Nations Unies

CCPR/C/HRV/CO/3

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

30 avril 2015

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ homme

Observations finales concernant le troisième rapport périodique de la Croatie *

Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de la Croatie (CCPR/C/HRV/3) à ses 3145e et 3146e séances, les 23 et 24 mars 2015 (CCPR/C/SR.3145 et 3146). À ses 3157e et 3158e séances, le 31 mars 2015, il a adopté les observations finales ci-après (voir CCPR/C/SR.3157 et 3158).

A.Introduction

Le Comité exprime sa gratitude à l’État partie, qui a accepté la nouvelle procédure facultative pour la présentation des rapports et a élaboré son troisième rapport périodique en réponse à la liste des points établie avant la soumission des rapports (CCPR/C/HRV/Q/3) conformément à cette procédure. Il se félicite de cette occasion de renouer le dialogue avec l’État partie au sujet des mesures adoptées par celui-ci pendant la période visée par le rapport pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte. Il remercie l’État partie des réponses orales apportées par la délégation ainsi que des renseignements complémentaires fournis par écrit.

B.Aspects positifs

Le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives et institutionnelles suivantes de l’État partie:

a)Adoption de la loi contre la discrimination et des modifications y relatives, en 2012;

b)Adoption de la loi relative à l’asile, en 2010;

c)Modification du Code pénal, qui prévoit désormais des sanctions plus lourdes pour les crimes de haine, en 2013;

d)Adoption du Programme national pour la protection et la promotion des droits de l’homme (2013-2016);

e)Adoption de la Politique nationale pour l’égalité des sexes (2011-2015);

f)Adoption de la Stratégie nationale pour l’égalisation des possibilités offertes aux personnes handicapées (2007-2015);

g)Adoption du Plan national de lutte contre la discrimination (2008-2013).

Le Comité accueille avec satisfaction la ratification du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, en 2013.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Institution nationale des droits de l’homme

Le Comité salue l’adoption en 2012 de la loi relative au Médiateur, qui exige de ce dernier une coopération avec les médiateurs spécialisés, mais relève avec regret des insuffisances dans le suivi et la mise en œuvre des recommandations du Médiateur. Il est préoccupé par le fait que le Bureau du Médiateur, malgré une récente augmentation des fonds qui lui sont alloués, dispose de ressources humaines et financières limitées (art. 2).

L ’ État partie devrait fournir au Bureau du Médiateur les ressources financières et humaines nécessaires pour qu ’ il puisse s ’ acquitter de son mandat efficacement et en toute indépendance, conformément aux Principes concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l ’ homme (Principes de Paris) (résolution  48/134 de l ’ Assemblée générale, annexe). L ’ État partie devrait aussi poursuivre ses efforts pour garantir la coordination entre les différents bureaux de médiateurs afin d ’ éviter les chevauchements de tâches, et s ’ efforcer d ’ appliquer avec davantage de diligence et de célérité les recommandations du Médiateur.

Diffusion du Pacte

Le Comité relève que les instruments internationaux priment le droit interne dans l’État partie, mais s’inquiète du nombre limité d’affaires dans lesquelles le Pacte est invoqué par les juridictions nationales. Il constate en outre avec préoccupation que les dispositions du Pacte ne sont pas suffisamment connues des magistrats et de la communauté judiciaire, et que la société civile, les minorités et les personnes handicapées n’ont qu’un accès limité à de telles informations (art. 2).

  L ’ État partie devrait prendre des mesures appropriées pour faire connaître le Pacte aux juges, aux avocats et aux procureurs, afin que ses dispositions soient prises en c onsidération par les juridictions nationales. I l devrait prendre des mesures effectives pour diffuser largement le Pacte dans le pays, le faire traduire et le rendre accessible à tous.

Profilage ethnique

Le Comité s’inquiète du profilage ethnique pratiqué par les forces de l’ordre qui ciblent certaines minorités, en particulier les Roms, lesquels semblent subir un nombre disproportionné de contrôles d’identité et d’interrogatoires en l’absence de tout soupçon d’acte répréhensible (art. 2, 9, 12, 17 et 26).

