Nations Unies

CAT/C/PAK/CO/1

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

1er juin 2017

Français

Original : anglais

Comité contre la torture

Observations finales concernant le rapport initial du Pakistan *

1.Le Comité contre la torture a examiné le rapport initial du Pakistan (CAT/C/PAK/1) à ses 1506e et 1508e séances (CAT/C/SR.1506 et 1508), tenues les 18 et 19 avril 2017, et a adopté, à ses 1530e et 1531e séances, tenues les 4 et 5 mai 2017, les présentes observations finales.

A.Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du rapport initial du Pakistan et des informations qu’il contient. Il regrette toutefois que ce rapport ait été présenté avec quatre ans de retard.

3.Le Comité se réjouit de l’occasion qui lui a été offerte d’engager un dialogue constructif avec la délégation de l’État partie et des réponses apportées aux questions posées et aux sujets de préoccupation soulevés pendant l’examen du rapport.

B.Aspects positifs

4.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments des droits de l’homme suivants ou y a adhéré :

a)Pacte international relatif aux droits civils et politiques (2010) ;

b)Convention relative aux droits des personnes handicapées (2011) :

c)Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2011) et Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (2016).

5.Le Comité se réjouit des mesures législatives, administratives et de politique générale suivantes adoptées par l’État partie dans des domaines visés par la Convention :

a)Plan d’action national pour les droits de l’homme (2016) ;

b)Loi pénale portant modification de la loi contre les crimes d’honneur et loi pénale portant modification des lois contre le viol (2016) ;

c)Loi sur la Commission nationale des droits de l’homme (2012), et entrée en service de la Commission nationale des droits de l’homme (2015) ;

d)Loi sur les enquêtes en vue d’assurer des procès équitables, et règles correspondantes relatives aux enquêtes visant à assurer des procès équitables (2013).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Allégations d’utilisation généralisée de la torture par la police

6.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie rejette la torture et déploie des efforts pour créer des mécanismes propre à lui permettre de s’acquitter de ses obligations au titre de la Convention contre la torture et renforcer ceux qui sont déjà en place, mais il est profondément préoccupé par les informations concordantes selon lesquelles la police aurait largement recours à la torture sur l’ensemble du territoire de l’État partie afin d’arracher des aveux aux personnes en garde à vue L’État partie a indiqué que des mesures disciplinaires avaient été prises à l’encontre de plus de 7 500 agents de police dans les provinces du Punjab et du Khyber Pakhtunkhwa pour torture, décès en détention, abus de pouvoir, mauvaise conduite ou séquestration, mais aucune information n’a été transmise au Comité précisant si des poursuites pénales avaient été engagées contre les agents de police concernés. Le Comité note que l’État partie a fourni durant le dialogue des informations sur 13 cas dans lesquels des procureurs avaient inculpé des membres de la police, notamment dans des cas présumés d’exécutions extrajudiciaire et de torture. Aucune information ne permet de savoir si l’une de ces affaires a déjà abouti à des sanctions pénales (art. 2, 12 et 16).

7. Le Comité demande à l’État partie :

a) De s’assurer que les responsables de l’État partie, au plus haut niveau, réaffirment sans équivoque l’interdiction absolue de la torture et en condamnent publiquement la pratique , et fassent clairement savoir que quiconque commettrait de tels actes, y participerait ou s’en rendrait complice en serait tenu personnellement responsable devant la loi, ferait l’objet de poursuites pénales et se verrait infliger la peine appropriée ;

b) De prendre des mesures pour qu’il soit interdit par la loi à tous les membres de la police de se livrer à la torture, conformément à l’ordonnance de 2002 sur la police applicable dans certaines provinces de l’État partie ;

c) De veiller à ce que les agents de police qui commettent des actes de torture soient poursuivis et condamnés à des peines à la mesure de la gravité du crime de torture, comme l’exige l’article 4 de la Convention ; et

d) De sensibiliser les agents de police et des forces de sécurité à l’interdiction absolue de la torture et aux dispositions de la Convention et de les former aux techniques de collecte de preuves médico-légales qui leur permettront de moins se fonder sur l’obtention d’aveux pour les enquêtes pénales.

Inadéquation des enquêtes menées sur les plaintes contre des actes de torture

8.Le Comité regrette que la police ait, selon certaines informations, souvent recours à la menace envers les personnes qui cherchent à faire enregistrer un premier rapport d’information pour faute professionnelle ou ne donne pas suite à leur demande ; que des policiers soient chargés d’enquêter sur les actes de torture imputés à leurs collègues et que l’Agence fédérale d’enquête ne soit pas suffisamment indépendante pour assurer que les poursuites pénales à l’encontre d’agents de police soient menées de manière effective ; que les organes de contrôle prévus par la législation de l’État partie ne soient ni opérationnels ni efficaces dans la pratique ; et que, même si des médecins ont dans de nombreux cas recueilli des preuves de torture, les autorités soient réticentes à agir sur la base de ces renseignements (art. 2, 11, 13 et 15).

