Quarante-cinquième session

18 janvier-5 février 2010

Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination à l’égard des femmes

Émirats arabes unis

Le Comité a examiné le rapport initial des Émirats arabes unis (CEDAW/C/ARE/1) à ses 914e et 915e séances, le 26 janvier 2010 (voir CEDAW/C/SR.914 et 915). La liste de questions soulevées par le Comité figure dans le document CEDAW/C/ARE/Q/1 et les réponses du Gouvernement émirien dans le document CEDAW/C/ARE/Q/1/Add.1.

Introduction

Le Comité remercie l’État partie pour son rapport initial, bien qu’il ne soit pas pleinement conforme aux directives concernant l’élaboration des rapports initiaux, ne contienne pas de référence aux recommandations générales du Comité, ni certaines données statistiques, et ait été présenté avec retard. Le Comité remercie aussi l’État partie d’avoir répondu par écrit aux questions posées par le Groupe de travail d’avant session et le remercie en outre pour son exposé et ses réponses présentés oralement suite aux questions posées par le Comité, qui aident à mieux comprendre la situation des femmes aux Émirats et l’application des droits énoncés dans la Convention.

Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation nombreuse et de haut niveau, présidée par un secrétaire d’État et constituée de représentants de la magistrature, de divers ministères et de centres d’aide sociale, qui ont fourni oralement des informations additionnelles et permis un dialogue franc, ouvert et constructif avec le Comité.

Le Comité prend note des réserves formulées par l’État partie au sujet de l’alinéa f) de l’article 2, de l’article 9, du paragraphe 2 de l’article 15, de l’article 16 et du paragraphe l de l’article 29 de la Convention.

Aspects positifs

Le Comité félicite l’État partie de la qualité des services sociaux de base fournis à ses citoyens, en particulier les services d’éducation et de santé financés par le Gouvernement, et notamment les services de santé maternelle et infantile.

Le Comité prend note avec satisfaction des mesures prises par l’État partie quant à la question de la traite des êtres humains et, à cet égard, se félicite de l’adoption de la loi fédérale no51 de 2006 sur la suppression de la traite des êtres humains, et de la ratification de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et de son protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (Protocole de Palerme).

Le Comité se félicite des diverses initiatives prises par l’État partie pour encourager la participation des femmes dans tous les domaines économiques, en particulier dans le secteur des affaires, telles que la création de conseils de femmes d’affaires et d’une récompense décernée aux femmes d’affaires.

Le Comité note que l’État partie envisage d’adhérer au Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Tout en rappelant l’obligation de l’État partie de mettre en œuvre de façon systématique et continue toutes les dispositions de la Convention, le Comité estime que les sujets de préoccupation et recommandations figurant dans les présentes observations finales exigent de la part de l’État partie une attention prioritaire d’ici à la présentation du prochain rapport périodique. Il l’appelle par conséquent à faire porter ses efforts sur ces questions dans ses activités de mise en œuvre et à rendre compte des mesures prises et des résultats obtenus dans son prochain rapport périodique. Il l’appelle également à soumettre les présentes observations finales à tous les ministères compétents, au Conseil national fédéral et au pouvoir judiciaire fédéral afin d’en assurer la pleine mise en œuvre .

Le Comité note les difficultés particulières que rencontre l’État partie en matière d’intégration sociale et de mise en œuvre des politiques d’égalité des sexes du fait que les non-nationaux constituent la vaste majorité de la population, ce qui a une incidence directe sur la mise en œuvre de tous les aspects de la Convention.

Le Comité recommande que l’État partie tienne dûment compte, dans ses politiques d’égalité des sexes, de la contribution des travailleurs migrants, en particulier des femmes, au développement national, en vue de mieux respecter les dispositions de la Convention .

Conseil national fédéral

Tout en réaffirmant que le Gouvernement a la responsabilité première de la pleine observation des obligations que la Convention impose à l’État partie et en est au premier chef comptable, le Comité rappelle que la Convention lie toutes les branches du Gouvernement, et invite l’État partie à encourager son Conseil national fédéral à prendre, conformément à ses procédures, toutes mesures nécessaires aux fins de la prise en compte des présentes observations finales et de l’établissement du prochain rapport que le Gouvernement doit présenter au titre de la Convention .

