NATIONS UNIES

CMW

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr.GÉNÉRALE

CMW/C/SR.1058 juin 2009

Original: FRANÇAIS

NATIONS UNIESCOMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DE TOUS LES TRAVAILLEURSMIGRANTS ET DES MEMBRES DE LEUR FAMILLE

Dixième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 105e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le jeudi 23 avril 2009, à 15 heures

Président: M. EL JAMRI

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 73 DE LA CONVENTION (suite)

Rapport initial des Philippines

La séance est ouverte à 15 heures .

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 73 DE LA CONVENTION (point 3 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial des Philippines (CMW/C/PHL/1), liste des points à traiter (CMW/C/PHL/Q/1), réponses écrites de l’État partie (CMW/C/PHL/Q/1/Add.1)

1.Sur l ’ invitation du Président , la délégation philippine prend place à la table du Comité.

2.Le PRÉSIDENT souhaite la bienvenue à la délégation philippine et se félicite de l’intérêt porté à la question des migrants, tant par le Gouvernement que par la société civile. L’État partie, qui compte de nombreux travailleurs migrants, s’est en effet doté d’une politique migratoire très dynamique qui constitue un exemple pour le reste du monde.

3.Mme BASILIO (Philippines) dit que le Gouvernement philippin a toujours défendu les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille, conscient de l’importance de leur rôle et de leur contribution dans les pays d’origine, de transit et de destination. Les Philippines continuent de jouer un rôle de défenseur des droits de l’homme dans la région de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN). Elles ont pris une part active à l’élaboration de la Déclaration de l’ASEAN sur la promotion et la protection des droits des travailleurs migrants et président actuellement le Comité contre la traite des personnes dans le cadre de la Réunion de haut niveau de l’ASEAN sur la criminalité transnationale. Elles ont continué à promouvoir la cause des travailleurs migrants en accueillant, en octobre 2008, le deuxième Forum mondial sur la migration et le développement, consacré au thème «Protéger et émanciper les migrants pour le développement». À cette occasion, elles ont appelé les autres pays à adhérer à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Dans le sillage du deuxième forum, elles ont accueilli la Conférence internationale sur le genre, la migration et le développement, consacrée au thème «Saisir les occasions, défendre les droits».

4.Dans le même ordre d’idées, les Philippines se sont félicitées que le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes ait adopté, en décembre 2008, la recommandation générale no 26 concernant les travailleuses migrantes, à l’élaboration de laquelle elles ont participé en accueillant un des ateliers consultatifs gouvernement-ONG, en partenariat avec le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM). En outre, à la cinquante-troisième session de la Commission de la condition de la femme, elles ont fait figurer dans les conclusions la question de la protection des droits des travailleuses migrantes employées de maison et la nécessité de leur assurer des conditions de travail décentes. Début avril, le Secrétaire philippin aux affaires étrangères a participé à la réunion ministérielle du processus de Bali en vue de renforcer la coopération régionale dans la lutte contre la traite des êtres humains. Enfin, à la Conférence d’examen de Durban, les Philippines ont fermement appuyé la lutte internationale contre le racisme et appelé à une meilleure protection des droits des migrants, notamment grâce à une plus large ratification de la Convention. Les Philippines se sont employées à faire figurer dans le document final des dispositions fermes sur la protection des droits de tous les migrants et sur le renforcement de la coopération internationale pour combattre efficacement la traite des êtres humains, l’accent étant mis sur une approche fondée sur les droits et sur la fourniture d’une assistance appropriée aux victimes.