L ’ État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour combattre et éliminer effectivement la pratique du profilage ethnique par les forces de l ’ ordre, notamment en veillant à ce que la loi définisse et interdise clairement cette pratique et que les membres des forces de l ’ ordre reçoivent une formation obligatoire qui les sensibilise aux particularités culturelles et au caractère inadmissible du profilage ethnique. Il devrait aussi enquêter sur tout comportement répréhensible fondé sur la discrimination ethnique et en sanctionner dûment les auteurs.

Personnes apatrides

Le Comité est préoccupé par le nombre d’apatrides relevant de la juridiction de l’État partie, pour la plupart des Roms, qui ont des difficultés à remplir les conditions nécessaires à l’acquisition de la nationalité croate parce qu’elles sont fréquemment dépourvues de pièce d’identité. Il est particulièrement inquiet au sujet des personnes qui sont devenues apatrides à la suite de l’éclatement de la République fédérative socialiste de Yougoslavie. Selon le Comité, cette situation empêche l’un des groupes les plus vulnérables, les Roms, de jouir de tout un éventail de droits fondamentaux, notamment ceux consacrés par le Pacte, et de bénéficier, entre autres, des services sociaux, des prestations sociales et d’un logement convenable, et limite également leur accès à l’emploi (art. 2, 24 et 26).

L ’ État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir à tous les résidents, y compris les personnes apatrides, la pleine jouissance des droits consacrés par le Pacte. Il devrait élaborer et mettre en œuvre des mesures efficaces pour remédier à l ’ apatridie et régulariser la situation des Roms, notamment en les aidant à se procurer des documents d ’ identité. L ’ État partie devrait également accroître ses efforts pour garantir à toutes les victimes des conflits passés qui relèvent de sa juridiction, y compris les Roms, l ’ accès à un logement convenable, aux prestations sociales et aux services sociaux, sans discrimination.

Crimes de haine

Le Comité salue la création du Groupe de travail interministériel pour le suivi des actes de violence inspirés par la haine, mais rappelle ses précédentes recommandations (voir CCPR/C/HRV/CO/2, par. 5) et exprime une nouvelle fois sa préoccupation quant à la persistance d’informations faisant état d’agressions racistes contre des membres de groupes ethniques minoritaires, en particulier des Roms et des Serbes. Il s’inquiète aussi des carences en matière d’enquêtes et de poursuites et du fait que les victimes ne reçoivent pas une indemnisation suffisante (art. 2 et 27).

L ’ État partie devrait intensifier ses efforts de lutte contre les attaques racistes commises par des agents de la force publique, en particulier contre des Roms et des Serbes, notamment en dispensant une formation spéciale à ces agents en vue de promouvoir le respect des droits de l ’ homme et la tolérance à l ’ égard de la diversité. Il devrait également accroître ses efforts pour que les agressions racistes donnent lieu à des enquêtes approfondies et à des poursuites, que leurs auteurs présumés, s ’ ils sont reconnus coupables, soient dûment sanctionnés et que les victimes reçoivent une indemnisation adéquate.

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

Le Comité est préoccupé par la prévalence des stéréotypes et des préjugés à l’encontre des lesbiennes, des gays, des bisexuels et des transgenres. À ce sujet, il est particulièrement inquiet des informations faisant état d’actes de violence contre ces personnes et de l’absence d’enquêtes et de poursuites efficaces (art. 2 et 26).

L ’ État partie devrait redoubler d ’ efforts pour combattre les stéréotypes et les préjugés à l ’ égard des lesbiennes, des gays, des bisexuels et des transgenres , notamment en lançant une campagne de sensibilisation à l ’ intention du grand public et en dispensant une formation appropriée aux agents publics, de manière à mettre un terme à la stigmatisation sociale de ces personnes . Il devrait veiller à ce que tous les faits de violence visant des lesbiennes, des gays, des bisexuels et des transgenres donnent lieu à des enquêtes efficaces et à ce que leurs auteurs soient poursuivis et punis.