Statut juridique de la Convention

Tout en prenant note des assurances données par l’État partie, selon lesquelles une convention internationale a force de loi dès lors qu’elle est publiée dans le Journal officiel, et prévaut sur le droit interne, le Comité demeure préoccupé par le fait que le statut des instruments internationaux, y compris la Convention, vis-à-vis du droit interne est flou. Il déplore par ailleurs le manque d’information concernant les affaires dans lesquelles les dispositions de la Convention ont été directement invoquées devant les tribunaux nationaux. Le Comité s’inquiète en outre du manque d’importance généralement accordé à la Convention et à la diffusion de ses propres recommandations générales.

Le Comité recommande que l’État partie clarifie le statut de la Convention dans son droit interne et veille à ce que ses dispositions prévalent sur les lois nationales en cas de conflit entre la Convention et la législation nationale. L’État partie devrait également veiller à ce que ses lois nationales soient en conformité avec les dispositions de la Convention. Le Comité lui recommande également de diffuser largement le texte de la Convention et de ses propres recommandations générales auprès de toutes les parties prenantes, y compris les ministères, les parlementaires, les autorités judiciaires, la police et les agents des forces de l’ordre, les organisations non gouvernementales, le secteur privé et le public en général .

Définition de la non-discrimination

Tout en notant que l’article 25 de la Constitution dispose l’égalité devant la loi sans distinction de race, de nationalité, de croyances religieuses ou de statut social, le Comité regrette que la Constitution et les autres législations nationales ne consacrent pas le principe de l’égalité entre femmes et hommes ni ne contiennent une définition de la discrimination à l’encontre des femmes conforme à l’article 1 de la Convention.

Le Comité demande à l’État partie d’incorporer pleinement dans la Constitution ou autre législation nationale appropriée le principe de l’égalité entre femmes et hommes, conformément à l’alinéa a) de l’article 2 de la Convention ainsi qu’une définition de la discrimination fondée sur le sexe, conforme à l’article  1 de la Convention, et d’élargir la responsabilité de l’État pour les actes de discrimination qui sont le fait du secteur public ou privé, conformément à l’alinéa e) de l’article  2 de la Convention, en vue de parvenir à l’égalité formelle et réelle entre femmes et hommes .

Réserves

Le Comité prend note de la promotion de la femme et du soutien de l’État partie à l’exercice de leurs droits par les femmes, ainsi que des explications fournies quant aux réserves formulées au sujet de l’alinéa f) de l’article 2, de l’article 9, du paragraphe 2 de l’article 15 et de l’article 16 de la Convention. Le Comité estime que ces articles sont essentiels au regard du but et de l’objet de la Convention et que les réserves ont une incidence négative sur l’exercice de leurs droits par les femmes. Il s’inquiète de ce qu’aucune procédure d’examen des réserves n’ait été encore engagée.

Le Comité encourage vivement l’État partie à envisager de réduire la portée de ses réserves à la Convention, en vue de les retirer entièrement de manière à assurer aux femmes la pleine jouissance de tous les droits consacrés dans la Convention. À cet égard, il appelle l’attention de l’État partie sur sa propre déclaration concernant les réserves figurant dans le rapport sur les travaux de sa dix-neuvième session et, en particulier, rappelle qu’il considère que les articles 2 et 16 sont des dispositions essentielles au regard de l’objet et du but de la Convention et que, conformément au paragraphe 2 de l’article 28, les réserves à ces articles devraient être retirées .

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité se félicite du rôle actif de l’Union générale des femmes et de sa présence auprès de toutes les instances gouvernementales, ainsi que des activités que mènent dans l’État partie les plus de 20 autres associations et organismes de femmes et de services sociaux. Il déplore toutefois le manque d’information sur les mandats et les ressources financières et humaines de ces associations et organismes et s’inquiète de l’absence d’un cadre institutionnel et juridique permettant la mise en œuvre des dispositions de la Convention.

