livrés n’ont pas permis d’établir qu’une violation des droits humains de l’auteur avait eu lieu. Bien que l’auteur ait été soumis à une procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables, son handicap n’avait eu aucune incidence sur le déroulement de ladite procédure. Au contraire, il a disposé des outils nécessaires pour faciliter le suivi de son dossier et s’est vu accorder les mêmes droits et la même capacité juridique que toute autre personne visée par une procédure judiciaire.

4.3L’État partie soutient qu’en ne faisant pas appel du jugement du 5 décembre 2011, l’auteur n’a pas utilisé la voie de recours appropriée pour faire valoir ses griefs. Le recours en amparo direct ne peut être introduit qu’une fois épuisées les voies de recours de première instance qui mettent fin au procès, en l’espèce l’appel. L’auteur a tenté de contester le jugement du 5 décembre 2011 au moyen du recours en amparo, alors que celui-ci était à l’évidence irrecevable. Bien que le jugement du 5 décembre 2011 lui ait été notifié par l’intermédiaire de son représentant légal, conformément à l’ordonnance du Treizième tribunal pénal de district compétent pour les recours en amparo indirect, l’auteur n’a pas interjeté appel. Ainsi, le 5 août 2015, les demandes de l’auteur ayant été accueillies, la décision rendue à l’issue du recours en amparo était réputée avoir été exécutée. Enfin, l’auteur n’a pas contesté la régularité de la décision du 5 août 2015 constatant l’exécution de la protection constitutionnelle, conformément à la loi relative à l’amparo.

4.4L’État partie demande donc au Comité de déclarer la présente communication irrecevable au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés et parce qu’elle est manifestement dénuée de fondement.

4.5Le 16 mars 2016, l’État partie a soumis des informations complémentaires concernant la recevabilité, ainsi que ses observations sur le fond de la communication. S’agissant de la recevabilité, il ajoute que l’auteur n’a pas épuisé les recours internes qui lui étaient ouverts pour contester le refus du juge de l’autoriser à choisir librement son conseil. Face à ce refus, l’auteur aurait pu soumettre une requête incidente non spécifiée et, s’il n’avait pas obtenu gain de cause, interjeter appel et, pour finir, introduire un recours en amparo indirect. L’État partie ajoute que la mère de l’auteur n’a pas non plus épuisé les recours internes disponibles.

4.6Sur le fond, l’État partie souligne que la décision de soumettre l’auteur à la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables n’a pas été laissée à l’entière discrétion des autorités compétentes, mais s’appuyait sur les certificats médicaux fournis par la famille de l’auteur, les antécédents médicaux et les certificats médicaux délivrés par des spécialistes. L’ensemble de ces éléments devait permettre d’analyser et d’établir des mesures appropriées pour garantir que l’auteur ait accès à la justice dans des conditions d’égalité avec les autres.

4.7L’État partie souligne que l’internement des personnes handicapées vise à leur permettre d’accéder à la justice sur la base de l’égalité avec les autres, moyennant, notamment, des aménagements procéduraux. En l’espèce, les certificats remis par les médecins et les antécédents médicaux ont permis d’établir que l’auteur présentait un trouble de la personnalité antisociale et un probable « retard mental superficiel », ce qui le rendait inapte à témoigner. Au cours de la procédure, le juge en charge de l’affaire a établi que l’auteur était socialement responsable de la commission du délit de vol aggravé et a ordonné son internement dans un établissement où il pourrait recevoir un traitement adapté pendant quatre ans. L’État partie conclut que le placement en établissement psychiatrique et la désignation d’un défenseur public satisfont aux normes reconnues par la Convention et d’autres instruments juridiques internationaux.