5.Les Philippines se sont dotées d’un des programmes d’emploi à l’étranger les plus avancés du monde, salué, à juste titre, par la communauté internationale comme un modèle de gestion de la migration parmi les pays d’Asie fournisseurs de main‑d’œuvre, notamment en ce qui concerne la protection des travailleurs migrants. Dans le souci de maximiser les bénéfices de l’emploi à l’étranger tout en réduisant au minimum les risques associés, le Gouvernement a mis en place des mécanismes de protection à toutes les étapes du cycle de la migration, à savoir avant, pendant et après l’emploi, jusqu’à la réintégration des migrants. Ce système de protection prévoit que les normes minimales relatives au travail doivent être appliquées par quiconque souhaite employer des travailleurs migrants philippins. En outre, une directive présidentielle autorise le déploiement dans diverses représentations diplomatiques d’agents des services sociaux relevant du Ministère de l’aide sociale et du développement, dont la mission est de faire bénéficier les travailleurs philippins expatriés de services sociaux complets et appropriés, de créer un réseau entre les organismes sociaux et les prestataires de services et de renforcer le partenariat et la coordination des activités entre des organismes publics tels que le Ministère des affaires étrangères, le Ministère du travail et de l’emploi et l’Administration de la protection des travailleurs expatriés. L’Agence philippine pour l’emploi outre-mer a également adopté des règles plus strictes réprimant les infractions administratives et les pratiques anormales de la part des agences de recrutement et des employeurs, notamment des frais de placement excessifs. Le fait d’inscrire sur une liste noire les employeurs et les travailleurs qui ne respectent pas les contrats et de leur interdire de prendre part au programme d’emploi à l’étranger, de façon temporaire ou permanente selon la gravité des infractions, s’est révélé efficace et a permis de se débarrasser des indélicats. À titre d’exemple, en 2008, 98 personnes soupçonnées d’avoir recruté illégalement des travailleurs ont été arrêtées et 10 agences de recrutement ont été fermées. En outre, l’Agence pour l’emploi outre-mer a reçu 1 060 plaintes de travailleurs en vue d’une conciliation, et plus de 600 000 dollars ont été versés par l’intermédiaire de son service de conciliation entre le 5 décembre 2008 et le 30 mars 2009. Pour renforcer la lutte contre le recrutement illégal, la Présidente a promulgué le décret n° 759 du 23 octobre 2008 portant création du Groupe de travail interinstitutions contre le recrutement illégal, qui relève du Bureau du Vice-Président.

6.Si le Gouvernement est fier des résultats qu’il a obtenus en matière de promotion et de protection des droits des travailleurs migrants, Mme Basilio n’en tient pas moins à souligner que la migration relève d’une responsabilité partagée. Pour que cette migration permette le développement, il faut renforcer les relations de partenariat entre les pays d’origine, de transit et de destination et intégrer pleinement la question migratoire dans les politiques de développement et le dialogue à tous les niveaux. Les contributions culturelles et économiques des travailleurs migrants aux sociétés qui les accueillent et à leurs communautés d’origine ne devraient pas être seulement reconnues, mais aussi valorisées. Parallèlement, les Philippines sont convaincues que tous les États ont le devoir de promouvoir et de respecter les droits et les libertés fondamentales de tous les migrants, en particulier ceux des femmes et des enfants, indépendamment de leur situation au regard de la législation sur l’immigration, conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. À cet égard, le Gouvernement associe étroitement les partenaires de la société civile, les employeurs et les travailleurs à la mise en œuvre de la Convention et des projets qui y ont trait. Quinze ONG contribuent également aux séminaires d’orientation avant le départ mis en place par l’Agence philippine pour l’emploi outre-mer pour les Philippins qui s’expatrient. Pour conclure, Mme Basilio souligne que les Philippines continuent de soutenir les projets de résolution sur les travailleurs migrants qui sont présentés au Conseil des droits de l’homme et à l’Assemblée générale des Nations Unies.