Le Comité recommande que l’État partie renforce le mandat et élargisse les ressources de l’Union générale des femmes afin de concrétiser la promotion de la femme et de surveiller la mise en œuvre concrète du principe de l’égalité formelle et réelle entre femmes et hommes s’agissant de la jouissance des droits fondamentaux dans tous les domaines. Il demande en outre à l’État partie de tenir compte de sa recommandation générale n o  6 et de lui présenter dans son prochain rapport des informations détaillées concernant le mécanisme national, l’organe central de coordination et les éventuels groupes sectoriels, notamment leurs pouvoirs, fonctions, attributions et ressources .

Le Comité salue les diverses campagnes de sensibilisation aux droits de l’homme lancées par l’État partie, notamment la stratégie relative aux droits de l’homme de l’administration de Doubaï chargée du développement communautaire. Il tient compte de l’engagement pris par l’État partie, dans le cadre du mécanisme d’examen périodique universel et du dialogue engagé avec le Comité, à envisager la création d’un organisme national de défense des droits de l’homme conformément aux Principes de Paris. Le Comité regrette qu’une telle institution n’existe pas déjà, et s’inquiète de l’absence d’un mécanisme de recours complet et efficace, accessible en particulier aux femmes y compris aux travailleuses migrantes. Il déplore en outre l’absence de données sur les recours présentés au moyen des mécanismes en place et sur la suite qui leur a été donnée.

Le Comité encourage l’État partie à créer sans tarder un mécanisme juridique de recours, ainsi qu’un organisme national indépendant de défense des droits de l’homme, conformément aux P rincipes de Paris, dotés de ressources suffisantes, d’un large mandat en matière de droits de l’homme et d’un mandat spécifique en matière d’égalité des sexes. Il exhorte par ailleurs l’État partie à veiller à ce que la composition et les activités de l’organisme national indépendant de défense des droits de l’homme soient axées sur la problématique homme s -femmes et tiennent pleinement compte des droits fondamentaux des femmes .

Mesures temporaires spéciales (par. 1 de l’article 4 de la Convention)

Le Comité s’inquiète de ce que l’État partie n’a pas de la finalité des mesures spéciales temporaires, et de la nécessité de prendre de telles mesures, une compréhension conforme au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à sa propre recommandation générale no25. Il s’inquiète aussi qu’aucune stratégie ne soit en place concernant les mesures temporaires spéciales pour accélérer l’instauration de l’égalité réelle ou formelle entre hommes et femmes, s’agissant en particulier de la participation des femmes, y compris de celles qui appartiennent à la majorité immigrée de la population.

Le Comité demande instamment à l’État partie de sensibiliser les responsables concernés au concept de mesures temporaires spéciales décrit au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, tel qu’interprété dans sa propre recommandation générale n o  25. Il recommande que l’État partie incorpore dans sa législation des dispositions spécifiques sur l’application de mesures temporaires spéciales qui encouragent leur utilisation dans les secteurs public et privé. Il recommande aussi que l’État partie mette en œuvre des mesures temporaires spéciales dans les domaines où les femmes sont insuffisamment représentées ou désavantagées, notamment dans les organes de décision et les organes de répression, en allouant les ressources voulues pour accélérer la promotion des femmes, en particulier de celles qui appartiennent à la majorité immigrée de la population .

Stéréotypes et pratiques culturelles

Tout en ayant conscience des efforts déployés par l’État partie pour promouvoir un changement quant aux rôles stéréotypés des femmes, et en notant que les femmes émiriennes ont une présence active dans le secteur privé en tant que femmes d’affaires, le Comité est préoccupé par les rôles que la société émirienne impartit aux femmes et aux hommes sur la base d’un modèle patriarcal. Il exprime en particulier le souci que lui inspirent l’accent mis sur le rôle de mères comme étant le seul rôle des femmes, et l’image que les programmes scolaires et les médias donnent des filles et des femmes.

Le Comité exhorte l’État partie à adopter un plan stratégique national visant à amener un changement dans les rôles stéréotypés largement admis des femmes et des hommes, en promouvant la répartition équitable des responsabilités familiales et l’égalité du statut et des responsabilités des femmes et des hommes dans les domaines public et privé. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer la formation du personnel enseignant en ce qui concerne les questions relatives à l’égalité des sexes et de réviser les manuels scolaires et les programmes d’enseignement afin d’en éliminer les stéréotypes sexistes. Il recommande que les campagnes de sensibilisation soient tournées à la fois vers les femmes et vers les hommes, et que les médias soient encouragés à donner une image positive des femmes .