9. Le Comité engage l’État partie à :

a) Prendre des mesures concrètes pour que les personnes qui portent plainte contre des comportements assimilables à des actes de torture, les témoins d’actes de torture et les membres de leur famille soient protégés contre le harcèlement et l’intimidation en représailles contre le dépôt d’une plainte ;

b) Veiller à ce que les fonctionnaires soupçonnés d’actes de torture soient suspendus de leurs fonctions en attendant les résultats de l’enquête sur les allégations de torture ;

c) Prendre des mesures immédiates pour assurer la création d’organes de contrôle de police et leur bon fonctionnement, s’agissant en particulier des commissions de sécurité publique dans les districts et les provinces de l’État partie ;

d) Examiner la possibilité de créer un mécanisme indépendant de la hiérarchie policière, habilité à recevoir des plaintes et à enquêter sur toutes les allégations de torture; et

e) Renforcer l’indépendance des conseils médicaux permanents de district et veiller à ce que les autorités ouvrent rapidement des enquêtes pénales dans toutes les affaires où des conseils médicaux médico-légaux constatent qu’une personne a été soumise à la torture en détention.

Impunité pour les actes de torture commis par des militaires, des membres des services du renseignement et des forces paramilitaires

10.Le Comité est profondément préoccupé par les informations selon lesquelles des militaires, des membres des services du renseignement, notamment de l’Agence du renseignement interservices, et des forces paramilitaires, telles que le Frontier Corps (corps des gardes frontière) et les Pakistan Rangers, sont impliqués dans un nombre important d’affaires d’exécution extrajudiciaire, notamment de torture et de disparition forcée. Le Comité s’inquiète également de ce que les lois de l’État partie prévoient la possibilité d’une immunité rétroactive , en vertu des dispositions du règlement de 2011 relatif au soutien au pouvoir civil, pour les actes de torture commis par des membres de l’armée et des forces paramilitaires à la suite des événements de février 2008, et de la modification en 2015 de la loi sur l’armée qui accorde à tous les membres du personnel associé aux tribunaux militaires une immunité de poursuites rétroactive pour les mesures prises « de bonne foi ». Le Comité note aussi avec préoccupation que la justice militaire a compétence exclusive sur les soldats accusés d’infractions contre des civils. Il regrette que l’État partie n’ait fourni aucune information indiquant que des membres de l’armée, des services de renseignement ou des forces paramilitaires ont été poursuivis et punis pour des actes assimilables à la torture telle que définie par la Convention. Il regrette en outre que l’État partie n’ait pas fourni les informations demandées par le Comité sur l’état d’avancement des enquêtes ou des poursuites concernant les affaires qu’il a soulevées avec la délégation, notamment : a) l’implication présumée d’officiers de l’armée dans la disparition forcée de 35 personnes d’un centre d’internement à Malakand, dans la province du Khyber Pakhtunkhwa, en 2012 ; b) l’implication présumée de membres du Frontier Corps dans la disparition forcée et l’assassinat en 2009 des responsables politiques baloutches Ghulam Mohammad Baloch, Lala Munir Baloch et Sher Mohammad Baloch ; et c) le décès en mai 2016 d’Aftab Ahmad qui se trouvait sous la garde de membres des Pakistan Rangers (art. 2, 12, 13 et 16).

11. L’État partie devrait :

a) Prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que toutes les allégations de torture ou de mauvais traitements fassent, sans délai, l’objet d’une enquête approfondie et impartiale, menée par un organe civil pleinement indépendant et que les auteurs présumés de ces actes soient dûment poursuivis et, s’ils sont déclarés coupables, condamnés à des peines à la mesure de la gravité de leurs crimes ;

b) Modifier le règlement relatif au sou tien au pouvoir civil et la loi sur l’armée, telle que modifiée en 2015, afin de faire clairement savoir que quiconque commet des actes de torture, y participe ou s’en rend complice fera l’objet de poursuites pénales et se verra infliger, s’il est reconnu coupable, une peine appropriée ;

c) Veiller à ce que les militaires accusés d’actes de torture et d’infractions analogues soient jugés par un tribunal civil ; et

d) Mettre un terme à l’utilisation par l’État partie de forces paramilitaires pour effectuer des tâches de maintien de l’ordre et veiller à ce que les plaintes de torture visant des membres de ces forces fassent l’objet d’enquêtes et donnent lieu à des poursuites.

