NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/15/Add.2341er juillet 2004

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Trente-sixième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales: Rwanda

1.Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Rwanda (CRC/C/70/Add.22) à ses 953e et 954e séances (voir CRC/C/SR.953 et 954), tenues le 21 mai 2004, et a adopté à sa 971e séance (voir CRC/C/SR.971), tenue le 4 juin 2004, les observations finales ci-après.

A. Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation par l’État partie de son deuxième rapport périodique1, établi conformément à ses directives. Il prend note également de la présentation des réponses écrites à sa liste des points à traiter (CRC/C/Q/RWA/2). Le Comité note que, grâce à la présence d’une délégation de haut niveau, dont les membres participent directement à la mise en œuvre de la Convention, il a pu se faire une meilleure idée de la situation des droits de l’enfant dans l’État partie.

B. Mesures de suivi mises en œuvre et progrès accomplis par l’État partie

3. Le Comité accueille avec satisfaction:

a) L’adoption de la Constitution de 2003, qui contient des dispositions relatives aux droits de l’homme, y compris les droits de l’enfant;

b) L’adoption de la Politique nationale pour les orphelins et les autres enfants vulnérables (2003);

c) L’adoption de la loi 27/2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre les violences;

d) L’adoption de la Politique nationale de santé (2002) et de l’initiative Vision 2020;

e) La création de la Commission nationale des droits de l’homme en 1999;

f) La ratification de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant;

g) La ratification de la Convention n o 182 de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (2000);

h) La ratification des deux Protocoles facultatifs à la Convention se rapportant l’un à l’implication d’enfants dans un conflit armé et l’autre à la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

4.Le Comité note que le génocide perpétré en 1994 a des conséquences négatives à long terme sur la mise en œuvre de la Convention et que la vie de tous les enfants a été sérieusement affectée par cette tragédie et ses séquelles. Le Comité note également la forte dégradation des conditions socioéconomiques intervenue dans l’État partie depuis la ratification de la Convention et aggravée par le génocide.

D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1. Mesures d’application générales

Législation

5.Le Comité constate avec préoccupation que la loi 27/2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre les violences et d’autres textes législatifs pertinents ne sont pas intégralement appliqués. Le Comité constate également avec préoccupation que les textes législatifs relatifs aux droits de l’enfant, ainsi que le droit coutumier, ne sont pas totalement compatibles avec les dispositions et principes de la Convention.

6. Le Comité encourage l’État partie à prendre toutes les mesures voulues pour mettre sa législation interne en pleine conformité avec les principes et dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant et appliquer cette législation dans son intégralité. À ce propos, le Comité encourage aussi l’État partie à accélérer la promulgation d’un code exhaustif de l’enfant.

Coordination

7.Le Comité note que le Ministère du genre et de la famille était responsable des affaires relatives à l’enfance et que le Programme national pour l’enfant, institué en 1997, est maintenant chargé de la coordination des programmes et politiques concernant les enfants. Le Comité est préoccupé par ce transfert des responsabilités concernant les questions relatives à l’enfance et s’inquiète de la faiblesse des ressources financières et humaines affectées au Programme national pour l’enfant, qui ne lui permet pas de fonctionner efficacement.

8. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour doter le Programme national pour l’enfant de ressources humaines, financières et autres suffisantes ainsi que d’un mandat précis et de l’autorité requise pour s’acquitter de sa mission. Le Comité recommande de plus à l’État partie d’assurer la stabilité et de renforcer la capacité du ministère investi de la responsabilité principale en matière de coordination de l’application de la Convention aux niveaux local et national et de solliciter l’assistance technique, notamment de l’UNICEF, à cette fin.

Plan d’action national pour l’enfance

9.Malgré l’adoption récente de la Politique nationale pour les orphelins et les autres groupes vulnérables (2003) et du Plan sectoriel de lutte contre le VIH/sida auprès de la jeunesse pour la décennie 2001-2010, le Comité note avec préoccupation qu’il n’a encore été adopté aucun plan d’action national en faveur de tous les enfants reposant pleinement sur la Convention.

10. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour adopter, en consultation avec toutes les parties prenantes intéressées, y compris la société civile, un plan d’action national pour l’enfance qui couvre l’ensemble des domaines d’intérêt de la Convention, reprenne les Objectifs de développement énoncés dans la Déclaration du Millénaire et s’inspire pleinement d’«Un monde digne des enfants», ainsi que d’affecter les ressources humaines et financières nécessaires à sa mise en œuvre intégrale et de solliciter une assistance internationale de l’UNICEF à cet effet.

Structures de suivi indépendantes

11.Le Comité se félicite de la création, en 1999, de la Commission nationale des droits de l’homme, qui reçoit et instruit également les plaintes pour violation des droits des enfants. Toutefois, il relève avec inquiétude que la Commission ne dispose pas des ressources humaines et matérielles suffisantes pour faire face avec efficacité à sa charge de travail aux niveaux national et local.

12. Le Comité recommande à l’État partie, conformément à l’Observation générale n o  2 formulée par le Comité au sujet des institutions nationales de défense des droits de l’homme:

a) De doter la Commission nationale des droits de l’homme de ressources suffisantes pour lui permettre d’exercer efficacement ses responsabilités;

b) D’envisager la création au sein de la Commission d’un bureau de défense des droits des enfants chargé de centraliser ses travaux relatifs aux droits de l’enfant;

c) D’en assurer l’accessibilité aux enfants, en particulier en sensibilisant aux compétences de cet organe s’agissant de recevoir, d’instruire et d’examiner les plaintes déposées par les enfants, notamment ceux qui sont touchés par des conflits;

d) De demander une assistance technique, notamment au HCDH.