Le Comité prend note des initiatives prises par l’État partie pour protéger les femmes contre la violence, y compris la violence familiale et se félicite de l’existence de foyers, de centres de soutien et de services de conseils ainsi que de numéros verts pour les femmes victimes de violence. Toutefois, le Comité regrette l’absence de loi spécifique sur la violence à l’égard des femmes, y compris au sein de la famille, prévoyant des moyens de recours. Il déplore également l’absence de statistiques, de recherches et de documentation appropriées sur les conséquences de la violence à l’égard des femmes et le fait que les femmes son souvent réticentes à signaler les cas de violence. Le Comité prend acte du projet de loi sur les employées de maison mais demeure néanmoins profondément préoccupé par l’absence de protection des travailleuses migrantes contre la violence, notamment les employées de maison qui déclarent avoir subi des violences, et qui peuvent pour cela être traitées comme des délinquantes, accusées de crimes ou déportées.

Le Comité engage instamment l’État partie à mettre en place de manière prioritaire des mesures complètes pour faire face à toutes les formes de violence contre les femmes et les filles. Il l’invite à promulguer une loi sur la violence à l’égard des femmes, y compris la violence familiale, afin qu’elle soit constitutive d’une infraction pénale. L’État partie devrait également renforcer les procédures de recours de sorte que toutes les femmes et les filles, y compris les travailleuses migrantes qui sont victimes de violence puisse nt accéder à des moyens de recours immédiats; fournir des centres d’accueil et de réhabilitation aux victimes; garantir des poursuites et des sanctions approprié e s pour les coupables; et mettre en place des activités pédagogiques et de sensibilisation à l’échelle du pays.

Traite et exploitation de la prostitution

Tout en se félicitant des efforts déployés par l’État partie pour lutter contre la traite des femmes et des filles, y compris la création d’un comité national pour l’élimination de la traite des êtres humains et la mise en place d’un plan national pour la combattre, le Comité continue d’être gravement préoccupé par la persistance de la traite des femmes et des filles dans l’État partie à des fins d’exploitation économique et sexuelle. Le Comité regrette également l’absence de données statistiques sur les femmes qui en sont victimes à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Il est également inquiet du peu de protection dont bénéficient les victimes et déplore la fermeture à Doubaï du seul refuge pouvant leur fournir une telle protection.

Le Comité invite instamment l’État partie à appliquer intégralement l’article 6 de la Convention, notamment par l’application effective de la loi récemment adoptée sur la traite des êtres humains et l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie prévoyant des mesures de prévention, des poursuites et des sanctions à l’égard des coupables, ainsi que la protection, la réadaptation et la réintégration des victimes. Il demande en outre à l’État partie d’intensifier ses efforts de prévention par le biais de la coopération internationale, régionale et bilatérale avec les pays d’origine, de transit et de destination et la collaboration avec les organisations non gouvernementales pour prévenir la traite grâce à l’échange d’informations ainsi que de fournir une assistance et un appui aux victimes en se fondant sur les Principes et directives concernant les droits de l’homme et la traite des êtres humains du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (E/20 0 2/68/Add.1). Le Comité demande que l’État partie surveille attentivement les incidences des mesures prises et fournisse des informations sur les résultats obtenus ainsi que des données statistiques ventilées dans son prochain rapport périodique.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité note avec appréciation que l’État partie est conscient de l’évolution progressive des coutumes et des traditions de la société en vue d’accorder une plus grande place aux femmes dans la vie publique et politique et prend acte des premières élections tenues au sein du Conseil fédéral national de l’État partie (2006) pour élire les membres hommes et femmes de la Commission électorale, lesquelles ont abouti à l’élection d’une femme et à la nomination de huit autres. Cependant, malgré les efforts faits par l’État partie pour encourager l’accession à des postes à responsabilité, le Comité constate avec regret que celles-ci sont toujours sous-représentées dans la vie publique et politique ainsi qu’aux postes décisionnels. En outre, tout en prenant acte des activités importantes mises en œuvre par nombre de femmes et organisations d’action sociale et d’intérêt public dans le pays, le Comité est préoccupé par l’absence d’une société civile forte y compris d’organisations actives de défense des droits des femmes et des droits fondamentaux et constate que ces associations qui jouent un rôle majeur dans la mise en œuvre effective de la Convention et la réalisation de la parité entre les sexes doivent surmonter beaucoup d’obstacles pour s’enregistrer.