Torture dans le cadre de la lutte antiterroriste

12.Tout en reconnaissant les efforts constants que l’État partie déploie pour protéger sa population contre la violence de la part de certains groupes terroristes non étatiques, le Comité note avec une profonde inquiétude que la législation antiterroriste, en particulier la loi contre le terrorisme de 1997, supprime les garanties juridiques contre la torture normalement accordées aux personnes privées de liberté. Cette législation autorise les organes de sécurité et les forces armées civiles à détenir toute personne soupçonnée d’avoir commis une infraction visée par ladite loi jusqu’à trois mois sans examen ni possibilité de recours en habeas corpus et permet la détention sans procès jusqu’à un an de toute personne soupçonnée d’être impliquée dans les activités d’une organisation interdite. Le Comité constate en outre avec préoccupation que la loi contre le terrorisme permet aux tribunaux d’admettre des aveux comme éléments de preuve lorsqu’ils ont été faits par l’accusé en présence du Commissaire de police du district, alors que dans les juridictions civiles les aveux ne sont recevables que s’ils sont faits devant un magistrat. Le Comité note aussi avec une profonde préoccupation que l’État partie a autorisé les tribunaux militaires à juger des civils pour des infractions liées au terrorisme, le plus récemment en 2017 au titre du vingt-troisième amendement de la Constitution pakistanaise, vu en particulier le manque d’indépendance des juges des tribunaux militaires, qui relèvent de la hiérarchie militaire. Le Comité est aussi profondément préoccupé par les pratiques de ces juridictions, notamment la tenue de procès à huis clos. Il est également vivement préoccupé par les très vastes pouvoirs conférés à l’armée, qui peut détenir dans des centres d’internement des personnes soupçonnées de participation à des activités terroristes sans inculpation ni contrôle judiciaire, en application du règlement de 2011 relatif au soutien au pouvoir civil (art. 2 et 15).

13. Le Comité rappelle que le paragraphe 2 de l’article 2 de la Convention dispose qu ’«  aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, … ne peut être invoquée pour justifier la torture » et que selon son observation générale n o  2 (2007 ) , les circonstances exceptionnelles incluent « les menaces d’actes terroristes ». À cet égard, le Comité demande instamment à l’État partie :

a) D’abroger ou de modifier la loi contre le terrorisme et d’autres textes de loi connexes pour assurer que toutes les personnes privées de liberté bénéficient de garanties juridiques contre la torture, y compris la présentation rapide devant un magistrat et la possibilité d’un recours en habeas corpus , et de veiller à ce que les aveux obtenus en l’absence d’un juge soient irrecevables comme éléments de preuve ;

b) De mettre fin au recours à des tribunaux militaires pour les procès liés au terrorisme, de transférer des tribunaux militaires aux tribunaux civils les affaires pénales concernant des civils et de donner aux civils déjà jugés par des juridictions militaires la possibilité de faire recours devant des tribunaux civils ; et

c) D’abroger ou de modifier le règlement de 2011 relatif au soutien au pouvoir civil de façon à ôter à l’armée le pouvoir d’établir des centres d’internement dans les zones tribales sous administration fédérale et les zones tribales administrées au niveau provincial et de veiller à ce que nul ne soit gardé au secret dans tout territoire relevant de l’État partie, le placement en détention dans ces conditions constituant, en soi, une violation de la Convention. Tant que ces centres d’internement restent ouverts, faire en sorte que des observateurs indépendants et des membres de la famille des personnes détenues y aient accès.

Définition et criminalisation de la torture

14.Le Comité note que le paragraphe 2 de l’article 14 de la Constitution pakistanaise interdit « la torture aux fins d’obtenir des informations », que certaines dispositions du Code pénal punissent « les préjudices corporels » et que l’ordonnance de 2002 sur la police réprime la pratique de la torture par les agents de police, mais il constate avec inquiétude que la législation de l’État partie ne comprend pas de définition de la torture qui intègre les divers éléments définis à l’article premier de la Convention et n’érige pas expressément la torture en infraction pénale, comme le prévoient le paragraphe 1 de l’article 2 et l’article 4 de la Convention. Le Comité constate en outre avec préoccupation que le Parlement est saisi depuis plusieurs années d’un projet de loi portant prévention et répression de la torture, des décès et des viols en détention mais qu’il ne l’a toujours pas adopté (art. 1er, 2 et 4).

15. Le Comité prie instamment l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour incorporer dans sa législation une définition spécifique de la torture qui recouvre l’ensemble des éléments de la définition figurant à l’article premier de la Convention et prévoie des peines à la mesure à la gravité de l’acte de torture. Le Comité encourage l’État partie à revoir le projet de loi portant prévention et répression de la torture, des décès et des viols en détention pour assurer sa pleine compatibilité avec les dispositions de la Convention et à promouvoir son adoption ou proposer un nouveau texte pour y parvenir.

Garanties juridiques fondamentales

16.Tout en notant que la législation de l’État partie prévoit le respect de garanties juridiques telles que l’accès rapide à un avocat, l’accès des familles et l’exigence que toute personne arrêtée soit présentée à un magistrat dans les vingt-quatre heures qui suivent son arrestation, le Comité est préoccupé par les informations indiquant que ces garanties ne sont pas respectées dans la pratique. Il est également préoccupé par l’absence d’application effective du droit de la personne arrêtée de réclamer un examen médical indépendant et d’en bénéficier dans les plus brefs délais, dès la privation de liberté, et s’inquiète de ce que les cas de détention ne soient pas tous rapidement consignés dans un registre général qui soit exact et accessible aux membres de la famille des détenus (art. 2).