4.8L’État partie fait valoir que la décision de soumettre l’auteur à la procédure réservée aux personnes pénalement irresponsables s’est appuyée sur la compréhension que ce dernier avait de l’infraction commise, ce qui ne signifiait pas qu’il serait statué sur sa capacité juridique. En outre, un tuteur, en l’occurrence l’avocat commis d’office, lui a été assigné pour l’accompagner. Cette démarche avait pour but de faciliter l’accès à la justice d’une personne dont la capacité juridique était reconnue mais qui avait du mal à comprendre l’infraction qu’elle avait commise, en mettant à sa disposition les outils adaptés à sa défense. L’avocat a présenté des preuves et des arguments et formé des appels pour défendre l’auteur. Il a informé à diverses reprises l’auteur et sa famille du déroulement de la procédure pénale. En outre, l’auteur a exercé divers recours par l’intermédiaire de ses conseils privés et de l’avocat commis d’office. L’État partie considère donc que la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables était un outil adéquat pour assurer à l’auteur l’accès à la justice sur la base de l’égalité avec les autres, et demande au Comité de constater qu’aucune violation des droits de l’auteur n’a été commise.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie

5.1Le 22 mars 2016, l’auteur a fait part de ses commentaires sur les observations de l’État partie. Il fait observer que les recours que l’État partie considère comme adéquats ne sont pas utiles, puisque la négation de sa capacité juridique l’a privé de l’accès à la justice dans des conditions d’égalité avec les autres.

5.2Bien que le recours en appel soit, en droit pénal mexicain, le meilleur moyen pour contester un jugement de première instance, il n’est pas utile pour les personnes déclarées irresponsables puisque l’accès aux voies de recours et, plus généralement, à la justice, leur est interdit. Les décisions n’ont jamais été notifiées personnellement à l’auteur, qui n’a jamais été informé des recours disponibles. On ne peut donc pas dire qu’il a décidé de ne pas former de recours.

5.3L’auteur considère également que le recours en appel ne permet pas d’établir la réalité d’une violation des droits de l’homme reconnus par la Convention, ni de réparer les violations des garanties judiciaires subies par les personnes handicapées dans le cadre de la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables.

5.4Selon l’auteur, la négation de la capacité juridique des personnes irresponsables est contraire à l’obligation de l’État partie de garantir des conditions d’égalité et la non‑discrimination. Or, une telle discrimination est de jure puisque le Code de procédure pénale autorise l’application de la procédure spéciale. Enfin, le juge du Treizième tribunal qui a ordonné qu’il soit remédié, au moyen de la décision rendue dans le cadre de la procédure en amparo, à la non-notification du jugement, en a informé l’auteur à travers son représentant légal et non pas personnellement. Lorsqu’il a été remédié à cette situation, l’auteur était sous la tutelle de l’État et la notification a été faite au domicile de sa mère. Le jugement ne lui ayant pas été notifié personnellement, l’auteur n’a donc pas pu interjeter appel.

5.5Selon l’auteur, cette situation a conduit à une violation de son droit d’être informé personnellement du jugement et de se faire expliquer celui-ci. Il estime ne pas avoir fait un usage erroné des voies de recours puisqu’étant dans l’incapacité de faire appel, il a été privé de moyens de défense. Les autorités n’ont pas corrigé leurs erreurs et il n’a pas eu accès à un recours utile.

5.6Le 18 mai 2016, l’auteur a soumis de nouveaux commentaires. En ce qui concerne l’argument de l’État partie selon lequel il devait épuiser les recours disponibles pour contester le refus du juge de le laisser choisir librement son conseil, l’auteur indique que cette décision ne lui a pas été notifiée et qu’il n’a pas eu à sa disposition les outils nécessaires pour se défendre. Il fait également valoir qu’on ne pouvait exiger de sa mère qu’elle épuise les recours disponibles pour contester la décision interdisant à l’auteur de choisir librement son conseil, puisque l’État partie était tenu de respecter sa capacité juridique d’agir en son propre nom.

5.7L’auteur ajoute que la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables équivaut à une sorte de mise sous tutelle, puisque la participation d’une tierce personne est nécessaire pour agir en lieu et place de la personne handicapée et la «prendre en charge». L’irresponsabilité conduit une personne à se soumettre à une procédure pénale dépourvue de garanties procédurales et s’accompagne de mesures de sûreté contraignantes destinées à protéger la société et la personne elle-même du danger qu’elle est censée représenter. Cette procédure repose sur les seuls examens médicaux pratiqués. Dès lors que ceux-ci établissent que l’auteur n’est pas en capacité de témoigner, ils servent de justification au juge pour exclure celui-ci de la procédure pénale dont il fait l’objet.