Le Comité exhorte l’État partie à faire tout son possible pour garantir la participation égale des femmes aux affaires publiques, y compris la prise des mesures temporaires spéciales visées au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et conformément aux recommandations générales n os  23 et 25 du Comité ainsi que pour définir des objectifs concrets, assortis de délais ou de quotas plus élevés, afin d’accélérer la représentation politique des femmes. Il lui recommande également de continuer à mener des campagnes de sensibilisation à l’importance de la participation des femmes dans les processus de décision à tous les niveaux. Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures concrètes, y compris par des amendements législatifs afin d’instaurer et de garantir un environnement favorable à la création de groupes de femmes qui se consacrent aux questions de parité et d’autonomisation des femmes et qui ont la possibilité d’exécuter en toute liberté leurs programmes et activités.

Nationalité

Le Comité prend note de l’élaboration par l’État partie d’un projet de loi portant amendement à la loi sur la nationalité et les passeports, des études entreprises sur le transfert de nationalité d’une femme des Émirats arabes unis mariée à un non-national à ses enfants ou à son mari étranger ainsi que des études sur les critères et données d’expérience d’autres pays en matière de naturalisation. Toutefois, le Comité demeure préoccupé qu’à ce jour, les femmes des Émirats arabes unis continuent de se voir refuser les mêmes droits à la nationalité et à la citoyenneté que les hommes et regrette le peu d’informations disponibles à cet égard. En outre, tout en se félicitant des mesures prises par l’État partie pour octroyer la citoyenneté à un certain nombre de Bidoons en 2007, le Comité reste préoccupé par la discrimination dont souffrent les femmes et les filles apatrides et la lenteur du processus de régularisation. Le Comité regrette également l’insuffisance de données statistiques sur cette question.

Le Comité prie instamment l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour accélérer l’adoption de l’amendement à la loi sur la nationalité et les passeports pour octroyer aux femmes des droits égaux en ce qui concerne l’acquisition, le changement, la conservation et l’octroi de la nationalité. Le Comité invite également l’État partie à retirer sa réserve à l’article 9 de la Convention. En outre, il recommande que l’État partie envisage d’accéder aux instruments internationaux pour résoudre la situation des apatrides, y compris à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et à son protocole de 1967, à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie et lui demande de fournir des informations actualisées sur la situation des femmes apatrides.

Éducation

Le Comité félicite l’État partie pour les niveaux élevés d’éducation atteints par ses citoyens et prend note des informations indiquant que l’enseignement public est libre et accessible à tous ceux qui vivent dans l’État partie, mais regrette toutefois l’insuffisance d’informations et de données statistiques sur les niveaux d’éducation des femmes et des filles des zones rurales ainsi que des non-ressortissantes et leur accès à des services éducatifs. Tout en se félicitant du fait que les écoles privées pour les non-ressortissantes soient autorisées et soutenues par l’État partie, il s’inquiète des obstacles pratiques qui entravent l’accès de la plupart des enfants d’étrangers au système d’enseignement public. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’informations sur l’âge de l’abandon scolaire chez les filles au cours des cycles du primaire et du secondaire.

Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses activités de sensibilisation à l’importance de l’accès universel et équitable à l’éducation pour l’autonomisation des femmes sur son territoire. Il prie l’État partie de fournir des informations détaillées dans son prochain rapport, notamment des statistiques ventilées par sexe et par âge sur l’éducation des femmes et des filles, y compris celles des zones rurales, des minorités et les non-ressortissantes, ainsi qu’en communiquant les taux net d’inscription dans les différents cycles d’enseignement.