Ressources

13.Tout en relevant que l’État partie accorde la priorité à l’accroissement des budgets de l’éducation et de la santé et à l’adoption du Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (2002), le Comité s’inquiète de l’insuffisante attention portée à l’article 4 de la Convention, dans lequel il est indiqué qu’aux fins de la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels des enfants, les États parties prennent des mesures «dans toutes les limites des ressources dont ils disposent». Le Comité s’inquiète en particulier de la diminution des ressources financières consacrées à la santé et à l’éducation.

14. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De ne négliger aucun effort pour accroître la part du budget affectée à la mise en œuvre des droits des enfants et, à cet égard, d’assurer une dotation suffisante en ressources humaines et de veiller à ce que la mise en œuvre des politiques concernant les enfants demeure une priorité aux niveaux national et local dans le contexte de la décentralisation et de la privatisation;

b) De faire du respect de la mise en œuvre des droits de l’enfant une considération déterminante dans l’application du Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté;

c) De définir les moyens de procéder à l’évaluation systématique de l’impact des allocations budgétaires sur la mise en œuvre des droits de l’enfant, et de rassembler et de diffuser les informations correspondantes.

Collecte des données

15.Le Comité constate avec préoccupation qu’à l’heure actuelle il n’est pas procédé à une collecte systématique et générale de données ventilées couvrant tous les domaines visés dans la Convention et concernant tous les groupes d’enfants, en particulier les enfants orphelins, abandonnés ou handicapés, alors qu’une telle collecte permettrait de suivre et d’évaluer les progrès accomplis et de prendre la mesure de l’impact des politiques adoptées en faveur des enfants.

16. Le Comité recommande à l’État partie de se doter, en se conformant à la Convention, d’un ensemble d’indicateurs et d’un système de collecte de données permettant une ventilation par sexe, âge et région urbaine ou rurale. Ce système devrait couvrir tous les individus jusqu’à l’âge de 18 ans, en mettant l’accent sur les enfants particulièrement vulnérables, notamment les enfants orphelins, abandonnés ou handicapés. Il invite en outre l’État partie à se servir de ces indicateurs et données pour élaborer des politiques et des programmes aux fins de la mise en œuvre effective de la Convention.

Coopération avec la société civile

17.Tout en prenant note du rôle des organisations non gouvernementales dans la fourniture de services, le Comité est préoccupé par l’insuffisance des efforts déployés pour faire participer la société civile à la pleine mise en œuvre de la Convention et au processus d’établissement des rapports.

18. Le Comité recommande à l’État partie de faire participer systématiquement les organisations non gouvernementales et les autres éléments de la société civile, notamment les associations d’enfants, à tous les stades de la mise en œuvre de la Convention, y compris celui de l’élaboration des politiques et programmes, et à la rédaction du prochain rapport au Comité.

Formation et diffusion

19.Le Comité prend note des mesures prises en vue d’une sensibilisation générale aux principes et dispositions de la Convention et se félicite de la traduction de brochures en kinyarwanda, mais craint que ces mesures ne soient insuffisantes. À cet égard, il est préoccupé par l’absence de plan systématique visant à former et sensibiliser les groupes professionnels travaillant avec et pour les enfants.

20. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’intensifier ses efforts et de systématiser la diffusion des principes et des dispositions de la Convention afin de sensibiliser la population aux droits des enfants;

b) De faire traduire la Convention dans les langues nationales;

c) De former et de sensibiliser systématiquement aux dispositions de la Convention tous les groupes professionnels qui travaillent pour et avec les enfants, notamment les parlementaires, les juges, les avocats, les responsables de l’application des lois, les fonctionnaires locaux et nationaux, le personnel des institutions, les enseignants, le personnel de santé, dont les psychologues, et les travailleurs sociaux, ainsi que les chefs traditionnels et les personnalités des communautés;

d) De demander une assistance technique au HCDH, à l’UNESCO et à l’UNICEF, entre autres.

2. Définition de l’enfant

21.Le Comité est préoccupé par d’éventuelles incohérences entre l’âge minimum d’admission à l’emploi et l’âge de la fin de la scolarité obligatoire ainsi que par la pratique du mariage forcé et précoce, malgré les dispositions législatives fixant l’âge nubile à 18 ans.

22. Compte tenu des articles 1, 2 et 3 de la Convention et de ses dispositions connexes, le Comité recommande à l’État partie de revoir sa législation afin d’éliminer les incohérences entre l’âge minimum d’admission à l’emploi et l’âge de la fin de la scolarité obligatoire, et d’amplifier ses efforts visant à faire respecter les prescriptions légales.

3. Principes généraux

Le droit à la non-discrimination

23.Tout en notant que l’article 11 de la Constitution de 2003 interdit la discrimination et en prenant acte des efforts déployés par l’État partie pour combattre la discrimination, notamment avec l’adoption de la loi n° 22/99 du 12 novembre 1999 sur les droits des femmes en matière de succession et l’élaboration d’une politique du genre par le Ministère du genre et de la promotion de la femme, le Comité s’inquiète de la persistance d’une discrimination de fait dans l’État partie. Il est particulièrement préoccupé par les inégalités dans la jouissance de leurs droits par les filles et les enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables, tels que les enfants orphelins, abandonnés ou handicapés, les enfants nés hors mariage, les enfants vivant dans des régions rurales et les enfants pygmées.

24. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’intensifier ses efforts pour garantir à tous les enfants relevant de sa juridiction l’exercice sans discrimination de tous les droits énoncés dans la Convention, conformément à son article 2;

b) De privilégier et cibler les services sociaux destinés aux enfants appartenant aux groupes marginalisés et aux groupes les plus vulnérables, notamment dans le cadre de la coopération internationale.

25. Le Comité demande que dans le prochain rapport périodique figurent des renseignements précis sur les mesures et programmes en relation avec la Convention mis en place par l’État partie pour donner effet à la Déclaration et au Programme d’action adoptés par la Conférence mondiale de 2001 contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, compte tenu de l’Observation générale n o  1 (Buts de l’éducation) du Comité.

Intérêt supérieur de l’enfant

26.Le Comité note avec préoccupation que le principe général de l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3) n’est pas pleinement appliqué et intégré dûment tant dans la mise en œuvre des politiques et des programmes de l’État partie que dans les décisions judiciaires et administratives.

27. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour assurer l’incorporation appropriée du principe général de l’intérêt supérieur de l’enfant dans la totalité des lois et des budgets ainsi que dans les décisions judiciaires et administratives et les projets, programmes et services qui ont des incidences sur les enfants.

Respect des opinions de l’enfant

28.Le Comité note avec préoccupation que le respect des opinions de l’enfant demeure limité en raison de certaines attitudes traditionnelles, que ce soit dans la famille, à l’école, devant les tribunaux et les instances administratives ou dans la société en général.

29. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts visant à assurer l’application du principe du respect des opinions de l’enfant. À cet égard, il conviendrait de mettre tout particulièrement l’accent sur le droit qu’a l’enfant de participer aux activités au sein de la famille, à l’école, dans d’autres institutions et organismes et au sein de la société en général, une attention particulière étant accordée aux groupes vulnérables. Un accent particulier devrait également être mis sur le droit de l’enfant d’être entendu dans les procédures judiciaires ou administratives le concernant. Ce principe général devrait aussi trouver son expression dans l’ensemble des lois, politiques et programmes concernant les enfants. Il conviendrait de renforcer les campagnes de sensibilisation du public ainsi que l’éducation et la formation des professionnels quant à l’application de ce principe.

4. Droits et libertés civils

Droit à l’identité

30.Le Comité prend note des efforts entrepris par l’État partie en vue de déterminer l’identité d’un grand nombre d’enfants évacués vers différents pays pendant le génocide de 1994, ou juste après, tout en constatant avec préoccupation qu’il n’a pas encore été possible d’identifier de nombreux enfants et de les restituer à leur famille.

31. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses efforts tendant à restituer ces enfants à leur famille en facilitant la détermination de leur identité.

32.Le Comité prend note de l’introduction du nouveau système de certificat de naissance et de carte d’identité, dans lequel il n’est pas fait mention de l’origine ethnique, mais il s’inquiète de la lenteur des progrès accomplis dans ce domaine.

33. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses efforts afin que tous les enfants puissent bénéficier d’un nouveau certificat de naissance et d’une nouvelle carte d’identité.

Châtiments corporels

34.Le Comité note que la législation rwandaise ne contient aucune disposition interdisant expressément le recours aux châtiments corporels et constate avec inquiétude que des châtiments corporels continuent à être infligés aux enfants par leurs parents, des enseignants ou des responsables de l’application des lois.

35. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De se doter d’un texte législatif interdisant expressément les châtiments corporels;

b) D’entreprendre des campagnes d’information et d’éducation destinées à sensibiliser les parents, les enseignants et les autres professionnels s’occupant d’enfants, ainsi que le public dans son ensemble, au caractère néfaste des châtiments corporels et à l’importance d’appliquer d’autres formes de discipline, non violentes, conformément au paragraphe 2 de l’article 28 de la Convention;

c) D’enquêter avec diligence sur toutes les allégations de mauvais traitements infligés à des enfants par des responsables de l’application des lois et de veiller à ce que des mesures judiciaires adaptées soient prises à l’encontre des auteurs présumés de ces actes;

d) D’assurer la protection, la réadaptation et la réinsertion des enfants victimes, à la lumière de l’article 39 de la Convention.

Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

36.Le Comité note que la loi 27/2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre les violences interdit tout acte de torture et toute autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant à l’encontre de l’enfant, mais reste préoccupé par l’absence de définition de ces infractions dans le Code pénal et par le fait que le Rwanda n’est pas partie à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

37. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures appropriées en vue de combattre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et de devenir partie à la Convention contre la torture.

5. Milieu familial et protection de remplacement

Responsabilité des parents

38.Le Comité constate avec préoccupation que nombre de familles monoparentales et de familles dirigées par un enfant, en particulier de familles dirigées par une fille, éprouvent des difficultés financières et autres. Il constate en outre avec une vive préoccupation que les parents ont la possibilité de demander l’internement de leur enfant si son comportement n’est pas satisfaisant.

39. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre efficacement la politique nationale en faveur des orphelins et des autres enfants vulnérables et de fournir une assistance aux familles monoparentales et aux familles dirigées par un enfant afin de les aider à mener à bien l’éducation de leurs enfants ou de leurs frères et sœurs, en application du paragraphe 2 de l’article 18 de la Convention;

b) De prendre les mesures nécessaires pour interdire la possibilité de faire interner un enfant en raison de son comportement ou pour des motifs d’ordre économique.