17. L’État partie devrait veiller, en droit et dans la pratique, à ce que tous les détenus bénéficient de toutes les garanties juridiques fondamentales dès le début de la privation de liberté, y compris celles mentionnées aux paragraphes 13 et 14 de l’observation générale n o  2 (2007) du Comité s ur l’application de l’article 2 . Il devrait en particulier faire en sorte que :

a) Toute personne privée de liberté puisse dans la pratique avoir rapidement accès à un avocat, en particulier pendant les interrogatoires de police ; informer un membre de sa famille ou une personne de son choix des motifs et du lieu de sa détention ; contester à tout moment pendant sa détention la légalité ou la nécessité de cette détention devant un magistrat habilité à ordonner sa remise en liberté immédiate, et obtenir une décision sans délai. L’État partie devrait vérifier régulièrement que les agents de la force publique respectent les garanties juridiques et sanctionner tout manquement en la matière ;

b) Sa législation inclue une disposition garantissant à toutes les personnes privées de liberté le droit réclamer un examen médical indépendant  et d’en bénéficier rapidement ; et

c) Tous les cas de privation de liberté soient rapidement consignés dans un registre général et que les membres de la famille et les avocats des détenus aient le droit d’accéder à ce registre.

Application de la Convention par les autorités judiciaires et accès à la justice

18.Le Comité est préoccupé par les incohérences signalées dans l’administration de la justice, notamment en ce qui concerne la compétence du Tribunal fédéral de la charia, situation qui cause des difficultés aux victimes d’actes la torture qui réclament justice, comme l’a constaté le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats (voir le document A/HRC/23/43/Add.2). Le Comité est particulièrement préoccupé consterné par les informations selon lesquelles des femmes victimes de torture se heurtent à de nombreux obstacles dans l’accès à la justice, ce qui engendre un état d’impunité et donne lieu à d’autres violations de la Convention.

19. Le Comité exhorte l’État partie à faire en sorte que tous ses organes judiciaires et extra-judiciaires donnent effet aux dispositions de la Convention. Il invite instamment l’État partie à veiller à ce que les décisions prises par ces organes puissent être contestées et, s’il y a lieu, annulées au cas où elles iraient à l’encontre des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention. L’État partie devrait revoir les pratiques qui empêchent les victimes d’actes de torture de déposer plainte et faire en sorte que toutes les plaintes pour torture fassent l’objet d’un examen rapide et impartial de la part des autorités compétentes et que toutes les personnes qui déposent des plaintes soient protégées des représailles.

Commission nationale des droits de l’homme

20.Le Comité accueille avec satisfaction la création en 2015 de la Commission nationale des droits de l’homme, mais il relève avec une vive préoccupation que son président n’a pas reçu l’autorisation, apparemment nécessaire au Pakistan, pour que des représentants de la Commission puissent participer à Genève à une réunion privée avec les membres du Comité, qui devait avoir lieu juste avant le dialogue avec l’État partie. Le Comité relève également avec une vive préoccupation que la loi portant création de la Commission prévoit que cette institution n’est pas habilitée à enquêter sur les activités des services du renseignement ni à mener des investigations approfondies sur les allégations de violation des droits de l’homme commises par des membres des forces armées. Tout en se réjouissant de l’accroissement substantiel des crédits alloués à la Commission, le Comité note avec inquiétude que celle-ci n’est pas encore dotée de suffisamment de ressources humaines et financières pour être à même de surveiller efficacement le respect des droits de l’homme dans l’ensemble du pays (art. 2, 12 et 13).

21. L’État partie devrait prendre immédiatement des mesures pour assurer que la Commission nationale des droits de l’homme soit à même de s’acquitter de toutes ses tâches avec efficacité et en toute indépendance, dans le plein respect des Principes concernant le statut des i nstitutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) , notamment en l’autorisant à rencontrer des représentants de mécanismes internationaux des droits de l’homme à l’étranger. L’État partie devrait conférer de plus amples compétences à la Commission et veiller à ce qu’elle puisse enquêter sur toute affaire concernant des actes de torture ou des mauvais traitements imputés à une entité de l’État partie habilitée à arrêter et détenir des personnes, dont les services du renseignement et les forces armées. En outre, l’État partie devrait allouer des ressources financières et humaines suffisantes à la Commission afin qu’elle soit en mesure de mener des activités sur l’ensemble du territoire.

Harcèlement, intimidation et arrestation de défenseurs des droits de l’homme, d’avocats et de journalistes et actes de représailles à leur encontre

22.Le Comité est préoccupé par les informations faisant régulièrement état d’actes d’intimidation et de harcèlement, ainsi que d’agressions physiques et de mesures de détention administrative, dont font l’objet des défenseurs des droits de l’homme, des avocats, des journalistes et des membres de leur famille. Il est notamment préoccupé par le cas des défenseurs des droits de l’homme Waqas Goraya, Aasim Saeed, Salman Haider et Ahmad Raza Naseer, qui auraient été enlevés en janvier 2017 par des agents de l’État, et de la journaliste Zeenat Shahzadi, qui aurait été victime de disparition forcée en août 2015. Il s’inquiète en outre de l’absence de renseignements provenant de l’État partie sur d’éventuelles enquêtes sur ces allégations (art. 2, 12, 14 et 16).