7.M. KARIYAWASAM (Rapporteur pour les Philippines), relevant que les Philippines sont un modèle pour les pays d’origine des travailleurs migrants en ce qui concerne la protection des travailleurs expatriés, rappelle que la Convention est fondée sur les droits des migrants, considérés comme des personnes et non comme des agents économiques. Il souligne que le Gouvernement, dont il salue les efforts, a la chance de pouvoir s’appuyer sur une société civile très dynamique née de la tradition démocratique du pays. Notant que de nombreux mécanismes ont été mis en place à partir de 1970 et que la loi sur les travailleurs migrants et les Philippins expatriés a été promulguée en 1995, il souhaite savoir si ces institutions, programmes et dispositions législatives ont été réexaminés à la lumière de la Convention, ou si un tel examen est prévu, afin que toutes les dispositions de la Convention qui aident les travailleurs migrants soient incorporées dans le droit interne.

8.M. Kariyawasam demande dans quelle mesure il est tenu compte des dispositions de la Convention lors de la conclusion d’accords bilatéraux entre les Philippines et d’autres pays. Il demande comment le personnel des représentations diplomatiques est sensibilisé à la Convention et comment est assuré le respect des droits des travailleurs migrants philippins dans les régions où l’État n’a pas de représentation diplomatique, comme dans l’État de Sabah en Malaisie, où se trouvent de nombreux travailleurs philippins. Notant que de plus en plus de femmes sont candidates à l’émigration, notamment pour devenir employées de maison, l’expert voudrait savoir s’il existe des mécanismes permettant de protéger cette catégorie particulièrement vulnérable de travailleurs migrants, notamment contre la traite et la maltraitance. Il rappelle qu’en vertu de la Convention les travailleurs migrants en situation irrégulière doivent avoir les mêmes droits que les autres travailleurs, et demande à ce sujet ce que fait l’État partie pour garantir cette égalité. M. Kariyawasam croit comprendre que l’Agence philippine pour l’emploi outre-mer (POEA) est le principal organisme compétent en ce qui concerne les questions migratoires et demande si cet organisme fait l’objet d’une supervision. Il voudrait obtenir des renseignements plus détaillés sur les points suivants: les conditions que doivent remplir les étrangers résidents pour exercer leur droit de vote; les mesures prises pour informer les candidats à l’émigration des droits consacrés par la Convention; l’accès à l’éducation et à la santé des travailleurs migrants résidant aux Philippines; les efforts que déploie l’État partie pour lutter contre la traite des personnes, en ce qui concerne particulièrement la coopération avec les pays voisins. M. Kariyawasam demande s’il existe des plans d’urgence pour venir en aide aux travailleurs migrants philippins qui se trouvent dans des pays ou des régions en proie à des conflits. Enfin, il demande un complément d’information sur les interdictions de voyager imposées par les Philippines aux travailleurs dans des pays comme l’Afghanistan, l’Iraq et le Liban.

9.Mme POUSSI (Corapporteuse pour les Philippines) relève au paragraphe 3 du rapport à l’examen que de nombreux organismes publics ont pris part à l’élaboration du rapport mais voudrait savoir ce qu’il en est de la participation de la société civile. Elle note que la quasi‑totalité des textes législatifs relatifs aux migrations ont été adoptés avant la ratification de la Convention et demande si les lois ont été révisées en conséquence. Elle voudrait savoir si la POEA exerce un contrôle sur les organismes privés d’emploi afin de garantir le respect des droits des travailleurs candidats à l’émigration. Elle demande des renseignements sur les causes et les conséquences du phénomène de la vente de femmes philippines par correspondance, et ses éventuels liens avec la traite des femmes.

10.Mme Poussi demande ce que signifie l’expression «expulsion sommaire» employée au paragraphe 181 du rapport sachant que cela pourrait signifier qu’il n’est pas tenu compte des droits élémentaires des personnes expulsées. Elle s’interroge aussi sur le sens à donner à la première phrase du paragraphe 208 du rapport, dont le libellé pourrait laisser entendre que des arrestations peuvent être effectuées sans motif. À cet égard, elle demande comment sont informées les représentations diplomatiques lorsque des travailleurs migrants font l’objet d’arrestations. Enfin, elle voudrait des informations précises sur le système de vote par correspondance concernant les travailleurs philippins à l’étranger, en particulier sur son efficacité.