Enfants privés de leur milieu familial

40.Le Comité constate avec une profonde préoccupation que dans l’État partie le tiers des enfants sont orphelins. Il demeure vivement préoccupé par la fragilité des liens familiaux, le grand nombre d’enfants privés de leur milieu familial et, en particulier, par les informations concernant l’abandon d’enfants par leurs parents pour des motifs d’ordre principalement économique. Le Comité constate en outre avec inquiétude que cette pratique débouche sur le placement de ces enfants dans des institutions où ils vivent dans des conditions difficiles et pour de longues périodes, sans mécanismes adéquats de protection. Le Comité constate également avec préoccupation que l’on privilégie un tel placement au détriment de la recherche de mesures de protection de remplacement (par exemple l’adoption et le placement nourricier).

41. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer et de multiplier, en collaboration avec les ONG intéressées, les programmes d’aide aux familles dans le besoin, notamment aux familles monoparentales et à celles qui éprouvent des difficultés socioéconomiques ou autres. Le Comité demande instamment à l’État partie de n’épargner aucun effort pour accroître l’appui aux parents, notamment sous la forme d’une formation, en vue de décourager l’abandon d’enfants. Il recommande aussi à l’État partie d’amplifier ses efforts tendant à promouvoir la protection de remplacement, en particulier le placement nourricier et l’adoption. Le Comité recommande en outre à l’État partie de veiller à ce que la situation des enfants placés en institution fasse l’objet d’un réexamen périodique et de mettre en place un mécanisme indépendant et aisément accessible de suivi des plaintes concernant le traitement de ces enfants.

Adoption

42.Tout en notant que l’adoption est régie par le Code civil et la loi no 27/2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre les violences, le Comité constate avec préoccupation que les adoptions non officielles, dont on ne vérifie en général pas si elles sont conformes à l’intérêt supérieur de l’enfant, sont courantes et largement acceptées dans l’État partie. Le Comité constate également avec préoccupation que les adoptions internationales ne se font pas toujours dans le respect des prescriptions de l’article 21 de la Convention.

43. À la lumière de l’article 21 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de renforcer les procédures administratives et législatives applicables aux adoptions officielles nationales et internationales, afin de lutter contre la pratique des adoptions non officielles et de garantir la protection des droits des enfants concernés. Face à l’augmentation du nombre d’enfants privés de milieu familial, le Comité recommande à l’État partie de promouvoir et d’encourager les adoptions officielles et de renforcer son programme de placement en famille d’accueil. Il lui recommande enfin de devenir partie à la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale et de demander une assistance internationale, notamment à l’UNICEF.

Violence, sévices, négligence et maltraitance

44.Le Comité est préoccupé par le nombre élevé et grandissant d’affaires de maltraitance physique et d’abus sexuels sur enfants, en particulier dans les écoles, les institutions de prise en charge et la famille. Le Comité est également préoccupé par la méconnaissance du problème de la violence domestique et des mauvais traitements et sévices (sexuels, physiques et psychologiques) à l’égard des enfants et par le manque d’information à ce sujet, de même que par l’insuffisance des ressources financières et humaines affectées aux programmes de prévention et de lutte contre la violence à l’égard des enfants.

45. À la lumière de l’article 19 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:

a) De consacrer une étude approfondie à la violence domestique, aux mauvais traitements et sévices (y compris les abus sexuels dans la famille) devant servir de base à l’adoption de lois, politiques et programmes susceptibles de faire évoluer les attitudes et d’améliorer la prévention et le traitement des cas de violence à l’égard des enfants;

b) De renforcer les campagnes de sensibilisation, en y associant les enfants, afin de prévenir et combattre le phénomène de la maltraitance à enfants;

c) D’enquêter comme il convient sur les affaires de violence, dans le cadre d’une procédure judiciaire attentive aux besoins des enfants, en veillant notamment à ce que l’opinion des enfants soit dûment prise en considération, et de punir les coupables tout en tenant dûment compte de la nécessité de protéger le droit de l’enfant au respect de sa vie privée;

d) De mettre en place une procédure adaptée de dépôt de plainte, d’informer les enfants de son existence et de les encourager à l’utiliser;

e) De fournir des services aux fins de la réadaptation physique et psychologique et de la réinsertion sociale des victimes de viol, sévices, négligence, mauvais traitements, violences ou exploitation, conformément à l’article 39 de la Convention, et de prendre des mesures pour empêcher que les victimes ne soient traitées comme des délinquants ou stigmatisées;

f) De prendre en considération les recommandations que le Comité a adoptées lors de ses journées de débat général sur la violence contre les enfants (CRC/C/100, par. 688, et CRC/C/111, par. 701 à 745);

g) De demander une assistance technique, notamment à l’UNICEF et à l’OMS.

6. Santé de base et bien-être

Enfants handicapés

46.Le Comité se félicite du lancement d’une étude sur l’accès des enfants handicapés à l’éducation, mais demeure préoccupé par le manque de données sur ces enfants, par l’insuffisance de mesures de protection de jure et de facto en leur faveur ainsi que par le manque de moyens et de services destinés aux enfants handicapés. Il s’inquiète aussi du petit nombre d’enseignants formés pour travailler avec les enfants handicapés et de l’insuffisance des mesures prises pour faciliter leur intégration dans le système éducatif et, plus généralement, dans la société. Le Comité est également préoccupé par la modicité des ressources affectées aux programmes d’éducation spéciale pour les enfants handicapés.