23. L’État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les défenseurs des droits de l’homme, les avocats et les journalistes contre l e harcèlement et les agressions  ; enquêter systématiquement sur tous les cas présumés d’intimidation, de harcèlement et d’agression afin de poursuivre et de punir les auteurs de ces actes, et offrir un recours utile aux victimes et à leurs proches, notamment dans les affaires susmentionnées. L’État partie devrait faire en sorte qu’aucune personne ou organisation ne soit la cible de harcèlement ou d’actes d’intimidation pour avoir publié des informations sur la façon dont l’État partie remplit les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention.

Disparitions forcées

24.Le Comité se félicite de la coopération de l’État partie avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires et du fait qu’il ait reçu une visite du Groupe en 2012. Il est toutefois préoccupé par l’absence de définition de la disparition forcée comme une infraction distincte dans le droit interne. Il est également préoccupé par des informations indiquant que des centaines de disparitions forcées ont été signalées ces dernières années dans l’État partie et que les autorités n’ont pas pris les mesures voulues pour enquêter à leur sujet et identifier les responsables. Le Comité relève en outre avec inquiétude que la Commission nationale d’enquête sur les disparitions forcées ne jouirait pas d’une indépendance suffisante et ne disposerait pas des ressources nécessaires pour s’acquitter de son mandat. Le Comité regrette que les activités de cet organe n’aient pas encore débouché sur l’ouverture de poursuites pénales dans des affaires de disparition forcée (art. 2, 12, 14 et 16).

25. L’État partie devrait faire en sorte que la disparition forcée soit définie dans le droit interne comme une infraction spécifique et emporte des peines à la mesure de sa gravité. Il devrait veiller à ce que toutes les affaires de disparition forcée donnent immédiatement lieu à une enquête approfondie et efficace, que les personnes soupçonnées de ce type d’acte soient poursuivies et que celles qui en sont reconnues coupables soient condamnées à des peines à la mesure de la gravité de cette infraction. L’État partie devrait aussi prendre des mesures pour renforcer l’indépendance de la Commission nationale d’enquête sur les disparitions forcées, lui allouer davantage de ressources et étendre ses compétences en matière d’enquête afin qu’elle soit en mesure de s’acquitter de son mandat avec efficacité et en toute indépendance. En outre, l’État partie devrait tenir compte du conseil du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, notamment pour ce qui est de renforcer les pouvoirs de la Commission nationale d’enquête sur les disparitions forcées et de lui allouer des ressources suffisantes.

Surveillance des lieux de détention

26.Le Comité prend note avec satisfaction des renseignements fournis par l’État partie au sujet des « comités de surveillance des prisons », qui se rendent régulièrement dans tous les centres de détention et établissements pénitentiaires afin de s’informer de la situation des détenus et d’adresser des recommandations aux autorités pénitentiaires les engageant à examiner les doléances des détenus. Il est toutefois préoccupé par les informations selon lesquelles ces comités ne sont pas opérationnels et par l’absence d’un mécanisme de surveillance pleinement indépendant (art. 2, 11, 12, 13 et 16).

27. L’État partie devrait :

a) Faire en sorte que les rapports des comités de surveillance des prisons soient rendus publics et que les autorités suivent les cas dans lesquels les observateurs expriment des préoccupation s au sujet de la torture ou de s mauvais traitements ;

b) Faire en sorte que des observateurs indépendants nationaux et internationaux, y compris des représentants d’organisations non gouvernementales, soient autorisé s à surveiller tous les lieux de garde à vue, de détention et d’emprisonnement, en y effectuant régulièrement des visites, notamment des visites inopinées. Il devrait recueillir des renseignements sur le lieu, la date et la fréquence des visites, y compris des visites inopinées, dans les centres de garde à vue, de détention et d’emprisonnement, ainsi que sur les conclusions formulées à l’issue de ces visites et la suite qui leur est donnée ;

c) Examiner la possibilité de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et de mettre en place un mécanisme national de prévention.

Conditions de détention

28.Le Comité est profondément préoccupé par les informations indiquant que des décès en détention résultant d’actes de torture et des allégations de violences sexuelles infligées à des mineurs par des détenus et par des membres du personnel pénitentiaire n’ont pas donné lieu à des enquêtes sérieuses et que les auteurs de ces actes sont restés impunis. Le Comité est également préoccupé par les renseignements selon lesquels le surpeuplement carcéral extrême et les conditions déplorables de vie sont la norme dans les lieux de détention de l’État partie et que, notamment, les locaux sont insalubres et l’accès aux services médicaux laisse à désirer. Il est aussi préoccupé par les informations indiquant que la population carcérale est composée à 70 % de personnes en détention provisoire et que les mineurs sont détenus avec les adultes. Il relève avec inquiétude que, bien que la Haute Cour ait déclaré que l’utilisation d’entraves était contraire à la Constitution, cette pratique serait encore courante dans certaines zones du Pakistan. Le Comité est profondément préoccupé par le fait que les personnes arrêtées pour blasphème sont souvent placées à l’isolement pendant des périodes prolongées, comme dans le cas de Junaid Hafeez, qui serait maintenu à l’isolement depuis mai 2014(art. 11 et 16).