5.8L’auteur estime également que les mesures de sûreté qui sont imposées dans le cadre de la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables privent les personnes handicapées de leur liberté, sans que l’on puisse contrôler la durée d’une telle mesure. Ces mesures de sûreté limitent également la possibilité de bénéficier des avantages de réduction de peine qu’offre la libération anticipée. Le Code pénal du District fédéral dispose qu’une fois le traitement terminé, l’autorité compétente remet la personne déclarée pénalement irresponsable à sa famille pour qu’elle la prenne en charge, ou à défaut, la confie aux autorités de la santé ou de la protection sociale, pour qu’elles prennent les mesures prévues par la loi. Enfin, l’auteur souligne que sa situation illustre à quel point le droit d’accéder à la justice et à une procédure régulière tout comme le droit à la liberté et à la sécurité de la personne sont, de manière systématique et généralisée, bafoués par l’inobservation par l’État partie de ses obligations conventionnelles et par le modèle social du handicap.

Observations supplémentaires des parties

6.1Le 27 mai 2016, l’État partie a réaffirmé que la communication était irrecevable car les recours internes n’avaient pas été épuisés. Il fait également valoir que la décision de soumettre l’auteur à la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables ne signifiait pas que ce dernier était privé de sa capacité juridique. Une telle situation ne peut résulter que d’une mise sous tutelle, régie par l’article 904 du Code de procédure civile, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce. L’auteur a été dûment accompagné, par l’avocat commis d’office.

6.2L’État partie fait valoir qu’à partir du 23 juillet 2015, le Neuvième tribunal pénal du District fédéral a notifié le jugement définitif du 5 décembre 2011 au représentant légal de l’auteur, à l’adresse indiquée dans le dossier. En l’absence de réponse, un avis de passage a été laissé au domicile à quatre reprises, comme le prévoient les articles 80 et 86 du Code de procédure pénale du District fédéral. Cette notification permettait à l’auteur et à ses représentants légaux d’interjeter appel, ce qu’ils n’ont pas fait. Les recours internes n’ont donc pas été épuisés.

6.3Le 16 août 2016, l’auteur a fait part d’observations supplémentaires, reprenant ses arguments tirés de la négation de sa capacité juridique et de l’absence de notification personnelle.

6.4Le 5 septembre 2016, l’État partie a répété ses arguments précédents.

Interventions de tiers

7.1Le 13 juin 2017, les avocates Maria Florencia Hegglin et Lucila Bernardini, et le docteur Ezequiel Mercurio ont présenté trois interventions, accompagnées de l’autorisation écrite de l’auteur de la communication. Le 15 juin 2017, le Groupe de travail des communications a autorisé ces interventions, au titre du paragraphe 3 de l’article 72 du Règlement intérieur du Comité.

7.2La première intervention renvoie à l’obligation des États parties de prendre des mesures pour promouvoir les droits des personnes handicapées et lutter contre la discrimination. À cet égard, les États parties doivent procéder aux aménagements procéduraux nécessaires et adaptés, à chaque étape de la procédure judiciaire, y compris pendant l’enquête et les autres étapes préliminaires.

7.3La deuxième intervention montre en quoi la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables est contraire aux droits des personnes handicapées. L’irresponsabilité pénale d’une personne est déclarée sur la base d’un diagnostic médical. Dès lors, cette personne est exclue de la procédure pénale et ses droits fondamentaux sont restreints : elle perd sa qualité de sujet titulaire de droits pour être considérée comme un objet de l’intervention d’autres personnes habilitées à agir à sa place. Dans ce processus, le handicap psychosocial est la seule raison qui justifie une telle restriction des droits et des garanties. Par ailleurs, l’imposition de mesures de sûreté sur le fondement de la dangerosité est contraire à la Convention puisqu’elle est repose sur un modèle médical dans lequel le handicap psychosocial ou intellectuel conduit automatiquement à un état d’irresponsabilité permanente. La personne cesse d’être un sujet de droit pour devenir un objet d’intervention, qu’il faut protéger.