Emploi et liberté d’association

Tout en constatant avec satisfaction la ratification par l’État partie de plusieurs conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur l’égalité, l’augmentation de la participation des femmes à la main-d’œuvre et les efforts déployés pour accroître le nombre de femmes employées dans le secteur public, le Comité déplore que l’État partie ait interdit la création d’associations de protection sociale pour les employés et que le principe « à travail égal salaire égal » n’existe pas. Tout en se félicitant des informations sur les lois relatives au travail dans l’intérêt des femmes, de l’amendement à la loi fédérale no 8 sur le travail (1980) visant à inclure les travailleurs temporaires, notamment les travailleuses migrantes et à protéger leurs droits, du projet de loi sur les services d’aide et du contrat type pour les travailleurs migrants employés de maison (2007), le Comité regrette que la législation promulguée par l’État partie afin d’assurer la protection des travailleurs soit discriminatoire envers les femmes. En outre, il note avec préoccupation que les femmes ne représentent que 13 % de l’ensemble de la main-d’œuvre nationale et que le nombre de ressortissantes travaillant dans l’État partie est largement inférieur à celui des migrantes. Le Comité déplore que les travailleuses migrantes ne sont pas informées de leurs droits, qu’elles n’ont pas facilement accès à la justice et que par conséquent elles ne peuvent obtenir réparation en cas de mauvais traitement, et que le système de la kafala et le fait que les employeurs des employés de maison migrants leur confisquent fréquemment leurs passeports les rendent extrêmement vulnérables aux mauvais traitements et à la maltraitance par leur employeur. Le Comité se dit également inquiet qu’une femme victime de harcèlement sur le lieu de travail soit contrainte de démissionner et de quitter son employeur. Le Comité est en outre préoccupé par les droits des enfants des travailleuses migrantes, notamment en matière de résidence et d’accès aux services de santé et à l’éducation et déplore le peu d’informations et de données statistiques fournies par l’État partie sur leur situation ainsi que sur leur accès à la justice et aux services de base.

Le Comité prie instamment l’État partie de renforcer la protection juridique des travailleurs étrangers en adoptant des lois et des politiques pour empêcher les abus tels que le non-paiement des salaires et des heures supplémentaires, la diminution arbitraire des salaires et des heures de travail et pour poursuivre les coupables, tant les recruteurs que les employeurs; de mieux informer les travailleurs de leurs droits et d’assurer leur accès à des mécanismes d’entraide judiciaire et de recours. Le Comité exhorte également l’État partie à garantir une même application de l’ensemble de la législation du travail aux femmes et aux hommes, sans égard à leur nationalité . Il demande à l’État partie d’accélérer l’adoption de l’amendement à la loi fédérale n o  8 sur le travail et de veiller à ce que les travailleurs migrants soient également couverts par les dispositions du projet de législation en cours d’élaboration et , à cet égard, invite l’État partie à prendre en considération la recommandation générale n o  26 du Comité. Le Comité engage instamment l’État partie à garantir à tous les travailleurs, y compris aux travailleuses, le principe fondamental de la liberté d’association ainsi que de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale et lui recommande de devenir partie aux Conventions 87 et 98 de l’OIT.

Le Comité demande à l’État partie de lui fournir dans son prochain rapport des données statistiques et des informations sur la situation des femmes en matière d’emploi, y compris sur les cas de harcèlement sur le lieu de travail, en particulier des employées de maison, s’agissant des droits consacrés par la Convention.

Santé

Le Comité félicite l’État partie de l’excellente qualité des services de santé mis à disposition de ses citoyens et apprécie les informations relatives aux soins prénataux. Néanmoins, le Comité regrette le manque de statistiques et d’indicateurs ventilés par sexe et par âge pour ce qui est de l’accès des femmes et des filles des zones rurales et des non-nationaux aux services de santé, de la situation des femmes âgées, de la santé mentale ainsi que l’absence d’informations sur la santé procréative et les maladies sexuellement transmissibles, y compris le VIH/sida.