29. L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que tous les décès en détention fassent immédiatement l’objet d’une enquête sérieuse ;

b) Mettre en place un système indépendant et confidentiel de traitement des plaintes à l’intention de toutes les personnes privées de liberté ;

c) Intensifier de toute urgence ses efforts pour remédier au surpeuplement des lieux de détention, notamment en appliquant des mesures autres que l’emprisonnement ;

d) Prendre des mesures concrètes pour améliorer les conditions d’hygiène, les soins de santé et les services offerts à tous les détenus et faire en sorte que les conditions de détention dans l’État partie soient mises en conformité avec l’ Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela) ;

e) Garantir la séparation dans les lieux de détention entre les personnes en détention provisoire et les condamnés, les hommes et les femmes, les mineurs et les adultes, et faire en sorte que les allégations d’abus sexuel fassent l’objet d’enquêtes en bonne et due forme et que les auteurs soient poursuivis et punis  ;

f) S’abstenir de mettre des personnes à l’isolement pendant des périodes prolongées au motif qu’une telle mesure est nécessaire pour assurer leur sécurité, et veiller, là où des craintes existent, par exemple dans le cas de personnes privées de liberté pour blasphème, à ce que les mesures prises pour les protéger ne constituent pas en elle s-mêmes des mauvais traitements ;

g) Faire en sorte que l’interdiction de la pose d’entraves aux personnes privées de liberté soit appliquée dans tout le territoire de l’État partie.

Violence à l’égard des femmes et crimes dits « d’honneur » 

30.Le Comité prend acte de l’adoption du projet de loi pénale de 2016 portant modification des lois sur la lutte contre le viol et du projet de loi pénale portant modification de la loi sur la lutte contre les « crimes d’honneur » et du fait que l’État partie s’est engagé à combattre ces crimes, mais il est préoccupé par l’ampleur présumée de la violence contre les femmes dans l’État partie, qui se manifeste notamment par des meurtres, viols, attaques à l’acide, enlèvements, violences intrafamiliales et « crimes d’honneur ». Le Comité est également préoccupé par le taux extrêmement faible de condamnation pour les infractions de cette nature et par des informations indiquant que des systèmes de justice parallèles (les panchayat ou jirga) auraient condamné des femmes à des châtiments corporels violents, voire à la peine capitale, y compris par lapidation, et auraient prononcé des peines clémentes contre des auteurs de « crimes d’honneur » et d’autres types de violence sexiste (art. 2, 14 et 16).

31. Le Comité exhorte l’État partie à :

a) Intensifier ses efforts pour prévenir, combattre et éradiquer toutes les formes de violence contre les femmes, notamment en renforçant les dispositions de la législation nationale et provinciale traitant des violences faites aux femmes et en érigeant ce type d’acte en infraction pénale ;

b) Veiller à ce que toutes les affaires de violence contre les femmes fassent immédiatement l’objet d’une enquête approfondie et efficace, à ce que les personnes soupçonnées d’actes de cette nature soient poursuivies et, si elles sont reconnues coupables, condamnées à des peines à la mesure de la gravité de l’infraction, et à ce que les victimes obtiennent réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation adéquate ;

c) Intensifier encore ses efforts pour invalider les jugements prononcés par les systèmes de justice parallèle s ou par les « mécanismes extra judiciaires de règlement des litiges » tels que les panchayat et les jirga , et veiller à ce que les agents de l’État s’abstiennent d’avaliser ou d’appliquer les décisions par lesquelles ces systèmes ou mécanismes exonèrent de leur responsabilité pénale des auteurs d’infractions commises au nom de l’honneur ou réclament l’infliction de châtiments corporels à des femmes, ou toute décision incompatible avec les obligations incombant à l’État partie en vertu de la Convention ;

d) Garantir que, dans la pratique, les femmes victimes de violence aient immédiatement accès à des voies de recours et faire en sorte qu’elles bénéficient d’une protection efficace et puissent notamment être hébergées dans un foyer et recevoir des soins médicaux et un soutien psychologique ; et

e) Mener des campagnes de sensibilisation et de formation à l’intention des fonctionnaires afin de les informer de l’obligation découlant de la Convention d’exercer la diligence voulue pour protéger les femmes contre la violence, notamment les crimes dits d’honneur, et de ne pas tolérer ni cautionner ce type de violence.

Traite et travail forcé

32.Le Comité note avec inquiétude que, malgré les efforts déployés par les autorités pakistanaises, des informations concordantes indiquent que la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé ou servile, notamment l’exploitation d’enfants en tant que travailleurs domestiques employés dans des conditions assimilables à l’esclavage, est largement répandue dans l’État partie (art. 2, 12, 14 et 16).