7.4La troisième intervention porte sur l’application d’une mesure de sûreté fondée sur la dangerosité de l’auteur. Cette mesure, qui répond à un critère de protection et de défense sociales, n’est pas conforme aux normes internationales relatives au traitement des personnes handicapées. En l’espèce, le recours à la mesure de sûreté est contraire à l’esprit des articles 9, 12, 14, 19 et 25 de la Convention puisqu’il existe d’autres dispositifs moins restrictifs et qui respectent l’autonomie et la dignité de la personne, comme l’hôpital de jour ou le traitement à domicile sous surveillance.

Observations de l’État partie sur les interventions des tiers

8.1Le 18 août 2017, l’État partie a fait part de ses observations sur les interventions des tiers. Il réaffirme que la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables n’exclue pas ces dernières, puisqu’elles sont représentées et sont soumises à cette procédure pour être traitées dans des conditions d’égalité avec toute autre personne qui aurait commis une infraction.

8.2L’État partie soutient que, dans le cadre de ses engagements internationaux, il a entrepris un important travail législatif afin d’améliorer le système judiciaire. Dans le nouveau système pénal accusatoire, les dispositions relatives à la procédure applicable aux personnes pénalement irresponsables ont été réformées. Si la législation, dans sa version antérieure, n’était pas contraire aux droits de l’homme, de nouveaux critères ont été établis qui offrent aux parties une plus grande certitude juridique quant aux mécanismes appliqués pour déterminer l’irresponsabilité pénale.

B.Examen de la recevabilité et examen au fond

Examen de la recevabilité

9.1Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 2 du Protocole facultatif et à l’article 65 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif.

9.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément aux dispositions de l’alinéa c) de l’article 2 du Protocole facultatif, qu’il n’avait pas déjà examiné la même question et que la question n’avait pas déjà été examinée ou n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

9.3En ce qui concerne les allégations de l’auteur au sujet de la violation de l’article 19 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4 (par. 3.7 ci-dessus), le Comité note qu’aucune information spécifique n’a été fournie pour ce qui est de la violation présumée du droit de l’auteur de vivre de manière indépendante et de s’insérer dans la société. Par conséquent, le Comité estime que ce grief n’est pas suffisamment étayé et le déclare irrecevable au regard de l’alinéa e) de l’article 2 du Protocole facultatif.

9.4Le Comité prend note des arguments de l’État partie relatifs au non-épuisement des recours internes, selon lesquels l’auteur a eu accès à toutes les voies de recours possibles prévues par les règles de procédure, sans être, à aucun moment, entravé dans son droit de les exercer. L’État partie fait également valoir que l’auteur n’a pas utilisé la voie de recours appropriée pour faire valoir ses griefs, puisqu’il a eu la possibilité de contester le jugement définitif en interjetant appel, ce qu’il n’a pas fait. Selon l’État partie, l’auteur a eu à nouveau la possibilité de faire appel de sa condamnation lorsque le Treizième tribunal de District a ordonné que celle-ci lui soit notifiée par l’intermédiaire de son représentant légal. Toutefois, le Comité prend note de l’affirmation de l’auteur selon laquelle la négation de sa capacité juridique l’a empêché d’accéder à la justice sur la base de l’égalité avec les autres, puisqu’il a été exclu de la procédure pénale et n’a pas été autorisé à former lui-même les recours. Le Comité note également que l’auteur soutient n’avoir été informé ni de sa condamnation ni de la possibilité de former le moindre recours, et que par conséquent il ne peut être dit qu’il avait décidé de ne pas faire appel.