Le Comité demande des informations ventilées par sexe et par âge supplémentaires sur la situation de la santé des femmes et les mesures préventives et curatives disponibles. Il recommande d’accorder une attention toute particulière aux besoins des femmes des zones rurales et des non-nationaux en matière de santé. Le Comité recommande également à l’État partie de sensibiliser systématiquement les femmes à l’importance de se faire examiner régulièrement pour faciliter le dépistage précoce des maladies ainsi que de mettre l’accent sur la santé procréative. Le Comité invite l’État partie à tenir compte de sa recommandation générale n o  24.

Femmes rurales

Tout en notant avec satisfaction les efforts faits par l’État partie pour développer les zones rurales, y compris au moyen de son plan stratégique national et de la création d’un comité ministériel à cet égard, le Comité déplore le manque de données et d’informations sur la situation des femmes dans les zones rurales, en particulier dans les Émirats de l’est et les zones frontalières.

Le Comité demande à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les ressources allouées pour la mise en œuvre de programmes axés sur le développement des zones rurales, notamment en faveur des femmes, ainsi que sur les incidences de ces programmes sur l’égalité et le bien-être des femmes pour tous les aspects de la vie, en particulier, le travail, la santé, le logement, l’éducation et la participation à la planification du développement des zones rurales.

Autres domaines de la vie économique et sociale

Le Comité loue les efforts déployés par l’État partie pour promouvoir le rôle des femmes dans les entreprises, mais note cependant l’absence d’informations sur le nombre de femmes ayant bénéficié de prêts et autres formes de crédits et prend note du problème posé par le fait que seules les femmes ayant des propriétés enregistrées à leur nom peuvent accéder au crédit. Par ailleurs, le Comité est préoccupé par les conséquences que pourrait avoir la crise financière sur les services sociaux de base et les crédits accordés aux femmes ainsi que sur leur emploi.

Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures pour encourager et soutenir l’esprit d’entreprise de toutes les femmes, y compris en leur offrant des possibilités de formation et un accès au crédit. Il prie l’État partie de lui fournir dans son prochain rapport des informations détaillées sur la situation des femmes dans les domaines de la vie économique et de l’emploi ainsi que sur les mesures prises pour atténuer les effets des crises financières sur les débouchés accessibles aux femmes.

Égalité devant la loi

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a indiqué une interprétation de moins en moins stricte de la charia, telle que la présence d’une femme juge et des débats sur l’interprétation de la charia qui commencent à tenir compte de l’égalité devant la loi et de l’accès à la justice pour les femmes. Il est également encouragé par les recherches comparées actuellement menées par l’État partie sur les pays arabes et islamiques et le retrait des réserves aux articles 15 et 16 de la Convention. Néanmoins, le Comité se dit préoccupé par le fait que les femmes dans l’État partie ne jouissent toujours pas de la même capacité juridique que les hommes, ne sont pas traitées de la même façon devant les tribunaux et ne bénéficient pas de la même liberté de circulation.

Le Comité prie instamment l’État partie d’abolir toutes les dispositions discriminatoires à l’encontre de la liberté de circulation des femmes. Il recommande à l’État partie d’examiner leur réserve au paragraphe 2 de l’article 15 en se basant sur l’expérience de pays dotés d’un contexte religieux et de systèmes juridiques similaires et qui ont adapté sans difficulté leur législation domestique aux engagements découlant des instruments internationaux contraignants, en vue de retirer sa réserve.

Les femmes, le mariage et la vie de famille

Le Comité constate avec préoccupation que les dispositions juridiques relatives à la vie privée, y compris le mariage et sa dissolution, la garde des enfants et l’héritage, notamment au titre de la loi sur le statut personnel ainsi que l’acceptation de la tutelle masculine et de la dot compromettent l’égalité des droits des femmes et des hommes et que la polygamie est une atteinte directe aux droits des femmes. Le Comité note en outre avec inquiétude la réserve formulée par l’État partie à l’article 16 de la Convention relatif à ces questions.

Le Comité invite l’État partie à retirer ses réserves à l’article 16 de la Convention et à mettre en place des réformes législatives pour accorder aux femmes les mêmes droits que les hommes en matière de mariage, de divorce, de relations patrimoniales, de garde d’enfants et d’héritage. Il engage instamment l’État partie à mettre un terme aux pratiques de la dot et de la polygamie, conformément à la recommandation générale n o 21 du Comité .