11.M. EL-BORAI dit que certaines dispositions des lois philippines relatives aux migrations, qui ont été adoptées avant la ratification de la Convention, sont en flagrante contradiction avec les dispositions de celle-ci. À cet égard, il demande quelle est la place de la Convention dans l’ordre juridique interne. Il fait en outre observer que certaines lois ou affaires citées par l’État partie, par exemple aux paragraphes 94 et 147 de son rapport, ne semblent pas vraiment s’appliquer aux migrants. S’agissant des paragraphes 227 et 228 relatifs à l’indemnisation pour emprisonnement abusif, il voudrait savoir si le problème s’est déjà posé. En ce qui concerne le paragraphe 250, il est indiqué que l’État doit «assurer une égalité d’accès à l’emploi quel que soit le sexe, la race ou la croyance» mais il n’est pas fait mention de la nationalité: doit-on en conclure que l’égalité entre citoyens et étrangers n’est pas garantie dans le domaine du travail? M. El-Borai demande par ailleurs si les Philippines ont ratifié la Convention no 87 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical et la Convention no 98 de l’OIT sur le droit d’organisation et de négociation collective.

12.M. El-Borai, à la lecture du paragraphe 254 du rapport de l’État partie (CMW/C/PHL/1), croit comprendre que l’affiliation à la sécurité sociale n’est obligatoire que pour les ressortissants philippins et s’en étonne. Il souhaite savoir exactement sur quels motifs le Bureau des Commissaires se fonde pour demander au Commissaire de l’immigration d’expulser un étranger (al. 11 et 12 du paragraphe 243) et quels textes juridiques régissent le transfert, par les travailleurs migrants philippins, de leurs revenus, économies et effets personnels dans leur pays d’origine (par. 296). Il aimerait des précisions sur les motifs d’annulation ou de retrait du permis de travail d’un étranger (par. 233). Par ailleurs, concernant les travailleurs philippins qui émigrent vers les pays du golfe Persique, il s’interroge sur les informations qui leur sont données avant leur départ: savent-ils qu’ils seront parmi les migrants les moins rémunérés et qu’il leur faudra un «garant»?

13.M. SEVIM demande si les travailleurs migrants étrangers aux Philippines et les membres de leur famille bénéficient de soins médicaux d’urgence, comme le prescrit l’article 28 de la Convention. Il souhaite savoir de combien de représentations consulaires les Philippines disposent dans les pays où résident des travailleurs migrants philippins, quels services elles offrent et s’il est prévu d’en ouvrir de nouvelles.

14.M. TAGHIZADE demande des précisions sur le fonctionnement du système de vote par correspondance pour les Philippins résidant à l’étranger (par. 328 du rapport) et sur le nombre de personnes ayant ainsi voté aux dernières élections. Concernant la protection de l’unité de la famille du travailleur migrant, M. Taghizade souhaite savoir ce qu’il advient des membres de la famille du migrant lorsque leur autorisation de résider dans le pays d’accueil a déjà été renouvelée une fois après la période initiale de 2 ans (par. 333).

15.MmeCUBIAS MEDINA, après avoir salué les nombreux efforts consentis par l’État partie concernant les migrants philippins, demande quelles mesures sont prises à l’égard des migrants irréguliers en transit, s’il existe des données sur le sujet, si ces personnes sont placées dans un centre de détention particulier, quels recours elles peuvent former contre des décisions d’expulsion ou de reconduite à la frontière et si ces décisions sont compatibles avec les dispositions de la Convention.

La séance est suspendue à 16 h 40; elle reprend à 17 heures.