33. Le Comité invite instamment l’État partie à :

a) Prendre des mesures pour éradiquer et combattre la traite des personnes et le travail forcé, enquêter sur toutes les allégations de traite et de travail forcé et veiller à ce que les personnes soupçonnées de ces actes soient poursuivies et à ce que celles qui en sont reconnues coupables soient condamnées à des peines à la mesure de la gravité de ces infractions ;

b) Mettre en place des mécanismes pour inspecter systématiquement et régulièrement les lieux de travail dans le secteur structuré et l’économie parallèle, y compris les endroits dans lesquels travaillent des domestiques, afin de prévenir le travail forcé et servile, ainsi que d’autres formes de mauvais traitements, de violence et d’exploitation ;

c) Veiller à ce que les victimes de la traite obtiennent réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation et de moyens de réadaptation.

Réfugiés et principe de non-refoulement

34.Le Comité félicite l’État partie d’avoir accueilli des millions de réfugiés, dont bon nombre d’Afghans, mais il est préoccupé par des informations récentes étayées d’après lesquelles des Afghans, dont des réfugiés enregistrés, auraient fait l’objet d’actes de coercition, notamment de menaces d’expulsion et de violences policières, d’extorsion, de descentes de police et de mesures de détention arbitraires, aux fins de leur renvoi dans leur pays, dans lequel ils courent un risque de persécution, de torture ou de mauvais traitements. Le Comité regrette en outre l’absence dans l’État partie d’un cadre juridique relatif aux réfugiés et aux demandeurs d’asile (art. 3).

35. L’État partie devrait :

a) Modifier sa législation, en particulier la loi de 1972 relative à l’extradition et le décret de 1951 relatif aux étrangers, ainsi que les procédures connexes afin de les mettre en pleine conformité avec le principe de non-refoulement et de garantir aux réfugiés et aux demandeurs d’asile la protection prévue à l’article 3 de la Convention ;

b) Examiner la possibilité d’adopter une loi générale sur l’asile conforme aux normes internationales relatives aux droits de l’homme et à l’article 3 de la Convention ;

c) Examiner la possibilité d’adhérer à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et au Protocole de 1967 s’y rapportant ; et

d) Enquêter sur les allégations de violences policières infligées à des Afghans et d’autres mesures prises par les autorités en vue de les contraindre à retourner dans leur pays en dépit du fait qu’ils courent un risque réel d’y être soumis à la torture, et imposer des sanctions disciplinaires ou pénales aux responsables.

Exercice de la diligence voulue pour prévenir les violences commises par des acteurs non étatiques

36.Le Comité est préoccupé par les informations faisant état de violences infligées à des personnes vulnérables, en particulier à des membres des communautés chiite, chrétienne et ahmadiyya, ainsi qu’à des individus accusés de blasphème, et indiquant que les efforts consentis par les autorités de l’État partie pour protéger les intéressés contre les violences commises par des acteurs non étatiques sont insuffisants. À cet égard, le Comité est particulièrement préoccupé par l’attitude des autorités pakistanaises dans une affaire récente dans laquelle un jeune homme, Mashal Khan, a été lynché à mort après avoir été accusé de blasphème. Le Comité est également préoccupé par des informations indiquant que les autorités tardent parfois à ouvrir des enquêtes et à engager des poursuites dans des affaires d’enlèvement et de demande de rançon dans lesquelles des groupes, dont le réseau Haqqani et le groupe Lashkar-e-Tayyaba, sont soupçonnés (art. 2, 12, 13 et 16).

37. Le Comité invite l’État partie à :

a) Protéger les membres des groupes vulnérables, notamment les communautés religieuses minoritaires et les personnes appartenant à ces communautés qui exercent leur droit à la liberté d’opinion ou d’expression, contre des actes de violence commis par des acteurs non étatiques. L’ État partie devrait faire en sorte que tous ces actes de violence y compris les actes de violence commis collectivement, fassent sans délai l’objet d’une enquête sérieuse et impartiale, que les auteurs soient punis et que les victimes obtiennent réparation ;

b) Faire en sorte que toutes les autorités nationales enquêtent rapidement sur les allégations d’enlèvement à des fins de demande de rançon commis par des acteurs non étatiques et par des groupes opérant sur son territoire.

Châtiments corporels

38.Tout en notant l’information fournie par la délégation de l’État partie quant à leur non-application dans la pratique, le Comité est préoccupé par les dispositions autorisant l’imposition dans l’État partie de châtiments corporels, notamment la flagellation, l’amputation.et la lapidation (art. 16).

39. L’État partie devrait prendre les mesures législatives nécessaires pour éradiquer et interdire expressément les châtiments corporels sous toutes leurs formes dans tous les contextes, vu qu’ils sont constitutifs d’actes de torture et de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants contraires à la Convention.

Justice pour mineurs

40.Le Comité est préoccupé par l’exécution de personnes qui, selon les certaines informations, étaient encore mineures au moment de la commission de l’infraction, en violation de l’interdiction d’une telle pratique par le droit international et la législation nationale. Tout en notant que les mineurs ont la possibilité de contester la détermination de leur âge devant les tribunaux, le Comité note avec préoccupation l’absence présumée d’un mécanisme efficace pour déterminer l’âge des jeunes délinquants qui soit conforme aux garanties d’une procédure régulière et d’un procès équitable.