9.5Le Comité constate, à la lecture des pièces présentées, que l’auteur n’a pas pu participer directement à la procédure et que, par conséquent, il n’a pas eu accès aux recours prévus par la loi. Il note que toutes les notifications effectuées dans le cadre de la procédure pénale ont eu pour destinataire l’avocat commis d’office de l’auteur, en ce compris le jugement qui le reconnaît coupable du délit de vol. Faute d’avoir été informé à temps, l’auteur n’a donc pas pu contester le jugement de première instance prononcé contre lui. Le Comité observe également que l’auteur a formé un recours en amparo dans lequel il a demandé qu’il soit dérogé au principe selon lequel les décisions judiciaires sont définitives, puisqu’il n’a pas eu la possibilité d’interjeter appel du jugement, faute d’en avoir été informé. Le Tribunal a rejeté la demande de dérogation et s’est déclaré incompétent pour statuer sur la procédure d’amparo direct, renvoyant l’affaire pour que soit formé un recours d’amparo indirect. La juridiction saisie de ce recours s’est également déclarée incompétente et, pour ne pas priver l’auteur de moyens de défense, a ordonné au Neuvième tribunal pénal de notifier à l’auteur le jugement de condamnation rendu le 5 décembre 2011, par l’intermédiaire de son représentant légal. Le Comité estime que le fait que le jugement définitif n’a pas été notifié en personne à l’auteur et l’impossibilité dans laquelle celui-ci se trouvait de participer directement aux différents étapes de la procédure judiciaire engagée contre lui l’ont empêché d’avoir accès aux recours prévus par la loi. En outre, le Comité estime qu’on ne pouvait pas attendre de l’auteur qu’il dépose un autre recours après que le jugement a été notifié à son représentant légal le 23 juillet 2015, soit près de quatre ans après son prononcé. Dans ce contexte, le Comité rappelle qu’en application de l’alinéa d) de l’article 2 du Protocole facultatif, seuls les recours qui ont une chance raisonnable d’être accueillis et qui n’excèdent pas des délais déraisonnables sont examinés. Compte tenu de ce qui précède et eu égard aux limites imposées à l’auteur en application de la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables, le Comité estime que ce dernier a fait suffisamment d’efforts pour faire valoir ses griefs devant les autorités nationales. La communication est par conséquent recevable au regard de l’alinéa d) de l’article 2 du Protocole facultatif.

9.6En conséquence, et en l’absence de tout autre obstacle à la recevabilité, le Comité déclare la communication recevable au regard de l’article 2 du Protocole facultatif, en ce qui concerne les allégations de violation formulées par l’auteur au titre des articles 5, 9, 12, 13 et 14, lus conjointement avec l’article 4 de la Convention, et procède à leur examen quant au fond.

Examen au fond

10.1Conformément à l’article 5 du Protocole facultatif et au paragraphe 1 de l’article 73 de son règlement intérieur, le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui avaient été communiquées.

10.2En ce qui concerne les allégations de violation de l’article 5 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4, le Comité note que, selon l’auteur, l’application de la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables est discriminatoire à l’égard des personnes handicapées et que l’application d’une telle procédure restreint les droits de ces personnes lorsqu’elles sont jugées. Le Comité note également que, selon l’État partie, l’application de cette procédure ne signifie pas que l’auteur a été traité différemment en raison de son handicap, mais qu’on a mis à sa disposition les outils nécessaires pour faciliter le suivi de son dossier et qu’il s’est vu accorder les mêmes droits que toute autre personne visée par une procédure judiciaire.

10.3Le Comité rappelle que l’article 5 de la Convention exige des États parties qu’ils reconnaissent que toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit sans discrimination à l’égale protection et à l’égal bénéfice de la loi. Les États parties doivent, afin de promouvoir l’égalité et d’éliminer la discrimination, prendre toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que des aménagements raisonnables soient apportés. Le Comité rappelle également que la discrimination peut résulter de l’effet discriminatoire d’une règle ou d’une mesure dénuée de toute intention discriminatoire, mais qui touche de manière disproportionnée les personnes handicapées. En l’espèce, la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables, telle que prévue dans le Code de procédure pénale du District fédéral, établit les règles à suivre dans le cadre d’une procédure pénale visant une personne qui présente un handicap psychosocial ou intellectuel. Par conséquent, la question dont est saisi le Comité est de savoir si la différence de traitement dont l’auteur a fait l’objet conformément à la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables était discriminatoire.