47. Compte tenu des Règles pour l’égalisation des chances des handicapés (annexe de la résolution 48/96 de l’Assemblée générale) et des recommandations adoptées par le Comité lors de la journée de débat général sur les droits des enfants handicapés (CRC/C/69, par. 310 à 339), le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre des mesures effectives en vue de recueillir des données statistiques pertinentes sur les enfants handicapés et de veiller à ce qu’elles soient utilisées pour élaborer des politiques et programmes en faveur de ces enfants;

b) D’intensifier ses efforts en vue de l’élaboration de programmes de dépistage précoce des handicaps;

c) De mettre en place des programmes d’éducation spéciale à l’intention des enfants handicapés et d’encourager, autant que possible, l’intégration de ces enfants dans le système éducatif général et dans la vie sociale;

d) D’organiser des campagnes de sensibilisation du public aux droits et besoins particuliers des enfants handicapés et des enfants ayant des problèmes de santé mentale;

e) D’accroître les ressources financières et humaines consacrées à l’éducation spéciale et à l’appui aux enfants handicapés;

f) D’engager une coopération technique, notamment avec l’OMS et l’UNESCO, en vue de la formation des personnels, dont les enseignants, travaillant avec et pour les enfants handicapés.

Santé et services de santé

48.Tout en prenant note de la Politique nationale de la santé 2000 et de l’initiative Vision 2020, le Comité est vivement préoccupé par les taux encore élevés de mortalité infantile, postinfantile et maternelle ainsi que par la brièveté de l’espérance de vie dans l’État partie. Il est en outre préoccupé par l’insuffisance persistante des ressources (tant financières qu’humaines) affectées aux services de santé. Le Comité constate de plus avec inquiétude que la survie et le développement des enfants dans l’État partie continuent d’être menacés par des maladies de la petite enfance et qu’il existe un grave problème de malnutrition. Le manque de soins de santé prénatals constitue aussi un sujet de préoccupation.

49. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De renforcer ses efforts tendant à affecter des ressources suffisantes et à élaborer et mettre en œuvre des politiques et programmes d’envergure destinés à améliorer la situation sanitaire des enfants, en particulier dans les zones rurales;

b) D’élargir l’accès aux services de soins de santé primaires; de réduire la mortalité infantile, postinfantile et maternelle; de prévenir et combattre la malnutrition, en particulier parmi les groupes d’enfants vulnérables et défavorisés; de promouvoir des pratiques saines d’allaitement au sein;

c) De mettre en place un système de soins de santé de la meilleure qualité possible;

d) De lancer des programmes de formation de sages-femmes pour assurer la sûreté des accouchements à domicile;

e) De rechercher des moyens supplémentaires de coopération et d’assistance en vue d’améliorer la santé des enfants avec, entre autres, l’OMS et l’UNICEF.

Santé des adolescents

50.Le Comité est préoccupé par le peu d’intérêt porté aux questions touchant à la santé des adolescents, notamment aux problèmes d’épanouissement, de santé mentale et génésique et d’abus de substances. Il est aussi préoccupé par la situation particulière des filles, eu égard notamment au pourcentage très élevé de mariages et de grossesses précoces qui peuvent avoir des conséquences néfastes pour leur santé.

51. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De mener une étude approfondie visant à déterminer la nature et l’ampleur des problèmes de santé des adolescents et, avec la pleine participation de ces derniers, de formuler, à partir des conclusions de cette étude, des politiques et des programmes axés sur la santé des adolescents, en portant une attention particulière à la prévention des infections sexuellement transmissibles, dont le VIH/sida, et des grossesses précoces, notamment par des activités d’éducation à la santé de la procréation en direction des filles et des garçons;

b) De renforcer les services de conseil relatifs à la santé mentale, en les adaptant aux besoins des adolescents, d’en faire connaître l’existence à ces derniers et de les leur rendre accessibles.

VIH/sida

52.Tout en prenant note de l’adoption du Plan stratégique de lutte contre le VIH/sida auprès de la jeunesse 2002-2006 ainsi que de la création du Ministère d’État en charge de la lutte contre le VIH/sida et d’une Commission nationale de lutte contre le sida, le Comité demeure préoccupé par la prévalence élevée et en augmentation du VIH/sida parmi les adultes et les enfants, ainsi que par le nombre grandissant d’enfants rendus orphelins par cette maladie. À ce sujet, le Comité s’inquiète du manque de protection de remplacement pour ces enfants.

53. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’intensifier ses efforts de prévention contre le VIH/sida compte tenu, notamment, de l’Observation générale n o  3 du Comité concernant le VIH/sida et les droits de l’enfant;

b) De renforcer les mesures de prévention contre la transmission de la mère à l’enfant, notamment en combinant et en coordonnant ces mesures avec la lutte contre la mortalité maternelle, et de prendre des mesures adéquates pour atténuer les répercussions du décès de parents, d’enseignants ou d’autres personnes victimes du VIH/sida sur la vie familiale et affective des enfants et leur éducation ainsi que sur leur accès à l’adoption;

c) D’amplifier ses efforts tendant à sensibiliser au VIH/sida les adolescents, en particulier ceux appartenant à des groupes vulnérables, et la population en général, notamment dans le souci de réduire la discrimination à l’encontre des enfants infectés et/ou affectés par le VIH/sida;

d) De demander une assistance technique supplémentaire, notamment à l’UNICEF, à l’OMS et au Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA).

Droit à un niveau de vie suffisant

54.Le Comité est très préoccupé par la forte prévalence de la pauvreté et par le nombre croissant d’enfants qui ne jouissent pas du droit à un niveau de vie suffisant.