41. L’État partie devrait veiller à ce que soient mis en place des mécanismes efficaces pour contester en temps utile les décisions relatives à la détermination de l’âge des jeunes délinquants. Il recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour faire en sorte que chaque mineur accusé d’une infraction pénale bénéficie d’une assistance juridique indépendante et efficace.

Moyens de recours

42.Tout en se félicitant des efforts du Gouvernement pour créer de nouveaux centres de réadaptation offrant une assistance médicale et psychologique, le Comité est préoccupé par l’information selon laquelle les victimes d’actes de torture n’ont pas accès à des recours utiles et à une réparation, sous la forme d’une indemnisation et de moyens de réadaptation. Il est également préoccupé par le fait que l’État partie n’ait pas fourni d’information sur des cas où des victimes d’actes de torture ou de mauvais traitements commis par des fonctionnaires ont été indemnisés ou ont bénéficié d’une autre forme de réparation (art. 14).

43. Rappelant son observation générale n o  3 (2012) sur l’application de l’article 14, le Comité demande instamment à l’État partie de :

a) Prendre des mesures pour assurer que les victimes d’actes de torture et de mauvais traitements bénéficient de recours utiles et de mesures complètes de réparation sous la forme d’une indemnisation et d’une réadaptation appropriées indépendamment du fait que l’auteur de la violation ait ou non été identifié, arrêté, poursuivi ou condamné ;

b) Faire en sorte que des services spécialisés de réadaptation complets soient disponibles et accessibles rapidement aux victimes d’actes de torture et de mauvais traitements, sans discrimination, grâce à la fourniture directe de services de réadaptation par l’État ou au financement d’autres services, notamment ceux gérés par des organisations non gouvernementales.

Collecte de données

44.Tout en notant que son examen portait sur le rapport initial de l’État partie au titre de l’article 19 de la Convention, le Comité relève avec une vive préoccupation que ce rapport ne contenait pas -et que la délégation de l’État partie n’a pas été en mesure de lui fournir- les données demandées sur les poursuites et les condamnations d’agents de l’État pour des actes constitutifs de torture au regard de la Convention ; des informations sur la progression d’enquêtes particulièrement importantes, des données sur le nombre, la capacité et le taux d’occupation des lieux de détention de l’État partie et des renseignements sur les mesures de réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation, prises dans le cadre d’affaires de torture et de mauvais traitements. Le Comité regrette également l’absence de données statistiques sur les enquêtes et les poursuites dans les affaires de disparition forcée, de violence à l’égard de femmes et des filles, de traite de personnes, de formes contemporaines d’esclavage et d’expulsion de réfugiés (art. 2, 3, 11 à 14 et 16).

45. L’État partie devrait recueillir et présenter des données statistiques, ventilées selon l’âge et le sexe des victimes, de façon à permettre au Comité d’avoir une idée plus exacte de l’application par l’État partie de la Convention au niveau national, notamment des données sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations relatives à des actes de torture et des mauvais traitements imputés à des membres des forces de l’ordre. Des données statistiques sur la violence physique et sexuelle à l’égard des filles et des femmes, la violence au foyer, les réfugiés et les disparitions forcées devraient être également recueillies et présentées.

Procédure de suivi

46. Le Comité demande à l’État partie de lui faire parvenir, d’ici au 12 mai 2018, des informations sur la suite donnée à ses recommandations concernant les poursuites à l’encontre d’agents de police reconnus coupables d’actes de torture, la mise en place d’organes de contrôle efficaces de la police et leur fonctionnement et les mesures prises pour faire en sorte que toutes les allégations de torture ou de mauvais traitements fassent rapidement l’objet d’une enquête approfondie et impartiale menée par un organe civil pleinement indépendant (voir par. 7 c), 9 c) et 11 a)). À ce propos, l’État partie est invité à informer le Comité sur ses intentions concernant l’application, pendant la période qui sera couverte par le prochain rapport périodique, de tout ou partie des autres recommandations figurant dans les observations finales.

Autres questions

47. Le Comité recommande à l’État partie de retirer sa réserve par laquelle il dit ne pas reconnaître la compétence du Comité pour mener une enquête confidentielle au titre de l’article 20.

48. L’État partie est invité à rendre publics et à diffuser largement le rapport soumis au Comité, les comptes rendus analytiques du dialogue qu’il a eu avec lui et les présentes observations finales, dans les langues voulues, par le biais des sites Web officiels, des médias et des organisations non gouvernementales .

49. Le Comité demande à l’État partie de lui soumettre son prochain rapport périodique, qui sera son deuxième, le 12 mai 2021 au plus tard. À cet effet, le Comité invite l’État partie à indiquer, d’ici au 12 mai 2018, qu’il accepte d’établir son rapport en suivant la procédure simplifiée, qui consiste pour le Comité à transmettre une liste de points à l’État partie avant que celui-ci ne soumette le rapport attendu. Les réponses à cette liste constitueront le prochain rapport périodique de l’État partie au titre de l’article 19 de la Convention. L’État partie est également invité à soumettre son document de base commun conformément aux instructions qui figurent dans les directives harmonisées pour l’établissement des rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN.2/Rev.6).