16.M. CATURA (Philippines) explique que le Gouvernement philippin, pour garantir l’application de la Convention et de tous les instruments internationaux auxquels les Philippines sont parties, a adopté une démarche fondée sur les droits de l’homme et décidé de se doter d’un Plan d’action national relatif aux droits de l’homme et de renforcer ses capacités en conséquence. En réponse à la question concernant la mobilisation de la société civile en général et des organisations non gouvernementales (ONG) en particulier en vue d’appliquer la Convention, M. Catura explique que le Gouvernement considère toutes ces organisations comme des partenaires à part entière, ce que prescrivent par ailleurs la loi de la République no 8042 sur les travailleurs migrants et les Philippins expatriés et d’autres textes juridiques. Le Comité présidentiel pour les droits de l’homme veille à travailler avec les organisations de la société civile, notamment au sein du Forum des droits de l’homme nouvellement créé, espace où il est prévu de débattre de la question des travailleurs migrants. Toutes ces démarches ne constituent pas de simples consultations: il s’agit réellement de définir des actions concrètes à mettre en œuvre. Si l’élaboration du rapport de l’État partie a été essentiellement un processus mené à l’échelon gouvernemental, les organisations de la société civile n’en ont pas moins été informées, voire consultées pour celles qui œuvrent depuis longtemps dans le domaine des migrations. La collaboration avec la société civile n’est pas limitée à la période d’élaboration de rapports: le Ministère de la main-d’œuvre et de l’emploi (DOLE), par exemple, travaille en permanence avec elle et des partenariats ont été mis en place avec certaines organisations pour des actions ponctuelles, comme ce fut le cas avec le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM), lorsqu’il s’était agi d’étudier le rôle des travailleuses migrantes.

17.M. Catura dit qu’un rapide coup d’œil à la presse, notamment par le biais d’Internet, suffit à prouver combien les Philippines sont attachées à la liberté d’expression: les médias philippins font partie des plus libres au monde. Force est de constater toutefois que l’exercice de ce droit se heurtera toujours à certains obstacles, d’où les préoccupations exprimées par les ONG dans leurs rapports, qui sont utiles à tous. À cet égard, il faut rappeler que la Commission nationale des droits de l’homme – organe constitutionnel indépendant – a pour mission de veiller à la bonne application de tous les instruments internationaux auxquels les Philippines sont parties, donc au respect de la liberté d’expression de tous, y compris des personnes qui relèvent de la Convention. Jusqu’à présent, les institutions concernées diffusaient les informations concernant l’application de la Convention essentiellement au moyen de publications écrites (livrets, brochures, etc.). Récemment, le Comité présidentiel pour les droits de l’homme a reçu la mission d’organiser une campagne d’information dans les médias sur la Convention ainsi que sur tous les instruments internationaux auxquels le pays est partie, qui commencera le mois prochain à l’échelon régional.

18.M. GLORIA (Philippines) précise que l’expression «travailleurs migrants» fait référence autant aux étrangers sur le territoire philippin qu’aux Philippins émigrés à l’étranger. Les Philippines disposent de tout l’arsenal législatif et juridique nécessaire à la protection des droits des travailleurs migrants. Au sein du Réseau de conseils et d’information aux migrants (MAIN), mis en place en 1995, les différents organismes publics ont créé leur propre système de traitement de l’information dans leur domaine de compétence; ils s’attachent aujourd’hui à interconnecter ces systèmes afin d’échanger des informations sur les activités réalisées en faveur des travailleurs migrants et, ainsi, de mieux protéger les droits de ces derniers. Le DOLE, par exemple, a mis sur pied un système qui permet aux demandeurs d’emploi d’accéder rapidement aux offres d’emploi et de postuler en ligne. Ces informations sont également accessibles depuis un téléphone portable, ce qui permet aux personnes qui résident dans les provinces éloignées d’obtenir les mêmes informations et de se faire aider aussi dans leur recherche d’emploi.