55. Le Comité recommande à l’État partie, conformément aux dispositions de l’article 27 de la Convention, d’intensifier ses efforts visant à apporter un soutien et une assistance matérielle aux familles économiquement défavorisées, aux enfants chefs de famille, aux enfants abandonnés et aux orphelins, et de garantir le droit des enfants à un niveau de vie suffisant. À ce propos, le Comité recommande à l’État partie de prêter une attention particulière aux droits et aux besoins des enfants dans la mise en œuvre de son Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté et de tous les autres programmes destinés à améliorer le niveau de vie dans le pays.

7. Éducation, loisirs et activités culturelles

56.Le Comité se félicite de ce que l’article 40 de la Constitution de 2003 dispose que l’enseignement primaire est obligatoire, et est gratuit dans les établissements publics, et de ce que les taux de scolarisation dans le primaire soient du même ordre pour les filles et les garçons, mais est préoccupé par la faiblesse persistante du taux de scolarisation et la forte proportion d’analphabètes. Il est également préoccupé par les disparités entre les sexes et les régions en termes de fréquentation, par les taux élevés d’abandon scolaire et de redoublement, par le nombre insuffisant d’enseignants qualifiés, d’établissements scolaires et de classes et par le manque de matériel pédagogique approprié. À la lumière du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention, le Comité est aussi préoccupé par la qualité de l’enseignement dans l’État partie.

57. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’assurer progressivement l’accès à l’éducation aux filles et garçons des régions urbaines, rurales ou particulièrement défavorisées, dans des conditions d’égalité pour tous;

b) De prendre les mesures voulues pour remédier à la médiocre qualité de l’enseignement et améliorer l’efficacité interne de la gestion de l’enseignement;

c) D’améliorer l’infrastructure scolaire et d’assurer une formation adéquate aux enseignants et un bon approvisionnement en matériel pédagogique;

d) D’améliorer le système éducatif en vue d’atteindre les buts visés au paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention et dans l’Observation générale du Comité sur les buts de l’éducation et de faire une place dans les programmes scolaires aux droits de l’homme, y compris les droits de l’enfant, ainsi qu’à une éducation relative à la paix et à la tolérance et à un enseignement relatif à l’environnement;

e) De sensibiliser à l’importance que revêt l’éducation durant la petite enfance et d’en tenir compte dans le cadre général de l’enseignement;

f) D’encourager la participation des enfants à tous les aspects de la vie scolaire;

g) De demander l’aide de l’UNICEF et de l’UNESCO, entre autre.

Loisirs et activités culturelles

58.Le Comité note avec inquiétude que les enfants n’ont pas suffisamment de possibilités d’exercer leur droit aux loisirs et aux activités culturelles.

59. Le Comité recommande à l’État partie d’œuvrer en faveur d’un plus grand respect du droit des enfants aux loisirs et aux activités culturelles, notamment en sensibilisant les parents, les enseignants et les dirigeants communautaires à ce droit. Le Comité lui recommande de demander à cet effet l’assistance de l’UNESCO et de l’UNICEF.

8. Mesures spéciales de protection

Enfants en situation d’urgence

Enfants réfugiés/déplacés

60.Le Comité prend note des accords récemment conclus par l’État partie et le HCR concernant le rapatriement des réfugiés, dont beaucoup sont des enfants, et se félicite du grand nombre d’enfants ayant été restitués à leur famille au cours des dernières années. Le Comité reste préoccupé par la situation difficile des enfants et de leur famille rapatriés dans l’État partie, en particulier en termes d’accès aux services de santé et à l’éducation. Le Comité relève en outre avec préoccupation que ces enfants ne bénéficient pas de possibilités adéquates de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale.

61. Eu égard aux articles 22 et 39 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de veiller à la délivrance des documents d’identité requis aux enfants réfugiés qui ont été rapatriés dans l’État partie, de faciliter la réunification familiale et d’assurer à tous ces enfants l’exercice de leur droit à la santé et à l’éducation. Le Comité recommande de plus à l’État partie de veiller à ce que les enfants réfugiés qui ont été rapatriés vivent dans la sécurité et bénéficient de toutes les possibilités de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale nécessaires.

Enfants soldats

62.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification du Protocole facultatif à la Convention se rapportant à l’implication d’enfants dans les conflits armés. Le Comité accueille également avec satisfaction la loi 27/2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre toutes les violences, dont l’article 19 dispose que le service militaire est interdit aux individus de moins de 18 ans, mais reste profondément préoccupé par le fait que cette disposition ne s’applique pas aux Forces de défense locale. Le Comité est en outre préoccupé par les nombreuses allégations faisant état du recrutement d’enfants de moins de 15 ans par des groupes armés opérant dans l’État partie ou en République démocratique du Congo. Le Comité constate également avec préoccupation que tous les anciens enfants soldats ne bénéficient pas de possibilités de réadaptation psychologique et de réinsertion sociale, en particulier les filles.

63. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher le recrutement d’individus de moins de 18 ans dans les Forces de défense locale ou tout autre groupe armé sur son territoire;

b) De déployer des efforts supplémentaires en vue de démobiliser les enfants soldats et de les réinsérer dans leur communauté, et de leur fournir des services de réadaptation psychologique et de réinsertion sociale, en portant une attention spéciale aux filles;

c) De demander une assistance technique, notamment à l’UNICEF.

Enfants en situations d’exploitation

Exploitation économique, y compris le travail des enfants

64.Le Comité se félicite de l’adoption du nouveau Code du travail (loi 51/2001 du 31 décembre 2001), mais relève avec une vive inquiétude que le travail des enfants est répandu dans l’État partie, notamment dans le secteur informel et plus particulièrement dans les emplois de maison, et que certains jeunes enfants travaillent de longues heures durant, ce qui a des effets préjudiciables sur leur développement et leur fréquentation scolaire.