10.4Le Comité fait observer que, au titre de la procédure spéciale, l’autorité judiciaire doit apprécier le comportement et l’expression de l’intéressé, commettre un avocat d’office et rendre l’ordonnance soumettant l’auteur à la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables. Pour déterminer « le degré d’irresponsabilité ou de déficience mentale, le juge “pourra prendre les dispositions qui s’imposentˮ ». En l’espèce, l’auteur a été accusé le 14 septembre 2011 d’avoir volé un véhicule. Dans le cadre des procédures menées tant par la Fiscalía que par le Tribunal pénal, il a été décidé qu’il convenait d’appliquer la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables. Cette décision reposait sur une expertise médico-légale selon laquelle l’auteur présentait un « trouble de la personnalité sociale » et un « possible retard mental superficiel », ce qui le rendait inapte à témoigner. Comme l’attestent les pièces qu’il a présentées, l’auteur n’a jamais eu la possibilité de témoigner ni de contredire les déclarations des policiers qui l’avaient arrêté. Il n’a pas pu choisir librement son défenseur, qui a été commis d’office par l’autorité judiciaire. En outre, il n’a pas bénéficié de l’accompagnement ou des aménagements raisonnables qui lui auraient permis d’exercer sa défense matérielle. Les documents présentés montrent également que l’auteur n’a jamais été convoqué aux audiences durant la procédure pénale. Eu égard à son handicap psychosocial et intellectuel, il a été soumis à une procédure spéciale qui l’a empêché de participer directement et d’introduire des recours, et dans laquelle son droit à une procédure régulière n’a pas été garanti. Tout en reconnaissant qu’il peut y avoir, dans certains cas, des exceptions aux garanties d’une procédure régulière, le Comité note qu’en l’espèce, rien ne justifie que ces garanties n’aient pas été respectées. La procédure n’a pas non plus permis de garantir à l’auteur qu’il bénéficierait d’aménagements procéduraux. En conséquence, le Comité estime que l’application de la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables, telle qu’elle est prévue dans le Code de procédure pénale du District fédéral, a donné lieu à un traitement discriminatoire à l’égard de l’auteur, en violation de l’article 5 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4.

10.5En ce qui concerne les griefs tirés de l’article 9 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4, le Comité note que l’auteur affirme que l’État partie a manqué à son obligation d’assurer l’accès à l’information pendant la procédure pénale, puisqu’il n’existe à l’heure actuelle aucune information sur la législation pénale dans un format accessible. Le Comité constate que l’État partie n’a pas indiqué dans quelle mesure les informations relatives aux procédures pénales engagées contre l’auteur ont été transmises dans un format accessible. Conformément au paragraphe 1 et à l’alinéa f) du paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention, les États parties doivent prendre des mesures appropriées pour assurer l’accès des personnes handicapées, sur la base de l’égalité avec les autres, à l’information et pour promouvoir des formes appropriées d’aide et d’accompagnement des personnes handicapées afin de leur assurer l’accès à l’information. En l’espèce, le Comité note qu’en raison de son handicap intellectuel et psychosocial, l’auteur n’a pas été pris en compte dans la procédure et n’a pas eu accès aux informations y afférentes. Toutes les informations relatives à la procédure judiciaire et aux actes de procédure ont été communiquées à l’avocat commis d’office. Le Comité note également que la demande soumise par l’auteur au juge de District saisi du recours en amparo, tendant à ce que soit établie une version simplifiée des décisions, a été rejetée, au motif qu’il était « dûment assisté par les avocats qu’il avait lui-même désignés ». Une seule des décisions rendues par le Tribunal collégial pénal a été établie dans une version accessible. Pour les raisons susmentionnées, le Comité estime que le fait que l’auteur n’a pas pu participer à la procédure engagée contre lui et le refus du tribunal d’établir une version simplifiée des décisions rendues dans le cadre de la procédure d’amparo constituent une violation de l’article 9 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4.