19.M. Gloria tient à souligner que la politique du Gouvernement philippin n’a jamais été de considérer ses ressortissants comme des produits d’exportation. La décision de migrer est toujours une décision qu’il appartient à la seule personne concernée de prendre. Les autorités n’interfèrent en rien: leur rôle consiste uniquement à aider les candidats à l’émigration dans leurs démarches et non à les inciter au départ. C’est dans cette optique qu’elles organisent des séminaires d’orientation avant l’emploi (PEOS) dans les domaines particulièrement touchés par les recrutements illégaux et le trafic, dont l’objectif est simplement de permettre aux candidats au départ de prendre une décision en toute connaissance de cause: des informations très diverses leur sont données sur les avantages comme sur les inconvénients inhérents à la migration, depuis le changement de style de vie jusqu’aux risques de délinquance juvénile, en passant par le mal du pays. Au cours de ces séminaires, on leur rappelle aussi qu’il existe des possibilités d’emploi dans leur propre pays et qu’ils peuvent avoir accès à des formations gratuites par l’intermédiaire du Bureau de l’enseignement technique et du développement des compétences professionnelles (TESDA). Chaque participant à un séminaire d’orientation a ainsi les moyens de prendre la décision de partir ou de rester dans son pays. S’il décide de partir, le Gouvernement l’accompagne dans sa démarche, pour éviter qu’il entre dans une filière de migration clandestine ou qu’il soit embauché dans des conditions abusives. S’il choisit de rester, le Gouvernement lui apporte une assistance qui peut se traduire par une formation ou une aide financière. Quoi qu’il en soit, les travailleurs philippins bénéficient réellement d’une assistance de la part du Gouvernement.

20.Mme GONDRANIOZ-DUQUEZ (Philippines) explique que l’Agence philippine pour l’emploi outre-mer organise à l’intention des candidats à la migration des séminaires d’orientation. Ces séminaires, qui sont obligatoires, ont été conçus en fonction de trois grandes régions de destination, à savoir l’Amérique et l’Europe; le Moyen-Orient et l’Afrique; l’Asie et le Pacifique. Il est expliqué aux participants à chaque séminaire en quoi consiste le séminaire, les raisons pour lesquelles il est obligatoire et les démarches à accomplir après l’avoir suivi. Durant le séminaire, on donne une vue d’ensemble de chaque pays de destination en indiquant les caractéristiques culturelles et les problèmes courants rencontrés par les expatriés philippins. L’accent est mis sur les obligations qui incombent aux expatriés en vertu du Code de discipline des travailleurs expatriés et sur les droits et obligations liés aux contrats de travail. Chaque candidat à la migration reçoit une brochure sur le pays de destination qui l’intéresse, dans laquelle il trouve les coordonnées des représentations philippines locales. Il lui est conseillé d’informer l’ambassade des Philippines de son arrivée dans le pays de destination. Entre septembre 2007 et décembre 2008, plus de 42 000 personnes ont bénéficié d’un séminaire d’orientation.

21.M. CHUAN (Philippines) fait observer que l’Administration de la protection sociale des travailleurs expatriés, qu’il représente, a mis en place un nouveau programme dans le cadre duquel les séminaires d’orientation sont organisés en fonction de trois pays, à savoir le Qatar, le Canada et l’Australie. Un rapport a été établi à l’intention des organisateurs des séminaires et l’Administration a renforcé le suivi et l’évaluation de ces activités. Des ressources ont été allouées à la publication de documents d’information destinés aux 700 000 travailleurs philippins à l’étranger. En outre, l’Administration a récemment promulgué une ordonnance selon laquelle le personnel domestique candidat à l'émigration est tenu de participer à un programme de formation complet avant le départ. Conçue dans le souci de répondre à la demande croissante de cette catégorie de personnel à l’étranger, la formation comprend des cours de langue et une sensibilisation aux réalités culturelles du pays de destination.