65. Eu égard à l’article 32 et aux articles connexes de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:

a) D’entreprendre une étude exhaustive visant à déterminer la situation en matière de travail des enfants;

b) De modifier la législation en vigueur afin de l’harmoniser avec les divers instruments internationaux ratifiés par l’État partie, notamment la Convention n o  182 de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination ;

c) De doter les services de l’inspection du travail, et les autres services chargés d’appliquer la loi, de ressources humaines et autres suffisantes et de former leur personnel afin de renforcer encore leur capacité à veiller efficacement à la pleine application de la législation relative au travail des enfants;

d) De demander une assistance au Programme international de l’OIT pour l’abolition du travail des enfants.

Exploitation sexuelle

66.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification du Protocole facultatif à la Convention se rapportant à la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, mais il reste préoccupé par le nombre croissant d’enfants victimes d’exploitation sexuelle, notamment à des fins de prostitution et de pornographie, en particulier parmi les filles, les enfants orphelins, les enfants abandonnés et les autres enfants défavorisés. Le Comité est également préoccupé par le manque de programmes de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale destinés aux enfants victimes de ces abus et de cette exploitation.

67. Compte tenu de l’article 34 et des articles connexes de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:

a) De renforcer l’application des mesures de protection contre l’exploitation sexuelle et la traite édictées dans l’ensemble des textes législatifs pertinents en faveur des filles et garçons de moins de 18 ans;

b) De veiller à ce que les enfants victimes d’exploitation sexuelle ne soient pas considérés comme des délinquants;

c) De mettre en œuvre, conformément à la Déclaration et au Programme d’action adoptés en 1996 par le premier Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et à l’Engagement mondial adopté en 2001 par le deuxième Congrès mondial, des politiques et programmes de prévention, de réadaptation et de réinsertion sociale des enfants victimes adaptés aux spécificités des filles et des garçons et des enfants.

Enfants des rues

68.Tout en notant qu’une étude a été consacrée aux enfants des rues en 1998, le Comité est préoccupé par le nombre croissant d’enfants des rues et l’absence de stratégie globale systématique visant à remédier à ce phénomène et à fournir à ces enfants une assistance adaptée. Le Comité est en outre préoccupé par les indications selon lesquelles des enfants des rues ont été rassemblés puis placés dans des lieux de détention où leurs conditions de vie sont mauvaises.

69. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De poursuivre ses efforts visant à prévenir et résorber ce phénomène en remédiant à ses causes profondes, notamment en réalisant une étude globale ayant pour objet de déterminer les moyens de parvenir à ces fins dans le respect de l’intérêt supérieur de ces enfants et avec leur participation;

b) D’étudier la possibilité de remédier à la situation des enfants des rues dans le cadre du système d’aide sociale à la jeunesse et de mettre un terme aux rafles d’enfants et à leur placement en détention;

c) De veiller à ce que les enfants des rues disposent de nourriture, de vêtements, d’un logement, de soins de santé et de services éducatifs appropriés, notamment d’une formation pour l’acquisition de compétences professionnelles ou pour la vie quotidienne, afin de favoriser leur plein développement, et de définir des moyens originaux de prendre en charge ces enfants;

d) D’assurer à ceux de ces enfants victimes de violences physiques ou sexuelles ou s’adonnant à l’abus de substances des services de traitement et réadaptation ainsi que des services de conseil pour les aider à se réconcilier avec leur famille.

Enfants en conflit avec la loi

Enfants en détention parce que soupçonnés de crimes de guerre

70.Le Comité constate avec une vive préoccupation que des individus âgés de moins de 18 ans au moment de crimes de guerre qui leur sont imputés n’ont toujours pas été jugés, sont incarcérés dans de très mauvaises conditions − certains depuis très longtemps − et ne bénéficient pas de services appropriés destinés à promouvoir leur réadaptation. Le Comité prend note de la mise en place des juridictions gacaca, mais est profondément préoccupé par l’absence de procédure spécifique pour les personnes qui avaient moins de 18 ans au moment des crimes de guerre dont ils sont soupçonnés, contrairement aux dispositions du paragraphe 3 de l’article 40 de la Convention, et se trouvent encore en ce que l’on pourrait considérer comme une détention avant jugement.

71. Eu égard aux articles 37, 40 et 39 de la Convention et aux autres normes internationales pertinentes, le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour mener à leur terme dans les six mois toutes les procédures judiciaires pendantes visant des individus soupçonnés d’avoir commis des crimes de guerre qui avaient moins de 18 ans au moment des faits.

Autres enfants en conflit avec la loi

72.Tout en prenant acte des efforts déployés par l’État partie dans ce domaine, notamment avec l’adoption de textes législatifs, de décrets et de circulaires ministérielles, le Comité est préoccupé par la faiblesse des progrès accomplis dans la mise en place d’un système opérationnel de justice pour mineurs dans l’ensemble du pays. Le Comité s’inquiète en particulier du manque de juridictions pour mineurs, de juges des enfants et de travailleurs sociaux spécialisés dans ce domaine. Il est en outre profondément préoccupé par les très mauvaises conditions de détention, imputables principalement à la surpopulation carcérale, par le recours fréquent à la détention avant jugement et par sa durée excessive, par le temps très long s’écoulant avant que les affaires concernant des mineurs ne soient jugées, par l’insuffisance des moyens de réadaptation et de réinsertion mis à la disposition des mineurs à l’issue de la procédure judiciaire à leur encontre et par le caractère sporadique de la formation des magistrats, procureurs et fonctionnaires de l’administration pénitentiaire.

73. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures supplémentaires en vue de réformer la législation pertinente et l’administration de la justice pour mineurs en s’alignant sur les dispositions de la Convention, en particulier les articles 37, 40 et 39, et sur d’autres normes des Nations Unies touchant à la justice pour mineurs, notamment l’Ensemble de Règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale.

74. Le Comité recommande en outre à l’État partie:

a) De prendre toutes les mesures voulues pour que des tribunaux pour mineurs soient créés et des juges des mineurs nommés dans toutes les régions du pays;

b) De n’envisager une mesure privative de liberté qu’en dernier ressort et pour la période la plus courte possible, et de limiter, par des dispositions législatives, la durée de la détention avant jugement;

c) De fournir aux personnes de moins de 18 ans une assistance juridique dès le début de la procédure judiciaire;

d) De protéger les droits des enfants privés de liberté et d’améliorer leurs conditions de détention, en particulier en s’attaquant au problème de la surpopulation carcérale et en créant des prisons spéciales pour enfants, adaptées à leur âge et à leurs besoins, et, dans l’intervalle, en faisant en sorte que sur l’ensemble du territoire les enfants soient séparés des adultes dans toutes les prisons ainsi que dans les centres de détention avant jugement;

e) De veiller à ce que toutes les personnes âgées de moins de 18 ans en conflit avec la loi ne se voient pas infliger les sanctions prévues pour les adultes;

f) De veiller à ce que toutes les personnes âgées de moins de 18 ans confrontées au système de justice pour mineurs restent en contact avec les membres de leur famille;

g) De faire en sorte que les détenus soient soumis périodiquement à des examens médicaux, pratiqués par un personnel médical indépendant;

h) De mettre à la disposition des personnes âgées de moins de 18 ans un mécanisme de plainte indépendant, accessible et à leur écoute;

i) De mettre en place des programmes de formation aux normes internationales pertinentes à l’intention de l’ensemble des personnels opérant dans le système de justice pour mineurs;

j) De s’employer à instituer un programme de réadaptation et de réinsertion sociale à l’issue de la procédure judiciaire à l’intention des mineurs en conflit avec la loi;

k) De demander une assistance technique dans le domaine de la justice pour mineurs et de la formation des forces de police, notamment au HCDH, au Centre de prévention internationale du crime (ONU), au Réseau international en matière de justice pour mineurs et à l’UNICEF.

Enfants appartenant à une minorité ou à un groupe autochtone

75.Le Comité est préoccupé par la situation des enfants appartenant à une minorité, notamment les enfants batwas, en particulier par le fait qu’ils ont difficilement accès aux services sociaux de base, en particulier aux soins de santé, à la vaccination et à l’éducation, et par la violation de leur droit à la survie et au développement, de leur droit de jouir de leur propre culture et de leur droit d’être protégés contre la discrimination.

76. Conformément aux recommandations formulées lors de sa journée de débat général consacrée aux droits des enfants autochtones (CRC/C/133, par. 624), le Comité recommande à l’État partie:

a) D’entreprendre une étude visant à déterminer la situation et les besoins des enfants batwas et d’élaborer un plan d’action, en y associant les chefs de la communauté batwa , visant à protéger les droits de ces enfants et à les faire bénéficier de services sociaux;

b) De définir des moyens et mesures propres à faciliter l’enregistrement des naissances, la fourniture de soins de santé, etc.

9. Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant

77.Tout en se félicitant de la ratification des deux Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant, l’un, la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, et l’autre, l’implication d’enfants dans les conflits armés, le Comité note avec préoccupation que l’État partie est en retard dans la soumission de ses rapports initiaux au titre de ces deux Protocoles.

78. Le Comité prie instamment l’État partie de soumettre dès que possible ses rapports initiaux au titre des Protocoles facultatifs.

10. Diffusion de la documentation

79. Compte tenu du paragraphe 6 de l’article 44 de la Convention, le Comité recommande que le deuxième rapport périodique et les réponses écrites présentées par l’État partie soient largement diffusés auprès du grand public et qu’il soit envisagé de publier le rapport ainsi que les comptes rendus analytiques des débats correspondants de même que les observations finales y relatives adoptées par le Comité. Ce document devrait être largement diffusé de façon à susciter un débat et à contribuer à faire connaître la Convention, ainsi que son application et son suivi, au sein du Gouvernement et du Parlement et parmi le public, y compris les organisations non gouvernementales concernées. Le Comité recommande à l’État partie de solliciter une coopération internationale à cet égard.

11. Périodicité des rapports

80. Le Comité souligne l’importance d’une pratique en matière de présentation des rapports qui soit pleinement conforme aux dispositions de l’article 44 de la Convention. Un aspect important des responsabilités incombant aux États à l’égard des enfants en vertu de la Convention est de veiller à ce que le Comité des droits de l’enfant ait régulièrement la possibilité d’examiner les progrès réalisés dans la mise en œuvre de cet instrument. Il est donc crucial que les États parties présentent leurs rapports régulièrement et dans les délais fixés. À titre de mesure exceptionnelle, dans le souci d’aider l’État partie à s’acquitter pleinement des obligations qui sont les siennes en vertu de la Convention, le Comité l’invite à soumettre ses troisième et quatrième rapports périodiques en un seul document avant le 22 février 2008, date à laquelle le quatrième rapport périodique est attendu. Ce rapport ne devrait pas dépasser 120 pages (voir CRC/C/118). Le Comité attend de l’État partie qu’il présente ensuite un rapport tous les cinq ans, comme la Convention le prévoit.

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