10.6Le Comité prend également note des allégations de l’auteur selon lesquelles, ayant été déclaré pénalement irresponsable, il a été privé de sa capacité juridique à se défendre, dans le cadre de la procédure, dans des conditions d’égalité avec les autres. À cet égard, il rappelle qu’en application de l’article 12, les États parties ont l’obligation de reconnaître que les personnes handicapées jouissent de la capacité juridique dans tous les domaines, sur la base de l’égalité avec les autres. Les États Parties ont également l’obligation de prendre des mesures appropriées pour donner aux personnes handicapées accès à l’accompagnement dont elles peuvent avoir besoin pour exercer leur capacité juridique. Selon l’État partie, la décision de soumettre l’auteur à la procédure réservée aux personnes pénalement irresponsables reposait sur la compréhension que ce dernier avait de l’infraction commise, ce qui ne signifiait pas qu’il serait statué sur sa capacité juridique. Le Comité a estimé que l’auteur s’étant vu déclaré « inapte à témoigner », il a été privé de la possibilité d’exercer sa capacité juridique de plaider non coupable, de contester les éléments de preuve à charge, de désigner librement son conseil et de contester les décisions qui lui portaient préjudice. Le Comité considère que si les États parties ont une certaine marge d’appréciation lorsqu’il s’agit de déterminer les aménagements procéduraux à mettre en place pour permettre aux personnes handicapées d’exercer leur capacité juridique, ils sont néanmoins tenus de respecter les droits et les garanties procédurales de l’intéressé. En l’espèce, l’auteur n’a pas eu cette possibilité, ni bénéficié de l’accompagnement ou des aménagements appropriés pour exercer ses droits. Le Comité rappelle que, conformément à son observation générale no 1 (2014) sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité, pour pouvoir faire valoir leurs droits et exécuter leurs obligations sur la base de l’égalité avec les autres, les personnes handicapées doivent être reconnues en droit comme ayant la capacité d’ester en justice sur la base de l’égalité avec les autres (par. 38). Le Comité considère donc que la situation dont il est saisi constitue une violation des droits que l’auteur tient de l’article 12 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4.

10.7En ce qui concerne la violation de l’article 13 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4, le Comité note que, selon l’auteur, celui-ci a été exclu de la procédure pénale engagée contre lui. Il prend note également des arguments de l’État partie selon lesquels la décision d’appliquer la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables s’est appuyée sur les certificats médicaux afin d’assurer à l’auteur l’accès à la justice, dans des conditions d’égalité avec les autres. Le Comité considère que cet objectif n’a pas été atteint, puisque les informations fournies ne permettent pas de conclure que l’action de l’avocat commis d’office ait permis à l’auteur de participer effectivement à la procédure. Le Comité rappelle que, en application de l’article 13 de la Convention, les États parties ont l’obligation d’assurer l’accès effectif des personnes handicapées à la justice, sur la base de l’égalité avec les autres, y compris au moyen d’aménagements procéduraux, afin de faciliter leur participation effective, directe ou indirecte, à toutes les procédures judiciaires. En l’espèce, les autorités judiciaires ont, à plusieurs reprises, refusé à l’auteur la possibilité d’exercer ses droits puisque : a) l’intéressé, dès le début de la procédure pénale, n’a pas pu participer à la procédure judiciaire, et n’a pas été autorisé à témoigner, à contester les preuves présentées, et à être présent lors des audiences ; b) il n’a pas été informé des décisions rendues ; c) les tentatives de l’auteur d’intervenir dans la procédure, par exemple lorsqu’il a formé un recours contre la décision du juge du Neuvième tribunal pénal du 22 septembre 2011 ou a demandé que l’assignation de l’avocat d’office soit annulée afin qu’il puisse désigner librement son conseil, se sont heurtées à une fin de non-recevoir du juge ; d) l’application de la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables n’a pas donné lieu à l’adoption d’aménagements procéduraux permettant à l’auteur d’accéder à la justice dans des conditions d’égalité avec les autres. Même pour réparer l’absence de notification du jugement définitif, le tribunal a ordonné que la notification ait de nouveau lieu par l’intermédiaire du représentant légal de l’auteur, ce qui a privé ce dernier de la possibilité de participer activement à la procédure. Le Comité considère donc que l’État partie a violé l’article 13 de la Convention, lu conjointement avec l’article 4.