22.Mme BALA (Philippines) rappelle qu’en 2003, le Gouvernement philippin a adopté la loi contre la traite des personnes. Cet instrument, qui vise principalement les femmes et les enfants, prévoit des mécanismes pour protéger les personnes victimes de la traite et leur apporter une assistance. Pour veiller à la mise en œuvre pleine et entière de la loi et assurer le suivi de son application, il a été créé un comité interorganisations de répression de la traite des êtres humains (IACAT), composé de représentants des administrations publiques concernées et d’organisations non gouvernementales (ONG) défendant les intérêts des femmes, des enfants et des travailleurs philippins expatriés. Aux fins du suivi et du respect de la loi, le Comité a adopté un plan stratégique sur la période 2004-2010 qu’il met en œuvre en partenariat avec les ONG et la société civile. Ce plan comprend six domaines stratégiques, à savoir la sensibilisation et la mobilisation sociale, le renforcement des capacités, la collecte et la gestion de données, la constitution d’alliances et de réseaux, la recherche et la documentation et les mécanismes institutionnels. Trois grands axes d’intervention ont été définis: a) la prévention, b) la protection, et c) la réadaptation et la réinsertion.

23.Dans le domaine de la prévention, des comités composés de représentants d’administrations publiques nationales et locales et d’ONG ont été mis en place dans le pays. En outre, des campagnes de sensibilisation ont été menées dans des régions ciblées, comme la campagne récente «Nous ne sommes pas à vendre», dont le lancement fait suite à l’augmentation inquiétante des collusions entre des fonctionnaires des services d’immigration et des trafiquants. En ce qui concerne la protection, 16 cellules d’intervention en cas de crise ont été mises en place et fonctionnent vingt-quatre heures sur vingt-quatre. À ces structures s’ajoutent des refuges temporaires et des opérations de secours menées principalement par les services chargés de l’application des lois. S’agissant de la réadaptation et de la réinsertion, axe d’intervention capital, les activités sont menées par les travailleurs sociaux auprès des familles et des communautés. Elles consistent à apporter une assistance sous diverses formes: mise en place de moyens de subsistance, appui financier, aide à la formation, accès à une assistance juridique ou encore assistance médicale. Il va sans dire qu’un appui institutionnel est apporté aux différents intervenants et que l’on continue de renforcer leurs capacités. Afin de s’assurer de la qualité des services fournis, on a défini des normes de service et des indicateurs de réinsertion positive. Enfin, une base de données sur la réadaptation et la réinsertion a été créée.

24.MmePOUSSI souhaite savoir si la forte migration des femmes a une incidence négative sur la stabilité de la cellule familiale, compte tenu du rôle éducatif généralement dévolu aux mères. Elle demande également si, dans le cas des migrantes qui vivent en ménage, les regroupements familiaux se font facilement et si le Gouvernement philippin prend des mesures particulières en ce qui concerne les enfants restés au pays.

25.M. KARIYAWASAM demande si les séminaires d’orientation destinés aux candidats à la migration sont obligatoires. Il demande en outre quelles mesures sont prises aux fins de la protection des migrants en situation irrégulière à l’étranger.

26.M. TAGHIZADE demande que la délégation philippine donne des exemples concrets d’expérience positive en ce qui concerne la protection des travailleurs migrants à l’étranger, notamment la légalisation des travailleurs sans papiers.

27.Le PRÉSIDENT, intervenant en tant que membre du Comité, souhaite savoir s’il existe un observatoire de la migration ou tout autre dispositif de veille institutionnalisé dans ce domaine. S’agissant de la prévention, il demande si l’État se heurte à des limites dans l’action qu’il mène pour éviter que des candidats à la migration ne tombent entre les mains de trafiquants, compte tenu de la pression migratoire. Enfin, s’agissant de l’aide à la migration, le Président souhaite savoir si l’on mène des études d’adéquation entre les besoins internes et la migration, autrement dit si l’aide apportée ne va pas parfois à l’encontre de la satisfaction des besoins constatés sur le marché du travail interne.

La séance est levée à 18 heures.

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