Établissement des responsabilités pour les violations passées des droits de l’homme

Le Comité est préoccupé par les nombreux cas de graves violations des droits de l’homme commises pendant le conflit armé qui sont restées impunies, et renouvelle à cet égard ses précédentes recommandations (voir CCPR/C/HRV/CO/2, par. 10). Il donne acte à l’État partie de ses efforts pour régler les affaires de crimes de guerre, mais note avec regret la lenteur avec laquelle les enquêtes progressent et relève avec inquiétude qu’un faible nombre d’entre elles ont abouti à la poursuite et à la sanction des coupables. Le Comité prend note des informations fournies par la délégation à propos des critères appliqués à l’instruction des affaires de crimes de guerre, mais note également que le choix des affaires (y compris l’accent mis précédemment sur les procès in absentia) semble continuer de viser de manière disproportionnée les personnes d’origine serbe. Le Comité est également inquiet des difficultés que rencontrent les personnes qui tentent d’obtenir réparation de l’État partie pour des violations des droits de l’homme commises pendant le conflit, notamment des crimes de guerre (art. 2, 6 et 7).

L ’ État partie devrait accélérer les poursuites dans les affaires de crimes de guerre et de crimes contre l ’ humanité, et faire en sorte que toutes ces affaires soient jugées de façon non discriminatoire, quelle que soit l ’ origine ethnique des auteurs présumés . L ’ État partie devrait également veiller à ce que toutes les victimes et les membres de leur famille reçoivent une réparation adéquate pour de telles violations.

Personnes disparues

Le Comité note avec regret que l’on ignore toujours ce que sont devenues environ 1 600 personnes portées disparues pendant la guerre. Il constate également avec préoccupation le manque de transparence quant aux méthodes employées pour choisir les régions où ont lieu les recherches et les exhumations (art. 2, 6 et 7).

L ’ État partie devrait prendre des mesures immédiates et efficaces pour faire procéder à des enquêtes sur tous les cas non résolus de disparitions et traduire les responsables présumés en justice. I l devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour que les opérations d ’ exhumation soient fondées sur des critères objectifs et menées de manière transparente. Il devrait veiller en outre à ce que les p roches de personnes disparues aient accès aux informations concernant le sort réservé aux victimes.

Demandeurs d’asile et réfugiés

Le Comité reste préoccupé par le nombre considérable de réfugiés, rapatriés et déplacés qui n’ont toujours pas été réinstallés et vivent encore dans des centres d’hébergement collectifs. Il note avec regret que l’exécution du programme d’aide au logement s’est ralentie depuis 2012 (art. 2 et 12).

Le Comité renouvelle ses précédentes recommandations ( voir CCPR/C/HRV/CO/2, par.  6) et recommande à l ’ État partie d ’ accélérer la mise en œuvre des mesures visant la réinstallation et le retour des réfugiés, rapatriés et déplacés.

Égalité des sexes

Le Comité rappelle sa recommandation précédente (voir CCPR/C/HRV/CO/2, par. 7) et constate avec préoccupation que les femmes sont toujours sous-représentées dans le secteur public et le secteur privé, en particulier aux postes de décision. Il s’inquiète aussi de la persistance des stéréotypes concernant la place de la femme dans la société, notamment en ce qui concerne les femmes des zones rurales et les femmes handicapées (art. 2, 3 et 26).

L ’ État partie devrait redoubler d ’ efforts pour accroître la participation des femmes dans le secteur public et le secteur privé, en adoptant si nécessaire des mesures spéciales temporaires pour donner effet aux dispositions du Pacte. Il devrait prendre les mesures nécessaires pour venir à bout des stéréotypes concernant la place des femmes dans la société en général, e t e n particulier celle des femmes des régions rurales et d es femmes handicapées.