10.8En ce qui concerne les affirmations de l’auteur relatives à sa détention, le Comité réaffirme que la liberté et la sécurité de la personne sont parmi les droits les plus précieux auxquels chacun puisse prétendre. Toutes les personnes handicapées, et plus particulièrement celles qui présentent un handicap intellectuel ou psychosocial, ont droit à la liberté en vertu de l’article 14 de la Convention. En l’espèce, le Comité note qu’une mesure de sûreté provisoire a été imposée à l’auteur dès le début de la procédure pénale et ensuite, après sa condamnation (mesure de sûreté et quatre ans d’internement). Bien qu’il ait qualifié de « minime » son degré de dangerosité, le juge qui a statué sur la responsabilité pénale de l’auteur a néanmoins décidé de l’interner dans un établissement de réadaptation psychosociale du système pénal du District fédéral. À cet égard, le Comité note que, dès le début, l’internement de l’auteur a reposé uniquement sur les certificats médicaux le concernant et sur le danger potentiel qu’il représentait pour la société. Le Comité rappelle qu’en application de l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 14 de la Convention, en aucun cas l’existence d’un handicap ne justifie une privation de liberté. De même, selon les Principes de base et lignes directrices des Nations Unies sur les voies et procédures permettant aux personnes privées de liberté d’introduire un recours devant un tribunal, l’internement en raison d’un handicap psychosocial ou intellectuel réel ou supposé est interdit et les États doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher les placements d’office ou internements en raison d’un handicap. D’après les documents présentés, le principal argument avancé pour justifier l’internement de l’auteur était qu’il était handicapé et avait besoin d’un traitement médical. Le Comité note en outre que la demande de placement extérieur soumise par l’auteur et sa mère a été rejetée par le juge au motif que la manière dont serait mis en place le traitement requis par l’auteur n’avait pas été déterminée. Ainsi, le Comité constate que le handicap de l’auteur est devenu la cause profonde de sa privation de liberté, ce qui constitue une violation de l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 14 de la Convention.

10.9Le Comité rappelle que, conformément à l’article 4 de la Convention, les États parties ont l’obligation générale de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir et promouvoir le plein exercice de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales des personnes handicapées. À cet égard, et compte tenu des arguments exposés dans les paragraphes précédents, le Comité conclut que l’État partie a manqué aux obligations qui lui incombent au titre des articles 5, 9, 12, 13, 14 et 19 de la Convention, lus conjointement avec l’article 4.

C.Conclusion et recommandations

11.Le Comité, agissant en vertu de l’article5 du Protocole facultatif, considère que l’État partie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles5, 9, 12, 13 et 14 de la Convention, lus conjointement avec l’article 4. En conséquence, le Comité adresse à l’État partie les recommandations suivantes :

a)S’agissant de l’auteur, l’État partie a pour obligation :

i)De lui assurer une réparation effective, y compris le remboursement de tous frais de justice qu’il aura engagés, ainsi qu’une indemnisation ;

ii)De reconnaître publiquement la violation de ses droits que font apparaître les présentes constatations et d’adopter toute autre mesure de satisfaction appropriée ;

iii)De rendre publiques les présentes constatations et de les diffuser largement, sous des formes accessibles, auprès de tous les secteurs de la population.

b)De façon générale, l’État partie est tenu de prendre des mesures pour empêcher que des violations analogues ne se reproduisent. À cet égard, le Comité renvoie aux recommandations qui figurent dans ses observations finales (CRPD/C/MEX/CO/1, par. 28 et 30) et demande à l’État partie :

i)De modifier, en étroite consultation avec les personnes handicapées et les organisations qui les représentent, la législation pénale du District fédéral et tous les textes de loi équivalents ou connexes en vigueur à l’échelle de l’État fédéral et des États fédérés, en ce qui concerne l’irresponsabilité pénale et la procédure spéciale réservée aux personnes pénalement irresponsables, de telle sorte que soit garantie leur conformité aux principes inscrits dans la Convention, afin d’assurer, pour les personnes handicapées, le respect des garanties d’une procédure régulière ;

ii)D’examiner l’application des mesures de sûreté impliquant l’internement en vue d’un traitement médico-psychiatrique et de prendre les mesures nécessaires pour promouvoir des solutions de remplacement conformes aux principes inscrits dans la Convention ;

iii)De veiller à ce que les personnes présentant un handicap intellectuel et psychosocial aient accès aux mesures d’accompagnement et d’aménagement raisonnables dont elles peuvent avoir besoin pour exercer leur capacité juridique devant les tribunaux ;

iv)De veiller à ce qu’une formation appropriée et régulière concernant le domaine d’application de la Convention et du Protocole facultatif s’y rapportant soit dispensée aux juges, aux membres de l’appareil judiciaire, aux agents du ministère public et au personnel qui facilitent le fonctionnement de la justice.

12.Conformément à l’article 5 du Protocole facultatif et à l’article 75 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie est invité à soumettre au Comité, dans un délai de six mois, une réponse écrite, dans laquelle il indiquera toute mesure qu’il aura prise à la lumière des présentes constatations et recommandations du Comité.