Collecte et analyse de données

Tout en prenant acte des données ventilées par sexe figurant dans le rapport de l’État partie concernant des secteurs clefs tels que l’éducation et indiquant une représentation égale dans de nombreux domaines tels que les étude médicales et dans les différents cycles d’enseignement, le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni, dans son rapport, suffisamment de données statistiques ventilées par sexe pour tous les domaines couverts par la Convention ou d’informations sur les effets et les résultats des mesures prises pour instaurer l’égalité entre les femmes et les hommes, d’où la difficulté pour le Comité d’évaluer les progrès accomplis par l’État partie dans la mise en œuvre de la Convention.

Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des données statistiques et des analyses plus détaillées et ventilées par sexe, par âge, par zones (rurales et urbaines), sur la situation des femmes, y compris des informations sur les non-nationaux résidant dans l’État partie. Le Comité demande également d’inclure des informations sur les incidences des mesures prises pour mettre en œuvre la Convention et les résultats obtenus dans la promotion d’une égalité effective entre les femmes et les hommes.

Suite à donner à la Déclaration et au Programme d’action de Beijing

Le Comité exhorte l’État partie, dans le cadre de ses obligations au titre de la Convention, à tirer pleinement parti de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et le prie d’inclure des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Les objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne également qu’une application pleine et effective de la Convention est indispensable pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Il invite à prendre en compte une perspective sexospécifique et à faire expressément référence aux dispositions de la Convention dans toutes les actions visant à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, et demande à l’État partie de faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des éléments d’information sur la question.

Ratification des autres traités

Le Comité note que l’adhésion des États aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme contribue à promouvoir l’exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc le Gouvernement des Émirats arabes unis à ratifier les instruments auxquels il n’est pas encore partie, à savoir le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Diffusion des observations finales

Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées dans les Émirats arabes unis pour que la population du pays, en particulier les membres de l’administration aux niveaux national et local, les responsables politiques, les parlementaires et les organisations féminines et de défense des droits de l’homme, soient au courant des mesures prises pour assurer l’égalité de droit et de fait entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Il demande également au Gouvernement de diffuser largement, surtout auprès des femmes et des organisations de défense des droits de l’homme, le texte de la Convention, de ses propres recommandations générales, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, ainsi que les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, intitulée « Les femmes en l’an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXIe siècle ».

Protocole facultatif et paragraphe 1 de l’article 20

Le Comité encourage l’État partie à signer et à ratifier le Protocole facultatif à la Convention et à accepter, dès que possible, l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20, de la Convention, concernant la durée des réunions du Comité.

Société civile

Le Comité encourage l’État partie à intensifier la collaboration et la coordination avec les organisations de la société civile, en particulier les associations féminines et de défense des droits de l’homme, pour renforcer l’application des dispositions de la Convention, et à engager des consultations avec ces organisations au moment d’établir son prochain rapport.

Suite à donner aux observations finales

Le Comité demande à l’État partie de lui fournir, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre les recommandations énoncées aux paragraphes 27 et 37 ci-dessus. Il lui demande également d’envisager de faire appel, s’il y a lieu, à la coopération et à l’assistance techniques, et notamment à des services consultatifs, pour assurer la mise en œuvre des recommandations ci-dessus.

Date du prochain rapport

Le Comité prie l’État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes conclusions finales dans le prochain rapport périodique qu’il établira en application de l’article 18 de la Convention. Il l’invite à présenter son prochain rapport périodique en février 2014.

Le Comité invite l’État partie à suivre les « Directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument », approuvées lors de la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, en juin 2006 (HRI/MC/2006/3). Les directives sur l'établissement de rapports propres à un instrument international, que le Comité a adoptées à sa quarantième session en janvier 2008, doivent être appliquées concurremment avec les directives harmonisées relatives au document de base commun. Ensemble, elles constituent les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Le document propre à cet instrument ne devrait pas dépasser 40 pages et le document de base commun actualisé devrait comporter de 60 à 80 pages.