Violence sexiste

Le Comité félicite l’État partie d’avoir introduit l’incrimination de la violence au foyer dans le Code pénal, mais il constate avec préoccupation que les peines ne sont pas appliquées de manière cohérente du fait que la violence familiale peut aussi être qualifiée en tant qu’infraction mineure. Le Comité s’inquiète face aux informations concernant l’absence d’enquêtes et de poursuites dans certaines affaires et la légèreté des peines prononcées. Il est particulièrement préoccupé par les informations persistantes selon lesquelles non seulement les auteurs mais également les victimes d’actes de violence familiale sont arrêtés et condamnés. Il s’inquiète aussi du petit nombre de femmes qui bénéficient de l’aide juridictionnelle gratuite, du petit nombre de mesures de protection qui sont ordonnées et du manque de suivi dans leur application, ce qui les rend largement inefficaces. Par ailleurs, le Comité s’inquiète du nombre insuffisant de refuges destinés aux victimes d’actes de violence familiale. Il note avec regret que le rapport ne contient pas de données statistiques sur les actes de violence familiale (art. 3 et 7).

L ’ État partie devrait:

a) Adopter une approche globale pour prévenir et combattre toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes;

b) Renforcer les actions de sensibilisation à l ’ intention de la police, des membres de l ’ appareil judiciaire, des procureurs, des représentants des communautés, des femmes et des hommes, pour appeler l ’ attention sur l ’ ampleur de la violence au foyer et ses effets préjudiciables sur la vie des victimes;

c) Veiller à ce que les affaires de violence familiale donnent lieu à des enquêtes de police approfondies, que les auteurs soient poursuivis et dûment punis s ’ ils sont reconnus coupables et que les victimes reçoivent une indemnisation appropriée;

d) Mettre fin à la pratique qui veut que les victimes comme les auteurs d ’ actes de violence familiale soient arrêtés et condamnés;

e) Veiller à ce que des mesures de protection soient ordonnées de façon à assurer la sécurité des victimes et veiller également à ce qu ’ un suivi de l eur application soit mis en place;

f) Prévoir des refuges en nombre suffisant et dotés de ressources appropriées;

g) Rassembler des données sur les actes de violence familiale à l ’ égard des femmes et continuer, sur cette base, à concevoir des stratégies durables de lutte contre cette forme de violation des droits de l ’ homme.

Personnes handicapées

Le Comité constate avec satisfaction que l’utilisation de lits de contention clos (lits‑cages/filets) pour les patients psychiatriques a été abolie. Il prend note de l’adoption récente de la loi sur la protection des personnes souffrant de troubles mentaux, mais s’inquiète des informations selon lesquelles des personnes qui présentent un handicap intellectuel ou psychosocial seraient hospitalisées sans y avoir consenti, et de manière excessive et prolongée (art. 7 et 9).

Compte tenu de l ’ Observation générale n o  35 (2014) relative à la liberté et la sécurité de la personne, l ’ État partie devrait faire en sorte que la privation de liberté ne soit appliquée qu ’ en dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible, et qu ’ elle soit entourée de garanties de procédure et de fond suffisantes, établies par la loi. L ’ État partie devrait garantir le respect de l ’ opinion des individus et permettre une représentation et une défense effectives de leurs souhaits et de leurs intérêts par un représentant. Il devrait en outre mettre en place un système indépendant de suivi et d ’ établissement de rapports et veiller à ce que les abus fassent l ’ objet d ’ enquêtes et de poursuites efficaces et que des réparations soient accordées aux victimes et à leur famille. Il devrait promouvoir le recours à des soins psychiatriques qui préservent la dignité des patients, aussi bien les adultes que les mineurs, et élaborer un plan de désinstitutionnalisation, avec des programmes de soins ambulatoires et communautaires appropriés.

Traite des personnes

Le Comité prend note des informations selon lesquelles l’application des mesures adoptées pour lutter contre la traite ne progresse guère. Il est également préoccupé par la persistance de cette pratique dans le pays. Il s’inquiète en outre de la rareté des poursuites engagées contre les trafiquants et de la légèreté des peines prononcées (art. 8).

L ’ État partie devrait appliquer énergiquement sa politique de lutte contre la traite des personnes. Il devrait continuer de sensibiliser l ’ opinion et de lutter contre cette pratique , y compris au niveau régional et en collaboration avec les pays voisins. Il devrait également assurer la formation des policiers, des gardes frontière, des juges, des avocats et autres personnels concernés pour mieux faire connaître le p roblème de la traite et les droits des victimes. Il devrait veiller à ce que tous les responsables d ’ actes de traite soient poursuivis et punis de peines proportionnelles à la gravité des infractions commises, et à ce que les victimes soient indemnisées et réinsérées. L ’ État partie devrait encore redoubler d ’ efforts pour identifier les victimes de la traite et procéder à la collecte systématique de données relatives à cette pratique , ventilées par âge, sexe et origine ethnique, ainsi qu e de données relatives aux flux de traite dont son territoire est l ’ origine ou la destination, ou pour lesquels il est une zone de transit.

Aide juridictionnelle gratuite

Le Comité prend note de l’adoption de la loi relative à l’aide juridictionnelle gratuite (2014), mais s’interroge sur la possibilité d’accès des groupes les plus vulnérables à cette aide (art. 14).

L ’ État partie devrait continuer de renforcer le système d ’ aide juridictionnelle gratuite afin d e pouvoir offrir ce service chaque fois que l ’ intérêt de la justice l ’ exige. Il devrait aussi allouer des ressources suffisantes pour financer le système d ’ aide juridictionnelle gratuite et mettre en place des mécanismes chargés de contrôler la qualité d u service dispensé.

Conditions carcérales

Le Comité prend note des efforts engagés par l’État partie pour reconstruire et rénover les lieux de privation de liberté afin d’améliorer les conditions carcérales, mais il rappelle sa recommandation antérieure (voir CCPR/C/HRV/CO/2, par. 13) et redit sa préoccupation au sujet des mauvaises conditions qui continuent de régner dans les établissements de détention, dont le surpeuplement de certains centres et un accès insuffisant aux soins médicaux. Le Comité est particulièrement préoccupé par les conditions de détention dans la prison du comté de Zagreb (art. 10).

L ’ État partie devrait intensifier ses efforts pour remédier au surpeuplement dans les centres de détention et les prisons, notamment en recourant davantage aux mesures de substitution à l ’ emprisonnement. Il devrait aussi faire en sorte que les nouvelles installations répondent aux normes internationales, en consacrant des ressources suffisantes à leur construction et leur fonctionnement. Il devrait surveiller les conditions de détention dans les prisons, en particulier la prison du comté de Zagreb, en vue de garantir aux personnes privées de liberté un traitement conforme aux exigences de l ’ article 10 du Pacte et de l ’ Ensemble de règles minima pour le traitement des prisonniers.

Enfants migrants non accompagnés et isolés

Le Comité s’inquiète des informations faisant état du peu d’intérêt accordé à la situation des enfants migrants non accompagnés et isolés. Il constate avec préoccupation que les règles et procédures de désignation des tuteurs ne reposent pas sur des critères bien définis (art. 24).

L ’ État partie devrait établir une procédure pour répondre aux besoins particuliers des enfants étrangers non accompagnés et veiller à ce que leur intérêt supérieur soit pris en considération dans toute procédure d ’ immigration, d ’ expulsion ou autre. L ’ État partie devrait instituer des critères bien définis pour la désignation des tuteurs et prendre toutes les mesures nécessaires pour que la tutelle des mineurs non accompagnés soit confiée à des personnes aptes à représenter l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant.

Discrimination à l’égard des Roms

Le Comité rappelle sa recommandation précédente (voir CCPR/C/HRV/CO/2, par. 19) et se dit de nouveau préoccupé par la discrimination de facto qui s’exerce à l’égard des Roms. Il s’inquiète en particulier des informations persistantes relatives à la ségrégation de facto que subissent les enfants roms dans le domaine de l’éducation et du fait qu’ils n’ont pas la possibilité de recevoir un enseignement dans leur langue. Le Comité s’inquiète aussi des chiffres qui montrent que les Roms et les Serbes ne peuvent guère jouir d’un certain nombre de droits comme, notamment, le droit au logement, aux soins de santé et à l’emploi et le droit de participer à la conduite des affaires publiques (art. 2 et 24 à 27).

L ’ État partie devrait prendre immédiatement des mesures pour mettre fin à la ségrégation dont les enfants roms sont victimes dans l ’ éducation et faire en sorte que le placement dans les écoles se fasse sur une base individuelle et sans prendre en considération le groupe ethnique auquel appartient l ’ enfant. L ’ État partie devrait redoubler d ’ efforts pour faire en sorte que les enfants roms aient la possibilité de recevoir un enseignement dans leur langue maternelle, de même qualité et de même contenu que celui qui est dispensé aux autres enfants. Il devrait aussi prendre des mesures concrètes pour améliorer l ’ exercice par les Roms du droit au logement, aux soins de santé et à l ’ emploi, ainsi qu e du droit de participer à la conduite des affaires publiques.

Droits des minorités

Le Comité sinquiète de ce que les personnes appartenant aux minorités nationales rencontrent des difficultés pour exercer, en commun avec les membres de leur groupe, leur droit demployer leurs propres langues, notamment lorsquil sagit de langues utilisant lalphabet cyrillique (art. 27).

L ’ État partie devrait prendre des mesures supplémentaires, notamment des mesures d ’ action positive, pour promouvoir la tolérance inter-ethnique dans sa société plurielle, et donner pleinement effet au droit d ’ employer les langues et les alphabets minoritaires dans les mêmes conditions que les autres, conformément à son cadre constitutionnel et juridique, en accordant une attention particulière à l ’ utilisation de l ’ alphabet cyrillique dans la ville de Vukovar et autres communes concernées.

Liberté d’expression

Eu égard à ses observations finales précédentes (voir CCPR/C/HRV/CO/2, par. 17), le Comité demeure préoccupé de constater qu’il n’a pas été procédé à des enquêtes suffisantes sur tous les actes d’intimidation et toutes les agressions visant des journalistes. Il est également préoccupé par la criminalisation de la diffamation, qui décourage les médias de publier des informations critiques sur des questions d’intérêt public et constitue une menace pour la liberté d’expression et l’accès à une information plurielle (art. 6, 7 et 19).

L ’ État partie devrait garantir la liberté d ’ expression et la liberté de la presse, consacrées par l ’ article 19 du Pacte et analysées plus avant dans l ’ Observation générale n o  34 (2011) du Comité relative à la liberté d ’ opinion et d ’ expression. Il devrait aussi envisager de dépénaliser la diffamation et circonscrire l ’ application du droit pénal aux cas les plus graves, étant entendu que l ’ emprisonnement n ’ est jamais une peine appropriée dans ce domaine. En outre, l ’ État partie devrait ouvrir des enquêtes sur les agressions perpétrées contre des journalistes et des médias et traduire en justice les responsables de ces actes .

L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, des deux Protocoles facultatifs s’y rapportant, de son troisième rapport périodique et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi que du grand public. Il devrait veiller à ce que le rapport et les présentes observations finales soient traduites en croate et dans les langues minoritaires du pays.

Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements pertinents sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations faites par le Comité aux paragraphes 11, 13 et 23 ci‑dessus.

Le Comité demande à l’État partie de lui faire parvenir son prochain rapport périodique d’ici au 2 avril 2020 et d’y faire figurer des renseignements précis et à jour sur la suite qu’il aura donnée à toutes ses recommandations et sur l’application du Pacte dans son ensemble. Le Comité demande aussi à l’État partie de consulter largement la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays lorsqu’il établira son prochain rapport périodique. L’État partie ayant accepté de présenter ses rapports selon la procédure simplifiée, le Comité lui communiquera en temps utile une liste de points. Les réponses à cette liste constitueront le prochain rapport périodique de l’État partie. Conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le nombre de mots du rapport ne doit pas dépasser 21 200.